Mme la présidente. Nous revenons à l’examen des crédits de la mission « Santé », pour le résultat du scrutin public n° 35, qui a donné lieu à un pointage.
Proclamation du résultat d’un scrutin public
Mme la présidente. Mes chers collègues, voici, après pointage, et compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 35, sur l’amendement n° II-43 :
Nombre de votants | 338 |
Nombre de suffrages exprimés | 302 |
Pour l’adoption | 152 |
Contre | 150 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l’article 81 quater.
Gestion des finances publiques et des ressources humaines (suite)
Crédits non répartis (suite)
Action et transformation publiques (suite)
Compte d’affectation spéciale : Gestion du patrimoine immobilier de l’État (suite)
Régimes sociaux et de retraite (suite)
Compte d’affectation spéciale : Pensions (suite)
Mme la présidente. Nous reprenons l’examen des crédits des missions « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » (et article 77 bis et 77 ter), « Crédits non répartis », « Action et transformation publiques », du compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État » (et articles 84 ter et 84 quater), de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d’affectation spéciale « Pensions ».
Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Éric Bocquet.
M. Éric Bocquet. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la question du recouvrement de nos impôts, celle de la qualité de la relation entretenue avec le citoyen contribuable et celle de la gestion de notre service public local ou hospitalier sont au cœur du débat qui nous réunit ce jour.
Il nous faut évoquer, à la suite de M. le rapporteur spécial Thierry Carcenac, la problématique de l’évolution des effectifs de l’administration fiscale.
Cette année encore, le ministère des finances conduit une politique de réduction de ses effectifs, avec la suppression de 1 872 postes au sein de la direction générale des finances publiques, qui affecte à la fois les centres des finances publiques et les sous-directions de Bercy.
La lutte contre la fraude et l’évasion fiscales, sujet qui nous tient particulièrement à cœur au Sénat, nécessite pourtant des moyens matériels et humains tout à fait particuliers.
On ne fera croire à personne que la dématérialisation des procédures de déclaration et de recouvrement suffirait, par elle-même, à garantir la transparence des résultats fiscaux et la fluidité des recettes de l’État.
De la même manière, la retenue à la source, désormais applicable à l’impôt sur le revenu, ne saurait nous garantir tout à fait contre la fraude.
C’est au premier niveau, en prise directe avec le terrain, que les agents des impôts, des douanes et de la police nationale détectent les fraudes les plus sophistiquées.
La fraude fiscale, ce n’est pas qu’une affaire de relations à fleurets mouchetés entre le Trésor public, représenté par la direction des grandes entreprises, et les grands groupes, leurs obligations de publicité et l’armada d’avocats qu’ils rémunèrent pour discuter de quelques points de droit avec l’administration fiscale.
La fraude et l’évasion fiscales sont deux maux dont souffre notre pays. Elles nous contraignent probablement à maintenir certaines recettes à rendement élevé pour pallier les manques constatés hier.
La fraude fiscale, dont on dit qu’elle coûterait environ 80 milliards d’euros à l’État, c’est-à-dire l’équivalent du déficit constaté à la fin de 2018 pour l’ensemble des comptes publics, demeure concentrée sur l’impôt sur les sociétés, la TVA et l’impôt sur les revenus les plus élevés. Elle se double de fraudes aux assurances sociales, frappant les cotisations sociales, ressource indispensable au maintien de l’égalité devant la santé, la vieillesse, la maladie ou encore les plans sociaux et leurs effets sur leur environnement économique immédiat.
Mme Nathalie Goulet. Absolument !
M. Éric Bocquet. Lutter contre la fraude et l’évasion fiscales, cela commence donc à la base, par le plus simple contrôle sur pièces, par l’étude concrète, par exemple, d’une demande de crédit d’impôt recherche, par l’analyse de la relation commerciale privilégiée entre une entreprise et l’un de ses fournisseurs : cela nécessite des équipes suffisamment denses, œuvrant au sein d’un maillage territorial suffisamment renforcé, au rebours de la ligne suivie par le Gouvernement au travers d’un projet de budget où les gains de productivité des agents et cadres de la DGFiP se traduisent par un nouvel étiolement de la présence physique et territoriale des services. L’article 77 ter du projet de loi, rattaché aux crédits de la mission, montre d’ailleurs clairement où cela risque encore de nous mener.
