Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Delattre, sur l’article.
Mme Nathalie Delattre. Madame la présidente, madame la ministre, chers collègues, l’article 1er A fait référence à la stratégie 2019-2037, qui fixe quatre priorités, dont le renforcement de la compétitivité des territoires et des ports.
Dans la lignée de ma proposition de loi permettant la régionalisation du statut des grands ports maritimes, j’ai déposé un amendement visant à instaurer le mécanisme d’un transfert de compétence aux conseils régionaux, sur la base du volontariat. Régions de France soutenait mon amendement, qui a malheureusement été déclaré irrecevable, car vous n’avez pas ouvert, madame la ministre, de ligne budgétaire pour mettre en œuvre cette proposition.
Je regrette que nous ne puissions avoir ce débat, car il est essentiel pour nos mobilités, pour notre développement économique et pour l’aménagement de notre territoire.
Depuis la réforme portuaire d’octobre 2008, le statut de grand port maritime s’est substitué à celui de port autonome. Ce statut regroupe néanmoins pêle-mêle des ports à vocation internationale au même titre que des ports placés sur des axes de trafic national. Or, concernant ces derniers, de nombreux élus locaux se prononcent depuis plusieurs années pour une plus grande implication des collectivités territoriales.
Les grands ports maritimes restent, aujourd’hui, les derniers ports ayant pour obligation de conserver un statut d’établissement public placé sous la responsabilité de l’État, comme le permet l’article 22 de la loi NOTRe.
Dans un rapport publié au mois de février 2017, la Cour des comptes rappelait l’urgence de trancher la question de la gestion des grands ports maritimes. Elle soulignait que la réforme des grands ports maritimes avait donné lieu à « une mise en œuvre inégale, des effets modestes, une attractivité insuffisante ». À titre d’exemple, ce rapport mettait en évidence les difficultés financières du grand port maritime de Bordeaux, liées à un manque de vision stratégique territorialisée.
Le transfert de la compétence portuaire à la région permettrait une meilleure association des partenaires économiques et industriels. L’État resterait néanmoins un acteur central pour l’accomplissement des missions régaliennes liées à la sécurité maritime et au contrôle des flux, ainsi qu’au titre de sa compétence en matière de dragage.
Le débat n’aura malheureusement pas lieu. Pourtant, j’entends que le Gouvernement apporte une réponse claire et forte. Le port de Bordeaux ne survivrait pas à une absence de prise de décision, qui reviendrait à le condamner : ne pas choisir, c’est choisir de l’enterrer. Je déplore que vous nous priviez de ce débat parlementaire, madame la ministre.
Mme la présidente. La parole est à M. Raymond Vall, sur l’article.
M. Raymond Vall. Madame la ministre, les « territoires d’industrie » tels que labellisés par le Gouvernement ne figurent nulle part dans votre texte. Or les entreprises de nos territoires ruraux disent souffrir de l’enclavement et d’un manque d’attractivité : outre qu’elles sont pénalisées en matière de transport, elles ne peuvent attirer et retenir les compétences dont elles ont aujourd’hui besoin pour se développer.
Madame la ministre, je vous interpelle une nouvelle fois sur ce sujet, qui concerne 135 territoires. Nous approuvons et entendons soutenir le choix gouvernemental, mais si l’on ne donne pas un peu d’espoir quant au désenclavement de ces territoires d’industrie, qui constituent d’ailleurs un terreau fertile pour le mouvement des « gilets jaunes », l’objectif fixé par le Gouvernement ne pourra être atteint. Ne passons pas à côté de la possibilité de sauver l’emploi industriel dans nos territoires.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, sur l’article.
M. Jean-Claude Tissot. Le rapport annexé à l’article 1er A détermine la stratégie en matière d’investissements de l’État pour la période 2019-2037. Plusieurs des grandes orientations retenues me semblent aller dans le bon sens, mais il faudra voir comment elles trouveront une concrétisation sur le terrain.
Ainsi, « le désenclavement routier des villes moyennes et des régions rurales par des aménagements d’itinéraires existants » figure parmi les priorités retenues. Dans le département de la Loire, la mise à 2x2 voies de la route nationale 7 au niveau de Mably est indispensable pour désenclaver Roanne. Alors qu’il avait été prévu dans le contrat de plan État-région 2015-2020 de réaliser a minima les études, les crédits nécessaires ne sont toujours pas débloqués. Cette opération n’apparaît pas clairement dans le rapport annexé. Madame la ministre, pouvez-vous me confirmer que les lignes génériques « Études amont » ou « CPER Route » permettront de répondre aux besoins ?
