M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
Mme Véronique Guillotin. Alors que l’examen du projet de loi relatif à l’organisation et la transformation du système de santé est en cours, plusieurs questions restent en suspens, notamment celle de l’attractivité des professions paramédicales.
Si les métiers d’aide-soignant et d’auxiliaire de vie souffrent d’une sévère désaffection depuis plusieurs années déjà, s’y ajoute désormais une véritable crise des vocations chez les infirmiers. Les services hospitaliers rencontrent en effet de grandes difficultés à recruter et, surtout, à garder leur personnel, et les écoles d’infirmières peinent à se remplir.
Les causes sont multiples, mais la question d’une juste rémunération revient invariablement. Nous pouvons voter toutes les lois de réorganisation possibles, en l’absence d’un financement à la hauteur des enjeux et d’une reconnaissance de nos personnels soignants, le système se tend et risque la rupture. J’en veux pour preuve le fait que de très nombreux établissements peinent à assurer un exercice optimal de leur activité et sont souvent contraints de recourir à des intérimaires, bien plus coûteux.
Je souhaite également évoquer les problèmes très spécifiques des territoires frontaliers. Dans le Grand Est, 4 800 infirmiers, aides-soignants et éducateurs franchissent chaque jour la frontière pour aller travailler. Un article récent d’un grand quotidien en fait état et pointe des conditions générales d’exercice bien plus favorables chez nos voisins, en particulier au Luxembourg, où le salaire moyen d’une infirmière en début de carrière est quasiment le double de ce qu’il est en France. La quasi-totalité de nos voisins proposent également des rémunérations plus élevées.
La situation de nos établissements présente un caractère d’urgence. Les personnels soignants sont épuisés, les directions d’établissement peinent à trouver des solutions. Tous attendent des mesures rapides et concrètes de nature à les rassurer. Quelles dispositions entendez-vous prendre, y compris à une échelle transfrontalière, pour remédier au manque d’attractivité de ces métiers ? (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Indépendants – République et Territoires.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice, le Gouvernement partage votre préoccupation quant à la moindre attractivité financière des postes ouverts en France.
Les infirmiers, comme les aides-soignants et les auxiliaires de vie, jouent un rôle central dans notre système de santé et sont indispensables, au quotidien, au fonctionnement de nos établissements de santé. Aussi cette situation ne peut-elle que nous préoccuper.
Les rémunérations pratiquées dans des pays frontaliers interrogent. Nous devons examiner avec les agences régionales de santé concernées quelles solutions pourraient être envisagées.
Les établissements de santé de ces régions frontalières ont déjà pris des initiatives tendant à la création d’observatoires transfrontaliers des personnels de santé. Ces expériences conduites entre les différents pays permettent de mieux coordonner les politiques de recrutement, mais aussi de fidéliser le personnel, par exemple en finançant les formations initiales.
Sur l’ensemble du territoire, nous nous engageons dès à présent à améliorer les conditions d’emploi à l’hôpital en deuxième partie de carrière pour les professionnels paramédicaux et à créer une prime de coopération pour les infirmiers de la fonction publique hospitalière engagés dans un protocole de coordination.
Parallèlement à cette réflexion, les travaux conduits par le ministère pour revaloriser les métiers se poursuivent. Le sixième avenant de la convention des infirmiers libéraux a été signé fin mars avec l’assurance maladie. Il comporte une série d’éléments de revalorisation d’actes techniques importants et des mesures structurantes, permettant de beaucoup mieux reconnaître et valoriser l’intervention et le rôle des infirmiers.
Dans le cadre de la stratégie Ma santé 2022, nous avons également engagé plusieurs réformes. Désormais, les étudiants en soins infirmiers pourront bénéficier des mêmes droits que les étudiants universitaires. Par ailleurs, nous développons de nouvelles compétences pour les infirmiers, avec la reconnaissance d’infirmiers en pratique avancée, disposant de prérogatives élargies. Cela constitue une évolution majeure pour notre système de santé. Nous élargissons également leurs missions en matière de prévention, notamment de vaccination.
