M. le président. Mes chers collègues, il va être procédé, dans les conditions prévues par l’article 56 du règlement, au scrutin public solennel sur l’ensemble du projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé.
Ce scrutin, qui sera ouvert dans quelques instants, aura lieu en salle des conférences, parallèlement aux explications de vote sur la proposition de loi visant à permettre aux conseillers de la métropole de Lyon de participer aux prochaines élections sénatoriales.
Je remercie nos collègues Annie Guillemot, Michel Raison et Patricia Schillinger, secrétaires du Sénat, qui vont superviser ce scrutin.
Je rappelle qu’une seule délégation de vote est admise par sénateur.
Je déclare le scrutin ouvert pour une durée maximale de trente minutes et vais suspendre la séance pour quelques instants.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinq, est reprise à dix-neuf heures dix.)
M. le président. La séance est reprise.
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Participation des conseillers de la métropole de Lyon aux prochaines élections sénatoriales
Adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle les explications de vote et le vote sur la proposition de loi visant à permettre aux conseillers de la métropole de Lyon de participer aux prochaines élections sénatoriales (proposition n° 462, texte de la commission n° 552, rapport n° 551).
La conférence des présidents a décidé que ce texte serait discuté selon la procédure de législation en commission prévue au chapitre VII bis du règlement du Sénat.
Au cours de cette procédure, le droit d’amendement des sénateurs et du Gouvernement s’exerce en commission, la séance plénière étant réservée aux explications de vote et au vote sur l’ensemble du texte adopté par la commission.
La commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale, saisie au fond, s’est réunie le 5 juin 2019 pour l’examen des articles et l’établissement du texte. Le rapport a été publié le même jour.
proposition de loi visant à permettre aux conseillers de la métropole de lyon de participer aux prochaines élections sénatoriales
Article 1er
Le titre II du livre II du code électoral est ainsi modifié :
1° Le 3° de l’article L. 280 est complété par les mots : « et des conseillers métropolitains de Lyon » ;
2° Il est ajouté un article L. 282-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 282-1. – Pour l’application des dispositions du présent livre à la métropole de Lyon, les références au conseiller départemental et au président du conseil départemental sont remplacées respectivement par les références au conseiller métropolitain de Lyon et au président du conseil de la métropole de Lyon. »
Article 2
La présente loi entre en vigueur à compter du prochain renouvellement du Sénat.
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble du texte adopté par la commission, je vais donner la parole, conformément à l’article 47 quinquies de notre règlement, au rapporteur de la commission, puis au Gouvernement, pour sept minutes, et, enfin, à un représentant par groupe, pour cinq minutes.
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Claudine Thomas, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, depuis le 1er janvier 2015, la métropole de Lyon remplace la communauté urbaine de Lyon et, dans son périmètre, le département du Rhône. Un département, le Nouveau-Rhône, subsiste néanmoins, en dehors des limites de la métropole.
Contrairement aux autres métropoles, celle de Lyon est non pas un établissement public de coopération intercommunale, un EPCI, à fiscalité propre, mais une collectivité territoriale à statut particulier, régie par l’article 72 de la Constitution. Elle exerce les compétences d’un département et certaines compétences des communes.
À compter de mars 2020, le conseil de la métropole de Lyon sera composé de 150 membres, élus au suffrage universel direct. Contrairement à ce qui est prévu pour les EPCI, la représentation des communes n’y sera plus garantie, ce qui soulève de réelles difficultés sur le terrain.
La proposition de loi de François-Noël Buffet et de plusieurs de ses collègues vise un objectif plus immédiat : corriger une malfaçon du code électoral pour permettre aux conseillers de la métropole de Lyon de participer aux prochaines élections sénatoriales, prévues en septembre 2020.
Le 5 juin dernier, la commission des lois a adopté la proposition de loi sans modification, selon la procédure de législation en commission. Je salue le consensus qui a prévalu : les sept sénateurs du Rhône, élus en 2014 et soumis à réélection l’année prochaine, sont cosignataires du texte, ce qui démontre tout son intérêt.
Le périmètre de la circonscription n’évolue pas : il comprend la métropole de Lyon et le département du Nouveau-Rhône, soit 1,8 million d’habitants au total. Le corps électoral compte 3 500 grands électeurs, dont 3 410 issus des conseils municipaux.
En l’état du droit, les conseillers de la métropole de Lyon ne peuvent pas participer aux élections sénatoriales. En effet, ils ne figurent pas dans la liste des grands électeurs établie à l’article L. 280 du code électoral.
