M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question, qui me permet de rappeler combien le ministre de l’action et des comptes publics, M. Gérald Darmanin, et la ministre chargée des transports, Mme Élisabeth Borne, attachent une haute importance à la réalisation de ce projet. Conscients de son importance stratégique, ils ont, depuis leur arrivée en fonction, consacré une grande part de leur énergie à la recherche de financements innovants et spécifiques.
Un projet de cette ampleur implique, comme vous l’avez fait remarquer, la concordance de plusieurs sources de financement.
Ce sera le cas pour le canal Seine-Nord Europe, dont le coût total serait, ainsi que l’a rappelé le Président de la République, réparti entre 2 milliards d’euros de subventions européennes, 1 milliard d’euros de ressources propres des collectivités, la mise en place par l’État de taxes nationales à assise locale qui permettront de gager un emprunt d’1 milliard d’euros, ainsi que 700 à 900 millions d’euros issus d’un emprunt garanti par la Société du canal Seine-Nord Europe, devenue régionale.
Vous m’interrogez plus particulièrement sur la part de ce financement revenant à l’État. Elle doit, comme vous le savez, intervenir au 1er janvier 2021.
Sachez, monsieur le sénateur, que ce délai est utilement mis à profit par le Gouvernement et que, contrairement à ce que vous pouvez craindre, l’État ne se désengage pas ; bien au contraire, il fait des propositions et cherche les bonnes solutions.
Nous avons notamment suggéré l’instauration d’une taxe spécifique à la région des Hauts-de-France, même si cette solution semble juridiquement fragile d’après l’avis qu’a récemment rendu le Conseil d’État.
D’autres pistes sont à l’étude, mais elles nécessitent des analyses juridiques approfondies et, pour certaines d’entre elles, des échanges avec la Commission européenne afin de bien cerner ce que permet le cadre européen.
Vous évoquez une troisième piste : l’inscription de crédits budgétaires dédiés. Le Gouvernement considère que cette solution ne devra être retenue qu’en dernier recours, dans la mesure où elle ne permet pas d’associer les futurs bénéficiaires du canal à son financement.
J’ajoute qu’une société de projet, véhicule juridique créé par la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite loi Macron, a permis de régionaliser le projet en le transférant aux collectivités concernées de la région des Hauts-de-France, en accord avec les élus locaux.
Comme vous le savez, tel est l’objet de l’article 36 du projet de loi d’orientations des mobilités, qui prévoit, d’une part, de ratifier l’ordonnance du 21 avril 2016 relative à la Société du canal Seine-Nord Europe, et, d’autre part, d’autoriser le Gouvernement à prendre, par la voie d’une nouvelle ordonnance, des dispositions visant à la transformation de cet établissement public national en établissement public local.
Soyez assuré, en tout état de cause, monsieur le sénateur, que le Gouvernement est déterminé à faire aboutir ce projet et que l’État assumera sa part du financement, quel que soit le vecteur retenu in fine. Votre concours pour y parvenir, ainsi que celui de l’ensemble des élus locaux que vous avez cités, nous est indispensable.
M. le président. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour la réplique.
M. Jérôme Bascher. Monsieur le secrétaire d’État, nous avons besoin, je vous le dis clairement, d’1 milliard d’euros de crédits budgétaires. Cela dit, nous pouvons également travailler avec vous, monsieur le secrétaire d’État : cela fait des années que les techniciens de Bercy travaillent sans trouver de solution. Si vous nous offrez les données, alors nous sommes prêts à y œuvrer avec vous !
police aux frontières à wallis-et-futuna
M. le président. La parole est à M. Robert Laufoaulu, auteur de la question n° 630, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
M. Robert Laufoaulu. Monsieur le secrétaire d’État, ma question porte sur l’organisation de la police aux frontières à Wallis-et-Futuna.
La direction centrale de la police aux frontières est, entre autres, chargée d’assurer les missions de police aéronautique et, par conséquent, la sécurité générale des ports et aéroports français.
Or, à Wallis-et-Futuna, les missions de la police aux frontières sont actuellement assurées par la gendarmerie, et ce sans aucune base juridique.