Concernant les aides-soignants, nous avons également prévu un meilleur accompagnement, avec par exemple l’actualisation des référentiels d’activité. (M. François Patriat applaudit.)
projet dit de la montagne d’or
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
M. Fabien Gay. Huit cents hectares en pleine forêt primaire d’Amazonie, dix tonnes d’explosifs et de cyanure par jour, l’équivalent en énergie de l’agglomération de Cayenne : voilà une présentation rapide du projet de mine « Montagne d’or » en Guyane.
Depuis 2014, le Président Macron est un fervent partisan de ce projet, mais les peuples autochtones, les ONG et 70 % du peuple guyanais dans son ensemble y sont opposés. À quinze jours du scrutin européen, et avant de recevoir le chef amérindien Raoni, le Président a changé son fusil d’épaule, sans doute en raison des mobilisations, notamment de la jeunesse, contre ce projet et pour le climat. Il a déclaré que ce projet « n’était pas compatible avec une ambition écologique et en matière de biodiversité ».
Mais depuis, le flou persiste. Quelle est donc la position officielle du Gouvernement ? Est-ce celle du Premier ministre, qui assure que c’est « en l’état » que le projet n’est pas acceptable, ce qui donne à penser qu’il pourrait l’être après une réforme du code minier, en décembre, ou bien celle du ministre de la transition écologique et solidaire, selon lequel le projet ne se fera pas, comme l’a répété la porte-parole du Gouvernement, acculée par de nombreuses questions sur un plateau de télévision, dimanche soir ?
Si nous disons « chiche » à une réforme du code minier instaurant l’interdiction de l’emploi du cyanure pour l’extraction minière, le projet « Montagne d’or » n’est acceptable, ni aujourd’hui « en l’état », ni demain, avec ou sans réforme.
Madame la secrétaire d’État, nous attendons une réponse claire et sans langue de bois : le projet « Montagne d’or » est-il, oui ou non, définitivement enterré ? (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et sur des travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Mme Brune Poirson, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur Gay, une fois n’est pas coutume, nous partageons la même vision. Peut-être faut-il y voir d’ailleurs notre capacité à rassembler… (Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain.)
Bien que nous ne soyons plus en période électorale, vous cherchez à mettre des coins entre le Président de la République, le Premier ministre ou des membres du Gouvernement. Or il n’y en a absolument pas !
Je tiens à rappeler, en reprenant les termes qu’a employés le Premier ministre et le ministre d’État, que le projet de la Montagne d’or ne se fera pas.
Ce projet est incompatible avec les exigences de protection de l’environnement, de préservation de la biodiversité et de lutte contre le changement climatique qui sont défendues par ce gouvernement et exigées par les Français. Je le répète donc, comme le ferait chaque membre du Gouvernement qui serait appelé à s’exprimer sur cette question : il ne se fera pas !
Nous allons même encore plus loin, monsieur le sénateur : en sortant du premier conseil de défense écologique, lequel représente en soi une avancée en termes de méthode et permettra d’obtenir des résultats concrets sur la transition écologique – c’est l’une de nos priorités –, le ministre d’État a annoncé que nous allions réformer en profondeur le code minier.
Au terme de cette réforme, la délivrance d’un titre minier sera soumise à trois conditions : la prise en compte des enjeux environnementaux ; la prise d’engagements quant aux impacts socioéconomiques du projet ; enfin, le consentement des populations.
Si d’aventure un dossier était déposé dans le cadre du projet de la Montagne d’or, il serait examiné à l’aune de nos standards environnementaux, donc de la réforme que nous envisageons. (Vives exclamations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. Fabien Gay. Et voilà !
Mme Brune Poirson, secrétaire d’État. Je conçois, monsieur le sénateur, que vous soyez ennuyé de devoir concéder que nous agissons et prenons des décisions fortes en matière environnementale. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, du groupe socialiste et républicain et du groupe Les Républicains.) Mais la réalité est là : le projet de la Montagne d’or ne se fera pas, et nous avons le courage de réformer en outre le code minier.