Par ailleurs, vous proposez de rompre avec les « impasses d’une politique d’infrastructures tournée vers les grands projets et non financée depuis des décennies ». Je ne peux que saluer une telle orientation, qui, je l’espère, permettra de sortir d’une impasse dans laquelle nous nous trouvons depuis près de trente ans.
En effet, le projet de création d’une nouvelle autoroute, l’A 45, entre Saint-Étienne et Lyon a longtemps achoppé sur l’insuffisance du financement, si longtemps qu’il en est devenu obsolète et inacceptable au regard des impératifs de la transition écologique. C’est ainsi que vous avez annoncé, au mois d’octobre dernier, l’abandon du projet de l’A 45, ainsi que le préconisait le rapport du Conseil d’orientation des infrastructures, présidé par Philippe Duron.
Pour autant, la connexion entre les deux premières villes de la région Auvergne-Rhône-Alpes reste largement problématique. Aussi je me félicite que l’exposé des motifs de ce projet de loi indique que « l’amélioration des déplacements entre Lyon et Saint-Étienne est une priorité » et que les 400 millions d’euros prévus initialement pour la réalisation de l’A 45 apparaissent dans le rapport annexé au titre du financement des projets alternatifs.
Alors que le projet de l’A 45 a longtemps empêché toute réflexion collective sur ces liaisons, nous travaillons étroitement, avec mon collègue député de la Loire Régis Juanico et mes collègues du Rhône Gilbert-Luc Devinaz et Annie Guillemot, à une réponse conjointe à la concertation.
Aujourd’hui, toutefois, certains élus des territoires concernés refusent de s’impliquer dans cette concertation, croyant que le projet de l’A 45 pourra être relancé. Afin qu’ils puissent avancer avec nous dans la construction d’alternatives, il conviendrait de formaliser l’abandon définitif de ce projet. Nous défendrons tout à l’heure un amendement en ce sens. Madame la ministre, envisagez-vous d’abroger prochainement la déclaration d’utilité publique de l’A 45, prise en 2008 ? (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain. –Mme Michèle Vullien applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Jacquin, sur l’article.
M. Olivier Jacquin. Nous apprécions d’avoir eu le temps de réfléchir et de travailler à cette grande loi d’orientation des mobilités depuis les Assises nationales de la mobilité. En outre, le fait que notre chambre soit saisie la première de ce texte qui intéresse particulièrement les collectivités territoriales est tout à fait satisfaisant. Je salue aussi l’esprit d’ouverture qu’a manifesté M. le rapporteur en donnant à tous les sénateurs la possibilité de participer aux auditions. Tout cela est très positif, de même que l’ambition affichée par ce projet de loi.
Toutefois, certains modes de transport sont soit écartés, soit insuffisamment pris en compte.
Ainsi, le transport aérien a été écarté de ce texte. C’est dommage, alors que les Assises nationales du transport aérien viennent de se terminer.
Le transport de marchandises, quant à lui, est insuffisamment pris en compte, qu’il soit fluvial, routier ou ferroviaire. C’est tout à fait dommage, car son impact est considérable en termes de pollution, ainsi que de congestion du trafic, avec l’accélération des flux de transport de marchandises et le développement du e-commerce. Nous sommes confrontés à des problèmes plus importants encore que ceux posés par le transport de voyageurs.
Le sujet des petites lignes ferroviaires avait été écarté de la loi pour un nouveau pacte ferroviaire et devait être traité dans le cadre du projet de loi d’orientation des mobilités, mais il est lui aussi insuffisamment pris en compte, sachant que le rapport commandé au préfet Philizot n’a pas encore été remis.
Nous avons bien compris que cette « patate chaude » des petites lignes ferroviaires avait été transférée aux régions sans être accompagnée des financements appropriés. Vous le confirmez, madame la ministre, avec cet amendement tout à fait souhaitable, mais tardif, qui vise à donner aux régions la possibilité de gérer ces petites lignes. C’est là un outil intéressant, mais sans financement suffisant…
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Féret, sur l’article.
