Mme la présidente. La parole est à M. Christophe Priou, pour la réplique.
M. Christophe Priou. Dont acte, mais la baisse régulière du nombre de spectateurs et la fracture culturelle entre grosses productions et films d’auteur continuent de nous interroger. Michel Audiard aurait pu conclure notre débat en ces termes : « Le cinéma français est à l’image de la France : on n’a pas assez de pognon, et c’est comme ça dans tous les domaines. » (Sourires.)
Conclusion du débat
Mme la présidente. En conclusion de ce débat, la parole est à M. Jean-Pierre Leleux, pour le groupe auteur de la demande.
M. Jean-Pierre Leleux, pour le groupe Les Républicains. Je remercie l’ensemble des intervenants. Des interrogations se font jour quant à l’avenir de notre cinéma, mais chacun a souligné l’excellence du modèle français.
Je remercie le ministre de s’être plié à cet exercice et d’avoir répondu à l’ensemble de nos questions.
Un consensus semble s’être dégagé : nous n’avons pas à remettre en cause le modèle français, qui a permis les résultats que nous constatons. Il intègre la diffusion dans la création, est presque autonome. Mieux vaut encore l’élargir pour y accueillir les nouveaux opérateurs, plutôt que de nous plier à leurs règles. Cela n’interdit pas d’imaginer d’autres financements, comme M. Boutonnat le souligne dans son rapport, même si le mode de financement actuel a démontré son efficacité et doit être maintenu.
Les sujets évoqués font écho à deux rapports, publiés récemment, qui ont provoqué quelques remous dans le landerneau du cinéma et de l’audiovisuel.
Le rapport de l’Autorité de la concurrence préconise une forte libéralisation du système, une déréglementation assez radicale. Il a évidemment choqué un certain nombre d’acteurs de l’audiovisuel et du cinéma, mais il a le mérite de bousculer les choses, ce qui permet de provoquer le débat. Il y a probablement un équilibre à trouver entre libéralisation et maintien en l’état d’une forme de carcan réglementaire. Certains acteurs du monde de l’audiovisuel et du cinéma reconnaissent que les réglementations sont parfois trop strictes et ne permettent pas de se développer, et sont même parfois responsables d’une attrition des financements.
Par ailleurs, de premières mesures ont déjà été prises, notamment en matière d’ouverture aux financements privés, sur le fondement du rapport sur le financement privé du cinéma et de l’audiovisuel qui a été remis par Dominique Boutonnat au Président de la République. Pourquoi se priver de nouvelles sources de financement ? Comme l’a dit un de nos collègues, cela ne doit pas amener à ne plus considérer que la seule rentabilité, mais pourquoi s’interdire de miser aussi sur des succès ?
Ce rapport traite également de la chronologie des médias, qui mériterait d’être quelque peu remise à plat pour plus d’équilibre et de justice dans la répartition de la valeur entre les différents acteurs.
La transparence est importante pour instaurer une forme de justice : il faut savoir ce que les uns et les autres retirent de notre système vertueux. Le recours à la blockchain pourrait permettre de mieux connaître l’ensemble des revenus des acteurs et d’assurer une plus grande clarté, un meilleur équilibre, sans intervention du législateur.
Je voudrais terminer sur une note optimiste, car je crois qu’il y a lieu de l’être. La capacité de résistance du cinéma résulte en partie de sa nature même, caractérisée, comme vous l’avez souligné, monsieur le ministre, par une émotion partagée collectivement en salle. Robert Desnos disait : « Ce que nous demandons au cinéma, c’est ce que l’amour et la vie nous refusent, c’est le mystère, c’est le miracle. » Cette demande existe sans doute toujours aujourd’hui, et pour longtemps encore. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste. – Mme Colette Mélot applaudit également.)
Mme la présidente. Nous en avons terminé avec le débat sur l’avenir du cinéma français.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
M. le président. La séance est reprise.
5
Questions d’actualité au Gouvernement
M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
La séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.
