Sommaire

Présidence de Mme Hélène Conway-Mouret

Secrétaires :

M. Guy-Dominique Kennel, Mme Patricia Schillinger.

1. Procès-verbal

2. Rappel au règlement

M. Patrick Kanner ; Mme la présidente.

3. Démission et remplacement d’un sénateur

4. Communication relative à deux commissions mixtes paritaires

5. Transformation de la fonction publique. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Article 34 A (priorité) (nouveau)

Mme Catherine Di Folco, rapporteur de la commission des lois

M. Didier Marie

M. Philippe Mouiller

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics

M. Philippe Bas, président de la commission des lois

Amendement n° 495 du Gouvernement. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 34 B (priorité) (nouveau)

Amendement n° 404 du Gouvernement. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 34 C (priorité) (nouveau) – Adoption.

Article 34 D (priorité) (nouveau)

Amendement n° 415 du Gouvernement. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article additionnel après l’article 34 D (priorité)

Amendement n° 263 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Retrait.

Article 34 (priorité)

Mme Laurence Cohen

Mme Esther Benbassa

Amendement n° 522 de M. Arnaud de Belenet. – Retrait.

Amendement n° 272 rectifié ter de M. Jean-François Longeot. – Rectification.

Amendement n° 272 rectifié quater de M. Jean-François Longeot. – Adoption.

Amendement n° 399 du Gouvernement. – Rejet.

Adoption de l’article modifié.

Article 35 (priorité) – Adoption.

Article 16 bis

Amendement n° 144 rectifié bis de M. Jérôme Durain. – Rejet.

Amendement n° 494 du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 87 rectifié sexies de Mme Sophie Taillé-Polian. – Rejet.

Amendement n° 496 du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 531 de M. Arnaud de Belenet. – Rejet.

Amendement n° 532 de M. Arnaud de Belenet. – Rejet.

Amendement n° 530 de M. Arnaud de Belenet. – Adoption.

Amendement n° 534 rectifié de M. Arnaud de Belenet. – Adoption.

Amendement n° 314 rectifié de Mme Nathalie Delattre. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

6. Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire

7. Transformation de la fonction publique. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Articles additionnels après l’article 16 bis

Amendement n° 147 rectifié bis de M. Jérôme Durain. – Retrait.

Amendement n° 4 rectifié ter de Mme Jocelyne Guidez. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 250 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

8. Questions d’actualité au Gouvernement

plan canicule

Mme Patricia Schillinger ; Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé ; Mme Patricia Schillinger.

suppression de l’émission soir 3

Mme Nathalie Delattre ; M. Franck Riester, ministre de la culture.

avenir de general electric à belfort

Mme Céline Brulin ; M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics ; Mme Céline Brulin.

situation de cinq cents mineurs dans la drôme

Mme Marie-Pierre Monier ; Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice ; Mme Marie-Pierre Monier.

remboursement des frais de sécurité des manifestations sportives et culturelles

M. Alain Fouché ; M. Christophe Castaner, ministre de l’intérieur ; M. Alain Fouché.

délinquance et immigration à paris

M. Pierre Charon ; M. Laurent Nunez, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur ; M. Pierre Charon.

expérimentation sur les vaches à hublot

Mme Évelyne Perrot ; Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire ; Mme Évelyne Perrot.

situation d’air austral

M. Abdallah Hassani ; Mme Annick Girardin, ministre des outre-mer.

avenir de l’agriculture française

M. Laurent Duplomb ; M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement ; M. Laurent Duplomb.

assurance chômage

Mme Frédérique Puissat ; Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail ; Mme Frédérique Puissat.

privatisation de barrages hydrauliques

Mme Angèle Préville ; Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire ; Mme Angèle Préville.

assouplissement des 80 kilomètres par heure

Mme Christine Herzog ; M. Christophe Castaner, ministre de l’intérieur ; Mme Christine Herzog.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Marc Gabouty

9. Mise au point au sujet d’un vote

10. Débat à la suite de la réunion du Conseil européen des 20 et 21 juin 2019

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères

M. Philippe Dominati, vice-président de la commission des finances

M. Cyril Pellevat, vice-président de la commission des affaires européennes

Mme Véronique Guillotin

M. Jean Louis Masson

M. Olivier Cadic

Mme Colette Mélot

M. Claude Haut

M. Pierre Laurent

M. Jean-Yves Leconte

M. Christophe Priou

M. Jean-François Longeot

M. René Danesi

M. Benoît Huré

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d’État

Conclusion du débat

M. Cyril Pellevat, vice-président de la commission des affaires européennes

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE Mme Catherine Troendlé

11. Transformation de la fonction publique. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Articles additionnels après l’article 16 bis (suite)

Amendement n° 148 rectifié bis de M. Jérôme Durain. – .Rejet

Amendements identiques n° 157 rectifié quater de M. Jérôme Durain et 450 rectifié ter de Mme Nathalie Delattre. – Adoption des deux amendements insérant un article additionnel.

Amendement n° 253 de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Devenu sans objet.

Amendement n° 448 rectifié bis de Mme Nathalie Delattre. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 252 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 149 rectifié bis de M. Jérôme Durain. – Rejet.

Amendement n° 156 rectifié bis de Mme Sophie Taillé-Polian. – Rejet.

Amendement n° 246 de M. Pierre-Yves Collombat. – Rejet.

Amendement n° 150 rectifié bis de M. Jérôme Durain. – Rejet.

Amendement n° 251 de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Rejet.

Amendements identiques nos 247 de M. Pierre-Yves Collombat et 418 rectifié quater de Mme Sophie Taillé-Polian. – Rejet de l’amendement n° 247, l’amendement n° 418 rectifié quater n’étant pas soutenu.

Amendement n° 248 de M. Pierre-Yves Collombat. – Rejet.

Article 16 ter AA (nouveau)

Amendement n° 371 du Gouvernement. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 16 ter A – Adoption.

Article 16 ter B (supprimé)

Article 16 ter

Amendement n° 506 rectifié bis de M. Patrick Chaize. – Rejet.

Amendement n° 376 du Gouvernement et sous-amendement n° 595 de Mme Nathalie Delattre. – Adoption du sous-amendement et de l’amendement modifié.

Amendement n° 245 de M. Pierre-Yves Collombat. – Devenu sans objet.

Amendement n° 544 rectifié bis de M. Patrick Chaize. – Retrait.

Adoption de l’article modifié.

Article additionnel après l’article 16 ter

Amendement n° 287 rectifié de Mme Christine Lavarde. – Retrait.

Article 16 quater – Adoption.

Article 16 quinquies

Amendement n° 596 du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 597 du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 17

Mme Éliane Assassi

M. Loïc Hervé, rapporteur de la commission des lois

Amendements identiques nos 35 de Mme Éliane Assassi et 145 rectifié bis de M. Jérôme Durain. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 383 du Gouvernement. – Adoption.

Amendement n° 346 rectifié bis de Mme Sylviane Noël. – Adoption.

Amendement n° 440 rectifié du Gouvernement et sous-amendement n° 577 de la commission. – Adoption du sous-amendement et de l’amendement modifié.

Amendement n° 498 rectifié ter de Mme Jocelyne Guidez. – Devenu sans objet.

Amendements identiques nos 353 rectifié ter de Mme Sylviane Noël et 558 rectifié de Mme Laurence Rossignol. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 586 de la commission. – Adoption.

Amendements identiques n° 302 rectifié de M. Michel Canevet et 542 de M. Arnaud de Belenet. – Adoption des deux amendements.

Amendement n° 538 de M. Arnaud de Belenet. – Rejet.

Amendements identiques nos 301 rectifié de M. Michel Canevet et 420 de M. Arnaud de Belenet. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 518 de M. Arnaud de Belenet. – Rejet.

Amendement n° 280 rectifié bis de M. André Reichardt. – Rejet.

Adoption de l’article modifié.

Articles additionnels après l’article 17

Amendement n° 464 rectifié de Mme Nathalie Delattre. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 335 rectifié ter de Mme Sylviane Noël. – Rejet.

Amendement n° 539 de M. Arnaud de Belenet. – Retrait.

Amendement n° 377 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 379 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 433 rectifié de Mme Gisèle Jourda. – Non soutenu.

Article 17 bis

Amendement n° 380 du Gouvernement. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 17 ter

Amendement n° 152 rectifié bis de M. Jérôme Durain. – Rejet.

Amendement n° 587 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article additionnel après l’article 17 ter

Amendement n° 151 rectifié bis de M. Jérôme Durain. – Retrait.

Article 17 quater (nouveau)

Amendement n° 382 du Gouvernement. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 18

Mme Cathy Apourceau-Poly

M. Didier Marie

Amendements identiques nos 36 de Mme Éliane Assassi et 83 rectifié quater de Mme Sophie Taillé-Polian. – Rejet de l’amendement n° 36, l’amendement n° 83 rectifié quater n’étant pas soutenu.

Amendement n° 387 du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 344 rectifié bis de Mme Sylviane Noël. – Rejet.

Amendement n° 146 rectifié bis de M. Jérôme Durain. – Retrait.

Amendement n° 355 rectifié bis de M. Jérôme Durain. – Rejet.

Adoption de l’article.

Articles additionnels après l’article 18

Amendement n° 203 rectifié bis de M. Max Brisson. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 198 rectifié bis de M. Max Brisson. – Retrait.

Article 18 bis

Amendement n° 37 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 385 du Gouvernement. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article additionnel après l’article 18 bis

Amendement n° 211 rectifié de Mme Françoise Gatel. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Article 19

Amendement n° 347 rectifié bis de Mme Sylviane Noël. – Retrait.

Amendement n° 388 du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 255 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 588 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 528 de M. Arnaud de Belenet. – Rejet.

Amendement n° 303 rectifié de M. Michel Canevet. – Retrait.

Amendement n° 345 rectifié bis de Mme Sylviane Noël. – Retrait.

Amendement n° 562 de Mme Victoire Jasmin. – Non soutenu.

Adoption de l’article modifié.

Articles additionnels après l’article 19

Amendement n° 61 rectifié quinquies de M. Michel Canevet. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 60 rectifié sexies de M. Michel Canevet. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Article 20 – Adoption.

Renvoi de la suite de la discussion.

12. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de Mme Hélène Conway-Mouret

vice-présidente

Secrétaires :

M. Guy-Dominique Kennel,

Mme Patricia Schillinger.

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quatorze heures trente.)

1

Procès-verbal

Mme la présidente. Le compte rendu intégral de la séance du jeudi 20 juin 2019 a été publié sur le site internet du Sénat.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté.

2

Rappel au règlement

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Kanner, pour un rappel au règlement.

M. Patrick Kanner. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, après le mouvement qui touche le personnel urgentiste depuis de très nombreuses semaines dans nos hôpitaux, ce sont les sapeurs-pompiers qui se mobilisent aujourd’hui avec un préavis de grève s’étendant du 26 juin au 31 août, tout en maintenant bien sûr leurs prestations pour le grand public.

Sept syndicats représentant 85 % des personnels ont prévu de se mobiliser ces prochains mois pour alerter sur un service de secours qui est malade – permettez-moi ce raccourci.

Ces personnels doivent répondre à une sursollicitation, malgré une baisse d’effectifs et de moyens, en assumant de plus en plus des missions qui ne relèvent pas de leurs compétences, chacun des élus locaux ici peut en témoigner. Ils subissent de plein fouet les manquements de l’État, mais aussi des difficultés au sein de chaque département.

Monsieur le secrétaire d’État, alors que le Gouvernement s’enorgueillit de poser les bases d’un « nouveau contrat social » – je reprends l’expression – avec la fonction publique – et que nous contestons, vous l’avez compris –, cet épisode nous fait craindre que le compte n’y soit pas. Le préavis transmis au ministre de l’intérieur rappelle notamment les problématiques liées à la sécurité des sapeurs-pompiers, délaissée par le Gouvernement et dont le Sénat s’est saisi par le biais d’une mission d’information ad hoc. À cet égard, je salue mon collègue Loïc Hervé.

Ces sapeurs-pompiers demandent le retrait de votre projet de loi de transformation de la fonction publique, débattu aujourd’hui dans cet hémicycle, car celui-ci fait porter, comme nous le pensons aussi, un risque majeur de fragilisation du service public au travers de la fonction publique.

Nous ne doutons pas que vous ne donniez pas suite à cette demande, qui nous semblerait pourtant légitime.

Ce rappel au règlement est l’occasion pour moi et pour le groupe socialiste et républicain de vous interpeller sur la nécessaire réponse qu’il faudrait apporter à cette profession qui souffre. Monsieur le secrétaire d’État, que comptez-vous faire ? Cela fait tant d’années que les pompiers expriment des doléances ! Ils sont les témoins privilégiés des fractures sociales de notre société, il est temps, plus que temps, de les écouter.

Le Gouvernement ne semble pas avoir pris la mesure de cette situation. Nous regrettons la crispation du dialogue social avec une profession qui fait du don de soi une règle. Manifestement votre projet de loi, monsieur le secrétaire d’État, ne fait qu’empirer les choses. Je vous remercie de votre réponse. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.

3

Démission et remplacement d’un sénateur

Mme la présidente. Mme Fabienne Keller a fait connaître à la présidence qu’elle se démettait de son mandat de sénateur du Bas-Rhin à compter du 23 juin 2019, à minuit.

En application de l’article L.O. 320 du code électoral, elle est remplacée par Mme Esther Sittler, dont le mandat de sénatrice a commencé le 24 juin 2019, à zéro heure.

4

Communication relative à deux commissions mixtes paritaires

Mme la présidente. J’informe le Sénat que les commissions mixtes paritaires chargées d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant création de l’Office français de la biodiversité et de la chasse, modifiant les missions des fédérations des chasseurs et renforçant la police de l’environnement et du projet de loi organique modifiant la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution sont parvenues à l’adoption de textes communs.

5

Article 16 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article 34 A (priorité) (nouveau)

Transformation de la fonction publique

Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de transformation de la fonction publique (projet n° 532, texte de la commission n° 571, rapport n° 570).

Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre II du titre V, aux articles 34 A, 34 B, 34 C, 34 D, 34 et 35, ainsi qu’à l’amendement n° 263 rectifié portant article additionnel après l’article 34 D, appelés en priorité.

TITRE V

RENFORCER L’ÉGALITÉ PROFESSIONNELLE

Chapitre II

Favoriser l’égalité professionnelle pour les travailleurs en situation de handicap

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article 34 B (priorité) (nouveau)

Article 34 A (priorité) (nouveau)

I. – La loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est ainsi modifiée :

1° Le troisième alinéa de l’article 9 ter est supprimé ;

2° Il est ajouté un chapitre V ainsi rédigé :

« CHAPITRE V

« De lobligation demploi des travailleurs handicapés, mutilés de guerre et assimilés

« Art. 33. – I. – L’État est assujetti à l’obligation d’emploi prévue à l’article L. 5212-2 du code du travail, dans les conditions fixées par les articles L. 5212-7 et L. 5212-10 du même code.

« Lorsqu’ils comptent au moins vingt agents à temps plein ou leur équivalent, cette obligation s’applique également aux :

« 1° Établissements publics de l’État autres qu’industriels et commerciaux ;

« 2° Juridictions administratives et financières ;

« 3° Autorités publiques et administratives indépendantes ;

« 4° Groupements d’intérêt public et groupements de coopération sanitaire lorsque ces derniers sont qualifiés de personne morale de droit public au sens de l’article L. 6133-3 du code de la santé publique ;

« 5° Collectivités territoriales et à leurs établissements publics autres qu’industriels et commerciaux ;

« 6° Établissements mentionnés à l’article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.

« II. – Les employeurs publics mentionnés au I du présent article qui comptent moins de vingt agents à temps plein ou leur équivalent déclarent leurs bénéficiaires de l’obligation d’emploi.

« Art. 34. – I. – Pour le calcul du taux d’emploi fixé à l’article L. 5212-2 du code du travail, l’effectif total pris en compte est constitué, chaque année, de l’ensemble des agents rémunérés par chaque employeur à une date fixée par décret en Conseil d’État.

« Chaque agent compte pour une unité. Toutefois, les agents affectés sur des emplois non permanents ne sont pas comptabilisés lorsqu’ils ont été rémunérés pendant une période inférieure à six mois au cours de l’année écoulée.

« Peut être pris en compte l’effort consenti par l’employeur public en faveur des bénéficiaires qui rencontrent des difficultés particulières de maintien en emploi.

« II. – Outre les personnes mentionnées à l’article L. 5212-13 du code du travail, sont pris en compte pour le calcul du nombre de bénéficiaires de l’obligation d’emploi :

« 1° Les agents reclassés, pendant une durée maximale de cinq ans à compter de leur reclassement ;

« 2° Les agents qui bénéficient d’une allocation temporaire d’invalidité.

« Art. 35. – I. – Le fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique est un établissement public national ayant pour mission de :

« 1° Favoriser l’accueil, l’insertion professionnelle et le maintien dans l’emploi des agents handicapés au sein des trois fonctions publiques, ainsi que leur formation et leur information ;

« 2° Conseiller les employeurs publics concernant la mise en œuvre de leurs actions en faveur des agents handicapés.

« II. – La gouvernance du fonds est assurée par un comité national, qui :

« 1° Définit les orientations concernant l’utilisation des crédits du fonds et sa politique de conventionnement avec les employeurs publics ;

« 2° Oriente l’activité des comités locaux et les actions territoriales du fonds ;

« 3° Détermine les conditions dans lesquelles les employeurs publics et les personnes handicapées sont associés à la définition et à l’évaluation des aides du fonds ;

« 4° Établit un rapport annuel, qui est ensuite soumis au Conseil commun de la fonction publique et au Conseil national consultatif des personnes handicapées.

« Le comité national est composé de représentants des employeurs publics, des personnels, du service public de l’emploi et des personnes handicapées.

« Art. 36. – Le fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique publie, dans un standard ouvert, aisément réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé, les objectifs et les résultats des conventions conclues avec les employeurs publics.

« Art. 37. – I. – Le fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique est saisi par les employeurs publics ou, le cas échéant, par les personnes mentionnées au II de l’article 34.

« II. – Outre les employeurs publics, peuvent bénéficier des aides du fonds les organismes ou associations contribuant à l’insertion professionnelle des personnes handicapées dans la fonction publique et avec lesquels le fonds a conclu une convention.

« Art. 38. – I. – Les employeurs publics peuvent s’acquitter de leur obligation d’emploi en versant au fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique une contribution annuelle pour chacun des bénéficiaires qu’ils auraient dû employer.

« Cette contribution est calculée en fonction du nombre d’unités manquantes constatées chaque année, à une date fixée par un décret en Conseil d’État.

« II. – Le nombre d’unités manquantes correspond à la différence entre :

« 1° Le nombre total de personnes rémunérées par l’employeur auquel est appliquée la proportion fixée à l’article L. 5212-2 du code du travail, arrondi à l’unité supérieure ;

« 2° Et le nombre des bénéficiaires de l’obligation d’emploi effectivement rémunérés par l’employeur.

« III. – Le montant de la contribution est égal au nombre d’unités manquantes, multiplié par un montant unitaire. Sous réserve des spécificités de la fonction publique, les modalités de calcul de ce montant unitaire sont identiques à celles prévues à l’article L. 5212-9 du code du travail.

« Pour les services de l’État, le calcul de la contribution est effectué au niveau de l’ensemble des personnels rémunérés par chaque ministère.

« Peuvent être déduites du montant de la contribution :

« 1° Les dépenses directement supportées par l’employeur public, destinées à favoriser l’accueil, l’insertion ou le maintien dans l’emploi des travailleurs handicapés, qui ne lui incombent pas en application d’une disposition législative ou réglementaire. Cette déduction ne peut pas se cumuler avec une aide accordée pour le même objet par le fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique ;

« 2° Les dépenses mentionnées à l’article L. 5212-10-1 du code du travail, selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État.

« IV. – Les employeurs publics déposent auprès du comptable public compétent une déclaration annuelle accompagnée du paiement de leur contribution, dans un délai fixé par décret en Conseil d’État.

« Le contrôle de la déclaration annuelle est effectué par le fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique.

« À défaut de déclaration et de régularisation dans un délai fixé par décret en Conseil d’État, l’employeur public est considéré comme ne satisfaisant pas à l’obligation d’emploi. Le montant de sa contribution est alors calculé en retenant la proportion de 6 % de l’effectif total rémunéré. Dans cette situation ou dans les cas de défaut de paiement ou de paiement insuffisant, le fonds émet un titre exécutoire qui est recouvré par le comptable public compétent selon les règles applicables au recouvrement des créances étrangères à l’impôt et au domaine.

« Art. 39. – Les associations ayant pour objet principal la défense des intérêts des bénéficiaires du présent chapitre peuvent exercer une action civile lorsque les employeurs publics ne respectent les prescriptions du présent chapitre et que cette situation porte un préjudice certain à l’intérêt collectif qu’elles représentent.

« Art. 40. – Les conditions d’application du présent chapitre sont précisées par décret en Conseil d’État. »

II. – Les articles L. 323-2 à L. 323-8-8 du code du travail sont abrogés.

III. – La loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel est ainsi modifiée :

1° À la fin du II de l’article 68, la référence : « L. 323-2 du même code » est remplacée par la référence : « 34 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires » ;

2° Les articles 72 à 74 sont abrogés.

IV. – L’article 5 de la loi n° 97-940 du 16 octobre 1997 relative au développement d’activités pour l’emploi des jeunes est abrogé.

V. – À la fin de l’avant-dernière phrase du III de l’article L. 712-6-1 du code de l’éducation, les mots : « instituée par l’article L. 323-2 du code du travail » sont remplacés par les mots : « d’emploi de travailleurs handicapés ».

VI. – Au VI de l’article 208 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011, la référence : « L. 323-8-6-1 du même code » est remplacée par la référence : « 35 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ».

VII. – À la fin du deuxième alinéa de l’article 122 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, la référence : « mentionné à l’article L. 323-8-6-1 du code du travail » est supprimée.

VIII. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2019. À titre dérogatoire, le II de l’article 33 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, tel qu’il résulte du présent article, entre en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d’État et, au plus tard, au 1er janvier 2022.

Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Catherine Di Folco, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, Didier Marie et moi-même avons rendu un rapport pour « donner un nouveau souffle à la politique du handicap dans la fonction publique », rapport qui a nécessité 8 mois de travaux, 2 déplacements et l’audition de 104 parties prenantes. Ce rapport a été adopté à l’unanimité par la commission des lois.

Globalement, la situation s’améliore et nous pouvons nous en féliciter : le taux d’emploi des personnes en situation de handicap est passé de 3,74 % en 2006 à 5,61 % aujourd’hui.

Toutefois, nous avons constaté trois principales difficultés.

Premièrement, seul le versant territorial respecte ses obligations. L’État est en retard avec 4,65 % d’agents handicapés – et seulement 3,38 % dans les services du Premier ministre.

Deuxièmement, les actions menées reposent souvent sur l’engagement personnel de certains élus, managers ou agents. Elles sont mises à mal lorsque ces locomotives quittent leurs fonctions.

Troisièmement, enfin, le fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, le FIPHFP, connaît une situation financière très préoccupante, après avoir accumulé 230 millions d’euros de déficit entre 2015 et 2018. Il a dû baisser ses aides aux agents handicapés, ce qui n’est pas satisfaisant.

Face à ces constats, le projet de loi initial restait en retrait. Il se limitait à confirmer des interprétations déjà en vigueur, comme l’a souligné le Conseil d’État. Un seul dispositif nous paraît novateur : la création d’un détachement ad hoc pour favoriser la promotion des agents porteurs de handicap.

Sur notre initiative, la commission des lois a adopté six amendements pour mieux intégrer les personnes handicapées dans la fonction publique.

Certains semblent recevoir l’approbation du Gouvernement, comme la généralisation des référents handicap, le droit à la portabilité des aménagements de poste ou la possibilité de titulariser, à titre expérimental, un apprenti handicapé à l’issue de son contrat d’apprentissage.

Toutefois, monsieur le secrétaire d’État, le compte n’y est pas.

Vous proposez plusieurs amendements de suppression, précisant que le Gouvernement a déjà porté le budget du FIPHFP à 130 millions d’euros après la loi Pénicaud de septembre 2018. Or cette somme, selon nous, permettrait uniquement de couvrir les interventions du fonds, non ses frais de gestion. Il lui faudrait au moins 20 millions de plus, comme nous l’avons démontré dans notre rapport.

Devant la commission des lois, vous avez indiqué que vous souhaitiez une certaine harmonisation entre le secteur public et le secteur privé. Toutefois, le rapport de l’inspection générale des finances, l’IGF, et de l’inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, de décembre 2017, a montré qu’une telle harmonisation n’était pas envisageable : à la page 25 du rapport, il est indiqué que le FIPHFP pourrait perdre plus de 60 % de ses contributions à moyen terme, contre 30 % dans le secteur privé.

À rebours de votre position de principe, vous souhaitez d’ailleurs supprimer des dispositions de la commission qui respectent votre volonté d’harmoniser le secteur privé et le secteur public.

Je pense, par exemple, à la règle de l’arrondi à l’unité supérieure, qui rapporterait 13 millions d’euros par an au FIPHFP, ou au meilleur encadrement des maintiens dans l’emploi.

À la différence du secteur privé, les employeurs publics qui « fabriquent » du handicap bénéficient d’une baisse de leurs cotisations, ce qui n’est plus acceptable. D’où l’intérêt du « bonus-malus » que Didier Marie et moi avons proposé.

Vous l’aurez compris, monsieur le secrétaire d’État, nous souhaitons des avancées réelles et concrètes pour l’intégration des personnes handicapées dans la fonction publique. Au cours de ce débat, nous espérons vous convaincre que nos propositions sont ambitieuses et que vous vous y rallierez en retirant vos amendements de suppression.

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, sur l’article.

M. Didier Marie. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, mon propos rejoint évidemment celui de Mme le rapporteur, puisque nous avons commis conjointement, au nom de la commission des lois du Sénat, un rapport d’information qui a été adopté à l’unanimité.

Je me réjouis bien évidemment que nos rapporteurs aient intégré l’essentiel de nos propositions dans le texte du projet de loi issu des travaux de la commission. Depuis la loi du 11 février 2005, les employeurs ont consenti de nombreux efforts pour relever le taux d’emploi des travailleurs handicapés dans la fonction publique, qui est passé de 3,74 % à 5,61 %.

Il faut souligner que, chaque année, les administrations recrutent plus de 30 000 agents handicapés, soit deux fois plus qu’en 2019. Pour autant, les objectifs assignés en 2005 ne sont que partiellement atteints et le système de promotion du handicap dans la fonction publique est aujourd’hui à un tournant, voire à bout de souffle.

Seul le versant territorial respecte son obligation d’employer au moins 6 % de travailleurs handicapés, sachant que, dans la fonction publique territoriale, il existe bien évidemment des écarts d’une collectivité à l’autre et qu’il ne faudra pas relâcher les efforts.

Pour ce qui concerne l’État, il est en retard, avec un taux d’emploi de 4,65 %. Certains ministères, voire certains services, notamment ceux du Premier ministre, cela a été souligné, sont particulièrement en retard et nous souhaiterions que l’État montre la voie, qu’il soit l’éclaireur et qu’il puisse dans un délai extrêmement rapide – deux ans –, par la fixation d’objectifs pluriannuels, atteindre ces 6 %.

En outre, nous avons constaté – monsieur le secrétaire d’État, vous avez lu notre rapport – que les services de l’État manquaient de coordination. Se pose la question de la déconcentration des moyens dévolus au handicap dans la fonction publique d’État.

Le second sujet fondamental, c’est effectivement celui du fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique. Après avoir contribué à une élévation du nombre de travailleurs handicapés dans les trois fonctions publiques, celui-ci a malheureusement été contraint de réduire drastiquement le montant de ses aides, qui ont baissé de 30 % entre 2014 et 2018, victime au final de son succès.

Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue. Vous avez épuisé votre temps de parole.

M. Didier Marie. Nous vous demandons de regarder avec beaucoup d’attention – c’est l’objet du présent projet de loi – la mise en œuvre d’une expérimentation de réforme globale du modèle de financement du FIPHFP.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Mouiller, sur l’article, à qui je demande d’essayer de respecter le temps qui lui est imparti.

M. Philippe Mouiller. Je vais être vigilant, madame la présidente.

Je salue moi aussi le travail de la commission et le rapport que celle-ci a produit sur l’emploi des personnes handicapées dans la fonction publique. Ce rapport détaille à la fois de façon très claire les objectifs en la matière, mais également toutes les difficultés pour y parvenir, ainsi que la nécessité de revoir, d’une façon générale, notre approche du recrutement de personnes handicapées au sein de la fonction publique.

Ce texte de loi, même s’il reste encore beaucoup de choses à faire, contient déjà un certain nombre d’avancées.

Monsieur le secrétaire d’État, je voudrais vous alerter sur deux points.

D’abord, vous avez déposé plusieurs amendements de suppression d’articles insérés par la commission. D’une façon générale, celle-ci a eu la prudence de ne prévoir les mesures qu’elle propose qu’à titre expérimental. Cela permet de se donner le temps de l’analyse, notamment avant la publication des décrets d’application ; surtout, cette prudence permet d’apprécier avec discernement la situation dans chacune des différentes fonctions publiques ou ce qui se passe dans chaque territoire.

Cette prudence de la commission doit être relevée et devrait vous inciter à retirer vos différents amendements de suppression.

Beaucoup d’arguments ont été avancés au sujet des modalités de financement du FIPHFP, la réforme de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés, ou OETH, constituant une nouvelle piste de travail pour récupérer des financements complémentaires. Or non seulement ce ne sera pas suffisant, mais encore c’est antinomique : d’une façon générale, cette réforme a été conduite dans le but d’améliorer le recrutement de personnes handicapées dans les fonctions publiques et donc, de fait, de réduire les ressources du FIPHFP.

Donc, comment peut-on, d’un côté, adopter des textes visant à améliorer le recrutement de personnes handicapées dans la fonction publique, sachant, de l’autre, que ces mesures sont financées par un fonds d’autant plus doté que les recrutements diminuent ?

Quelque chose ne fonctionne pas dans ce système et on ne peut pas mener ces deux objectifs en parallèle : abonder le FIPHFP – en réduisant les recrutements – et recruter plus.

C’est pourquoi, par souci de cohérence, il faut regarder de très près les propositions de la commission visant à compléter les possibilités de financement, notamment au travers de l’arrondi.

Pour conclure, je veux également dire qu’il faut aussi avoir une approche nuancée entre le maintien des personnes handicapées dans les postes et la création sèche d’emplois dans les différentes administrations, afin de voir les chiffres différemment. Collectivement, les différentes branches de la fonction publique ont un effort à faire.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat auprès du ministre de laction et des comptes publics. Madame la présidente, madame, monsieur les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, comme je l’ai fait devant votre commission des lois, je salue le travail de Mme Di Folco et de M. Marie, dont le rapport a été adopté à l’unanimité. Nous partageons tous les constats qui y sont dressés, tout comme nous partageons aussi beaucoup des solutions ou des pistes qui y sont avancées pour répondre aux problématiques liées à l’accueil et au maintien de personnes en situation de handicap dans les services publics.

C’est la raison pour laquelle, comme vous l’avez noté, madame la rapporteur, un certain nombre des dispositions adoptées par votre commission sont appréciées de manière extrêmement positive par le Gouvernement et ne font l’objet d’aucune proposition de modification ou de demande de retrait. Comme je l’ai indiqué au cours de la discussion générale, je prends l’engagement devant vous que ce dont le Gouvernement n’a pas demandé la remise en cause par votre assemblée sera défendu par lui au cours de la navette parlementaire et que le soutien que je peux apporter directement ou indirectement à des dispositions adoptées par le Sénat est un soutien qui vaut non pas seulement pour la séance, mais bien pour l’intégralité des débats sur ce texte.

Nous avons deux divergences, deux points de désaccord.

Le premier porte, plus que sur la question de l’harmonisation, sur la question de la convergence entre le secteur public et le secteur privé. Nous avons engagé, voilà presque dix-huit mois, Sophie Cluzel, Muriel Pénicaud et moi-même, un travail de rapprochement des deux systèmes public et privé, l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des handicapés, l’Agefiph, et le FIPHFP, tout en précisant que nous ne voulions pas de leur fusion, ces deux instruments n’étant ni financés ni gérés de la même manière. Nous cherchons par tous les moyens à permettre, dans le cadre de la fluidité public-privé que nous souhaitons, des modalités d’intervention, de calcul, de déclaration aussi proches que possible.

Ce que nous craignons, comme j’ai eu l’occasion de le dire en commission des lois, c’est qu’un certain nombre des dispositions que vous avez adoptées, au-delà de leur intérêt propre, ne soient contradictoires avec cette volonté de faire converger les secteurs public et privé en matière de handicap.

Le second point de divergence que nous avons avec la commission – et qui, avec le premier, justifie le dépôt des amendements de suppression ou de modification du Gouvernement – porte sur le financement du FIPHFP.

Vous faites un certain nombre de propositions, tandis que nous défendons une autre méthode. La méthode que nous défendons se fonde sur une réforme des obligations des employeurs publics.

À cet égard, la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a acté la minoration des contributions au FIPHFP dont bénéficient un certain nombre d’employeurs publics, au premier rang desquels le ministère de l’éducation nationale. S’agissant de ce dernier, notamment, cette minoration se justifie par ses efforts et son engagement en faveur notamment d’accueil d’élèves en situation de handicap. Cependant, la loi a prévu un plafonnement progressif de cette exonération, de manière que celle-ci ne puisse pas, la première année, excéder 90 % de la contribution théorique et 80 % en deuxième année. Cela permettra une montée en puissance de la contribution du ministère de l’éducation nationale et donc de garantir l’alimentation du FIPHFP, indépendamment des efforts faits en matière d’accueil des personnes en situation de handicap, à hauteur de 130 millions d’euros.

Nous apportons une seconde nuance à ce que propose la commission : vous estimez que le FIPHFP aurait besoin de 150 millions d’euros ; pour notre part, nous estimons, après un certain nombre de travaux, que, avec 130 millions d’euros, nous atteindrons un rythme de croisière. Peut-être aurons-nous l’occasion, avant l’adoption définitive de ce texte, de trouver un terrain d’entente sur cette question-là.

Ce qui nous importe prioritairement, c’est de maintenir les fonds à 130 millions d’euros. M. Marie l’a dit : ceux-ci ont connu une baisse constante entre 2014 et 2018, et nous devons mettre fin à cette tendance pour en revenir à ce niveau.

Je précise, pour la clarté et l’intelligibilité des débats, que le FIPHFP n’est pas le seul financeur de l’insertion et de l’accueil des personnes en situation de handicap : c’est un cofinanceur. La volonté de maintenir cette logique de cofinancement est, je crois, partagée, de sorte que les employeurs des trois versants de la fonction publique soient responsables aussi des engagements et des efforts à fournir en matière d’accueil.

Enfin, je termine sur ce que l’on pourrait qualifier de divergence, laquelle peut, à mon avis, être surmontée.

Monsieur le sénateur, vous proposez un mécanisme expérimental de bonus-malus. J’ai eu l’occasion de vous dire, soit en commission des lois, soit à l’occasion de réunions de travail, que nous n’étions pas opposés à cette idée.

Nous sommes prêts à travailler avec vous sur un bonus-malus non pas centré sur l’insertion des personnes en situation de handicap, mais qui soit plus en rapport avec la prévention et ce qu’on appelle parfois communément la « production » du handicap dans les administrations. Ce peut être un outil utile de sanction en l’absence de toute mesure de prévention ou, au contraire, un outil d’accompagnement de comportements particulièrement marqués en faveur d’une prévention de bonne qualité.

Telles sont nos nuances d’appréciation. Madame la rapporteur, vous m’appelez à retirer les amendements du Gouvernement : en aparté, je vous ai fait comprendre que ce ne serait pas possible. Cela fait partie des désaccords que nous pouvons avoir sur ce texte, et le débat sera l’occasion de rappeler les positions des uns et des autres.

Vos propos, ceux qu’ont tenus les deux intervenants qui vous ont succédé, et ceux que je viens de tenir laissent apparaître des divergences entre nous, mais, sur l’essentiel, notamment notre volonté d’une fonction publique plus inclusive, nous avons les mêmes objectifs.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des lois.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Monsieur le secrétaire d’État, je me réjouis que, à l’occasion de l’examen du présent projet de loi, nous puissions nouer un dialogue sur cette question très importante. Je dois vous dire très sincèrement que nous considérons, à la commission des lois, que le compte n’y est pas et que nous ne pouvons nous contenter de vous faire crédit de vos bonnes intentions.

Vous connaissez les chiffres comme nous les connaissons. En 2014, le fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique avait un budget de 181 millions d’euros. Il est tombé à 126 millions d’euros. On compte certes davantage de personnes handicapées dans les fonctions publiques qu’il y a cinq ans, mais précisément, il y a davantage de besoins, car le FIPHFP contribue non pas simplement à l’intégration de personnes handicapées au sein de la fonction publique, mais à l’accompagnement de leurs carrières, pour qu’elles puissent y trouver toute leur place et apporter toute leur contribution au fonctionnement des services publics.

Cela démontre à quel point le système actuel a atteint ses limites. Je ne le critique pas pour un vice de fabrication, car je me permets de vous rappeler que, avec Christian Jacob, alors ministre de la fonction publique – votre prédécesseur –, j’en ai été le coauteur lorsque j’étais chargé des solidarités au sein du gouvernement d’alors, et que c’est nous qui avons créé ce fonds.

Vous nous dites : « Il faut attendre. » Non, n’attendons surtout pas, ne ratons pas l’occasion du prochain budget de l’État pour amorcer un redressement ! Vous proposez 130 millions ; nous vous disons que 150 millions d’euros, c’est encore beaucoup moins qu’il y a cinq ans et c’est nécessaire.

Cette évaluation n’est pas sortie de notre chapeau, elle résulte d’un travail pluraliste mené par M. Marie et Mme Di Folco, dont chacun, y compris vous-même, a salué le sérieux.

Pour assurer la pérennité des financements à un haut niveau, il est absolument indispensable de modifier le système de prélèvement. C’est la raison pour laquelle nous vous proposons ce système de bonus-malus.

Je veux croire que toute proposition émanant du Parlement est prise au sérieux par le Gouvernement sans que celui-ci nous oppose sa propre réflexion et son propre calendrier. On ne va pas perdre un an pour mettre en œuvre un dispositif qui sera plus efficace pour les personnes handicapées !

C’est la raison pour laquelle, au moment d’aborder l’examen de ces amendements, je tiens à vous dire très solennellement que nous ne souhaitons pas que notre attente soit déçue. Du temps va s’écouler entre la position que vous adopterez aujourd’hui et la commission mixte paritaire, avant le vote final du texte. Ce que nous proposons n’a rien d’un bouleversement révolutionnaire.

Par ailleurs, l’argument selon lequel vous voudriez rapprocher, sans les fusionner, le fonds pour le secteur privé et le fonds pour le secteur public ne nous paraît pas recevable, et ce pour une raison très simple : les modalités de recrutement, le déroulement des carrières et même les métiers sont différents entre le secteur privé et le secteur public.

L’Agefiph, créée par une loi qu’avait fait voter Philippe Séguin, voulue par Jacques Chirac, à l’époque Premier ministre, a été mise en place en 1988 par le gouvernement de Michel Rocard, Jean-Pierre Soissons étant ministre du travail, sous forme de gestion paritaire avec les partenaires sociaux : vous ne voulez pas abandonner cela ?

Le système en vigueur dans la fonction publique est différent parce que le paritarisme y a pris énormément de retard. Vous ne pouvez donc pas fusionner les deux systèmes. Vous pouvez d’autant moins le faire qu’alors un effet de masse jouerait en défaveur des financements spécifiques pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique.

Cet argument ne saurait retarder ce travail devant nous permettre de franchir un palier dans l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique. C’est ce que le Sénat vous demande. Vous dites que nous sommes d’accord sur les objectifs ; eh bien, je souhaite maintenant que nous soyons aussi d’accord sur les moyens ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Jean-Pierre Decool applaudit également.)

Mme la présidente. L’amendement n° 495, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L’article L. 323-8-6-1 du code du travail est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi modifié :

a) La seconde phrase du premier alinéa est supprimée ;

b) Les 1° et 3° sont abrogés ;

c) À la première phrase du dernier alinéa, les mots : « et des personnes handicapées », sont remplacés par les mots : « , du service public de l’emploi et des personnes handicapées » ;

3° Les deuxième à dernier alinéas du II sont supprimés ;

4° Le III est ainsi rédigé :

« III. – Les crédits du fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique servent à financer des actions réalisées soit à l’initiative des employeurs mentionnés à l’article L. 323-2, soit, à l’initiative du fonds, en vue de favoriser l’insertion professionnelle des personnes handicapées au sein de la fonction publique, ainsi que la formation et l’information des agents participant à la réalisation de cet objectif. »

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. La présentation brève de cet amendement sera l’occasion pour moi de souligner, comme je viens de le faire dans mon propos préalable, à l’attention de M. le président de la commission des lois, que le Gouvernement n’a surtout pas l’intention de fusionner les deux fonds, pour les raisons qu’il a invoquées, notamment parce qu’il existe des différences dans leur mode de gouvernance. Je le répéterai une troisième fois si cela est nécessaire.

Nous parlons à dessein de convergence, notamment avec la volonté de garantir l’équité sur les niveaux et les modalités de prise en charge.

Cet amendement n° 495 a un seul objet, à savoir inscrire dans la loi le principe de fongibilité des sections du FIPHFP, qui correspond à la pratique d’aujourd’hui, de manière à offrir de la souplesse dans la gestion des missions du fonds.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Le texte de la commission a mis en œuvre le rapport Donner un nouveau souffle au handicap dans la fonction publique, adopté une semaine auparavant.

Avec plusieurs de ses amendements, le Gouvernement revient sur diverses propositions du rapport. En l’occurrence, s’il était adopté, l’amendement n° 495 supprimerait : la clarification du droit applicable aux agents en situation de handicap et leur insertion dans le statut général de la fonction publique, règles qui sont aujourd’hui, je le rappelle, « cachées » dans une partie non abrogée du code du travail de 2007, ce qui n’est pas acceptable, même si l’on annonce une nouvelle fois un code de la fonction publique ; la limitation à cinq ans de la prise en compte des maintiens dans l’emploi dans le calcul du taux d’emploi des travailleurs handicapés, notamment pour ne pas avantager les employeurs qui « fabriquent » du handicap ; la règle de l’arrondi à l’inférieur, qui permettrait d’augmenter les contributions au FIPHFP de 13 millions d’euros ; la modernisation du conventionnement entre le FIPHFP et les employeurs publics, la commission ayant notamment permis la publication des objectifs retenus et des résultats obtenus.

Le Gouvernement accepte simplement de revoir la « tripartition » du FIPHFP entre les trois versants de la fonction publique, ce qui n’a jamais été appliqué.

L’ambition du Gouvernement, au travers de cet amendement, est donc bien plus limitée que le rapport du Sénat, alors qu’il y a urgence à donner un nouveau souffle à la politique du handicap dans la fonction publique.

Retrait ; à défaut, avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 495.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 34 A.

(Larticle 34 A est adopté.)

Article 34 A (priorité) (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article 34 C (priorité) (nouveau)

Article 34 B (priorité) (nouveau)

À compter du 1er janvier 2020 et pour une durée de trois ans, l’État conduit une expérimentation destinée à refonder le modèle financier du fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique et à assurer sa pérennité.

L’expérimentation déroge à l’article 38 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, tel qu’il résulte de la présente loi.

L’État sélectionne un nombre représentatif de départements dans lesquels les employeurs mentionnés à l’article 33 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée, tel qu’il résulte de la présente loi, versent une cotisation universelle de 0,1 % de leur masse des rémunérations au fonds.

Cette cotisation universelle peut être modulée afin tenir compte, pour chaque employeur :

1° Du taux d’emploi mentionné à l’article 34 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée, tel qu’il résulte de la présente loi ;

2° Du nombre de travailleurs handicapés recrutés ;

3° Du nombre de disponibilités d’office pour raison de santé, de licenciements pour inaptitude et de mises à la retraite d’office.

Un décret en Conseil d’État définit les modalités de cette expérimentation. Il précise les règles de modulation de la cotisation universelle.

Le Gouvernement présente au Parlement une évaluation de cette expérimentation un an avant son terme. Le fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, le Conseil commun de la fonction publique et le Conseil national consultatif des personnes handicapées adressent également leurs observations.

Mme la présidente. L’amendement n° 404, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Cet amendement vise à supprimer les dispositions adoptées par la commission des lois visant à expérimenter un nouveau système de financement du FIPHFP.

À l’ouverture de nos débats, je vous ai assuré qu’un décret d’application de la loi du 5 septembre 2018, portant modification des modalités de calcul des contributions des différents employeurs publics au FIPHFP, serait pris rapidement. Le décret a été soumis au conseil commun de la fonction publique il y a un peu plus de quinze jours. Pour des raisons pratiques, et par un hasard du calendrier, l’ensemble des membres du Gouvernement compétents en la matière l’ont contresigné ce matin même, en marge du conseil des ministres.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Avec cet amendement, le Gouvernement souhaite supprimer une proposition du Sénat relative au handicap dans la fonction publique.

Le système actuel du financement du FIPHFP connaît deux difficultés principales.

Premièrement, ce fonds subit un effet de ciseaux : avec la progression du nombre d’agents handicapés, les ressources du fonds s’amenuisent alors que les besoins de financement augmentent. Ces dernières années, le fonds a réduit de 40 % le montant de ses conventions avec les employeurs publics, au détriment des agents en situation de handicap.

Deuxièmement, le système actuel favorise les employeurs publics qui « créent » du handicap. Plus les agents sont exposés à des risques professionnels, plus ils sont reclassés, ce qui permet de réduire d’autant les contributions de leur employeur. C’est un véritable effet pervers.

Face à ces difficultés structurelles, le Gouvernement a prévu un « sparadrap », c’est-à-dire des mesures ponctuelles pour stabiliser les ressources du fonds à 130 millions d’euros. Certaines mesures sont courageuses, comme la réduction des dérogations accordées par l’Assemblée nationale. Toutefois, ces dispositions sont insuffisantes pour régler l’effet de ciseaux constaté. Pis, elles ne répondent pas aux besoins du FIPHFP, que le Sénat a estimés à 150 millions d’euros.

Dès lors, il est important de lancer une expérimentation pour refonder le modèle de financement du fonds. Cette expérimentation pourrait être entreprise dès janvier 2020, en prenant en compte les propositions de Mme Lecocq. La mission qui lui est confiée dépasse d’ailleurs largement le champ du handicap.

Ce nouveau modèle se fonde sur une idée simple et juste : partons d’une cotisation universelle pour tous les employeurs et appliquons un bonus-malus pour valoriser les employeurs vertueux.

Ce bonus-malus est également la seule manière de pénaliser les employeurs qui multiplient les retraites ou les licenciements pour inaptitude. Comment être contre cette solution de bon sens ?

Pour garantir la faisabilité technique du dispositif, le Gouvernement pourra s’appuyer, non seulement sur le rapport d’information du Sénat, mais aussi sur le rapport de l’inspection générale des finances et de l’inspection générale des affaires sociales, publié en 2017, qu’il a lui-même commandé.

Pour ces raisons, la commission demande, comme précédemment, le retrait de l’amendement gouvernemental. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.

M. Philippe Mouiller. Monsieur le secrétaire d’État, je ne reviendrai pas sur les arguments que M. le rapporteur a détaillés, et que j’approuve ; j’insisterai simplement sur deux points.

Tout d’abord, la mesure que nous proposons est de nature expérimentale. Elle permettra de cibler un certain nombre de départements.

Ensuite, elle complétera la politique menée, aujourd’hui, par votre gouvernement en matière d’inclusion. Je pense notamment à la démarche « Territoires 100 % inclusifs ». À ce titre, dans certains bassins de vie, l’ensemble des collectivités se sont engagées pour des mesures d’accompagnement spécifiques. À ce titre, elles ont besoin de souplesse et de moyens financiers dédiés : l’expérimentation d’une cotisation spécifique pourra constituer une réponse.

Je tenais simplement à mettre en parallèle votre politique et l’urgence de créer des territoires inclusifs, qui implique des financements spécifiques de la part des collectivités. Par cohérence avec la politique transversale que mène le Gouvernement face au handicap, notamment au sein de la fonction publique, je vous invite à retirer votre amendement de suppression.

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.

M. Didier Marie. À mon sens, ces dispositions sont centrales, et je regrette que le Gouvernement veuille les supprimer.

Lors de l’examen de notre rapport, puis au cours des débats, nous avons tous insisté sur les difficultés financières structurelles que subit le FIPHFP.

Je ne reviendrai pas sur l’effet de ciseaux, mais j’insisterai sur une autre dimension qui doit être prise en compte : la pratique du maintien dans l’emploi, que l’on considère à l’échelle de la carrière des agents dans son ensemble et qui aboutit à l’embolie du dispositif. Pour notre part, nous proposons de ne prendre en considération le maintien dans l’emploi que pendant cinq années. Ainsi, de nouveaux postes pourront être ouverts en faveur des travailleurs en situation de handicap.

En outre – cela a été dit et redit, mais, à l’évidence, il faut encore le répéter –, nous proposons une expérimentation. Mettez, en parallèle, la cotisation universelle fondée sur la masse salariale, de 0,1 %, et celle que la fonction publique territoriale verse au Centre national de la fonction publique territoriale, le CNFPT, de 0,9 % : vous verrez que la participation ici proposée n’est pas très lourde.

En effet, pour que les collectivités ou administrations les plus vertueuses ne soient pas pénalisées, nous avons souhaité instaurer un bonus permettant de tempérer leur participation. Inversement, un malus majorera les cotisations des structures qui n’ont pas fait les efforts nécessaires et qui, éventuellement, rechigneraient encore à le faire.

Pour ma part, je voterai contre cet amendement de suppression.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des lois.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. J’ai entre les mains le très bon rapport de Mme Di Folco et de M. Didier Marie. Il est on ne peut plus clair quant aux restrictions budgétaires que le fonds d’insertion pour les personnes handicapées dans la fonction publique est en train d’appliquer.

Monsieur le secrétaire d’État, je vous recommande en particulier de lire la page 66. Elle détaille les mesures qu’a prises le fonds, par obligation budgétaire, pour la réduction des dépenses d’intervention : réduction de 40 % du montant des conventions employeurs – ce sont les conventions que le fonds passe avec des employeurs publics pour obtenir de ceux-ci l’engagement de recruter des personnes handicapées et de les accompagner dans leur travail ; plafonnement des aides ponctuelles à 100 000 euros sur trois ans ; instauration d’un plancher de prise en charge, les dépenses de moins de 200 euros n’étant plus remboursées par le fonds ; réduction du montant de certaines aides – par exemple, le plafond de remboursement des prothèses auditives est abaissé de 3 000 à 1 600 euros ; connaissez-vous le prix des prothèses auditives ? ; suppression des aides accordées pour assurer l’accessibilité des bâtiments.

Il faut donner un coup d’arrêt à ce rétrécissement de la capacité d’action du FIPHFP.

Nous vous invitons instamment à mener, avec nous, ce combat pour l’insertion des personnes handicapées dans les fonctions publiques. Les résultats se sont améliorés au fil des années : c’est une raison supplémentaire de conjurer le risque d’un recul.

Cette grande politique sociale est émancipatrice : donner du travail aux personnes handicapées, c’est leur faire prendre pleinement part à la vie de la société. Nous ne devons donc pas suivre, en la matière, une logique strictement budgétaire ; et nous ne pouvons pas laisser les choses en l’état. D’ailleurs, je ne crois pas qu’en dotant ce fonds décemment l’on expose le budget de l’État à une grande menace ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud de Belenet, pour explication de vote.

M. Arnaud de Belenet. Mes chers collègues, ce que j’entends aujourd’hui, c’est un consensus portant à la fois sur le constat et sur les objectifs.

Le FIPHFP, inventé il y a quelques années, ne fonctionne plus. D’ailleurs, chacun de ceux qui l’ont créé et qui ont élaboré ses modalités de financement savait bien que sa durée de vie était limitée. Aujourd’hui, nous réitérons ce constat et nous faisons le bilan, plus ou moins larmoyant, de ses effets et de ses limites.

Pour ma part, je voterai l’amendement du Gouvernement,…

M. Laurent Duplomb. C’est un scoop !

M. Arnaud de Belenet. … non parce que ces dispositions sont contre l’insertion des personnes handicapées, non parce que je suis membre du groupe La République En Marche, mais parce qu’un travail approfondi est encore nécessaire. (M. le président de la commission des lois brandit le rapport dinformation de Mme Di Folco et M. Marie.)

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Le travail approfondi, il est là !