Mme Corinne Féret. Madame la ministre, je souhaite évoquer la ligne nouvelle Paris-Normandie, la LNPN. Les objectifs de départ étaient ambitieux : augmenter la fréquence et le nombre des dessertes ferroviaires de la Normandie, réduire les temps de parcours et améliorer la qualité de service. Au-delà du transport de passagers et de marchandises, c’étaient bien l’aménagement de la vallée de la Seine, le développement économique par le désenclavement de la Normandie et la politique maritime de la France qui se jouaient.
Force est de constater, à la lecture du volet relatif à la programmation de ce projet de loi, que tout cela n’est pas pour demain… Même pour quelques sections jugées prioritaires, les opérations courraient au mieux jusqu’en 2037 ! De fait, pour les habitants de mon département, le Calvados, plutôt que de parler de LNPN, mieux vaudrait s’en tenir à évoquer des travaux sur le tronçon Paris-Mantes et à la gare Saint-Lazare, rien n’étant planifié pour améliorer la desserte jusqu’à Caen.
Pourtant, le Gouvernement a reconnu lui-même que « la desserte ferroviaire de la Normandie n’offre clairement pas aujourd’hui un niveau satisfaisant de qualité ».
M. Charles Revet. C’est le moins qu’on puisse dire !
Mme Corinne Féret. M. Guillaume Pepy, actuel président-directeur général de la SNCF, a admis lui aussi, en 2009, à Caen, que son entreprise avait une « dette envers la Normandie ».
Madame la ministre, avec ce projet de loi, vous aviez l’occasion d’honorer cette dette, de répondre aux objectifs prioritaires de réduction des inégalités territoriales entre régions françaises et de modernisation indispensable du réseau. Il n’en est rien pour l’ouest de la Normandie.
Eu égard à toutes les réserves émises sur la sincérité de la programmation financière développée dans le rapport annexé au présent projet de loi, je me dis que les usagers de la ligne Paris-Caen-Cherbourg, que je connais bien, ont encore bien des galères et des retards devant eux…
Madame la ministre, nous attendions un engagement fort de l’État, avec un échéancier ambitieux tenant compte des besoins de notre territoire et des usagers. Si l’Atlantique s’est rapproché de la capitale ces dernières années, la Manche reste de toute évidence une zone non prioritaire, totalement transparente. (M. Roland Courteau applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. Édouard Courtial, sur l’article.
M. Édouard Courtial. Madame la présidente, je vous prie d’excuser mon retard, dû à des problèmes de mobilité dans Paris cet après-midi ! (Sourires.)
Réduire les inégalités territoriales en renforçant l’accessibilité des zones rurales enclavées, améliorer la qualité des réseaux routiers, ferroviaires et fluviaux et en assurer la pérennité, accélérer la transition énergétique et la lutte contre la pollution et la congestion routière, accroître l’efficacité des transports de marchandises : voilà quatre objectifs pour cette programmation et cette stratégie en matière de mobilité auxquels je ne peux que souscrire. Je remercie le rapporteur de les avoir intégrés dès le début de ce texte ô combien important pour nos territoires en général, et pour l’Oise en particulier.
Dans mon département, ces objectifs ont en effet au moins trois déclinaisons majeures, structurantes et indispensables à son désenclavement, à son interconnexion et à son attractivité.
La première de ces déclinaisons est la plus visible : il s’agit du canal Seine-Nord Europe, évoqué à l’article 36, dont j’ai soutenu la réalisation comme parlementaire et comme président du conseil départemental de l’Oise. C’est une infrastructure d’avenir, d’envergure nationale, dont la mise en œuvre permettra de relier, via l’Oise, Paris au nord de l’Europe et de générer, lors de sa construction et après, de nombreux emplois avec un recrutement d’abord local : des « clauses Molière » sont prévues et l’aide à la réinsertion sera privilégiée.
La deuxième déclinaison me tient particulièrement à cœur, d’autant que je me suis beaucoup investi dans ce projet, comme premier élu départemental, en fédérant les communautés de communes pour boucler le financement. La réalisation du barreau Roissy-Picardie est une absolue nécessité, et je me félicite de sa confirmation dans ce texte, après de nombreuses interventions en ce sens depuis dix-huit mois. J’appelle cependant à la présentation d’un calendrier de mise en œuvre précis et rapide. Il s’agit d’une infrastructure qui, à l’heure de la transition écologique, privilégie le transport ferroviaire, décongestionne l’A 1, donne accès aux Oisiens à un aéroport international et à une gare TGV, mais qui constitue surtout une porte d’entrée à la zone d’activité de Roissy-Charles-de-Gaulle, tout cela en six kilomètres de voies.