Je le répète pour la quatrième fois, ce projet ne se fera pas,…
M. le président. Il faut conclure !
Mme Brune Poirson, secrétaire d’État. … et nous irons même encore plus loin, puisque le code minier sera réformé. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour la réplique.
M. Fabien Gay. Voilà le vrai visage du Gouvernement ! (Exclamations.) Je ne sais pas si vous êtes « champions de la terre », mais vous êtes en tout cas champions du blabla politique !
Oui, il faut en finir avec le projet de la Montagne d’or, l’enterrer définitivement. Il faut faire de même avec l’ensemble des projets miniers, qui menacent 360 000 hectares en Amazonie française, et assurer l’égalité républicaine dans nos outre-mer, afin qu’ils puissent se développer.
M. le président. Il faut conclure !
M. Fabien Gay. Le minimum est de respecter les accords de Guyane et d’établir l’égalité républicaine en matière d’infrastructures et de services publics. (Protestations sur les travées du groupe La République En Marche.)
M. le président. Veuillez conclure, s’il vous plaît !
M. Fabien Gay. Vous verrez alors que la jeunesse guyanaise, qui a une grande force, pourra elle aussi se développer. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain.)
suppression d’emplois à general electric (ii)
M. le président. La parole est à M. Cédric Perrin, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Cédric Perrin. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie et des finances.
Monsieur le ministre, il y a moins de deux mois, j’exprimais dans cet hémicycle les craintes des salariés de General Electric, GE, et des élus du Territoire de Belfort.
Il y a deux mois, le gouvernement auquel vous appartenez affirmait suivre avec la plus grande attention la réorganisation de GE. Il expliquait souhaiter accompagner le développement d’activités nouvelles, telles que l’aéronautique, le grand carénage ou encore l’hydrogène, auquel je crois beaucoup.
Plus inquiétant, le Gouvernement excluait d’office son soutien aux projets liés aux énergies fossiles, notamment le gaz, comme l’exprimait votre secrétaire d’État dans cet hémicycle le 4 avril dernier. Vous avez même personnellement affirmé qu’il n’y avait pas d’avenir pour le marché des turbines à gaz.
C’est aujourd’hui que la nouvelle tant redoutée est tombée. Une catastrophe industrielle pour mon département et pour le nord de la Franche-Comté : 1 044 emplois seront supprimés par General Electric à Bourogne, à Boulogne-Billancourt et à Belfort, site qui va perdre 985 de ses salariés !
Un salarié sur quatre sera touché. Des drames s’annoncent ; des familles vont se trouver en difficulté. Mes premières pensées vont, bien entendu, aux femmes et aux hommes touchés par ce tsunami industriel.
Monsieur le ministre, l’heure n’est plus aux petits arrangements calendaires, comme avec cette annonce que GE a opportunément retardée jusqu’au lendemain des élections européennes. Les salariés ont besoin de réponses concrètes.
Quels choix stratégiques le Gouvernement met-il en œuvre pour le redressement de l’industrie belfortaine ? Quels efforts de réindustrialisation êtes-vous en mesure de porter pour ce territoire ? Excluez-vous, oui ou non, les projets liés aux énergies fossiles ? (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances.
M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie et des finances. Monsieur Perrin, je partage totalement le choc qu’éprouvent les salariés, tous ceux qui travaillent sur le site de GE à Belfort et l’ensemble des élus locaux, que j’ai rencontrés à plusieurs reprises. Mais je ne suis pas là pour vendre des illusions.
Lorsque j’examine aujourd’hui la situation du marché des turbines à gaz, je constate – je rappelle les chiffres – que GE en vendait une centaine en 2008, qu’il en a vendu 29 en 2018, et que les perspectives pour 2019, 2020 et 2021 s’établissent autour d’une vingtaine. Or l’équilibre du point de charge sur les turbines à gaz, vous le savez aussi bien que moi, se situe au niveau d’une quarantaine de pièces par an, ce qui est la condition pour garantir la rentabilité du site.