Cette situation n’a pas été souhaitée par le législateur. Elle résulte d’une erreur de coordination de l’ordonnance du 19 décembre 2014, comme l’a confirmé le secrétaire d’État en commission.
Par ailleurs, elle soulève un fort risque contentieux. En effet, en application de la jurisprudence constitutionnelle, l’élection des sénateurs doit respecter trois critères : l’élection par des élus locaux, la représentation de l’ensemble des collectivités territoriales et la prise en compte de la démographie. Or, dans le Rhône, ces deux derniers critères ne sont plus respectés : la métropole de Lyon n’est pas représentée pour l’élection des sénateurs, alors qu’elle constitue une collectivité territoriale à statut particulier et compte 1,35 million d’habitants.
C’est pourquoi la présente proposition de loi autorise les 150 conseillers de la métropole de Lyon à participer aux élections sénatoriales. Elle entrerait en vigueur dès le prochain scrutin, prévu en septembre 2020. Le nombre de grands électeurs dans le Rhône passerait ainsi de 3 500 à 3 650, soit une augmentation de 4,29 %.
Cette proposition de loi me semble indispensable pour sécuriser les élections sénatoriales dans le Rhône. Elle comble opportunément une lacune du code électoral : en tant qu’élus locaux, les conseillers de la métropole de Lyon ont vocation à participer aux élections sénatoriales.
L’enjeu est double : sur le plan juridique, il s’agit de respecter la jurisprudence constitutionnelle, qui impose que toutes les catégories d’élus locaux participent aux élections sénatoriales ; sur le plan politique, il convient d’assurer une certaine équité entre les conseillers métropolitains et les autres élus locaux.
Ce texte fait consensus entre les sénateurs du Rhône – je l’ai constaté lors de mes auditions. Ainsi, selon notre collègue Michel Forissier, il est indispensable pour réparer une inégalité de traitement entre élus.
Je rappelle que nous devons agir rapidement : sauf modification liée aux réformes institutionnelles, les prochaines élections sénatoriales dans le Rhône auront lieu dans tout juste quinze mois.
L’adoption de cette proposition de loi ne modifiera qu’à la marge les élections sénatoriales dans le Rhône : les 150 conseillers de la métropole de Lyon, qui seront issus de différentes familles politiques, ne représenteront que 4,11 % du collège électoral.
La commission s’est interrogée sur un éventuel déséquilibre démographique entre la métropole de Lyon et le département du Nouveau-Rhône. En effet, la métropole bénéficierait d’une meilleure représentation aux élections sénatoriales que le département : un conseiller métropolitain représenterait 9 030 habitants, contre 17 208 pour un conseiller départemental.
Après analyse, cette situation semble compatible avec la jurisprudence constitutionnelle, quelle que soit l’interprétation retenue.
Selon une première interprétation, la métropole et le département représenteraient deux strates de collectivités distinctes, la métropole exerçant les compétences d’un département, mais également certaines compétences des communes. Dans une telle hypothèse, la jurisprudence constitutionnelle n’impose pas de prendre en compte la population respective de la métropole et du département pour répartir les grands électeurs.
Selon une seconde interprétation, la métropole et le département appartiendraient à la même strate de collectivités territoriales. La jurisprudence constitutionnelle reste toutefois relativement souple : elle impose de prendre en compte la démographie des collectivités territoriales, pas de prévoir un nombre de grands électeurs proportionnel à leur population. Au sein de la strate communale, la ville de Lyon, par exemple, est moins bien représentée que les communes rurales, ce qui permet de représenter plus équitablement les territoires au sein de notre assemblée.
Monsieur le secrétaire d’État, nous espérons que cette proposition de loi consensuelle sera très prochainement inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale.
Je remercie les membres de la commission des lois de m’avoir confié ce premier rapport ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Laurent Nunez, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, voilà cinq ans, une nouvelle collectivité territoriale à statut particulier a été créée par la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite loi Maptam : la métropole de Lyon.
La nouvelle collectivité territoriale est dotée de pouvoirs importants, puisqu’elle assume sur le territoire de l’ancienne communauté urbaine de Lyon certaines compétences des communes et toutes les compétences du conseil départemental.
Cet acteur majeur du territoire est aussi un acteur politique, avec pour instance de gouvernance un conseil métropolitain de 150 membres, élus au suffrage universel direct : ils seront désignés, pour la première fois, concomitamment aux élections municipales de mars prochain.