M. Arnaud de Belenet. Non seulement de nouveaux rapports vont arriver, mais je m’en remets à la navette : j’espère que nous pourrons avancer et que la commission mixte paritaire nous permettra de trouver un consensus.

De plus, un rapport qui, quoique pluraliste, n’est issu que de l’opposition nationale, ne peut pas produire tous ses effets. Or, quand on veut rassembler sur un sujet, il est bon de savoir s’ouvrir…

Enfin, de manière plus personnelle, le papa d’un jeune handicapé que je suis apprécie assez modérément l’instrumentalisation que certains échanges pourraient donner l’impression de développer.

Ces sujets concernent un certain nombre d’entre nous à titre personnel, et il serait bon qu’ils ne soient pas instrumentalisés. À l’inverse, nous devons grandir par la recherche du compromis et du consensus en commission mixte paritaire. Je l’espère très sincèrement ; et je ne doute pas une seconde que le secrétaire d’État et le Gouvernement tout entier visent, en la matière, les mêmes objectifs que la majorité sénatoriale !

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Il leur suffit de le démontrer !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 404.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 34 B.

(Larticle 34 B est adopté.)

Article 34 B (priorité) (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article 34 D (priorité) (nouveau)

Article 34 C (priorité) (nouveau)

À titre expérimental et pour une durée de cinq ans à compter de la publication de la présente loi, les personnes mentionnées aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l’article L. 5212-13 du code du travail peuvent être titularisés, à l’issue de leur contrat d’apprentissage, dans le corps ou cadre d’emploi correspondant à l’emploi qu’elles occupaient.

Cette titularisation est conditionnée à la vérification de l’aptitude professionnelle de l’agent. Une commission de titularisation se prononce au vu du parcours professionnel de l’agent et après un entretien avec celui-ci.

Un décret en Conseil d’État définit les modalités de cette expérimentation. Il précise les conditions minimales de diplôme exigées et les conditions du renouvellement éventuel du contrat d’apprentissage.

Une évaluation de cette expérimentation est présentée au Parlement un an avant son terme. – (Adopté.)

Article 34 C (priorité) (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 34 D (priorité) - Amendement  n° 263 rectifié

Article 34 D (priorité) (nouveau)

I. – Le dernier alinéa de l’article 41 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les informations recueillies dans cet espace numérique sont transmises au service public de l’emploi. »

II. – À titre expérimental et pour une durée de cinq ans à compter de la publication de la présente loi, les personnes mentionnées aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l’article L. 5212-13 du code du travail peuvent déposer leur curriculum vitae sur l’espace numérique mentionné au dernier alinéa de l’article 41 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.

Les employeurs mentionnés à l’article 2 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires peuvent, après identification, consulter ces documents dans le seul objectif de recruter des agents en situation de handicap.

Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, définit les modalités de cette expérimentation. Il précise la durée de conservation des données enregistrées et les conditions de leur mise à jour ainsi que les moyens à mettre en œuvre pour garantir la confidentialité du dispositif.

Une évaluation de cette expérimentation est présentée au Parlement un an avant son terme.

Mme la présidente. L’amendement n° 415, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Au-delà de mes précédents propos et de la convergence de vues que M. de Belenet a relevée avec raison, nous pouvons avoir quelques divergences quant au calcul des montants nécessaires en la matière, du fait de l’application d’autres politiques menées par le Gouvernement. Je pense, notamment, au « reste à charge zéro », pour reprendre l’un des exemples avancés.

À nos yeux, l’article 34 D est de nature plus réglementaire que législative. En outre, nous considérons que l’espace numérique commun « Place de l’emploi public », institué par un décret du 28 décembre 2018 et opérationnel depuis la mi-février 2019, permet de répondre aux attentes exprimées.

Nous devons encore améliorer le dispositif « Place de l’emploi public » : il s’agit de le mettre en interface avec un certain nombre de sites et de sources d’information, de manière à avoir une meilleure lecture de l’ensemble des données à la disposition des candidats, des agents et des employeurs publics.

Pour l’heure, je propose la suppression de cet article.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Cet amendement vise à revenir sur une importante proposition du rapport de Mme Di Folco et de M. Marie.

Mes chers collègues, le Gouvernement a créé un site, « Place de l’emploi public », devant regrouper les offres d’emploi des employeurs publics. Toutefois, ce site n’est connecté ni à Pôle emploi ni à Cap emploi. En conséquence, les offres d’emploi dont il s’agit ne disposent, par ce biais, d’aucune visibilité.

En outre, le recours à la loi est nécessaire pour prévoir les conditions dans lesquelles des personnes handicapées pourraient déposer leur curriculum vitae dans un espace dédié de « Place de l’emploi public ». Il s’agit d’encadrer la diffusion de ces données sensibles avec l’aide de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL.

Aussi, la commission est défavorable à cet amendement de suppression.

Je le rappelle d’autant plus volontiers que je n’en suis pas l’auteur : le rapport de Catherine Di Folco et Didier Marie, c’est 8 mois de travail, c’est 104 auditions, c’est une adoption à l’unanimité par la commission des lois du Sénat. C’est donc un travail sérieux, et c’est une approche du handicap dans la fonction publique qui se veut la plus universelle et la plus bienveillante possible.

En tant que rapporteur, je ne voudrais donc pas que le débat dérape s’agissant de sujets qui nous touchent tous, les uns et les autres, à divers degrés dans nos vies personnelles. On ne peut pas persister dans la procrastination au motif qu’il faudrait encore réfléchir davantage.

Nous débattons de l’inclusion des personnes handicapées dans l’emploi public. Nous voulons transformer la fonction publique – en tout cas, le Gouvernement prétend le faire, et de notre côté, nous nous efforçons de l’y aider. Il s’agit là d’un sujet important ; c’est précisément la raison pour laquelle nous avons appelé ces articles en priorité, aujourd’hui, à quatorze heures trente. Nous ne voulions pas le voir examiné dans la nuit, à une heure où les travées de cet hémicycle seraient moins fournies. Ce faisant, nous avons démontré l’importance que nous attachons à cette partie du texte !

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Merci !

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Je précise que, conformément au vœu de la commission des lois, l’interface entre le site « Place de l’emploi public » et celui de Pôle emploi est en cours de réalisation. En outre, les premières discussions vont être ouvertes avec Cap emploi.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.

M. Philippe Mouiller. Monsieur le secrétaire d’État, je m’efforce d’accompagner, dans cette démarche, les collectivités du département dont je suis l’élu. À ce titre, Cap emploi fait l’objet d’un suivi particulier.

Vous le soulignez avec raison : plusieurs actions sont mises en œuvre pour assurer une convergence des outils numériques. Mais, concrètement, sur le terrain, on estime entre dix-huit et vingt-quatre mois le temps nécessaire pour les rendre efficientes !

L’expérimentation pourrait justement permettre une phase de transition : le Gouvernement en maîtriserait la durée et les contours. De manière pragmatique, nous aurions, dès le 1er janvier prochain, un outil opérationnel dans les départements. (M. le président de la commission des lois opine.) Au fur et à mesure du déploiement de cette interface, vous seriez en mesure d’éteindre l’expérimentation, avec la certitude de disposer d’un outil qui fonctionne.

Enfin, la mesure que nous proposons permettra à des collectivités qui n’ont pas connaissance des démarches spécifiques d’accueillir des personnes en situation de handicap. Au nom de nos départements, je vous demande, du fond du cœur, de bien vouloir retirer votre amendement !

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.

M. Didier Marie. J’ai écouté M. de Belenet avec une certaine émotion, et je tiens à le rassurer : personne ici n’entend instrumentaliser un sujet qui nous touche toutes et tous, et qui fait l’objet d’un large consensus.

Le travail d’élaboration de notre rapport a fait remonter des demandes et des aspirations convergentes. M. le rapporteur vient de le rappeler : nous avons mené un grand nombre d’auditions, qu’il s’agisse du FIPHFP, des syndicats ou des associations de personnes en situation de handicap.

Tous nos interlocuteurs nous ont fait part des mêmes volontés : premièrement, rétablir la situation financière du FIPHFP ; deuxièmement, améliorer la coordination des acteurs, qui – il faut le dire – est mauvaise dans certains endroits ; troisièmement, inciter l’ensemble des acteurs publics à faire les efforts nécessaires, via la généralisation de référents ; quatrièmement, diversifier l’accès à l’emploi public, notamment par l’apprentissage et les contrats ad hoc, qui existent déjà, mais qui sont insuffisamment employés ; cinquièmement, enfin, simplifier le fonctionnement du FIPHFP.

Tous ces efforts doivent concourir à améliorer l’inclusion des personnes en situation de handicap dans la fonction publique. C’est un objectif que nous avons toutes et tous en partage ; dans certaines branches, il y a encore beaucoup de travail à faire.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 415.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 34 D.

(Larticle 34 D est adopté.)

Article 34 D (priorité) (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article 34 (priorité)

Article additionnel après l’article 34 D (priorité)

Mme la présidente. L’amendement n° 263 rectifié, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 34 D

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport ayant pour objectif d’évaluer l’opportunité de créer un corps spécifique pour les accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH).

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Mes chers collègues, je connais les réticences que vous inspirent les demandes de rapport,…

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. En effet !

Mme Éliane Assassi. … mais les limites constitutionnelles qui entourent le droit d’amendement dans notre chambre nous obligent bien souvent à solliciter ce type d’études.

Il faut, une nouvelle fois, se pencher sur la situation des accompagnants des élèves en situation de handicap, les AESH. Lors de l’examen du projet de loi pour une école de la confiance, nous avons longuement débattu de leur absence de statut. Comment expliquer que des agents publics répondant à un besoin permanent, indispensables au bon fonctionnement de l’éducation nationale, soient laissés dans une précarité absolue ? C’est bien le premier enjeu d’un statut de fonctionnaires pour les AESH : la sortie de la précarité.

Nous le savons, la situation est tout à fait insatisfaisante, et à tout point de vue, pour les AESH. Ainsi, la diversité des employeurs conduit à l’absence de cadre et nourrit de graves situations de discrimination, selon que l’État ou les établissements sont recruteurs, ou encore en fonction des académies et des directions desdits établissements.

Le recrutement se fait, en dépit du bon sens, à temps partiel et à durée déterminée, ce qui entraîne des rémunérations particulièrement faibles et une imprévisibilité de l’emploi. En parallèle, cette situation participe fortement des difficultés que rencontrent de nombreuses familles à chaque rentrée.

Fonctionnariser les AESH constituerait une solution juste socialement pour ces derniers et une garantie pour qu’ils soient affectés en amont de la rentrée scolaire. Par ailleurs, il faut relever que, en l’absence de cadre, les AESH ont bien du mal à faire valoir leur expérience : ils repartent de zéro à chaque changement d’établissement, s’ils sont recrutés à cette échelle, ou à chaque changement de département, si les rectorats sont les employeurs.

En outre, il est grand temps de reconnaître à sa juste valeur l’apport des AESH au bon fonctionnement du service public d’éducation. Le ministre de l’éducation nationale a pointé, à juste titre, les difficultés qu’il avait à recruter des AESH. Au vu du tableau que je viens de dépeindre, cela n’est guère étonnant ; et ce n’est pas en assouplissant les conditions de recrutement, comme on l’a fait il y a un an, que le problème sera résolu.

Voilà pourquoi nous formulons, au travers de cet amendement, une demande de rapport.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Ma chère collègue, vous le rappelez vous-même, face aux demandes de rapport, la commission suit une position constante qui ne souffre que très peu d’exceptions. Aussi, elle demande le retrait de cet amendement. Cela étant, ses dispositions nous donnent l’occasion d’évoquer un sujet important, et elles nous permettront d’entendre le Gouvernement sur ce point.

Aujourd’hui, les AESH gagnent en moyenne 700 euros par mois, sur la base de contrats précaires ; seuls 2 % d’entre eux travaillent à temps plein. Le Gouvernement a pris plusieurs engagements, notamment de porter à 30 % la proportion d’AESH à temps plein d’ici à la rentrée prochaine, ou encore de permettre l’octroi d’un CDI lorsqu’un AESH a obtenu deux CDD de trois ans.

Nous attendons que le Gouvernement nous détaille ses engagements et, surtout, qu’il les tienne !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Comme pour la quasi-totalité des demandes de rapport, le Gouvernement émet, sur cet amendement, un avis défavorable.

Madame Assassi, au-delà de la position de principe, et à la suite de M. Blanquer, je vous assure que l’amélioration durable du cadre d’emploi et des conditions d’exercice des AESH constitue une priorité du ministère de l’éducation nationale. Des avancées majeures ont été accomplies, notamment grâce à une forte mobilisation de moyens humains pour un meilleur accueil des élèves.

Pour ce qui concerne, plus particulièrement, les questions que vous évoquez, à l’issue d’une large concertation avec les partenaires sociaux, le ministère a adopté un nouveau cadre de gestion de ses agents. Il s’agit d’un des leviers essentiels du saut qualitatif annoncé, lequel est nécessaire pour construire une école inclusive et transformer durablement le dispositif d’accompagnement.

Ce nouveau cadre pose les fondements d’une gestion pérenne et valorisante des accompagnants d’élèves en situation de handicap. Il définit des mesures de nature à consolider leur place dans la communauté éducative, en améliorant à la fois leur gestion administrative et leurs conditions d’exercice, avec l’allongement de la durée des contrats, l’accroissement de la quotité travaillée et la meilleure prise en compte, en rémunération, des activités connexes à l’accompagnement des élèves.

Les travaux dont il s’agit ont vocation à se poursuivre pour renforcer ces acquis fondamentaux. Ils s’appuient sur une réflexion aboutie.

Au fond, la principale difficulté que soulève votre suggestion est la suivante : le rapport que vous proposez vise un objet dont, en réalité, l’opportunité a déjà été évaluée. La création d’un corps d’AESH au sein de la fonction publique d’État conduirait, in fine, à appliquer aux mêmes AESH des règles de gestion potentiellement moins favorables que les dispositions définies dans le nouveau cadre de gestion que le ministre de l’éducation nationale met en place.

En particulier, la gestion d’un corps impliquant d’éventuelles mobilités à l’échelle académique ou départementale, et une mobilité fonctionnelle accrue entre maternelle, élémentaire et second degré, la création d’un corps pourrait tarir le vivier des personnes intéressées par le métier sans répondre pour autant à l’objectif d’amélioration des conditions d’emploi des AESH.

Pour des raisons d’attractivité, et pour la pérennité de l’engagement de chacun des AESH auprès des élèves en situation de handicap, nous préférons donc ne pas retenir cette formule.

En résumé, nous allons continuer à travailler sur le fond. Le ministre de l’éducation nationale s’y est engagé dans les termes que je viens de rappeler. De plus, la demande de rapport que vous formulez me semble satisfaite par le travail de concertation mené. Enfin, vous connaissez la position constante du Gouvernement en la matière.

Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Cartron, pour explication de vote.

Mme Françoise Cartron. Mes chers collègues, pas plus tard qu’hier, je me suis rendue à l’inspection académique de la Gironde, où le directeur académique des services de l’éducation nationale, le Dasen, présentait, avec le recteur, le nouveau dispositif de l’école inclusive. Ils ont apporté un certain nombre de réponses et d’engagement très précis, dont je tiens à vous faire part.

En Gironde, tous les nouveaux AESH seront recrutés au 20 août prochain. Entre cette date et celle de la rentrée scolaire, ils bénéficieront de 60 heures de formation. Mme Assassi l’a dit avec raison : il faut des personnes formées pour accompagner les enfants en situation de handicap.

Ces AESH seront recrutés sur des temps pleins, qui pourront être fractionnés afin de leur permettre d’accompagner deux ou trois enfants. Ils disposeront d’un CDD de trois ans renouvelable ouvrant sur un CDI.

J’ajoute que, en Gironde, nous allons expérimenter une formation conjointe entre l’enseignant et l’AESH : tous deux doivent intervenir ensemble dans un même lieu, pour ces élèves qui sont en situation de fragilité particulière.

La situation actuelle est marquée à la fois par une précarité totale et par une faiblesse de formation, alors même que nous avons besoin, dans ce domaine, d’emplois très qualifiés. La Gironde est souvent exemplaire, et j’ose espérer que les mesures volontaristes mises en œuvre dans notre territoire pourront être déployées dans les autres départements !

Mme la présidente. Madame Assassi, l’amendement n° 263 rectifié est-il maintenu ?

Mme Éliane Assassi. Je me doutais qu’une demande de rapport ne serait pas bien accueillie, et j’ai conscience qu’une telle étude ne suffira pas pour répondre à cette grande question. Je vais donc retirer mon amendement. Cela étant, nous avons pointé la problématique des AESH et le manque de reconnaissance de leurs savoir-faire.

Madame Cartron, j’ai bien entendu les précisions que vous nous avez apportées à propos de la Gironde. Malheureusement, je crains que la Seine-Saint-Denis ne soit pas dans la même situation…

Je retire mon amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 263 rectifié est retiré.

Article additionnel après l'article 34 D (priorité) - Amendement  n° 263 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article 35 (priorité)

Article 34 (priorité)

I. – L’article 6 sexies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) Au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;

b) Les mots : « de l’exercer et d’y progresser ou pour qu’une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée » sont remplacés par les mots : « de développer un parcours professionnel et d’accéder à des fonctions de niveau supérieur ainsi que de bénéficier d’une formation adaptée à leurs besoins tout au long de leur vie professionnelle » ;

2° Sont ajoutés des II à IV ainsi rédigés :

« II. – Tout agent a le droit de consulter un référent handicap, chargé de l’accompagner tout au long de sa carrière et de coordonner les actions menées par son employeur en matière d’accueil, d’insertion et de maintien dans l’emploi des personnes handicapées.

« La fonction de référent handicap peut être mutualisée entre plusieurs employeurs publics.

« III. – Lorsqu’ils effectuent une mobilité, les agents mentionnés à l’article 34 de la présente loi ont le droit de conserver leur aménagement de poste pour exercer leurs nouvelles fonctions.

« Un décret en Conseil d’État définit les conditions dans lesquelles leur nouvel employeur participe financièrement à l’amortissement de leur aménagement de poste.

« IV. – Le Conseil national consultatif des personnes handicapées est saisi pour avis des projets de loi, d’ordonnance et de décret relatifs à l’accueil, à l’insertion et au maintien dans l’emploi des personnes handicapées dans la fonction publique. »

II. – L’article 27 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du I, les mots : « ayant fait l’objet d’une orientation en milieu ordinaire de travail par la commission prévue à l’article L. 146-9 du code l’action sociale et des familles » sont supprimés ;

2° Le dernier alinéa du même I est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Des dérogations aux règles normales de déroulement des concours, des procédures de recrutement et des examens sont prévues afin d’adapter la durée et le fractionnement des épreuves en fonction de la nature du handicap des candidats mentionnés au premier alinéa du présent I ou de leur apporter les aides humaines et techniques nécessaires précisées par eux préalablement au déroulement des épreuves. Des temps de repos suffisants sont accordés à ces candidats entre deux épreuves successives, de manière à leur permettre de composer dans des conditions compatibles avec leur situation.

« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application de l’avant-dernier alinéa du présent I. » ;

3° Au III, les mots : « fonctionnaires handicapés » sont remplacés par les mots : « agents publics en situation de handicap ».

III. – L’article 35 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « ayant fait l’objet d’une orientation en milieu ordinaire de travail par la commission prévue à l’article L. 146-9 du code l’action sociale et des familles » sont supprimés ;

2° L’avant-dernier alinéa est ainsi rédigé :

« Des dérogations aux règles normales de déroulement des concours, des procédures de recrutement et des examens sont prévues afin d’adapter la durée et le fractionnement des épreuves en fonction de la nature du handicap des candidats mentionnés au premier alinéa du présent article ou de leur apporter les aides humaines et techniques nécessaires précisées par eux préalablement au déroulement des épreuves. Des temps de repos suffisants sont accordés à ces candidats entre deux épreuves successives, de manière à leur permettre de composer dans des conditions compatibles avec leur situation. Les conditions d’application de ces dérogations sont fixées par décret en Conseil d’État. » ;

3° Au dernier alinéa, les mots : « fonctionnaires handicapés » sont remplacés par les mots : « agents publics en situation de handicap ».

IV. – Le I de l’article 27 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 précitée est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « ayant fait l’objet d’une orientation en milieu ordinaire de travail par la commission prévue à l’article L. 146-9 du code l’action sociale et des familles » sont supprimés ;

2° L’avant-dernier alinéa est ainsi rédigé :

« Des dérogations aux règles normales de déroulement des concours, des procédures de recrutement et des examens sont prévues afin d’adapter la durée et le fractionnement des épreuves en fonction de la nature du handicap des candidats mentionnés au premier alinéa du présent I ou de leur apporter les aides humaines et techniques nécessaires précisées par eux préalablement au déroulement des épreuves. Des temps de repos suffisants sont accordés à ces candidats entre deux épreuves successives, de manière à leur permettre de composer dans des conditions compatibles avec leur situation. Les conditions d’application de ces dérogations sont fixées par décret en Conseil d’État. » ;

3° Au dernier alinéa, les mots : « fonctionnaires handicapés » sont remplacés par les mots : « agents publics en situation de handicap ».

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.

Mme Laurence Cohen. Le taux de chômage des personnes en situation de handicap est de 19 % : son niveau est deux fois plus élevé que pour les personnes valides, et il faut reconnaître que la fonction publique a encore des progrès à effectuer pour intégrer ces salariés – nous en avons parlé.

Il est inacceptable que, en 2019, les personnes en situation de handicap soient encore victimes de discriminations lors de leur recrutement. Des efforts doivent être réalisés pour l’adaptation des épreuves des concours et des examens de la fonction publique, comme pour la sensibilisation des personnels chargés des ressources humaines. Surtout, le nombre de postes ouverts aux handicapés doit être étendu.

La mission d’information sur la politique de l’emploi des personnes handicapées dans la fonction publique, menée par Catherine Di Folco et Didier Marie, à laquelle notre rapporteur, Loïc Hervé, a d’ailleurs fait référence, a permis de chiffrer à 280 760 le nombre de travailleuses et de travailleurs handicapés dans la fonction publique. Le taux global de fonctionnaires handicapés s’élève à 5,61 %, pourcentage inférieur à l’obligation d’emploi, fixée à 6 %.

La fonction publique doit donc redoubler d’efforts pour employer davantage de personnes handicapées. L’État doit lancer un vrai plan en faveur de l’emploi des personnes victimes d’un handicap, dans l’ensemble des trois fonctions publiques. Je signale que cet effort, quoique insuffisant, est plus important dans les collectivités territoriales, puisque le taux de fonctionnaires handicapés y est de 6,76 %.

Avant de conclure, je tiens à exprimer une inquiétude du groupe CRCE en matière de sémantique – cette dernière a toute son importance. Pour la fonction publique d’État, les termes de « fonctionnaires handicapés » sont remplacés, dans le présent texte, par ceux d’« agents publics en situation de handicap ».

Monsieur le secrétaire d’État, cette évolution, loin d’être anecdotique, met en lumière le projet global de votre gouvernement : réduire le périmètre d’intervention de l’État et supprimer les spécificités protectrices des agents qui y concourent, au profit d’une contractualisation à outrance. Nous continuons de nous y opposer et de défendre l’ensemble des fonctionnaires, y compris, bien entendu, les fonctionnaires handicapés.

Mme la présidente. La parole est à Mme Esther Benbassa, sur l’article.

Mme Esther Benbassa. Cet article encourage le développement du parcours professionnel des personnes en situation de handicap engagées dans la fonction publique. Il entend, de plus, faciliter la mise en œuvre d’aménagements en leur faveur lors du déroulement des épreuves des concours et examens.

Si les intentions sont louables, le système d’aide aux travailleurs handicapés est à bout de souffle, comme le dénonce d’ailleurs un récent rapport de la commission des lois du Sénat.

Le fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, destiné à financer des actions pour favoriser l’emploi de ces personnes et leur insertion professionnelle, est en grande difficulté financière ; ses aides ont ainsi baissé de 30 % entre 2014 et 2018.

Les personnes handicapées, souffrant déjà d’invisibilisation et de stigmatisation en France, sont pourtant des acteurs indispensables pour notre administration, qui doit refléter notre société dans toute sa diversité.

Aussi, nous aurions souhaité que le recrutement par voie contractuelle soit assoupli, afin de multiplier les titularisations de ces agents. Il n’en est rien dans ce projet de loi.

La loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées imposait au secteur public d’embaucher au moins 6 % de fonctionnaires handicapés. En 2019, nous sommes malheureusement toujours en deçà de cette obligation légale, notamment dans la fonction publique d’État, dans laquelle les personnes handicapées représentent seulement 4,65 % des effectifs.

Le Gouvernement n’a manifestement pas pris en compte ces appels à l’aide et a manqué, une fois de plus, de la volonté de mieux faire, prouvant ainsi que la protection des plus vulnérables n’était pas sa priorité.

Mme la présidente. L’amendement n° 522, présenté par MM. de Belenet, Mohamed Soilihi, Amiel, Bargeton et Buis, Mme Cartron, MM. Cazeau, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Navarro, Patient, Patriat et Rambaud, Mme Rauscent, M. Richard, Mme Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa :

« II. – Tout agent a le droit de consulter un référent handicap, chargé d’orienter, d’informer et d’accompagner les personnes en situation de handicap afin que celles-ci puissent développer leur parcours professionnel, accéder à des fonctions de niveau supérieur et bénéficier d’une formation adaptée à leurs besoins tout au long de leur vie professionnelle.

II. – Après l’alinéa 7

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

« Le référent handicap œuvre concomitamment à la sensibilisation de l’ensemble des agents sur la nécessité de favoriser l’égalité professionnelle pour les travailleurs en situation de handicap.

« Cette fonction de conseil et de sensibilisation s’exerce sans préjudice de la responsabilité et des prérogatives du chef de service.

« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités et critères de désignation des référents handicap.

La parole est à Mme Françoise Cartron.

Mme Françoise Cartron. Cet amendement vise à suggérer une nouvelle rédaction de la disposition permettant à tout agent public de consulter un référent handicap, en tendant à opérer quelques corrections qui nous semblent, en toute rigueur, formaliser cette faculté sous un jour plus positif.

Tel qu’il est actuellement rédigé, l’alinéa 6 se borne en effet à évoquer les seules conditions d’accueil, d’insertion et de maintien dans l’emploi des personnes handicapées. Or je persiste à croire que cette sobriété légistique n’est pas si raisonnable qu’il y paraît.

Mes chers collègues, décrire un handicap, c’est définir les moyens de l’appréhender et, par là même, organiser les conditions de son acceptabilité sociale. Parler de « maintien » et d’« insertion », c’est déjà imprimer dans la loi un présupposé inégalitaire.

Être traité en handicapé, voilà bien le premier des handicaps ! Nos textes de loi doivent être soucieux de ces formules de langage : en aucune façon, le « maintien » dans un emploi ne saurait être vécu comme une forme d’accomplissement professionnel.

Nous préférons, en ce sens, voir reconnaître au référent un rôle plus dynamique et plus positif, corrélé, par nature, à la possibilité pour l’agent en situation de handicap d’accéder à des fonctions de niveau supérieur.

Par ailleurs, il nous semblait opportun de préciser que le référent handicap devait œuvrer concomitamment à la sensibilisation de l’ensemble des agents à la nécessité de favoriser l’égalité professionnelle pour tous les travailleurs en situation de handicap.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. L’amendement n° 522 vise à réécrire les dispositions relatives au référent handicap.

La rédaction de la commission me semble préférable, car le référent handicap doit pouvoir être consulté pour tous les agents, sans aucune distinction. Il pourra, par exemple, aider à la reconversion des agents faisant face à des risques professionnels, avant la déclaration d’inaptitude et la reconnaissance du handicap.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis serait défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement, pour deux raisons.

Premièrement, la quasi-totalité des items qui y figurent nous paraît relever du niveau réglementaire et sera reprise dans les textes réglementaires d’application.

Deuxièmement, nous marquons une nuance d’interprétation sur la rédaction que vous proposez. Nous considérons en effet que, si chaque agent en situation de handicap doit avoir droit à un accompagnement personnalisé, celui-ci sera évidemment le fait du référent handicap, reconnu par la loi, à l’existence duquel les alinéas 6 et 7 donnent force de loi en lui conférant une reconnaissance formelle dont il ne bénéficiait pas précédemment. En revanche, on ne peut pas exclure, ainsi que le sous-tend la rédaction que vous proposez, que cet accompagnement puisse être effectué par autre agent de la collectivité, qui ne serait pas nécessairement le référent handicap, mais qui serait cependant capable de jouer ce rôle.

Dans la rédaction des textes réglementaires, nous reprendrons vos objectifs, tout en précisant que, outre un référent handicap qui a une mission de coordination et d’animation, tout agent en capacité de le faire et d’être utile auprès d’un collègue en situation de handicap peut se voir confier cet accompagnement.

Mme la présidente. Madame Cartron, l’amendement n° 522 est-il maintenu ?

Mme Françoise Cartron. J’ai bien entendu que son objet entrait dans le domaine réglementaire et que le Gouvernement prendra en compte ses objectifs ; je le retire donc, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 522 est retiré.

L’amendement n° 272 rectifié ter, présenté par MM. Longeot, Henno et Cadic, Mme Vullien, MM. Laugier et Prince, Mme Billon, M. Canevet, Mme Joissains, MM. Détraigne, Moga, Kern et Lafon et Mmes Doineau, Sollogoub, C. Fournier et Guidez, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 7

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

« … – L’employeur public désigne, parmi ses agents, un tuteur chargé, sur la base du volontariat, d’accompagner les agents mentionnés au présent article dans l’exercice de leurs fonctions et dans leur intégration au collectif de travail.

« L’employeur veille à ce que le tuteur dispose, sur son temps de travail et en fonction de la nature du handicap, des disponibilités nécessaires à l’accompagnement de l’agent.

« La fonction tutorale peut être partagée entre plusieurs agents.

La parole est à M. Jean-François Longeot.

M. Jean-François Longeot. Beaucoup reste à faire pour que les personnes handicapées puissent s’intégrer convenablement et durablement au sein du marché du travail. J’en veux pour preuve que leur taux de chômage reste deux fois plus élevé que la moyenne nationale.

Au sein de la fonction publique, de réels progrès ont été constatés ces dernières années, notamment à la suite de l’introduction de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés : entre 2006 et 2018, le taux d’emploi légal des personnes handicapées est passé de 3,74 % à 5,61 %.

Chaque année, ce sont ainsi plus de 30 000 travailleurs handicapés qui sont recrutés dans la fonction publique, soit deux fois plus qu’en 2009. Ces derniers rencontrent toutefois de véritables obstacles, identifiés dans l’excellent rapport de nos collègues Catherine Di Folco et Didier Marie relatif au handicap dans la fonction publique.

À ce titre, l’amendement que je vous soumets vise à valoriser le rôle des tuteurs chargés d’accompagner leurs collègues handicapés. Engagés sur la base du volontariat, ils ne bénéficient aujourd’hui d’aucune garantie statutaire, ce qui peut parfois freiner l’accompagnement des agents handicapés et empêcher certains d’entre eux de trouver un emploi pérenne au sein de la fonction publique.

Je vous propose donc, sur le modèle des maîtres d’apprentissage, de faire bénéficier ces tuteurs de nouveaux droits afin d’améliorer l’accompagnement des agents handicapés et, in fine, leur maintien dans l’emploi. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. L’amendement n° 272 rectifié ter de M. Longeot tend à permettre de reconnaître le rôle des tuteurs, accompagnant les agents handicapés dans leur intégration au collectif de travail. Il s’inscrit dans la logique du rapport de Mme Catherine Di Folco et de M. Didier Marie.

Le tuteur complétera utilement le rôle du référent déontologue chargé d’impulser la politique du handicap dans chaque administration.

La commission y est favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement est plus réservé. L’amendement que vous proposez, monsieur le sénateur Longeot, tend à préciser les droits dont dispose un tuteur, notamment en termes de disponibilité.

Toutefois, au début de son dispositif, il est précisé de manière affirmative que l’employeur désigne un tuteur, ce qui donne à cette désignation un caractère prescriptif. Or il ne nous paraît pas nécessairement opportun que chaque agent en situation de handicap soit accompagné d’un tuteur, de manière systématique, y compris lorsqu’il n’en a pas besoin.

Nous considérons en effet que le rôle du référent est important et que le rôle de tuteur doit être reconnu lorsque sa présence est nécessaire. Pour autant, nous n’allons pas jusqu’à la rédaction que vous proposez et qui rend obligatoire et automatique sa désignation.

La partie de votre amendement relative à l’accompagnement en termes de droits et de disponibilité nous paraît toutefois intéressante ; nous aurons l’occasion d’en reparler au cours de la navette.

L’avis du Gouvernement est donc différent de celui de la commission et défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.

M. Didier Marie. Je remercie M. Longeot de son amendement, qui va dans le sens du rapport que ma collègue Catherine Di Folco et moi-même avons réalisé.

En réponse à vos propos, monsieur le secrétaire d’État, je voudrais citer l’alinéa tel qu’il est rédigé : « l’employeur public désigne, parmi ses agents, un tuteur chargé, sur la base du volontariat […] ». On trouvera évidemment dans chacune de nos administrations, dès lors qu’elles ont plus de vingt salariés, un volontaire pour être référent, à qui l’on donnera, à ce titre, les moyens nécessaires pour effectuer cette tâche, qui nous paraît très importante.

Lors de nos auditions, la question du référent a été mentionnée à maintes reprises par nos divers interlocuteurs comme un élément important permettant la prise en charge des personnes en situation de handicap.

Jusqu’à présent, il ne s’agit que de personnes volontaires et nous avons constaté, dans bon nombre d’administrations, que cette mission dépendait de l’engagement personnel d’un cadre ou d’un directeur des ressources humaines et que, lorsque cette personne passait la main, le dispositif pouvait s’écrouler.

Nous considérons donc qu’une structuration des référents dans chaque administration serait un plus pour l’inclusion des personnes en situation de handicap. Nous sommes favorables à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Monsieur le sénateur Marie, il n’y a pas de sujet sur la question du référent ; s’agissant des tuteurs, sur lesquels porte cet amendement, nous avons une divergence d’appréciation.

Je ne remets pas en cause la rédaction de M. le sénateur Longeot sur le caractère volontaire de celui qui accepte, ou qui n’accepterait pas, d’être tuteur. En revanche, tous les agents en situation de handicap n’auront pas nécessairement besoin de ce tutorat, alors que la rédaction affirmative de cet amendement rend automatique la désignation d’un tuteur pour chacun, sur la base, certes, du volontariat.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Loïc Hervé, rapporteur. La rédaction de l’amendement n° 272 rectifié ter de Jean-François Longeot doit sans doute être améliorée. Mon cher collègue, je vous propose d’ajouter une précision visant à affirmer que cette désignation se fait à la demande des agents concernés. Nous irions ainsi dans le sens des remarques de M. le secrétaire d’État en apportant de la souplesse à cette démarche, qui ne serait dès lors plus obligatoire et systématique.

Mme la présidente. Monsieur Longeot, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens suggéré par M. le rapporteur ?

M. Jean-François Longeot. Cette nouvelle rédaction, qui améliore le dispositif, me semble intéressante et répond à l’observation de M. le secrétaire d’État. J’y souscris et je rectifie donc l’amendement en ce sens, madame la présidente.

Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° 272 rectifié quater, présenté par MM. Longeot, Henno et Cadic, Mme Vullien, MM. Laugier et Prince, Mme Billon, M. Canevet, Mme Joissains, MM. Détraigne, Moga, Kern et Lafon et Mmes Doineau, Sollogoub, C. Fournier et Guidez, et ainsi libellé :

Après l’alinéa 7

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

« … – L’employeur public désigne, parmi ses agents, un tuteur chargé, sur la base du volontariat et à la demande des agents concernés, d’accompagner les agents mentionnés au présent article dans l’exercice de leurs fonctions et dans leur intégration au collectif de travail.

« L’employeur veille à ce que le tuteur dispose, sur son temps de travail et en fonction de la nature du handicap, des disponibilités nécessaires à l’accompagnement de l’agent.

« La fonction tutorale peut être partagée entre plusieurs agents.

Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Au bénéfice de cette rectification, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

Nous travaillerons durant la navette parlementaire pour évaluer ensemble les implications techniques et la faisabilité, en particulier dans l’hypothèse où aucun volontaire ne se manifesterait alors qu’un agent demanderait la mise en œuvre de ce droit sans pouvoir, dès lors, être satisfait.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 272 rectifié quater.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 399, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 8 et 9

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« III. – Pour tout changement d’emploi dans le cadre d’une mobilité, les administrations visées à l’article 2 de la présente loi prennent les mesures appropriées permettant aux agents mentionnés au I du présent article de conserver leurs équipements contribuant à l’adaptation de leur poste de travail, dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État. »

II. – Alinéa 10

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Cet amendement vise à préciser la formulation à retenir en matière de portabilité des aménagements de poste de travail des agents en situation de handicap.

Il tend, par ailleurs, à supprimer l’ajout de la saisine pour avis du Conseil national consultatif des personnes handicapées, le CNCPH, sur les textes législatifs et réglementaires relatifs au handicap dans la fonction publique, dans l’attente des résultats de la mission confiée par le Premier ministre en décembre dernier au député Thierry Michels et à Mme Carine Radian, animatrice de la commission culture et citoyenneté du CNCPH.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Notre définition du droit à la portabilité nous paraît plus concrète et plus opérationnelle. Nous notons toutefois que le Gouvernement accepte de reconnaître ce droit, ce qui constitue une avancée et met fin à des situations illogiques. L’agent conservera désormais ses aménagements de poste, adaptés à son handicap, lorsqu’il changera d’employeur.

Le Gouvernement souhaite supprimer la consultation du Conseil national consultatif des personnes handicapées sur les projets de loi, d’ordonnance et de décret relatifs au handicap dans la fonction publique, quand les représentants des personnes en situation de handicap ont pourtant besoin d’être davantage écoutés. À titre d’exemple, la concertation menée en 2018 par la DGAFP, la direction générale de l’administration et de la fonction publique, n’a concerné que les employeurs publics et les organisations syndicales, alors que les associations ont également une expertise à faire valoir et des idées à proposer.

Par conséquent, l’avis de la commission est défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.

M. Philippe Mouiller. Je souhaite ajouter un argument à l’avis défavorable exprimé par la commission, s’agissant de la définition de l’équipement et de l’aménagement. Selon votre proposition, monsieur le secrétaire d’État, lorsqu’une personne handicapée souffrant, par exemple, de difficultés auditives ou visuelles, change de poste, elle peut apporter son équipement.

En revanche, l’aménagement n’est pas garanti. Vous ne prévoyez pas d’obligation d’aménagement du nouveau poste de façon adaptée pour les personnes handicapées. J’ai notamment à l’esprit le cas des déficients visuels, pour lesquels se limiter à l’équipement revient à ne pas modifier les conditions de lumière.

Votre proposition est donc plus restrictive et risque de créer des difficultés quand une personne recrutée viendra avec son équipement alors que le poste qu’elle va occuper ne sera pas adapté à sa situation. De ce point de vue, votre rédaction entraîne donc une régression du dispositif.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 399.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 34, modifié.

(Larticle 34 est adopté.)

Article 34 (priorité)
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article 16 bis (début)

Article 35 (priorité)

À compter du 1er janvier 2020 et jusqu’au 31 décembre 2025, par dérogation à l’article 13 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, les fonctionnaires mentionnés à l’article 2 de la même loi en situation de handicap relevant de l’une des catégories mentionnées aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l’article L. 5212-13 du code du travail peuvent accéder à un corps ou cadre d’emplois de niveau supérieur ou de catégorie supérieure par la voie du détachement, sous réserve d’avoir accompli préalablement une certaine durée de services publics. Au terme d’une durée minimale de détachement, qui peut le cas échéant être renouvelée, ils peuvent être intégrés dans ce corps ou cadre d’emplois. Le détachement et, le cas échéant, l’intégration sont prononcés après appréciation par une commission de l’aptitude professionnelle des fonctionnaires à exercer les missions du corps ou cadre d’emplois.

Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du premier alinéa du présent article, notamment la durée de services publics exigée des candidats au détachement, les modalités d’appréciation de l’aptitude professionnelle préalable à ce détachement, la durée minimale de celui-ci, les conditions de son renouvellement éventuel et les modalités d’appréciation de l’aptitude professionnelle préalable à l’intégration. Il fixe également la composition de la commission chargée d’apprécier l’aptitude professionnelle du fonctionnaire.

Au plus tard un an avant son terme, le Gouvernement présente au Parlement un rapport d’évaluation de cette expérimentation. – (Adopté.)

Mme la présidente. Nous en revenons au cours normal de la discussion des articles.

TITRE III (suite)

SIMPLIFIER LE CADRE DE GESTION DES AGENTS PUBLICS

Article 35 (priorité)
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article 16 bis (interruption de la discussion)

Article 16 bis

I. – La section 4 du chapitre Ier de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique est ainsi modifiée :

1° (Supprimé)

2° Le II de l’article 19 est ainsi rédigé :

« II. – Le président de la Haute Autorité est nommé par décret du président de la République.

« Outre son président, la Haute Autorité comprend :

« 1° Deux conseillers d’État, dont au moins un en activité au moment de sa nomination, élus par l’assemblée générale du Conseil d’État ;

« 2° Deux conseillers à la Cour de cassation, dont au moins un en activité au moment de sa nomination, élus par l’ensemble des magistrats du siège hors hiérarchie de la cour ;

« 3° Deux conseillers-maîtres à la Cour des comptes, dont au moins un en activité au moment de sa nomination, élus par la chambre du conseil ;

« 4° Deux personnalités qualifiées n’ayant pas exercé de fonctions de membre du Gouvernement, de mandat parlementaire ou de fonctions énumérées au I de l’article 11 depuis au moins trois ans, nommées par le Président de l’Assemblée nationale, après avis conforme de la commission permanente de l’Assemblée nationale chargée des lois constitutionnelles, rendu à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés ;

« 5° Deux personnalités qualifiées n’ayant pas exercé de fonctions de membre du Gouvernement, de mandat parlementaire ou de fonctions énumérées au même I depuis au moins trois ans, nommées par le Président du Sénat, après avis conforme de la commission permanente du Sénat chargée des lois constitutionnelles, rendu à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés ;

« Les modalités d’élection ou de désignation des membres mentionnés aux 1° à 5° du présent II assurent l’égale représentation des hommes et des femmes.

« Lorsque la Haute Autorité émet un avis en application des 3° à 5° du II de l’article 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, le référent déontologue de l’administration dont relève l’intéressé peut assister aux séances de la Haute Autorité, sans voix délibérative. » ;

3° L’article 20 est ainsi modifié :

a) Après le 6° du I, il est inséré un 7° ainsi rédigé :

« 7° Elle apprécie le respect des principes déontologiques inhérents à l’exercice d’une fonction publique, dans les conditions prévues par la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. » ;

a bis) Après la première phrase du dernier alinéa du même I, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Ce rapport comprend un suivi statistique annuel des allers-retours des fonctionnaires avec le secteur privé. » ;

b) Le dernier alinéa du II est supprimé ;

4° La seconde phrase du premier alinéa du I de l’article 23 est supprimée.

II (nouveau). – Les 1° à 3° de l’article 19 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, tels qu’ils résultent du I du présent article, ne s’appliquent pas aux membres de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique en fonction à la date de publication de la présente loi.

Mme la présidente. L’amendement n° 144 rectifié bis, présenté par MM. Durain, Marie, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Sueur, Sutour, Tourenne, Antiste, Bérit-Débat, Montaugé, Temal et Raynal, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 9

Remplacer le mot :

deux

par le mot :

trois

II. – Alinéa 10

Remplacer le mot :

deux

par le mot :

trois

La parole est à M. Jérôme Durain.

M. Jérôme Durain. Cet amendement vise à revenir aux intentions initiales du législateur concernant la composition de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, la HATVP.

L’Assemblée nationale souhaitait porter à trois le nombre de personnalités qualifiées nommées respectivement par les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat. Le Gouvernement s’est opposé à ce rééquilibrage au profit du Parlement, arguant de la nécessité de maintenir un équilibre entre les nominations relevant du Parlement et celles qui reviennent au Gouvernement.

Pourtant, même dans cette configuration, les personnalités qualifiées nommées par les présidents des deux assemblées étaient minoritaires, au nombre de six dans un collège comptant treize membres.

Nous proposons, par cet amendement, de rétablir cette composition, cohérente avec notre volonté de rehausser les droits du Parlement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Avant d’en venir à l’avis de la commission sur l’amendement n° 144 rectifié bis de M. Durain, je voulais intervenir sur l’article.

Jeudi dernier, nous avons adopté l’article 16 du projet de loi et apporté plusieurs garanties pour renforcer les contrôles déontologiques, tout en rappelant le droit, pour les fonctionnaires, d’avoir des expériences dans le privé.

Nous avons notamment amélioré le suivi des réserves de la HATVP et renforcé le contrôle du rétropantouflage. Sur l’initiative du groupe socialiste et républicain, nous avons également généralisé les contrôles sur les collaborateurs du Président de la République et des cabinets ministériels.

L’article 16 bis, que nous abordons à présent, concerne l’organisation même de la Haute Autorité. Il est question non plus uniquement du contrôle du pantouflage des agents publics, mais, plus largement, du contrôle de la déontologie dans la sphère publique, incluant les membres du Gouvernement, les élus et les membres des autorités administratives indépendantes.

Sur le fond, je vous propose d’en rester au texte de la commission et de refuser que le Gouvernement désigne deux membres supplémentaires au sein de la HATVP. De même, je ne suis pas favorable à la création d’une formation restreinte ou à la possibilité, pour le supérieur hiérarchique, de siéger au sein de la Haute Autorité, même avec une voix consultative. À la différence de la commission de déontologie, la Haute Autorité est une autorité administrative indépendante et rien ne doit laisser croire que le Gouvernement prend la main sur elle ; il y va de son impartialité. Nous changeons ainsi complètement de culture juridique.

Je vous rappelle que le Gouvernement souhaitait au départ recréer la commission de déontologie au sein même de la Haute Autorité, en prévoyant un second collège. Il n’a pas été suivi par la majorité de l’Assemblée nationale.

L’exécutif fait d’ailleurs valoir deux arguments qui me semblent contradictoires : il devrait être représenté à la Haute Autorité, car il gère l’administration d’État, le Premier ministre en étant le chef, mais, malgré cela, les personnes nommées seraient indépendantes.

La position de la commission me semble plus équilibrée : la HATVP comporterait onze membres, dont six magistrats, quatre membres désignés par le Parlement conformément à la procédure prévue à l’article 13 de la Constitution et un président désigné par le Président de la République. Le fait que plusieurs groupes appuient cette proposition pourrait nous aider à faire valoir nos arguments en commission mixte paritaire.

Cher collègue Jérôme Durain, vous comprendrez donc que votre amendement n° 144 rectifié bis est contraire à cette position, le texte de la commission me semblant suffisant sur ce point. Le collège de la HATVP comptera donc onze membres, dont quatre nommés par le Parlement et un seul – le président – nommé par l’exécutif.

En outre, l’adoption de l’amendement n° 144 rectifié bis rendrait plus difficile l’application du principe de la parité à la HATVP, qui sera appréciée au niveau de chaque autorité de nomination : il est plus facile de respecter la parité lorsque l’on nomme deux membres plutôt que trois.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. L’avis du Gouvernement sur cet amendement est défavorable, pour des raisons un peu différentes de celles qu’a fait valoir M. le rapporteur.

M. Durain propose de rétablir une forme de parité entre les membres issus de juridictions et les personnalités qualifiées : les premiers seraient six – issus du Conseil d’État, de la Cour de cassation et de la Cour des comptes –, comme les secondes.

Nous divergeons de cette position, car nous souhaitons que l’on parvienne à ce chiffre par trois fois deux – deux membres nommés respectivement par le Sénat, l’Assemblée nationale et le Gouvernement –, quand vous proposez de le faire par deux fois trois, une proposition qui avait également été défendue par de nombreux parlementaires à l’Assemblée nationale. Après débat, nous avons toutefois convergé vers la position « trois fois deux ».

Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement ; j’y reviendrai en défendant l’amendement suivant.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 144 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 494, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 10

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …° Deux personnalités qualifiées choisies en raison de leur expérience de l’administration de l’État, des collectivités territoriales, de la santé publique ou de la recherche, du monde universitaire ou ayant exercé au sein d’une entreprise privée, n’ayant pas exercé de fonctions de membre du Gouvernement, de mandat parlementaire ou de fonctions énumérées au I de l’article 11 depuis au moins trois ans, nommées par décret.

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Je viens d’une certaine manière de présenter cet amendement, puisqu’il s’agit de revenir aux dispositions adoptées par l’Assemblée nationale et prévoyant que, sur les six personnalités qualifiées, deux soient nommées par le Gouvernement.

M. le rapporteur l’a relevé, le Premier ministre étant, par principe, le chef de l’administration, il nous semble logique qu’il participe à la désignation des personnalités qualifiées.

J’insiste pourtant sur le fait que nous ne modifions évidemment pas la loi organique relative à la transparence de la vie publique, qui garantit l’indépendance des membres du collège de la HATVP et définit leurs compétences, même si nous modifions leur nombre. Par définition, la nomination d’un membre du collège, magistrat ou personnalité qualifiée, quelle que soit l’autorité qui l’opère, lui confère le bénéfice des dispositions de la loi organique et garantit son indépendance.

Nous avons donc la volonté, en accord avec une grande majorité des groupes de l’Assemblée nationale, au-delà des différences traditionnelles entre majorité et opposition, de rétablir la nomination de personnalités qualifiées par le Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Le Gouvernement souhaite désigner deux représentants au sein du collège de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, ce que la commission a refusé à l’unanimité.

En effet, le Gouvernement nomme déjà le président de la HATVP, qui dispose de larges pouvoirs, notamment en matière d’autosaisine.

En outre, à la différence de la commission de déontologie, la HATVP est une autorité administrative indépendante. Veillons à garantir son impartialité, en particulier dans la désignation de ses membres.

Enfin, le Gouvernement met en avant sa volonté de nommer des membres représentant l’autorité chargée du pilotage de l’administration d’État. Pourquoi, dès lors, ne pas prévoir la représentation au sein de la HATVP des employeurs territoriaux ou hospitaliers ?

L’avis de la commission est défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 494.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 87 rectifié sexies, présenté par Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme G. Jourda, MM. Antiste et M. Bourquin, Mme Meunier, M. P. Joly, Mmes Préville et Monier, M. Joël Bigot, Mmes Blondin et Grelet-Certenais et M. Jacquin, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 10

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

« 6° Un membre des associations se proposant, par leurs statuts, de lutter contre la corruption, préalablement agréées par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, désigné par ces dernières ;

« 7° Un membre de l’Agence française anticorruption désigné par cette dernière.

« Ces membres ne sont pas rémunérés et aucun frais lié à leurs fonctions au sein de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique ne peut être pris en charge par une personne publique.

II. – Alinéa 11

Remplacer la référence :

par la référence :

La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.

Mme Sophie Taillé-Polian. La question qui nous occupe actuellement – la composition de la HATVP – s’inscrit dans un contexte de défiance sans appel des citoyens envers la vie publique, le fonctionnement de l’administration et ses rapports avec les entreprises privées.

Ce contexte se nourrit d’une réalité : les journaux rapportent souvent, comme c’était le cas encore récemment, les véritables plans de bataille préparés par certaines entreprises privées pour interférer dans les décisions de l’État ou des acteurs de l’administration, voire leur stratégie de recrutement au sein de l’administration d’agents, qui reviennent ensuite au service de l’État, induisant un risque de conflits d’intérêts.

Pour lutter contre ce sentiment de défiance, contre ce soupçon permanent, il nous semble intéressant d’élargir encore davantage la composition de la HATVP et d’y introduire une sorte de contrôle citoyen.

Il n’est pas question, évidemment, d’y faire entrer un citoyen qui n’aurait pas bénéficié d’une formation et dont la probité ne serait pas garantie. C’est la raison pour laquelle je vous propose, par cet amendement, d’élargir le collège à des personnes représentatives d’associations agréées par la HATVP. Parmi les trois associations qui le sont aujourd’hui, on trouve Anticor et Sherpa, lesquelles ont fait la preuve de leur capacité à lever le voile sur un certain nombre de sujets et sont susceptibles d’apporter un autre regard au sein de la HATVP.

Une telle évolution contribuerait à lever les soupçons par un contrôle citoyen, lequel doit être davantage intégré dans la façon dont nous réfléchissons au fonctionnement même de nos institutions, notamment de nos institutions de contrôle. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Cet amendement vise à insérer un membre des associations anticorruption et un membre de l’Agence française anticorruption au sein du collège de la HATVP.