Ce que je souhaite, c’est qu’il y ait un avenir industriel pour le site de GE à Belfort. Il me serait facile de vous dire que l’on va se battre pour les turbines à gaz, mais ce serait mentir aux salariés ! Vous me connaissez suffisamment pour savoir que telle n’est pas ma façon de faire de la politique. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
En revanche, je suis convaincu qu’il y a un avenir industriel pour le site de Belfort. Si nous y travaillons tous ensemble, notamment en utilisant les 50 millions d’euros du fonds qui a été mis à disposition pour réindustrialiser ce site avec d’autres projets, il y a de belles perspectives.
Il y a des perspectives pour l’aéronautique, qui faisaient partie des propositions que vous m’avez faites et auxquelles je souscris ; nous pouvons y travailler ensemble.
Il y a des perspectives dans le carénage des usines nucléaires, notamment pour leur démantèlement en France ou à l’étranger.
Il y a des perspectives également pour l’hydrogène. Je sais, monsieur le sénateur, que vous soutenez totalement ces projets, et le site de Belfort est très bien placé dans ce domaine. Là aussi, nous pouvons y travailler tous ensemble.
Je propose que nous nous rencontrions de nouveau, avec tous les élus de Belfort et de la région qui sont concernés, pour examiner attentivement chacune des solutions possibles et les investissements nécessaires.
On sait ainsi qu’il faudra faire des investissements supplémentaires si l’on veut développer la filière aéronautique à Belfort. Il nous faut examiner comment la région et l’État peuvent accompagner ces propositions et faire en sorte de rassurer l’ensemble des salariés, en leur disant que ce site a un avenir industriel.
M. le président. Il faut conclure !
M. Bruno Le Maire, ministre. Cela, vous le croyez profondément, et je le crois aussi. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
M. le président. La parole est à M. Cédric Perrin, pour la réplique.
M. Cédric Perrin. Monsieur le ministre, les salariés de GE sont éprouvés et ils demandent, évidemment, des actes. Il faut se battre pour eux ! Ce sont 11 % des emplois industriels de mon département qui vont être supprimés.
Il faut se battre pour la diversification, vous l’avez dit. Mais il faut aussi se battre pour l’avenir de la France et pour son avenir industriel. Baisser les bras à cause d’une baisse temporaire des commandes de turbines à gaz n’est pas un bon calcul ! Notre indépendance énergétique, notre savoir-faire industriel et nos compétences peuvent être entretenus.
M. le président. Il faut conclure !
M. Cédric Perrin. En effet, lorsque les commandes reviendront, il faudra que la France puisse y répondre ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
arrivée de sri lankais à mayotte
M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour le groupe La République En Marche. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
M. Thani Mohamed Soilihi. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.
Hier, dix-huit migrants en provenance du Sri Lanka ont été interpellés par les forces de l’ordre sur une plage de la commune de Bouéni, à Mayotte.
Cinq jours plus tôt, c’était un réseau international d’immigration clandestine de migrants en provenance de la République démocratique du Congo qui était identifié et démantelé par le groupe d’enquête sur la lutte contre l’immigration clandestine, le Gelic, créé spécifiquement à Mayotte en juin 2018.
Au lendemain des élections européennes, à l’issue desquelles le Rassemblement national est arrivé largement en tête à Mayotte, une nouvelle filière d’immigration semble faire son apparition dans la commune de Bouéni, qui, je le rappelle, totalise le triste score record de vote pour ce parti, avec 68 % des suffrages.
Vous le savez, Mayotte est déjà sclérosée par une immigration clandestine massive en provenance des Comores. Alors même que le plan présenté par Mme la ministre des outre-mer en mai 2018, à la suite du mouvement social contre l’insécurité, produit des résultats tangibles, des kwassas-kwassas accostent encore chaque jour sur nos côtes.
Monsieur le ministre de l’intérieur, je vous sais déterminé à lutter contre l’immigration clandestine dans ce département. Aussi, pouvez-vous nous détailler l’action du Gouvernement mise en œuvre à Mayotte pour lutter contre l’arrivée de ces embarcations et, plus généralement, contre l’immigration irrégulière, véritable fonds de commerce du Rassemblement national ?