Nous ne pouvons, en rejetant cet article comme les crédits de la mission, que confirmer notre refus de ce démembrement continu de nos administrations fiscales et financières.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, les missions que nous examinons à présent concernent le pôle économique et financier de l’État : l’État employeur, avec la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », dans le cadre de la mission relative aux régimes dits sociaux et de retraite, ainsi que la politique de l’État propriétaire, par le biais du compte d’affectation spéciale « Patrimoine immobilier de l’État ».
Quatre articles rattachés ont été ajoutés à l’Assemblée nationale, prévoyant notamment l’expérimentation du compte financier unique dans les regroupements de collectivités territoriales, la délégation d’opérations relevant habituellement de la compétence du comptable public, et le transfert de la propriété de l’hôtel du commandement de la Marine, en Polynésie.
Avec près de 2 millions de fonctionnaires, l’État est le premier employeur, et la gestion de son personnel revêt une importance cruciale pour notre pacte social et pour la vie de nos territoires, avec des implications sur l’efficacité de l’administration, la qualité et l’accessibilité des services publics, ainsi que le développement économique.
Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite qu’il soit mis un terme à la fuite des personnels de l’État exerçant dans les services déconcentrés de nos départements vers les métropoles et les préfectures de région.
Comme en 2018, la réduction des effectifs sera certes modeste, mais réelle, avec environ 1 500 suppressions nettes de postes. Si les grandes masses d’effectifs par ministère sont restées stables, la plus forte baisse est supportée par le ministère de l’action et des comptes publics. Mais quoi de plus normal quand on demande beaucoup d’efforts aux autres ?
L’analyse des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d’affectation spéciale relatif aux pensions des fonctionnaires montre que, si les retraites des régimes spéciaux restent encore subventionnées dans des proportions importantes, leurs situations, au demeurant très diversifiées, tendent à converger vers le régime général. Le budget de la mission sera stable en 2019 tant en montant, à 6,3 milliards d’euros, qu’en périmètre. Quant au solde du compte d’affectation spéciale « Pensions », il est nettement excédentaire, de 1,6 milliard d’euros.
En revanche, le rapport spécial sur la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » met en lumière des points à améliorer dans la gestion des ressources humaines de l’État. Ainsi, les déploiements de programmes informatiques créent toujours des difficultés importantes, avec beaucoup de retards, et de surcoûts aussi, mais vous le savez, monsieur le secrétaire d’État.
Il nous paraît essentiel d’améliorer la situation de l’administration dans ce domaine. Cela passe aussi par des organisations repensées, une meilleure gestion des ressources humaines et des carrières, une autre utilisation des compétences au sein des services et une meilleure négociation des contrats de fourniture et de services avec les prestataires extérieurs.
La direction générale des finances publiques, issue elle-même de fusions successives – la fusion entre le Trésor et les services fiscaux n’a pas toujours été facile -, connaît des changements importants liés aux réformes actuellement mises en œuvre, en particulier l’instauration du prélèvement à la source.
La lutte contre la fraude fiscale, effectivement fondamentale, doit rester la priorité des priorités.
La direction générale des douanes, quant à elle, est l’une des principales administrations concernées par la préparation du Brexit, dont une étape cruciale devrait se jouer la semaine prochaine.
Ces deux importantes directions sont confrontées à des défis communs, dans le cadre du programme Action publique 2022 : la dématérialisation, la distinction entre accueil physique et gestion des dossiers en back office, enfin et surtout la mise en place prévue d’une agence unique du recouvrement regroupant aussi l’URSSAF. Sachant, monsieur le secrétaire d’État, le poids considérable, de plusieurs milliards d’euros, des indus dans le budget de l’État, je souhaite que l’on s’attaque enfin à cette question, découlant également de la non-mise en place de la contemporanéité. Un certain nombre d’efforts sont consentis au titre du budget pour 2019, mais il faut aller plus loin.