La troisième déclinaison appelle, en revanche, notre plus grande vigilance. Il s’agit des petites lignes ferroviaires et des dessertes. Comme de nombreux territoires et malgré une politique volontariste de rénovation des haltes du conseil régional, l’Oise est confrontée à des risques de fermeture de gares. Or ce sont des éléments déterminants d’attractivité pour les communes et leur maintien est garant d’activités économiques. Les fermer, c’est priver les habitants du service public et isoler encore davantage nos territoires ruraux. Vous l’aurez compris, madame la ministre, je m’y opposerai avec force.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, sur l’article.
M. Pierre Ouzoulias. Madame la ministre, dans ce débat, des élus de province se plaignent de la non-réalisation d’infrastructures et des élus franciliens vous reprochent, à l’inverse, de lancer des projets sans que l’on sache exactement qui les pilote, quelle est leur finalité et comment ils seront financés…
En tant qu’élu francilien, j’aimerais que vous nous donniez des informations sur le barreau province-province reliant Massy à Valenton.
M. Gérard Longuet. C’est important !
M. Pierre Ouzoulias. Le problème est que ce barreau passe en plein centre-ville d’Antony, commune de mon département des Hauts-de-Seine.
Madame la ministre, je m’interroge sur la méthode.
Tout d’abord, ce qui est présenté dans le rapport annexé ne cadre pas du tout avec l’enquête publique de 2015. On apprend ainsi que la robustesse et la capacité de la ligne TGV seront augmentées. Aujourd’hui, 40 TGV passent en pleine ville ; demain, il y en aura 120, 130 ou 140… (Mme Éliane Assassi s’exclame.) C’est un sujet d’inquiétude pour les habitants.
Par ailleurs, juste à côté de ce barreau passe la ligne B du RER, qui fonctionne très mal. Les usagers et les riverains ne comprennent pas très bien pourquoi ils auraient à supporter des nuisances supplémentaires liées à la croissance du trafic sur le barreau Massy-Valenton, alors que la ligne B dont ils ont besoin au quotidien est délaissée et se trouve tout à fait défaillante.
Nous attendons, madame la ministre, que vous vous expliquiez sur les choix que vous opérez entre les mobilités du quotidien, fondamentales pour la population francilienne, et vos axes stratégiques, qui ne correspondent même pas à des engagements pris par les gouvernements précédents, au travers notamment de l’étude d’impact de 2015. L’équilibre entre les mobilités du quotidien et le trafic d’intérêt national passant par des territoires urbains densément peuplés est vraiment un enjeu fondamental.
Mme la présidente. La parole est à M. Roland Courteau, sur l’article.
M. Roland Courteau. Je veux rappeler ici que le Grand Projet du Sud-Ouest et la ligne à grande vitesse Montpellier-Perpignan sont vraiment des projets structurants de développement du territoire, en particulier pour l’Occitanie.
Je m’attarderai plus particulièrement sur le projet de ligne à grande vitesse Montpellier-Perpignan, à propos duquel je suis intervenu ici même plus d’une dizaine de fois au cours de ces dernières années…
La réalisation de ce chaînon manquant sur le plus grand axe européen à grande vitesse reliant l’Europe du Nord au sud de l’Espagne est annoncée, depuis des décennies et les sommets franco-espagnols d’Albi, de Tolède ou de Foix, comme prioritaire, voire hautement prioritaire. Pourtant, cette infrastructure permettant d’ouvrir la plus grande région de France sur l’Espagne et l’Europe n’a toujours pas été réalisée.
J’ai été rapporteur du projet de loi autorisant la ratification de l’accord franco-espagnol pour la réalisation de la ligne à grande vitesse transpyrénéenne Perpignan-Figueras. J’avais alors insisté sur la nécessité de réaliser concomitamment le tronçon Montpellier-Perpignan. Or, si la section internationale reliant Perpignan à Figueras a été réalisée voilà des années, la ligne à grande vitesse Montpellier-Perpignan se fait toujours attendre.
Il s’agit pourtant d’un enjeu local, régional, national, européen, et d’un véritable levier économique pour l’eurorégion, totalement lié à la réalisation de la ligne à grande vitesse Bordeaux-Toulouse-Narbonne.