Comment choisir, parmi les associations anticorruption, celle qui pourra désigner un membre de la HATVP ? Comment assurer la transparence de cette nomination ? Je préfère les nominations décidées par le Parlement, après audition publique des intéressés.

En outre, l’Agence française anticorruption est un service rattaché au ministère de la justice ; sa présence pourrait donc renforcer l’exécutif, ce que la commission ne souhaite pas.

Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement partage l’avis de la commission, à l’exception de son avant-dernière phrase ! (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.

Mme Sophie Taillé-Polian. Une précision, monsieur le rapporteur : il me semble positif que le Parlement joue un rôle plus important dans les nominations, dans les conditions que vous avez décrites ; ma proposition ne s’y oppose pas, elle vient en complément de cela.

Il ne s’agit, ici, que d’associations déjà agréées par la HATVP, et non d’associations qui n’auraient pas apporté la preuve de leur attachement à une certaine probité ou de leur capacité à œuvrer dans le domaine de compétence de la HATVP. Si on leur accorde un ou deux sièges, libre à elles d’organiser les conditions d’une répartition ou d’un tourniquet, l’idée étant de placer en permanence au cœur de l’institution un regard citoyen.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 87 rectifié sexies.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 496, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 11

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La Haute Autorité peut statuer en formation restreinte selon des modalités prévues par décret en Conseil d’État.

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Il s’agit par cet amendement de prévoir un décret en Conseil d’État permettant ultérieurement à la Haute Autorité de s’organiser pour créer, en son sein, une formation spécialisée réduite lui permettant d’examiner les dossiers les plus simples dans des délais et des modalités pratiques.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Dans la même lignée que les amendements précédents, le Gouvernement essaie de reprendre la main sur la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, en créant une formation restreinte.

Cette formation restreinte ne correspond toutefois pas à une demande du président de la HATVP, que nous avons entendu en audition et auquel nous avons posé des questions sur le fonctionnement interne de cette autorité administrative indépendante. Nous avons évoqué la possibilité de lui confier des pouvoirs supplémentaires, sur le modèle d’autres autorités administratives indépendantes dans lesquelles siègent certains parlementaires, dont votre serviteur, mais il n’est pas demandeur de cette possibilité.

La HATVP pourra gérer l’afflux de dossiers en jouant sur l’organisation de ses réunions. La CNIL, par exemple, que j’évoquais à demi-mot, fonctionne avec une partie A donnant lieu à délibérations et une partie B donnant lieu à un vote plus global et à délibérations uniquement à la demande de l’un des commissaires.

Le président de la HATVP pourrait également prononcer des décisions par ordonnances, ce qui permettrait de simplifier l’instruction de certains dossiers.

De surcroît, cet amendement pose problème sur le plan constitutionnel, car il me semble entaché d’incompétence négative : c’est non pas au décret, mais bien à la loi, de définir les modalités d’organisation de la formation restreinte de la HATVP, qui reste une autorité administrative indépendante.

J’ajoute que, dans la mesure où l’on réduit de manière significative le nombre de membres du collège de la HATVP, il y va du respect de la collégialité et du bon fonctionnement de l’institution qu’ils disposent tous d’une vision d’ensemble de tous les dossiers amenés à délibération. Si nous mettions en place une formation restreinte, nous diviserions par deux le nombre de membres ayant à connaître d’une partie des dossiers. Cela ne me paraît pas du tout pertinent.

L’avis de la commission est donc défavorable sur cet amendement du Gouvernement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Durain, pour explication de vote.

M. Jérôme Durain. Comme le rapporteur vient de le signaler, cet amendement paraît contradictoire avec la logique du texte : après nous avoir expliqué qu’il faudrait resserrer le contrôle de la HATVP sur les situations les plus aiguës, le Gouvernement nous propose finalement d’alléger encore le contrôle sur les cas les plus simples parmi ces situations.

La moindre des choses, c’est que les fonctionnaires concernés aient droit à un contrôle plein et entier, pas à un contrôle au rabais par une formation rétrécie. Le contrôle doit non pas être low cost, mais s’exercer en bonne et due forme !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 496.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 531, présenté par MM. de Belenet, Mohamed Soilihi, Richard, Amiel, Bargeton et Buis, Mme Cartron, MM. Cazeau, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Navarro, Patient, Patriat et Rambaud, Mmes Rauscent et Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :

Alinéa 12

Remplacer les mots :

le référent déontologue de l’administration dont relève l’intéressé peut assister aux séances de la Haute Autorité, sans voix délibérative

par les mots :

l’autorité hiérarchique ou l’autorité investie du pouvoir de nomination de l’intéressé ainsi que le référent déontologue de l’administration dont relève l’intéressé peuvent être entendus sans voix délibérative

La parole est à M. Arnaud de Belenet.

M. Arnaud de Belenet. Madame la présidente, souhaitez-vous que je présente dans le même mouvement les amendements nos 532, 530 et 534 rectifié ?

Mme la présidente. Bien volontiers, mon cher collègue.

L’amendement n° 532, présenté par MM. de Belenet, Mohamed Soilihi, Richard, Amiel, Bargeton et Buis, Mme Cartron, MM. Cazeau, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Navarro, Patient, Patriat et Rambaud, Mmes Rauscent et Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 12

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…° Après le 3° du V du même article 19, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le Président de la Haute Autorité peut également faire appel à des rapporteurs choisis parmi les fonctionnaires de catégorie A, à l’exclusion de ceux exerçant les fonctions de référent déontologue. » ;

L’amendement n° 530, présenté par MM. de Belenet, Mohamed Soilihi, Richard, Amiel, Bargeton et Buis, Mme Cartron, MM. Cazeau, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Navarro, Patient, Patriat et Rambaud, Mmes Rauscent et Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :

Alinéa 16

Remplacer les mots :

des allers-retours des fonctionnaires avec le secteur privé

par les mots :

des saisines reçues par la Haute Autorité au titre des 3° à 5° du II de l’article 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires

L’amendement n° 534 rectifié, présenté par MM. de Belenet, Mohamed Soilihi, Amiel, Bargeton et Buis, Mme Cartron, MM. Cazeau, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Navarro, Patient, Patriat et Rambaud, Mme Rauscent, M. Richard, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :

Alinéa 19

Rédiger ainsi cet alinéa :

II. – Les mandats des membres de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique nommés en application des 1° à 3° du II de l’article 19 de la loi n° 2013–907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique se poursuivent jusqu’à leur terme.

Veuillez poursuivre, mon cher collègue.

M. Arnaud de Belenet. L’amendement n° 531 vise à permettre à la HATVP d’auditionner lors de l’examen d’un dossier non seulement le référent déontologue de l’administration, mais aussi l’autorité hiérarchique ou l’autorité de nomination de l’agent, qui peut apporter des éclairages précieux sur les missions que ce dernier exerce ou a exercées.

L’amendement n° 532 tend à autoriser le président de la HATVP, pour faire face à l’augmentation du nombre de dossiers consécutive au transfert de compétence de la commission de déontologie vers la Haute Autorité, à faire appel à des rapporteurs choisis parmi les fonctionnaires de catégorie A.

L’amendement n° 530 est rédactionnel.

Quant à l’amendement n° 534 rectifié, il vise à reformuler la disposition introduite par la commission prévoyant que les modifications opérées par l’article 16 bis ne s’appliquent pas aux mandats des magistrats de la HATVP en fonction à la date de publication de la future loi.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Avec l’amendement n° 531, M. de Belenet suggère de donner à l’autorité hiérarchique ou à l’autorité de nomination la faculté d’assister aux réunions de la Haute Autorité. Notre avis est défavorable, car cela remettrait en cause, au moins dans les apparences, l’impartialité de la Haute Autorité, qui reste une autorité administrative indépendante. En outre, le VIII de l’article 25 octies de la loi Le Pors de 1983 permet déjà à la HATVP d’obtenir des informations en amont de ses réunions auprès de l’autorité hiérarchique ou de l’autorité de nomination.

En ce qui concerne l’amendement n° 532, je rappelle que les rapporteurs de la HATVP sont, en l’état du droit, des magistrats administratifs, financiers ou judiciaires. Ils préparent les dossiers les plus importants avant que ceux-ci ne soient soumis aux membres du collège.

M. de Belenet souhaite étendre ce vivier à tous les fonctionnaires de catégorie A, à l’exclusion de ceux qui exercent les fonctions de référent déontologue. L’idée est intéressante, et j’y ai moi-même songé dans le cadre de mes auditions ; mais le président de la HATVP m’a convaincu qu’il était préférable d’en rester au droit en vigueur, car il pense pouvoir gérer le volume des affaires avec le vivier actuel de rapporteurs.

Il nous semble difficile pour un fonctionnaire de l’État d’instruire le dossier d’un de ses collègues. Ne retombons pas dans le débat de l’impartialité objective et des risques de pressions exercées sur les rapporteurs.

J’ajoute que les magistrats ont par nature une culture du contradictoire et de l’élaboration de ces dossiers.

Une extension trop large me paraissant risquée, j’émets un avis défavorable sur l’amendement.

En revanche, l’avis est favorable sur l’amendement n° 530, visant à préciser le contenu du rapport d’activité de la Haute Autorité ; l’expression « allers-retours des fonctionnaires avec le secteur privé », retenue par l’Assemblée nationale, n’est pas suffisamment précise.

De même, nous sommes favorables à l’amendement n° 534 rectifié, rédactionnel. Toutefois, monsieur de Belenet, il serait nécessaire de le rectifier pour mentionner, à des fins de coordination, les 1° à 3° du II de l’article 19.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Sur l’amendement n° 531, l’avis du Gouvernement est différent de celui de la commission. M. de Belenet propose que l’autorité hiérarchique ou l’autorité investie du pouvoir de nomination, ainsi que le référent déontologue dont relève l’intéressé, puissent, sans voix délibérative, non pas assister aux séances de la HATVP, mais être entendus par celle-ci – à sa demande, par définition. Il me paraît utile de donner cette faculté à la Haute Autorité. Avis favorable.

L’amendement n° 532 vise à permettre à la HATVP de recourir à des fonctionnaires de catégorie A. Nous considérons que l’élargissement des missions de la Haute Autorité justifie la diversification du vivier, afin que d’autres que des magistrats puissent être associés aux travaux et à la préparation des rapports dans le cadre des vacations confiées aux rapporteurs. Avis favorable.

Sur l’amendement n° 530, rédactionnel, l’avis est aussi favorable.

S’agissant enfin de l’amendement n° 534 rectifié, qui tend à reformuler la disposition relative à la poursuite des mandats des membres de la HATVP dans le sens d’une plus grande précision, l’avis est favorable également.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 531.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 532.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 530.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 534 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 314 rectifié, présenté par Mmes N. Delattre et Costes, MM. Collin, Gabouty et Guérini, Mmes Guillotin, Jouve et Laborde et MM. Léonhardt, Requier, Vall, Castelli et Gold, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – Le présent article est applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie Française et dans les îles Wallis et Futuna.

La parole est à Mme Nathalie Delattre.

Mme Nathalie Delattre. Le présent amendement vise à rendre applicables dans les collectivités d’outre-mer régies par le principe de spécialité législative – la Polynésie française, la Nouvelle-Calédonie et Wallis-et-Futuna – les dispositions prévues à l’article 16 bis en matière de transparence de la vie politique.

En effet, l’organisation propre des collectivités régies par l’article 74 de la Constitution et de la Nouvelle-Calédonie est fixée exclusivement par les lois organiques statutaires, y compris dans ce domaine, contrairement aux règles en vigueur à Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon, territoires régis par le principe de l’identité législative.

Comme l’a déterminé le Conseil d’État dans sa décision d’assemblée du 9 février 1990 portant sur les élections municipales à Lifou, il ne suffit pas qu’un nouveau texte modifie un texte applicable dans une collectivité soumise au principe de spécialité législative pour y être, de ce seul fait, lui-même applicable.

En conséquence, dès lors que le projet de loi modifie la composition de l’autorité chargée d’examiner les déclarations des élus de ces collectivités territoriales, il convient de prévoir l’extension à celles-ci de l’article 16 bis. Faute d’une telle extension, la HATVP, si elle devait se prononcer sur le cas d’élus de ces collectivités, devrait se réunir dans sa composition antérieure au projet de loi, ce qui n’est pas souhaitable.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. L’avis est favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Cette disposition complétera utilement le dispositif. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 314 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 16 bis, modifié.

(Larticle 16 bis est adopté.)

Article 16 bis (début)
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Discussion générale

6

Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire

Mme la présidente. Mes chers collègues, je suis particulièrement heureuse de saluer en votre nom la présence dans notre tribune d’honneur d’une délégation de parlementaires irlandais, conduite par M. Neale Richmond, sénateur et président du groupe interparlementaire d’amitié Irlande-France. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le secrétaire dÉtat, se lèvent.) La délégation est accompagnée par Mme Françoise Laborde, présidente du groupe d’amitié France-Irlande.

La relation ancienne d’amitié qu’entretiennent l’Irlande et la France est plus que jamais nécessaire aujourd’hui, alors que le Royaume-Uni, partenaire économique majeur de nos deux pays, a décidé de quitter l’Union européenne.

Après avoir échangé avec les membres du groupe d’amitié France-Irlande du Sénat et s’être entretenue avec des membres de la commission des affaires économiques pour évoquer les nombreux sujets sur lesquels nos pays ont un intérêt partagé, la délégation sera reçue demain à l’Assemblée nationale.

Nous espérons que ce séjour à Paris sera fructueux et souhaitons à nos amis irlandais la bienvenue au Sénat français. Fáilte ! (Applaudissements.)

7

Article 16 bis (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 147 rectifié bis

Transformation de la fonction publique

Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi de transformation de la fonction publique.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° rectifié ter

Articles additionnels après l’article 16 bis

Mme la présidente. L’amendement n° 147 rectifié bis, présenté par MM. Durain, Marie, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Sueur, Sutour, Tourenne, Antiste, Bérit-Débat, Montaugé, Temal et Raynal, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 16 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 2 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, il est inséré un article 2-… ainsi rédigé :

« Art. 2-…. – La Haute Autorité organise la diffusion de la culture déontologique. Elle publie chaque année une synthèse de ses avis et conseils donnés en la matière. »

La parole est à M. Jérôme Durain.

M. Jérôme Durain. La déontologie est affaire de règles, mais il s’agit aussi d’un climat : un climat de confiance entre les institutions et les citoyens. Nous proposons de renforcer la diffusion de la culture déontologique en demandant à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique de publier annuellement une synthèse de ses avis et conseils en matière de déontologie.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. M. Durain propose que la HATVP publie une synthèse de ses avis déontologiques. Je souscris à l’objectif de cet amendement, mais celui-ci me paraît satisfait par le rapport annuel de la Haute Autorité, déjà prévu par la loi de 2013 relative à la transparence de la vie publique, de même que par la publication de ses avis les plus importants. Je rappelle que la commission a adopté une rédaction permettant à la Haute Autorité de décider elle-même de la publication de ses avis, pour faire connaître sa doctrine.

En outre, la HATVP publie déjà des rapports thématiques. Ainsi, en avril dernier, elle a publié un guide déontologique à l’attention des référents déontologues.

L’amendement étant satisfait, l’avis est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Même avis.

M. Jérôme Durain. Je retire l’amendement !

Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 147 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 250 (début)

Mme la présidente. L’amendement n° 147 rectifié bis est retiré.

L’amendement n° 4 rectifié ter, présenté par Mme Guidez, MM. Delahaye, Gabouty et Mizzon, Mmes Loisier et Puissat, M. Danesi, Mme Noël, M. Guerriau, Mme Goy-Chavent, MM. Lafon et Louault, Mme Vérien, M. Moga, Mme L. Darcos, MM. Vogel et Canevet, Mmes Kauffmann et C. Fournier, MM. Mandelli, Détraigne, Prince, Delcros et de Legge, Mme Perrot et MM. A. Marc, Segouin, Chasseing et Gremillet, est ainsi libellé :

Après l’article 16 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa de l’article 97 de la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions est supprimé.

La parole est à M. Vincent Delahaye.

M. Vincent Delahaye. Déposé par ma collègue Jocelyne Guidez, empêchée de participer à nos travaux de cet après-midi, et cosigné par un certain nombre de nos collègues, cet amendement vise à supprimer la possibilité pour les collectivités territoriales de verser une indemnité de conseil aux receveurs du Trésor public.

Il s’agit d’un amendement de clarification, puisque les receveurs publics sont des agents de l’État, payés par l’État. La possibilité de leur verser une indemnité de conseil suscite chaque année des discussions au sein d’un assez grand nombre de collectivités territoriales, pour savoir si les services sont réels ou pas, à quel niveau il faut fixer l’indemnité et si celle-ci sera ou non partagée – la plupart du temps, le receveur ne la partage pas avec ses collaborateurs.

Ce système est donc source de soucis pour les collectivités territoriales, qui, par ailleurs, ont subi un certain nombre de restrictions budgétaires de la part des services de l’État. Il nous paraît donc souhaitable de clarifier la responsabilité des uns et des autres, afin que des agents de l’administration d’État ne puissent plus être rémunérés par les collectivités territoriales.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. L’amendement présenté par M. Delahaye vise à supprimer l’indemnité de conseil que peuvent percevoir les agents des services déconcentrés de l’État ou des établissements publics de l’État au titre des prestations fournies personnellement, en dehors de l’exercice de leurs fonctions.

Autoriser les comptables publics à monnayer des prestations auprès des collectivités territoriales parallèlement à leur mission officielle nous semble entraîner un mélange des genres difficilement compréhensible. De nombreuses collectivités territoriales ont d’ailleurs décidé de mettre fin à ces prestations, en adoptant une délibération explicite.

La commission des lois est favorable à cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Monsieur le sénateur, votre proposition a fait l’objet de discussions dans le cadre d’autres débats, à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances ou de l’examen par l’Assemblée nationale du présent projet de loi. Chaque fois, le Gouvernement a exprimé sa volonté d’ouvrir une discussion avec les principaux intéressés, celles et ceux qui perçoivent aujourd’hui cette indemnité, en ayant à l’esprit que, comme l’a signalé M. le rapporteur, un certain nombre de collectivités territoriales ont fait le choix d’en cesser le versement, comme elles en ont la liberté.

Nous ne sommes pas favorables à la suppression brutale de cette possibilité d’indemnité, car nous préférons poursuivre le travail engagé au sein des services, notamment de la direction générale des finances publiques. À ce stade, le Gouvernement est donc défavorable à la mesure proposée.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.

M. Vincent Delahaye. Monsieur le secrétaire d’État, j’entends votre argument, mais je ne suis pas d’accord avec la position du Gouvernement. En réalité, les collectivités territoriales sont souvent très ennuyées, parce qu’elles ont l’impression que, en réduisant l’indemnité de conseil, voire en la supprimant, elles sanctionnent l’agent en question. Elles peuvent en être plus ou moins contentes, mais hésitent devant ce qu’elles perçoivent comme une sanction.

Par ailleurs, les sommes versées, parfois très importantes, sont prises sur tous les budgets, y compris les budgets d’action sociale. Or un budget d’action sociale n’a pas pour objet de rétribuer les conseils d’un comptable qui, du reste, n’en donne pas forcément.

Il y a là une forme de conflit d’intérêts, en tout cas une question qui empoisonne bon nombre de collectivités territoriales. Un certain nombre ont le courage, si je puis dire, de tout arrêter ; mais beaucoup d’autres sont très ennuyées. Il serait donc bon d’agir par voie législative pour mettre fin dès maintenant à ce système d’indemnités de conseil.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 4 rectifié ter.

(Lamendement est adopté.)

Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° rectifié ter
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 250 (interruption de la discussion)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 16 bis.

L’amendement n° 250, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 16 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 4° de l’article 24 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …° Du non-respect de l’engagement à servir l’État pendant une durée minimale de dix ans pour les élèves diplômés de l’École nationale d’administration ou de l’École Polytechnique. »

La parole est à M. Éric Bocquet.

M. Éric Bocquet. Notre collègue Vincent Delahaye vient d’évoquer des conflits d’intérêts ; je poursuivrai sur cette thématique.

Nous souhaitons enrayer la pratique dite du pantouflage, en proposant que le non-respect de l’engagement à servir l’État pour une durée minimale de dix ans soit assorti de la radiation de la qualité de fonctionnaire.

Les élèves fonctionnaires sont rémunérés par l’État dès leur admission, en contrepartie de quoi ils s’engagent à servir l’État pendant dix années. Si la règle des dix ans n’est pas respectée, les élèves sont censés rembourser une partie des traitements perçus pendant leur formation.

Toutefois, cette règle n’est pas suffisamment dissuasive. Hier pratiqué en général en fin de carrière, le pantouflage s’est généralisé, dès la sortie de l’ÉNA ou de l’École polytechnique, par exemple. Les risques de conflit d’intérêts n’ont jamais été aussi nombreux !

L’encadrement, voire l’interdiction du pantouflage est ancienne, puisqu’elle fut introduite dès 1919, voilà donc un siècle ; elle a été constamment réaffirmée depuis lors. Pourtant, cette interdiction n’est absolument pas suivie d’effets. Il se dit dans certains milieux que le plus gros employeur d’inspecteurs généraux des finances publiques est non pas Bercy, mais BNP Paribas…

La violation de cet interdit légal, mais aussi éthique, est monnaie courante, accentuée par la quasi-certitude d’une totale impunité. Il s’agit désormais du déroulement normal de carrière, au point qu’il est naturel de voir figurer dans un curriculum vitae le passage dans un ministère, puis dans une entreprise – non sans lien avec ledit ministère –, puis de nouveau dans un ministère, enfin dans une entreprise. Il suffit pour s’en convaincre de pratiquer la lecture régulière du Bulletin quotidien, où figurent les nominations et recrutements.

C’est pourquoi, reprenant une des préconisations du rapport de notre excellent collègue Pierre-Yves Collombat, nous proposons une mesure simple et radicale pour enrayer ce phénomène : interdire toute forme de pantouflage, sauf à être radié de la fonction publique en devant rembourser l’ensemble des frais engendrés par la formation.

Le coût seul de la pantoufle n’est pas assez dissuasif, selon nous. Le retour dans la fonction publique après un passage par le privé constitue en effet une sorte de filet de sécurité, qui tend à encourager le pantouflage. Cela n’est pas du tout admissible !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. L’amendement qui vient d’être présenté concerne le remboursement de la pantoufle. Il s’agit d’un vrai sujet, et nous sommes en droit d’attendre des réponses du Gouvernement.

Le principe est déjà clairement posé : les fonctionnaires qui partent avant d’avoir accompli leur obligation de servir doivent rembourser leurs frais de scolarité. La durée de l’obligation de servir varie toutefois d’un corps à l’autre : elle est de dix ans pour l’École nationale d’administration, de huit pour l’École des mines, par exemple.

Le pouvoir réglementaire a apporté de premières réponses en 2017, puis 2019, notamment en empêchant les départs pendant les quatre premières années de service.

Un manque de transparence persiste toutefois. Il existe peu d’informations sur le sujet, et les dispositifs ne sont pas clairement coordonnés : le recouvrement de la pantoufle échoit, selon le cas, au ministère ou à l’école. Ainsi, les deux commissions d’enquête de l’Assemblée nationale et du Sénat sur la haute fonction publique ont eu de nombreuses difficultés pour investiguer sur ce point.

Je souhaite avancer sur ces sujets, mais cet amendement me pose problème. Il vise à systématiser le licenciement des fonctionnaires n’ayant pas remboursé la pantoufle, alors qu’il faudrait sans doute prendre en compte des cas spécifiques ; je pense en particulier à des problèmes de santé. En outre, il ne concerne que l’École nationale d’administration et l’École polytechnique, alors que d’autres écoles sont concernées, en particulier l’École des mines et l’École normale supérieure.

Pour ces raisons, je sollicite le retrait de l’amendement ; s’il est maintenu, j’appellerai à son rejet, au profit d’autres amendements traitant de ce sujet.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Personne ne nie l’importance du sujet, mais l’avis est défavorable pour les deux raisons exposées par M. le rapporteur : le caractère systématique du licenciement et le champ partiel des écoles couvertes.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Nous arrivons à un moment très plaisant de cette séance… Donner du travail supplémentaire à la Haute Autorité, tout le monde est capable de le faire ; on fera des dossiers, et ainsi de suite. Mais nous voici dans le vif du sujet : les allers-retours avec le privé des hauts fonctionnaires ayant des tâches de responsabilité – car c’est pour eux que le problème se pose, pas pour l’instituteur qui ouvre une pizzeria ! (Sourires.)

Désormais, les carrières sont par morceaux : on est pendant quelques années à BNP Paribas ou à la Société générale, ensuite à la tête de la Banque de France, puis on repart. À cha peu, comme disait ma grand-mère, on finira bien par faire les dix ans… Et puis, quand on sera installé dans une banque à un bon niveau, ma foi, on pourra rembourser une partie de la pantoufle.

Évidemment, ces pratiques sont un peu gênantes pour les gens qui croient que nous sommes dans un système démocratique et qu’il y a une division des pouvoirs. Eh bien non, ce n’est pas ainsi que les choses se passent.

Je veux bien qu’on prenne toutes les précautions oratoires qu’on veut et qu’on confie toujours plus de tâches à la Haute Autorité ou à une autre instance, mais le cœur du sujet est le contrôle véritable des allers-retours des gens qui ont des postes de responsabilité – les autres, ce n’est pas important. C’est cela qui pose problème pour notre démocratie ! Or, en la matière, je ne sens pas un enthousiasme considérable de la part du Gouvernement… (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – M. Christian Manable applaudit également.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 250.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

M. le président. La séance est reprise.

Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 250 (début)
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Discussion générale

8

Questions d’actualité au Gouvernement

M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

Sans que ce soit une litanie, j’appelle chacun de vous, mes chers collègues, à respecter son temps de parole et à faire preuve de courtoisie.

plan canicule

M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour le groupe La République En Marche. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

Mme Patricia Schillinger. Ma question s’adresse à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Cette semaine, un épisode caniculaire intense et précoce s’abat sur l’Hexagone, avec des températures supérieures à quarante degrés et des ressentis encore plus élevés.

Certes, des leçons ont été tirées du tragique été 2003. Aujourd’hui, l’ensemble des ministères et des administrations se sentent concernés et ont déjà pris des mesures de prévention, qu’il s’agisse du report des épreuves du brevet, des préconisations aux entreprises, notamment dans le BTP, ou encore du recours facilité à la circulation différenciée en cas de pollution.

Pour autant, madame la ministre, à l’échelle de toute une population, les réflexes individuels et collectifs en matière de prévention ne sont pas encore automatisés, même dans l’hémicycle, où la cravate reste de mise pour mes collègues masculins… (Sourires. – Très bien ! et applaudissements sur diverses travées.)

Aussi, pourriez-vous nous détailler les principaux éléments du plan Canicule déclenché cette semaine pour ce qui concerne la prévention, notamment les publics spécifiquement ciblés par les messages de prévention, ainsi que les mesures de mobilisation prévues pour les services de santé en cas d’afflux dans les hôpitaux et dans le secteur des services à la personne ? Comment la cellule de veille est-elle déclinée ? (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice Schillinger, chaque année, je réunis au début de l’été, dès le mois de juin, l’ensemble des ministères concernés pour être certaine que le plan Canicule puisse être déployé.

Il y a dix jours donc, j’ai réuni ce groupe de travail au sein de mon ministère pour vérifier que l’ensemble des consignes étaient connues de tous. Aussi, cette semaine, dès que le territoire a été placé en vigilance orange, nous avons pu mettre en œuvre toutes les recommandations sur les différents lieux de vie.

Au titre des lieux de vie, je pense évidemment aux entreprises, notamment à celles du BTP et de la restauration, où nous souhaitons que soient mis en place des horaires aménagés et des lieux de rafraîchissement.

Nous demandons également que le télétravail soit favorisé.

Je pense également aux lieux de vie des enfants, qu’il s’agisse des crèches, qui ont reçu des consignes adaptées, ou des établissements de l’éducation nationale. Jean-Michel Blanquer a adressé toutes les recommandations nécessaires aux professeurs des écoles, mais aussi aux principaux des collèges et des lycées pour qu’ils prennent soin des jeunes et évitent que ces derniers ne soient exposés à la chaleur dans la journée.

Je pense par ailleurs aux lieux de sport. La ministre des sports a fait passer des consignes à toutes les associations sportives.

Nous travaillons également avec toutes les associations de lutte contre la précarité pour augmenter le nombre de maraudes et élargir les plages d’ouverture des centres d’hébergement de jour. Le ministre Julien Denormandie a demandé la création de places d’accueil de nuit – plusieurs centaines en région parisienne et à Lyon – pour permettre aux personnes de se rafraîchir la nuit.

Enfin, les établissements sociaux et médico-sociaux sont évidemment informés. Des plans bleus dans les Ehpad existent depuis 2003. Toutes les consignes sont très bien connues des personnels, et nous suivons chaque jour, via les agences régionales de santé, les hôpitaux qui seraient en tension, de façon à pouvoir les accompagner. Pour l’instant, nous n’avons pas reçu de signal d’alerte des établissements de santé. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour la réplique.

Mme Patricia Schillinger. Je remercie la ministre de ces précisions.

En mon nom personnel et au nom de mes collègues, permettez-moi d’avoir une pensée pour nos sapeurs-pompiers et toutes nos forces de l’ordre qui subissent cette canicule de plein fouet,…

Mme Éliane Assassi. Les urgences sont en grève !

Mme Patricia Schillinger. … mais aussi tous les maires et tous les adjoints qui œuvrent dans ce domaine. (Marques dironie sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. Permettez-moi, mes chers collègues, de faire un clin d’œil particulier à notre collègue Robert del Picchia (M. Robert del Picchia se lève et salue ses collègues.), qui a eu le courage de revenir parmi nous. (Applaudissements.)

suppression de l’émission soir 3

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour le groupe du Rassemblement démocratique et social européen.

Mme Nathalie Delattre. Monsieur le président, monsieur le ministre de la culture, mes chers collègues, en septembre dernier, Soir 3 célébrait ses quarante ans de programmation.

Depuis 1978, cette édition a réussi à s’imposer comme l’un des journaux télévisés préférés des Français, attirant près de 600 000 spectateurs en moyenne tous les soirs, avec, régulièrement, des pics de 1,5 million de téléspectateurs, pour suivre l’actualité, principalement locale. Cette situation aurait pu durer, mais c’était sans compter sur l’annonce des nouvelles orientations stratégiques de France Télévisions.

Officiellement, on parle non pas de suppression de programme, mais de transfert sur Franceinfo.

Pourtant, la disparition de l’émission Soir 3, telle que nous la connaissons tous, semble inévitable, monsieur le ministre. Rebaptisé, remodelé et repensé, le futur 23 heures n’a, à ce jour, même pas l’assurance que l’ensemble des moyens alloués au Soir 3 soient redéployés. Et pour cause, si la nouvelle édition est toujours consacrée à « l’international, l’Europe, la politique nationale, l’économie, et l’environnement », le coup de projecteur quotidien qui était mis sur nos régions et nos territoires va s’éteindre et, avec lui, une certaine idée du service public.

Dans le contexte de l’examen prochain du projet de loi sur la réforme de l’audiovisuel, quel modèle souhaitez-vous défendre, monsieur le ministre ? Celui de la numérisation à tout prix et de la généralisation des chaînes d’infos à toute vitesse ? Ou serez-vous – vous connaissant, je n’en doute pas ! – à l’écoute des maires ruraux, qui ont lancé une pétition pour s’opposer à ce transfert, afin de maintenir une édition locale, proche de leur collectivité ?

Écouterez-vous le CSE, le comité social et économique, de l’établissement, qui s’est opposé hier à l’unanimité à la décision de la direction de France Télévisions, pour défendre un programme audiovisuel regardé par des téléspectateurs, notamment des seniors, qui ne se servent pas des nouvelles sources d’information ?

Enfin, écouterez-vous les usagers-citoyens qui plébiscitent leurs programmes et qui, pour beaucoup d’entre eux, vous regardent aujourd’hui ? Monsieur le ministre, vous êtes le dernier recours, et nous sommes très nombreux à compter sur vous ! (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la culture.

M. Franck Riester, ministre de la culture. Madame la sénatrice Delattre, l’audiovisuel public, pour lequel le Gouvernement a une grande ambition, est essentiel pour notre pays. Et nous comptons bien réaffirmer ses missions, parmi lesquelles figurent bien évidemment l’information et la proximité.

Pour autant, il appartient à la direction de France Télévisions de mettre en œuvre ses grilles de programmation dans la mesure où il existe une indépendance éditoriale évidente des chaînes.

En ce qui concerne l’information et la proximité, il est nécessaire d’adapter les programmes à l’évolution des usages de nos compatriotes, notamment à l’utilisation du numérique, mais pas seulement.

En effet, depuis un certain nombre d’années, nous le voyons, nos compatriotes s’informent de plus en plus via les chaînes d’information en continu. C’est la raison pour laquelle France Télévisions a pris la décision, voilà maintenant quelques années, de créer une telle chaîne d’information. La direction a souhaité aller plus loin dans la réorganisation des programmes en matière d’information, en sanctuarisant les deux rendez-vous sur France 3 et sur France 2 de milieu de journée et de fin d’après-midi, tout en modifiant la fin de soirée.

Aussi, elle a décidé de créer un temps fort sur Franceinfo, la chaîne d’information en continu de France Télévisions, pour muscler cette tranche d’information, qui était effectivement concentrée sur Soir 3. Cette émission commençait vers vingt-trois heures trente, voire, parfois, minuit et ne remplissait pas complètement son rôle au regard de la présence nécessaire de France Télévisions, de l’audiovisuel public, de façon très puissante, sur les créneaux de l’information de proximité et de l’information concernant l’international et l’Europe, de vingt et une heures à minuit.

Cette décision ne remet absolument pas en cause le travail formidable des équipes, mais il faut pouvoir accompagner la direction de la chaîne dans la transformation de ses programmes au service d’une meilleure satisfaction des missions de service public, …

M. le président. Il faut conclure !

M. Franck Riester, ministre. … notamment en matière d’information et de proximité. (M. François Patriat applaudit.)

M. Rachid Temal. On n’a pas compris : Soir 3 est sauvé ou non ?

avenir de general electric à belfort

M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Céline Brulin. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, la mobilisation qui a eu lieu ce week-end à Belfort montre à quel point un énième renoncement en matière industrielle est devenu inacceptable pour une très grande diversité de nos concitoyens, les syndicats des salariés, les organisations d’employeurs, ainsi que les élus de tous bords !

Le Gouvernement répète souhaiter diminuer le nombre de salariés concernés par le plan social. Mais ce qu’il faut, c’est que la puissance publique se redonne des leviers en matière industrielle pour construire une véritable transition énergétique.

Or nous nous sommes dépossédés, un à un, de tous nos fleurons, au point que nos emplois, nos savoir-faire, notre souveraineté économique et énergétique sont aujourd’hui à la merci de dirigeants sans scrupules, pour lesquels l’accroissement des profits est la principale, pour ne pas dire l’unique boussole.

General Electric s’est engagé à créer 1 000 emplois ; vous devez lui faire respecter ses engagements, monsieur le secrétaire d’État !

Au-delà, comptez-vous obtenir un moratoire sur les suppressions d’emplois industriels, notamment dans la filière de l’énergie, qui doit être accompagné d’un plan de développement, indispensable pour assurer une véritable transition énergétique ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat auprès du ministre de laction et des comptes publics. Madame la sénatrice, vous nous interrogez sur la situation particulière de General Electric et, au-delà, sur celle de l’industrie et des emplois industriels.

Nous vivons, il est vrai, une période assez paradoxale. La France crée de l’emploi industriel, des usines sont ouvertes, des entreprises investissent, et c’est heureux pour l’ensemble de nos concitoyens. Malgré l’amélioration de la situation industrielle et de la compétitivité de notre pays, qui tient aussi évidemment à l’ensemble des mesures mises en œuvre par le Gouvernement pour accompagner cette compétitivité, nous rencontrons des difficultés sur un certain nombre de sites. C’est le cas pour General Electric, avec l’annonce d’un plan prévoyant des suppressions d’emplois. À cet égard, vous avez eu raison de le rappeler, le Gouvernement considère depuis le début que ce plan n’est pas suffisamment bien proportionné, car il comprend trop de licenciements, et il veut qu’il soit amélioré.

Le ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, dont je vous prie de bien vouloir excuser l’absence et qui m’a chargé de vous répondre, l’a indiqué aux dirigeants de General Electric. Il a également dit aux représentants des organisations syndicales que l’ensemble de ses services et lui- même se tenaient à leur disposition pour les accompagner dans un dialogue qui soit le plus constructif possible. (Marques dagacement sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Il est évidemment temps que ce dialogue constructif soit ouvert entre les organisations syndicales et la direction de General Electric pour faire en sorte que la situation soit très nettement améliorée.

Le Gouvernement ne veut pas que le plan présenté par General Electric soit le prélude à une fermeture du site de Belfort.

Mme Laurence Cohen. Il faut réagir alors !

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Au contraire, nous voulons que les investissements sur le site lui permettent de bénéficier de la reprise du marché des turbines lorsque celle-ci adviendra.

Par ailleurs, le ministre de l’économie et des finances a vivement engagé General Electric à se saisir des opportunités dans l’aéronautique pour investir en vue de garantir le maintien et le développement de ce site.

Il y a encore beaucoup à faire, mais cela passera par un dialogue aussi constructif que possible entre les organisations syndicales, General Electric et le ministère de l’économie et des finances. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

Mme Laurence Cohen. Oh là là !

M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour la réplique.

Mme Céline Brulin. Monsieur le secrétaire d’État, j’ai l’impression de ne pas vivre dans la même France que vous !

Malheureusement, le cas de Belfort n’est pas isolé : nous assistons à de prétendues améliorations des plans improprement appelés « sociaux ».

Vos propos sont de nature à beaucoup inquiéter les salariés. Et vous ne répondez pas à une question fondamentale : que faisons-nous pour construire en France une stratégie industrielle solide ? C’est sur ce point que j’interroge, au nom de mon groupe, le Gouvernement ! Dans ce cadre, nous considérons que les nationalisations temporaires, voire définitives, ne sont pas à exclure pour préserver des outils que je qualifierais de « stratégiques ». (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

situation de cinq cents mineurs dans la drôme

M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour le groupe socialiste et républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme Marie-Pierre Monier. Ma question s’adresse à Mme la garde des sceaux.

Madame la ministre, à travers le pays, dans beaucoup de tribunaux, les greffières et les greffiers, chevilles ouvrières du système judiciaire français, sont en sous-effectif. Les exemples sont nombreux : au tribunal de grande instance de Valence, mais aussi dans bien d’autres endroits, leur trop petit nombre ne leur permet pas d’absorber la charge de travail qui leur incombe. Cette situation entraîne l’allongement considérable du délai de traitement des dossiers.

En effet, lorsqu’une décision de justice est prise par un magistrat, elle nécessite la rédaction par un greffier ou une greffière d’une notification, qui la rend valable aux yeux de la loi. Aucun dossier ne peut avancer sans cela, et ce sont les plus fragiles qui en souffrent en premier lieu, notamment les bénéficiaires de l’aide juridictionnelle, ainsi que les enfants.

Plusieurs centaines de dossiers traités par le tribunal pour enfants de Valence sont en attente depuis des mois et s’accumulent. Or, pour intervenir auprès des familles et mettre en œuvre les décisions de justice prises en faveur de la protection de l’enfant, les travailleurs sociaux de l’ANEF, l’Association nationale d’entraide, et de la Sauvegarde de l’enfance et de l’adolescence ont besoin de ces notifications rédigées par les greffiers, sans quoi ils n’ont aucun mandat pour agir. À cause du manque de personnel dans le service public de la justice, ils sont dans l’incapacité d’œuvrer pour placer les enfants lorsque cela est nécessaire.

Aujourd’hui, en ne réagissant pas, vous mettez des enfants en danger. Cette situation est inacceptable, intolérable. Que comptez-vous faire, madame la garde des sceaux, pour y remédier ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – Mme Brigitte Lherbier applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la sénatrice Monier, votre question est très importante dans la mesure où elle a un rapport avec l’enfance en danger, et nous ne pouvons pas laisser les choses en l’état.

Vous m’alertez sur les difficultés du tribunal pour enfants de Valence qui se sont fait jour vers le mois de janvier dernier, notamment en raison de l’augmentation considérable du nombre de mesures d’assistance éducative.

Comme vous le savez, le juge des enfants a une double casquette : il intervient à la fois au pénal, et c’est le service de la protection judiciaire de la jeunesse, la PJJ, qui met en œuvre les mesures, et au titre de l’assistance éducative, et ce sont alors les départements et les services de l’ASE, l’aide sociale à l’enfance, qui exécutent les décisions.

Au tribunal pour enfants de Valence, les mesures d’assistance éducative ont augmenté de 60 % en quatre ans. Pour faire face à cette situation, nous avons affecté un magistrat supplémentaire l’année dernière. Nous avons ainsi pris en compte les difficultés existantes. Toutefois, l’organisation du greffe n’a pas suivi. C’est la raison pour laquelle il a fallu travailler localement : la présidente du tribunal de grande instance a organisé des réunions au mois de mai dernier, et la notification des décisions par les greffiers a depuis lors repris.

Cependant, un stock de décisions importantes demeure encore à notifier. C’est pourquoi trois décisions ont été prises.

Tout d’abord, la direction des services judiciaires va attribuer des crédits supplémentaires pour permettre le recrutement de vacataires. Ensuite, la présidente du tribunal de grande instance affectera un emploi supplémentaire dans ce cadre-là. Enfin, deux greffiers supplémentaires arriveront au mois de septembre prochain.

Nous espérons ainsi pouvoir assurer au tribunal pour enfants de Valence les conditions nécessaires à son fonctionnement.

Plus généralement, pour ce qui concerne l’exécution des décisions de justice en matière d’assistance éducative, mes collègues Agnès Buzyn, Adrien Taquet et moi-même avons décidé de diligenter une mission d’inspection pour améliorer la situation dans ce domaine. C’est, je le répète, important pour l’enfance en danger. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – Mme Michèle Vullien applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour la réplique.

Mme Marie-Pierre Monier. Madame la ministre, il ne s’agit pas d’un « stock de décisions » ; on parle d’enfants.

Les travailleurs sociaux de la Sauvegarde de l’enfance et de l’adolescence avec qui j’ai discuté hier sont très inquiets. La République a le devoir de protéger ses enfants. Or, aujourd’hui, dans la Drôme, elle est défaillante. À l’heure même où nous évoquons ces enfants, ces derniers sont en danger.

Neuf mois, de janvier à septembre, c’est beaucoup trop long. Si l’on regarde l’ensemble des services publics, les services des urgences, les hôpitaux, les pompiers et la justice sont en danger et vivent un véritable malaise, auquel le Gouvernement est sourd. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – Mme Brigitte Lherbier applaudit également.)

remboursement des frais de sécurité des manifestations sportives et culturelles

M. le président. La parole est à M. Alain Fouché, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires.)

M. Alain Fouché. Depuis la loi du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité, l’État facture le coût d’intervention des forces de l’ordre sur les manifestations sportives, récréatives ou culturelles organisées par les associatifs, mais aussi par les collectivités.

À la suite des attentats de 2015, les mesures de sûreté ont été renforcées et le montant des frais de sécurité a explosé. La circulaire Collomb du 15 mai 2018 a entériné cette hausse et mis en péril de nombreuses associations et manifestations. À titre d’exemple, le montant facturé aux Eurockéennes est passé de 30 000 euros en 2017 à 250 000 euros en 2018. Dans mon département, la Vienne, il est demandé à l’association Au Fil du Son, gérée par 100 bénévoles, entre 15 000 et 30 000 euros pour trois jours de festival, sachant que cette association n’est pas encore informée du montant réel.

Dans les faits, l’application de cette circulaire est aléatoire ; certains critères sont sujets à interprétation par les préfets. Les factures diffèrent selon les départements pour des manifestations identiques. Un rapport a souligné la nécessité de clarifier la loi et d’harmoniser les pratiques.

Un nouveau fonds d’intervention a heureusement pris le relais du fonds d’urgence, mais sa dotation est modeste et son périmètre restreint. Il ne contribuera pas au remboursement des frais de sécurité.

Quelles mesures comptez-vous prendre, monsieur le ministre, pour assurer la pérennité de ces manifestations, qui sont les forces vives de nos territoires ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe socialiste et républicain. – Mme Françoise Laborde applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Christophe Castaner, ministre de lintérieur. Monsieur le sénateur Fouché, vous avez abordé deux sujets distincts qui concernent la question de la sécurité des manifestations diverses et variées, les manifestations sportives et culturelles, qui peuvent mailler notre territoire et dont chacun ici connaît l’importance.

Le premier sujet, le renforcement des conditions de sécurité à la suite des attentats de 2015, vise à la fois les forces de sécurité intérieure et les sociétés privées. En déplacement vendredi dernier à Nice, dans les Alpes-Maritimes, j’ai visité le site sécurisé pour la fête de la musique, qui était retransmise en direct le soir sur France Télévisions – ce sont des sociétés privées qui sont intervenues.

Il est vrai que les besoins de sécurité se sont accrus, et il est évident que nous devons les assumer collectivement, chacun à notre place. C’est une difficulté, mais les organisateurs de manifestations ont bien compris la situation et ont mis en place des dispositifs.

Le second sujet est celui de la facturation par l’État du coût de l’intervention des forces de sécurité intérieure, dans le cadre d’échanges avec les préfets et les associations ou les organisateurs de ces manifestations, un dispositif prévu, vous l’avez dit, depuis 1995.

Vous m’avez écrit le 29 avril dernier et ma réponse ira dans le même sens que celle que je vous ai faite par écrit au mois de mai, à savoir le respect de la loi, une contrainte à laquelle nous devons faire face.

Comme vous l’avez indiqué, la loi était appliquée de manière distincte d’un territoire à l’autre, d’un département à l’autre. C’est la raison pour laquelle la ministre de la culture et le ministre de l’intérieur se sont mis d’accord l’année dernière pour publier une circulaire, afin de mettre en place les dispositions prévues par la loi, avec la prise en charge par les organisateurs des sollicitations nécessaires pour la sécurité, qui sont bien en deçà du coût réel des interventions de la police et la gendarmerie.

Nous avons demandé aux préfets d’appliquer la loi avec discernement et dans le cadre de discussions. C’est pour cette raison que, en amont des festivals, des conventions doivent être proposées, avec la possibilité de prévoir peut-être un étalement de la prise en charge sur plusieurs années. Tel est le sens du courrier que je vous ai adressé et des instructions que je donne aux préfets : il faut appliquer la loi, en faisant en sorte que cela puisse se faire progressivement, afin que ne se retrouvent pas dans une situation de fragilité des festivals ou des animations, qui sont importants pour nos territoires. (MM. Martin Lévrier et François Patriat applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Alain Fouché, pour la réplique.

M. Alain Fouché. Monsieur le ministre, merci de votre réponse, mais ce n’est pas aux associations de financer une mission régalienne, celle d’assurer la sécurité des biens et des personnes. Il y a un risque de voir disparaître de nombreuses associations et de nombreux spectacles sur nos territoires. Soyez très attentif, car il s’agit vraiment d’un enjeu très important. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires et sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

délinquance et immigration à paris

M. le président. La parole est à M. Pierre Charon, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Pierre Charon. Monsieur le président, monsieur le ministre de l’intérieur, mes chers collègues, depuis plusieurs mois, la délinquance explose à Paris. Les chiffres sont catastrophiques : hausse de 8 % des vols avec violence, progression de 34 % des vols à la tire, augmentation de 10 % des cambriolages, sans parler de la multiplication des rixes entre bandes rivales, souvent composées de mineurs, n’est-ce pas, madame Belloubet ?…

La mairie de Paris réclame plus d’effectifs, mais cela ne résout pas les difficultés. Il faut nommer les vrais problèmes pour trouver les vraies solutions.

Monsieur le ministre, comment envisagez-vous de faire baisser les chiffres de la délinquance, alors qu’il n’y a plus de policiers pour se porter candidat à l’investigation ? C’est pourtant la seule solution de nature à boucler des enquêtes et à faire diminuer de façon spectaculaire ces chiffres.

Ensuite, il faut souligner la responsabilité de Mme la maire de Paris, Anne Hidalgo (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.), qui, avant de se convertir aux vertus de la police municipale pour des raisons ridiculement électorales (Mêmes mouvements.), a joué au pompier pyromane par son appel de bienvenue à Paris lancé aux migrants en 2015. (Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.) Résultat : les chiffres de la préfecture de police nous le rappellent, plus de 45 % des personnes mises en cause dans ces nouvelles délinquances sont des migrants.

La préfecture de police, dont je salue l’efficacité dans la nouvelle gestion de l’ordre public face à la crise des gilets jaunes, parle de « l’effet important des vagues migratoires » : c’est écrit dans le journal Le Monde du 21 juin dernier.

Monsieur le ministre, l’insécurité devient la préoccupation quotidienne des Parisiens. Des quartiers entiers sont désormais des zones de non-droit. Que comptez-vous faire contre cette déflagration de la délinquance ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur.

M. Laurent Nunez, secrétaire dÉtat auprès du ministre de lintérieur. Monsieur le sénateur Pierre Charon, loin de nous – le ministre de l’intérieur et moi-même – l’idée de nier la hausse de la délinquance que vous avez soulignée ; elle bien réelle et importante sur les cinq premiers mois de cette année. Pour parler des catégories que vous connaissez bien, nous enregistrons une augmentation de près de 17 % des atteintes aux biens et de près de 11 % des atteintes volontaires à l’intégrité physique des personnes.

Je dois le souligner, mais vous l’avez rappelé, le mouvement des gilets jaunes a forcément eu un impact. En effet, nous avons dû déployer de nombreux effectifs, notamment le samedi, lesquels étaient donc moins disponibles sur la voie publique pour lutter contre la délinquance et mener des investigations judiciaires. Nous avons agi bien évidemment à la demande – une demande bien naturelle et légitime – des élus de la ville de Paris.

Je dois également souligner – c’est un point essentiel à rappeler – que, au cours du mois de mai, l’augmentation a été moins importante – on voit naître une inflexion en ce sens. Dans la même période, nous avons constaté que la préfecture de police avait augmenté son taux d’élucidation, c’est-à-dire son activité. Il convient donc de saluer le courage et la détermination de nos policiers et de la préfecture de police de Paris.

M. Pierre Charon. Tout à fait !

M. Laurent Nunez, secrétaire dÉtat. Pour répondre au phénomène que vous avez dénoncé, monsieur le sénateur, sachez que, dans les quartiers parisiens qui sont les plus affectés, le préfet de police renforce les effectifs déployés en ayant recours notamment à d’autres unités que celles qui sont dédiées aux commissariats de police.

Par ailleurs, nous allons améliorer l’investigation judiciaire, car, vous avez raison de le rappeler, nous avons un problème pour recruter des officiers de police judiciaire. Christophe Castaner et moi-même travaillons sur ce dossier, afin que des officiers supplémentaires puissent être affectés dès cet automne. Surtout, nous voulons réussir à les fidéliser et à les attirer dans des fonctions qui sont difficiles. C’est tout l’enjeu de l’allégement de la procédure pénale à laquelle la garde des sceaux, Christophe Castaner et moi-même avons procédé.

Enfin, comme vous le savez, un quartier de reconquête républicaine sera mis en place à Paris dans les XVIIIe et Xe arrondissements, quartier qui recevra vingt effectifs supplémentaires pour mieux lutter contre la délinquance.

Soyez assuré, monsieur le sénateur, que la lutte contre la délinquance à Paris restera notre priorité. Le préfet de police, Christophe Castaner et moi-même mettons tout en œuvre pour que ce soit le cas. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. Pierre Charon, pour la réplique.

M. Pierre Charon. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de cette réponse technique, que je respecte bien sûr. Cependant, je crains, hélas, de devoir vous poser la même question dans un an !

M. Rachid Temal. Ce sera après les municipales du coup ! (Sourires.)

expérimentation sur les vaches à hublot

M. le président. La parole est à Mme Évelyne Perrot, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

Mme Évelyne Perrot. Madame la secrétaire d’État, depuis jeudi dernier, l’association de défense des animaux L214 a mis en ligne une vidéo qui dénonce les conditions de vie des bêtes dans la ferme expérimentale de Sourches. Ce centre privé européen de recherches en nutrition animale et conduite d’élevage y mène des expérimentations, afin d’élaborer et de tester les aliments pour animaux de la marque Sanders, leader français en nutrition animale et filiale du groupe Avril.

L’association pointe du doigt l’utilisation de hublots implantés dans le ventre des vaches, afin de permettre un accès direct à leur estomac et, ainsi, d’étudier leur digestion, et ce pour optimiser leur performance et leur productivité.