J’appelle chacun de vous, mes chers collègues, à veiller au respect du temps de parole et au respect des uns et des autres.
suppression d’emplois à general electric (I)
M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour le groupe socialiste et républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Jérôme Durain. Ma question, à laquelle je souhaite associer mon collègue Martial Bourquin, s’adresse au Premier ministre.
La Bourgogne-Franche-Comté est la première région industrielle du pays au regard de la part des salariés de l’industrie dans la population active. C’est une fierté pour tous ses habitants et c’est un atout pour notre pays.
Ce matin, la direction de General Electric a reçu les représentants syndicaux pour leur annoncer un plan de restructuration. Il prévoit la suppression de plus d’un millier d’emplois dans le Territoire de Belfort, sur les sites GE de Belfort et de Bourogne. C’est un quart des effectifs de GE que la direction souhaite rayer d’un trait de plume. C’est un coup de massue pour toute la population.
Pourtant, à la suite du rachat de la branche énergie d’Alstom, le même groupe GE nous promettait la création de 1 000 emplois. Beaucoup attendaient mieux de M. Macron, qui a surtout su négocier le calendrier de ce plan social, annoncé au lendemain des élections européennes.
M. Jean-Marc Todeschini. Eh oui !
M. Jérôme Durain. M. Montebourg avait mis en place des garanties lors de la vente d’Alstom. Elles alimenteront un fonds précieux de réindustrialisation, à hauteur de 50 millions d’euros. Toutefois, ce fonds n’est toujours pas opérationnel, malgré l’insistance des collectivités locales.
Aujourd’hui, l’annonce de GE constitue une nouvelle rupture, qui appelle une réponse forte de la part de l’État. GE doit préserver davantage d’emplois et de savoir-faire, diversifier son activité sur les sites de Belfort et de Bourogne, mais aussi remettre la main à la poche !
Monsieur le ministre, quels sont vos objectifs en termes de réduction du nombre d’emplois supprimés ? Êtes-vous prêt à exiger le doublement de l’amende due par GE ? Comment allez-vous associer les élus locaux du territoire, qui forment une union sacrée, pour assurer un avenir à l’industrie régionale ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur des travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances.
M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie et des finances. Monsieur le sénateur, mon objectif est simple : garantir l’avenir industriel de GE à Belfort et, de manière plus générale, en France. Je compte bien entendu associer les élus à ma démarche. Je l’ai déjà fait, et je suis prêt à recevoir tous les élus concernés par les annonces de GE dans les jours qui viennent.
C’est un coup dur pour les salariés de GE. Il résulte tout simplement de l’effondrement des commandes de turbines à gaz. Vous connaissez parfaitement le dossier : 100 turbines à gaz avaient été commandées à GE Belfort en 2008, contre 29 aujourd’hui, et les perspectives pour les années à venir ne sont pas bonnes. Peut-être seront-elles plus ouvertes à compter de 2040, lorsque les usines à charbon auront fermé, mais, dans l’intervalle, il faut trouver d’autres activités.
Mon objectif principal est de trouver de nouveaux débouchés industriels pour les salariés de GE à Belfort. Il y a des débouchés possibles dans le secteur aéronautique ou dans celui de l’hydrogène – la ville de Belfort s’est beaucoup engagée et toutes les qualifications et technologies nécessaires sont présentes –, mais aussi dans le démantèlement des centrales nucléaires et dans les grands carénages.
Dans tous ces domaines, qu’il s’agisse de l’aéronautique, du nucléaire ou de l’hydrogène, les salariés ont les compétences et les qualifications nécessaires pour réinventer un avenir industriel sur le site de Belfort. Nous allons utiliser le fonds de 50 millions d’euros, alimenté par les pénalités payées par General Electric. Il sera opérationnel dans les jours qui viennent. Je l’ai déjà dit, je souhaite que la grande majorité de cette somme profite à la réindustrialisation et à la réinvention du site de Belfort. Je compte sur votre soutien ! (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)
M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour la réplique.