Quant à la politique de l’État propriétaire, je sais le travail effectué par M. Carcenac sur ce dossier. Il y aurait beaucoup à dire, et je n’ai pas suffisamment de temps pour cela, mais il serait bon que Bercy fasse preuve de célérité en matière de cessions d’immobilier de l’État. Tout le monde s’en réjouirait, surtout ceux qui veulent bâtir.
Enfin, la mission « Action et transformation publiques », qui porte sur la rénovation des cités administratives, est importante.
Monsieur le secrétaire d’État, je conclurai ce trop bref propos en disant que le groupe du RDSE votera les crédits de ces quatre missions et de ces deux comptes spéciaux, dont les enjeux sont importants.
Mme la présidente. La parole est à M. Dany Wattebled.
M. Dany Wattebled. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui les crédits des missions « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », « Action et transformation publiques » et « Régimes sociaux et de retraite ».
Les évolutions liées à la première de ces missions nous semblent aller dans le bon sens. La maîtrise des effectifs des ministères économiques et financiers est réelle et doit être saluée. La suppression de 1 947 équivalents temps plein fait de cette mission le principal contributeur à l’effort de réduction des effectifs de la fonction publique d’État. Cet effort doit avoir valeur d’exemple pour les autres ministères et pour la sphère publique dans son ensemble. Oui, assurer un service public de qualité avec moins de fonctionnaires est possible.
C’est d’ailleurs l’honneur de notre fonction publique d’avoir traversé les réformes successives de l’action publique, de la révision générale des politiques publiques, la RGPP, à la modernisation de l’action publique, la MAP, en s’adaptant pour servir avec la même excellence et la même efficacité. Nous soutenons donc le Président de la République dans sa démarche de suppression de 120 000 postes de fonctionnaire sur la durée du quinquennat.
Malheureusement, force est de constater que nous en sommes très loin. Les résultats de l’année 2018 et les prévisions pour l’année 2019 sont trop timides pour que l’on puisse espérer atteindre les objectifs de masse salariale fixés par le Gouvernement. Nous en sommes à peine à 6 000 suppressions nettes sur deux ans, ce qui est bien trop peu ! Toutefois, cette diminution de 120 000 du nombre des fonctionnaires ne doit pas être un totem, une coupe brutale comme nous en avons connu par le passé. Elle doit s’accompagner d’une réflexion d’ampleur sur les secteurs de l’action publique que nous entendons sanctuariser ou renforcer, comme la sécurité ou la justice, sur les dépenses inefficientes ou peu utiles, enfin sur la nature de l’État que nous voulons, ses missions essentielles, son périmètre, ses modes d’action.
Nous fondons aussi de grands espoirs sur la mission « Action et transformation publiques », dont nous espérons que les résultats seront à la hauteur de l’intitulé volontariste.
Le comité Action publique 2022 devra d’abord contribuer à redonner aux agents publics le goût de leur métier. La succession de réformes de l’État depuis vingt ans les a parfois conduits à perdre de vue le sens de leurs missions. Ensuite, il ne pourra pas faire l’économie d’une réforme d’envergure de la fonction publique et du statut des fonctionnaires.
Nous attendons du projet de loi qui sera présenté au début de l’année prochaine qu’il traite de la simplification des normes et des procédures dans les domaines de la mobilité, des instances de représentation, de la grille salariale et de la retraite des fonctionnaires. La Cour des comptes rappelle d’ailleurs régulièrement la nécessité d’un rapprochement avec le régime du secteur privé.
Les retraites sont justement l’objet de la mission « Régimes sociaux et de retraite ». Ses crédits correspondent aux subventions d’équilibre que l’État verse à divers régimes spéciaux de retraite dont l’autofinancement est rendu impossible par un déséquilibre démographique de plus en plus insoutenable. Ces subventions s’élèvent à 6,3 milliards d’euros dans le projet de loi de finances pour 2019, ventilés principalement entre les régimes des transports terrestres, des marins et des mineurs.