Je rappelle que la présidente de la région Occitanie, Carole Delga, défend ces dossiers avec force, appuyée par les sénatrices et sénateurs d’Occitanie, toutes tendances confondues. (Mme Marie-Thérèse Bruguière approuve.)
Je relève en outre que le Conseil de l’Union européenne vient de confirmer que « l’Europe veut s’assurer que son programme phare concernant le mécanisme pour l’interconnexion en Europe continuera de financer les projets clés dans le domaine des transports, notamment ». Quant au Parlement européen, il a déjà proposé d’ajouter le chaînon manquant Montpellier-Perpignan, ainsi que la liaison à grande vitesse Bordeaux-Toulouse-Narbonne.
Il serait temps, désormais, que ces dossiers avancent au niveau national. J’ose donc espérer, madame la ministre, que vous donnerez un avis favorable à l’amendement n° 870, qui a été déposé par Angèle Préville et plusieurs sénateurs d’Occitanie. (Mme Marie-Thérèse Bruguière applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Nelly Tocqueville, sur l’article.
Mme Nelly Tocqueville. Je salue à mon tour la présence dans nos tribunes de Philippe Duron, président du Conseil d’orientation des infrastructures, dont le travail a été unanimement apprécié.
Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention sur le projet de ligne nouvelle Paris-Normandie, et particulièrement sur la section Rouen-Barentin. Ces projets figurent parmi les programmes d’investissements prioritaires.
Comme vous la savez, la réalisation de la LNPN est indispensable à la modernisation profonde du système ferroviaire rouennais, et plus largement normand, celui-ci n’ayant pas connu d’évolution depuis l’après-guerre.
Parmi les opérations prioritaires à engager dans les cinq premières années figurent les gares et les accès ferroviaires, aujourd’hui trop exigus et encombrés, de la plupart des grands pôles urbains et métropolitains. Nous savons que la situation actuelle de la gare de Rouen ne permet pas d’atteindre l’objectif du Gouvernement de doubler la part du ferroviaire dans cette aire urbaine.
Il est également nécessaire de développer l’usage des modes de transport les moins polluants et les plus partagés au quotidien, pour une meilleure qualité de vie, et de renforcer l’efficacité et le report modal dans le transport de marchandises.
La nouvelle gare de Rouen permettra d’améliorer les offres de déplacement du quotidien, d’accélérer la transition énergétique et la lutte contre la pollution, de contribuer à la cohésion des territoires et, enfin, de renforcer l’efficacité des transports de marchandises pour accroître la compétitivité des territoires et des ports. Madame la ministre, pouvez-vous nous confirmer que ce projet sera bien engagé dans les cinq prochaines années ? Comme l’a indiqué ma collègue Corinne Féret, il s’agit de permettre à la région rouennaise en particulier, et plus largement à la Normandie, de renforcer leur attractivité économique et démographique, à la hauteur qu’elles méritent. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Dagbert, sur l’article.
M. Michel Dagbert. Si certains doutaient encore de la pertinence de réintroduire à ce point de nos débats le sujet de la programmation des investissements de l’État, les interventions successives de nos collègues démontrent à l’évidence qu’il importe que nous puissions échanger avec vous sur cette question, madame la ministre.
Pour ma part, je voudrais revenir sur le projet de canal Seine-Nord Europe, qui n’était pas mentionné dans la lettre de mission que vous avez adressée au Conseil d’orientation des infrastructures.
Malgré un contexte particulièrement difficile, les collectivités territoriales se sont montrées promptes à se mettre autour de la table et à prendre leurs responsabilités pour participer, aux côtés de l’Europe et de l’État, au financement de cette infrastructure majeure, dont chacun s’accorde à reconnaître qu’elle est indispensable au maillage fluvial.
Je regrette que le projet de loi fasse si peu cas du transport fluvial, les investissements prévus restant très largement sous-dimensionnés au regard des besoins, qu’il s’agisse du réseau existant ou de l’infrastructure à créer.
C’est la raison pour laquelle je tenais à intervenir cet après-midi pour rappeler les bonnes dispositions dans lesquelles se trouvent les collectivités territoriales et la promptitude avec laquelle le président de la région Hauts-de-France s’est efforcé de bâtir une société de projet susceptible de permettre de répondre à l’urgence. Il s’agit de poser les premiers jalons de la réalisation de cette infrastructure, sachant que l’Europe, qui a accepté de revoir sa part de financement, attend de la France des actes. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Didier Rambaud, sur l’article.