Une difficulté est apparue, que Mme la rapporteure vient d’exposer : le législateur a commis un oubli dans la loi Maptam en ne prenant pas en compte la nécessaire participation des élus métropolitains lyonnais aux élections sénatoriales. Concrètement, l’ordonnance de 2014, prise en application de la loi Maptam, n’a pas ajouté la mention des élus du conseil métropolitain de Lyon à l’article L. 280 du code électoral. L’effet de cette absence est direct : si les élections sénatoriales se tenaient demain, en l’état du droit, les conseillers métropolitains de Lyon n’auraient pas le droit de vote.
Cette situation ne pouvait pas durer, avant tout parce qu’elle provoque un problème majeur de non-représentation politique. Nous devons d’autant plus y mettre un terme qu’elle ferait planer des risques, comme l’a expliqué Mme la rapporteure, sur les opérations électorales dans le Rhône.
En effet, si les élections sénatoriales se déroulaient en l’état du droit, soit sans les élus métropolitains parmi les grands électeurs, elles risqueraient très fortement d’être invalidées comme contraires non seulement à l’article L. 280 du code électoral, qui dispose que le collège électoral « assure, dans chaque département, la représentation des différentes catégories de collectivités territoriales », mais aussi à la Constitution, puisque le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 6 juillet 2000, a été plus explicite encore, jugeant que le Sénat devait être élu par un corps électoral représentant toutes les catégories de collectivités territoriales.
Nous partageons tous la même volonté d’éviter que pèse le moindre risque sur le prochain scrutin sénatorial. C’est pourquoi le Gouvernement soutient cette proposition de loi.
De son point de vue, le texte soumis à l’examen du Sénat ne comporte aucune difficulté. Il me paraît atteindre simplement et efficacement l’objectif qu’il vise : inscrire les conseillers métropolitains de Lyon sur la liste des grands électeurs pour les élections sénatoriales.
Je remercie François-Noël Buffet d’avoir déposé cette proposition de loi et je salue le travail mené par chacun, ainsi que l’esprit de consensus qui a régné pendant nos travaux. Je félicite Mme la rapporteure pour le travail qu’elle a accompli dans le cadre de son premier rapport.
Cet esprit de consensus, madame la rapporteure, mesdames, messieurs, les sénateurs, Christophe Castaner et moi-même le porterons à l’Assemblée nationale. Vous pouvez compter sur notre vigilance pour que la proposition de loi soit adoptée et promulguée avant les prochaines élections sénatoriales ! (Mmes Michèle Vullien et Nassimah Dindar applaudissent.)
M. le président. Merci, monsieur le secrétaire d’État, pour votre concision.
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de mon collègue sénateur du Rhône, que je salue, n’appelle pas d’objection particulière de la part de mon groupe : c’est ce qu’on pourrait appeler un texte de bon sens. En effet, il s’agit simplement d’assurer l’égalité en permettant aux conseillers métropolitains de Lyon de participer aux prochaines élections sénatoriales.
Je ne rouvrirai pas les débats que nous avons eus lors de l’examen du projet de loi dont est issue la loi Maptam ; en cinq minutes, cela me serait impossible, et puis le temps a passé.
Reste que la situation nous invite à réfléchir sur ces lois – la loi Maptam, la loi NOTRe, notamment – dont certaines dispositions votées de façon parfois un peu rapide, quelquefois à la faveur de petits arrangements, nous obligent, quelques mois ou quelques années plus tard, à modifier, compléter ou ajuster, pour les rendre conformes et applicables, des dispositifs pourtant structurants pour l’organisation de notre pays.
Un problème demeure, que M. le secrétaire d’État a évoqué : le mode de scrutin qui régira la désignation des conseillers métropolitains de Lyon.
Il s’agit d’un problème politique, que nous avons dénoncé dès le départ : au sein de la métropole de Lyon – cas particulier, puisqu’elle vaut aussi département –, un certain nombre de communes ne seront plus représentées, compte tenu du mode de scrutin choisi.
On peut tourner les choses dans tous les sens : au vu des circonscriptions qui ont été découpées, des formations politiques et des enjeux électoraux, nous pouvons tous reconnaître que, demain, des communes ne seront plus représentées. D’où les propositions faites par le Sénat il y a peu sur la nécessité d’un travail avec l’ensemble des maires au sein de la métropole – je ne reviens pas sur les amendements qui ont été déposés.