Plus précisément, jusqu’à l’installation des gendarmes mobiles sur le territoire, la police aux frontières était assurée par quatre gardes territoriaux, sous la responsabilité d’un gendarme référent. Depuis leur installation, les gendarmes mobiles ont repris le service, mais ils continuent à faire appel aux gardes territoriaux lorsqu’ils rencontrent des problèmes d’effectifs. Tout cela se fait, bien sûr, sans habilitation officielle ni base normative.
Cette situation bancale ne saurait perdurer.
Je sais que plusieurs pistes sont à l’étude. Toutefois, pour des raisons budgétaires, chaque service se renvoie la balle, si je puis dire, entre la direction centrale de la police aux frontières, la direction des douanes et la gendarmerie.
Monsieur le secrétaire d’État, la meilleure piste ne serait-elle pas une collaboration avec la police aux frontières de Nouvelle-Calédonie, qui formerait les gardes territoriaux de Wallis-et-Futuna et collaborerait avec eux ? La surveillance aux frontières est un métier de policier, et non pas une mission de douanier.
Je souhaiterais donc savoir ce que compte faire le Gouvernement pour mettre en place une solution plus viable et officielle, afin d’assurer cette prérogative régalienne.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur Robert Laufoaulu, je vous remercie de votre question : sur tous ces sujets, nous vous savons très mobilisé, et vous avez raison de l’être !
À ce stade, pour être juridiquement très précis, l’article 2 du décret n° 2012-328 attribue la compétence territoriale de Nouvelle-Calédonie et de Wallis-et-Futuna à la direction centrale de la police aux frontières. Or cet article ne fait aucune mention de l’extension de cette compétence à l’aéroport de Wallis-Hififo, où aucun effectif de la PAF n’est aujourd’hui affecté.
Au vu de cette situation, dont vous avez rappelé combien elle est insatisfaisante, l’administrateur supérieur conduit actuellement une réflexion, en liaison avec la direction centrale de la police aux frontières et la direction de la gendarmerie nationale, réflexion qui associera aussi la direction de la douane, afin de mettre en place un système qui soit, comme vous le souhaitez, plus efficace et conforme à la réglementation.
Je ne manquerai pas de porter personnellement auprès de Laurent Nunez et de Christophe Castaner votre message et votre suggestion, afin que la solution vienne le plus vite possible.
Vous avez souligné que la gendarmerie nationale, avec un poste de sous-officier, ainsi que quelques militaires du détachement de la gendarmerie mobile, est aujourd’hui chargée du contrôle frontalier, avec examen visuel des passeports. La douane effectue des contrôles de bagages de soute ; elle reçoit parfois le renfort de la garde territoriale.
Face à cette situation qui n’est pas pleinement satisfaisante, nous sommes à l’heure des réflexions. Vous avez d’ailleurs vous-même mis une piste sur la table ce matin, et je m’en ferai l’écho auprès de mes collègues pour qu’elle soit expertisée.
En tout état de cause, il faut que le contrôle aux frontières, prérogative régalienne à Wallis-et-Futuna comme sur l’ensemble du territoire national, puisse pleinement s’appliquer.
Je remarque par ailleurs qu’aujourd’hui encore, après votre question de jeudi dernier relative au futur sommet France-Pacifique, vous vous montrez un ardent défenseur des intérêts des territoires ; nous allons naturellement en tenir le plus grand compte.
M. le président. La parole est à M. Robert Laufoaulu, pour la réplique.
M. Robert Laufoaulu. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse.
En l’absence de franche volonté de l’exécutif, Wallis-et-Futuna fait face à différentes situations sans réelle base légale ou réglementaire. Souvent, l’État semble improviser ! L’option dont je parlais dans ma question permettrait notamment une amorce de solution, certes partielle, pour régler la situation des gardes territoriaux de Wallis-et-Futuna, qui, je le rappelle, assurent des missions incombant à l’État sans en être des fonctionnaires, ce qui pose un véritable problème.
tourisme numérique dans les colonies israéliennes des territoires palestiniens occupés
M. le président. La parole est à M. Gilbert Roger, auteur de la question n° 656, adressée à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
M. Gilbert Roger. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention sur le tourisme numérique dans les colonies israéliennes situées en territoires palestiniens occupés.
Les entreprises de réservation en ligne, comme Airbnb, Booking.com, Expedia Group ou TripAdvisor, contribuent à des violations de droits humains des Palestiniens, en proposant plusieurs centaines d’hébergements et activités dans les colonies illégales de peuplement israéliennes en territoires palestiniens occupés, y compris à Jérusalem-Est.