M. Jérôme Durain. Monsieur le ministre, nous ne partageons pas votre analyse concernant le marché des turbines à gaz, mais nous sommes favorables à la diversification des activités. Pour 1 000 emplois non créés, General Electric a dû verser 50 millions d’euros ; combien pour 1 000 emplois supprimés ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur des travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
mesures à prendre après les élections européennes
M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires. – M. Gérard Longuet applaudit également.)
M. Franck Menonville. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Au lendemain des élections européennes, et au-delà des résultats obtenus par les différentes listes, deux faits majeurs positifs sont à souligner. Tout d’abord, alors qu’il était annoncé comme devant être catastrophique, le taux de participation, supérieur à 50 %, a dépassé les espérances. J’y vois un nouvel espoir pour notre démocratie et pour l’Europe. Ensuite, le taux de participation des jeunes est élevé : il augmente de treize points par rapport à 2014, pour atteindre environ 40 %. Nous devons en tirer les enseignements, afin d’apporter immédiatement des réponses claires et concrètes à leurs attentes légitimes.
Force est de constater que la fracture territoriale qui se creuse depuis déjà de nombreuses années est désormais indiscutable. Le résultat de ces élections européennes marque une nouvelle accentuation de la différence entre le vote urbain et le vote rural. Nous n’en sommes pas surpris, car les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets. La disparition des services publics et le désengagement de l’État sont bien réels.
J’ai pu observer que, partout où le lien social est développé et vivant, la progression des populistes a été freinée. Dimanche soir, le Gouvernement a indiqué que l’acte 2 du quinquennat allait commencer. Monsieur le Premier ministre, quelle lecture faites-vous des résultats et quelles mesures comptez-vous prendre pour résorber la fracture territoriale ? En tant que sénateur de la Meuse, je sais que vous pourrez vous appuyer sur les élus locaux pour relever les défis territoriaux. Il ne faut pas perdre de temps : il est urgent d’envoyer des signes forts aux territoires, en adoptant des mesures concrètes. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires. – M. Gérard Longuet applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement.
Mme Sibeth Ndiaye, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur Menonville, vous nous interrogez sur les enseignements à tirer de ce scrutin. Je vous remercie de votre question, qui me permet de vous faire part de mon sentiment concernant ces élections européennes.
Le premier enseignement que j’en tire, c’est bien entendu l’importance de la participation, dont je me félicite, comme vous-même. Cela montre que ce scrutin, malgré les Cassandres, intéresse encore beaucoup nos concitoyens.
Je constate en outre que la recomposition de la vie politique française, qui avait été engagée par l’élection du Président de la République, est une réalité durable et incontestable.
J’observe avec tristesse que, une fois de plus, l’extrême droite arrive en tête d’un scrutin national, ce qui témoigne malheureusement de son ancrage durable dans un certain nombre de nos territoires. (Murmures sur des travées du groupe Les Républicains.)
Au travers des résultats de ces élections, force est également de constater que le très ancien clivage entre la gauche et la droite n’est plus considéré comme pertinent par les Français, puisque les partis traditionnels ont réalisé un score inférieur à 10 % chacun. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Aujourd’hui, l’heure est bien évidemment à l’action. Nous avons déjà beaucoup agi, les chiffres sont là pour en témoigner : 500 000 emplois ont été créés en deux ans et le taux de chômage connaît son plus bas depuis plus de dix ans,…
M. Jean-Marc Todeschini. Grâce à qui ?
Mme Sibeth Ndiaye, secrétaire d’État. … mais beaucoup reste encore à faire, en particulier pour résorber la fracture territoriale.