Nous devrons réfléchir à une réforme en profondeur de ces régimes spéciaux de retraite, dont l’équilibre financier est rompu depuis l’origine et dont le modèle n’est plus tenable sur le long terme. Le Président de la République et le Premier ministre se sont engagés à mener à bien, avec l’aide de Jean-Paul Delevoye, une réforme d’ampleur de ces régimes de retraite, avec l’instauration d’un régime universel. Nous saluons ces efforts en vue de la mise en place d’un système plus équitable, plus juste et plus solide. Alors que se poursuivent les consultations citoyennes autour de cette réforme, il importera de veiller à ce qu’elle ne fasse aucun perdant, surtout parmi les ménages les plus fragiles.
Pour conclure, le groupe Les Indépendants soutient le Gouvernement dans sa volonté d’améliorer les services publics, de renforcer notre fonction publique et de moderniser l’action de l’État. Nous voterons donc les crédits de ces missions, en portant un regard particulièrement vigilant sur les résultats concrets du comité Action publique 2022, qui se font malheureusement encore attendre.
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Haut.
M. Claude Haut. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mesdames, messieurs les rapporteurs, chers collègues, le service public est au cœur du pacte républicain.
Le service public, c’est ce « Lazare juridique », comme le disait le président du Conseil d’État Roger Latournerie, capable de renaître de ses cendres et d’évoluer constamment.
Le service public doit renaître. Il est critiqué par une partie de la population, car pas assez efficace, pas assez égalitaire entre nos territoires et, en même temps, pas suffisamment adapté à la réalité de ceux-ci. Il est critiqué, parce que la dépense publique française atteint un niveau indépassable. Le service public doit mieux faire. Répondre à cette demande des Français implique de faire des choix clairs et forts. Monsieur le secrétaire d’État, votre ministère fait des sacrifices importants pour que l’État réoriente ses effectifs et réponde aux enjeux du temps présent ; je salue ce courage.
Débattre de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » me permettra d’évoquer les enjeux importants pour le service public du XXIe siècle, à savoir les mesures prises pour faciliter les relations avec l’administration et les mesures qui concernent la fonction publique.
La loi du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance, dite « loi ESSOC », a traduit la volonté d’adapter les services publics aux usagers : je veux dire par là adapter les services publics aux attentes des usagers, mais aussi mettre fin à un modèle standardisé.
Assurer l’égalité signifie adapter : c’est dédoubler les classes de cours préparatoire, par exemple, c’est aussi accepter que tous les demandeurs d’emploi ne soient pas suivis de la même manière – un cadre ne doit pas avoir le même soutien qu’une personne précaire et très éloignée du marché de l’emploi.
Ce sont ainsi des mesures concrètes qui ont été annoncées par le Gouvernement : extension des horaires d’ouverture pour les faire correspondre au rythme de la vie, fin des numéros surtaxés pour joindre les administrations et services de l’État, dématérialisation des démarches avec l’administration, principe du « dites-le-nous une fois ».
Simplifier les relations entre l’administration et les Français participera au rétablissement de la confiance avec l’État, les collectivités et, bien entendu, les élus que nous sommes.
Il faut simplifier la vie des Françaises et des Français comme nous devons simplifier la vie des entreprises. Les échanges sont le quotidien dans de nombreux territoires : le succès de la certification d’opérateur économique agréé mise en place par les douanes et retracée dans l’un des objectifs du programme 302 est, pour moi, l’une des meilleures preuves de l’évolution en cours.
Ces mesures doivent réconcilier les Français avec l’administration, à l’image du droit à l’erreur, pour qu’enfin les contrôles opérés par les pouvoirs publics soient réalisés non plus d’abord pour sanctionner, mais pour orienter.
Mais simplification ne veut pas dire laxisme. Nous pouvons tous ici saluer les créations d’emplois dans les filières de surveillance et de dédouanement : la loi de finances pour 2018 a enclenché une trajectoire de 700 créations d’emplois sur trois ans, tirant notamment les conséquences du Brexit.