L’autre difficulté qui rend fondamental le travail qui devra être fait dans la future gouvernance de la métropole, c’est qu’un certain nombre de communes seront représentées, mais pas par leur majorité. Il faudra donc gérer ce paradoxe : des opposants, y compris parfois les plus extrêmes, participeront aux débats de la métropole, quand les maires en seront totalement exclus. Cette situation est d’autant plus surprenante que, encore une fois, les compétences de la métropole de Lyon seront importantes, tant pour la vie des communes et leur administration que pour l’ensemble de la population qui y réside.
Peut-être faudra-t-il que le Sénat se saisisse de la question à l’issue du rendez-vous électoral de 2020, en examinant les incidences de cette situation sur la vie démocratique et la place réellement donnée à chaque commune de la métropole dans les deux ou trois années qui suivront.
De façon collective et dans le respect de la liberté des collectivités territoriales, à laquelle nous sommes toutes et tous très attachés, nous devons, s’agissant d’un cas particulier – la métropole de Lyon –, faire preuve d’une vigilance particulière pour que, comme nous le souhaitons tous, la commune reste l’échelon de base de la démocratie ! (Mmes Mireille Jouve et Michèle Vullien applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Gilbert-Luc Devinaz. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est la deuxième fois en moins d’un mois que la métropole de Lyon s’invite dans les débats de cette illustre assemblée.
Début mai, à l’occasion de l’examen de la proposition de loi tendant à renforcer les synergies entre les conseils municipaux et les conseils communautaires, François-Noël Buffet, par un amendement relatif à la conférence métropolitaine, a déjà lancé un débat. Cet après-midi, nous allons débattre du statut spécifique de cette collectivité, à la faveur de la proposition de loi visant à permettre aux conseillers métropolitains de participer aux prochaines élections sénatoriales.
Ce texte corrige une lacune juridique : la métropole de Lyon est une collectivité territoriale à statut particulier, dont, à partir de 2020, les conseillers pourront ne pas être conseillers municipaux, mais ces conseillers métropolitains, comme il a été rappelé, ne figurent pas dans le collège électoral pour l’élection des sénateurs du Rhône. Or tout justifie que ces élus participent aux futures élections sénatoriales.
D’accord pour combler cette lacune de droit, les sénateurs socialistes du Rhône ont cosigné la proposition de loi. Mon intervention pourrait donc s’arrêter là.
Toutefois, ce ne sera pas tout à fait le cas. Car cette omission bientôt corrigée ne doit pas masquer le problème de fond des institutions métropolitaines, celui de l’identité d’une métropole qui est actuellement dans une période transitoire.
Cette collectivité dispose d’une double compétence : celle d’une intercommunalité et celle d’un département. Son identité n’est pas achevée, et plusieurs modèles se profilent, comme l’ont souligné mes collègues Claude Raynal et Charles Guené dans leur rapport d’information. « Affaire d’hommes et de circonstances », encore inachevée, cette métropole pose aujourd’hui de nombreuses questions institutionnelles, dont deux me paraissent fondamentales : l’absence formelle des maires dans les futures institutions et l’absence des habitants à des échelons de proximité.
En mai dernier, Annie Guillemot et moi-même avons défendu plusieurs amendements visant à corriger cette absence des maires. Nous souhaitions renforcer le pouvoir d’avis de la conférence des maires, seule instance où ces derniers siègent en tant que tels. Nous voulions renforcer aussi le pouvoir de consultation des conférences territoriales, déclinaisons locales de la conférence des maires. Ces amendements ont été rejetés, au motif que leurs dispositions rigidifiaient l’exercice du mandat local et qu’il revenait à la collectivité territoriale de résoudre ces lacunes.
Nous avions tout de même obtenu le changement de nom du texte, afin de l’adapter à la métropole de Lyon, grâce à un amendement de Mme Annie Guillemot.
Cet après-midi, nous débattons de nouveau d’un sujet technique lié à cette institution originale. Ne serait-il pas temps de se poser la question d’un texte spécifique pour une métropole à statut spécifique ? Légiférons dans le cadre d’un grand texte général, et non par une accumulation de corrections techniques !
Cela nous donnerait l’occasion de nous interroger sur les conséquences en termes de gouvernance de ce statut particulier et de réfléchir ensemble à des questions aussi importantes que celle des échelons de proximité entre la métropole et ses habitants. Sans proximité, la métropole risque un destin proche de celui de l’Union européenne : s’éloigner in fine des habitants qu’elle est censée représenter, avec les conséquences électorales que cela peut provoquer.