C’est la raison pour laquelle, sous l’autorité du Premier ministre, un certain nombre de chantiers ont d’ores et déjà été lancés, en particulier une mobilisation nationale pour l’emploi dans les territoires, qui permettra aux partenaires sociaux et aux collectivités locales de s’unir autour de la recherche de solutions, pour réduire de manière concrète la précarité et apporter plus de travail à tous les Français. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)
pénurie de cortisone
M. le président. La parole est à M. Jean-François Rapin, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-François Rapin. Maladies inflammatoires articulaires, maladies inflammatoires intestinales, maladies respiratoires aiguës et chroniques, cancérologie, dermatologie, et j’en passe : dans de très nombreux cas, les médecins doivent prescrire de la cortisone, médicament de premier recours et souvent irremplaçable.
Madame la ministre, depuis quelques semaines, nous assistons à une décroissance des stocks de cortisone, administrable par voie orale comme injectable. Nous en arrivons aujourd’hui à une véritable pénurie dans les officines, ce qui contraint les patients à se livrer à une surréaliste chasse au trésor.
Pouvez-vous nous expliquer précisément comment cette situation incroyable et inacceptable a pu se produire ? Pourquoi n’a-t-elle pas été anticipée en amont ? Pouvez-vous faire un point de situation ? (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur, vous nous interrogez sur les inquiétudes exprimées ces dernières semaines par des médecins et des patients rencontrant des difficultés pour s’approvisionner en corticoïdes.
Nous tenons tout d’abord à vous rassurer : l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM, a écarté jeudi dernier tout risque de pénurie pour les corticoïdes. Cette information est le fruit non pas d’un heureux hasard, mais d’une action volontariste des autorités sanitaires.
En effet, dès que l’ANSM a été informée, début mai, de l’existence de tensions en matière d’approvisionnement en corticoïdes, elle a immédiatement convoqué les fabricants afin qu’ils prennent toutes les mesures nécessaires pour assurer l’accès des patients à ces médicaments dans les plus brefs délais. Cela s’est traduit par la mobilisation par les fabricants de stocks permettant de garantir la couverture des besoins des patients.
L’ANSM a également régulièrement échangé avec les représentants d’associations de patients et les professionnels de santé pour partager les informations à sa disposition. Nous le reconnaissons, il a parfois été difficile, et tel peut encore être le cas pour certains patients ou professionnels de santé, de se procurer facilement des corticoïdes administrables par voie orale ou injectables.
Le retour à une disponibilité normale de ces médicaments dans les pharmacies d’officine ou hospitalières est attendu d’ici à la fin du mois de juin. Entre-temps, l’ANSM maintient son dispositif de suivi renforcé. Un tableau de la disponibilité des différentes spécialités par dosage est public et consultable sur le site de l’agence. Nous faisons le choix d’une gestion transparente de ces dossiers.
Si les autorités n’ont pas tardé à réagir, il n’en demeure pas moins que la situation actuelle, en termes de rupture de médicaments, n’est pas acceptable pour les Français. Mme la ministre des solidarités et de la santé, Agnès Buzyn, présentera dans quelques jours un plan d’action destiné à éviter la pénurie de médicaments et à avoir une visibilité sur la gestion des stocks. (M. François Patriat applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Jean-François Rapin, pour la réplique.
M. Jean-François Rapin. Votre réponse est celle que nous pouvons lire dans la presse, mais, sur le terrain, la situation est bien différente !
Je suis médecin. Aujourd’hui, mes prescriptions de cortisone ne sont pas honorées. Les patients ont du mal à en trouver, c’est une certitude : prenez-en acte !
Sur ce sujet, l’anticipation a été très mauvaise. Pourquoi en arrive-t-on à des ruptures de stock ? Tout simplement parce que nous gérons une médecine à bas coût, dont la pénurie est la variable d’ajustement. Remédiez très vite à cette situation. Sinon, nous rencontrerons bientôt d’énormes difficultés sanitaires ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)
violences sexuelles dans le monde universitaire
M. le président. La parole est à Mme Dominique Vérien, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
Mme Dominique Vérien. Ma question s’adresse à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Alors que le Sénat vient de présenter son rapport intitulé « Violences sexuelles sur mineurs : pouvoir confier ses enfants en toute sécurité », je découvre avec stupeur que les actes dont on souhaite les protéger, notamment à l’école, se pratiquent à l’université !