Le renforcement de la surveillance concerne aussi les trafics illégaux, notamment celui du tabac, qui détruit le chiffre d’affaires des buralistes frontaliers. Je vous rappelle ici, chers collègues, les mesures entérinées par le projet de loi de lutte contre la fraude, qui renforcent les sanctions et les moyens de surveillance.
Les Français attendent aussi que la fonction publique évolue pour répondre aux transformations de l’action publique. Cela veut dire renverser le paradigme selon lequel l’administration centrale doit imposer des choix déconnectés des réalités, et plutôt inciter les managers publics à prendre des risques, à innover pour améliorer la qualité du service et les conditions de travail des agents. Le Fonds de transformation de l’action publique, doté de 700 millions d’euros, est à ce titre un levier utile.
Nous connaissons les grandes lignes de la transformation de la fonction publique : une rémunération plus individualisée pour récompenser le travail et l’efficacité, l’ouverture aux contrats pour aller plus vite lorsque c’est nécessaire, car nous vivons une époque où tout s’accélère ; une meilleure mobilité entre les trois fonctions publiques ; un meilleur dialogue social dans la fonction publique. Les concertations sont en cours, qui doivent porter en priorité sur la qualité du service public et les conditions de travail des agents publics.
En cette période de troubles où l’État est comptable aujourd’hui des intérêts des Français, et le sera demain de leurs espoirs, les fonctionnaires doivent avoir tout notre soutien, car ils sont la sève du lien social dans notre pays. Ils méritent que l’État dépasse l’approche comptable des politiques publiques ; le grand défaut de la RGPP, qui a été mise en œuvre sans le soutien des agents, a été d’en rester à la seule dimension comptable. Ils méritent d’être partie prenante à la transformation engagée, comme ils méritent un service public adapté et moderne.
Cette mission traduit en partie cette transformation. Par conséquent, le groupe La République En Marche votera ses crédits.
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme Monique Lubin. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est pour préparer une année bien particulière et à un moment singulier que nous discutons de la mission « Régimes sociaux et de retraite » du projet de loi de finances pour 2019.
Le moment est celui d’une crise sociale et politique qui renvoie notamment à la problématique du pouvoir d’achat des Français. Aiguë, elle est en partie nourrie par des choix opérés par le Gouvernement au travers des projets de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 et pour 2019. Je pense ici au choix d’augmenter la CSG pour 8 millions de retraités et à la non-indexation des pensions sur l’inflation.
L’année particulière, c’est 2019 : selon l’agenda du Gouvernement, elle devrait être celle de la réforme des retraites, l’objectif affiché étant de simplifier un système complexe et difficilement lisible pour nos concitoyens. Les régimes spéciaux de retraite en seront un sujet clef.
L’examen des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » me donne l’occasion de m’exprimer à propos de cette réforme.
Les crédits de cette mission restent d’année en année relativement stables. Certaines interrogations perdurent, notamment sur l’imputation de la retraite complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles sur la mission examinée aujourd’hui, et non sur la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ».
Cette mission prend surtout en charge les subventions d’équilibre versées par le budget de l’État à onze régimes spéciaux de retraite, ainsi que la subvention de l’État au régime complémentaire obligatoire des exploitants agricoles.
L’évolution qui sera proposée sera l’un des enjeux de la réforme des retraites à venir. Le haut-commissaire à la réforme des retraites, M. Jean-Paul Delevoye, est venu en présenter les prémices devant la commission des affaires sociales du Sénat. Il a été clair et bienveillant, mais nous considérons que tout reste à faire, car la bienveillance et la compétence ne font pas tout…
Ainsi, les représentants des régimes spéciaux de retraite ont signifié leur attachement à la singularité de leurs régimes respectifs et ont exprimé une inquiétude légitime, liée à la crainte d’être stigmatisés.
De fait, il va nous falloir être particulièrement vigilants ; l’état actuel de la France, caractérisé par une colère qui gronde et un profond mécontentement qui se fait jour, nous commande de faire tout particulièrement attention à la manière dont nous aborderons et traiterons ce dossier.