Cette réflexion peut avoir lieu à l’occasion d’une future réforme de la décentralisation annoncée par le Président de la République ou plus tard, après une phase d’évaluation à l’issue du prochain mandat. Mais un texte de portée générale sur la métropole de Lyon fait défaut pour ce qui concerne le fonctionnement de cette dernière après 2020 et une éventuelle généralisation.
Je conclus en me félicitant de cette proposition de loi pour deux raisons.
Premièrement, ce texte met en lumière le rôle technique et précis du Sénat dans l’évaluation et l’amélioration de la loi.
Deuxièmement, il illustre l’esprit de consensus et d’intérêt général qui a prévalu et nous a conduits à le cosigner : nous le voterons. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur des travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Mireille Jouve. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
Mme Mireille Jouve. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, conjointement à la tenue des prochaines élections municipales, les électeurs du Grand Lyon seront amenés à élire, dans le cadre d’un scrutin distinct, leurs conseillers métropolitains.
Depuis le 1er janvier 2015, date de la création de la nouvelle collectivité territoriale à statut particulier dénommée « métropole de Lyon », ce sont les anciens conseillers de la communauté urbaine qui siègent toujours en son sein. Ces derniers, comme tous les conseillers communautaires de France, sont susceptibles d’être parties prenantes du corps électoral aux élections sénatoriales de par leur mandat communal, ayant été désignés dans le cadre d’un fléchage.
Or le prochain renouvellement des conseillers métropolitains lyonnais devant désormais se faire dans le cadre d’un scrutin supra-communal, il convient de permettre aux futurs élus d’être associés aux prochaines élections sénatoriales.
En effet, dans un avis de 2000, le Conseil Constitutionnel a rappelé que « toutes les catégories de collectivités territoriales doivent […] être représentées » au Sénat.
Aussi, le groupe du RDSE souscrit à la proposition de notre collègue Jean-Noël Buffet, laquelle répare une omission et permet une modification du collège électoral des sénateurs dans le département du Rhône.
L’occasion nous est donnée de revenir brièvement sur la perspective de cette élection au sein du Grand Lyon, qui conduira, pour la première fois à l’intérieur d’une métropole, à faire exercer des compétences pour partie précédemment communales par des élus qui ne seront plus nécessairement également des élus municipaux.
Le Sénat, de manière constante, a rappelé son attachement à ce que la commune demeure la cellule de base dans toute forme de coopération intercommunale. Ce lien ne saurait être rompu sans menacer la pérennité de la structure communale.
Le Sénat a également pris acte du fait que, en l’état des règles institutionnelles, il n’est pas possible de garantir une représentation de l’ensemble des communes concernées au sein d’une métropole ayant acquis le statut de collectivité territoriale.
Dès son élection, le Président de la République a fait part de son intention de voir reproduit le modèle lyonnais et de favoriser la fusion des compétences départementales et métropolitaines, au sein des périmètres métropolitains, dans le cadre de la création de nouvelles collectivités territoriales.
Lille, Nantes, Bordeaux, Toulouse, Nice… : plusieurs tentatives de rapprochement ont été entreprises. Elles n’ont pas pu à ce jour faire l’objet de consensus locaux, comme cela avait été le cas à Lyon.
Les récents travaux de la commission des finances sur ces évolutions institutionnelles, en l’occurrence la fusion intervenue sur le territoire du Grand Lyon, ont conclu qu’une telle entreprise serait difficilement reproductible.
En effet, une large part de l’équilibre du modèle lyonnais réside notamment dans le fait que la dynamique économique et financière existant autour de l’aéroport Lyon-Saint Exupéry continue de profiter au département du Rhône. Une configuration différente aurait vraisemblablement entraîné un profond déséquilibre en termes de moyens et d’attractivité.
Un ultime projet de fusion demeure actif, celui de la métropole d’Aix-Marseille-Provence. Le Gouvernement souhaiterait le concrétiser sur l’ensemble du périmètre des Bouches-du-Rhône, écartant, notamment, ainsi le délicat sujet des ressources des territoires demeurant hors du périmètre métropolitain au sein d’un même département.
Là encore, si le projet aboutit – les élus bucco-rhodaniens attendent, monsieur le secrétaire d’État, avec une impatience désormais non dissimulée les propositions du Gouvernement –, il ne sera pas possible, en l’état du droit, d’assurer la représentation de l’intégralité des communes au sein de la future collectivité territoriale.
La nouvelle métropole marseillaise, comme c’est le cas à Lyon, s’emparera de compétences précédemment communales, qui affecteront largement l’action municipale. Mais toutes les communes ne pourront y être représentées ou, situation ubuesque, certaines pourraient l’être par des opposants aux maires en place.