Sur la chaîne Public Sénat, Mme Poirson a affirmé que cette pratique était choquante, mais restait scientifiquement utile et ne faisait en rien souffrir les animaux, eu égard à l’absence de stress, même s’il faudrait mieux l’encadrer à l’avenir.

L’Institut national de la recherche agronomique, l’INRA, saisie de cette affaire, rendra ses conclusions d’ici à 2025. (Exclamations ironiques sur des travées du groupe Les Républicains.)

Ce reportage sur la condition animale et la manière dont on traite les bêtes au nom du sacro-saint rendement est, hélas, loin d’être le premier. J’espère que la pétition que j’ai personnellement signée aura une incidence sur le devenir de ce centre de recherches, dont la cruauté dépasse l’entendement. (Mme Jacqueline Eustache-Brinio proteste.) Le législateur doit faire entendre sa voix pour que l’animal ne soit pas qu’un maillon commercial.

Madame la secrétaire d’État, que pouvez-vous répondre aux Français choqués par cette nouvelle affaire d’animaux bafoués, ainsi qu’aux éleveurs qui sont l’élément clé de cette filière et qui découvrent, comme moi, cette pratique ? (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste. – Mme Mireille Jouve applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la sénatrice Évelyne Perrot, la recherche sur les animaux, y compris les ruminants, est encadrée par la loi et par des interventions de comités d’éthique. Elle est permise au cas par cas, les autorisations étant accordées par le ministère chargé de la recherche.

La situation que vous relevez concerne la ferme de Sourches. Cette expérimentation a été spécifiquement autorisée par ce ministère en 2014 après un avis favorable du comité d’éthique des Pays de la Loire. Il s’agit d’une pratique de recherche sur les ruminants qui existe depuis plusieurs dizaines d’années, avec comme objectif la réduction des antibiotiques et des émissions de nitrate et de méthane. (M. Joël Labbé proteste.)

Je ne crois pas que l’on puisse se satisfaire de cette pratique, même si elle est ancienne et menée à des fins scientifiques. La communauté scientifique a le devoir de recourir à des méthodes alternatives, telles que le rumen artificiel ou la modélisation des processus digestifs, avec pour objectif de ne plus opérer de prélèvements sur les animaux.

Au-delà des questions liées à la recherche, le respect du bien-être animal, qui est défendu par François de Rugy et par Didier Guillaume, est une cause très importante. La stratégie gouvernementale dans ce domaine se renforce notamment pour l’élevage, mais également en ce qui concerne la faune sauvage, puisque le ministère de la transition écologique et solidaire a lancé il y a quelques semaines une grande concertation sur le sujet, et un plan d’action dédié sera effectif dès la rentrée 2019. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche. – MM. Joël Labbé et Jean-Marc Gabouty applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Évelyne Perrot, pour la réplique.

Mme Évelyne Perrot. Madame la secrétaire d’État, l’élevage français souffre et les éleveurs reçoivent de plein fouet la réaction des Français qui découvrent ces images. La filière viande est excessivement attaquée, notre agriculture est incomprise : nous devons aider le monde agricole à rester digne ! (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

situation d’air austral

M. le président. La parole est à M. Abdallah Hassani, pour le groupe La République En Marche.

M. Abdallah Hassani. Ma question s’adresse à Mme la ministre des outre-mer.

Depuis le 3 juin, Mayotte est encore plus isolée qu’à l’ordinaire. L’un des deux 787-8, seuls avions de l’unique compagnie qui assure la liaison directe avec Paris, est immobilisé pour au moins deux mois. Un contrôle a détecté une nouvelle détérioration précoce et inattendue des ailettes du moteur, déjà sous surveillance depuis l’inspection imposée l’an dernier à l’ensemble des opérateurs de ce type d’avion équipé de moteurs Trent 1000.

Le recours en urgence à l’affrètement d’avions d’autres compagnies est retardé, car il faut assurer aux pilotes une formation sur simulateurs de vol adaptée aux spécificités de la piste courte de Pamandzi.

Il en résulte une perturbation des vols, malvenue en cette période estivale. La plupart d’entre eux sont annulés et reportés. Les escales par La Réunion allongent la durée des trajets. Les déplacements pour affaires, de même que les déplacements familiaux et touristiques sont bouleversés. Tout cela désorganise la vie économique de l’île.

Depuis des années, les Mahorais réclament en vain l’aménagement d’une piste longue qui permettrait le désenclavement de l’île. À cause du monopole de fait d’une compagnie, les autres sociétés aériennes n’investissant pas dans des avions spécifiquement destinés à ne desservir que Mayotte, ils paient leurs billets d’avion très cher et sont à la merci de tout souci technique, sans solution de rechange.

L’apparition brutale d’un volcan sous-marin près de Mayotte avec une menace de submersion ou de tsunami, en premier lieu là même où se trouve l’aéroport, complique encore la donne.

Il faudra trouver et mettre en œuvre sans tarder des solutions innovantes. Dans ce contexte difficile, madame la ministre, quelles actions envisagez-vous ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre des outre-mer.

Mme Annick Girardin, ministre des outre-mer. Monsieur le sénateur Hassani, vous m’interrogez sur la desserte aérienne à Mayotte et vous avez raison, parce qu’elle n’est pas satisfaisante aujourd’hui.

J’apporterai quelques précisions rapides.

D’abord, je rappelle que l’avarie qu’a connue le Boeing 787 d’Air Austral n’est pas liée à un défaut d’entretien.

Quand les dirigeants de cette compagnie aérienne m’ont signalé les difficultés techniques de leur appareil, je leur ai immédiatement demandé de faire le maximum pour que les Mahorais souffrent le moins possible de cette situation qui est, il est vrai, difficilement acceptable, notamment dans cette période.

Air Austral souhaite investir dans de nouveaux appareils qui augmenteront les capacités de desserte vers Mayotte comme La Réunion. Des dossiers de demande de défiscalisation ont été déposés, dossiers que nous allons étudier.

De manière plus générale, l’amélioration de la desserte à Mayotte est une préoccupation de ce gouvernement.

Comme vous le savez, le plan d’action pour l’avenir de Mayotte, que j’ai eu l’occasion de vous présenter en mai 2018 à Mayotte même, et dont je suis venu faire le bilan il y a tout juste quelques mois, visait trois objectifs : le premier concernait la sécurité de la piste ; le deuxième portait sur l’amélioration de la desserte aérienne ; le troisième avait trait à l’étude du développement de l’aéroport de Mayotte.

Les engagements ont été tenus.

Concernant la sécurisation de la piste, les lits d’arrêt dont la construction a commencé le 28 juin 2018 ont été inaugurés le 28 mars dernier. Ils ont été conçus pour un coût total de 13,5 millions d’euros.

S’agissant de l’amélioration de la desserte, nous avons engagé des discussions avec le Kenya pour accroître la fréquence hebdomadaire des vols vers Mayotte.

Enfin, le contrat de convergence et de transformation qui sera signé le 8 juillet prochain ici, à Paris, au ministère des outre-mer, prévoit des études techniques …

M. le président. Il faut conclure !

Mme Annick Girardin, ministre. … qui prendront en compte les nouvelles informations dont nous disposons, c’est-à-dire les risques volcaniques et sismiques qui pèsent sur Mayotte aujourd’hui.

Vous pouvez compter sur moi et sur ma vigilance sur ce dossier comme sur les autres ! (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)

avenir de l’agriculture française

M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements nourris sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Laurent Duplomb. Monsieur le Premier ministre, lors de votre discours de politique générale, vous avez une fois de plus appelé l’agriculture française à changer de modèle.

Or, à force de critiquer notre modèle ces dernières années et de distiller ce message, vous amplifiez son déclin !

La production agricole française stagne en volume, alors que celle de nos concurrents augmente. L’excédent commercial agricole a été divisé par deux en cinq ans, et risque de disparaître en 2023.

Les importations augmentent à un tel rythme que, aujourd’hui, les Français consomment uniquement des produits agricoles importés plus d’un jour par semaine, alors même qu’un quart de ceux-ci ne respectent pas les normes imposées en France. Un légume et un fruit sur deux sont importés, ainsi qu’un quart du porc. Et même le jambon bio vient d’Espagne !

Monsieur le Premier ministre, êtes-vous conscient de cette réalité ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre chargé des relations avec le Parlement.

M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur Duplomb, je vous prie d’excuser l’absence de Didier Guillaume, qui ne pouvait pas être présent parmi nous aujourd’hui.

J’ai lu attentivement le rapport que vous avez présenté au nom du Sénat sur l’avenir de l’agriculture française. Vous dressez un bilan sévère de l’état de notre agriculture, en particulier de sa capacité de production et d’exportation. Mais finalement, quand on regarde bien les chiffres, votre bilan porte sur les quinze dernières années.

Partageons le constat qu’une partie du chemin n’a pas été fait et qu’il reste du travail à accomplir collectivement – Gouvernement et Parlement – pour que notre agriculture reconquière à la fois des capacités de production et de la compétitivité.

Vous nous interrogez en particulier sur les distorsions de concurrence et sur la question des normes et des produits importés.

Vous l’avez souligné : les importations de produits agricoles et alimentaires ont fortement augmenté depuis 2000, de même que les exportations, mais dans une moindre mesure. La qualité des produits importés constitue un enjeu majeur en termes à la fois de santé publique et de respect des normes qui sont les nôtres.

Ces produits font l’objet de contrôles stricts par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF. Les services régionaux réalisent 5 000 prélèvements par an sur les végétaux placés sur le marché.

En 2017, le taux de non-conformité des produits soumis à un contrôle renforcé à l’importation s’élève à 9,3 %. Il est lié soit à la présence de résidus d’un produit non autorisé, soit au dépassement de ce que l’on appelle la limite maximale de résidus – la LMR – pour un produit dont l’usage est autorisé sur le végétal considéré.

Ce taux de non-conformité, vous avez raison de le souligner, est tout à fait anormal. Pour mieux contrôler ces denrées, nous avons donc décidé de doubler le nombre de prélèvements. Les LMR sont calculés pour chaque denrée et chaque substance, afin d’assurer un traitement efficace et une alimentation saine.

Comme l’a constaté la DGCCRF, la fraude semble plus importante pour les produits importés issus de l’agriculture biologique, ce qui pose un problème de relation de confiance à l’égard des consommateurs. Le Gouvernement met tout en œuvre pour lutter contre cette concurrence déloyale pour les producteurs français auxquels il souhaite évidemment réaffirmer son soutien : c’est une question de respect et de confiance vis-à-vis des consommateurs. C’est aussi une question essentielle pour la compétitivité de notre agriculture ! (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour la réplique.

M. Laurent Duplomb. La réalité, monsieur le ministre, c’est que plus vous opposez les modèles, plus vous favorisez l’agribashing, alors qu’un tiers des agriculteurs a plus de 55 ans et qu’il faudrait renouveler les exploitants plutôt que dégoûter les vocations !

La réalité, c’est que plus vous contraignez nos agriculteurs sans suffisamment contrôler les importations, plus vous ouvrez la porte à des produits qui ne respectent pas les normes françaises !

La réalité, c’est que changer de modèle et monter en gamme se traduira par une segmentation des Français : d’un côté, il y aura ceux qui auront les moyens de se payer une alimentation prétendument plus vertueuse ; de l’autre, il y aura ceux qui seront condamnés à manger exclusivement des produits importés !

Ce gouvernement se caractérise par des annonces qui sont aussi fortes que la réalité de son action est faible.

Alors, monsieur le ministre, j’en appelle à votre bon sens : arrêtez ce jeu de massacre suicidaire pour notre agriculture française ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)

assurance chômage

M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Frédérique Puissat. Ma question s’adresse à Mme la ministre du travail.

Ce jour, les partenaires sociaux organisent plusieurs mouvements de contestation de la réforme de l’assurance chômage.

Les uns et les autres peuvent penser ce qu’ils veulent du paritarisme. Pour notre part, nous sommes convaincus de son utilité. Nonobstant les différentes positions, nous nous accordons pour considérer en tout cas qu’il n’est bon ni pour la paix républicaine ni pour l’image de la France que les Français soient dans la rue et que les syndicats soient décrédibilisés.

Vous avez fait le choix, madame la ministre, de passer en force sur la réforme de l’assurance chômage. Pour motiver votre position, vous évoquez deux faits : tout d’abord, les partenaires sociaux n’auraient pas su se mettre d’accord ; ensuite, vous présentez un scénario alarmiste en expliquant que « si on ne fait d’économies, dans dix ans, on n’aura plus de quoi indemniser les chômeurs ».

Mes questions sont les suivantes.

Me confirmez-vous qu’un accord avait été trouvé par les partenaires sociaux le 28 mars 2017, qu’il portait déjà sur le déficit de l’assurance chômage et sur les contrats courts – les négociations se sont certes déroulées sous un autre gouvernement, mais dans lequel figurait Emmanuel Macron –, et que vous ne lui avez pas laissé sa chance ?

Me confirmez-vous qu’un accord avait été trouvé le 22 février 2018 sous votre mandature, qu’il portait également sur les contrats courts et la gestion de la dette, et que vous avez balayé les propositions des partenaires sociaux ?

Me confirmez-vous, enfin, que le scénario alarmiste que vous évoquez, qui serait lié à la dette de l’assurance chômage, n’est pas réaliste et que l’Unédic prévoyait un retour à l’équilibre du dispositif au deuxième semestre 2020 ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail.

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail. Madame la sénatrice Frédérique Puissat, nous ne sommes d’accord qu’avec le début de votre intervention, lorsque vous soulignez l’importance du paritarisme et du dialogue social.

Je vous rappelle les faits.

Dans la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, nous avons précisé les conditions dans lesquelles s’exerce le rôle des partenaires sociaux en ce qui concerne l’assurance chômage, et appelé à une négociation.

Au mois de septembre dernier, nous avons mené une concertation avec eux, sous l’égide du Premier ministre, pour définir la lettre de cadrage qui leur a été envoyée par la suite. Les partenaires sociaux ont alors eu quatre mois pour négocier. Puis, ils ont demandé un cinquième mois, que le Premier ministre leur a accordé. (M. le Premier ministre opine.) Au bout de cinq mois, ils ont constaté qu’ils n’arrivaient pas à se mettre d’accord.

Nous nous inscrivons donc dans le strict respect de la loi, madame la sénatrice : la loi prévoit que si les partenaires sociaux ne parviennent pas à définir les règles de l’assurance chômage, c’est à l’État de prendre ses responsabilités. Nous prenons donc nos responsabilités !

Depuis le mois de février, nous aurions tout à fait pu faire paraître le décret, mais nous avons préféré attendre pour poursuivre les discussions. Nous reprenons d’ailleurs certains éléments de ces négociations dans la réforme qui sera prochainement publiée par décret, conformément à la loi.

Nous engageons cette réforme pour deux raisons essentielles.

Tout d’abord, le taux de précarité a explosé dans notre pays : neuf embauches sur dix le sont aujourd’hui en contrat extrêmement court.

Ensuite, nous avons fait de grands progrès en matière de retour à l’emploi, mais nous devons aller encore plus loin. Même si le taux de chômage actuel, qui s’élève à 8,7 %, est inférieur d’un point à celui que nous avons trouvé en arrivant, nous pouvons aller plus loin et, pour ce faire, les efforts en matière de formation et dans le domaine de l’assurance chômage seront primordiaux.

En ce qui concerne la dette de l’assurance chômage, j’ai été très précise : aujourd’hui, 35 milliards d’euros de dette sont garantis par l’État. Si une crise éclatait dans dix ans, comment pourrait-on dégager des marges de manœuvre importantes avec une dette aussi élevée ? Nous ne devons pas laisser la dette de l’assurance chômage reposer sur la génération suivante pour être en mesure de protéger les chômeurs de demain.

M. François Patriat. Très juste !

Mme Muriel Pénicaud, ministre. Enfin, il y a un enjeu majeur en matière de formation – je compte beaucoup sur les régions à ce sujet. Aujourd’hui, certaines régions baissent leur budget dédié à la formation des chômeurs et des apprentis, alors que nous devrions veiller ensemble à l’intérêt général. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour la réplique.

Mme Frédérique Puissat. Madame la ministre, réformer un dispositif, réformer la France, personne dans cet hémicycle n’en conteste le besoin.

Vous avez fait le choix de passer en force et avez pris un certain nombre de décisions : une partie de l’hémicycle peut y être favorable, l’autre pas. Mais nous ne serons pas associés à ces négociations, pas plus que les partenaires sociaux ne le seront à cette deuxième réforme de l’assurance chômage.

Je tiens simplement à dire que votre passage en force s’appuie sur deux postulats faux. Premièrement, les partenaires sociaux se sont mis d’accord à deux reprises sur les enjeux que vous aviez fixés, une fois en 2017, la seconde en 2018. Deuxièmement, vos chiffres alarmants ne visent qu’un objectif : diviser la France et diviser les Français ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

privatisation de barrages hydrauliques

M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour le groupe socialiste et républicain.

Mme Angèle Préville. Madame la secrétaire d’État, samedi dernier, en Savoie, syndicats, associations et partis manifestaient contre l’ouverture à la concurrence des barrages hydroélectriques.

L’injonction de la Commission européenne à privatiser la gestion des barrages dans le cadre du renouvellement des concessions se voit donc opposer une réprobation citoyenne et transpartisane pour défendre à la fois la gestion publique et notre bien commun qu’est l’eau.

Un consensus se dessine pour rejeter l’ouverture à la concurrence de ce secteur stratégique d’avenir qui dégage un bénéfice net de 1,25 milliard d’euros par an.

Les barrages produisent une énergie vertueuse, décarbonée, garante de notre indépendance et disponible immédiatement. Ils jouent de plus un rôle essentiel dans la compensation des variations de production en apportant une réponse fiable à la perte d’inertie des systèmes. Ils permettent enfin de stocker le surplus d’électricité. Bref, leur rôle est central et indispensable pour accompagner le développement des énergies renouvelables.

Notre pays tire aussi de nombreux avantages qui dépassent le seul intérêt énergétique : irrigation, soutien au débit d’étiage, gestion des crues.

Quatre cents barrages, en majorité gérés par EDF, sont concernés par la mise en concurrence. Nous pouvons légitimement avoir un doute sur la gestion, qui sera certainement purement comptable, des futurs opérateurs : ainsi, rien ne nous assure que les opérateurs en question continueront à fournir de l’électricité pendant les périodes moins rentables.

Peut-on brader au plus offrant un patrimoine vertueux, qui fonctionne, qui est sécurisé et a été financé par les Français ? À la fin, tout est-il marchandise ? Quelle est votre religion sur cette ouverture à la concurrence ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la sénatrice Angèle Préville, le Premier ministre l’a dit lors de son discours de politique générale : la France soutiendra son modèle d’hydroélectricité, qui, comme vous l’avez rappelé, est la première source d’énergie renouvelable, afin de garantir les enjeux d’intérêt public lors du renouvellement des concessions.

Dès 2015, la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte a prévu des mesures protectrices pour les salariés des concessions hydroélectriques, à savoir le maintien de leur statut et la reprise à des conditions équivalentes en cas de nouveau concessionnaire. Nous avons ainsi la garantie que ces salariés se verront proposer une rémunération et des avantages sociaux similaires à ceux dont ils bénéficient actuellement.

Mais surtout, toujours en 2015, la Commission européenne a adressé une mise en demeure aux autorités françaises au sujet de ces concessions hydroélectriques, considérant que les mesures françaises étaient incompatibles avec le droit communautaire. Le Gouvernement continue de contester l’idée d’une rupture d’égalité sur le marché de la fourniture d’électricité au détail et l’idée d’un quelconque avantage discriminatoire accordé à EDF.

Par ailleurs, je vous rejoins : les barrages hydroélectriques, les concessions hydroélectriques constituent des enjeux sociaux, économiques, écologiques majeurs, liés à l’hydroélectricité, en particulier à la gestion de l’eau et à la sécurité des ouvrages.

Toutefois,…

M. Fabien Gay. Ah ! On attendait le « mais »… (Sourires.)

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat. … le principe de mise en concurrence des concessions échues découle du droit national et européen. Le Gouvernement s’y prépare en défendant des principes essentiels, notamment en s’opposant à toute interdiction de candidater pour EDF et à la remise en concurrence des concessions non échues. C’est la défense d’une application équilibrée de la loi relative à la transition énergétique : regroupement des concessions dans une même vallée, prolongation de certaines concessions dans le respect du droit, possibilité de constituer des sociétés d’économie mixte lors du renouvellement des concessions, lorsque les collectivités locales sont intéressées.

Les échanges avec la Commission européenne se poursuivent, mais aucun accord n’a été trouvé à ce stade. Nous défendrons les intérêts généraux des concessions hydroélectriques dans ce débat. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour la réplique.

Mme Angèle Préville. Nous prenons acte de votre réponse et serons particulièrement vigilants sur ce sujet, madame la secrétaire d’État.

Je tiens à rappeler que certains de nos voisins n’ont pas de régime concessif et ne seront donc pas concernés par la mise en concurrence.

Je tiens également à préciser que le renouvellement des concessions dans certaines vallées pourrait remettre en cause l’équilibre patiemment construit : nos territoires ruraux n’ont pas besoin de cette menace !

Enfin, gouverner, c’est être visionnaire, c’est anticiper en responsabilité.

M. le président. Il faut conclure !

Mme Angèle Préville. Il faut avoir suffisamment de sérénité, d’indépendance, en somme de sagesse pour pouvoir rêver la France en privilégiant l’intérêt général et préserver ce qui nous constitue en tant que Nation ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur des travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

assouplissement des 80 kilomètres par heure

M. le président. La parole est à Mme Christine Herzog, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.

Mme Christine Herzog. Monsieur le ministre, la décision autoritaire d’abaisser la limitation de vitesse de 90 à 80 kilomètres par heure a été prise sans tenir compte des besoins de nos concitoyens dans leur vie au quotidien et des problèmes spécifiques aux zones rurales. Il n’est donc pas surprenant qu’elle ait provoqué des réactions de colère qui ont été en grande partie à l’origine du mouvement des gilets jaunes.

Tout comme d’autres parlementaires, je me suis opposée à cette mesure impopulaire.

La solution que nous avons adoptée au Sénat consiste à assouplir le dispositif en donnant aux préfets et aux présidents de département le pouvoir de rétablir la limitation de vitesse à 90 kilomètres par heure sur les routes nationales et départementales lorsqu’il n’y a pas de danger particulier.

Or on s’achemine vers une mesure a minima, qui est incohérente, puisque le seuil des 80 kilomètres par heure resterait obligatoire sur toutes les routes nationales, les routes départementales étant les seules susceptibles de bénéficier d’un retour au seuil des 90 kilomètres par heure.

Monsieur le ministre, comment pouvez-vous justifier une telle discrimination entre routes nationales et routes départementales ? Par ailleurs, ne pensez-vous pas qu’il serait plus sage et plus cohérent de conserver une norme nationale à 90 kilomètres par heure et de permettre, a contrario, aux préfets et aux présidents de département de limiter la vitesse à 80 kilomètres par heure dans les endroits les plus accidentogènes ? (Certains membres de la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste daucun groupe applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Christophe Castaner, ministre de lintérieur. Madame la sénatrice, de quoi est-il question ? Nous parlons de prévention, de sécurité, de vies humaines emportées sur nos routes. L’année dernière, 3 248 personnes ont perdu la vie sur les routes.

Ce constat doit être à la base de notre réflexion sur les aménagements à venir, avec un objectif commun, fixé depuis plusieurs années : tout faire pour que le nombre de morts sur les routes baisse.

La mise en place le 1er juillet 2018 de la limitation de la vitesse à 80 kilomètres par heure a largement contribué au caractère exceptionnel du chiffre que je viens de vous donner. Il s’agit du meilleur bilan que nous ayons connu depuis longtemps, même s’il y a encore 3 248 morts !

Le Premier ministre avait annoncé que cette mesure ferait l’objet d’une expérimentation pour une durée de deux ans. Mais vous savez, comme moi, que nous avons rencontré une vraie difficulté pour évaluer les résultats de cette expérimentation en raison de la dégradation massive – vous avez parlé des gilets jaunes – de notre dispositif de contrôle : près de 75 % des radars ont en effet été neutralisés sur les routes départementales de façon provisoire ou définitive.

Par la suite, les chiffres ont montré qu’il y avait eu un relâchement important : plus de soixante morts au premier trimestre 2018 sont précisément liées à une vitesse excessive.

Il faut aujourd’hui engager la discussion avec tous les partenaires. Dans le cadre du grand débat national, les maires et les présidents de département ont ainsi demandé de pouvoir revenir sur cette mesure. C’est exactement ce que l’amendement parlementaire – élaboré par le Sénat, puis examiné par l’Assemblée nationale – a prévu, le tout dans la transparence et sur la base de chiffres objectifs, ceux qui nous permettent justement de constater que la baisse de la vitesse sauve des vies.

C’est sur cette base-là que le Parlement décidera, en application de la loi dite LOM, de donner la faculté aux présidents de département et aux maires de revenir aux 90 kilomètres par heure. Ceux-ci prendront ainsi – c’est une évidence – toutes leurs responsabilités. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à Mme Christine Herzog, pour la réplique.

Mme Christine Herzog. Monsieur le ministre, nos concitoyens attendent des mesures cohérentes et lisibles, qui simplifieraient leur quotidien, toujours plus compliqué. Revenir à la norme des 90 kilomètres par heure et l’inscrire dans le code de la route serait une mesure de bon sens. (Certains membres de la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste daucun groupe applaudissent.)

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

Les prochaines questions d’actualité au Gouvernement auront lieu le jeudi 4 juillet 2019, à quinze heures.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-cinq, est reprise à dix-sept heures cinquante-cinq, sous la présidence de M. Jean-Marc Gabouty.)

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Marc Gabouty

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

9

Mise au point au sujet d’un vote

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Grand.

M. Jean-Pierre Grand. Monsieur le président, le 5 février 2019, lors du scrutin public n° 48 intervenu dans le cadre de l’examen du projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises, j’ai été comptabilisé comme ayant voté pour, alors que je souhaitais voter contre.

M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle figurera dans l’analyse politique du scrutin.

10

Débat à la suite de la réunion du Conseil européen des 20 et 21 juin 2019

M. le président. L’ordre du jour appelle le débat à la suite de la réunion du Conseil européen des 20 et 21 juin 2019.

La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire dÉtat auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le Conseil européen des 20 et 21 juin derniers a permis aux chefs d’État et de gouvernement d’aborder de nombreux sujets. J’ai eu l’occasion d’échanger avec certains d’entre vous avant ce Conseil. Nous avions alors constaté que l’agenda s’annonçait chargé. Les commentateurs ont volontiers retenu la seule question des nominations, en négligeant parfois les avancées importantes que nous avons enregistrées sur d’autres points, sur lesquels je voudrais revenir.

Pour ce qui est des nominations, sujet largement commenté, les chefs d’État ou de gouvernement, lors de leur rencontre informelle du 28 mai dernier, s’étaient accordés sur une ambition commune largement partagée. Il s’agit bien de trouver une équipe reflétant la diversité de l’Union s’agissant de la géographie, de la démographie, du genre et de l’affiliation politique.

Dans la nuit de jeudi dernier, à Bruxelles, les chefs d’État ou de gouvernement se sont mis d’accord sur ce qu’ils ne voulaient pas : la discussion a ainsi permis d’écarter le principe des candidats chefs de file, appelés Spitzenkandidaten, selon lequel les principales familles politiques de l’Union désignent leur candidat pour la présidence de la Commission européenne. Ainsi, le parti réunissant le plus grand nombre de sièges au Parlement obtient mécaniquement la présidence de la Commission.

Toutefois, comme l’a redit le président du Conseil européen, Donald Tusk, à l’issue de la réunion, aucun des trois candidats identifiés par cette procédure – Manfred Weber pour le PPE, Frans Timmermans pour les socialistes et Margrethe Vestager pour le groupe centriste – n’est apparu susceptible d’obtenir une majorité claire au sein ni du Parlement européen ni du Conseil européen.

Par conséquent, une nouvelle réunion des chefs d’État ou de gouvernement aura lieu dimanche prochain pour achever les discussions et présenter une équipe d’Europe pouvant prendre la tête de la Commission, du Conseil, du Parlement et de la Haute Représentation de l’Union européenne. Nous devons considérer cette échéance comme une date butoir, puisque la première session du Parlement européen, au cours de laquelle les députés européens devront élire leur président, se tiendra le 2 ou le 3 juillet.

Comme l’a dit le Président de la République, il s’agit d’un enjeu non seulement de crédibilité, un mois après des élections européennes ayant fortement mobilisé les citoyens, mais aussi de bon fonctionnement institutionnel. N’ajoutons pas de la lenteur à une discussion pouvant s’avérer difficile à suivre pour de nombreuses personnes.

Je tiens à le rappeler, dans ce cadre, la France n’a qu’une seule exigence : il faut parler du projet européen, avec des critères de compétences plutôt que de nationalité. Ce n’est pas une bataille de drapeaux. Si nous nous plaçons sur le terrain de la bataille d’influence nationale, le projet européen ira dans le mur. Il s’agit avant tout d’une bataille de crédibilité, pour que l’Europe puisse peser et prendre des décisions efficaces au cours des cinq prochaines années.

Le futur président de la Commission devra être une personne expérimentée et crédible, qui sera capable d’assumer des missions difficiles de haut niveau à l’échelon national, au sein de l’Union européenne ou à l’égard de ses voisins, puisqu’il y a également fort à faire à cette échelle.

Mais le Conseil s’est également penché, et c’est heureux, sur la nature du projet européen et le programme stratégique 2019-2024. Il ne s’agit pas d’un document de concept. Au contraire, il détermine très précisément les domaines politiques prioritaires sur lesquels l’Union devra concentrer ses efforts au cours des cinq prochaines années. Il dresse donc l’esquisse de la feuille de route du prochain président de la Commission.

Les quatre grandes priorités identifiées dans ce programme ont fait l’objet d’un large consensus parmi les États membres : protéger les citoyens et les libertés ; mettre en place une base économique solide et dynamique ; construire une Europe neutre pour le climat, verte, équitable et sociale ; et promouvoir les intérêts et les valeurs de l’Europe sur la scène mondiale. Ce programme stratégique fixe ainsi un cap clair, qui correspond pleinement aux priorités défendues par la France depuis maintenant plusieurs années, comme en témoignent les interventions du Président de la République et un certain nombre de travaux parlementaires.

Notre pays assumera également une responsabilité particulière au cours de ce nouveau cycle institutionnel, puisqu’il prendra la présidence du Conseil au premier semestre 2022, soit à mi-parcours.

Par ailleurs, comme nous l’avons demandé, le Conseil européen reviendra sur le sujet du programme stratégique en octobre prochain, ce qui lui permettra d’examiner, en concertation avec le futur président ou la future présidente de la Commission européenne, les moyens de mettre en œuvre concrètement cet agenda dans le cadre du programme de travail de la Commission et des feuilles de route des différents commissaires européens.

Les chefs d’État ou de gouvernement ont examiné d’autres sujets prioritaires de l’ordre du jour européen.

La discussion sur le cadre financier pluriannuel 2021-2027 a permis au Conseil de saluer les travaux réalisés sous la présidence roumaine, synthétisés dans la « boîte de négociation », support du futur accord politique, et d’inviter la présidence finlandaise à poursuivre ces travaux et à affiner cette boîte, en présentant des chiffres, similaires ou différents de la proposition initiale de la Commission.

Sur cette base, les chefs d’État ou de gouvernement sont convenus d’avoir un nouvel échange de vues sur ce sujet en octobre prochain, dans la perspective de parvenir à un accord avant la fin de l’année 2019. En effet, pour une mise en œuvre le 1er janvier 2021, il est essentiel de conclure tôt les négociations, afin que les États et les régions puissent ensuite utiliser pleinement les fonds.

Nous avons également engagé des échanges particulièrement intéressants avec l’ensemble des autorités finlandaises. J’ai moi-même rencontré mon homologue très récemment, afin de lui faire part des priorités de la France, de ses inquiétudes et, surtout, de l’état d’esprit dans lequel elle souhaite aborder une discussion budgétaire essentielle.

La discussion sur la lutte contre le changement climatique a donné lieu à des échanges nourris. Si les conclusions sur le climat ne sont pas aussi ambitieuses que nous l’aurions souhaité, les Vingt-Huit ne s’étant pas accordés à reconnaître qu’il fallait atteindre la neutralité carbone en 2050, c’est parce que quatre États membres continuent toujours d’opposer transition climatique et compétitivité de leur appareil industriel et à faire valoir des circonstances nationales pour empêcher de faire de l’Union un véritable chef de file en matière de lutte contre le changement climatique.

Nous aurions en effet souhaité entériner le fait que l’Union présenterait un message unifié lors de la réunion qui se tiendra le 23 septembre prochain à New York, organisée sur l’impulsion du secrétaire général de l’ONU, António Guterres, pour faire un point sur les initiatives prises par les différents pays.

L’objectif de la neutralité climatique de l’Union en 2050 n’a donc pas été inscrit dans le texte des conclusions, mais figure néanmoins dans une note en bas de page. Pour autant, vingt-quatre pays s’y sont ralliés. Nous n’étions que huit au sommet de Sibiu le 9 mai dernier, et seulement quatre au mois de mars. Sur cette proposition, formulée par la France, nous avons donc réussi à rassembler largement.

La problématique du financement a été posée. Nous avons invité la Banque européenne d’investissement à intensifier ses activités en faveur de l’action climatique. Ce point fait écho à la proposition soutenue par la France de créer une banque européenne du climat.

Les conclusions du Conseil européen rappellent également les efforts à fournir pour renforcer la résilience des démocraties face à la désinformation, aux fake news, et améliorer la capacité de réaction de l’Union face aux menaces hybrides et cyber. À la demande de la France, le Conseil a invité les institutions de l’Union européenne, ainsi que les États membres, à œuvrer à des mesures visant à renforcer la résilience et à améliorer la culture de sécurité de l’Union européenne, notamment pour mieux protéger les réseaux d’information et de communication de l’Union, ainsi que ses processus décisionnels, contre les actes de malveillance de tout type. La cyberguerre existe bel et bien, nous pouvons aujourd’hui le constater au Moyen-Orient, et il convient que l’Europe puisse se protéger de ses risques.

Les relations extérieures ont aussi été au cœur de ce Conseil européen, au vu de l’actualité et des priorités de l’Union en la matière.

Le Conseil européen, sur notre initiative, a réaffirmé l’importance du partenariat stratégique de l’Union européenne avec l’Afrique, tout en appelant à le développer davantage. Il a également souligné le caractère essentiel pour l’Union de la stabilité, de la sécurité et de la prospérité des pays de la rive sud de la Méditerranée. Le Président de la République a eu l’occasion de réaffirmer ce dernier point ce week-end, à l’occasion du sommet des Deux Rives, qui s’est tenu à Marseille. La France fera des propositions pour que l’Union européenne renforce son partenariat avec le sud de la Méditerranée.

Le Conseil européen a par ailleurs décidé de renouveler, pour six mois supplémentaires, les sanctions sectorielles européennes appliquées à la Russie. Ces dernières sont non pas une fin en soi, mais un moyen d’encourager le règlement pacifique du conflit au Donbass. Nous n’observons malheureusement à ce stade aucune avancée dans la mise en œuvre des accords de Minsk, qui conditionnent l’allégement de ces sanctions.

Un sommet de la zone euro a été organisé vendredi matin en marge du Conseil européen, en présence de Mario Draghi et Mario Centeno, le président de l’Eurogroupe, dans un format inclusif, c’est-à-dire à vingt-sept, soit avec des pays qui ne sont pas membres de cette zone.

Il a permis de faire un bilan exhaustif de l’accord trouvé lors du conseil Écofin qui s’était tenu la semaine précédente, après l’accord franco-allemand de Meseberg de juin 2018 et l’accord des vingt-sept chefs d’État ou de gouvernement en décembre 2018 pour renforcer et approfondir l’Union économique et monétaire. À cet égard, les chefs d’État ou de gouvernement ont salué les progrès réalisés par l’Eurogroupe sur la révision du traité sur le mécanisme européen de stabilité, qui vise notamment à faciliter l’utilisation de ce mécanisme en cas de crise, et la création d’un instrument budgétaire pour la convergence et la compétitivité de la zone euro. Il s’agit d’une esquisse d’un budget de la zone euro.

Ces accords sont positifs, mais ne sont pas suffisants. Des clarifications doivent encore être apportées, notamment sur la gouvernance et le financement d’un tel budget. Comme nous l’avons dit à plusieurs reprises, il faut un budget de taille suffisante, crédible, doté d’une gouvernance spécifique, un budget qui ne puisse pas être confondu avec une ligne budgétaire des Vingt-Huit.

Enfin, une discussion en format article 50 a été organisée à l’issue du Conseil européen pour évoquer la situation du retrait britannique depuis le sommet du 10 avril. Les vingt-sept chefs d’État ou de gouvernement ont fait part de leur pleine disponibilité pour travailler avec le prochain Premier ministre britannique, tout en rappelant que l’approche de l’Union quant aux négociations restait inchangée : s’il n’est pas envisageable de rouvrir l’accord de retrait, qui reste la seule option pour assurer un retrait ordonné du Royaume-Uni, ils sont prêts à travailler sur la déclaration relative aux relations futures, la fameuse déclaration politique, si la position britannique venait à évoluer à ce sujet.

Sur tous ces sujets, mesdames, messieurs les sénateurs, je serai ravie d’écouter vos observations et de répondre à vos questions. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – M. le président de la commission des affaires étrangères, MM. René Danesi et Jean-Marie Bockel applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires étrangères.

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre aperçu assez complet des nombreux thèmes abordés lors du dernier Conseil européen. Je me réjouis de la qualité du dialogue que vous avez souhaité engager avec notre assemblée dès votre prise de fonction. Il est utile et fécond. Vous pouvez compter sur le Sénat pour vous soutenir dans toutes vos initiatives visant à refonder l’Union européenne.

Cela dit, au nom de la commission des affaires étrangères, je formulerai quatre observations. Elles portent sur la défense, la Russie, l’élargissement et la Turquie.

Je ne peux pas ne pas évoquer la défense, au lendemain du salon du Bourget où a été signé l’accord avec l’Allemagne et l’Espagne sur l’avion de combat du futur, et à la veille de l’examen, en commission des affaires étrangères, du traité d’Aix-la-Chapelle.

Je proposerai à mes collègues d’adopter le traité signé avec l’Allemagne, mais j’appellerai à des avancées concrètes sur le volet « export de défense ».

La réaffirmation symbolique de l’amitié franco-allemande est, nous en sommes tous d’accord, une nécessité absolue dans un contexte marqué par le Brexit et la montée des rivalités entre puissances. Le moment est bien choisi pour donner un successeur au traité de l’Élysée de 1963, car l’amitié franco-allemande est non seulement la grande réussite de l’après-guerre, mais surtout, aujourd’hui, le socle de la pérennité de l’Union européenne.

Vous connaissez notre préoccupation sur un volet essentiel du traité : la coopération sur les programmes de défense, clé de l’indépendance stratégique européenne future. Au-delà de la volonté d’avancer manifestée par le texte et les dirigeants des deux côtés du Rhin, de nombreuses incertitudes pèsent sur les projets communs, qu’ils concernent les avions, les drones ou les chars lourds. Je parle évidemment de la politique d’exportation. On ne peut vouloir construire un avion de combat européen ensemble et tout faire pour qu’il soit impossible de l’exporter. C’est une question de cohérence !

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères. Les bisbilles du partage industriel ne doivent pas empêcher la défense européenne d’avancer. Le Président de la République et la Chancelière l’ont clairement dit, c’est 50-50, et on pourra exporter librement. Tels sont les principes ! Appliquons-les !

Le Sénat va bien sûr mouiller sa chemise, si je puis me permettre cette expression, sur ce dossier vital, en faisant jouer ses liens privilégiés avec la commission de la défense du Bundestag, acteur clé dans ce dossier. Comptez sur moi pour aborder cette question avec le président Wolfgang Hellmich, que je rencontrerai très bientôt à Bâle, en compagnie de mon collègue de l’Assemblée nationale. Vous le voyez, le Parlement, ça peut servir ! Au salon du Bourget, nous n’avons cessé d’entendre des appels à un meilleur dialogue entre les parlementaires de nos deux pays.

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères. S’agissant de la Russie, mes observations n’étonneront personne, tant la position de la commission est constante et connue : il faut dialoguer, avec fermeté et détermination. Oui, nous condamnons l’annexion de la Crimée ; oui, nous demandons l’application des accords de Minsk et la libération des marins ukrainiens ; oui, nous demandons aux Russes de modérer leurs alliés iraniens et d’agir sur leur allié syrien pour mettre fin à l’atrocité des bombardements à Idlib.

Cependant, la Russie est un grand partenaire stratégique, au cœur de la résolution des crises au Moyen-Orient, mais aussi en Europe. Il est tout de même invraisemblable de constater qu’on parlait davantage aux Russes du temps de la guerre froide ! À cet égard, je me félicite de la rencontre organisée hier entre les Premiers ministres de France et de Russie. Car il faut ouvrir un nouvel espace de dialogue avec la Russie.

La réintégration de la Russie au sein du Conseil de l’Europe, dont le principe a été adopté hier soir, permettra aux citoyens russes opposants de déposer des recours auprès de la Cour européenne des droits de l’homme, la CEDH. Je remercie les membres de notre assemblée siégeant à Strasbourg d’avoir voté en ce sens.

Bien évidemment, nous attendons des signes de nos amis russes, qui doivent notamment s’engager à exécuter les jugements de la CEDH. Une telle attitude, très positive, serait appréciée.

Pour ce qui concerne l’élargissement, madame la secrétaire d’État, vous avez indiqué la semaine dernière que la question de l’ouverture des négociations d’adhésion avec l’Albanie et la Macédoine du Nord ne serait finalement discutée qu’en octobre, dans l’attente d’une position du Bundestag. Mais vous n’avez pas clairement exprimé la position que la France adoptera à ce sujet.

La Commission européenne met en avant les progrès effectués par ces deux pays. Il nous faut bien sûr éviter qu’ils ne basculent sous d’autres influences – ici même, nous recevons leurs représentants quasiment chaque semaine. La mise en scène du rapprochement récent entre la Serbie et la Russie est, en la matière, une vraie piqûre de rappel. Le Président de la République puis le président Larcher se rendront d’ailleurs prochainement en Serbie – c’est une bonne chose.

Mais l’Union européenne ne nous semble pas prête à accueillir de nouveaux membres !

M. Bruno Sido. Non, ça suffit !

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères. Elle se débat toujours avec le Brexit et avec sa propre refondation. Là est, aujourd’hui, la priorité : refonder l’Europe ! C’est ce que nous pensons ; c’est aussi ce que pense notre opinion publique. J’aimerais, à cet égard, que vous précisiez quelle est la position exacte de la France au sujet de l’ouverture de nouveaux processus d’adhésion.

Un mot, enfin, sur la Turquie.

Voilà l’Union européenne prête à prendre des sanctions à l’égard d’un État qui est un candidat à l’adhésion depuis plus de trente ans. Nous saluons la fermeté du Conseil face aux activités de forage illégales en Méditerranée orientale et en mer Égée, facteur de déstabilisation pour plusieurs États membres de l’Union européenne, notamment la Grèce et Chypre, où j’irai moi-même dans quarante-huit heures.

Mais la Turquie est un partenaire stratégique, membre de l’OTAN. Notre coopération antiterroriste est essentielle. Nous avons besoin de la Turquie dans la gestion des migrations.

Il y a peu de chances de voir les menaces de sanction faire effet – vous l’avez dit vous-même, madame la secrétaire d’État ! Qu’a-t-on à gagner à éloigner chaque jour un peu plus la Turquie de l’Union européenne ? Les dirigeants turcs ne sont pas le peuple turc : on le constate au résultat des élections municipales d’Istanbul. Et les électeurs turcs ne sont peut-être pas aussi naïfs qu’on le pense !

Quelle sera donc la position du Gouvernement ? La priorité n’est-elle pas de recréer des marges d’action et de dialogue avec la Turquie ?

Voilà, madame la secrétaire d’État, quelques éléments issus du travail de la commission des affaires étrangères.

Dans la situation compliquée que vit et que va vivre l’Europe avec le Brexit, nous devons évidemment adopter, sur tous ces sujets, des positions claires. Le Sénat est prêt à vous accompagner ; poursuivons notre dialogue et veillons à ce que les intérêts de la France soient privilégiés dans ce grand continent qui est le nôtre. Je souhaite que vous multipliiez les initiatives permettant de renforcer l’Europe. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – M. Jean-Yves Leconte applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le vice-président de la commission des finances.

M. Philippe Dominati, vice-président de la commission des finances. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la réunion du Conseil européen qui s’est tenue la semaine dernière, la première depuis les élections européennes, était très attendue pour fixer le cap de l’Union européenne jusqu’en 2024.

Or, loin de tenir ses promesses, cette réunion a surtout confirmé l’existence de divergences majeures entre les États membres, le Conseil européen renvoyant d’ailleurs à une date ultérieure la prise des décisions concernant les principaux sujets intéressant la commission des finances.

Premièrement, le Conseil reste prudent, dans ses conclusions, sur l’état d’avancement des négociations relatives au prochain cadre financier pluriannuel.

Il se contente en effet de « saluer » les travaux déjà réalisés, tout en prévoyant un « échange de vues » sur le sujet en octobre prochain. Certes, le temps européen relève du temps long, et le prochain cadre financier pluriannuel déterminera les moyens financiers de l’Union européenne jusqu’en 2027.

Toutefois, ce retard pèsera nécessairement sur les conditions de démarrage des programmes nationaux bénéficiant des fonds européens, alors que ceux de l’actuelle programmation ont déjà pâti de difficultés importantes. Espérons, madame la secrétaire d’État, que la présidence finlandaise trouvera une issue favorable à ces négociations. Elle dispose pour cela d’un délai serré.

Deuxièmement, à défaut de réussir à s’accorder sur la nomination du futur président de la Commission européenne, et, plus globalement, sur la répartition des nominations aux postes clés des institutions européennes, les vingt-sept États membres ont adopté un programme stratégique pour les années à venir.

Ce programme stratégique vise à orienter les travaux des institutions européennes au cours des cinq prochaines années. Il s’articule autour de quatre priorités, dont celle de construire une « base économique solide et dynamique » ; reste à savoir qui l’incarnera.

Ce programme stratégique, sans apporter de propositions concrètes, maintient l’approfondissement de l’union économique et monétaire au rang des priorités de l’Union européenne. Or l’affirmation de cette priorité contraste quelque peu avec les conclusions du sommet de la zone euro qui s’est tenu vendredi en format élargi.

En effet – c’est le troisième point que je souhaite développer –, ledit sommet a confirmé la révision à la baisse des ambitions de réforme pour la zone euro, que l’Eurogroupe avait déjà esquissée la semaine précédente.

Les États membres ont validé l’accord a minima trouvé sur la capacité budgétaire de la zone euro, abandonnant ainsi la fonction de stabilisation de ce budget que préconisait la France depuis deux ans maintenant. Madame la secrétaire d’État, je ne reviendrai pas sur l’ampleur et l’utilité réduites de ce nouvel instrument budgétaire. Le président de la commission des finances, Vincent Éblé, a lui-même, en la matière, exposé ses réserves la semaine dernière.

Les vingt-sept États membres se sont en revanche accordés sur la nécessité de progresser s’agissant du troisième pilier de l’union bancaire, à savoir le système européen de garantie des dépôts. Pour rappel, en décembre 2015, la commission des finances avait déjà adopté une proposition de résolution sur l’approfondissement de l’union économique et monétaire, dans laquelle elle avait souligné l’effort contributif significatif que représentait le système européen de garantie des dépôts pour les établissements bancaires français.

Elle restera attentive à ces évolutions ; il convient néanmoins de noter que les discussions sont bloquées, sur ce sujet, depuis près de trois ans. Il semble donc peu réaliste de croire à un accord à brève échéance.

Enfin, les États membres ont validé l’accord de l’Eurogroupe relatif à la réforme des statuts du mécanisme européen de stabilité, le MES. Ce dernier devrait constituer un filet de sécurité du Fonds de résolution unique d’ici à 2024. La commission des finances a déjà salué les progrès réalisés en ce sens, permettant de renforcer la résilience de notre système bancaire.

Toutefois, je veux attirer votre attention, madame la secrétaire d’État, sur le poids des contributions des banques françaises au Fonds de résolution unique. En 2018, celles-ci ont représenté 2,3 milliards d’euros au total. Or, l’ACPR, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, prévoit qu’elles devraient s’élever à 15,5 milliards d’euros en 2023, soit près de sept fois plus !

La montée en puissance du Fonds de résolution unique doit s’accompagner de règles claires du calcul des contributions, afin de rendre le montant de ces dernières prévisible. Un équilibre doit être trouvé entre la sécurisation du système bancaire européen et les performances de nos établissements financiers. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Véronique Guillotin applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le vice-président de la commission des affaires européennes.

M. Cyril Pellevat, vice-président de la commission des affaires européennes. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le président de la commission des affaires européennes, M. Jean Bizet, participait ces deux derniers jours à la réunion de la Cosac, la Conférence des organes spécialisés dans les affaires communautaires, à Bucarest. Il vous prie de bien vouloir excuser son absence, qui n’était pas prévisible, et m’a confié le soin de m’exprimer à sa place, au nom de la commission.

Comme vous aviez pu le constater lors de notre débat de jeudi dernier, madame la secrétaire d’État, notre commission avait de fortes attentes à l’égard de la réunion du Conseil européen qui s’est tenue les 20 et 21 juin. Sans doute certaines de ces attentes sont-elles déçues à l’issue de ce sommet ; en effet, cette réunion n’aura pas permis de faire émerger les noms des futurs dirigeants des institutions européennes. Il est un peu tôt pour savoir si le Conseil européen a définitivement enterré le processus des Spitzenkandidaten, prévu pour consacrer la tête de liste du groupe parlementaire européen sorti le plus puissant des urnes.

Restent ouvertes à ce jour, en tout cas, certaines options que la France pourrait valablement soutenir. Il est encore possible de nommer, comme nous l’espérons, des personnes expérimentées et crédibles aux postes de président de la Commission, de président du Conseil ou de Haut Représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité.

Sans doute cette réunion du Conseil européen aura-t-elle aussi été décevante sur le sujet du climat. Vous l’avez rappelé, madame la secrétaire d’État : l’enjeu climatique sera au cœur du sommet qu’organisent les Nations unies en septembre prochain, afin que les objectifs de l’accord de Paris puissent être atteints.

Le Gouvernement aurait voulu faire de l’Europe un fer de lance dans cette perspective. Mais le Conseil européen a malheureusement échoué à s’accorder sur l’échéance de 2050 pour parvenir à la neutralité carbone.

S’agissant par ailleurs du cadre financier pluriannuel, de l’élargissement ou même du Brexit, les chefs d’État et de gouvernement ont renvoyé ces dossiers au mois d’octobre. Bref, les sujets épineux restent devant nous.

Pourtant, le bilan de cette dernière réunion du Conseil européen est loin d’être maigre.

L’agenda stratégique de l’Union européenne pour les cinq prochaines années a été arrêté. Il s’organise autour de quatre priorités : la protection des citoyens et des libertés, le développement d’une base économique solide pour l’Union européenne, la construction d’une Europe verte, juste et sociale et la promotion des valeurs et des intérêts de l’Europe dans le monde.

Il trace une route claire et ambitieuse pour l’Union, qui nous semble adaptée aux immenses défis auxquels celle-ci est confrontée : transition climatique, pression migratoire, extraterritorialité du droit américain, concurrence de la Chine, atteintes au multilatéralisme, menace terroriste, affirmation des mouvements populistes, enjeux de la numérisation.

Le Conseil européen n’est en outre pas resté muet sur les tensions internationales du moment, alors que la voix de l’Europe est attendue : il a réaffirmé la primauté des accords de Minsk face aux récentes provocations russes en Ukraine ; il n’a pas passé sous silence les forages menés par la Turquie dans la zone économique exclusive de Chypre – il a ainsi chargé la Commission et le Service européen d’action extérieure de lui proposer des mesures de nature à porter un coup d’arrêt à ces incursions inadmissibles dans le territoire d’un État membre de l’Union.

Il a également rappelé l’importance de la politique de voisinage, à l’Est comme au Sud, appelant à se rapprocher des pays de l’autre rive de la Méditerranée, particulièrement le Maroc, mais aussi du continent africain dans son ensemble.

Le sommet de la zone euro en configuration élargie qui a suivi la réunion du Conseil européen offre aussi certains motifs de satisfaction : il a entériné la création d’une capacité budgétaire pour la zone euro. Sa voilure est certes réduite par rapport aux ambitions françaises, mais il constitue un premier embryon décisif d’un dispositif que nous appelions de nos vœux depuis longtemps.