Comment faire en sorte que les Mahorais cessent de s’en remettre à des partis populistes et extrémistes, qui les oublient sitôt les échéances électorales passées ? (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – M. Jean-Marc Gabouty applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Christophe Castaner, ministre de l’intérieur. Monsieur Thani Mohamed Soilihi, vice-président du Sénat, vous m’interpellez, à la fois, sur l’arrivée hier de dix-huit migrants en provenance du Sri Lanka et, plus globalement, sur notre volonté de lutter à vos côtés contre l’immigration irrégulière dans votre département.
Sur le premier point, je veux vous indiquer que dès hier, sous l’autorité du procureur de la République, le pilote a été identifié comme étant susceptible d’être un passeur, et placé en garde à vue. Les dix-huit passagers de ce bateau se sont vu notifier immédiatement un refus d’entrer et ont été placés en zone d’attente.
J’ai demandé à mes services, ainsi qu’à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, l’Ofpra, de faire en sorte que l’instruction soit la plus rapide possible. Il se trouve, en effet, que les Sri Lankais qui sont arrivés sur place ont tout de suite demandé l’asile. Leurs dossiers individuels seront examinés. Les auditions sont en cours ; elles s’achèveront très vite.
Vous avez également évoqué, monsieur le sénateur, le travail du Gelic. Outre les mouvements presque « traditionnels » que nous connaissons à Mayotte, il y a aussi des arrivées importantes depuis l’Afrique. Là encore, on voit combien ces migrations sont organisées par des gens qui font commerce de la misère humaine et contre lesquels nous devons agir.
Il est absolument indispensable de veiller à ce que la pression migratoire irrégulière sur Mayotte baisse, pour les raisons que vous avez évoquées : le développement anarchique de l’habitat et du travail illégaux, un fort taux de chômage, enfin toute une île et sa population qui n’en peuvent plus. Nous devons donc agir.
Nous avons commencé à le faire au travers de la montée en puissance de la police aux frontières : 90 agents supplémentaires ont été recrutés en deux ans. Par ailleurs, la gendarmerie a vu ses effectifs augmenter de 59 agents.
À la suite de ma visite sur l’île à vos côtés, monsieur le sénateur, nous avons aussi décidé de renforcer nos moyens d’action en plaçant, par exemple, des intercepteurs à Longoni, afin d’augmenter notre capacité d’interpellation.
Je puis ainsi vous indiquer que, sur les trois premiers mois de l’année, les résultats sont là : nous constatons une augmentation de plus de 30 % des éloignements. Bien évidemment, il nous faudra poursuivre cet effort. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
maisons de services au public
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Richer, dont je salue la première question dans cet hémicycle, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Marie-Pierre Richer. Ma question s’adresse à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Madame la ministre, lors de sa conférence de presse, le 25 avril dernier, le Président de la République a lancé une idée novatrice, inspirée du modèle canadien, en annonçant la création dans chaque canton d’une maison France services où seraient regroupés les services de l’État et tous les opérateurs.
Quel ne fut pas mon étonnement ! S’inspirer du modèle canadien, alors que, en France, bon nombre d’élus locaux ont mis en place de telles structures depuis de si nombreuses années… En effet, depuis la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens avec les administrations, ces maisons France services portent déjà un nom : elles s’appellent les maisons de services au public, les MSAP.
Bien auparavant, certaines existaient en tant que relais de services publics. Aujourd’hui, elles sont majoritairement portées par les collectivités, mais également par La Poste.
Je me permets de rappeler que, pour être labellisées, les MSAP doivent contractualiser avec au moins deux opérateurs dans le domaine social et dans celui de l’emploi, être ouvertes au public au moins vingt-quatre heures par semaine et mettre à disposition des locaux et des moyens informatiques.
Je veux bien saluer l’idée affichée de proximité. En revanche, je m’interroge sur l’intérêt de proposer une maison France services dans chaque canton, alors que certains d’entre eux sont parfois plus grands que les communautés de communes.
Avons-nous la mémoire si courte que nous en avons oublié que la première de toutes les maisons communes, celle qui appartient à toutes et à tous, qui est connue et reconnue, s’appelle la mairie ? (Eh oui ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Pendant très longtemps, les services publics dont nous parlons ont tenu des permanences. Peu à peu, celles-ci se sont raréfiées, jusqu’à disparaître.