Cet écueil appelle peut-être une évolution de nos règles institutionnelles. Si l’égalité des citoyens devant le suffrage est un principe à valeur constitutionnelle, la représentation de tous les territoires doit aussi être une préoccupation croissante au regard du creuset qui s’installe inexorablement entre les territoires urbains, périurbains et ruraux, une diversité de territoires que l’on serait susceptible de retrouver dans la future métropole marseillaise.
Au travers de la défense de l’échelon communal, le Sénat a toujours été soucieux de maintenir une véritable proximité, un lien physique avec nos concitoyens, et ce dans l’ensemble de nos territoires. Nous n’oublions pas que les Français veulent garder des élus « à portée d’engueulades » dans leurs communes, comme au Parlement d’ailleurs. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe Union Centriste. – Mme Michèle Vullien et M. Daniel Chasseing applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Michèle Vullien. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
Mme Michèle Vullien. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui une proposition de loi visant à corriger un vide juridique pour la collectivité à statut particulier qu’est la métropole de Lyon.
Tout d’abord, je souhaite remercier François-Noël Buffet de son initiative et de son association de tous les sénateurs du Rhône à sa démarche. Je remercie également Mme la rapporteure de nous avoir auditionnés.
Permettez-moi de poser le sujet en rappelant certains éléments, même si les orateurs précédents les ont évoqués.
En devenant le 1er janvier 2015 la première métropole à statut particulier de France et non plus un EPCI, la métropole de Lyon intégrait sur les cinquante-neuf communes de son territoire toutes les compétences du conseil départemental, tandis que le conseil départemental du Nouveau-Rhône voyait le jour pour le reste du département.
Le Rhône se divise désormais en deux entités administratives distinctes : la métropole et le conseil départemental.
De fait, les conseillers communautaires fléchés lors des élections municipales de 2014 ont obtenu, dans la nuit du 31 décembre 2014 au 1er janvier 2015, la double casquette de conseillers métropolitains et de conseillers départementaux.
En 2020, le mode de scrutin changera, comme cela a été évoqué : le fléchage disparaîtra au profit d’une élection métropolitaine au suffrage universel direct dissociée des élections municipales, même si le scrutin aura lieu le même jour, ce qui ne sera pas sans troubler les électeurs. Les citoyens éliront donc les maires des 59 communes et les 150 conseillers métropolitains répartis sur 14 nouvelles « circonscriptions Maptam » : celles-ci sont différentes des circonscriptions législatives ; elles sont liées au poids démographique, sans tenir compte des entités communales. Il est entendu qu’il n’y a pas nécessairement de lien entre les listes : aucune obligation, par exemple, pour un conseiller métropolitain d’être présent sur une liste municipale.
Dans le cadre de la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui, il convient d’ajuster le droit à notre spécificité, à savoir de faire des 150 conseillers métropolitains des grands électeurs lors des prochaines élections sénatoriales. Nous partageons tous, me semble-t-il, l’idée de ce nécessaire ajustement, et l’ensemble du groupe centriste votera en faveur de ce texte.
Permettez-moi, toutefois, de profiter de cette tribune pour remettre en perspective le volet démocratique de ce nouveau mode de scrutin, volet qu’il nous faudra corriger. J’aurais aimé le faire pour l’échéance de 2020, mais des événements malencontreux ne l’ont pas permis. Aussi, je persévère pour 2026.
Très simplement, il faut considérer que toutes les communes ne seront plus représentées au sein du conseil de la métropole. Pis encore, comme cela a été relevé, il est possible qu’un maire démocratiquement élu voie son opposant ayant perdu aux élections municipales, mais gagné aux élections métropolitaines siéger au conseil métropolitain et représenter sa commune. Avouons-le, cette situation sera assez incompréhensible pour les citoyens. Certains disent qu’il en est de même pour les élections départementales, à la nuance près que, dans notre cadre, les communes délèguent des compétences à la métropole comme un EPCI. Il est donc impossible de fait d’être le premier échelon de proximité sans siéger dans les organes délibérants.
La contrainte juridique est actuellement liée à la logique démographique et au fameux tunnel des plus ou moins 20 %. C’est ce point qu’il conviendra de modifier et qui pourrait être étudié lors de la prochaine révision constitutionnelle. Je vous donne donc rendez-vous, mes chers collègues, et j’espère que ce texte sera examiné par le Sénat le plus rapidement possible. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste. – M. Daniel Chasseing applaudit également.)