Ainsi, un collectif de 500 chercheurs a dénoncé l’omerta qui règne sur les violences sexistes et sexuelles dans le milieu universitaire. J’apprends que ces affaires sont censées être traitées selon des procédures disciplinaires laissées à la discrétion du président de l’établissement ou de la formation disciplinaire du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche, dont la compétence et la probité ont été ouvertement mises en cause par deux articles de Mediapart datés du 20 mai dernier.
Le nombre de procédures et les sanctions appliquées sont dérisoires au regard de l’ampleur du phénomène. Les victimes sont entendues comme simples témoins ou ne sont carrément pas auditionnées, et elles ne disposent d’aucun mécanisme d’appel, contrairement aux agresseurs !
La procédure disciplinaire est une première étape importante pour la victime, qui peut ainsi être reconnue comme telle. Cela permet surtout d’arrêter immédiatement les agissements des agresseurs. Mais encore faut-il que procédure disciplinaire il y ait ! La peur doit changer de camp, madame la ministre ! Vous le savez d’ailleurs, pour avoir annoncé l’ouverture de cellules de veille dans chaque université et proposé une large campagne de formation du personnel des Crous sur ces questions.
Nous sommes fin mai 2019 : combien d’universités sont-elles dotées de cellules de veille ? Comment répondre aux attentes des victimes qui se heurtent à des procédures disciplinaires opaques et apparemment peu rigoureuses ? (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question, d’une actualité brûlante.
En mars 2018, j’ai demandé à l’ensemble des établissements de se doter de cellules permettant de porter la parole des victimes. Ces lieux de prévention et d’écoute permettent à cette parole de se libérer et d’être entendue. Ces cellules ont pour vocation d’accompagner les victimes, y compris dans la démarche essentielle de porter plainte.
Les procédures disciplinaires dans les établissements d’enseignement supérieur sont effectivement régies par des organisations que nous devons impérativement revoir. La semaine dernière, le président de l’université Paris 1, où deux cas ont récemment défrayé la chronique, me disait à quel point les universités sont démunies pour prendre en charge ce type de procédures disciplinaires.
C’est la raison pour laquelle j’ai lancé une concertation visant à définir un nouveau mode d’organisation, de façon que non seulement les victimes puissent être entendues, mais aussi que leur plainte puisse aboutir à des sanctions disciplinaires exemplaires. Cette concertation concernera l’ensemble de la communauté universitaire, et des procédures spécifiques seront mises en place.
Marlène Schiappa et moi-même menons, avec l’ensemble du Gouvernement, une politique visant à libérer la parole et à faire en sorte que ces violences sexistes et sexuelles disparaissent de notre société. Vous pouvez compter sur mon entière détermination à agir, sans tabou et sans aucune omerta. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)
M. le président. La parole est à Mme Dominique Vérien, pour la réplique.
Mme Dominique Vérien. Madame la ministre, les violences sexuelles, outre qu’elles détruisent durablement leurs victimes, ont un coût très lourd pour la société en termes de santé publique. Éradiquer ce fléau où qu’il se manifeste –famille, école, église, université – est une œuvre de salut public. Merci de nous aider à libérer la parole, afin de libérer les victimes. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste.)
renault
M. le président. La parole est à M. Frédéric Marchand, pour le groupe La République En Marche. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
M. Frédéric Marchand. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie et des finances.
Le groupe Renault a annoncé, ce lundi 27 mai, avoir reçu une proposition de Fiat Chrysler Automobiles, FCA, concernant une potentielle fusion à parité.
Renault a fait savoir que son conseil d’administration avait décidé d’examiner avec intérêt l’opportunité d’un tel rapprochement, qui, en cas de fusion, ferait de la nouvelle entité le troisième groupe automobile mondial, et même le premier en y ajoutant le tandem Nissan-Mitsubishi.