A également été affirmée la nécessité de poursuivre l’approfondissement de la zone euro dans deux directions : la réforme du mécanisme européen de stabilité et l’établissement du fonds européen de garantie des dépôts. Il était important de rappeler ces objectifs pour continuer de consolider la monnaie unique, qui en a besoin.

Au nom de la commission des affaires européennes, je crois donc pouvoir conclure que cette réunion du Conseil européen et le sommet de la zone euro qui l’a suivie, même s’ils laissent pendantes des questions centrales, ont été décisifs, et je me félicite que la voix de la France semble y avoir été en grande partie entendue. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste. – Mme Colette Mélot applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

Mme Véronique Guillotin. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, Jean Monnet le soulignait dans ses mémoires : « Rien n’est possible sans les hommes, rien n’est durable sans les institutions. » Aussi, après l’échec des tractations sur les nominations aux grandes institutions européennes lors de la dernière réunion du Conseil européen, il faut espérer que le prochain et imminent sommet exceptionnel produise des résultats.

En effet, à cette heure, le suspense reste entier quant à l’identité de ceux qui occuperont ce que l’on appelle les « top jobs ».

S’agissant en particulier de la prestigieuse Commission européenne, le système des Spitzenkandidaten étant visiblement hors-jeu, et faute de règles très précises dans les traités, seule subsiste la nécessité de parvenir à un consensus le plus large possible entre les membres du Conseil européen, afin que la nouvelle mandature ne s’ouvre pas sur les traces de désaccords.

On sait que la désignation du candidat à la présidence de la Commission résulte, d’une part, d’un équilibre au sein de l’ensemble des nominations, et, d’autre part, des souhaits de certains États membres particulièrement proactifs en raison de leur poids politique.

J’ajouterai, madame la secrétaire d’État, que la compétence et l’expérience sont bien entendu, comme vous l’avez dit, les conditions requises pour accéder aux quatre plus hauts postes de l’Union – ces conditions sont évidemment un gage de crédibilité pour les institutions européennes.

En outre, nos concitoyens, qui se sont davantage mobilisés, le 26 mai dernier, qu’ils ne le font d’ordinaire pour des élections européennes, ne comprendraient pas que leur expression ne soit pas respectée, d’autant plus que le contexte est celui, depuis quelques années, d’un affaiblissement de la démocratie représentative. Aussi, sans méconnaître le résultat du PPE, le parti populaire européen, il me semble que le recentrage politique au centre ne doit pas être ignoré, non plus que le renforcement du pôle des écologistes.

En attendant, qui que soient ceux ou celles qui seront à la tête des grandes institutions, l’Europe est avant tout un projet à porter. Dans cet esprit, on peut déjà se réjouir que le Conseil européen ait adopté l’agenda stratégique pour les cinq prochaines années.

Soucieux de l’approfondissement des politiques communautaires, le RDSE adhère naturellement à la plupart des grandes priorités affichées dans ce cadre.

En effet, dans le monde de plus en plus ouvert qui est celui d’aujourd’hui, comment ne pas souscrire aux grandes lignes que la Commission a rappelées à Sibiu en mai dernier : promouvoir les valeurs européennes, protéger les citoyens et les libertés, développer un tissu économique fort et stable et construire une Europe sociale, juste, verte et neutre ?

Mais tout cela suppose de surmonter les fractures qui ralentissent, quand elles ne la bloquent pas, l’avancée d’un grand nombre de dossiers.

Nous l’avons d’ailleurs hélas constaté, s’agissant de l’objectif d’une Europe durable, avec la question du climat, qui était un des principaux points à l’ordre du jour de la réunion du Conseil européen. En effet, les chefs d’État et de gouvernement ne sont pas parvenus à s’entendre.

En tout cas, la formule retenue dans les conclusions du Conseil européen est un peu légère : « assurer une transition vers une Union européenne climatiquement neutre ». Que devient, dans ces conditions, l’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050 ? C’est un mauvais signal qui est ainsi envoyé par l’Union européenne, tant dans la perspective du sommet sur le climat prévu en septembre prochain qu’au regard de la mobilisation croissante de la jeunesse européenne sur ce sujet – cet intérêt s’est vraisemblablement manifesté dans les urnes le 26 mai dernier, ne l’oublions pas.

En la matière, les réticences des pays de l’Est, qui voient venir le coût de la politique de décarbonisation de l’économie, doivent être entendues. La question de la solidarité financière est ainsi sur la table, car ce qui se passe à l’Est concerne l’Ouest, donc nous concerne, le dérèglement climatique n’ayant pas de frontières.

Le Conseil européen s’est également penché sur le prochain cadre financier pluriannuel 2021-2027, qui soutiendra notamment l’agenda stratégique. On sait que les négociations sont difficiles, car, là aussi, si les États membres partagent un grand nombre d’objectifs, lorsqu’il s’agit d’entrer dans les détails, chacun avance ses propres priorités.

Nous devons reconnaître que la France a les siennes. En effet, est-il utile de rappeler ici, au Sénat, que notre pays est particulièrement attaché au maintien d’une PAC, ou politique agricole commune, volontaire et dynamique ?

Or, à terme, si les ressources budgétaires n’augmentent pas plus significativement, soit au-delà de 1,08 % du RNB, ou revenu national brut, de l’Union à vingt-sept, il est à craindre que les politiques traditionnelles ne soient la variable d’ajustement de la satisfaction des nouveaux besoins de l’Union européenne. Mais je ne doute pas que le Gouvernement continuera à défendre la PAC et les programmes de cohésion, deux politiques chères au Sénat.

S’agissant toujours de la question financière, je m’interroge aussi sur l’articulation du futur instrument de capacité budgétaire de la zone euro, destiné à conforter la compétitivité, avec le cadre financier pluriannuel. Comment voyez-vous les choses sur ce sujet, madame la secrétaire d’État ?

Quelques mots, enfin, sur l’Europe de la sécurité, et en particulier sur deux volets évoqués lors de la réunion du Conseil européen : la cybersécurité, d’une part, et les sanctions contre la Russie, d’autre part.

Comme vous le savez, mes chers collègues, l’Union européenne envisage de renforcer sa réglementation en matière de cybersécurité, et le Conseil européen, le 18 octobre dernier, avait préconisé des mesures fortes, dont des mesures restrictives, permettant de décourager les cyberattaques. Où en sommes-nous de ces mesures, des moyens dévolus à l’Agence européenne de la cybersécurité et de la mise en œuvre d’un système de certification de cybersécurité à l’échelle de l’Union européenne ?

La sécurité, c’est aussi et bien sûr celle qui doit être assurée à nos frontières et au-delà, via les actions que mène l’Union européenne en matière de relations extérieures.

Je m’arrêterai sur un seul point : la question des sanctions économiques contre la Russie, que le Conseil européen a décidé de reconduire pour six mois. Il me semble que la reconduction est un bon compromis entre l’assouplissement et le durcissement, compte tenu des incidents en mer d’Azov. Le RDSE est pour sa part attaché à une position d’équilibre permettant de ne pas bloquer la situation sur le plan diplomatique. C’est d’ailleurs dans cet esprit que le Conseil de l’Europe a décidé, cette nuit, de rouvrir ses portes à la Russie.

Du côté ukrainien, la présidence Zelensky va-t-elle ouvrir une nouvelle ère et relancer l’application des accords de Minsk, sachant que les relations avec la Russie sont compliquées ?

Le président ukrainien a réservé sa première visite bilatérale, la semaine dernière, à la France. Aussi, madame la secrétaire d’État, auriez-vous peut-être un éclairage à nous apporter sur ses intentions.

Mes chers collègues, tels sont quelques-uns des messages que je souhaitais vous communiquer, au nom du groupe du RDSE, qui est profondément attaché à l’Europe et, par conséquent, toujours attentif aux décisions du Conseil européen. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – Mmes Catherine Fournier et Colette Mélot et M. Claude Haut applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson.

M. Jean Louis Masson. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je veux profiter de cette intervention pour regretter que la France cautionne une politique très partisane de l’Europe, qui est à la fois hostile à la Russie et tolère n’importe quoi de la part des États-Unis.

M. Poutine est un homme dix fois moins dangereux que M. Trump pour la paix dans le monde ! M. Poutine gère les dossiers de proximité qui concernent la Russie ; on parle toujours de la Crimée, mais on oublie de rappeler que la population qui y vit est à 80 % russe ! Je soutiens tout à fait, à ce titre, la politique de la Russie en Crimée : il est absolument normal qu’un territoire habité à 80 % par des Russes puisse se prononcer par voie électorale sur son rattachement à la Russie, et que le rattachement ait lieu si ceux qui y vivent en formulent la demande.

Le double langage de l’Union européenne en la matière est d’autant plus flagrant que, dans le cas de la Serbie, on a soutenu le Kosovo au motif que les habitants du Kosovo voulaient se séparer de la Serbie ! On tient à l’encontre de la Russie un langage qui est systématiquement contradictoire.

Je parlais de M. Trump ; mais M. Trump est le seul dirigeant international, ou presque, qui s’assied sur les traités internationaux ; par ses menaces, il finira par nous conduire à la guerre. M. Trump me fait penser à Hitler ! Hitler a commencé, vers 1936, à mettre en cause et à passer outre les traités internationaux ; et, à partir de 1938 et des accords de Munich, il est passé au rapport de forces.

M. Trump se comporte à l’égard de l’Iran comme le président voyou d’un État voyou ! Les États-Unis ont signé des accords avec l’Iran, et M. Trump veut organiser la guerre, tout comme George W. Bush, en son temps, avait menti au monde entier, en pleine connaissance de cause, en prétendant que l’Irak possédait des armes de destruction massive. Les États-Unis sont à l’origine du foutoir inacceptable qu’est devenu le Moyen-Orient : sans la guerre engagée par M. Bush, on n’aurait ni l’État islamique en Irak ni les problèmes que connaît la Syrie.

M. Trump prépare la guerre avec l’Iran ; je redis que ce comportement fait de lui un chef d’État voyou et qu’il me fait penser à Hitler en 1938.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Jean Louis Masson. En 1938, tout le monde cirait les chaussures d’Hitler ; actuellement, l’Europe cire les chaussures de M. Trump en acceptant notamment qu’il exploite les pouvoirs que lui donne le dollar pour empêcher d’autres pays de commercer avec l’Iran ! C’est un scandale, madame la secrétaire d’État ! La France n’est pas à la hauteur !

M. le président. La parole est à M. Olivier Cadic. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste. – M. le président de la commission des affaires étrangères et M. Robert del Picchia applaudissent également.)

M. Olivier Cadic. Assumant la redoutable tâche de passer après les « trumpettes » de M. Masson, je commencerai, monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, par dire que je suis personnellement très heureux de retrouver Robert del Picchia, après ces quelques mois. Il nous a beaucoup manqué. En tant que sénateur représentant les Français établis hors de France, comme toi, je veux souligner que tu n’as jamais cessé, pendant ces six mois, de communiquer avec ces derniers et de faire des propositions. Tu démontres que le travail à distance ça peut fonctionner ! Mes chers collègues, je vous prie d’applaudir Robert del Picchia. (Applaudissements.)

M. Olivier Cadic. Le 18 juin dernier, le conseil des affaires générales, à la réunion duquel vous participiez, madame la secrétaire d’État, a « pris bonne note de la recommandation de la Commission d’ouvrir des négociations d’adhésion avec la République de Macédoine du Nord et l’Albanie, compte tenu de son évaluation positive des progrès accomplis ».

Ces conclusions ont été reprises par le Conseil européen, dont la réunion qui s’est tenue le lendemain fait l’objet du présent débat.

Je me réjouis vivement de ces déclarations, même si je regrette que nous devions encore attendre le Bundestag pour que le Conseil puisse se prononcer véritablement sur le fond.

L’élargissement rapide de l’Union vers les Balkans occidentaux est en effet une évidence historique et culturelle.

Lors des conférences que j’ai données en septembre 2018 en Albanie, à Tirana et à Korça, et en Macédoine du Nord, à Skopje, j’ai posé la question : quelle différence y a-t-il entre un Albanais ou un Macédonien du Nord et un Français ou un Allemand ? Aucune : ils sont tous européens !

Permettre à ces deux pays de nous rejoindre est une nécessité stratégique, tant pour l’Union européenne que pour lesdits pays. Ils ne rêvent que d’Europe. (M. Jean-Marc Boyer applaudit.) Leur fermer la porte serait les inviter à construire leur avenir avec des pays qui combattent notre projet et nos valeurs, comme la Russie, n’en déplaise à M. Masson, la Chine ou la Turquie.

J’ajoute que c’est leur jeunesse qui est actuellement la première affectée par la situation. Elle s’en va pour, souvent, ne pas revenir, privant ces pays de leurs forces vives. Elle y est même parfois incitée – ainsi les médecins albanais sont-ils systématiquement encouragés à apprendre l’allemand pour exercer chez notre voisin.

Comment ne pas comprendre ces jeunes et l’élite de ces pays ?

J’ai eu l’honneur de recevoir, ici, au Sénat, la semaine dernière, le docteur Alfred Moisiu, ancien président de la République d’Albanie, accompagné de Son Excellence M. Dritan Tola, ambassadeur d’Albanie en France.

L’ancien président a formulé le souhait que nos deux pays tissent des liens plus étroits et que la France accorde davantage d’importance à la région des Balkans. Il craint que notre absence n’offre un espace à d’autres pays.

Je lui ai fait part de ma crainte que la jeunesse de son pays ne quitte l’Albanie, au cas où celle-ci ne rejoindrait pas à court terme l’Union européenne. Beaucoup de responsables politiques des Balkans occidentaux partagent cette préoccupation. L’ancien président m’a rappelé que l’adhésion à l’Union européenne est au cœur des aspirations du peuple albanais et, plus particulièrement, de la jeune génération.

Ce parcours d’adhésion est jalonné de nombreux défis.

L’Albanie consent déjà à beaucoup d’efforts pour y parvenir, à l’image de la lutte contre la corruption, objet d’une réforme de son système judiciaire. J’ai salué ce volontarisme et assuré l’ancien président de mon total soutien à la démarche d’adhésion à l’Union européenne de son pays.

Je veux également évoquer et saluer les efforts du peuple de Macédoine du Nord, qui a accepté de modifier le nom de son pays, par référendum, pour pouvoir accéder à l’Union européenne.

Il est temps désormais pour l’Union d’adopter une position claire envers ces pays et envers ces peuples. Madame la secrétaire d’État, la France va-t-elle accepter d’ouvrir des négociations d’adhésion qui, en plus de répondre à des aspirations locales puissantes, s’inscrivent dans les priorités stratégiques de notre continent ? (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste. – MM. Robert del Picchia et Jean-Yves Leconte applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot.

Mme Colette Mélot. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous le savions, ce sommet européen était principalement dédié à la distribution des hauts postes institutionnels ; pourtant, malgré de longues discussions, aucun consensus n’a pu être dégagé entre les États membres.

Cela n’est pas vraiment une surprise, tant les négociations sur ce sujet sont délicates et l’équilibre difficile à trouver.

Nous l’avions souligné lors de notre débat préalable : cette réunion du Conseil européen devait être un moment fort de la démocratie européenne, l’occasion d’affirmer le rôle politique de l’Union européenne. Partie remise, donc, au sommet de crise du 30 juin, deux jours seulement avant la session inaugurale du Parlement européen – troisième sommet depuis les élections européennes, déjà, sur ce sujet.

Devant cet échec des tentatives de compromis, il semble bien que le système du Spitzenkandidat, si critiqué par certains, soit définitivement mort. Les favoris pour la présidence de la Commission ont été écartés, faute d’une majorité parmi les dirigeants de l’Union européenne.

Le fait que les chefs d’État et de gouvernement ne se soient pas mis d’accord peut être considéré comme un échec. Cela peut aussi être interprété comme le signe d’une volonté politique de trouver les personnalités adéquates pour diriger l’Union européenne, des femmes et des hommes politiques forts qui feront consensus et qui mettront en œuvre les priorités définies, répondant aux attentes des citoyens.

Il faut des personnalités qui ont déjà exercé des fonctions à responsabilité au plus haut niveau. Je ne peux, à ce titre, que soutenir le Président de la République face à la chancelière allemande, qui veut imposer M. Weber.

À la tête de la Commission européenne, il faudrait une personnalité forte qui fasse l’unanimité et qui soit connue du grand public. Et pourquoi pas une femme ?

Il faudra aussi que le président ou la présidente de la Commission européenne s’entoure d’une équipe solide, compétente et approuvée dans son ensemble par le Parlement européen pour mettre en œuvre les nombreuses priorités européennes.

En ce sens, l’agenda stratégique qui a été adopté pour les cinq prochaines années par le Conseil européen guidera la prochaine Commission européenne. C’est écrit noir sur blanc : il faudra protéger davantage les citoyens, développer le tissu économique, construire une Europe sociale, juste et verte, et renforcer les intérêts européens à l’échelon mondial. Autant de dossiers qui mériteront une attention particulière des institutions européennes !

Le climat en fait partie. Et même si les Vingt-Huit n’ont pas réussi à se mettre d’accord sur la date de 2050 pour la neutralité carbone européenne, les progrès réalisés par la France pour convaincre de nombreux États membres peuvent être soulignés.

Il est aussi important de comprendre les raisons du refus de certains États pour adopter une stratégie ambitieuse qui sera acceptée par tous.

La Finlande, qui tiendra bientôt les rênes de la présidence tournante de l’Union européenne, a récemment annoncé qu’elle visait des émissions nettes zéro d’ici à 2035 et voulait devenir un pays à bilan carbone négatif d’ici à 2050. C’est encourageant.

Madame la secrétaire d’État, le message porté par l’Europe au sommet des Nations unies en septembre prochain devra être fort et audible pour que les signataires de l’accord de Paris renforcent leur ambition en matière de climat.

L’approfondissement de l’Union économique et monétaire sera également essentiel dans les années à venir. Les premières pierres posées lors du sommet de la zone euro sont autant de signes encourageants, même si tout n’est pas encore réglé.

La question du financement est, certes, compliquée, mais essentielle si l’Union européenne veut avancer concrètement sur cet instrument budgétaire pour la compétitivité et la convergence.

C’est en tout cas un pas important qui est franchi pour le budget de la zone euro. Cela devrait permettre d’encourager les réformes structurelles pour accroître la compétitivité des dix-neuf États membres ayant adopté la monnaie unique. Il faudra poursuivre ces travaux pour définir clairement l’architecture du futur budget de la zone euro.

Madame la secrétaire d’État, le sommet du 30 juin sera fondamental pour l’avenir de l’Union européenne. Je suis certaine que la France se montrera à la hauteur des enjeux. Gageons que les chefs d’État et de gouvernement réussiront à se mettre d’accord au-delà de leurs intérêts nationaux pour préserver et renforcer notre Europe. (M. Claude Haut applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Claude Haut.

M. Claude Haut. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues – je salue particulièrement notre collègue Robert del Picchia, qui nous fait le plaisir d’être revenu auprès de nous aujourd’hui –, ce Conseil européen de juin, le premier depuis les élections européennes de mai, était un moment décisif, à plusieurs égards.

Parmi toutes les questions qui ont été abordées, j’évoquerai seulement trois points.

Premièrement, à l’occasion du sommet de la zone euro qui était accolé à cette rencontre, les chefs d’États et de gouvernement ont formellement adopté l’accord sur la création d’un budget de la zone euro conclu le 14 juin par les ministres des finances de la zone euro. Cet accord, dont notre groupe se félicite, est une bonne nouvelle. Il marque un pas de plus vers le renforcement des investissements et de la convergence entre les dix-neuf économies de la zone euro, pour leur permettre de mieux résister aux chocs économiques.

En effet, l’accord vise trois mesures majeures.

D’abord, pour la première fois, un budget opérationnel sera mis en place, afin d’encourager des réformes favorisant la convergence entre économies. Ensuite, le renforcement du Mécanisme européen de stabilité le transformera en un véritable pare-feu d’intervention rapide et efficace en cas de crise. Enfin, la création d’un filet de sécurité en cas de crise est une nouvelle forme de protection des économies des épargnants français, comme de ceux de toute la zone euro. C’est un engagement du Président de la République, énoncé dans son discours de la Sorbonne. Comme il l’a évoqué à la sortie du Conseil européen, nous allons « dans la bonne direction », mais il faudra « aller beaucoup plus loin sur ces ambitions, […] au bout de la fonction de stabilisation, […] acter évidemment la réforme du mécanisme européen, mais […] bâtir un véritable budget avec gouvernance propre et financement suffisant. » Madame la secrétaire d’État, quelle sera désormais la suite à donner à cet accord ?

Deuxièmement, le sommet a permis des échanges sur un nouvel agenda stratégique pour les cinq années à venir. Comme vous venez de le rappeler, cet agenda a été adopté à l’unanimité. Il s’inscrit dans la continuité des résultats du sommet de Sibiu du 9 mai et est destiné à orienter les travaux des institutions, au lendemain d’élections européennes déterminantes, alors que le renouvellement des institutions est encore en cours.

Les citoyens européens, qui se sont exprimés dans les vingt-huit pays de l’Union européenne, ont notamment voulu attirer l’attention de leurs dirigeants sur la transformation de nos économies et ses conséquences sur leur vie, sur la protection de leurs libertés et des frontières extérieures, ainsi que sur l’urgence climatique.

Nous nous réjouissons que cet agenda stratégique ait su prendre en compte à la fois ces attentes fortes et les défis qui s’imposent désormais à l’Europe, en traçant quatre axes prioritaires : la protection des citoyens et des libertés ; une Europe économiquement solide et dynamique, en passant notamment par une approche plus intégrée autour de la politique industrielle, de la transformation numérique et d’une fiscalité juste et efficace ; une Europe neutre pour le climat, équitable et sociale ; enfin, la défense des intérêts et des valeurs européennes sur la scène internationale et l’affirmation de l’Europe comme un rempart face aux défis mondiaux. Notre groupe restera bien évidemment vigilant quant à la mise en œuvre de cet agenda durant les cinq années à venir. Madame la secrétaire d’État, sur ces quatre axes, des dossiers prioritaires vont-ils émerger ?

Troisièmement, l’un des enseignements cardinaux de ces dernières élections est l’affirmation saine et massive de la préoccupation environnementale. Celle-ci ne s’est pas seulement exprimée en nombre de sièges. Elle s’est aussi durablement installée au cœur du débat pour chacune des formations politiques en jeu. Et elle continuera de s’exprimer ainsi, à la manière d’une force bienveillante… et pas souvent tranquille ! Les revendications pleines d’espoir de notre jeunesse en attestent.

Notre groupe se réjouit que le Conseil européen ait su faire écho à une telle préoccupation en inscrivant ce sujet brûlant à son ordre du jour et en adoptant des conclusions spécifiques.

Ces conclusions invitent le Conseil et la Commission à faire avancer leurs travaux sur les mesures incitatives et sur le cadre qui permettra d’assurer une transition vers une Union européenne neutre pour le climat, conformément à l’accord de Paris.

De même, comme je viens de le souligner, la construction d’une Europe neutre pour le climat, verte et équitable figure bien dans l’agenda stratégique.

La France a réussi à franchir une étape supplémentaire, en rassemblant désormais vingt-quatre pays européens autour de l’objectif d’une économie décarbonée pour 2050, pour appliquer pleinement l’accord de Paris.

Certains préféreront peut-être voir le verre à moitié vide ; je préfère le voir à moitié plein. Et permettez-moi de vous citer un proverbe chinois : « Ne craignez pas d’être lent,… » – en Europe, il faut parfois être un peu lent – « … craignez seulement d’être à l’arrêt ».

L’espoir nous est d’autant plus permis que, rappelons-le, au sommet de Sibiu, seuls huit pays, et non vingt-quatre comme aujourd’hui, étaient convaincus par l’objectif d’une économie décarbonée d’ici à 2050.

Madame la secrétaire d’État, comment réussir à convaincre nos partenaires que sont la Pologne, la République tchèque, la Hongrie et l’Estonie du bien-fondé d’un tel objectif politique pour nos générations futures ? Surtout quand, nous le savons, les énergies fossiles sont au fondement de leurs systèmes économiques ? Pourriez-vous d’ores et déjà nous informer sur la manière dont la présidence finlandaise compte se saisir de ce dossier ?

L’urgence climatique est de mise, et la paralysie politique n’est plus permise. Ce serait la pire des stratégies que d’agir isolément sur ce phénomène global, dans l’attente d’être vertueusement imité.

Nous devons donc mettre les bouchées doubles dans les efforts diplomatiques que nous déployons aujourd’hui à tous les niveaux, et demain au G20 d’Osaka des 28 et 29 juin, puis le 23 septembre lors du sommet onusien sur le climat. Il est de notre devoir de combattre la résignation en tout temps et en tout lieu, car le réchauffement climatique, nous nous en rendons bien compte, c’est le déplacement des populations, c’est la guerre de l’eau, c’est aussi l’effondrement de la biodiversité, du monde animal et végétal tel que nous l’avons toujours connu.

Madame la secrétaire d’État, quel bilan dressez-vous des efforts diplomatiques multipliés de la France quant au respect et à la mise en œuvre de l’accord de Paris ?

Au Sénat, c’est avec cette conscience que nous prendrons bientôt notre part lors de l’examen du projet de loi relatif à l’énergie et au climat. Nous tenterons de répondre au mieux aux attentes qui se sont exprimées – je pense au poids de l’écologie – lors de ce récent vote.

M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent.

M. Pierre Laurent. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, mon intervention tranchera peut-être un peu avec l’ambiance « mi-chèvre mi-chou » et bien peu lucide des premières prises de parole.

Je pense que nous pouvons malheureusement dresser un constat d’échec à propos de cette première réunion. C’est un échec non seulement pour les gouvernements des plus grands pays de l’Union, mais aussi pour l’avenir des peuples d’Europe, qui attendent des changements importants.

Alors que les inquiétants résultats des élections européennes appellent des remises en cause profondes, alors que les revendications sociales, écologiques et démocratiques infusent à travers le continent, tout démarre comme si rien n’allait changer. L’échec du sommet est une alarme de plus sur la crise très profonde de l’actuelle construction de l’Union européenne. Au-delà de la personnalité des candidats aux nominations, au-delà des circonstances, le modèle institutionnel et économique de l’Union européenne est à bout de souffle.

Les extrêmes droites de tous poils, dont plus personne ne parle, semble-t-il, exploitent ces impasses répétées pour pousser leurs pions vers une Europe de plus en plus brutale, guerrière, rejetant les solidarités sociales et humaines. Et les chefs d’État conservateurs, néo-libéraux ou sociaux libéraux, incapables de renouveler en profondeur les logiques de l’Union européenne, bloqués dans des institutions et des traités qu’ils ont eux-mêmes façonnés, se révèlent de plus en plus inaptes à résoudre les contradictions et à avancer vers des solutions novatrices.

Il y a bien les grandes envolées présidentielles à l’Acropole, à la Sorbonne, devant l’Organisation internationale du travail ou encore au sommet des Deux Rives, mais les réalités sont têtues. Et la réalité, c’est une Europe qui s’enfonce dans la crise, sans projet novateur et sans écoute des demandes citoyennes.

Sur les discussions institutionnelles, les mots de Visconti résonnent encore malheureusement : « Il faut que tout change pour que rien ne change. » Le Président de la République se présente comme le pourfendeur des habituelles tractations entre socialistes et conservateurs européens, mais les acteurs restent les mêmes ; seuls les rôles changent. Et pour quel résultat prévisible ? Un nouveau compromis, associant peut-être cette fois un peu plus de libéraux et de verts, mais fondé sur la continuité des mêmes objectifs. Aucun changement de cap sérieux en faveur du progrès social, de la protection de la planète ou d’une nouvelle industrialisation intégrant ces réorientations !

Les arrangements de couloirs reprennent de plus belle sans contrôle des objectifs, loin du regard des citoyens et des parlementaires nationaux. Et, même dans ces conditions, vous n’arrivez pas à déboucher sur un consensus !

La même logique prévaut pour les discussions relatives au cadre financier pluriannuel. Avec le même résultat : un ajournement des décisions. Quels compromis se nouent en arrière-plan des nominations négociées ? Nous voulons de la transparence, une autre méthode et un réel changement de cap.

Pourquoi, par exemple, ne pas simplement fonder les priorités budgétaires sur des demandes qui continuent d’être largement exprimées par la grande majorité des citoyens des États membres ? Dans un récent eurobaromètre, la Commission souligne elle-même que la préoccupation première des Européens est celle du développement économique et social, loin devant le développement de la défense européenne. Pourquoi dès lors s’évertuer à faire du fonds européen de défense de 13 milliards d’euros la priorité absolue, sur l’autel de laquelle beaucoup de renoncements à d’ambitieuses politiques sociales semblent se tramer ?

Nous attendons également des engagements clairs sur deux postes de dépenses qui risquent de payer le prix fort des marchandages politiques en cours.

Tout d’abord, concernant la politique agricole commune, la PAC, ô combien importante pour nos agriculteurs, une baisse des montants serait inacceptable, surtout quand on prétend engager le continent dans la transition de nos modèles de production, qui sera impossible sans des revenus redevenus rémunérateurs ! Une réforme de ces aides est possible et même souhaitable. Il faut limiter les aides versées aux plus grands propriétaires terriens et à l’agriculture la plus productiviste, au profit de modèles de qualité sociale, alimentaire et écologique nouveaux. Mais la mise en cause du montant des crédits de paiements est un véritable danger.

La politique de cohésion et, notamment, les divers fonds de solidarité doivent également être sanctuarisés, voire développés vers de nouveaux objectifs de réduction des inégalités. Or, à l’heure actuelle, la politique de cohésion est menacée par le projet de cadre financier pluriannuel.

Oui, le minimum – je dis bien « le minimum » – serait de protéger les rares dépenses de redistribution qui existent dans l’Union européenne. Je pense, entre autres, au fonds d’aide aux plus démunis, qui avait déjà été plusieurs fois menacé et qui a été préservé, notamment grâce à la détermination des élus du groupe de la Gauche unitaire européenne/Gauche verte nordique, ou GUE/NGL, au Parlement européen.

Le programme stratégique pour la période 2019-2024 nous alarme, tant il est en décalage avec les grandes urgences de changements nécessaires.

Le premier paragraphe est relatif à la protection des citoyens et des libertés ? Très bien ! Mais quelle est la première idée mise en avant dans ce cadre ? Le renvoi des réfugiés dans les pays d’origine ! Est-ce cela la vision que nous promettons au monde et aux peuples d’Europe à l’aube du XXIe siècle ? Et les axes directifs réitèrent tous ceux qui ont clairement échoué.

Le Conseil européen appelle à développer notre base économique ? Parfait, il serait temps ! Il mentionne même la politique industrielle. C’est une nouveauté. Mais quel est le principe directeur choisi ? L’investissement public dans des projets utiles ? Des coopérations scientifiques ? Le développement d’une base productive écologique ? Absolument pas ! Il s’agit seulement de renvoyer tous ces objectifs à l’achèvement du marché unique dans toutes ses dimensions. Et pendant ce temps, nous voyons ce qui se produit pour Alstom, General Electric, la 5G… L’effacement industriel de l’Europe continue !

Madame la secrétaire d’État, vous l’aurez compris, mon intervention est celle d’un sénateur inquiet pour l’avenir de son continent et des peuples qui le composent. L’installation d’une nouvelle législature est souvent un moment décisif pour engager le changement. Au vu de la colère qui gronde, c’est peut-être même l’une des dernières fenêtres de tir pour cela. Malheureusement, je n’ai pas l’impression que nous nous engagions dans cette voie ! (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Jean-Yves Leconte. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, avant de commencer mon intervention, et même si, comme d’autres, je partage l’invitation du président de la commission des affaires étrangères à regarder l’avenir non pas face à face, mais côte à côte avec la Russie, il ne me paraît pas convenable d’entendre dans cet hémicycle une ode à l’invasion, à l’annexion, à la violation du droit international et des droits humains des citoyens ukrainiens de Crimée !

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Jean-Yves Leconte. « L’Europe ne se fera pas d’un coup ni dans une construction d’ensemble : elle se fera par des réalisations concrètes créant d’abord une solidarité de fait. » Tout le monde connaît ces mots prononcés par Robert Schuman le 9 mai 1950.

Je crois que le Brexit montre les limites d’une telle méthode. Car, même si nous constatons que nous avons intérêt à ne pas nous séparer, même si nous sommes si interdépendants que nous aurions tous du mal à le faire, nous allons probablement le faire ! Si les liens d’interdépendance et les solidarités qui ont été créés ne s’accompagnent pas d’un supplément d’âme qui donne la volonté et la joie d’être ensemble, le danger de la séparation et de la déconstruction arrive petit à petit. Ce que nous vivons avec le Brexit est aussi un enjeu majeur pour l’ensemble de la construction européenne à l’avenir.

Pourtant, au regard de ce que nous attendions et de ce que les commentateurs annonçaient, le résultat des élections européennes a déjoué les pronostics les plus pessimistes.

D’abord, la participation a été plus importante et plus marquante que prévu. Cela montre l’importance que les citoyens accordent à la construction européenne.

Ensuite, une opinion publique européenne émerge. Elle a deux composantes. L’une est très favorable à l’Union européenne, écologique ; c’est un vecteur d’espoir. L’autre est nationaliste et xénophobe ; si elle nous inquiète, elle montre que des débats et des peurs que nous avons sur le continent traversent les frontières et se retrouvent dans l’ensemble de nos pays.

Enfin, le PSE et le PPE n’auront plus de majorité ensemble. C’est aussi un moyen pour que le Parlement européen soit un peu moins dominé par les accords conclus au sein du Conseil européen. Ce sont de bonnes nouvelles. Cela invite à travailler à la démocratisation de l’Europe, qui est la condition de sa future stabilité.

Face au Conseil, qui représente la somme des intérêts nationaux, le Parlement européen a la lourde tâche de représenter l’intérêt général de l’Union européenne et des citoyens. Il faut garder cette idée en tête au moment des choix des différentes personnalités.

Je ferai trois remarques à propos du Conseil des 20 et 21 juin dernier. D’abord, on a assisté à un débat sur les personnes et les postes plutôt que sur les idées. Ensuite, l’Allemagne et la France ont plus mis en scène leurs désaccords qu’essayé de travailler ensemble à servir l’intérêt général.

M. Roland Courteau. C’est vrai !

M. Jean-Yves Leconte. Enfin, en refusant l’idée que le Parlement européen puisse, par une majorité, choisir le président de la Commission européenne, la France est revenue sur l’acquis démocratique mis en œuvre en 2014, qui avait permis à une majorité du Parlement européen de choisir le président de la Commission européenne.

En Europe comme en France, le Président de la République refuse de reconnaître le rôle et la responsabilité des partis politiques dans la vie démocratique. À Paris comme à Bruxelles, cette attitude représente un risque. Le processus de nomination passe pourtant quand même par une majorité au Parlement européen. Quelle que soit la décision du Conseil, il faudra qu’elle réunisse une majorité au Parlement européen. Quelle que soit la manière dont chaque État décidera de ses commissaires, ce n’est pas ce qui permettra de constituer une Commission. Une Commission, ce n’est pas chaque État qui envoie un commissaire ; c’est le président de la Commission et les États qui passent un accord.

Madame la secrétaire d’État, nous souhaiterions avoir votre engagement que la Commission sera solidairement et politiquement responsable, et non composée de représentants des États. Il est absolument indispensable d’avancer dans cette voie. Je le rappelle, tous les commissaires devront être auditionnés individuellement et confirmés par le Parlement européen.

Je parlais de débat sur les personnes plutôt que sur le projet. En réalité, il y a un petit projet : le programme stratégique adopté par le Conseil. Mais regardons-le plus en détail.

L’ambition écologique est très en deçà de ce que les citoyens européens ont exprimé lors des élections, et il n’y a pas grand-chose sur les moyens pour atteindre l’ambition d’exemplarité climatique et la neutralité carbone.

On ne trouve rien sur la manière dont cette exemplarité sera utile pour faire évoluer l’ensemble de nos partenaires commerciaux. Nous sommes la première puissance commerciale du monde. Nous avons une responsabilité particulière pour que l’ensemble du commerce prenne la voie d’une neutralité en carbone, sans repli sur soi, mais, au contraire, en profitant de notre place dans le commerce mondial pour faire la norme et le rendre plus vertueux. Il faut y travailler avec nos partenaires commerciaux.

Rien non plus sur la défense du droit d’asile, qui est le fruit de notre histoire et des promesses de nos anciens : ne jamais revoir les horreurs que nous avons vécues sur le continent. C’est le sens d’un engagement pour une Europe humaniste, combattant pour la liberté. Dans ce projet stratégique, il n’y a rien ! Pourtant, nous le savons, la question du droit d’asile est au cœur des négociations entre les États européens aujourd’hui.

Il y a une inquiétude sur l’idée que l’Union se fait de son rôle à ses propres frontières. Nous ne pourrons jamais progresser dans l’approfondissement politique de l’Union européenne si nous laissons des parties entières de nous-mêmes au-delà de nos frontières. Je pense en particulier à la Macédoine, qui a fait, avec la Grèce, de gros efforts ces derniers mois ; ils devraient être salués. Pourtant, le conseil des ministres des affaires étrangères n’a pas mis à l’ordre du jour du Conseil européen l’ouverture des négociations avec la Macédoine.

Au lieu d’un budget de la zone euro, on se contente d’une petite ligne de crédit dans un projet de cadre financier pluriannuel, qui n’a pas avancé au cours des négociations.

Rien sur l’enjeu du vieillissement de la population, qui pèsera sur notre croissance, mais aussi sur notre capacité d’innovation et sur notre capacité de remettre en cause nos habitudes face aux exigences climatiques.

Rien sur l’amélioration des ressources propres de l’Union européenne, alors que le prochain cadre financier pluriannuel est difficile à mettre en place. En effet, chaque cadre financier pluriannuel fait justement de plus en plus appel aux ressources des États plutôt qu’aux ressources propres. Il conviendrait de modifier une telle évolution.

Rien sur la manière dont l’Europe, première puissance commerciale du monde, pourrait envisager de faire face à l’extraterritorialité des lois américaines, qui viole notre souveraineté, le droit international et qui menace aujourd’hui aussi la paix.

Rien de bien concret sur l’évolution de la politique de concurrence qu’il convient de mettre en place pour répondre aux problèmes que nous avons constatés lors du projet de fusion Alstom-Siemens, alors que la Commission n’a fait que dire le droit.

Madame la secrétaire d’État, les élections européennes ont souligné que les Européens étaient, plus qu’on ne le pense, attachés à l’Europe, convaincus qu’elle est la dimension adéquate pour faire face aux défis de demain. Je pense en particulier au défi climatique, mais aussi au défi de la gestion de la donnée, avec lequel on n’en a pas fini, sous prétexte que l’on a mis en place le règlement général sur la protection des données, ou RGPD ; c’est une condition absolument essentielle de notre liberté pour demain.

L’Europe, c’est la chance pour les Européens de ne pas se chamailler, de ne pas être des spectateurs de l’évolution du monde, mais d’être ensemble un acteur. Nous avons aujourd’hui la force, notamment commerciale, de pouvoir faire la norme et de peser sur l’ensemble du monde. Les États membres, au lieu de continuer à défendre les intérêts nationaux, devraient être à la hauteur de ce que les citoyens européens ont dit lors de ces élections, en participant plus qu’on ne l’attendait et en montrant l’émergence d’une opinion publique européenne. Il convient aujourd’hui de répondre à cette attente.

Les États membres doivent être à la hauteur de ce que les citoyens européens ont exprimé lors des dernières élections européennes. Ce n’est pas le sentiment que nous avons eu lors du Conseil du 20 et du 21 juin dernier.

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Jean-Yves Leconte. Les États membres ont plutôt continué à défendre leurs intérêts particuliers, ainsi que les postures de leurs chefs d’État et de gouvernement. Cela nous inquiète pour l’avenir de la construction européenne.

Nous ne pouvons pas faire la démocratisation de l’Europe sans les partis politiques. Nous ne pouvons pas avancer sans respecter une majorité au Parlement européen. Nous ne pourrons pas faire en sorte que cette démocratisation se fasse, si la Commission continue à être un autre club, comme le Conseil européen, réunissant des représentants des États. Non ! La Commission doit être solidairement responsable, choisie par son président, validée par une majorité au Parlement européen et porteuse d’une politique qui ne plaira peut-être pas à tout le monde, mais qui sera le choix de la majorité des Européens.

M. Roland Courteau. Très bien dit !

M. Jean-Yves Leconte. Ce sera beaucoup plus difficile que les fois précédentes, parce que les majorités au Parlement européen seront plus compliquées. Mais c’est aussi pour cela que la démocratisation de l’Europe est possible aujourd’hui, lors de cette législature. Il est de notre responsabilité de la réussir.

Pour cela, il faut que les différents gouvernements soient à la hauteur des attentes du moment, de la gravité de la situation internationale et des défis que nous avons à relever. Au-delà des discours, au regard des attitudes des uns et des autres lors du Conseil, nous ne sommes pas sûrs que tout le monde l’ait bien compris. Mais, sait-on jamais, peut-être que cela évoluera… (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Priou.

M. Christophe Priou. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le Conseil européen a adopté des conclusions dans plusieurs domaines stratégiques, dont le changement climatique. La hausse des températures est une réalité éprouvée concrètement cette semaine, y compris dans cet hémicycle !

Quelle que soit la température ressentie en ce moment, il est utile d’évoquer, parmi les intérêts stratégiques de l’Union européenne à protéger, le climat. L’Union a tout intérêt à construire une Europe du climat qui ne soit pas en opposition avec le développement économique.

Le Conseil européen du 20 juin 2019 affirme que « l’Europe doit s’appuyer sur une approche inclusive et durable, qui tire parti des changements induits par la transition énergétique ». Vaste programme, aurait dit le général de Gaulle, à l’origine de bien des politiques européennes.

Plus loin, le Conseil européen explique que l’Union doit montrer la voie pour une neutralité climatique en tenant compte des situations nationales tout en étant socialement juste. C’est la quadrature du cercle.

Au-delà d’un appel à se conformer à l’accord de Paris, il n’y a rien de concret dans cette feuille de route. Pourtant, nous répétons depuis de nombreuses années que la planète ne peut plus attendre. Le marché européen de l’énergie intégré n’existe pas encore, tant s’en faut. L’accélération de la transition vers les énergies renouvelables est complexe, notamment en France.

Par exemple, en 2018, la ferme d’éoliennes offshore la plus puissante du monde a été inaugurée en mer d’Irlande. Il existe plus de 4 000 éoliennes maritimes en Europe, essentiellement réparties au large du Royaume-Uni, de l’Allemagne, du Danemark, des Pays-Bas, de la Belgique et de la Suède. Il n’y en a aucune sur les côtes françaises. Notre pays creuse son retard, alors qu’il dispose de la deuxième zone économique exclusive du monde : 11 millions de kilomètres carrés. Des industriels français finissent par développer des projets à l’étranger.

Je rappelle que le premier appel d’offres pour développer la filière remonte à 2011. Aujourd’hui, ailleurs en Europe, il faut quatre ou cinq ans pour créer un parc éolien en mer. La France double la mise avec des périodes de recours de trois ou de quatre ans supplémentaires. Une telle situation n’existe nulle part ailleurs en Europe.

Oui, l’économie circulaire devra s’appuyer sur des partenariats public-privé. Mais une fois qu’on l’a dit et répété, que fait-on ? Quels sont les investissements européens prévus pour les mobilités de demain ?

Les conclusions du Conseil européen rappellent aussi la nécessité de préserver les systèmes environnementaux, notamment les océans. Le 2 avril dernier, lors du dernier débat post-Conseil européen, je soulignais que la mondialisation des échanges s’effectuait par les océans, sur des autoroutes maritimes aux équilibres biologiques fragiles, d’où l’importance d’un « espace européen de sécurité maritime » contenu dans le paquet « Erika III ». La création de l’Agence européenne pour la sécurité maritime en 2002 a été utile, mais nous devons améliorer les dispositifs. N’oublions jamais que la souveraineté alimentaire se trouve aussi sur la mer et dans la mer.

La préservation des océans est un formidable gisement économique. Je pense, par exemple, aux larges possibilités offertes par les macro-algues et micro-algues alimentaires. Ce sont des aliments naturels produits de manière durable grâce à des procédés innovants. En raison de la croissance de la population mondiale, nous devons chercher de nouvelles sources protéiques pour nous alimenter. La mer en regorge.

La demande alimentaire mondiale augmentera probablement de 50 % d’ici à 2050. C’est donc une question de sécurité alimentaire. Nous devons également tenir compte de l’augmentation des températures, qui est susceptible de modifier l’équilibre des flores marines. L’enjeu n’est pas mince.

Les études du Centre d’études stratégiques de la marine apportent un éclairage utile sur la question de la préservation des océans et des problématiques alimentaires. L’interdépendance entre protection du milieu marin, commerce et sécurité alimentaire est forte. L’Union devrait être un moteur sur cette question éminemment maritime et européenne.

En conclusion, madame la secrétaire d’État, l’agenda stratégique mérite d’être précisé, car il n’y a aucune référence à un calendrier clairement défini pour que l’Union atteigne la neutralité climatique. C’est un échec, après l’opposition de quatre pays qui ont refusé de retenir 2050 comme date butoir. Le charbon a encore de beaux jours devant lui !

Comment l’Union européenne accompagnera-t-elle la transition énergétique des pays membres les moins riches ? Quels seront les mécanismes de compensation ? Autant de questions à résoudre avant de parvenir à l’unanimité pour graver de louables objectifs dans le marbre et les transformer en actions concrètes. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi quau banc des commissions.)

M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

M. Jean-François Longeot. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le 21 juin dernier s’est tenu un sommet de la zone euro au cours duquel a été examinée la situation économique de la zone. Il y a notamment été débattu de l’approfondissement de l’Union économique et monétaire. Parmi les avancées obtenues ou espérées, j’en retiendrai deux.

Tout d’abord, je retiens la mise en place d’un instrument budgétaire de convergence et de compétitivité pour la zone euro. Si celui-ci représente une piste pertinente pour relancer l’activité économique en stimulant l’investissement public, il semble bien éloigné d’un véritable budget de la zone euro tel qu’esquissé lors du discours de la Sorbonne. Un tel outil est pourtant indispensable pour corriger les conséquences des chocs asymétriques et des structures hétérogènes des économies nationales, tout en accompagnant la disparition des politiques monétaires nationales d’une politique budgétaire commune. Pouvez-vous, madame la secrétaire d’État, nous présenter les ambitions d’un tel « instrument budgétaire » et nous préciser ses sources de financement dans la perspective du prochain cadre financier pluriannuel ?

Je retiens ensuite le renforcement de l’union bancaire. Sa mise en place doit nous permettre de protéger les contribuables et les épargnants d’éventuelles défaillances du secteur financier, tout en démontrant qu’un partage de compétences entre États européens peut apporter aux citoyens davantage de protection et de sécurité que l’action isolée d’un État. Toutefois, quelles ont été, madame la secrétaire d’État, les avancées concernant le troisième pilier de cette union, à savoir un système européen de garantie des dépôts ? Sans celui-ci, l’union bancaire aura bien du mal à assurer la stabilité du secteur bancaire.

Par ailleurs, le dernier Conseil européen fut l’occasion d’évoquer le nouveau programme stratégique 2019-2024 et d’insister sur la nécessité de concevoir une « politique industrielle permettant d’affronter l’avenir ». Or je constate que nous sommes pour le moment incapables de passer de politiques industrielles nationales cloisonnées à une politique industrielle européenne à même de faire émerger des géants industriels européens. Pour cette question comme pour tant d’autres, l’Union européenne ne pourra traiter d’égale à égale avec les autres puissances en adoptant une approche morcelée. Elle ne pourra y parvenir qu’en formant un front uni et « en s’appuyant sur ses propres ressources et sur celles des États membres ». Cette question a-t-elle été évoquée, madame la secrétaire d’État ?

En outre, ce sujet ne peut que m’amener à aborder celui de la politique européenne de concurrence dont l’obsolescence est dénoncée de tous bords, et alors que l’actuelle commissaire à la concurrence, Margrethe Vestager, faisait partie des candidats malheureux à la présidence de la Commission européenne les 20 et 21 juin derniers.

Des pistes ont-elles été évoquées pour enfin refonder les règles de concurrence, particulièrement en matière de contrôle des concentrations et d’interdiction absolue des aides publiques, pour penser une stratégie industrielle européenne intégrée et pour promouvoir des règles du jeu équitables avec les autres grandes puissances, notamment concernant l’application du principe de réciprocité dans les échanges internationaux ?

Enfin, je m’étonne que la plus ancienne et la plus importante des politiques en termes de budget n’ait pas été évoquée lors de ce Conseil européen, alors même qu’elle est à la croisée des enjeux en termes de développement durable, de développement rural et de sécurité. Je parle, bien évidemment, de la politique agricole commune et de sa réforme prochaine. Vous l’avez récemment dit, madame la secrétaire d’État, le premier défi à relever est celui d’une PAC qui protège ses agriculteurs. Le deuxième défi est celui d’une PAC qui protège ses consommateurs. Enfin, le dernier défi est celui de sa simplification. Toutefois, la nouvelle réforme à venir pour la PAC après 2020 en réduit substantiellement le budget tandis que, dans le même temps, elle prévoit également de donner davantage d’autonomie aux États membres.

Qu’en est-il, madame la secrétaire d’État, des discussions autour de cette réforme et de ses ambitions pour les prochaines années ? (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, ainsi quau banc des commissions. – M. Jean-Claude Requier applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. René Danesi.

M. René Danesi. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le Conseil européen s’est accordé sur un programme stratégique pour la période 2019-2024 sur la base de quatre priorités. La quatrième priorité a l’ambition de réussir l’amalgame entre la Realpolitik, chère aux États-Unis de Nixon et de Trump, et un idéalisme européen de bon aloi, consistant à promouvoir les intérêts et les valeurs de l’Europe sur la scène mondiale. Voyons son application pratique dans les relations avec la Russie.

Le Conseil européen vient de décider unanimement de renouveler pour une période de six mois les sanctions économiques contre la Russie. Si cette décision n’a rien d’étonnant, il n’en est pas de même de l’absence d’invitation aux cérémonies du 6 juin dernier du président Poutine.

L’Allemagne à l’origine de la guerre était invitée, mais pas la Russie, qui a détruit 80 % des divisions du IIIe Reich et sacrifié 27 millions d’habitants pour lutter contre le nazisme. Ce n’est certainement pas un hasard si la réponse du président Poutine à ce camouflet a été de recevoir, ce même 6 juin, dernier le président de la Chine pour renforcer une coopération bilatérale, déjà très étroite. Dans cet état d’esprit, a été annoncé le choix très probable de la technologie chinoise Huawei pour équiper les futurs réseaux 5G en Russie.

Le lendemain, le 7 juin, le monde entier a pu découvrir que la flotte russe croisait en mer de Chine aux côtés de la flotte chinoise. Ce constat a été fait à l’occasion d’une quasi-collision entre un navire de guerre russe et un navire de la septième flotte des États-Unis, dont la mission est d’empêcher la Chine de s’approprier les eaux de la mer de Chine méridionale.

Il faut tout de même noter que les pays européens qui veulent durcir et prolonger indéfiniment les sanctions contre la Russie, quitte à la pousser ainsi dans les bras de la Chine, sont ceux qui contribuent le moins à la construction de l’Europe de la défense, chère à Emmanuel Macron.

La Pologne, la Lituanie et la Lettonie apportent régulièrement par milliards leur contribution au complexe militaro-industriel américain. Aucun pays de l’Union européenne n’a d’ailleurs acheté de Rafale…

Par ailleurs, les sanctions économiques occidentales ont amené la Russie à rechercher et à atteindre ses objectifs d’autosuffisance alimentaire. En 2017, la Russie est devenue le cinquième exportateur mondial de céréales. Pendant ce temps, les sanctions font perdre aux pays de l’Union européenne près de 5,9 milliards de dollars d’exportations dans le secteur agroalimentaire.

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères. Eh oui !

M. René Danesi. Il est donc temps de faire le bilan diplomatique et économique de la reconduction rituelle des sanctions qui éloignent la Russie de l’Europe au plus grand bénéfice de la Chine. Il est urgent de faire bouger les lignes !

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères. Très bien !

M. René Danesi. La visite du Premier ministre russe, hier, au Havre, en compagnie de notre Premier ministre, indique qu’Emmanuel Macron s’y emploie. Il a opportunément déclaré au début du mois de juin que « l’Europe a besoin d’une nouvelle grammaire de confiance et de sécurité avec la Russie qui ne doit pas passer exclusivement par l’OTAN ».