Je n’imagine d’ailleurs pas qu’une transformation aussi profonde de notre système de retraites que celle qui est envisagée aujourd’hui, dans un contexte aussi tendu et porteur de tant de remises en question, ne fasse pas l’objet d’un temps de travail et de réflexion particulièrement important.
C’est la raison pour laquelle je m’interroge sur la possibilité et la pertinence de voter ce texte dès 2019, sachant que la discussion ne démarrerait qu’au troisième trimestre de cette même année.
Si, toutefois, cette réforme devait être menée, j’ose espérer que l’on mettra – pour une fois – le temps qu’il faudra pour parvenir à un résultat juste et équilibré : une acceptation des Français sera indispensable, et demandera travail et dialogue.
Beaucoup de questions se posent : que deviendront les pensions de réversion, sujet .extrêmement sensible ? Sur quels régimes seront alignées les retraites des fonctionnaires ? Quid des carrières longues ? Nombreux sont ceux qui ont commencé à travailler très tôt et qui ont effectué des carrières longues et pénibles. Il est bien sûr hors de question que la réforme remette en cause leurs droits. Quid de la valeur du point, de son évolution, de la gouvernance du futur système ?
Monsieur le secrétaire d’État, les temps démontrent qu’aucune réforme, grande ou petite, ne peut être menée sans une véritable concertation avec la représentation nationale et les corps intermédiaires. Ils sont nécessaires à l’équilibre de notre démocratie. Ils sont indispensables pour que notre action soit comprise par nos concitoyens, dont le consentement est un préalable indispensable à toute réforme. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, avec ces trois missions et ces deux comptes spéciaux, nous abordons de vastes sujets, qui mériteraient sans doute un plus long débat. Pour ma part, j’emploierai le temps qui m’est imparti pour formuler quelques remarques, réflexions et analyses.
J’évoquerai tout d’abord la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », qui rassemble les crédits de l’essentiel des effectifs du ministère de l’économie et des finances. Elle traduit un objectif de baisse des dépenses de fonctionnement et des effectifs, laquelle est censée aller de pair avec une hausse de l’efficacité des services. Cette volonté s’inscrit dans la continuité de la trajectoire amorcée l’année dernière pour redéfinir les politiques publiques, dans le cadre du comité Action publique 2022.
Le seul programme dont les crédits sont en hausse est le programme 302, « Facilitation et sécurisation des échanges », notamment avec la création de 350 emplois dans les filières de surveillance et de dédouanement, afin d’anticiper le Brexit.
Avec un certain nombre de collègues, j’ai travaillé sur cette question au sein de mon groupe et de la commission des affaires européennes. Dès ce projet de budget pour 2019, nous observons le changement de paradigme que le Brexit entraîne et les coûts qu’il impose à l’État ; à mon sens, nous n’en sommes encore qu’au début. La fragilisation du multilatéralisme diplomatique et commercial va engendrer des surcoûts ; le bilatéralisme commercial va, dans le même temps, poser un certain nombre de problèmes, et ceux-là mêmes qui critiquaient le multilatéralisme vont découvrir les inconvénients résultant de sa remise en cause…
La mission « Action et transformation publiques » s’inscrit dans un vaste chantier de transformation de l’action publique et de renouvellement de la relation entre l’usager et le service public, dont relèvent des mesures comme l’instauration du droit à l’erreur ou le guichet unique. Comme le Gouvernement, je souhaite que l’on repense notre action publique à l’aube du XXIe siècle. Internet a modifié toutes nos habitudes. Il suffit de nous voir, les uns et les autres, twitter pendant les séances : je ne dénonce personne, nous le faisons toutes et tous ! (Sourires.)
L’État ne peut rester étranger aux transformations que provoque internet. Demain, notre service public sera de plus en plus numérique. Dès lors, sera-t-il toujours aussi humain ? L’expérience du déménagement de ma permanence de sénateur m’inspire à cet égard un certain scepticisme : lorsqu’on doit contacter EDF, GDF, son fournisseur d’accès à internet, tel ou tel service de l’État, et que l’on est renvoyé d’une plateforme téléphonique à une autre, l’on en vient à regretter le bon vieux temps où l’on avait affaire à une personne…