Selon le rapport d’Amnesty International de janvier 2019 intitulé Destination : occupation. Le tourisme numérique et les colonies de peuplement israéliennes illégales dans les territoires palestiniens occupés, ces entreprises du numérique induisent en erreur leurs clients, en s’abstenant d’indiquer systématiquement que les offres concernées sont situées dans les territoires occupés.
Or, en favorisant l’industrie du tourisme dans les colonies et, en conséquence, l’essor économique de ces implantations qui sont contraires au droit international, Airbnb, Booking.com, Expedia Group et TripAdvisor contribuent au maintien, au développement et à l’extension des colonies de peuplement illégales et en tirent profit.
Aussi, je souhaite savoir si vous êtes prêt à mettre en ligne, sur le site du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, un conseil aux voyageurs pour alerter ceux-ci des pratiques de ces entreprises de locations en ligne qui fournissent des informations trompeuses, en s’abstenant d’indiquer que les hébergements proposés sont situés en territoires palestiniens occupés dans des colonies illégales au regard du droit international, et non en Israël.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Comme vous le savez, monsieur le sénateur Gilbert Roger, la position de la France est très claire : pour notre pays, la politique de colonisation est illégale, elle nuit à la recherche d’une paix juste et durable et menace la solution des deux États. Le Conseil de sécurité des Nations unies a d’ailleurs rappelé cette position le 23 décembre 2016 avec le soutien de la France.
La France condamne régulièrement les annonces de construction de nouveaux logements dans les colonies en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, ainsi que les démolitions et les évacuations forcées en zone C, qui participent de la même stratégie.
De même, nous appelons publiquement les autorités israéliennes à reconsidérer ces décisions et à abandonner cette stratégie de colonisation afin de préserver la solution des deux États avec Jérusalem comme capitale.
Nous avons tiré les conséquences de cette situation, en inscrivant dans les conseils aux voyageurs publiés sur le site internet France Diplomatie du ministère un certain nombre d’éléments. Dans ces conseils aux voyageurs, qui visent à informer nos compatriotes des risques encourus lors de séjours à l’étranger et à les sensibiliser sur les mesures et comportements à adopter pour réaliser leurs déplacements dans les meilleures conditions, il est indiqué que « la Cisjordanie, Jérusalem-Est, la bande de Gaza et le plateau du Golan sont des territoires occupés par Israël depuis 1967 » et que « les colonies sont illégales en vertu du droit international ».
Nous informons aussi les entreprises françaises et les sensibilisons aux risques qu’elles encourent en termes juridiques et économiques et au regard de leur réputation.
En ce qui concerne les acteurs économiques que vous évoquez, monsieur le sénateur, ce sont des entreprises privées, souvent implantées à l’étranger. De ce fait, il ne nous est guère possible de mener une action coercitive à leur endroit.
Néanmoins, nous pouvons discuter avec elles de cette question. Par exemple, depuis ma prise de fonction, j’ai veillé à appeler l’attention des plateformes sur la nécessité pour elles de dialoguer avec les autres acteurs du secteur, notamment les hôteliers. Soyez assuré que je signalerai votre préoccupation à leurs responsables, lorsque je les rencontrerai.
Tels sont, monsieur le sénateur, les éléments d’information que je souhaitais porter à votre attention.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Roger, pour la réplique.
M. Gilbert Roger. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d’État. Je souhaite apporter deux éléments complémentaires.
Entre le moment où cette question a été publiée et aujourd’hui, le groupe Expedia a demandé à me rencontrer et m’a indiqué qu’il voulait trouver une solution pour apporter de la clarté à ses offres, en particulier en ce qui concerne Jérusalem-Est. Je crois qu’Airbnb entend s’inscrire dans la même démarche.
Travailler ensemble à trouver des solutions est d’autant plus important que, dans le cadre des élections législatives qui ont lieu aujourd’hui même en Israël, le Premier ministre sortant, qui risque d’être reconduit, a annoncé que, s’il était réélu, il annexerait les colonies situées en Cisjordanie. De nouvelles difficultés risquent donc d’apparaître dans peu de temps au Moyen-Orient…
devenir de la section consulaire du luxembourg
M. le président. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, auteure de la question n° 448, adressée à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Mme Hélène Conway-Mouret. Monsieur le secrétaire d’État, lors de mes déplacements en circonscription, je note partout l’inquiétude grandissante de nos compatriotes et de nos conseillers consulaires quant au devenir des postes diplomatiques.