Alors que la Russie avait menacé de quitter le Conseil de l’Europe, la France a pris en main avec succès la manœuvre diplomatique pour que la Russie retrouve toute sa place au sein de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

Le président Macron a également reçu il y a quelques jours le nouveau président ukrainien, Volodymyr Zelensky, dont la priorité absolue est le retour à la paix dans l’est de l’Ukraine. Cela suppose la relance du processus de Minsk, que supervisent la France et l’Allemagne, Allemagne dont les Länder de l’Est militent d’ailleurs activement et officiellement pour la levée des sanctions qui frappent leur « ancien grand frère ».

L’ambition du président Macron de faire enfin jouer à l’Union européenne ou, à défaut, à la France et à l’Allemagne un rôle géopolitique autonome est donc à saluer et à encourager ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi quau banc des commissions.)

M. le président. La parole est à M. Benoît Huré.

M. Benoît Huré. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, au lendemain de ce grand rendez-vous démocratique qu’ont été les élections européennes, et juste après l’adoption lors du Conseil européen des 20 et 21 juin du nouveau programme stratégique, j’interviens dans le cadre de ce débat au Sénat pour dire ma satisfaction, exprimer mes attentes sur l’Union européenne et réaffirmer mes convictions quant à une Union européenne mieux coordonnée et qui s’impose dans un contexte mondial tant déstabilisé. Rarement l’humanité aura eu à faire face à autant de dangers et de défis !

Nous sommes nombreux à nous réjouir des ambitions européennes, alors que certains dirigeants de grands pays, plus ou moins ouvertement, voulaient détruire la construction européenne et que la machine à fabriquer des fake news était à la manœuvre pour que l’Union sorte affaiblie de ces élections et marque le pas. C’est finalement l’inverse qui s’est produit. La participation des électeurs a été importante, avec un beau pourcentage de jeunes, et le vote populiste a été contenu.

Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, tout cela nous engage et nous oblige à ne plus perdre de temps. Si les Vingt-Sept ont été trop accaparés par le Brexit, ils sont néanmoins sortis unis de l’épreuve. Nous devons maintenant accélérer la marche tant au niveau européen qu’au niveau international. Nous ne pouvons pas nous résigner à être les sous-traitants de l’Asie et du continent américain. Il n’est pas acceptable que nous soyons cantonnés à devenir une simple destination touristique !

Le plan stratégique adopté la semaine dernière va dans le bon sens en nous donnant les moyens de nos ambitions. Une augmentation et une plus grande mutualisation de nos moyens et de nos savoir-faire permettront de renforcer la performance de tous les secteurs de production industrielle, agricole, alimentaire et de services, y compris dans les domaines de l’économie numérique et de l’intelligence artificielle. Elle nous permettra d’être un acteur déterminant dans la lutte contre le réchauffement climatique et en faveur du développement durable que nous devons à nos enfants. Dans ce domaine, efforçons-nous cependant d’adopter une démarche qui ne soit pas d’abord punitive, mais qui suscite plutôt l’enthousiasme.

Ce plan stratégique permettra également de renforcer la protection des Européens sur leur sol et de défendre mieux nos intérêts partout dans le monde. Plus de moyens pour nos armées coordonnées et nos gardes-frontières renforceront également la souveraineté de l’Europe et permettront à notre diplomatie d’être moins dépendante.

Ce plan, enfin, permettra d’être à l’initiative d’un plan de développement économique destiné aux pays pauvres, à l’image du plan Marshall pour aider à la reconstruction de l’Europe au sortir de la guerre. Ainsi, nous réduirions significativement les migrations subies. Cette démarche est à entreprendre en même temps que le renforcement du contrôle des flux migratoires à nos frontières, car il est illusoire de croire que nous pouvons accueillir toute la misère du monde.

Ainsi, ensemble, nous irons plus vite et plus loin. Mais ces ambitions vitales pour nos pays européens ne pourront se concrétiser que si l’Europe se dote d’un budget beaucoup plus élevé que celui de la période qui s’achève.

Il devra être alimenté de plusieurs manières. Tout d’abord, par des ressources propres en lui affectant, par exemple, une part significative de la fiscalité généralisée des géants du numérique. Après la France et quelques pays européens, tous les membres de l’OCDE, États-Unis d’Amérique compris, vont enfin décider de taxer les GAFA. Ensuite, via le versement par chaque pays des sommes qu’ils consacraient jusque-là aux actions désormais déléguées à l’Union européenne. C’est ainsi qu’ont procédé les communes avec les communautés de communes.

Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la dangerosité du monde, agité par certains dirigeants aux comportements incertains et irresponsables, oblige les responsables européens à se rassembler sur l’essentiel et à ne pas être passifs et soumis au contexte international imposé par d’autres. Les bons sentiments comme une certaine naïveté n’ont que trop duré.

Si nous voulons agir plus efficacement contre la pauvreté, pour un développement durable réaliste et promouvoir la démocratie partout dans le monde, l’Europe ne peut plus être celle du temps long, car les urgences nous obligent à accélérer ce temps.

Oui, l’Europe est à réformer pour la mettre plus au cœur de la vie de chacun d’entre nous. Oui, l’Europe doit être plus qu’une zone de libre-échange fondée sur le commerce et la finance. Oui, elle doit être synonyme de progrès social, d’humanisme et de développement durable. Oui, l’Europe doit être moins technocratique. Oui, elle doit mieux s’organiser pour concourir à armes égales dans la compétition mondiale. Oui, face à toutes les menaces, l’Europe doit continuer à renforcer la protection due à chacun de ses concitoyens.

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, même si nous ne nous en rendons pas toujours compte, l’Europe avance.

M. le président. Merci de bien vouloir conclure, mon cher collègue !

M. Benoît Huré. Le paysan que je suis sait que le grain de blé semé a une croissance peu visible avant d’être le bel épi à récolter. Néanmoins, maintenant, nous avons hâte de récolter ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire dÉtat. Je répondrai bien volontiers aux différents points qui viennent d’être évoqués, car c’est tout l’intérêt de ce type de débat. Je commencerai par les questions les plus saillantes.

Monsieur le président Cambon, vous m’avez interrogée sur la défense et sur l’ambition de constituer – ce point a également été abordé par le dernier orateur – une autonomie stratégique européenne. Dans ce cadre, la constitution d’une base industrielle et technologique de défense est un impératif économique et de souveraineté. Nous constatons des progrès. Qu’il s’agisse de l’avion de combat, du ravitailleur en vol ou de l’hélicoptère, beaucoup de projets dépassent nos frontières et vont dans le bon sens. Nous développons une stratégie commune avec nos partenaires européens, notamment allemands. L’idée est, en particulier, de mettre en place une stratégie globale de l’Union et de décliner ensuite des stratégies spécifiques avec la Chine ou l’Afrique sur des sujets jusque-là plutôt perçus comme relevant de la souveraineté nationale.

En ce qui concerne les enjeux relatifs à l’exportation, il est indéniable que les différentes histoires nationales jouent effectivement un rôle important. Comme vous le savez, nous avons parfois des divergences de vues avec les Allemands. Nous dialoguons beaucoup sur ce sujet avec Berlin. Nous avons d’ailleurs reçu Heiko Maas en conseil des ministres. C’est un point qui a été discuté avec Jean-Yves Le Drian. À mon niveau, dans les cercles des ministres des affaires européennes, nous engageons un dialogue sur le fonds européen de défense et sur la manière de l’utiliser. Vous le savez peut-être mieux que quiconque ici, dans le cadre du traité d’Aix-la-Chapelle, c’est un sujet sur lequel des progrès ont été enregistrés.

Vous m’avez aussi interrogée, tout comme le sénateur Cadic, sur l’élargissement. Je poserai quelques principes et rappellerai quelques faits. Il a toujours été admis que les Balkans occidentaux avaient une perspective européenne. Il a également toujours été dit que, quand les critères seraient réunis, quand l’Union européenne serait prête, ces pays avaient vocation à rejoindre l’Union. Il importe d’être clair à l’égard des sociétés civiles et par rapport aux réformes qui sont engagées : ces pays ont bien une perspective européenne. En revanche, la France constate deux choses.

Premièrement, l’Union elle-même a besoin de se réformer avant de pouvoir intégrer d’autres pays.

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères. Très bien !

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire dÉtat. Elle a besoin de se réformer dans ses processus de décision, dans ses processus budgétaires et dans ses différentes politiques publiques. Il n’est en effet pas forcément utile de décliner des politiques exactement semblables ; ce n’est pas non plus bénéfique aux populations elles-mêmes.

Deuxièmement, nous constatons que le processus de négociation tel qu’il est lancé n’est pas satisfaisant. D’abord, parce qu’il est extrêmement long. Ensuite, parce que l’Union européenne apparaît toujours comme un facteur bloquant. Enfin, parce que les réformes que nous demandons ne sont pas engagées.

C’est pourquoi j’ai demandé, mais c’est le fruit d’un travail mené depuis de nombreux mois, que nous utilisions la période qui s’ouvre jusqu’au mois d’octobre pour que la nouvelle Commission propose une autre stratégie de négociation. Il convient de mettre un terme à cette logique des « tunnels » dans lesquels les pays entrent en étant convaincus a priori d’en sortir comme des pays membres. Cette automaticité de fait n’est pas forcément bénéfique, car au moment où les négociations s’engagent chacun a déjà en tête que les pourparlers déboucheront sur un élargissement. Ce n’est pas sain non plus, car il n’est pas certain qu’il en ira effectivement ainsi, comme nous le voyons avec la Turquie. Il faut donc trouver une manière de procéder plus satisfaisante et plus honnête eu égard aux pays candidats.

Bref, il est essentiel que l’Union se réforme, et que les négociations puissent se tenir de manière plus acceptable pour nous et pour les pays qui souhaitent entrer dans cette démarche. Les conclusions du conseil Affaires générales soulignent très clairement que l’Union salue, de manière très affirmative, tous les accords menés dans le cadre de Prespa. Il convient, à ce propos, de saluer le courage politique dont les dirigeants grecs et macédoniens ont fait preuve pour régler un différend qui durait depuis des décennies. Nous serons très vigilants en octobre. En Albanie et en Macédoine des réformes ont été votées, mais leur mise en œuvre n’est pas aujourd’hui maximale.

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères. Nous sommes d’accord !

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire dÉtat. Je pense, notamment, à nomination d’un procureur spécial et à la mise en place d’un parquet spécial en Macédoine du Nord. De ce point de vue, des choses restent à faire. J’ai d’ailleurs eu un échange très courtois et très honnête avec mon homologue macédonien à ce propos. En Albanie, par ailleurs, se posent également des questions sur la corruption et le blanchiment d’argent. Le Conseil de l’Europe, à ce titre, joue un rôle très important.

En tout état de cause, la France parle à tout le monde. Nous recevons tous nos interlocuteurs, mais nous leur rappelons les critères à la fois internes à l’Union et externes.

Vous m’avez également interrogée sur la Turquie. Dans le cadre des conclusions du conseil Affaires générales, nous avons acté le fait que, depuis déjà quelques semestres, la négociation était au point mort et que les conditions n’étaient pas réunies pour rouvrir de nouveaux chapitres ni pour moderniser davantage l’union douanière avec la Turquie. En revanche, d’un point de vue diplomatique et géopolitique, il est évident, parce que nous avons un accord sur le sujet migratoire, comme sur beaucoup d’autres, que nous devons continuer à avoir des échanges et une relation diplomatique étroite, pour la simple et bonne raison qu’il s’agit d’un pays pivot. La France ne peut donc pas imaginer prendre ses distances.

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères. Très bien !

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire dÉtat. M. le sénateur Dominati m’a questionnée sur le cadre financier pluriannuel, le CFP. Effectivement, en 2014, le lancement du nouveau cadre financier pluriannuel a pris du retard, la négociation s’étant terminée tardivement. Par ailleurs, il s’est produit en France, en parallèle, un mouvement de décentralisation vers les régions. Nous en avons payé les conséquences. La montée en charge du budget européen a été ralentie.

Chers amis sénateurs, comme je l’ai rappelé lors de mon audition avant la réunion du Conseil, j’ai besoin de vous. Nous ne pouvons pas négocier, comme certains d’entre vous l’ont souligné, un budget de cohésion, un budget sur la PAC, c’est-à-dire des politiques qui sont extrêmement importantes pour nous, si nous ne montrons pas très activement que nous sommes ensuite capables de bien dépenser l’argent que l’Union européenne met à la disposition des acteurs au sein de l’Union européenne pour soutenir des politiques publiques. Si vous voulez renforcer la position française dans ces négociations, tout ce que vous pourrez faire en tant qu’acteurs territoriaux de premier plan pour accélérer la programmation et le paiement des fonds européens dans vos territoires sera extrêmement utile. Nous pourrons ainsi montrer que, si nous négocions fortement à Bruxelles, ce n’est pas parce que nous aimons faire de grands discours, mais c’est parce que ces politiques sont pour nous un outil essentiel en faveur du développement économique, social et territorial.

J’ai engagé des échanges avec de nombreux présidents de région. Jacqueline Gourault et le Premier ministre ont également entamé des discussions sur la bonne utilisation et la bonne gestion des fonds. La Cour des comptes a rendu un rapport à ce titre. Sachez que votre action dans ce domaine sera pour nous extrêmement utile.

Monsieur Cyril Pellevat, vous avez souligné que de nombreux sujets épineux nous attendaient. Effectivement, l’Europe avance par petits pas, mais le chemin parcouru est tout de même long ! Au mois d’octobre, un rendez-vous important nous attend, qu’il s’agisse de l’élargissement, du budget européen ou de la mise en œuvre d’un agenda stratégique plus concret. Quoi qu’il en soit, il ne faut pas être triste à l’idée que les choses se fassent de manière séquentielle. En revanche, il faudra être attentif à ne laisser de côté aucun sujet. Vous pouvez évidemment compter sur notre vigilance absolue.

Madame la sénatrice Guillotin, vous avez évoqué la neutralité carbone. Pour reprendre vos propos, vous percevez comme un signal négatif le fait nous n’ayons pas inscrit 2050 comme date butoir dans le corps du texte des conclusions. Bien sûr, nous aurions préféré obtenir l’unanimité, mais je tiens à rappeler d’où nous sommes partis. Au mois de mars, soit il y a trois mois, quand la France a avancé cette idée, quatre pays seulement la soutenaient. En mai, elle recueillait d’adhésion de huit pays, plus un, la Lettonie s’étant greffée au mouvement sur la grande place de Sibiu. Avant le Conseil, nous étions entre douze et quinze, et pendant les discussions nous sommes parvenus à rassembler vingt-quatre pays autour de notre proposition.

Une chose est claire aujourd’hui : la Commission est officiellement mandatée pour travailler à la mise en œuvre de proposition pour atteindre la neutralité carbone en 2050. Par conséquent, elle va devoir faire des propositions qui vont dans notre sens. C’est un fait que quatre pays se sont opposés à adopter le principe de la neutralité carbone en 2050, mais c’est aussi un fait que la Commission va devoir réfléchir à des actions concrètes pour y arriver. Je tenais donc à nuancer votre sentiment d’échec, qui a été aussi mis en avant par M. Christophe Priou.

En ce qui concerne la PAC, madame la sénatrice, oui nous sommes volontaires, oui nous cherchons à stabiliser les fonds. Entre 2014 et 2020, 52 milliards d’euros avaient été consacrés au premier pilier de la PAC. Nous voudrions également programmer 52 milliards d’euros entre 2021 et 2027. Par ailleurs, 9,9 milliards d’euros avaient été consacrés au deuxième pilier. Nous voudrions nous rapprocher le plus possible de ces montants. Aujourd’hui, 8,56 milliards sont consacrés au deuxième pilier et 50 milliards au premier pilier. Il faut donc faire un effort. Quoi qu’il en soit, si l’on s’arrête à une question de montant, on passe à côté du sujet. Cette PAC doit être une PAC de modernisation, de transformation, de capacité pour les agriculteurs à diversifier leur activité. Elle doit les inciter à être plus résilients aux chocs de marché, aux chocs climatiques et aux chocs liés à des pratiques culturales différentes. Utiliser moins d’intrants chimiques, cela signifie aussi plus de volatilité dans la production. Par conséquent, tout ce qui pourra conduire à stabiliser et à lisser les revenus me semble être une bonne option. C’est le sens des discussions conduites par Didier Guillaume au sein du conseil Agriculture. Soyez donc rassurés, nous sommes sur ce sujet très mobilisés.

Vous m’avez aussi interrogée sur le budget de la zone euro, tout comme MM. Haut et Longeot. La France, par la voix de son président, mais c’était déjà le cas avant lui depuis de nombreuses années, considère – c’est aussi ce que pensent de nombreux économistes – qu’une politique monétaire commune doit normalement être associée à un outil budgétaire commun. C’est ce que l’on appelle le policy mix, le budgétaire et le monétaire devant se compenser selon la nature du cycle économique. L’accord annoncé lors de l’Eurogroupe Écofin est une bonne nouvelle. Il acte l’idée que nous pouvons à dix-neuf – et pas à vingt-huit, c’est essentiel – nous doter d’un instrument qui soutienne à la fois les réformes et l’action de convergence.

Nous n’abandonnons pas l’idée selon laquelle nous parviendrons, un jour, à mettre en place un outil de stabilisation, notamment pour l’assurance chômage, et nous nous réjouissons d’ores et déjà d’avoir acté ce principe.

Il est essentiel selon moi d’avoir également acté – ce sera l’un des éléments de la négociation du cadre financier pluriannuel – le financement de ce budget par des ressources propres autonomes, afin que nous n’ayons pas à attendre 2027 pour trouver des tuyaux d’abondement pour sa montée en charge.

La question du volume du budget est importante, de même que celle de la gouvernance. Nous nous réjouissons, là aussi, des pas que nous avons faits, sans pour autant nous en satisfaire. Le Président de la République a été très clair sur ce point : il faut envisager les choses dans la continuité. La présidence finlandaise actuelle, ainsi que le changement de gouvernement en Finlande, va nous aider à convaincre de nouvelles personnes de l’importance et de la pertinence de cet outil.

Nous devons répéter cette tâche chaque fois que les gouvernements changent dans les pays : il faut de nouveau remobiliser, en expliquant combien cet outil est important.

Vous m’avez interrogée sur la situation en Ukraine et sur les vues de M. Volodymyr Zelensky. Je suis allée à Kiev pour son investiture et Jean-Yves Le Drian s’est également rendu sur place, à la fin du mois de mai, avec M. Heiko Maas, son homologue allemand. Quant à M. Zelensky, il est venu à Paris le 17 juin. Nous entretenons, vous le voyez, une relation diplomatique très forte avec ce pays, car nous pensons qu’il convient – pour les accords de Minsk, le Donbass, la Crimée et, plus largement, pour la région – de consentir un effort diplomatique important afin que nous puissions avancer sur ces dossiers.

Ce qu’a dit M. Zelensky dans son discours d’investiture est très intéressant. Il a notamment appelé les Ukrainiens qui étaient partis à revenir. Plus de 5 millions d’entre eux ont quitté le pays au cours des cinq ou six dernières années. Il s’agit, mécaniquement, de ceux qui, au sein de la population, ont le plus de capacités financières, culturelles, intellectuelles, qui disposent des ressources pour faire redémarrer l’économie et, plus globalement, le développement du pays. Nous aimerions pouvoir soutenir M. Zelensky dans cette démarche. Mais pour que le retour de ces personnes soit possible, il doit d’abord mener à bien le travail qu’il souhaite engager en termes de lutte contre la corruption et de pacification.

Il semble que M. Masson ait quitté l’hémicycle… Je tiens néanmoins à rappeler quelques éléments, évoqués également par M. Leconte, sur la Crimée.

M. Jean-Claude Requier. Vous voulez le convaincre…

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire dÉtat. Sans vouloir le convaincre, il me semble important, ne serait-ce que pour le compte rendu, de poser quelques principes simples.

L’annexion de la Crimée qui a eu lieu en 2014 était illégale. La France souhaite poursuivre un dialogue de fermeté avec la Russie à cet égard. Les décisions de l’assemblée générale des Nations unies sur ce sujet doivent d’abord nous rappeler à la raison.

J’ai entendu beaucoup de choses extrêmement fallacieuses et dangereuses. En effet, nos alliés et nous-mêmes avons imposé des sanctions économiques et politiques à la Russie. Nous devons continuer à exiger la libération des marins ukrainiens. Je tiens à souligner que Jean-Yves Le Drian et Heiko Maas ont rendu visite, lorsqu’ils étaient à Kiev, aux familles de ces marins. Nous avons proposé que se tienne prochainement une nouvelle réunion en format « Normandie » afin de trouver une solution politique.

Sur ce sujet, Jean-Yves Le Drian est très clair : nous ne nous résoudrons pas à accepter une situation qui ne respecte pas les frontières internationalement reconnues. Les élections d’autodétermination, de souveraineté, doivent s’organiser dans un cas très précis. Nous ne pouvons donc pas, je le répète, accepter la situation actuelle.

M. Masson a par ailleurs fait des comparaisons plus que hasardeuses portant sur les leaders de pays qui sont nos alliés depuis longtemps. Je n’y reviendrai pas plus longuement, mais vous aurez compris le sens de ma pensée. Il est important de garder dans cette assemblée mesure et raison.

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire dÉtat. Monsieur Cadic, en matière de stratégie pour les Balkans, nous devons avoir, comme je l’ai dit à propos de l’Ukraine, une politique active, afin que les classes moyennes, les classes moyennes supérieures et la jeunesse de ces pays puissent y rester. Sinon, tous nos efforts diplomatiques seront vains, puisque nous n’aurons pas localement les ressources pour accompagner leur développement. C’est l’enjeu de la réunion qui se tiendra à Poznań les 4 et 5 juillet prochains et à laquelle je participerai, de même que le Premier ministre.

Ce dialogue de haut niveau vise à ce que le processus juridique des négociations en vue d’un éventuel élargissement, entre autres, s’accompagne d’une véritable stratégie économique de soutien au développement de cette zone.

Le processus de Berlin qui sera relancé, ou en tout cas approfondi, à Poznań est selon moi essentiel. Vous avez bien décrit la situation, monsieur le sénateur, et je serais ravie de poursuivre nos échanges sur ce sujet.

Madame Mélot, je tiens à dire ici formellement qu’il n’y a pas de lutte franco-allemande sur les nominations. Mme Angela Merkel, le président Macron, ainsi que nous tous savons bien qu’il n’y a pas d’autre solution que le compromis pour faire avancer l’Europe.

Nous devons donc non pas négocier un compromis mou, mais nous donner les moyens d’avancer en nommant des personnes qui ont les épaules et l’énergie pour porter ce projet. Vous l’avez bien dit, et il est utile de le répéter.

Vous êtes intervenu, monsieur Haut, sur la présidence finlandaise et son ambition pour le climat.

La Finlande, qui figurait parmi les signataires de l’appel de Sibiu, innove et, notamment sur les enjeux agricoles, cherche à lancer des initiatives tout à fait intéressantes. Nous allons donc approfondir notre réflexion avec ce pays.

Un élément clé est selon nous la part du budget européen, lequel est sous la responsabilité de la présidence finlandaise, qui sera dédiée au changement climatique. Vous le savez, nous cherchons à atteindre l’objectif de 40 % ; nous avons d’ores et déjà acté un objectif minimal de 25 %, mais nous voudrions vraiment aller plus loin.

Un autre point très important est la politique d’innovation, à laquelle la Finlande est très attentive, car elle permettra de trouver des solutions. Ce n’est pas le tout de faire de grands discours, il faut en effet des solutions concrètes et je crois que la présidence finlandaise pourra nous aider à cet égard.

Monsieur Laurent, l’heure tournant, nous n’avons plus le temps de nous lancer dans un grand débat sur les échecs, les succès et les réalités de l’Europe d’aujourd’hui.

Je suis quelque peu étonnée que vous évoquiez le programme stratégique en un seul mot. Il y a pourtant dans ce programme de quoi faire avancer un projet au service des citoyens. Nous parlons en effet d’une Europe sociale, et mettons sur la table l’idée d’un salaire plancher permettant aux personnes qui travaillent à plein temps de vivre au-dessus du seuil de pauvreté. (M. Fabien Gay proteste.)

Si nous avons la certitude de garantir, en Europe, aux salariés travaillant à plein temps qu’ils pourront gagner au moins 50 % du salaire médian, je puis vous dire que nous aurons fait un progrès qui concernera un certain nombre de pays !

M. Fabien Gay. Ce sera encore moins !

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire dÉtat. Je n’ai pas dit qu’il fallait se conformer à ce seuil ; mais prévoir un plancher pour l’intégralité des États membres serait déjà un progrès.

Pour ce qui concerne le climat, ce que nous avons obtenu est également, à mon avis, le signal que nous avançons. Nous pouvons discuter du point de savoir si c’est satisfaisant ou suffisant, mais il est réducteur de dire que nous n’avançons pas ! Nous devons certainement aller plus vite et plus loin ; je rappelle néanmoins que l’inscription des termes « Europe sociale » résulte d’une demande française. Au départ, il n’était question que d’une « Europe inclusive ». Or nous avons considéré que nous pouvions assumer collectivement les termes d’« Europe sociale ». Il faudra décliner ensuite les objectifs à défendre, projet par projet.

Monsieur Leconte, il est une autre phrase de Jean Monnet que j’aime beaucoup, selon laquelle il faut avoir en tête, plutôt que de l’optimisme ou du pessimisme, de la détermination. À votre discours, pas totalement exempt de relents de déclinisme, je préfère l’attitude consistant à regarder précisément, projet par projet, comment nous pouvons avancer au cours des prochaines années.

Je peux vous rassurer, les commissaires sont bien solidaires de la feuille de route du président de la Commission, laquelle travaille dans l’intérêt général de l’Union européenne. Ils ne sont donc pas les représentants des intérêts nationaux.

Vous avez également évoqué la politique de l’asile. Le Conseil européen mentionne bien dans ses conclusions qu’il est proposé, à l’unanimité du Conseil, de revoir le fonctionnement du règlement de Dublin et de mener en matière d’asile une véritable politique de responsabilité et de solidarité.

Il n’est donc pas vrai, comme vous l’avez dit, que rien n’est prévu sur l’asile. Vous le savez, la France est très claire sur ce point : si nous ne respectons pas aujourd’hui les valeurs de l’Europe, c’est parce que nous n’avons pas réussi à nous organiser pour accueillir ceux qui ont besoin, en toute légitimité, de protection. Par ailleurs, le règlement de Schengen est totalement déséquilibré : le pilier de la circulation intérieure est bien en place, mais nous sommes en retard sur le point des frontières extérieures.

Monsieur Longeot, nous travaillons beaucoup, avec Bruno Le Maire, sur les dossiers de l’industrie européenne et de la concurrence dans les différents cercles, et notamment au sein du conseil Compétitivité.

M. Jean-François Longeot. C’est très important !

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire dÉtat. Ces sujets sont essentiels, car, derrière la politique de la concurrence et de l’industrie, il y a la possibilité de créer des emplois et de développer la prospérité économique.

Lorsque nous parlons de recherche au niveau européen et que nous consacrons 100 milliards d’euros au programme Horizon Europe sur sept ans, quand nous protégeons nos actifs stratégiques, c’est l’industrie de demain que nous construisons. Qu’il faille, là aussi, aller plus loin, j’en suis d’accord : c’est une ambition que nous partageons.

Vous avez dit, monsieur Huré, qu’il fallait un budget beaucoup plus élevé.

Certains de vos collègues siégeant sur les mêmes travées que vous ne manquent pas de faire savoir, lors du débat sur les prélèvements sur recette au bénéfice de l’Union européenne, que l’Europe coûte cher, mais je ne crois pas que ce soit une bonne façon de présenter les choses. Les ressources propres sont en effet un bon moyen de sortir de l’idée selon laquelle c’est le contribuable national qui alimente les fonds.

Je tiens aussi à mettre en avant une idée que Jean Arthuis a longuement défendue : il faut s’assurer que le budget européen est bien complémentaire du budget national et qu’il n’y ait pas de doublons ; cela signifierait, sinon, que les contribuables et les acteurs économiques paient deux fois. Les nouvelles initiatives européennes doivent donc être complémentaires et non similaires aux actions lancées au niveau national.

J’aurais plaisir à vous faire part, sur ce sujet, des avancées que nous pourrons mener dans les prochains mois. La « taxe plastique » est ainsi une ressource propre intéressante, qui permettra de financer le budget de l’Union sur la base du plastique non recyclé. Les pays, les collectivités et les acteurs qui recycleront ce matériau seront exemptés de la participation à ce financement.

J’espère que ledit financement sera égal, à terme, à zéro, ce qui voudrait dire que l’on sera parvenu à recycler l’ensemble du plastique. En attendant que cet objectif soit atteint, il s’agit d’une bonne ressource, qui peut être incitative. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche ainsi quau banc de la commission.)

Conclusion du débat

M. le président. La parole est à M. le vice-président de la commission des affaires européennes.

M. Cyril Pellevat, vice-président de la commission des affaires européennes. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, permettez-moi, en conclusion de ce débat, de revenir sur l’agenda stratégique de l’Union européenne, sur lequel le Conseil européen s’est accordé pour les cinq prochaines années.

Je ne rappellerai pas les quatre volets de cet agenda qui ont déjà été largement évoqués dans le débat, mais je souhaiterais souligner certaines avancées qui méritent, à mes yeux, une attention particulière. Pourquoi ? Parce que toutes témoignent d’une prise de conscience salutaire, par l’Union européenne, de la nécessité pour elle de se concevoir comme puissance, et non simplement comme espace.

Premier point, l’accent est mis par le Conseil européen sur l’importance qu’il convient d’accorder à l’euro, et plus spécifiquement au renforcement de son rôle international. La monnaie est assurément l’un des éléments fondateurs de la souveraineté. L’extraterritorialité des lois américaines, qui s’attache au dollar et contre laquelle l’agenda stratégique appelle à lutter, nous rappelle combien nous aurions à gagner à favoriser l’usage de l’euro dans les échanges internationaux. Nous pouvons aussi saluer le fait que l’agenda prévoit de finaliser l’union bancaire et l’union des marchés de capitaux, sans lesquelles l’édifice de la monnaie unique reste fragile.

Deuxième point : je relève une évolution sémantique sensible qui témoigne de l’éveil progressif du Conseil européen à la vision française d’une Europe-puissance. En matière de défense, l’agenda stratégique, tout en rappelant évidemment la nécessité d’une coopération étroite avec l’OTAN pour la sécurité de notre continent, invite à renforcer les moyens de la défense européenne et à viser la perspective d’une autonomie décisionnelle de l’Union européenne en ce domaine. Cet appel à l’autonomie de décision se retrouve d’ailleurs, comme en écho, dans les conclusions du sommet de la zone euro qui s’est tenu à la suite du Conseil européen.

Il n’y a qu’un pas de l’autonomie à la souveraineté, qui reste néanmoins un gros mot, semble-t-il. Pourtant, le Conseil européen lui-même va jusqu’à mentionner l’impératif de souveraineté européenne dans le domaine du numérique. J’y vois la confirmation que la souveraineté numérique, à laquelle notre assemblée consacre en ce moment une commission d’enquête, est un enjeu tout à fait stratégique, qui doit se concevoir à l’échelle européenne.

Troisième élément, l’agenda stratégique tel qu’il a été adopté par le Conseil européen mentionne explicitement l’impératif, pour l’Union, de se doter d’une politique industrielle. C’est un concept qui a trop longtemps été inaudible à Bruxelles, et nous pouvons nous féliciter de le voir ainsi consacré durablement. L’agenda stratégique prévoit également une mise à jour des règles européennes en matière de concurrence, que nous appelons aussi de nos vœux : il conviendra de s’assurer que cet aggiornamento se fasse bien au service de la stratégie industrielle que l’Union entend déployer.

Enfin, quatrième motif de satisfaction : l’agenda stratégique assigne clairement à l’Union européenne la mission de développer son influence et d’être plus assertive dans la défense de ses intérêts. Il vise notamment à obtenir plus de réciprocité en matière de négociations commerciales ; c’est un objectif que nous promouvons depuis longtemps, particulièrement en ce qui concerne l’ouverture des marchés publics.

Pour conclure ce débat, je veux donc saluer le nouvel agenda stratégique assigné à la Commission et au Conseil : c’est un fruit important de ce Conseil européen de 2019. Il me paraît très prometteur. Pour qu’il ne reste pas lettre morte, il doit être endossé par des personnalités qui ont à la fois l’expérience et l’ambition requises. Souhaitons donc que les prochaines nominations soient à la hauteur de cette nouvelle feuille de route de l’Union.

Je formulerais un dernier souhait. L’agenda stratégique invite l’Union à consacrer plus de ressources à sa mise en œuvre effective. Puisse en effet l’Union se doter des moyens de ses ambitions, et réveiller ainsi l’espoir d’un avenir meilleur pour l’ensemble des citoyens européens ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste ainsi que du groupe La République En Marche.)

M. le président. Nous en avons terminé avec le débat à la suite de la réunion du Conseil européen des 20 et 21 juin 2019.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de Mme Catherine Troendlé.)

PRÉSIDENCE DE Mme Catherine Troendlé

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

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Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 250 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n°148 rectifié bis

Transformation de la fonction publique

Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi de transformation de la fonction publique.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 16 bis - Amendements n° 157 rectifié quater et n° 450 rectifié ter

Articles additionnels après l’article 16 bis (suite)

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 148 rectifié bis, présenté par MM. Durain, Marie, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Sueur, Sutour, Tourenne, Montaugé, Temal et Raynal, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 16 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est ainsi modifiée :

1° Le dernier alinéa de l’article 24 est supprimé ;

2° Après l’article 25 septies, il est inséré un article 25 septies… ainsi rédigé :

« Art. 25 septies …. – Tout fonctionnaire dont la formation obligatoire préalable à sa titularisation est rémunérée est soumis à un engagement de servir l’État pendant une durée de quinze ans. Il ne peut être prononcé de disponibilité avant le terme de cette période.

« En cas de rupture de l’engagement avant ce délai le fonctionnaire est soumis à une obligation de remboursement des sommes engagées au titre de sa formation et de ses traitements selon un barème fixé par décret en Conseil d’État.

« Le fonctionnaire et l’autorité hiérarchique dont il relève informent la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique de la rupture anticipée de l’engagement. Celle-ci met en œuvre la procédure de remboursement selon des modalités déterminées par décret en Conseil d’État.

« Dans le cas où la rupture de l’engagement intervient avant dix années de services effectifs, le remboursement est majoré d’une pénalité dont le montant ne peut être inférieur au cumul des traitements nets reçus et du montant des actions de formations entreprises au cours des douze derniers mois.

« Lorsque la rémunération perçue au moment de la rupture de l’engagement de servir ne donne pas lieu au versement d’un traitement, la somme due est calculée par référence à l’indice correspondant à l’échelon détenu dans le corps d’origine.

« Cette obligation n’est, toutefois, opposable ni au fonctionnaire reconnu travailleur handicapé par la commission mentionnée à l’article L. 146-9 du code de l’action sociale et des familles, ni au fonctionnaire radié des cadres par anticipation pour invalidité.

« La rupture anticipée de l’engagement entraîne radiation des cadres et perte de la qualité de fonctionnaire. »

La parole est à M. Jérôme Durain.

M. Jérôme Durain. Le choix de s’engager dans le service public se fait en conscience et l’obligation imposée aux élèves fonctionnaires d’exercer dans l’administration pendant un certain temps est connue de ces derniers lorsqu’ils s’engagent dans la carrière.

Nul n’est obligé de s’engager dans la fonction publique. De moins en moins d’ailleurs, aurais-je tendance à dire, puisque, au terme des dispositions qui ont été adoptées, il n’est même plus nécessaire d’être titulaire pour exercer. Cela étant dit, le pantouflage, le rétropantouflage et leurs excès sont les mamelles qui alimentent les procès faits aux élites, entretenant l’idée dans l’opinion qu’il y a entre la haute fonction publique et les intérêts privés des vases communicants, une forme de perméabilité, voire de connivence et d’opportunisme.

Cet amendement vise donc à durcir la proposition faite par nos collègues du groupe CRCE dans l’amendement que nous avons précédemment examiné.

Il prévoit de renforcer les obligations déontologiques des fonctionnaires qui bénéficient d’une rémunération à l’occasion de la formation obligatoire préalable à leur titularisation : en soumettant l’ensemble de ces fonctionnaires à une obligation de servir l’État pour une durée minimale de quinze ans ; en prohibant toute mise en disponibilité pour convenances personnelles avant le terme de cette période de quinze ans ; en généralisant l’obligation de remboursement en cas de rupture anticipée de cet engagement de servir ; en confiant à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, la HATVP, la mise en œuvre de la procédure de remboursement.

Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n°148 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 253

Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 157 rectifié quater est présenté par MM. Durain, Marie, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Sueur, Sutour, Tourenne, Antiste et Bérit-Débat, Mme Taillé-Polian, MM. Montaugé, Temal et Raynal, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain.

L’amendement n° 450 rectifié ter est présenté par Mmes N. Delattre, M. Carrère et Costes, MM. Collin, Gabouty et Guérini, Mmes Guillotin et Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Requier, Vall, Castelli et Gold.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 16 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la première phrase du dernier alinéa de l’article 24 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Le recouvrement de ces sommes est exécutoire de plein droit. »

La parole est à M. Jérôme Durain, pour présenter l’amendement n° 157 rectifié quater.

M. Jérôme Durain. Cet amendement de repli vise à systématiser la demande de remboursement de la pantoufle et à assurer un suivi de ces demandes.

Il prévoit le recouvrement sans ordonnancement des sommes dues par les fonctionnaires n’ayant pas honoré l’intégralité de leur engagement de servir au terme de leur formation rémunérée.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° 450 rectifié ter.

Mme Nathalie Delattre. Le recouvrement des frais de scolarité et des traitements versés à l’élève fonctionnaire lors de sa scolarité, ce que nous appelons plus ordinairement la « pantoufle », est aujourd’hui sujet à polémique. En effet, faute de procédure de recouvrement clairement définie et de centralisation de la mission de recouvrement, il semblerait que cette obligation soit mise en œuvre de façon très disparate, en cas de départ anticipé de la fonction publique, selon le corps d’origine.

Nous proposons, par cet amendement, de renforcer les dispositions légales, afin de contraindre chaque administration à se saisir de ce problème.

Article additionnel après l'article 16 bis - Amendements n° 157 rectifié quater et n° 450 rectifié ter
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 448 rectifié bis

Mme la présidente. L’amendement n° 253, présenté par Mmes Lienemann, Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 16 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa de l’article 24 de la loi 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est complété par trois phrases ainsi rédigés : « En cas de démission, régulièrement acceptée, le fonctionnaire doit obligatoirement rembourser sous un délai de deux ans la totalité de ses frais de formation. Il peut en être relevé, en tout ou partie, pour des motifs impérieux tirés soit de leur état de santé, soit de nécessités d’ordre familial. Dans ces cas précis, la décision est prise conjointement par le ministre ou l’autorité chargée de la gestion du corps de fonctionnaires concerné et le ministre chargé de la fonction publique. »

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. La « pantoufle » désigne dans le langage courant la somme qu’un ancien élève d’une école de la haute fonction publique doit rembourser, lorsqu’il résilie avant terme son obligation de servir dix ans l’État qui a financé sa formation et l’a rémunéré pendant cette période. On connaît de nombreux exemples de ces pratiques qui conduisent de jeunes hauts fonctionnaires, dont l’ascension a été permise par l’État, à quitter l’administration publique pour aller pantoufler dans de grandes entreprises privées, en espérant de plus grasses rétributions.

À son corps défendant, l’État a donc formé en son sein de futurs cadres stratégiques ou dirigeants du secteur privé qui défendront ensuite, et parfois contre lui, des intérêts financiers contre l’intérêt général. À cette pratique condamnable s’ajoute celle du rétropantouflage : un ancien haut fonctionnaire passé au privé revient dans la haute fonction publique. Ces allers-retours suscitent un trouble sérieux dans l’opinion quant à l’action d’une partie de la haute administration, dont on ne sait plus si certains y défendent l’intérêt général ou l’intérêt de leurs anciens, et peut-être futurs, employeurs privés.

Nous demandons, en outre, le remboursement automatique de la pantoufle.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. L’adoption de l’amendement n° 148 rectifié bis aurait pour conséquence d’empêcher toute disponibilité pour convenances personnelles pendant quinze ans. Or je rappelle que ces disponibilités ne sont pas seulement prises pour rejoindre le secteur privé : elles sont parfois justifiées par des motifs familiaux.

De même, c’est non pas à la HATVP de vérifier le remboursement de la pantoufle, mais bien à l’administration ! L’avis est donc défavorable.

Les amendements identiques nos 157 rectifié quater et 450 rectifié ter visent à recouvrer la pantoufle de plein droit, sans qu’il soit besoin d’émettre un titre de créance. Il s’agit d’une simplification utile.

Ces amendements ayant été rectifiés à la demande de la commission, ce dont je remercie leurs auteurs, la commission émet un avis favorable.

L’amendement n° 253 est satisfait par le droit en vigueur : le remboursement de la pantoufle est d’ores et déjà obligatoire. L’avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat auprès du ministre de laction et des comptes publics. Sur l’amendement n° 148 rectifié bis, l’avis est défavorable.

Pour ce qui concerne les amendements nos 157 rectifié quater et 450 rectifié ter, je ne partage pas l’appréciation de la commission.

Nous considérons en effet que le décret du 14 novembre 2014 relatif à la rupture de l’engagement de servir des anciens élèves de l’École nationale d’administration, qui s’applique par homologie à une soixantaine de corps de fonctionnaires de la fonction publique d’État, permet l’établissement d’un titre de perception avec un caractère exécutoire. Ces amendements identiques étant satisfaits par le droit existant, l’avis est défavorable.

L’avis est également défavorable sur l’amendement n° 253, pour le même motif.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 148 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 157 rectifié quater et 450 rectifié ter.

(Les amendements sont adoptés.)

Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 253
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 252

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 16 bis, et l’amendement n° 253 n’a plus d’objet.

L’amendement n° 448 rectifié bis, présenté par Mmes N. Delattre, M. Carrère et Costes, MM. Collin, Gabouty et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Requier, Roux, Vall, Castelli et Gold, est ainsi libellé :

Après l’article 16 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport présentant les mesures mises en œuvre pour obtenir le remboursement du montant des traitements et indemnités perçues lors de leur scolarité par les anciens élèves de l’École normale supérieure, l’École nationale d’administration et l’École polytechnique bénéficiant d’une mise en disponibilité et n’ayant pas souscrit à l’engagement de rester au service de l’État pendant la durée minimale prévue par décret.

La parole est à Mme Nathalie Delattre.

Mme Nathalie Delattre. Lors de l’examen du projet de loi pour la confiance dans la vie politique, à l’été 2017, le Sénat avait adopté un amendement visant à demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport relatif au recouvrement de la pantoufle. En effet, nous disposons actuellement de bien peu de données sur la question. Mais cette demande s’est perdue dans les méandres législatifs.

Cet amendement vise à réitérer cette demande, car un tel rapport permettrait également d’amorcer une réflexion au sein de la direction générale de l’administration et de la fonction publique, la DGAFP, en vue d’une harmonisation des régimes de recouvrement de la pantoufle entre les corps.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Cet amendement prévoit la remise d’un rapport sur le remboursement de la pantoufle.

Le Sénat, et en particulier sa commission des lois, est assez peu enclin à accepter les rapports. Toutefois, nous avions déjà adopté cette demande de rapport lors de l’examen du projet de loi pour la confiance dans la vie politique.

Il est très difficile – M. Collombat ne me démentira pas sur ce point… – d’obtenir des chiffres précis et centralisés. Les deux commissions d’enquête sur la haute fonction publique, celle de l’Assemblée comme celle du Sénat, ont rencontré nombre de difficultés pour se faire une vision globale du problème.

L’avis est donc favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Au risque de tenir des propos désagréables à l’oreille de Mme Delattre, je rappelle la position de principe du Gouvernement sur les demandes de rapport, même s’il y a des interrogations que nous pouvons partager.

Nous confirmons que le décret de 2014 renforçant le contrôle pour les fonctionnaires sortis de Polytechnique et de l’École nationale d’administration, l’ÉNA, prévoit non pas seulement une possibilité, mais une obligation de perception, avec titre exécutoire. À notre sens, sauf cas impérieux précisé par le décret, il ne doit pas y avoir de perte en ligne en cas de non-remboursement de la fameuse pantoufle.

Nous procéderons à ces vérifications, nonobstant l’avis défavorable de principe que j’émets sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Le Gouvernement trouve que tout va bien ! Telle n’est pas notre impression, mais peut-être a-t-il des renseignements dont nous ne disposons pas…

Mme Lebranchu, qui fut l’un de vos prédécesseurs, monsieur le secrétaire d’État, n’avait quant à elle pas réussi à obtenir ce type de renseignements, même ceux qui sont relatifs aux salaires et aux rémunérations. Je me félicite donc de ce progrès substantiel, et que ce gouvernement sache tout ce qui se passe dans la haute fonction publique !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 448 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 448 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 149 rectifié bis

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 16 bis.

Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 252, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 16 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 25 decies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, sont insérés deux articles ainsi rédigés :

« Art. 25 …. – Il est interdit à tout ancien fonctionnaire ou agent public d’exercer une activité de conseil qui a trait directement ou indirectement aux missions de service public attachées à ses anciennes fonctions pendant un délai de trois ans.

« Art. 25 …. – Il est interdit à tout ancien fonctionnaire ou agent public en disponibilité et ayant exercé des fonctions pour le compte d’une entreprise publique ou privée ou pour une société de conseil d’occuper une fonction impliquant une mission de service public ou l’exercice de prérogatives de puissance publique directement ou indirectement liés aux secteurs d’activités dans lesquels il est intervenu pendant un délai de trois ans. »

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Cet amendement a pour objectif de lutter contre les conflits d’intérêts dans la fonction publique, en interdisant à tout ancien fonctionnaire ou agent public d’exercer une activité de conseil qui a trait directement ou indirectement aux missions de service public attachées à ses anciennes fonctions pendant un délai de trois ans.

Il interdit également à tout ancien fonctionnaire ou agent public en disponibilité et ayant exercé des fonctions pour le compte d’une entreprise publique ou privée, ou pour une société de conseil, d’occuper une fonction impliquant une mission de service public ou l’exercice de prérogatives de puissance publique directement ou indirectement liées aux secteurs d’activité dans lesquels il est intervenu pendant un délai de trois ans.

Nous considérons que cette mesure est tout à fait indispensable, particulièrement dans le cadre de ce projet de loi qui accentue la contractualisation de la fonction publique, ce qui aura inévitablement pour effet d’entraîner une confusion entre les intérêts publics et privés.

Cet effet est déjà à l’œuvre avec le pantouflage, lequel crée un phénomène de porosité entre les élites administratives et les élites économiques, ce qui nuit gravement au respect de l’intérêt général, indispensable au bon déroulement de l’action publique. De nombreux exemples attestent de ce dysfonctionnement structurel, lequel s’avère être particulièrement nuisible à la vitalité de notre démocratie.

Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 252
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 156 rectifié bis

Mme la présidente. L’amendement n° 149 rectifié bis, présenté par MM. Durain, Marie, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Sueur, Sutour, Tourenne, Antiste, Bérit-Débat, Montaugé, Temal et Raynal, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 16 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 25 sexies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, il est inséré un article 25 sexies … ainsi rédigé :

« Art. 25 sexies …. – Il est interdit à tout agent public qui quitte la fonction publique d’exercer pendant un délai de trois ans une activité de conseil qui a trait directement ou indirectement aux missions de service public attachées à ses anciennes fonctions. »

La parole est à M. Didier Marie.

M. Didier Marie. Cet amendement prévoit d’interdire à tout agent public quittant la fonction publique d’exercer pendant un délai de trois ans une activité de conseil qui a trait directement ou indirectement aux missions de service public attachées à ses anciennes fonctions.

Un millier de fonctionnaires d’État seraient concernés chaque année par le pantouflage, c’est-à-dire par le fait de passer du secteur public au secteur privé. Jadis pratiqué en fin de carrière, ce système s’est généralisé et les risques de conflit d’intérêts n’ont ainsi jamais été aussi nombreux.

Par ailleurs, le pantouflage fonctionne aussi dans l’autre sens ; c’est que l’on appelle le rétropantouflage. De plus en plus de hauts fonctionnaires partis dans le privé reviennent vers le public.

Il s’agit d’un problème structurel à notre pays, qui est le seul à connaître une telle perméabilité entre les intérêts privés et les intérêts publics. L’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE, elle-même, s’en est inquiétée il y a quelques années dans un rapport.

Selon elle, « les relations proches entre, d’un côté, les régulateurs et le pouvoir politique et, de l’autre, l’industrie de la finance et ses lobbyistes, sont alimentées par le recyclage régulier de personnel entre ces deux univers » et « s’attaquer aux portes tournantes constitue le début d’un processus indispensable afin de restaurer la confiance des citoyens dans le système politique et le fonctionnement des marchés financiers ».

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Ces amendements visent à interdire pendant trois ans à un agent public d’exercer une activité de conseil en lien avec ses anciennes fonctions.

Ces amendements me semblent en grande partie satisfaits par l’article 16 ter AA, que nous avons adopté en commission sur l’initiative de leurs auteurs, interdisant, pendant trois ans, à un fonctionnaire d’exercer une fonction de représentant d’intérêts auprès de son ancienne administration. Les avis d’incompatibilité ou de compatibilité avec réserves qui seront émis par la HATVP vont dans le même sens. À l’article 16, nous avons d’ailleurs substantiellement renforcé la portée de ces avis.

En outre, les termes employés dans les amendements, notamment sur les liens « directs ou indirects » avec l’ancienne fonction, nous paraissent trop larges.

Commençons par préserver l’article 16 ter AA, que le Gouvernement souhaite supprimer.

L’avis est donc défavorable sur les deux amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 252.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 149 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 149 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 246

Mme la présidente. L’amendement n° 156 rectifié bis, présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Sueur, Durain, Marie, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Sutour, Tourenne, Antiste, Bérit-Débat, Montaugé, Temal et Raynal, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 16 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 25 decies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, il est inséré un article 25 … ainsi rédigé :

« Art. 25… – Les personnels relevant de la direction générale des finances publiques appartenant à la catégorie A ne peuvent cesser leurs fonctions pour exercer une activité, salariée ou non, dans les établissements de crédit et les sociétés de financement définis aux articles L. 511-1 du code monétaire et financier. »

La parole est à M. Jérôme Durain.

M. Jérôme Durain. Nous proposons, au travers de cet amendement, de mettre un terme à un type de pantouflage qui, depuis la crise financière de 2008, laisse planer un doute sur l’impartialité d’une partie des hauts cadres de la fonction publique.

On ne peut être chargé de surveiller un système bancaire qui a créé une des plus grandes crises depuis celle de 1929 et envisager de poursuivre sa carrière professionnelle dans une des banques faisant l’objet de cette surveillance.

On ne peut conseiller les décideurs politiques sur les conséquences de la mise en œuvre de contraintes supplémentaires en matière de gestion du risque systémique du secteur bancaire et penser pouvoir aider ultérieurement une banque à s’émanciper de ces contraintes.

On ne peut mettre en œuvre la surveillance fiscale des flux financiers et imaginer conseiller, dans le futur, une des institutions surveillées.

En clair, nous devons définitivement lever le doute sur l’impartialité de hauts fonctionnaires du ministère des finances qui pourraient envisager de monnayer leurs compétences dans un secteur d’activité qui reste un secteur à risque pour notre économie.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Cet amendement tend à interdire à un fonctionnaire de catégorie A de la DGFiP de travailler dans le milieu bancaire. En suivant cette logique, pourquoi se concentrer sur la DGFiP ?

M. Pierre-Yves Collombat. On peut commencer par là !

M. Loïc Hervé, rapporteur. Il faudrait également évoquer les inspecteurs des finances, la direction générale du budget, la direction générale du Trésor, pour rester dans le strict périmètre de Bercy, du ministère des finances. Je le répète, pourquoi cette direction générale, et pas d’autres ?

Surtout, nous préférons l’examen des situations au cas par cas par la HATVP, avec la possibilité d’émettre des avis d’incompatibilité ou de compatibilité avec réserves. Nous avons d’ailleurs significativement amélioré le suivi des réserves de la HATVP.

Notre avis est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. L’avis est défavorable. J’ajoute, en reprenant les arguments du rapporteur, que l’article 423-13 du code pénal interdit à tout agent public d’exercer une activité au sein d’une entreprise dont il a assuré la surveillance ou le contrôle, ou avec laquelle il a conclu des contrats au cours des trois dernières années.