Alors, oui à la proximité, oui à l’accompagnement de nos concitoyens, mais non à des annonces qui masquent la réalité des actions déjà portées et développées par les élus locaux !
Madame la ministre, mes questions sont les suivantes.
Quelle est la plus-value de ces maisons France services ? Qui les portera ? Quel soutien envisagez-vous d’apporter aux MSAP déjà existantes et portées pour l’essentiel par les collectivités ? (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Madame Richer, je suis ravie de répondre – « en voisine », si je puis dire – à la première question que vous posez.
Dans un souci d’établir une plus grande proximité, ce qui est notre premier objectif, le Président de la République a annoncé la création des maisons France services, dans le prolongement des actuelles MSAP.
Le Premier ministre a, quant à lui, annoncé la création de 500 nouvelles MSAP, qui seront installées là où il y a des besoins, c’est-à-dire là où elles n’existent pas encore. Cela sera fait, comme par le passé, en collaboration avec l’opérateur La Poste, qui travaille à nos côtés au lancement de ces nouvelles maisons, et avec les collectivités territoriales, qui soutiennent actuellement la majeure partie des 1 340 MSAP. Dans le Cher, par exemple, il y a 14 MSAP, dont 10 sont portées par des collectivités et 4 par La Poste.
Autre objectif : au-delà de la plus grande proximité, il s’agit de rendre de nouveaux services. Ce minimum, dont vous avez parlé, nous allons l’augmenter. En effet, les services rendus par les MSAP sont très inégaux : certaines en apportent beaucoup, et d’autres bien moins. Nous voulons que soit proposé un panier de services de qualité, afin que tous nos concitoyens, quel que soit le lieu où se trouve la MSAP, puissent obtenir la même réponse.
Enfin, il ne faut pas oublier les financements. Comme c’est le cas aujourd’hui, le Gouvernement financera annuellement, sur une base forfaitaire de 30 000 euros, les maisons France services.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. La Banque des territoires apportera également sa participation financière. Quant à la formation des personnes chargées d’animer les maisons France services, elle sera assurée par le Centre national de la fonction publique territoriale, le CNFPT. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)
convocation de journalistes par la direction générale de la sécurité intérieure
M. le président. La parole est à Mme Claudine Lepage, pour le groupe socialiste et républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme Claudine Lepage. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ces derniers mois, plusieurs journalistes ont été convoqués par les services de la Direction générale de la sécurité intérieure, la DGSI, simplement pour avoir fait leur travail de journaliste : enquêter, trouver des sources, révéler l’utilisation d’armes françaises au Yémen ou, pour Ariane Chemin, avoir dévoilé qu’un chargé de mission de l’Élysée faisait, à l’occasion, le coup de poing lors de manifestations, et qu’il entretenait des relations pour le moins douteuses.
Ces convocations, cette volonté d’intimidation, s’inscrivent dans un contexte plus large de défiance du Gouvernement vis-à-vis de ce contre-pouvoir qu’est la presse. Je pense notamment à l’arrestation de Gaspard Glanz lors de la manifestation du 1er mai dernier et à son placement en garde à vue pendant quarante-huit heures, ou aux nombreux journalistes indépendants blessés alors qu’ils couvraient les manifestations des gilets jaunes.
Face à ce climat inquiétant et à ce qui s’apparente à une volonté d’intimider les journalistes, notre groupe tient à rappeler son attachement aux libertés fondamentales, à la liberté de la presse et à la protection des sources, sans lesquelles l’information ne serait plus la même.
À l’inverse, le Gouvernement et le Président de la République continuent de justifier, sous couvert de sécurité nationale ou de secret défense, l’injustifiable. Car comment appeler autrement la convocation de journalistes et du patron du groupe Le Monde par un service censé lutter contre les menaces terroristes ?
Madame la ministre de la justice, quand le Gouvernement va-t-il mettre un terme à ces pratiques qui fragilisent la liberté de la presse et ternissent considérablement l’image de liberté de notre pays à l’international ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)