Pour répondre à la demande inédite de réduction de 10 % de la masse salariale de la représentation française à l’étranger, les fermetures de certains services et la diminution du personnel ne peuvent être que drastiques. Elles vont toucher directement plus de trois millions de nos concitoyens résidant à l’étranger, mais aussi quelques centaines de milliers de transfrontaliers et les millions de touristes français.
Tous les postes sont concernés et nos ambassadeurs, immédiatement sollicités pour faire connaître les économies qu’ils pouvaient réaliser, ont tous fait des propositions, que pour l’instant nous ne connaissons pas.
Je voudrais prendre comme exemple notre poste au Luxembourg, que je connais bien et qui rassemble un certain nombre de problématiques. La population française a dépassé 53 000 résidents – c’est le nombre recensé par les autorités locales –, dont 36 000 inscrits au consulat. Les Français établis au Luxembourg représentent la dixième communauté française dans le monde, à laquelle je me dois d’ajouter les 100 000 frontaliers qui, chaque jour, viennent travailler dans ce pays. Beaucoup préfèrent s’adresser au consulat pour la délivrance de leurs papiers d’identité ; c’est plus facile pour eux, car ils sont sur place et ne doivent pas prendre deux jours de congé pour effectuer les mêmes démarches dans leur commune.
Depuis plusieurs mois, le personnel est soumis à une continuelle pression de la part des usagers mécontents de la diminution des services. Pourtant, les agents ne chôment pas, avec en moyenne trente-six rendez-vous par jour ouvré.
Aujourd’hui, nos concitoyens craignent une éventuelle fermeture du consulat, alors même que certains services ne peuvent pas être supprimés – c’est le cas pour les dossiers de nationalité et de bourses scolaires.
D’ici à 2020, les services de l’état civil vont être transférés à Nantes. Il semblerait que l’on envisage également de demander à nos concitoyens du Luxembourg de se déplacer à Bruxelles pour certaines démarches administratives ou même de se rendre en France. Or je ne pense pas qu’il soit envisagé d’augmenter le personnel dans les départements frontaliers ou au consulat à Bruxelles.
Monsieur le secrétaire d’État, au vu du nombre important de personnes concernées, pouvez-vous me donner une réponse claire et précise sur les décisions que vous entendez prendre concernant ce poste et, plus généralement, sur les grandes orientations pour l’ensemble du réseau ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Madame la sénatrice Conway-Mouret, soyons très clairs : la fermeture de la section consulaire à Luxembourg n’est pas à l’ordre du jour !
Certes, dans le cadre du programme Action publique 2022, il nous est demandé des économies de masse salariale, ce qui ne correspond pas nécessairement à des postes en équivalent temps plein – ETP.
En tout état de cause, nous devons à nos compatriotes établis hors de France le maintien d’un service de qualité, ce qui ne nous empêche pas de travailler sur un certain nombre de nouveautés. La députée Anne Genetet a préparé un rapport, dans lequel elle préconise la mise en place d’une plateforme téléphonique fonctionnant 7 jours sur 7, 24 heures sur 24 : il me semble que cela constituerait une novation tout à fait intéressante.
Plus globalement, nous pouvons aussi réfléchir aux moyens de tirer parti des technologies numériques, qui transforment nos vies. C’est le cas, nous l’évoquions précédemment, dans le secteur du tourisme avec les plateformes. Certains actes de procédure peuvent aujourd’hui être dématérialisés, en particulier lorsque les états civils sont fiables, comme c’est le cas en Europe.
C’est dans cet esprit que la gestion des transcriptions en Europe sera réorganisée vers le service central de l’état civil à Nantes, sans que cela pèse sur la capacité, pour les Français établis hors de France, d’avoir accès, dans de bonnes conditions, à tous ces services. Cette réorganisation signifie le transfert d’un ETP, mais sa mise en œuvre n’obère en rien, comme je l’ai dit, le reste des missions du consulat.