Sur le fond, l’amendement me semble donc satisfait. J’estime dommageable – le rapporteur l’a dit – que cet amendement ne cible que la DGFiP. La supervision du secteur bancaire relève principalement de la direction générale du Trésor, de l’Autorité des marchés financiers et de la Banque de France. La DGFiP assure une mission en matière de fiscalité, mais elle n’est pas la seule. Je le redis, il me semble regrettable de la cibler, au risque de la stigmatiser.

Par ailleurs, à la place qui est la mienne aujourd’hui, je peux témoigner à la fois de l’engagement, de la loyauté et du grand sens de l’État des agents de cette direction. Il me paraît dommageable que l’amendement, dans la rédaction proposée qui ne cible qu’une direction, soit parcellaire, au risque d’être partial.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Il y a mille raisons, au moins une en tout cas, de faire un sort particulier aux inspecteurs des finances : ils pantouflent à 70 % !

M. Loïc Hervé, rapporteur. Non !

M. Pierre-Yves Collombat. Si, je vous assure, à 70 % !

M. Loïc Hervé, rapporteur. On parle de la DGFiP, pas de l’IGF !

M. Pierre-Yves Collombat. Il y a tout de même un petit problème… Alors je veux bien, monsieur le secrétaire d’État, que vous soyez très gentil avec tous ces braves gens qui se sacrifient – c’est clair… – pour le service public. (M. le secrétaire dÉtat auprès du ministre de laction et des comptes publics sagace.) Mais je crois que ce qui se passe précisément à la direction des finances pose légèrement problème.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Au risque d’être insistant, monsieur le sénateur, la « direction des finances » n’existe pas.

Nous avons une direction générale des finances publiques, au sein de laquelle il y a une direction de la législation fiscale, et une inspection générale des finances, qui est considérée comme un grand corps. Il serait utile, pour nourrir votre argumentation, que je vous remette, à l’occasion de la prochaine séance, un organigramme complet des services du ministère de l’action et des comptes publics, ainsi que du ministère de l’économie et des finances.

Je le dis avec un peu de colère, parce que – je le répète – à la place qui est la mienne aujourd’hui, je peux témoigner de la qualité de ces hommes et ces femmes, et de celle de leur engagement. La France et les représentants du peuple français devraient s’enorgueillir d’avoir une haute fonction publique et, au-delà, une fonction publique de cette qualité et de cet engagement, plutôt que de systématiquement chercher à lui faire procès.

M. Loïc Hervé, rapporteur. Très bien !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 156 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 156 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 150 rectifié bis

Mme la présidente. L’amendement n° 246, présenté par M. Collombat, Mmes Assassi, Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 16 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 432-13 du code pénal est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« I. – Est puni de trois ans d’emprisonnement et d’une amende de 200 000 €, dont le montant peut être porté au double du produit tiré de l’infraction, le fait, par une personne ayant été chargée, en tant que membre du Gouvernement, membre d’une autorité administrative indépendante ou d’une autorité publique indépendante, titulaire d’une fonction exécutive locale, fonctionnaire, militaire ou agent d’une administration publique, dans le cadre des fonctions qu’elle a effectivement exercées, soit d’assurer la surveillance ou le contrôle des entreprises privées d’un secteur d’activité, soit de conclure des contrats de toute nature, de formuler un avis sur de tels contrats, de proposer directement à l’autorité compétente des décisions relatives à des opérations réalisées par des entreprises privées de ce secteur ou de formuler un avis sur de telles décisions, de prendre ou de recevoir une participation par travail, conseil ou capitaux dans l’une des entreprises de ce secteur d’activité avant l’expiration d’un délai de cinq ans suivant la cessation de ces fonctions. »

2° Il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :

« II. – Est puni de trois ans d’emprisonnement et d’une amende de 200 000 €, dont le montant peut être porté au double du produit tiré de l’infraction, le fait, par une personne ayant été chargée de fonctions de direction dans un secteur d’activité ou de défense des intérêts de ce secteur d’exercer des fonctions de contrôle ou de régulation concernant ce secteur d’activité au sein de l’administration publique ou d’une autorité administrative indépendante avant un délai de cinq ans suivant la cessation de l’activité privée. »

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. En préliminaire, je voudrais vous faire observer, monsieur le secrétaire d’État, que la directrice du service de l’inspection générale des finances n’a pas été capable de me dire combien elle avait d’inspecteurs des finances sous sa direction – elle ne le savait pas !

Vous me reprochez de ne pas me débrouiller dans votre méli-mélo, mais je ne suis pas le seul, et cela profite à tout le monde !

Par ailleurs, je ne confonds pas tout ! Par exemple, moins de 20 % des énarques, qu’on accuse pourtant de tout, pantouflent… Mais les inspecteurs des finances pantouflent à 70 %, les membres du Conseil d’État à 40 %, sans compter ceux de la Cour des comptes… Ce sont les chiffres que l’on m’a donnés. Il y a tout de même, je le redis, un petit problème.

Je veux bien que, dans la version pour enfants qui nous est régulièrement servie, on évoque le « conflit d’intérêts ». Moi, je n’appelle pas cela ainsi ; comme je suis assez mal élevé, je parlerai de favoritisme, qui est sanctionné par le code pénal, et de trafic d’influence qui est, lui aussi, sanctionné par le code pénal. Voilà quels sont les risques !

Cet amendement vise justement à protéger ces fonctionnaires de bonne volonté, sinon de la tentation, du moins des écueils qu’il y aurait à se trouver trop rapidement à prendre des décisions qui intéressaient ou intéresseront des entreprises privées. Car, vous l’avez remarqué, nous nous intéressons non seulement au pantouflage, mais aussi au rétropantouflage.

Le but est parfaitement désintéressé : il s’agit simplement d’éviter à ces fonctionnaires des bévues et des ennuis, pour leur bien-être et leur quiétude.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. L’amendement que M. Collombat nous propose vise à étendre de trois ans à cinq ans la période considérée pour la prise illégale d’intérêts.

L’avis de la commission est défavorable : il faut maintenir une certaine cohérence avec les réserves de la HATVP, qui s’appliquent pendant un délai de trois ans.

Cet amendement serait également plus sévère pour les élus locaux, alors même que la définition de la prise illégale d’intérêts pose un véritable problème.

En ce qui concerne les mobilités du privé vers le public, je rappelle que nous avons amélioré, à l’article 16, le contrôle du rétropantouflage.

J’attire l’attention de mes collègues sur le vote de cet amendement qui modifie un article du code pénal. La matière pénale mérite que nous légiférions avec d’autant plus de prudence.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. En matière pénale, on n’a pas toujours ces précautions !

M. Loïc Hervé, rapporteur. Il faudrait pourtant !

M. Pierre-Yves Collombat. Quand il s’agit de petits délinquants ou de personnes qui manifestent imprudemment, ma foi, augmenter les peines, cela ne gêne strictement personne ! Mais alors, là, c’est vrai, il faudrait prendre quelques précautions…

Il ne vous aura pas échappé – moi, cela m’a étonné – que le conflit d’intérêts n’est pas un délit. Ce n’est rien du tout ! Le seul article, ajouté tardivement, du code pénal qui « colle » à peu près aux problèmes posés par le pantouflage, c’est l’article 432-13. Nous demandons simplement, par souci de prudence et pour assurer la quiétude de ces braves gens qui se dévouent, de prévoir un délai suffisant pour que ces derniers ne soient pas soumis à la tentation.

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.

M. Didier Marie. L’ensemble des amendements que nous venons d’examiner visent à rétablir la confiance. Nous vivons aujourd’hui, qu’on le veuille ou non, une forme de crise démocratique. Nombre de nos concitoyens, souvent poussés par des forces que nous n’apprécions pas nécessairement, considèrent que la haute fonction publique n’est pas toujours exempte de reproches.

Au travers de ces amendements, nous souhaitons rassurer nos concitoyens et, en même temps, protéger les hauts fonctionnaires. Je peux comprendre la colère de M. le secrétaire d’État : personne ici n’a de doute sur l’intégrité de la quasi-totalité des fonctionnaires du ministère de l’économie et des finances, mais j’attire son attention sur le fait qu’il peut y en avoir un ou deux – malheureusement, nous en avons connu à certains moments – dont le comportement jette l’opprobre sur l’ensemble de la corporation.

Notre souci, c’est de prémunir ces fonctionnaires contre ces risques et, en même temps, de restaurer la confiance. C’est la raison pour laquelle nous insistons sur ces mesures.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 246.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 246
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 251

Mme la présidente. L’amendement n° 150 rectifié bis, présenté par MM. Durain, Marie, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Sueur, Sutour, Tourenne, Antiste, Bérit-Débat, Montaugé, Temal et Raynal, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 16 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 8-1 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« …. – Toute personne dont la nomination est envisagée à un emploi civil ou militaire relevant de l’article 13 de la Constitution, à un emploi supérieur relevant du décret mentionné à l’article 25 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État, ou à un emploi de direction de l’État ou de ses établissements publics relevant du décret mentionné au 1° bis de l’article 3 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précité fait l’objet des procédures mentionnées au I du présent article. »

La parole est à M. Jérôme Durain.

M. Jérôme Durain. Cet amendement prévoit de soumettre toute personne dont la nomination est envisagée à un poste supérieur ou de direction de la fonction publique d’État au dispositif de contrôle actuellement prévu pour les membres du Gouvernement.

Il s’agit, d’abord, de la communication par le président de la HATVP « des informations indiquant, à la date de la demande et compte tenu des éléments dont dispose la Haute Autorité, si cette personne a, le cas échéant, satisfait ou non aux obligations de transmission d’une déclaration d’intérêts et d’activités, d’une déclaration d’intérêts ou d’une déclaration de situation patrimoniale et à la justification des mesures prises pour gérer ces instruments financiers dans des conditions excluant tout droit de regard de sa part, ainsi que si cette personne se trouve dans une situation pouvant constituer un conflit d’intérêts et les mesures nécessaires pour prévenir ou faire cesser immédiatement celui-ci ».

Il s’agit, ensuite, de la communication par l’administration fiscale « d’une attestation constatant qu’à la date de la demande et en l’état des informations dont dispose cette administration, la personne satisfait ou non aux obligations de déclaration et de paiement des impôts dont elle est redevable ».

Il s’agit, enfin, de la communication du bulletin n° 2 du casier judiciaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Dans la loi pour la confiance dans la vie politique, le Sénat a créé, sur l’initiative du président Bas, une procédure de contrôle avant la nomination des membres du Gouvernement.

Le Président de la République peut désormais consulter la HATVP, l’administration fiscale et le bulletin n° 2 du casier judiciaire.

L’amendement de M. Durain propose d’étendre cette procédure aux nominations au titre de l’article 13 de la Constitution et à certains emplois publics.

La commission des lois y est défavorable, pour deux raisons.

D’abord, parce que l’amendement nous semble largement satisfait pour les emplois publics : les personnes concernées doivent remplir une déclaration d’intérêts en amont de leur nomination. Il en va de même pour le casier judiciaire qui doit être vierge.

Ensuite, concernant les nominations au titre de l’article 13 de la Constitution, qui semblent d’ailleurs éloignées du champ du projet de loi, les éventuelles révisions institutionnelles seront l’occasion de renforcer les pouvoirs du Parlement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 150 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 150 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 16 bis - Amendements n° 247 et n° 418 rectifié quater

Mme la présidente. L’amendement n° 251, présenté par Mmes Lienemann, Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 16 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Les emplois et fonctions pour lesquels le pouvoir de nomination du Président de la République s’exerce dans les conditions fixées au dernier alinéa de l’article 13 de la Constitution sont incompatibles avec le fait d’exercer ou d’avoir exercé, au cours des trois dernières années, les fonctions de dirigeant, de salarié ou de conseiller d’une société contrôlée, supervisée, subordonnée ou concernée par l’institution, l’organisme, l’établissement ou l’entreprise auquel cet emploi ou fonction se rattache.

II. – Aucune personne exerçant les emplois et fonctions mentionnés au I ne peut participer à une délibération concernant une entreprise ou une société contrôlée, supervisée, subordonnée ou concernée par l’institution, l’organisme, l’établissement ou l’entreprise dans laquelle elle a, au cours des trois années précédant la délibération, exercé des fonctions ou détenu un mandat.

Les personnes exerçant les emplois et fonctions mentionnés au même I ne peuvent, directement ou indirectement, détenir d’intérêts dans une société ou entreprise mentionnée audit I.

L’article 432-13 du code pénal est applicable aux personnes mentionnées au même I, après la cessation de leur emploi ou de leur fonction.

Le non-respect de cet article est passible des sanctions prévues à l’article 432-13 du code pénal.

Un décret en Conseil d’État fixe le modèle de déclaration d’intérêts que chaque personne doit déposer au moment de sa désignation.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Nous souhaitons rétablir des amendements, adoptés par le Sénat lors de la discussion du projet de loi pour la confiance dans la vie politique et supprimés par l’Assemblée nationale, relatifs à la déontologie de la haute fonction publique.

Il s’agit en l’occurrence d’un amendement de Marie-Noëlle Lienemann qui interdisait de nommer à une fonction d’intérêt général relevant de la procédure de l’article 13 de la Constitution une personne qui aurait travaillé, au cours des trois années précédentes, dans une entreprise ayant des liens avec l’organisme au sein duquel elle exercera sa fonction.

Par ailleurs, cet article interdit la participation des personnes exerçant actuellement une fonction d’intérêt général à une délibération concernant une entreprise dans laquelle elles ont travaillé au cours des trois années précédant cette délibération et qui entretient des liens avec l’organisme auquel elles sont rattachées.

Il s’agit d’une disposition particulièrement utile pour éviter les conflits d’intérêts.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Cet amendement avait déjà reçu un avis négatif du président Bas quand il était rapporteur du projet de loi pour la confiance dans la vie politique. Nous ne pouvons pas déjuger le président de la commission des lois ce soir ! (Sourires.)

L’amendement tend à interdire de nommer à une fonction relevant de la procédure de l’article 13 de la Constitution une personne qui aurait travaillé dans un organisme se rattachant à cet emploi.

La procédure de l’article 13 dépasse très largement le champ du projet de loi. Elle pourrait d’ailleurs être renforcée à l’occasion des prochaines réformes institutionnelles.

Par ailleurs, les auditions devant les commissions parlementaires permettent d’ores et déjà de prévenir les conflits d’intérêts.

De plus, l’adoption de cet amendement empêcherait, par exemple, la nomination à la tête de la Caisse des dépôts et consignations d’une personne ayant auparavant dirigé une de ses filiales. Nous serions alors contraints de prendre un fonctionnaire de Bercy, ce qui n’est sans doute pas l’intention des auteurs de l’amendement. La situation est identique pour l’Autorité de sûreté nucléaire. Nous avons besoin de spécialistes pour un certain nombre de postes sensibles. Il s’agit de ne pas bloquer des évolutions de carrière ou des nominations qui pourraient être tout à fait pertinentes, en vertu d’un principe qui se retournerait contre la volonté du législateur.

Enfin, les organismes concernés possèdent déjà en interne leurs propres règles de déport.

L’avis est donc doublement défavorable, par cohérence avec la position adoptée sur la loi précitée.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Les occasions pour le Gouvernement d’être totalement d’accord avec le président Philippe Bas sont trop rares à mes yeux. Je saisis l’occasion pour le conforter sur ce point !

J’ajoute que les emplois ciblés dans cet amendement sont des emplois qui ne relèvent pas du statut général de la fonction publique, mais de la loi organique de 2010 en matière d’emplois à la discrétion du Gouvernement.

Aux arguments déjà développés par le rapporteur, j’ajoute que cet amendement ne nous semble pas relever du cadre de ce projet de loi.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 251.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 251
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 248

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 247 est présenté par M. Collombat, Mmes Assassi, Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 418 rectifié quater est présenté par Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme G. Jourda, MM. Antiste et M. Bourquin, Mme Meunier, M. P. Joly, Mmes Préville et Monier, M. Joël Bigot et Mmes Blondin et Grelet-Certenais.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 16 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les articles 108, 109 et 110 de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel sont abrogés.

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour présenter l’amendement n° 247.

M. Pierre-Yves Collombat. Contrairement à ce qu’on essaie de nous faire croire, le pantouflage n’est pas une exception !

Ce qui se passe réellement, c’est qu’on a abattu progressivement les barrières entre le public et le privé, et on passe de l’un à l’autre et de l’autre à l’un. Fatalement, cela aboutit à un système collusif où les intérêts se mélangent.

On constate que le Gouvernement facilite cette situation, avec laquelle il est d’accord. En effet, la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel avait prévu qu’une personne exerçant une fonction dans le privé pouvait continuer à bénéficier des avantages du statut de la fonction publique : l’avancement, le droit à la retraite, etc. Mais où va-t-on ?

L’amendement vise à revenir sur cette disposition qui avait reçu, si ma mémoire est bonne, un avis défavorable du Conseil d’État – c’est dire ! – et à rétablir un minimum de séparation entre l’exercice des prérogatives publiques et l’exercice d’un métier privé.

Mme la présidente. L’amendement n° 418 rectifié quater n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Depuis l’adoption de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, un fonctionnaire placé en disponibilité pour exercer des fonctions professionnelles dans le secteur privé conserve ses droits à avancement et à retraite. Cette mise en disponibilité peut donc s’apparenter à un détachement.

L’amendement n° 247 vise à supprimer cette disposition. J’en comprends l’objectif, surtout que cette dernière a été introduite dans un texte qui ne comportait pas de véritable lien avec la fonction publique.

Sur un plan technique, il conviendrait de supprimer la disposition telle que « codifiée » dans le statut général de la fonction publique, mais nous pourrons voir cela au moment de la commission mixte paritaire.

Nous souhaitons entendre les explications du Gouvernement sur ce point capital : nous sommes favorables aux mobilités du public vers le privé, sous réserve des contrôles déontologiques, mais pas à n’importe quel prix !

Dans un suspense insoutenable (Sourires.), la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. La mesure visée ici est une disposition de la loi du 5 septembre 2018 qui, comme vient de le rappeler M. le rapporteur, vise, d’une certaine manière, à aligner, en termes de droits pour les agents, le régime de la disponibilité pour convenances personnelles sur celui du détachement.

Avant cette loi, un agent public qui faisait valoir son droit à occuper un emploi par détachement conservait le bénéfice de son déroulement de carrière et la possibilité de relever des caisses de retraite de la fonction publique.

Si un agent obtenait une disponibilité pour convenances personnelles et qu’il revenait dans la fonction publique à l’issue de cette période, son avancement était figé à la date de son départ en disponibilité : il perdait donc le bénéfice de l’avancement, ainsi que celui de sa carrière.

Le Gouvernement a souhaité aligner les dispositions relatives à la disponibilité sur celles qui sont applicables au détachement. Cela signifie qu’un agent qui demande une disponibilité pour convenances personnelles peut, lorsqu’il revient dans la fonction publique, conserver notamment le bénéfice de son déroulement de carrière et de son avancement.

À quel type de situations cela correspond-il ?

Vous dites, monsieur Collombat, que cette mesure vise à encourager le pantouflage. En réalité, nous l’avons pensée comme une modalité tendant à faciliter les retours dans la fonction publique d’agents publics faisant valoir leur droit à une disponibilité.

Nous avons aujourd’hui des agents publics – vous avez cité précédemment quelques exemples que j’ai contestés parce que je les ai trouvés stigmatisants – qui peuvent exercer une fonction dans le secteur privé en disponibilité et dont l’expérience acquise pendant cette période peut être extrêmement bénéfique à l’administration publique.

Je prends un exemple volontairement caricatural : si un agent des services fiscaux a travaillé quelques années dans une banque privée, il est peut-être ensuite meilleur pour examiner un certain nombre de dispositions et pour lutter contre la fraude. Cela peut donc être utile.

La difficulté que l’on rencontre aujourd’hui, c’est que nous avons du mal à faire revenir les agents publics. Cela s’explique par les différences de rémunération entre le public et le privé, auxquelles il faut ajouter le fait que, à leur retour, ils reprennent leur carrière là où ils l’avaient laissée, si vous me permettez cette expression. Cela n’est guère attractif.

Par ailleurs, nous ciblons les disponibilités pour convenances personnelles. Ce terme recouvre tant la disponibilité pour exercer une fonction dans le secteur privé que la disponibilité pour des raisons tout à fait personnelles.

Parmi ces raisons, il s’agit, d’abord, d’élever un enfant au-delà du congé parental, de manière à pouvoir prolonger le temps passé auprès de celui-ci.

Il s’agit, ensuite, dans une part numériquement plus importante, de la demande de femmes – même s’il peut y avoir des hommes – mariées ou en couple avec un fonctionnaire muté d’office, comme un militaire ou un gendarme, qui souhaitent suivre leur conjoint dans sa région d’affectation.

Dans ce deuxième cas, ces femmes ne trouvent pas d’emploi public disponible correspondant à leur grade dans la nouvelle région d’affectation : elles se mettent en disponibilité, non pas pour exercer une activité dans le privé par choix, non pas pour aller pantoufler ou verser dans je ne sais quel autre travers qu’on pourrait leur reprocher, mais pour arrêter de travailler ou pour occuper un poste dans le privé, parce qu’elles n’ont pas trouvé de poste dans le public, alors qu’elles ont suivi leur conjoint. Cette situation ne relève pas du choix.

Cette disposition, qui a depuis donné lieu à la publication d’un décret le 27 mars dernier, vise, d’abord, à faciliter le retour dans le public d’agents qui ont vécu une expérience dans le privé et, ensuite, à protéger le déroulement de carrière d’agents et d’agentes qui n’ont pas fait le choix d’une disponibilité, mais qui la subissent.

J’ajoute pour compléter mon propos que nous avons ramené à cinq ans la durée totale de disponibilité, qui était jusqu’alors limitée à dix ans. Nous avons exigé, dans le décret, qu’un agent qui fait valoir une disponibilité pour cinq ans ne puisse en demander une seconde qu’après avoir passé dix-huit mois consécutifs dans son administration de retour. Il s’agit d’éviter les allers et retours séparés de quelques jours, pour lesquels effectivement on peut s’interroger sur le mobile réel de la demande de la deuxième disponibilité.

Nous avons encadré le régime de la disponibilité dans la durée et dans le « rattachement » à l’administration. Je le répète, favoriser les retours, c’est utile, tout comme il est utile de protéger la carrière de ceux, et surtout de celles, qui font valoir leur droit à une disponibilité pour convenances personnelles sans l’avoir choisie.

C’est la raison pour laquelle l’avis est défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le secrétaire d’État, je me demandais quand vous alliez me sortir la version pour enfants que l’on sert toujours à cette occasion : c’est une disposition pour les femmes, car elle leur est favorable ! Qui pourrait être contre une telle décision ?

En réalité, ceux qui en profitent le plus, ce sont ceux pour lesquels le pantouflage est une modalité d’exécution de leur carrière. Ils ne perdent rien !

Voilà le fond du débat ! Dites franchement qu’il n’y a plus de différence entre la fonction publique et les autres métiers. La fonction publique servait apparemment jusqu’à présent à défendre l’intérêt général, celui de l’ensemble de la population, et pas celui d’une profession, fût-elle aussi glorieuse que celle de banquier.

Cela me fait penser à ce que disait un ancien gouverneur de la Banque d’Angleterre : « Les banques prospèrent à l’international et viennent mourir au pays. » (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour explication de vote.

Mme Christine Lavarde. J’ai l’impression, depuis un petit moment, d’entendre l’expression d’une suspicion généralisée de la part de collègues qui voient le mal partout… Heureusement, certains ont souligné ici qu’on peut vouloir devenir fonctionnaire par volonté, pour servir son pays sans profiter d’un moyen ou d’un autre.

Je ne sais pas si la disposition actuelle s’appliquerait à quelqu’un qui prendrait une disponibilité pour exercer un mandat d’élu. Quand on devient vice-président d’une région ou d’une grande agglomération, maire d’une ville, on peut décider de mettre entre parenthèses sa carrière dans la fonction publique le temps d’exercer ce mandat.

M. Pierre-Yves Collombat. C’est déjà ce qui se passe !

Mme Christine Lavarde. Pas pour tout le monde !

Je prendrai mon cas particulier : j’ai été mise en disponibilité alors que je devais être promue. Du jour au lendemain, on a stoppé ma promotion ; quand je reviendrai, je retournerai tout en bas, ce qui posera un véritable problème. Aujourd’hui, en l’état actuel, je pourrais difficilement retourner dans la fonction publique, même si c’était mon choix.

Mme Christine Lavarde. Si cette disposition s’applique aux mandats des élus, c’est très bien ; si ce n’est pas le cas, il faudrait peut-être y penser. Je ne pense pas que quelqu’un qui exerce, par exemple, un mandat de vice-président de région soit contre l’intérêt général et contre l’intérêt public. Il s’enrichit de son expérience d’élu de terrain, est mieux informé et a de meilleures relations avec ses administrés ou avec ses interlocuteurs que sont les élus qui lui succéderont pour mettre en œuvre des politiques publiques.

Je soutiens complètement cette disposition, d’ailleurs validée par le Conseil d’État, puisque le décret a été publié au mois de mars dernier.

M. Yves Détraigne. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Madame la sénatrice, la disponibilité pour exercer un mandat d’élu répond à deux cas de figure.

Pour les élus locaux, il s’agit d’une disponibilité demandée par l’élu, qui est de droit, mais qui n’est pas accompagnée, malgré le décret pris le 27 mars 2019, du maintien du déroulement de carrière et des dispositions visées par la loi du 5 septembre 2018. Je rejoins votre propos lorsque vous dites qu’il serait utile d’y penser : peut-être que la discussion du texte en cours d’élaboration par mon collègue Sébastien Lecornu sur l’engagement des élus sera l’occasion d’aborder ce sujet.

Les disponibilités que nous visons, au travers de la protection du déroulement de carrière pendant cinq ans – et non plus dix ans –, ce sont celles qui sont prises pour convenances personnelles, celles qui ne sont pas de droit. En effet, même s’il est vrai que certaines demandes de disponibilité pour convenances personnelles ne sont pas choisies, lorsqu’elles accompagnent un mouvement de mutation d’office, elles sont toujours soumises à un accord de la hiérarchie, accordé sous réserve des nécessités de service ; ce n’est pas le cas de la disponibilité des élus.

Pour revenir à mon premier point, la disponibilité liée à l’exercice d’un mandat d’élu est possible et de droit pour les élus locaux et est d’office pour les parlementaires – vous l’avez vécu, comme d’autres, ici.

M. Pierre-Yves Collombat. Mais la carrière ne suit pas…

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 247.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 16 bis - Amendements n° 247 et n° 418 rectifié quater
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article 16 ter AA (nouveau)

Mme la présidente. L’amendement n° 248, présenté par M. Collombat, Mmes Assassi, Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 16 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La nomination au tour extérieur des membres du Conseil d’État, de la Cour des comptes, de l’Inspection générale des finances, de l’Inspection générale de l’administration, de l’Inspection générale des affaires sociales et l’Inspection générale de l’Éducation nationale ne peut intervenir que deux ans au moins après la participation à un cabinet présidentiel ou ministériel.

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Je suis bien parti pour me faire des amis… (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

Quand on examine le parcours des pantouflards professionnels, on s’aperçoit qu’il y a deux voies principales : les grands corps – il faut avoir fait l’ÉNA et y avoir été admis –, et le passage par un cabinet politique. En effet, le pantouflard est intéressant s’il a quelque chose à monnayer : il a pris des décisions, il sait comment les choses se passent, il connaît des gens qu’il n’oubliera pas et qu’il saura reconnaître le moment venu… Ce que j’ai exposé en défendant l’amendement précédent correspondait à la première voie, cet amendement vise la deuxième.

Ainsi, si l’on pouvait réduire la fréquence avec laquelle les membres de cabinets peuvent pantoufler, ce ne sera pas plus mal.

Il faut donc une limite aux nominations au tour extérieur, qui sont politiques. Ces désignations bénéficient à des gens dont, sans doute, la compétence n’est pas contestable – je ne me le permettrais pas… –, mais elles représentent un service rendu à quelqu’un qui a pris beaucoup de son temps pour aider un responsable politique dans l’exercice de son mandat.

Par conséquent, il serait décent d’instaurer un plus grand délai entre l’appartenance à un cabinet ministériel et la nomination au tour extérieur.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable.

M. Pierre-Yves Collombat. C’est étonnant !

M. Loïc Hervé, rapporteur. Cet amendement vise à établir un délai de carence de deux ans entre l’exercice de fonctions au sein d’un cabinet ministériel et la nomination au tour extérieur dans un grand corps.

La commission est défavorable à cet amendement pour trois raisons. Premièrement, cette question trouvera sans doute sa place dans la mission confiée à M. Thiriez.

M. Loïc Hervé, rapporteur. Deuxièmement, les nominations au tour extérieur sont déjà encadrées. À titre d’exemple, le vice-président du Conseil d’État émet, sur chaque projet de nomination, un avis qui prend en compte les fonctions antérieurement exercées par l’intéressé, son expérience et les besoins du corps ; le sens de cet avis est d’ailleurs rendu public.

Troisièmement, enfin, l’amendement ne couvre pas toutes les hypothèses ; il ne mentionne pas, par exemple, les nominations au tour extérieur dans le corps des administrateurs civils.

M. Pierre-Yves Collombat. Les nominations au tour extérieur dans le corps des administrateurs civils sont beaucoup moins nombreuses !

M. Loïc Hervé, rapporteur. Cela dit, que M. Collombat le sache, s’il ne s’est peut-être pas fait de nouveaux amis, il conserve en tout cas les plus anciens…

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Même avis, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 248.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 248
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article 16 ter A

Article 16 ter AA (nouveau)

Après le 9° de l’article 18-5 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, il est inséré un 10° ainsi rédigé :

« 10° S’abstenir d’exercer toute action pour le compte ou auprès d’une personne morale de droit public dont ils auraient été le fonctionnaire ou l’agent public dans les trois dernières années. »

Mme la présidente. L’amendement n° 371, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement souhaite la suppression de l’article 16 ter AA, relatif à l’activité de représentant d’intérêts.

En effet, une interdiction générale et absolue d’exercice d’une activité de représentant d’intérêts, sans limitation relative à son champ d’application matériel, serait, à nos yeux, contraire à la Constitution.

Par ailleurs, les dispositions relatives au départ vers le secteur concurrentiel, notamment en vue d’exercer des activités de conseil, telles qu’elles sont prévues par les articles 25 septies et 25 octies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, permettent déjà d’encadrer ce type de situations, tout comme les dispositions du code pénal relatives à la prise illégale d’intérêts.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement souhaite la suppression de cet article.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Le Gouvernement souhaite supprimer un article adopté en commission sur l’initiative des groupes socialiste et républicain et communiste républicain citoyen et écologiste. Le Sénat avait d’ailleurs adopté une disposition similaire dès 2017, sur l’initiative de notre excellent collègue Jacques Genest.

Cet article prévoit que, pendant une durée de trois ans, les anciens fonctionnaires s’abstiennent d’exercer une fonction de représentant d’intérêts auprès de leur ancienne administration.

Il ne s’agit pas d’une interdiction générale et absolue. En effet, l’intéressé pourra toujours exercer des activités de lobbying ; seulement, il ne pourra pas le faire auprès de ses anciens collègues. En outre, cette interdiction sera limitée dans le temps.

Il nous a effectivement semblé que le risque de collusion était particulièrement élevé, et que cela justifiait de déroger au dispositif de contrôle devant la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 371.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 16 ter AA.

(Larticle 16 ter AA est adopté.)

Article 16 ter AA (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article 16 ter B

Article 16 ter A

I. – L’article 25 nonies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée est ainsi modifié :

1° Après le I, il est inséré un I bis ainsi rédigé :

« I bis. – Les III et IV de l’article 25 octies de la présente loi ne s’appliquent pas aux agents publics qui exercent des fonctions mentionnées au I de l’article 23 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique. » ;

2° Au premier alinéa du II, les mots : « 25 sexies et » sont supprimés.

II. – (Non modifié) Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° À la fin du 3° du I de l’article L. 1313-10, les mots : « , à l’exception de l’article 25 septies de la même loi » sont supprimés ;

2° À la fin du quatrième alinéa de l’article L. 5323-4, les mots : « , à l’exception de l’article 25 septies de la même loi » sont supprimés. – (Adopté.)

Article 16 ter A
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article 16 ter (Texte non modifié par la commission)

Article 16 ter B

(Supprimé)

Article 16 ter B
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 16 ter - Amendement n° 287 rectifié

Article 16 ter

(Non modifié)

Les départements ministériels, les régions, les départements, les collectivités territoriales de plus de 80 000 habitants, les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 80 000 habitants et les établissements publics hospitaliers dotés d’un budget de plus de 200 millions d’euros publient chaque année, sur leur site Internet, la somme des dix rémunérations les plus élevées des agents relevant de leur périmètre, en précisant également le nombre de femmes et d’hommes figurant parmi ces dix rémunérations les plus élevées.

Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er octobre de chaque année, un rapport sur les hautes rémunérations dans la fonction publique. Pour chacune des trois fonctions publiques, ce rapport précise le montant moyen et le montant médian des rémunérations au dernier centile, le nombre d’agents concernés et les principaux corps ou emplois occupés. Ce rapport présente également l’ensemble des informations mentionnées au premier alinéa.

Mme la présidente. L’amendement n° 506 rectifié bis, présenté par MM. Chaize, Husson, Charon et Sido, Mme Ramond, MM. D. Laurent, Babary, Cardoux, B. Fournier, Priou et Brisson, Mmes Morhet-Richaud, Lherbier et Deromedi et MM. Poniatowski et Kennel, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Patrick Chaize.

M. Patrick Chaize. Cet article comporte des dispositions excessives s’apparentant davantage à du voyeurisme qu’à une volonté réelle de transparence.

La communication de données portant sur des éléments de rémunération doit viser un but précis et s’inscrire dans un cadre qu’il convient de définir. Ainsi, si la volonté de récolter des informations portant sur les rémunérations à des fins statistiques, comme le précise l’alinéa 2 du présent article, s’entend tout à fait, je m’interroge sur l’intérêt de leur publication sur le site internet des collectivités et des administrations concernées. Dans un contexte national déjà sensible, la pertinence et la justesse des conclusions qui peuvent être tirées par les internautes de la publication de tels éléments peuvent être mises en cause.

C’est pourquoi je propose la suppression de cet alinéa.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. L’Assemblée nationale a prévu que les employeurs publics les plus importants publient sur leur site internet la somme de leurs dix rémunérations les plus élevées. L’amendement de Patrick Chaize tend à supprimer ce dispositif ; je remercie notre collègue de susciter ce débat, même si la commission émet un avis défavorable.

En effet, il nous semble que le dispositif adopté par l’Assemblée nationale représente un bon compromis, notamment en ce qu’il garantit l’anonymisation des données de ces dix rémunérations.

En outre, je le rappelle, la commission d’enquête sénatoriale sur la haute fonction publique a appelé à plus de transparence en la matière.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Je partage l’avis de M. le rapporteur.

Je veux en outre insister sur le caractère anonyme des données diffusées. Il y avait – il y a toujours –, sur toutes les travées, dans toutes les familles politiques de notre pays, des demandes d’une meilleure transparence en la matière, pouvant aller jusqu’à des mesures nominatives. Gérald Darmanin et moi-même nous sommes toujours opposés, dans nos fonctions respectives, à la publication d’informations nominatives sur la rémunération de telle ou telle personne.

Nous considérons que la publication de la somme des dix plus hautes rémunérations, qui permet de déduire une moyenne, avec une répartition par sexe – cela donnera une idée des écarts de rémunération entre femmes et hommes au plus haut niveau hiérarchique –, est une mesure à la fois suffisamment protectrice de l’anonymat et respectueuse de la demande de transparence.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 506 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements et d’un sous-amendement faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 376, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

Le Gouvernement remet au Parlement, en annexe au rapport annuel sur l’état de la fonction publique, avant le 1er novembre de chaque année, un état des hautes rémunérations dans la fonction publique. Pour chacune des trois fonctions publiques, cette annexe précise le montant moyen et le montant médian des rémunérations au dernier centile, le nombre d’agents concernés et les principaux corps ou emplois occupés. Cette annexe comprend également les informations mentionnées au premier alinéa.

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. L’Assemblée nationale a adopté, avec l’accord du Gouvernement, le principe d’une publication annuelle portant sur les dix plus hautes rémunérations – nous venons d’en évoquer les dispositions.

Le Gouvernement propose, au travers du présent amendement, que cette étude des plus hautes rémunérations soit intégrée dans le rapport annuel sur l’état de la fonction publique. Cela nous paraît constituer une mesure de simplification – un rapport plutôt que deux –, et il nous semble utile d’intégrer les éléments relatifs aux plus hautes rémunérations au cœur des informations sur l’ensemble de la fonction publique, avec un point de vue comparatiste, afin que chaque administration, chaque ministère, puisse se situer.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 595, présenté par Mmes N. Delattre, M. Carrère et Costes, MM. Castelli, Collin, Guérini et Gold, Mmes Guillotin et Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Requier et Vall, est ainsi libellé :

Amendement n° 376, alinéa 3, après la deuxième phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Elle précise également, concernant ces corps ou emplois occupés, le nombre d’agents en mobilité temporaire ou définitive, et, le cas échéant, leur situation au regard de l’engagement de servir pendant une durée minimale et de l’obligation conséquente de remboursement des sommes fixées par la réglementation applicable.

La parole est à Mme Véronique Guillotin.

Mme Véronique Guillotin. Cela a été évoqué au cours des échanges précédents, ce sous-amendement, cohérent avec nos amendements sur ce thème, vise à inscrire dans l’annexe du rapport annuel sur l’état de la fonction publique, remis par le Gouvernement au Parlement, des éléments de nature à favoriser un meilleur contrôle des dispositifs de remboursement de la pantoufle des hauts fonctionnaires.

Il s’agit ainsi d’assurer que ceux qui quittent définitivement la fonction publique sont identifiés et que leur situation, au regard de leur engagement décennal, est effectivement régularisée.

Mme la présidente. L’amendement n° 245, présenté par M. Collombat, Mmes Assassi, Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 2, première phrase

Remplacer les mots :

les hautes rémunérations

par les mots :

les rémunérations (salaires, primes, émoluments annexes) de plus de 120 000 euros bruts par an

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. L’exercice consistant à essayer de connaître les revenus exacts des très hauts fonctionnaires n’est pas simple… Aussi, la manière la plus simple de les connaître consiste à fixer une rémunération plancher ; je propose 120 000 euros bruts par an, ce qui me paraît constituer un revenu confortable et représente une contrainte gérable.

On a parlé de voyeurisme pour qualifier cette manie consistant à vouloir savoir ce que les gens gagnent. Je ferai néanmoins remarquer ceci : si ce que l’on croit savoir du projet de loi sur l’exercice des mandats locaux – projet de loi qui instaurerait un pseudo-statut de l’élu – se concrétise, vous verrez que l’on n’aura pas les mêmes pudeurs avec les élus locaux. En effet, les collectivités devront publier toutes les rémunérations et indemnités des élus, qu’il s’agisse du maire d’une commune de cinquante habitants ou de celui d’une ville d’un million d’habitants ; et il est, ma foi, normal que nos concitoyens sachent combien leurs élus gagnent.

Mais avec les fonctionnaires, je constate qu’il faut manier la porcelaine avec beaucoup de précautions…

Mme la présidente. L’amendement n° 544 rectifié bis, présenté par MM. Chaize, Husson, Charon et Sido, Mme Ramond, MM. D. Laurent, Babary, Cardoux, B. Fournier, Priou et Brisson, Mmes Morhet-Richaud, Lherbier et Deromedi et MM. Poniatowski et Kennel, est ainsi libellé :

Alinéa 2, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. Patrick Chaize.

M. Patrick Chaize. Il s’agissait d’un amendement de coordination avec mon amendement précédent.

Je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 544 rectifié bis est retiré.

Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. La commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 376 du Gouvernement ; il s’agit de centraliser les informations au sein du rapport annuel sur l’état de la fonction publique, ce qui donnera à ces données une meilleure visibilité. En outre, cela permet de préciser la date de remise de ce rapport annuel, fixée au 1er novembre de chaque année.

La commission a aussi émis un avis favorable sur le sous-amendement n° 595, qui vise à introduire des éléments relatifs au remboursement de la pantoufle dans le rapport annuel sur les plus hautes rémunérations de la fonction publique. Nous pourrons, le cas échéant, améliorer la rédaction de cette disposition en commission mixte paritaire.

Enfin, il n’a pas semblé pertinent à la commission de fixer, dans la loi, un montant fixe de rémunération. Le Parlement pourra toujours demander au Gouvernement d’enrichir son rapport si nécessaire. En outre, les informations publiées concerneront également des rémunérations inférieures à 120 000 euros bruts annuels, donc l’amendement n° 245 pourrait restreindre le contenu du rapport du Gouvernement, ce qui ne semble pas souhaitable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement a émis un avis favorable sur le sous-amendement présenté par Mme Guillotin ; son adoption permettra d’aller plus loin en matière d’information sur les remboursements de pantoufle, évoqués précédemment au travers d’amendements qui nous semblaient moins opérationnels et moins acceptables.

Je partage l’avis du rapporteur sur l’amendement n° 245 ; fixer un seuil de 120 000 euros par an pour déterminer la publication de la rémunération serait, je pense, contraire à l’objectif des auteurs de l’amendement, puisque seulement 1 % des agents publics gagnent plus de 7 000 euros par mois. Fixer un seuil de 1 % par ministère permet au contraire d’atteindre ce niveau de rémunération, alors que, je le répète, le montant proposé au travers du présent amendement restreindrait le champ du rapport proposé par l’Assemblée nationale. Avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. L’une des meilleures façons de brouiller les pistes, pour ceux qui sont passés maîtres dans cet art, consiste à calculer des pourcentages. C’est ainsi qu’un rapport de l’Assemblée nationale sur le pantouflage indique que les fonctionnaires se trouvant dans cette situation représentent moins de 1 % des effectifs. C’est vrai, mais le problème n’est pas là ; le problème vient non pas de l’instituteur qui ouvre une pizzeria, mais des gens qui exercent des responsabilités, qui décident, qui ont un pouvoir et qui passent d’une situation à l’autre.

Par conséquent, plus on élargit l’échantillon – pour être « plus réaliste » ou pour toute autre raison –, plus on passe à côté du sujet. J’attends donc de voir ce que donnera votre ratio de 1 %. S’il s’agit de 1 % de l’ensemble des salaires du ministère des finances, tout compris, vous n’aurez pas un résultat pertinent ; si, en revanche, vous ne retenez dans l’échantillon que les postes à responsabilités et que vous faites la moyenne des rémunérations, vous n’aurez pas le même résultat…

Cela dit, tout cela est bien connu ; ce n’est qu’un vaste jeu de cache-cache ! Vous allez encore sortir brillamment vainqueurs de nos échanges,…

M. Loïc Hervé, rapporteur. Oh !

M. Pierre-Yves Collombat. … mais le problème demeure et, si l’on ne prend pas de décisions claires, compréhensibles par tout le monde, la situation actuelle perdurera : une situation de méfiance généralisée, parfois à raison, mais souvent à tort.

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 595.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 376, modifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° 245 n’a plus d’objet.

Je mets aux voix l’article 16 ter, modifié.

(Larticle 16 ter est adopté.)

Article 16 ter (Texte non modifié par la commission)
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Article 16 quater

Article additionnel après l’article 16 ter

Mme la présidente. L’amendement n° 287 rectifié, présenté par Mme Lavarde, MM. Delahaye, Rapin et Husson, Mme Imbert, M. Canevet, Mme Ramond, MM. Vaspart, A. Marc, Chevrollier et Karoutchi, Mme Estrosi Sassone, MM. Decool et Babary, Mme Renaud-Garabedian, M. Bascher, Mme Lamure, MM. Bazin et Mouiller, Mme Férat, MM. Laugier, D. Laurent et Magras, Mme L. Darcos, MM. Louault, Daubresse, Kern, Guerriau et Lefèvre, Mmes Doineau et Deromedi, MM. Fouché, Savin, Bonhomme, Moga, Brisson et Cuypers, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonnecarrère et Henno, Mme Duranton, M. Piednoir, Mme Vullien, MM. Adnot, Mandelli et Guené et Mme Lherbier, est ainsi libellé :

Après l’article 16 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les rémunérations hauts fonctionnaires en poste dans les autorités administratives indépendantes, dans les entreprises relevant du secteur public et dans les administrations déconcentrées sont déterminées par référence à une grille commune.

La cohérence des rémunérations effectives avec celles perçues par les fonctionnaires en poste en administration centrale fait l’objet d’un contrôle annuel par la Cour des comptes.

La parole est à Mme Christine Lavarde.

Mme Christine Lavarde. Il s’agit encore de la traduction, sur un autre thème, de l’une des préconisations de la commission d’enquête du Sénat sur les mutations de la haute fonction publique.

J’ai l’impression que nous n’avons pas tous entendu la même chose au cours des quelque quarante auditions de cette commission d’enquête. Nous venons de nous intéresser aux hautes rémunérations et, s’agissant de fonction publique, notamment de haute fonction publique, un problème plus important que celui de savoir si les gens sont trop payés me semble résider dans la différence de traitement entre agents ayant le même niveau indiciaire, mais touchant des primes très différentes en fonction de l’administration dans laquelle ils travaillent : selon qu’ils sont en administration centrale ou déconcentrée, au ministère de la transition écologique et solidaire ou au ministère des finances, en détachement sur contrat dans une autorité administrative indépendante ou un ministère.

Ainsi, quand les personnes détachées dans une autorité administrative indépendante ou à Bercy retournent dans leur ministère d’origine – le ministère de la transition écologique et solidaire ou un autre –, se posent des problèmes de réaffectation, parce qu’on ne peut plus les rémunérer au même niveau.

L’objet de cet amendement est d’instituer une instance centralisée ; la pédagogie est l’art de la répétition, donc je ne désespère pas que M. le secrétaire d’État finisse par entendre qu’il y a besoin de créer une véritable direction des ressources humaines unique pour la catégorie A+. Cette direction aurait un droit de regard et disposerait de l’ensemble de ces informations, afin de favoriser des passages réellement fluides entre les différentes zones d’action de ces hauts fonctionnaires.

Aujourd’hui, cette question de rémunération différenciée représente un véritable frein aux mobilités entre les ministères et les autorités publiques.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. La commission est réservée sur l’amendement de Mme Lavarde, même si elle comprend et partage en grande partie ses objectifs. Elle a instauré, à l’article 16 quater, une grille de rémunération harmonisée pour les autorités publiques indépendantes et les autorités administratives indépendantes.

Nous identifions dans cet amendement au moins trois difficultés juridiques.

En premier lieu, le dispositif de l’amendement mêle plusieurs réalités juridiques – fonctionnaires en détachement, en disponibilité ou mis à disposition –, et il est difficile de faire masse de ces différentes situations administratives.

En second lieu, les autorités administratives indépendantes, auxquelles il faudrait d’ailleurs ajouter les autorités publiques indépendantes, sont régies par un statut spécifique, d’origine sénatoriale. Ce statut leur garantit une liberté de recrutement, dans les limites de leur budget et, pour en connaître une en particulier – la Commission nationale de l’informatique et des libertés –, je puis vous assurer que c’est essentiel. Le nouveau jaune budgétaire sur les autorités administratives indépendantes et les autorités publiques indépendantes favorise également une certaine transparence.

En troisième lieu, les entreprises du secteur public, c’est-à-dire les sociétés dans lesquelles l’État est majoritaire – l’INSEE en recensait, à la fin de 2015, plus de 1 600, qui employaient près de 800 000 salariés –, comme Areva, ont besoin de compétences pointues, surtout dans des domaines concurrentiels ou qui vont le devenir. Surtout, les fonctionnaires qui travaillent dans ces structures seraient défavorisés par rapport aux agents de droit privé, et nous aurions là une difficulté d’ordre constitutionnel. Le problème est d’ailleurs plus global, puisque l’ancien PDG de Renault n’était pas un fonctionnaire…

Enfin, je signale que ces structures sont déjà contrôlées par la Cour des comptes.

La commission vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Je partage l’avis du rapporteur.

Je veux ajouter deux éléments.

D’une part, en l’état du texte, il est prévu qu’un décret définisse les modalités d’encadrement de la rémunération dans les autorités administratives indépendantes, avec une possibilité de différenciation, mais une transparence des critères et des règles.

D’autre part, les autorités administratives indépendantes visées – mais la démonstration serait valable pour les entreprises publiques – ont des caractéristiques extrêmement différentes. Il y a des autorités administratives indépendantes dont la présidence peut être particulièrement rémunératrice, et d’autres dont la rémunération peut être très faible. Cela dépend de la nature de l’activité, de l’intensité et du rythme des réunions et des responsabilités assumées par le président.

Cette extrême hétérogénéité, sur laquelle nous reviendrons lors de l’examen d’autres amendements, y compris gouvernementaux, nous incite à ne pas privilégier votre solution, celle d’une grille commune, mais plutôt à renvoyer au décret, tout en améliorant – c’est un travail que nous pouvons faire ensemble et c’est aussi un engagement que je prends – les conditions de transparence de la rémunération dans les autorités administratives indépendantes. C’était en effet là que résidait le principal défaut du système.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Madame Lavarde, l’amendement n° 287 rectifié est-il maintenu ?

Mme Christine Lavarde. Je vais le retirer, parce que j’entends qu’il pose des problèmes de rédaction.

J’entends également qu’une partie du problème a été identifiée, pour ce qui concerne les autorités administratives indépendantes, notamment la rémunération de leurs présidents. Cela dit, dans les autorités administratives indépendantes, il n’y a pas qu’un président ; des fonctionnaires peuvent y être détachés sous contrat, dans des conditions beaucoup plus avantageuses que celles de leur ministère d’origine, ce qui pose la question de leur retour dans leur organisme d’origine à la fin du contrat.

En outre, il y a un point sur lequel vous n’avez pas répondu, à savoir les différences de primes entre les personnes qui ont un niveau d’indice et des fonctions équivalents – chef de bureau, sous-directeur –, mais qui touchent des primes de niveaux très différents selon leur ministère de rattachement. Ce phénomène explique d’ailleurs la défection de certains corps à l’égard de leur ministère d’origine et dont les membres préfèrent travailler dans d’autres ministères. Ce problème demeurera, malgré les avancées que représentera le décret, même s’il est déjà positif d’avancer un peu…

Je retire mon amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 287 rectifié est retiré.

Article additionnel après l'article 16 ter - Amendement n° 287 rectifié
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Article 16 quinquies (Texte non modifié par la commission)

Article 16 quater

I. – Le titre Ier de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes est ainsi modifié :

1° L’article 4 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du deuxième alinéa, la référence : « articles 5 » est remplacée par les références : « deux premiers alinéas de l’article 5, les articles 6 à 8, 9 » ;

b) Au début du troisième alinéa, sont ajoutés les mots : « Les deux premiers alinéas de » ;

2° Il est ajouté un article 8-1 ainsi rédigé :

« Art. 8-1. – Un décret en Conseil d’État détermine les modalités de rémunération des membres des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes. Ce décret prévoit les conditions dans lesquelles le montant des pensions de retraite perçues par les membres retraités est déduit de la rémunération qui leur est versée. »

II. – Le troisième alinéa de l’article L. 131 du code des postes et des communications électroniques est supprimé.

II bis (nouveau). – Le dernier alinéa de l’article L. 592-8 du code de l’environnement est supprimé.

II ter (nouveau). – La première phrase du cinquième alinéa de l’article 5 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est supprimée.

II quater (nouveau). – Le dix-septième alinéa de l’article 9 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés est supprimé.

III. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2020.

Par dérogation, la seconde phrase de l’article 8-1 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes, telle qu’elle résulte du I du présent article, s’applique aux membres nommés à partir du 1er janvier 2020.

IV. – (Supprimé) – (Adopté.)

Article 16 quater
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Article 17

Article 16 quinquies

(Non modifié)

I. – L’article 5 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le président ne peut être âgé de plus de soixante-huit ans le jour de sa nomination ou de son renouvellement. »

II. – Le I s’applique aux présidents nommés, élus ou renouvelés à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi.

Mme la présidente. L’amendement n° 596, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer le mot :

soixante-huit

par le mot :

soixante-dix

Monsieur le secrétaire d’État, voulez-vous présenter par la même occasion l’amendement n° 597 du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 597, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 3

1° Après la référence :

I

insérer les mots :

du présent article

2° Remplacer les mots :

l’entrée en vigueur

par les mots :

la publication

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement présente deux amendements à l’article 16 quinquies.

L’amendement n° 596 vise à modifier le fond de l’article, qui limite à 68 ans l’âge d’activité d’un président d’autorité administrative indépendante.

L’amendement n° 597 a une vocation rédactionnelle ; il tend à clarifier les conditions d’entrée en vigueur de l’article.