L’idée est bien évidemment d’unir ses forces et de profiter de synergies considérables et indéniables, alors que le secteur automobile doit investir massivement dans la voiture électrique, connectée et autonome. En cumulé, le nouveau groupe réaliserait au moins 170 milliards d’euros de chiffre d’affaires, 10 milliards d’euros de résultat opérationnel et 8 milliards d’euros de résultat net. Les deux groupes sont bien placés sur des marchés complémentaires et espèrent aussi se renforcer sur de nouveaux secteurs géographiques.
Le secteur automobile est confronté à des défis majeurs, le véhicule autonome et la voiture électrique exigeant des investissements massifs. Seuls de grands ensembles industriels seront en capacité d’effectuer les investissements qui assureront les emplois de demain dans l’industrie automobile. Cette fusion peut permettre à Renault-Nissan et à FCA de constituer un champion européen compétitif, avec des bases européennes.
En matière de véhicules, c’est une nouvelle ère qui commence, avec la fin programmée des moteurs thermiques en France d’ici à 2040. À cet effet, Renault a déjà investi l’an dernier un milliard d’euros dans les usines de Douai et de Maubeuge, où est fabriquée la Kangoo électrique. Le groupe fusionné pourrait devenir le leader mondial dans un secteur en pleine évolution, avec un fort positionnement dans les nouvelles technologies.
Si cette fusion peut permettre de relever les défis de demain dans le secteur automobile, elle soulève aussi des questions. J’en vois deux, essentielles : ce projet de fusion représente-t-il une menace pour l’emploi et les intérêts de l’État ? Sa mise en œuvre aurait-elle une incidence sur l’alliance Renault-Nissan ? (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances.
M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie et des finances. Monsieur le sénateur, je partage votre analyse sur le secteur automobile. Avec la propulsion électrique, le stockage de l’énergie électrique, le véhicule autonome ou le véhicule connecté, il est confronté, en ce début de XXIe siècle, à des défis aussi importants que ceux qu’il a rencontrés au début du XXe siècle.
Pour garder une industrie automobile, il faudra que chaque nation investisse des dizaines de milliards d’euros. Nous ne pouvons pas le faire seuls. Une consolidation du secteur automobile est nécessaire partout dans le monde. De ce point de vue, l’offre de Fiat est une belle opportunité pour consolider notre champion industriel national automobile qu’est Renault. Nous veillerons donc à ce que les discussions se poursuivent de manière constructive entre Renault et Fiat.
Pour que cette opération puisse être menée à bien dans de bonnes conditions, j’ai demandé au président de Renault, Jean-Dominique Senard, d’apporter un certain nombre de garanties.
La première garantie concerne évidemment les sites industriels et les emplois industriels en France. Nous voulons qu’aucune fermeture de site industriel n’intervienne en France à la suite de cette fusion.
La deuxième garantie porte sur le maintien de l’alliance entre Renault et Nissan. Créée voilà vingt ans, cette alliance fonctionne bien, et nous voulons que la fusion s’inscrive dans ce cadre. La semaine dernière, j’ai eu un entretien avec mon homologue japonais sur cette question, au cours duquel nous avons réaffirmé notre volonté de renforcer l’alliance entre Renault et Nissan. Jean-Dominique Senard est aujourd’hui au Japon pour engager les discussions avec nos partenaires japonais.
La troisième garantie a trait à la gouvernance. Il faut évidemment que les intérêts de l’État, de la Nation française soient bien représentés au sein de la gouvernance de ce futur groupe.
Enfin, une dernière garantie concerne la nouvelle filière de batteries électriques franco-allemande et, demain, européenne que nous avons lancée. Nous souhaitons que le futur ensemble achète ces batteries électriques, afin de garantir le développement de cette filière.
Cette fusion peut être une belle opportunité pour notre industrie automobile, à condition que les garanties que je viens d’évoquer soient apportées. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
rémunération des infirmiers