Cette évolution s’inscrit dans le cadre de relations très intenses entre la France et le Luxembourg, comme en témoigne la visite d’État effectuée l’année dernière par le Grand-Duc et la Grande-Duchesse. Vous le savez, les liens de la France avec le gouvernement du Luxembourg sont très forts et nous menons ensemble un certain nombre de combats européens.
En conclusion, je tiens vraiment à tordre le cou à cette rumeur, si tant est qu’elle ait circulé : pas de fermeture !
M. le président. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, pour la réplique.
Mme Hélène Conway-Mouret. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État. Je comprends bien évidemment que vous soyez tenu par la solidarité ministérielle, mais je crois que personne ne peut défendre aujourd’hui les économies qui sont demandées à votre ministère – il a aussi été le mien, un temps.
Les demandes d’économies sont récurrentes, mais celle-ci est quand même inédite par son ampleur, 10 %. Et tout le monde sait bien, quand on parle d’économies, qu’il s’agit d’un euphémisme pour cacher les termes de suppression de postes et de réduction d’effectifs !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État. C’est sur l’ensemble des services de l’État à l’étranger !
Mme Hélène Conway-Mouret. Bien sûr, mais les autres ministères ont adressé une lettre au Premier ministre, indiquant qu’ils n’entendaient pas participer de manière importante à cette réduction.
Je souhaite simplement vous rappeler les propos tenus hier par le Premier ministre lors de la restitution du grand débat. En évoquant l’exigence de fraternité, il a dit : « Quand le service public ferme, c’est l’État qui abandonne ses citoyens. » Il a ajouté : « Nous avons besoin d’un service public adapté pour être au contact, et pas simplement numérique. »
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue !
Mme Hélène Conway-Mouret. Je dirai simplement que nous devons conserver le contact humain !
fonds européen d’aide aux plus démunis
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, auteur de la question n° 637, adressée à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes.
M. Philippe Mouiller. Ma question porte sur le Fonds européen d’aide aux plus démunis, le FEAD. Les associations caritatives telles que le Secours populaire, les Restos du Cœur, Emmaüs et la Banque alimentaire sont inquiètes.
En effet, pour répondre aux besoins alimentaires des personnes auxquelles elles portent secours, ces associations font appel à la générosité publique, s’approvisionnent auprès des enseignes alimentaires et bénéficient du Fonds européen d’aide aux plus démunis.
Ce fonds a vocation à soutenir des actions menées par les pays de l’Union européenne pour apporter une assistance matérielle aux plus précaires. Il permet aux associations françaises de disposer de 100 à 120 tonnes de produits de base, soit près de 30 % des produits distribués dans leurs permanences. Comme vous le voyez, cet apport est essentiel pour assurer une stabilité et une régularité des denrées distribuées aux personnes dans le besoin.
Or les représentants de ces associations constatent depuis plusieurs années des retards récurrents de plusieurs mois dans la livraison des produits issus du FEAD.
Surtout, ils craignent une diminution des moyens alloués dans les années qui viennent. En effet, dans le cadre de la prochaine programmation budgétaire, un changement total de paradigme pourrait s’opérer : nous passerions d’un fonds spécifiquement dédié à un pourcentage minimum réservé au sein d’un programme global, le FSE+, laissant la possibilité aux États membres, s’ils le souhaitent, de consacrer une enveloppe plus importante à l’aide aux plus démunis.
Je vous remercie de bien vouloir me préciser la position du Gouvernement concernant cette situation, car il est nécessaire, pour les associations caritatives, de préserver le montant aujourd’hui alloué au FEAD.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur Mouiller, la France a toujours défendu le maintien d’un programme européen d’aide aux plus démunis, qui incarne l’idée d’une Europe qui protège.
Comme vous, je suis un élu local rural et ma permanence de Saint-Valérien jouxte les locaux des Restos du Cœur. Je mesure donc concrètement combien l’action de ces structures associatives et de leurs bénévoles est importante et je sais que les financements européens ont un impact très concret sur nos territoires, en particulier au service de nos concitoyens les plus démunis. Je sais aussi que la lutte contre les inégalités est un fil rouge qui nous rassemble tous.