M. Didier Rambaud. Madame la ministre, en tant qu’élu rhônalpin, je voudrais évoquer à mon tour la liaison Lyon-Turin, dans la continuité de l’intervention de mon collègue Jean-Pierre Vial lors de la discussion générale.
L’État réaffirme, au travers de ce projet de loi d’orientation des mobilités, son engagement à réaliser le tunnel transfrontalier et il confirme l’intérêt stratégique de l’ouvrage sur les plans économique et écologique.
En revanche, le texte est beaucoup plus timide en ce qui concerne la programmation de la réalisation des voies d’accès françaises à ce tunnel de plus de 57 kilomètres passant sous les Alpes. Ces voies d’accès sont pourtant indispensables, non seulement d’un point de vue opérationnel, mais aussi pour respecter l’esprit des accords internationaux conclus avec l’Italie et l’Union européenne.
Je souhaiterais, madame la ministre, que vous puissiez rassurer les collectivités territoriales et les partenaires engagés dans ce projet.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.
M. Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Lors de la discussion générale, vous avez dit regretter, madame la ministre, que la commission ait introduit la question du financement des infrastructures au titre Ier A. (Mme la ministre proteste.) C’est vraiment là ce qui nous différencie, pour ne pas dire ce qui nous oppose.
Vous avez affirmé, lors de la présentation du texte initial, que ce projet de loi était sincère et que la programmation était financée. Or, malheureusement, tous les groupes s’accordent sur ce point, la réalité est tout autre. Ce projet de loi très important n’est pas financé : c’est tout de même incroyable ! Il n’est donc ni sincère, ni crédible, ni fiable. Vous nous dites que vous travaillez à des solutions de financement, mais ce projet de loi est prêt depuis à peu près un an : ce n’est pas sérieux !
Vous nous dites aussi que c’est à la loi de finances qu’il revient d’établir le financement de ce projet de loi. Mais d’où sortez-vous cette règle ? M. Karoutchi peut témoigner que le débat a été tranché ici même en 2011, quand un gouvernement qu’il a bien connu a voulu inscrire dans la Constitution que les questions financières étaient du seul ressort de la loi de finances : nous nous y sommes tous opposés !
M. Roger Karoutchi. Eh oui…
M. Hervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. J’ajoute que, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2019 à l’Assemblée nationale, dès qu’un sujet touchant à la mobilité était abordé, le Gouvernement renvoyait au projet de loi d’orientation des mobilités : quand on élabore la LOM, on renvoie à la loi de finances, et quand on débat de la loi de finances, on renvoie à la LOM. Ce n’est pas acceptable !
Nous voulons avoir la certitude que les infrastructures prévues dans ce projet de loi seront financées et que l’Afitf recevra effectivement les ressources qui lui sont affectées. La hausse de la TICPE de 2 centimes d’euro pour les véhicules légers et de 4 centimes pour les véhicules lourds intervenue en 2014 pour compenser la suppression de l’écotaxe rapporte 1,2 milliard d’euros. Cette recette est destinée à financer l’Afitf, mais, une fois de plus, Bercy, sans en parler à personne, et surtout pas au Parlement, a décidé que, à partir de 2020, l’Afitf ne toucherait plus que 500 millions d’euros. C’est tout simplement inacceptable !
Enfin, madame la ministre, vous affirmez que l’État est au rendez-vous des financements, en vous appuyant sur le budget de l’Afitf. Or, là encore, les faits démontrent le contraire. Alors que nous sommes sur une trajectoire de 2,7 milliards d’euros par an, le budget de l’Afitf a été péniblement fixé à 2,5 milliards d’euros. Nous sommes donc en retrait par rapport au scénario n° 2 du Conseil d’orientation des infrastructures, dont je salue à mon tour le président, Philippe Duron, qui préconisait d’inscrire dans la loi une somme 3 milliards d’euros par an pour atteindre l’objectif fixé par le Président de la République de régénération des infrastructures.
Dire que l’État est au rendez-vous des financements est donc erroné, madame la ministre. Heureusement, la commission et son rapporteur ont établi des dispositifs permettant de donner du sens et une réalité à ce projet de loi ! (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste.)