En 2014, la France a soutenu la mise en place du Fonds européen d’aide aux plus démunis dans le cadre du précédent budget européen. Des négociations se tiennent actuellement sur le nouveau cadre financier post-2020. C’est dans ce cadre que la Commission européenne a formulé des propositions et il ne vous a pas échappé que la France a d’ores et déjà émis des réticences, voire une franche opposition, à l’égard de certaines de ces propositions – en particulier, nous ne souscrivons pas à celle qui vise à baisser les crédits de la politique agricole commune.
En ce qui concerne le FEAD, la Commission européenne, évoquant un souci de simplification et de lisibilité, propose d’intégrer ce programme au sein d’un nouveau fonds social européen, FSE+, destiné à financer l’ensemble des actions de l’Union dans le domaine social.
Nous restons très vigilants sur ce sujet. Nous entendons les arguments avancés par la Commission européenne, mais nous défendons le principe d’un fléchage minimal du nouveau programme vers les plus démunis. Ce fléchage devrait selon nous constituer un plancher, et non un plafond, et chaque État membre devrait conserver la possibilité d’allouer le montant souhaité à l’aide aux plus démunis.
Quelle que soit la structure du financement, nous avons en outre pris l’engagement que les enveloppes seraient maintenues constantes.
Ces questions constituent une préoccupation importante du Gouvernement, en particulier pour Agnès Buzyn et Christelle Dubos. Monsieur le sénateur, nous sommes, comme vous, particulièrement vigilants sur l’évolution de ces crédits, qui sont très utiles pour nos concitoyens les plus fragiles.
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour la réplique.
M. Philippe Mouiller. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse. Il me semble que nous partageons les mêmes ambitions et la même volonté et que nous avons vraiment besoin du fléchage dont vous avez parlé.
Nous devons faire preuve d’une vigilance extrême sur ces sujets et je comprends, dans vos propos, que le Gouvernement s’engage en tout état de cause à maintenir les enveloppes aujourd’hui allouées aux associations caritatives.
Ainsi, selon votre réponse, si les crédits dédiés aux plus démunis au sein du futur FSE+ ne permettaient pas de garantir le fonctionnement de ces associations, le Gouvernement interviendrait en complément.
délivrance de la carte nationale d’identité
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, auteur de la question n° 654, transmise à M. le ministre de l’intérieur.
M. Hervé Maurey. Monsieur le secrétaire d’État, la réforme de la délivrance de la carte nationale d’identité, mise en œuvre en 2017, a conduit à diviser par quinze le nombre de communes dans lesquelles il est possible d’obtenir ce document. Désormais, nos concitoyens ne peuvent plus s’adresser qu’à 2 300 mairies, alors que cela était précédemment possible dans la quasi-totalité des communes.
Cette réforme, je le rappelle, fait suite à celle de la délivrance du passeport, qui avait conduit aux mêmes conséquences.
Elle présente en tout cas de nombreux désagréments : les usagers doivent aller plus loin et attendre plus longtemps ; les communes qui ont conservé ce service doivent gérer une augmentation du nombre de demandes à traiter, ce qui induit une surcharge de travail et des coûts supplémentaires ; les communes rurales qui ont perdu, avec ce service, une forme de proximité et de contact avec leurs administrés vivent cela comme un nouveau coup porté à la ruralité et à leur rôle.
Les échanges entre le Président de la République et les élus locaux ont montré l’importance de ce sujet, qui induit un sentiment de dépossession progressive des communes rurales de leurs missions essentielles. Les élus aimeraient qu’au minimum chaque intercommunalité dispose de la capacité de délivrer les cartes nationales d’identité.
Le Président de la République s’est engagé, lors du débat qui s’est tenu le 15 janvier au Grand Bourgtheroulde, à « rouvrir le sujet pour les cartes d’identité, les passeports et les permis de conduire ».
Le grand débat étant terminé, je souhaiterais connaître les intentions du Gouvernement sur ce sujet et, au-delà, sur les mesures qu’il compte prendre pour conforter les communes et redonner confiance et espoir aux maires.
À cet égard, permettez-moi de vous rappeler que les maires aspirent notamment à un allégement des normes, à une visibilité sur l’évolution de leurs ressources, à un meilleur fonctionnement des intercommunalités ou encore à une amélioration de leur statut. Je pourrais allonger davantage la liste, mais je m’arrêterai là, monsieur le secrétaire d’État, pour vous laisser me répondre…