Pourquoi le Gouvernement souhaite-t-il porter, au travers de l’amendement n° 596, de 68 ans à 70 ans l’âge maximal du président à sa nomination ? Pour une raison extrêmement simple – en tout cas, je vais essayer de l’expliquer aussi simplement que possible – : le vivier de candidats pour exercer ses responsabilités n’est pas aussi large qu’on pourrait le croire.

En effet, d’une part, de tels postes nécessitent de l’expérience, de l’expertise et un minimum de recul, ce qui implique une carrière, sinon derrière soi, en tout cas suffisamment avancée. D’autre part, je l’ai évoqué voilà un instant en répondant à Mme Lavarde, la rémunération des présidents d’autorité administrative indépendante est extrêmement variable. Il y a ainsi des autorités administratives indépendantes dont le président est rémunéré entre 10 000 et 20 000 euros par an, ce qui ne correspond évidemment pas, eu égard au niveau de technicité demandé, à une rémunération de fonctionnaires en activité.

Enfin, nous le savons, l’une des garanties d’indépendance du président de certaines autorités administratives indépendantes tient au fait que celui-ci ne peut se retrouver en difficulté à l’issue de sa présidence. Pour dire les choses un peu brutalement, il est parfois utile, pour certains postes, de nommer des personnes qui n’auront plus, on le sait, de carrière par la suite. C’est une forme de gage d’indépendance pour eux.

Dans certains corps et dans certaines instances, l’âge de mise à la retraite s’élève à 67 ans ou à 68 ans. Aussi, en fixant l’âge maximal à 68 ans, le vivier s’en trouve, on le comprend aisément, particulièrement resserré.

J’ajoute que nous rencontrerions une autre difficulté – totalement pragmatique et plutôt liée à l’application de cette disposition, si elle était maintenue –, à savoir qu’un certain nombre d’autorités administratives indépendantes ont d’ores et déjà, au sein de leur collège, extrêmement peu de candidats, voire aucun, qui respecteraient la limite d’âge. Cela complexifierait les difficultés que je viens d’évoquer.

Pour toutes ces raisons, nous proposons de relever l’âge limite de nomination de 68 ans à 70 ans.

L’amendement n° 597 est, je le répète, rédactionnel ; il porte sur les modalités d’entrée en application de l’article.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Ces amendements ont été déposés aujourd’hui. Ma collègue Catherine Di Folco et moi-même émettons donc un avis à titre personnel.

Conformément à l’article 16 quinquies, le président d’une autorité administrative indépendante ne devra pas avoir plus de 68 ans au moment de sa nomination ou de son renouvellement ; il s’agit là de la rédaction issue de l’Assemblée nationale.

Ce dispositif s’inspire du droit applicable aux présidents de conseil d’administration et aux directeurs des établissements publics de l’État.

Votre amendement, monsieur le secrétaire d’État, tend à porter cet âge limite à 70 ans. Je doute personnellement qu’un allongement de deux ans suscite vraiment l’apparition d’un vivier beaucoup plus important.

M. André Reichardt. Cela change tout, je pourrais postuler… (Sourires.)

M. Loïc Hervé, rapporteur. Peut-être cet amendement a-t-il vocation à traiter des situations personnelles ou des projets de nomination ? Cela expliquerait ce dépôt tardif…

Mme Éliane Assassi. Pour qui est-ce ? (Sourires.)

M. Loïc Hervé, rapporteur. En l’état actuel des choses, Mme Di Folco et moi-même préférons en rester à la rédaction issue de l’Assemblée nationale et présentée à la commission des lois.

En revanche, nous émettons un avis favorable sur l’amendement rédactionnel n° 597.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 596.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 597.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 16 quinquies, modifié.

(Larticle 16 quinquies est adopté.)

Article 16 quinquies (Texte non modifié par la commission)
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 17 - Amendement n° 464 rectifié

Article 17

I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par ordonnances toute mesure relevant du domaine de la loi visant à :

1° Redéfinir la participation des employeurs mentionnés à l’article 2 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires au financement des garanties de protection sociale complémentaire de leurs personnels ainsi que les conditions d’adhésion ou de souscription de ces derniers, pour favoriser leur couverture sociale complémentaire ;

2° Faciliter la prise en charge des personnels des employeurs mentionnés au même article 2 en simplifiant l’organisation et le fonctionnement des instances médicales et de la médecine agréée, y compris les services de médecine de prévention et de médecine préventive, et en rationalisant leurs moyens d’action ;

3° Simplifier les règles applicables aux agents publics relatives à l’aptitude physique à l’entrée dans la fonction publique, aux différents congés et positions statutaires pour maladies d’origine non professionnelle ou professionnelle ainsi qu’aux prérogatives et obligations professionnelles des agents publics intervenant dans les dossiers d’accidents du travail et de maladies professionnelles ;

4° Étendre les possibilités de recours au temps partiel pour raison thérapeutique et au reclassement par suite d’une altération de l’état de santé pour favoriser le maintien dans l’emploi des agents publics ou leur retour à l’emploi ;

5° Clarifier, harmoniser et compléter, en transposant et en adaptant les évolutions intervenues en faveur des salariés relevant du code du travail et du régime général de sécurité sociale, les dispositions applicables aux agents publics relatives au congé de maternité, au congé pour adoption, au congé de paternité et d’accueil de l’enfant et au congé de proche aidant.

II. – (Non modifié) Les ordonnances prévues aux 3°, 4° et 5° du I sont prises dans un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi.

Les ordonnances prévues aux 1° et 2° du même I sont prises dans un délai de quinze mois à compter de la publication de la présente loi.

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de chaque ordonnance.

III (nouveau). – La loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale est ainsi modifiée :

1° L’article 26-1 est ainsi modifié :

a) Les mots : « ou des services » sont remplacés par les mots : « , de médecine de contrôle ou » ;

b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Ces services peuvent également être mutualisés avec les autres versants de la fonction publique. » ;

2° Après le 10° de l’article 57, il est inséré un 10° bis ainsi rédigé :

« 10° bis À un congé de proche aidant, dans les conditions fixées aux articles L. 3142-16 à L. 3142-22, L. 3142-24, L. 3142-25-1 et L. 3142-27 du code du travail. Avant et après son congé, le fonctionnaire a droit à l’entretien professionnel prévu à l’article 76 de la présente loi. » ;

3° L’article 85-1 est ainsi modifié :

a) Le début de la première phase est ainsi rédigé : « Le fonctionnaire à l’égard duquel une procédure tendant à reconnaître son inaptitude à l’exercice de ses fonctions a été engagée… (le reste sans changement). » ;

b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Pendant son congé pour raison de santé, le fonctionnaire peut, sur la base du volontariat et avec l’accord de son médecin traitant, suivre une formation qualifiante ou un bilan de compétences. » ;

4° Le premier alinéa de l’article 108-2 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, la seconde occurrence du mot : « collectivités » est remplacée par les mots : « employeurs publics » ;

b) À la deuxième phrase, les mots : « collectivités et établissements » sont remplacés par les mots : « employeurs publics » ;

c) À la dernière phrase, les mots : « l’autorité territoriale » sont remplacés par les mots : « l’employeur public » ;

5° Après l’article 108-3, il est inséré un article 108-3-1 ainsi rédigé :

« Art. 108-3-1. – Les agents qui occupent des emplois présentant des risques professionnels majeurs sont convoqués à un entretien de carrière afin d’examiner les difficultés rencontrées et de déterminer, le cas échéant, des actions de formation et de reconversion professionnelles. Cet entretien est assuré par l’autorité territoriale ou par le centre de gestion.

« Un décret fixe la liste des emplois concernés et la périodicité de l’entretien. »

IV (nouveau). – La loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État est ainsi modifiée :

1° Après le 9° de l’article 34, il est inséré un 9° bis ainsi rédigé :

« 9° bis À un congé de proche aidant, dans les conditions fixées aux articles L. 3142-16 à L. 3142-22, L. 3142-24, L. 3142-25-1 et L. 3142-27 du code du travail. Avant et après son congé, le fonctionnaire a droit à l’entretien professionnel prévu à l’article 55 de la présente loi. » ;

2° Après l’article 62, il est inséré un article 62 bis ainsi rédigé :

« Art. 62 bis. – Les agents qui occupent des emplois présentant des risques professionnels majeurs sont convoqués à un entretien de carrière afin d’examiner les difficultés rencontrées et de déterminer, le cas échéant, des actions de formation et de reconversion professionnelles.

« Un décret fixe la liste des emplois concernés et la périodicité de l’entretien. » ;

3° Le dernier alinéa de l’article 63 est ainsi modifié :

a) Le début de la première phase est ainsi rédigé : « Le fonctionnaire à l’égard duquel une procédure tendant à reconnaître son inaptitude à l’exercice de ses fonctions a été engagée (le reste sans changement). » ;

b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Pendant son congé pour raison de santé, le fonctionnaire peut, sur la base du volontariat et avec l’accord de son médecin traitant, suivre une formation qualifiante ou un bilan de compétences. »

(nouveau). – La loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière est ainsi modifiée :

1° Après le 9° de l’article 41, il est inséré un 9° bis ainsi rédigé :

« 9° bis À un congé de proche aidant, dans les conditions fixées aux articles L. 3142-16 à L. 3142-22, L. 3142-24, L. 3142-25-1 et L. 3142-27 du code du travail. Avant et après son congé, le fonctionnaire a droit à l’entretien professionnel prévu à l’article 65 de la présente loi. » ;

2° Après l’article 71, il est inséré un article 71-1 ainsi rédigé :

« Art. 71-1. – Les agents qui occupent des emplois présentant des risques professionnels majeurs sont convoqués à un entretien de carrière afin d’examiner les difficultés rencontrées et de déterminer, le cas échéant, des actions de formation et de reconversion professionnelles.

« Un décret fixe la liste des emplois concernés et la périodicité de l’entretien. » ;

3° L’article 75-1 est ainsi modifié :

a) Le début de la première phase est ainsi rédigé : « Le fonctionnaire à l’égard duquel une procédure tendant à reconnaître son inaptitude à l’exercice de ses fonctions a été engagée… (le reste sans changement). ;

b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Pendant son congé pour raison de santé, le fonctionnaire peut, sur la base du volontariat et avec l’accord de son médecin traitant, suivre une formation qualifiante ou un bilan de compétences. »

VI (nouveau). – À titre expérimental et pour une durée de cinq ans à compter de la publication de la présente loi, l’autorité administrative établit une liste de médecins agréés généralistes et spécialistes autorisés à exercer les fonctions de médecin de prévention dans les trois versants de la fonction publique.

Cette liste est établie sur proposition des agences régionales de santé.

Un décret en Conseil d’État définit les modalités de mise en œuvre de l’expérimentation et précise les formations requises pour l’agrément des médecins généralistes et spécialistes.

Une évaluation de l’expérimentation est présentée au Parlement un an avant son terme.

Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi, sur l’article.

Mme Éliane Assassi. L’article 17 est en fait un article à plusieurs tiroirs. Dans le premier tiroir, on trouve notamment la protection sociale complémentaire des agents publics.

Selon le livre blanc Santé et mieux-être au travail des agents territoriaux de la Mutuelle nationale territoriale, la MNT, 91 % des agents et 75 % des élus sont favorables à l’amélioration de la protection sociale des agents.

Malheureusement, vous avez refusé, monsieur le secrétaire d’État, d’inscrire dans la loi le principe de la participation obligatoire.

Pourtant, dans le secteur privé, les employeurs sont obligés de participer au financement de la protection sociale complémentaire des salariés.

Le Gouvernement, qui mène par ailleurs une politique d’affaiblissement du périmètre de la sécurité sociale au profit des complémentaires privées, refuse donc aux agents publics de pouvoir se soigner dans de bonnes conditions.

Le Gouvernement doit, d’une part, acter la participation obligatoire au financement de la protection sociale complémentaire avec un minimum de 50 % et, d’autre part, garantir aux collectivités territoriales une dotation de l’État fléchée pour améliorer la prise en charge de la santé et la prévoyance des agents.

Cette mesure n’est pas portée uniquement par notre groupe, puisque, selon un sondage IFOP-MNT d’octobre 2017, les décideurs territoriaux sont favorables à 75 % au caractère obligatoire de la participation financière des collectivités à la protection sociale des agents, avec au moins 15 euros en santé par mois et par agent et 5 euros en prévoyance.

L’article 17 renvoie aux ordonnances et aux négociations avec les organisations syndicales, alors que le bon sens aurait voulu qu’y figurent les résultats des négociations entre le Gouvernement et les organisations syndicales sur la participation au financement de la protection sociale complémentaire.

Mme Éliane Assassi. J’indique, madame la présidente, que mon intervention sur l’article vaut défense de mon amendement n° 35.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Loïc Hervé, rapporteur. Nous abordons le thème important de la santé au travail. Je rappelle que 67 % des agents publics ressentent des douleurs physiques liées à leur position de travail, et 35 % ont le sentiment que leur travail dégrade leur santé.

Le vieillissement des effectifs renforce cet enjeu, les agents de 50 ans et plus représentant aujourd’hui 33,4 % des effectifs de la fonction publique, avec un vieillissement encore plus marqué dans le versant territorial, où ils sont 40 %.

La situation est particulièrement délicate dans le secteur hospitalier : en 2015, les accidents du travail ont touché 4 % des agents hospitaliers, le plus souvent à la suite d’efforts liés à la manutention des patients.

Au départ, le Gouvernement souhaitait renvoyer l’ensemble du sujet à une ordonnance. La commission a préféré inscrire « en dur » certaines garanties en s’inspirant du rapport de Catherine Di Folco et de Didier Marie Donner un nouveau souffle à la politique du handicap dans la fonction publique, que nous avons cité à nombreuses reprises.

Ces propositions semblent faire consensus entre les parties prenantes. Il s’agit notamment du renforcement de la période de préparation au reclassement, de la mutualisation des médecins de prévention, du rendez-vous de carrière pour les métiers les plus pénibles. J’ajoute que, sur l’initiative de notre collègue Jocelyne Guidez, nous avons également étendu le congé de proche aidant à la fonction publique.

Le texte de la commission permet donc des avancées rapides pour répondre à des problèmes concrets, alors que les ordonnances ne seront pas publiées avant douze à quinze mois.

Enfin, mes chers collègues, nous vous demanderons le retrait de plusieurs de vos amendements qui nous semblent déjà satisfaits par le texte de la commission.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 35 est présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 145 rectifié bis est présenté par MM. Durain, Marie, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Sueur, Sutour, Tourenne, Antiste, Bérit-Débat, Montaugé, Temal et Raynal, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

L’amendement n° 35 a déjà été défendu.

La parole est à M. Jérôme Durain, pour présenter l’amendement n° 145 rectifié bis.

M. Jérôme Durain. Par cet amendement de principe, nous demandons la suppression de l’article 17 qui habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnances en matière de protection sociale complémentaire, de santé au travail, de temps partiel thérapeutique et de congés.

Chacun de ces sujets, de notre point de vue, revêt une grande importance pour les agents publics. Dès lors, il n’y a pas lieu pour le Parlement de s’en dessaisir, d’autant que les quelques orientations évoquées dans l’étude d’impact – fusion des instances médicales, restriction de la visite médicale à un certain type d’emplois – font craindre une moindre prise en compte des enjeux liés à la santé au travail.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable.

Certes, donner une habilitation à légiférer par ordonnances n’est jamais facile pour le Parlement. En l’espèce, la commission a grandement amélioré la rédaction de l’article 17 en inscrivant « en dur » de nouveaux droits pour les agents, que j’ai évoqués à l’instant.

Dans les cas du rendez-vous de carrière et du renforcement de la période préparatoire au reclassement, il s’agit de mieux prévenir les risques professionnels, en s’inspirant du rapport Di Folco-Marie.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. L’avis est défavorable. Nous souhaitons maintenir cette habilitation à légiférer par ordonnances sur des sujets qui sont évidemment importants : la protection sociale complémentaire, la question de la santé au travail et de la prévention des risques psychosociaux et socioprofessionnels.

Le rapport que nous avons commandé aux trois inspections pour dresser un état des lieux de la protection sociale complémentaire et des niveaux de participation des agents publics dans les trois versants de la fonction publique nous sera bientôt remis ; il sera également communiqué aux partenaires sociaux à l’occasion d’une réunion de travail organisée le 18 juillet. C’est sur la base de ce rapport que nous pourrons ouvrir la concertation nécessaire à la rédaction de l’ordonnance.

Par ailleurs, en matière de santé et de médecine professionnelles, M. le Premier ministre a confié à la députée Charlotte Lecocq une mission dont les conclusions, qui nous seront prochainement remises, nourriront cette concertation.

J’aurai l’occasion de revenir sur un certain nombre de dispositions adoptées par la commission des lois, dont nous partageons l’objectif, même si nous considérons qu’elles sont peut-être de nature à préempter la concertation qui est ainsi ouverte avec le rapport parlementaire confié à Mme Lecocq.

Tant la protection sociale complémentaire que la santé au travail réunissent l’ensemble des parties prenantes de la discussion.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 35 et 145 rectifié bis.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L’amendement n° 383, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Après le mot :

adoption,

insérer les mots :

au congé supplémentaire à l’occasion de chaque naissance survenue au foyer de l’agent,

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Le présent amendement vise à ajouter dans le champ de l’habilitation à prendre par voie d’ordonnances des mesures législatives en matière de protection sociale des agents publics les dispositions relatives au congé supplémentaire à l’occasion de chaque naissance, ce qui permettra d’aligner ce congé, non modifié pour les agents publics depuis 1946, sur celui des salariés, codifié à l’article L. 3142-1 du code du travail.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Avis favorable. Cet ajout est cohérent avec le champ de l’habilitation.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 383.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 346 rectifié bis, présenté par Mme Noël, M. D. Laurent, Mme Deromedi, M. Bonhomme, Mme Duranton et MM. Gremillet et Mandelli, est ainsi libellé :

Alinéa 12

Après le mot :

médecine

insérer les mots :

statutaire et

La parole est à Mme Sylviane Noël.

Mme Sylviane Noël. Depuis le 1er janvier 2017, le centre de gestion du Rhône propose un nouveau service aux collectivités, le service de médecine statutaire et de contrôle, qui a pour objet de vérifier l’aptitude à l’embauche d’un candidat et de contrôler la justification médicale des arrêts de travail des agents. Assurée par un médecin agréé intégré au centre de gestion, cette mission est accessible par convention.

Après plusieurs mois de fonctionnement, le centre de gestion a constaté une montée en charge progressive de l’activité opérationnelle, notamment de contrôle, et une baisse sensible de l’absentéisme.

L’objet de cet amendement est de permettre le développement de cette mission, de manière sécurisée, dans l’ensemble des centres de gestion.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. La commission a sécurisé les services de médecine de contrôle des centres de gestion en prenant exemple sur ce qui se pratique dans celui du Rhône.

L’amendement de Mme Noël est de précision : il vise à ajouter le mot « statutaire », notamment pour les visites d’aptitude. Notre avis ne peut être que favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Comme sur d’autres sujets, nous souscrivons à l’objectif, mais nous considérons comme prématuré, à ce stade, d’inscrire cette disposition dans la loi. Nous préférons attendre, d’une part, les conclusions que rendra la députée Charlotte Lecocq et, d’autre part, une concertation avec l’ensemble des centres de gestion.

L’avis est défavorable, pour cette seule raison.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 346 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de onze amendements et d’un sous-amendement faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 440 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 15

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 10° bis À un congé de proche aidant d’une durée de trois mois renouvelable et dans la limite d’un an sur l’ensemble de la carrière lorsque l’une des personnes listées à l’article L. 3142-16 du code du travail présente un handicap ou une perte d’autonomie d’une particulière gravité. Le congé de proche aidant peut être fractionné ou pris sous la forme d’un temps partiel. Pendant le congé de proche aidant, le fonctionnaire n’est pas rémunéré. La durée passée dans le congé de proche aidant est assimilée à une période de service effectif et est prise en compte pour la constitution et la liquidation des droits à pension. » ;

II. – Alinéas 16 à 25

Supprimer ces alinéas.

III. – Alinéa 28

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 9° bis À un congé de proche aidant d’une durée de trois mois renouvelable et dans la limite d’un an sur l’ensemble de la carrière lorsque l’une des personnes listées à l’article L. 3142-16 du code du travail présente un handicap ou une perte d’autonomie d’une particulière gravité. Le congé de proche aidant peut être fractionné ou pris sous la forme d’un temps partiel. Pendant le congé de proche aidant, le fonctionnaire n’est pas rémunéré. La durée passée dans le congé de proche aidant est assimilée à une période de service effectif et est prise en compte pour la constitution et la liquidation des droits à pension. » ;

IV. – Alinéas 29 à 34

Supprimer ces alinéas.

V. – Alinéa 37

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 9° bis À un congé de proche aidant d’une durée de trois mois renouvelable et dans la limite d’un an sur l’ensemble de la carrière lorsque l’une des personnes listées à l’article L. 3142-16 du code du travail présente un handicap ou une perte d’autonomie d’une particulière gravité. Le congé de proche aidant peut être fractionné ou pris sous la forme d’un temps partiel. Pendant le congé de proche aidant, le fonctionnaire n’est pas rémunéré. La durée passée dans le congé de proche aidant est assimilée à une période de service effectif et est prise en compte pour la constitution et la liquidation des droits à pension. » ;

VI. – Alinéas 38 à 47

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. À la suite de mon propos de l’instant précédent, j’indique que le Gouvernement est favorable tant à la création du congé de proche aidant qu’à la mutualisation des services de médecine de prévention et de médecine préventive dans les trois versants de la fonction publique.

Cet amendement vise à conserver ces mesures adoptées en commission des lois tout en sécurisant les droits, s’agissant du congé des proches aidants.

En revanche, nous ne souhaitons pas préempter la concertation à venir avec les organisations syndicales et les employeurs publics sur la question de la prévention de l’inaptitude et le maintien dans l’emploi. C’est pourquoi nous proposons la suppression de ces dispositions.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 577, présenté par Mme Di Folco et M. L. Hervé, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Amendement n° 440, alinéas 4, 5, 9, 10, 14 et 15

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Catherine Di Folco, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Par cet amendement, la commission souhaite préserver ses apports pour mieux protéger la santé des agents et mieux prévenir les risques professionnels.

Issus du rapport Donner un nouveau souffle au handicap dans la fonction publique, ces apports concernent la création d’un rendez-vous de carrière, le renforcement de la période de préparation au reclassement et les réponses face à la pénurie de médecins de prévention.

Mme la présidente. L’amendement n° 498 rectifié ter, présenté par Mmes Guidez et Létard, MM. Milon et Détraigne, Mmes Lavarde et Férat, MM. Guerriau et Decool, Mme N. Delattre, M. Laugier, Mme Goy-Chavent, MM. Piednoir, Lefèvre et Kennel, Mme Malet, M. Karoutchi, Mmes Vullien et Vermeillet, MM. Féraud, Vogel et Henno, Mmes Puissat et Loisier, MM. de Nicolaÿ et Kern, Mme L. Darcos, M. Savary, Mme Sollogoub, M. Janssens, Mmes Noël, Kauffmann et de la Provôté, M. Luche, Mmes Morhet-Richaud, Joissains, Tetuanui et C. Fournier, MM. Le Nay, Laurey et Longeot, Mme Saint-Pé, MM. Laménie et Léonhardt, Mmes Perrot et Lanfranchi Dorgal, MM. Canevet et Menonville, Mmes Dindar et Gruny, MM. Bouloux, Buis, Chasseing et Mouiller, Mme Berthet et MM. Mandelli et A. Marc, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 15, 28 et 37

1° Remplacer la référence :

L. 3142-25-1

par la référence :

L. 3142-26

2° Compléter ces alinéas par une phrase ainsi rédigée :

La durée passée dans le congé de proche aidant est assimilée à une période de service effectif et est prise en compte pour la constitution et la liquidation des droits à pension.

II. – Après les alinéas 15, 28 et 37

Insérer cinq alinéas ainsi rédigés :

« Pour l’application de l’article L. 3142-26 du code du travail aux agents publics civils et militaires, les négociations entre les organisations syndicales de fonctionnaires et les représentants du Gouvernement, les représentants des employeurs publics territoriaux et les représentants des employeurs publics hospitaliers peuvent déterminer :

« a) La durée maximale du congé ;

« b) Le nombre de renouvellements possibles ;

« c) Les délais d’information de l’employeur par le salarié sur la prise du congé et son renouvellement ainsi que la durée du préavis en cas de retour du salarié avant la fin du congé ;

« d) Les délais de demande du salarié et de réponse de l’employeur sur le fractionnement du congé ou sa transformation en période d’activité à temps partiel. » ;

La parole est à Mme Sylvie Vermeillet.

Mme Sylvie Vermeillet. Les dispositions introduites en commission des lois afin de dupliquer aux agents publics les dispositions du code du travail relatives au congé de proche aidant ont omis de faire référence à l’article L. 3142-26 du code du travail. Par ailleurs, le dispositif retenu fait expressément mention de l’article L. 3142-25-1 du même code.

Premièrement, l’article L. 3142-25-1 du code du travail codifie l’article 1er de la loi du 13 février 2018 créant un dispositif de don de jours de repos non pris au bénéfice des proches aidants de personnes en perte d’autonomie ou présentant un handicap. L’article 3 de cette loi prévoit qu’un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application de l’article 1er aux agents publics civils et militaires. Or ce décret a été pris, ce qui rend cette référence inutile.

Deuxièmement, l’article L. 3142-26 du code du travail dispose que « pour mettre en œuvre le droit à congé du salarié mentionné à l’article L. 3142-16, une convention ou un accord de branche ou, à défaut, une convention ou un accord collectif d’entreprise détermine : 1° La durée maximale du congé ; 2° Le nombre de renouvellements possibles ; 3° Les délais d’information de l’employeur par le salarié sur la prise du congé et son renouvellement ainsi que la durée du préavis en cas de retour du salarié avant la fin du congé ; 4° Les délais de demande du salarié et de réponse de l’employeur sur le fractionnement du congé ou sa transformation en période d’activité à temps partiel. »

En omettant de faire référence à cet article, l’actuelle duplication aux fonctionnaires des dispositions relatives au congé de proche aidant n’est que partielle. En apportant une précision, les auteurs de cet amendement visent le même but que la commission.

Considérant que l’article 1er de la loi du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique permet que se tiennent des négociations entre les organisations syndicales de fonctionnaires et les représentants du Gouvernement, les représentants des employeurs publics territoriaux et les représentants des employeurs publics hospitaliers sur des sujets relatifs aux ressources humaines, rien ne fait obstacle à l’application de l’article L. 3142-26 aux agents publics, sous réserve des précisions relatives à la manière dont cet article doit être appliqué aux agents publics. En effet, cet amendement ouvre la possibilité – il ne s’agit pas d’une obligation – de négocier sur les conditions du congé de proche aidant.

Enfin, l’amendement n° 440 rectifié déposé par le Gouvernement a permis de rendre recevable une précision complétant l’objectif de l’amendement.

Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 353 rectifié ter est présenté par Mme Noël, M. D. Laurent, Mme Deromedi, M. Bonhomme, Mme Duranton et MM. Houpert, Gremillet et Mandelli.

L’amendement n° 558 rectifié est présenté par Mmes Rossignol et Monier, MM. P. Joly et Duran, Mme Préville, MM. Temal, Kerrouche, Tissot, Jacquin, Daudigny et Mazuir et Mme Lepage.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I. – Après l’alinéa 15

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…° L’article 72 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le fonctionnaire mis en disponibilité d’office à l’expiration des congés institués par les 2°, 3° et 4° de l’article 57 de la présente loi, peut exercer toute activité ordonnée et contrôlée médicalement au titre de la réadaptation. » ;

II. – Après l’alinéa 18

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

…) Est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Pendant cette période, l’agent peut être mis à disposition du centre de gestion pour exercer une mission définie au deuxième alinéa de l’article 25 de la présente loi. » ;

…° Après l’article 85-1, il est inséré un article 85-… ainsi rédigé :

« Art. 85–… . – Chaque agent bénéficie d’un bilan de carrière périodique au minimum tous les dix ans destiné à prévenir toute situation éventuelle d’inaptitude. Ce bilan est assuré par l’autorité territoriale ou le centre de gestion. Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application de cette disposition. » ;

La parole est à Mme Sylviane Noël, pour présenter l’amendement n° 353 rectifié ter.

Mme Sylviane Noël. Dans la fonction publique territoriale, plus de 76 % des agents sont de catégorie C, exerçant souvent des métiers à hauts facteurs de pénibilité.

Cet amendement a pour objet d’instituer un bilan de carrière, au terme de dix années d’exercice, afin de prévenir des situations éventuelles d’inaptitude, notamment pour les fonctions exposées à des risques professionnels et à l’usure physique, et d’examiner les possibilités d’évolution professionnelle ou de reclassement.

Il a également pour objet de prévoir que, en dehors de la période de préparation au reclassement, un agent en disponibilité d’office pour raison de santé qui n’est pas définitivement inapte à tout emploi pourra exercer des activités ordonnées et contrôlées médicalement au titre de la réadaptation.

Enfin, cet amendement vise à instaurer la possibilité pour un agent, dans le cadre d’une période de préparation au reclassement, d’être mis à disposition par un centre de gestion auprès d’une autre collectivité.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Duran, pour présenter l’amendement n° 558 rectifié.

M. Alain Duran. Il est défendu.

Mme la présidente. L’amendement n° 586, présenté par Mme Di Folco et M. L. Hervé, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 17 et 33

Après le mot :

engagée

insérer les mots :

a droit

II. – Alinéas 29 et 30

Remplacer la référence :

62 bis

par la référence :

62 ter

La parole est à M. le rapporteur.

M. Loïc Hervé, rapporteur. Amendement de coordination.

Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 302 rectifié est présenté par MM. Canevet, Delcros et Moga, Mmes Saint-Pé et Férat, M. Médevielle, Mme Goy-Chavent et MM. Longeot, Kern et Laugier.

L’amendement n° 542 est présenté par MM. de Belenet, Amiel, Bargeton et Buis, Mme Cartron, MM. Cazeau, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Mohamed Soilihi, Navarro, Patient, Patriat et Rambaud, Mme Rauscent, M. Richard, Mme Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 18

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Pendant cette période, l’agent peut également être mis à disposition du centre de gestion pour exercer une mission définie au deuxième alinéa de l’article 25 de la présente loi.

La parole est à Mme Françoise Férat, pour présenter l’amendement n° 302 rectifié.

Mme Françoise Férat. Tous les employeurs publics constatent une augmentation des situations d’inaptitude dans leurs structures.

Ce phénomène touche toutes les collectivités, quelle que soit leur taille, et entraîne une augmentation des demandes de retraite pour invalidité ou des licenciements pour inaptitude.

Notre amendement vise à instaurer la possibilité pour un agent, dans le cadre d’une période de préparation au reclassement, d’être mis à disposition par un centre de gestion auprès d’une autre collectivité pour lui permettre ainsi d’être effectivement reclassé.

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud de Belenet, pour présenter l’amendement n° 542.

M. Arnaud de Belenet. Il est défendu.

Mme la présidente. L’amendement n° 538, présenté par MM. de Belenet, Mohamed Soilihi, Richard, Amiel, Bargeton et Buis, Mme Cartron, MM. Cazeau, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Navarro, Patient, Patriat et Rambaud, Mmes Rauscent et Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 18

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… - Après l’article 85-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, il est inséré un article 85-… ainsi rédigé :

« Art. 85-… – Chaque agent bénéficie d’un bilan de carrière périodique au minimum tous les dix ans destiné à prévenir toute situation éventuelle d’inaptitude. Ce bilan est assuré par l’autorité territoriale ou le centre de gestion. Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article. »

La parole est à M. Bernard Buis.

M. Bernard Buis. Personne n’ignore ici que les agents de catégorie C sont très nombreux au sein de la fonction publique territoriale : 76 % d’entre eux relèvent de cette catégorie. Ce sont ces mêmes agents qui sont exposés quotidiennement à des exigences professionnelles à hauts facteurs de pénibilité, leurs conditions matérielles de travail organisant inévitablement leur usure professionnelle.

Aussi, il semble tout à fait opportun d’instituer un bilan de carrière périodique, qui interviendrait au terme de dix ans d’exercice, et dont l’objet serait de prévenir les situations d’inaptitude et d’examiner les possibilités d’évolution professionnelle.

Ce bilan de carrière périodique compléterait l’entretien de carrière prévu à l’alinéa 24 du même article, qui vise à examiner les difficultés rencontrées par les agents occupant des emplois présentant des risques professionnels majeurs et à déterminer, le cas échéant, des actions de formation et de reconversion professionnelle.

Pour être tout à fait complet, j’indique qu’il est prévu que ce bilan soit assuré par l’autorité territoriale ou le centre de gestion, un décret en Conseil d’État déterminant les modalités d’application de cette disposition.

Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 301 rectifié est présenté par MM. Canevet, Delcros, Moga et Médevielle, Mme Goy-Chavent et MM. Longeot, Kern et Laugier.

L’amendement n° 420 est présenté par M. de Belenet.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 25

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Chaque agent bénéficie d’un bilan de carrière périodique au minimum tous les dix ans destiné à prévenir toute situation éventuelle d’inaptitude. Ce bilan est assuré par l’autorité territoriale ou le centre de gestion. Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application de ces dispositions. »

La parole est à M. Michel Canevet, pour présenter l’amendement n° 301 rectifié.

M. Michel Canevet. Dans chacune de nos collectivités, l’appréhension des risques professionnels est très importante. Aussi, nous pensons qu’il serait nécessaire qu’un bilan de carrière soit établi périodiquement, par exemple tous les dix ans, soit par l’autorité territoriale soit par le centre de gestion s’il est doté d’un service de santé au travail.

D’une part, l’employeur doit prendre en compte la réalité de la situation ; d’autre part, les agents doivent être sensibilisés à ces questions par ce point périodique.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Buis, pour présenter l’amendement n° 420.

M. Bernard Buis. Il est défendu.

Mme la présidente. L’amendement n° 518, présenté par MM. de Belenet, Mohamed Soilihi, Amiel, Bargeton et Buis, Mme Cartron, MM. Cazeau, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Navarro, Patient, Patriat et Rambaud, Mme Rauscent, M. Richard, Mme Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – L’article 72 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le fonctionnaire mis en disponibilité d’office à l’expiration des congés institués par les 2°, 3° et 4° de l’article 57 de la présente loi, peut exercer toute activité ordonnée et contrôlée médicalement au titre de la réadaptation, après avis du comité médical compétent. »

La parole est à M. Arnaud de Belenet.

M. Arnaud de Belenet. Cet amendement vise les cas de disponibilité d’office pour raisons de santé, c’est-à-dire les cas où un agent n’est plus en capacité physique d’assurer ses missions. Ce cas est un peu différent des précédents. Nous proposons d’ajouter une nouvelle voie aux solutions actuelles, qui ne sont pas pleinement satisfaisantes, en permettant à l’agent d’exercer toute activité ordonnée et contrôlée médicalement au titre de la réadaptation. L’avis du comité médical compétent serait alors évidemment requis. Dans le droit actuel, cette possibilité est réservée aux bénéficiaires d’un congé de longue maladie ou de longue durée. Bien évidemment, nous ne pouvons pas sous-estimer l’effet positif d’une activité, même de faible importance, pour un agent qui serait confronté à une telle situation de mise en disponibilité d’office pour raisons de santé.

Nous devons encourager la possibilité de maintenir un lien avec le travail et les missions de service public lorsque cela est médicalement possible.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. L’avis de la commission est favorable sur l’amendement n° 440 rectifié du Gouvernement, qui vise à sécuriser le congé de proche aidant, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 577 de la commission. Le Gouvernement souhaite en effet attendre pour régler les problèmes de santé au travail. Les conclusions du rapport de Mme Di Folco et de M. Marie, qui a fait l’objet d’une concertation avec toutes les parties prenantes, permettent toutefois d’avancer dès à présent.

Nous demandons par conséquent le retrait de l’amendement n° 498 rectifié ter, qui nous paraît partiellement satisfait par l’amendement du Gouvernement.

De même, il nous semble difficile de transposer les modes de négociation du secteur privé au secteur public.

Nous demandons également le retrait des amendements identiques nos 353 rectifié ter et 558 rectifié. Le texte de la commission prévoit d’ores et déjà l’organisation d’un bilan de carrière.

L’avis est favorable sur les amendements identiques nos 302 rectifié et 542, qui tendent à permettre à un agent d’être mis à disposition du centre de gestion pendant la période de préparation au reclassement.

En revanche, considérant qu’ils sont satisfaits, je demande le retrait des amendements nos 538, 301 rectifié et 420 : le texte de la commission prévoit déjà, je l’ai dit, ce bilan de carrière.

Je requiers l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 518 de M. de Belenet, qui vise à permettre à un agent placé en disponibilité d’office pour des raisons de santé de recommencer à travailler. L’idée est intéressante, mais peut-être complexe à mettre en œuvre. Monsieur le secrétaire d’État, nous avons besoin de votre éclairage.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Tout d’abord, je me félicite que les rapporteurs soient d’accord avec le Gouvernement pour sécuriser un certain nombre de dispositions touchant notamment à la création du congé du proche aidant ou à la mutualisation.

Le sous-amendement n° 577 de la commission vise à réinsérer à l’article 17 des dispositions dont j’ai dit qu’elles nous semblaient prématurées, dans la mesure où elles nous paraissent préempter la concertation. Par conséquent, et par cohérence, l’avis est défavorable.

Pour les mêmes raisons que celles qu’a invoquées M. le rapporteur, je suis également défavorable à l’amendement n° 498 rectifié ter, qui vise à préciser la rédaction de l’article 17 relativement au congé de proche aidant.

Pareillement, l’avis est défavorable sur les amendements identiques nos 353 rectifié ter et 558 rectifié, car il existe déjà dans notre droit des dispositions favorisant le maintien dans l’emploi des agents en situation d’inaptitude ou de congé médical. Il nous semble que la concertation autour de l’ordonnance prévue à l’article 17 permettra d’apporter des réponses sans qu’il soit nécessaire d’être aussi précis à ce stade dans la rédaction « en dur », pour reprendre une expression de M. le rapporteur.

Par cohérence avec ce que j’ai dit sur le sous-amendement n° 577, l’avis est défavorable sur l’amendement n° 586 de la commission.

Sur les amendements identiques nos 302 rectifié et 542, nous avons une divergence d’approche avec M. le rapporteur : le Gouvernement n’est pas favorable à l’idée consistant à permettre à un agent en période de préparation au reclassement d’être mis à disposition par un centre de gestion auprès d’une autre collectivité pour exercer des missions temporaires de remplacement. Il nous semble plus opportun de veiller à préserver l’objectif même de la période préparatoire au reclassement, qui est d’accompagner les fonctionnaires reconnus inaptes à l’exercice de leurs fonctions vers un reclassement dans des postes en adéquation avec leur état de santé et leur projet professionnel.

Les mises en situation professionnelle, dans le cadre de collectivités différentes, sont rendues possibles par les textes qui régissent la période préparatoire au reclassement sans qu’il soit nécessaire d’aller jusque vers des mises à disposition, qui nous paraissent être d’une autre nature.

Sur les amendements nos 538, 301 rectifié et 420, nous formulons, comme M. le rapporteur, une demande de retrait ; à défaut, l’avis sera défavorable.

Enfin, je demande le retrait de l’amendement n° 518, qui vise à permettre aux fonctionnaires mis en disponibilité d’office d’exercer toute activité ordonnée et contrôlée médicalement au titre de la réadaptation, car il existe déjà dans notre droit des dispositions tendant à favoriser le maintien dans l’emploi des agents en situation d’inaptitude ou de congé maladie. Je pense ainsi à l’exercice d’une activité ordonnée et contrôlée médicalement au titre de la réadaptation ou au droit, que je viens d’évoquer, à une période de préparation au reclassement.

Cette question se pose – et M. de Belenet l’a souligné – avec une acuité particulière dans la fonction publique territoriale. À notre sens, la question de la prévention de l’inaptitude et du maintien dans l’emploi doit nécessairement s’inscrire dans une démarche commune aux trois fonctions publiques. Dans l’attente des concertations autour de l’habilitation prévue à l’article 17, en l’état, je demande donc le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 577.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 440 rectifié, modifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° 498 rectifié ter n’a plus d’objet.

Je mets aux voix les amendements identiques nos 353 rectifié ter et 558 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 586.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 302 rectifié et 542.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 538.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 301 rectifié et 420.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 518.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 280 rectifié bis, présenté par MM. Reichardt, Kennel, Kern et Daubresse, Mme Puissat, MM. Pierre, Frassa et Longeot, Mmes Lassarade et Raimond-Pavero, MM. Moga et Charon, Mme Deromedi, MM. Brisson, Bonhomme, Sido, Segouin, Gremillet et Mandelli, Mme Delmont-Koropoulis et M. Poniatowski, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – L’article 26-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Le titre II du livre II de la première partie du code du travail et le titre II du livre VI de la quatrième partie du même code s’appliquent à l’exercice de la médecine préventive dans la fonction publique territoriale.

« Les articles L. 315-1 à L. 315-3, les articles L. 323-1 à L. 323-7 du code de la sécurité sociale, relatifs au contrôle de l’absentéisme en cas d’incapacité de travail, s’appliquent à la fonction publique territoriale. »

La parole est à M. André Reichardt.

M. André Reichardt. Le présent amendement vise à étendre l’application des dispositions du code du travail relatives à la médecine du travail à l’exercice de la médecine de la fonction publique. En effet, l’exercice de la médecine du travail a été largement assoupli dans le régime général, et il me semble que la fonction publique territoriale a besoin que ces mesures d’assouplissement lui soient rapidement étendues pour favoriser la préservation des politiques de prévention de la santé au travail.

Il est également proposé d’étendre l’application à la fonction publique des dispositions du code de la sécurité sociale relatives au contrôle de l’absentéisme en cas d’incapacité au travail. Les règles de contrôle de l’absentéisme dans la fonction publique territoriale relèvent de dispositions juridiques complexes, et il serait, à mon sens, cohérent et équitable que ces dispositifs de contrôle de l’absentéisme dans la fonction publique soient similaires à ceux du régime général, garantissant ainsi aux employeurs publics la mise en œuvre d’un système expérimenté, incontestable et efficace dans la lutte contre l’absentéisme abusif au travail, dont on sait qu’il est malheureusement plus important dans la fonction publique que dans le secteur privé.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. L’amendement de M. Reichardt vise à appliquer le code du travail à la médecine préventive et à l’absentéisme dans la fonction publique.

J’en comprends la logique, mais je le considère comme un amendement d’appel. La fonction publique présente des spécificités qui me semblent, en l’espèce, difficilement assimilables à la situation du secteur privé.

Concernant l’absentéisme, la réintroduction du jour de carence commence à porter ses fruits dans la fonction publique, comme l’a démontré un récent rapport de la commission des finances de l’Assemblée nationale. L’économie est estimée à plus de 120 millions d’euros pour la seule année 2018.

Concernant les médecins de prévention, la commission a proposé des mesures concrètes pour répondre à ce problème récurrent. Elle a renforcé la mutualisation des services de prévention et permis, à titre expérimental, à des médecins agréés d’exercer les fonctions de médecin de prévention.

C’est donc une demande de retrait ; à défaut, l’avis sera défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.

M. André Reichardt. Je me permets d’insister. J’ai bien entendu la position de principe plutôt favorable de M. le rapporteur et je m’étonne franchement qu’on ne puisse pas étendre à la fonction publique des dispositions qui fonctionnent plutôt bien dans le secteur privé.

Monsieur le rapporteur, vous l’avez dit vous-même, la journée de carence porte déjà ses fruits. Pourquoi ce qui fonctionne dans le secteur privé ne fonctionnerait-il pas dans le secteur public ? Essayons simplement de dupliquer les règles ! Je le répète, il s’agit de médecine du travail, de lutte contre l’absentéisme. Qui, dans cette assemblée, peut ne pas être d’accord, compte tenu des résultats obtenus par ailleurs ?

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 280 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 17, modifié.

(Larticle 17 est adopté.)

Article 17
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 17 - Amendement n° 335 rectifié ter

Articles additionnels après l’article 17

Mme la présidente. L’amendement n° 464 rectifié, présenté par Mmes N. Delattre, M. Carrère et Costes, MM. Gabouty et Guérini, Mmes Guillotin et Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Requier, Roux, Vall, Castelli et Gold, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La deuxième phrase du quatrième alinéa de l’article 20 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est supprimée.

La parole est à Mme Nathalie Delattre.

Mme Nathalie Delattre. Dans le cadre de ses fonctions, le Défenseur des droits a eu à connaître de situations conflictuelles entre parents fonctionnaires séparés assurant la garde alternée de leurs enfants. La répartition du supplément familial de traitement cristallise notamment les conflits.

Le supplément familial de traitement est prévu à l’article 20 de la loi du 13 juillet 1983, qui, dans sa rédaction actuelle, n’organise pas la répartition de cette somme en cas de séparation avec garde alternée. Afin que le partage devienne systématique et ne provoque plus de tensions familiales, nous proposons de modifier ces dispositions.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Le droit au supplément familial de traitement est ouvert en fonction du nombre d’enfants à charge. À titre d’exemple, il s’élève à 111 euros par mois pour deux enfants à charge.

Lorsque plusieurs fonctionnaires assument la charge du ou des mêmes enfants, le fonctionnaire auquel le supplément familial de traitement est alloué est désigné d’un commun accord entre les intéressés. Or cette procédure pose des difficultés en cas de dispute entre les parents ; en l’absence d’accord, à qui verser le supplément familial ? Cette situation porte souvent préjudice aux familles monoparentales et, en conséquence, aux enfants eux-mêmes. Le Défenseur des droits a été saisi à plusieurs reprises de cas de cette nature.

Je remercie Mme Delattre d’avoir déposé cet amendement. Certes, sa rédaction devra sans doute être peaufinée d’ici à la commission mixte paritaire (Mme Nathalie Delattre le concède.), mais, en attendant, la commission a émis un avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Madame Delattre, si je comprends bien, vous souhaitez favoriser le partage du supplément familial de traitement lorsque les parents sont séparés et que chacun d’eux assume des charges similaires.

À l’instar de M. le rapporteur, j’émets quelques réserves quant à la rédaction de votre amendement : vous suggérez d’abroger certaines dispositions sans proposer de dispositif permettant un partage effectif. Ainsi, lorsque deux parents demanderaient le bénéfice du supplément familial de traitement pour le même enfant, l’autorité serait contrainte d’en désigner un ou, à défaut, de ne désigner personne, ce qui nous paraît assez peu opérationnel. Ce point doit encore être travaillé.

Au-delà d’un partage éventuel, le supplément familial de traitement est un élément de la rémunération qu’il faut revoir de fond en comble, pour que sa répartition devienne plus juste : cela fait partie des engagements que nous avons pris. Ils se traduiront non seulement à l’article 17 du présent texte, mais aussi dans le cadre des chantiers réglementaires. Pour l’heure, je demande le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 464 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Article additionnel après l'article 17 - Amendement n° 464 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 17 - Amendement n° 539

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 17.

L’amendement n° 335 rectifié ter, présenté par Mme Noël, M. D. Laurent, Mme Deromedi, M. Bonhomme, Mmes Renaud-Garabedian, Duranton et Morhet-Richaud et MM. Gremillet et Mandelli, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 40 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique est ainsi modifié :

1° La seconde phrase du premier alinéa est supprimée ;

2° Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le fonctionnaire autorisé à travailler à temps partiel est en congé maladie, constaté à la suite d’un accident reconnu imputable au service comme défini aux II, III et IV de l’article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, il perçoit une fraction des émoluments auxquels il a normalement le droit en travaillant à temps partiel. »

La parole est à Mme Sylviane Noël.

Mme Sylviane Noël. Certains l’ignorent peut-être, mais, aujourd’hui, lorsqu’un agent du service public qui travaille à temps partiel se retrouve en arrêt de travail, en congé maladie à la suite d’un accident directement reconnu imputable à son service ou encore en congé maternité, il est rémunéré sur la base d’un temps plein. Ainsi, lorsqu’un agent travaillant à 50 %, et percevant une rémunération au prorata temporis, est placé dans l’une des situations que je viens d’évoquer, il est indemnisé sur la base d’un temps plein.

D’après une récente enquête, le taux d’absentéisme pour raisons de santé, qui a bondi de 28 % depuis 2007, a atteint 9,5 % en 2016 dans la fonction publique territoriale, contre à peine 4,6 % dans le privé, selon le baromètre Ayming. Ainsi, en 2017, la facture s’est élevée à 4 milliards d’euros, presque une fois et demie les économies annuelles demandées sous le quinquennat précédent.

Cet amendement vise donc à rétablir une certaine justice sociale et financière en rémunérant les agents autorisés à travailler à temps partiel, en congé maladie ou maternité, en fonction de ce à quoi ils ont réellement droit.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Nous demandons l’avis du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Le rétablissement des droits à temps plein pour les agents à temps partiel se retrouvant en arrêt de travail, en congé maladie à la suite d’un accident directement reconnu imputable à leur service ou en congé maternité est un choix sur lequel le Gouvernement ne souhaite pas revenir.

Madame Noël, pour les cas spécifiques d’arrêt liés à des situations imputables au service ou à la maternité, la mesure que vous proposez irait à rebours des orientations que nous avons retenues en matière d’égalité entre les femmes et les hommes, ainsi que des mesures prises dans le cadre de l’accord visant à assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes – je pense, en particulier, à la situation des femmes enceintes.

Par ailleurs, il nous semble qu’une telle mesure est de nature, non législative, mais réglementaire.

Pour ces raisons, nous demandons le retrait de cet amendement.

Je vous ai écoutée attentivement, et j’ai le sentiment que vous présentez ces dispositions dans un esprit d’amélioration de l’égalité entre les femmes et les hommes, notamment pour prendre en compte la situation des femmes à la suite d’une maternité. Or l’adoption de ces mesures aurait plutôt l’effet inverse.

Mme la présidente. Madame Noël, l’amendement n° 335 rectifié ter est-il maintenu ?

Mme Sylviane Noël. Monsieur le secrétaire d’État, vous ne répondez pas à ma question. En l’occurrence, je me préoccupe davantage de l’égalité entre le public et le privé que de l’égalité entre les hommes et les femmes.

Je ne vois pas pourquoi, dans la fonction publique, une femme qui travaille à temps partiel serait indemnisée sur la base d’un temps plein durant son congé maternité, alors que, dans le privé, sauf erreur de ma part, une femme qui travaille à temps partiel est indemnisée sur la base de son temps partiel. Comment justifier, aujourd’hui, une telle différence de traitement ?

Je maintiens donc mon amendement.

Mme la présidente. Quel est maintenant l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour explication de vote.

Mme Pascale Gruny. Lorsqu’un salarié est à temps partiel, son traitement est fixé en conséquence. Quand il est malade, il doit percevoir cette rémunération, pas plus ! Tel est, tout simplement, l’objet de cet amendement.

Pour ma part, je ne comprends pas cette situation, que je découvre à l’instant. Au-delà des enjeux d’égalité entre le public et le privé, la question fondamentale est la suivante : est-il normal de percevoir une rémunération plus élevée dès lors que l’on est malade ou en congé maternité ?

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 335 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 17 - Amendement n° 335 rectifié ter
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 17 - Amendement n° 377

Mme la présidente. L’amendement n° 539, présenté par MM. de Belenet, Mohamed Soilihi, Richard, Amiel, Bargeton et Buis, Mme Cartron, MM. Cazeau, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Navarro, Patient, Patriat et Rambaud, Mmes Rauscent et Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après le 3° de l’article 11 de la loi n° 84-594 du 12 juillet 1984 relative à la fonction des agents de la fonction publique territoriale et complétant la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« … La formation qui participe au développement de compétences et d’employabilité dans l’objectif de reclassement et de mobilité professionnelle. »

II. – La loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale est ainsi modifié :

1° L’article 15 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le cadre de la formation prévue au 19° de l’article 23 de la présente loi, les collectivités et établissements affiliés à titre obligatoire ou volontaire à un centre de gestion concluent avec ce dernier une convention d’accompagnement de ces agents. » ;

2° Le II de l’article 23 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 19° La formation qui participe au développement de compétences et d’employabilité dans l’objectif de mobilité professionnelle. »

La parole est à M. Didier Rambaud.

M. Didier Rambaud. Plusieurs mesures de ce projet de loi encouragent la mobilité des agents publics entre les trois versants de la fonction publique ou vers le secteur privé. Nous avons également débattu de l’introduction d’une rupture conventionnelle. Toutefois, les dispositions visant spécifiquement l’accompagnement au reclassement vers une seconde carrière doivent encore être améliorées.

Avec cet amendement, nous proposons de compléter ces dispositifs. Premièrement, le CNFPT deviendrait compétent pour définir les programmes de formation relatifs au reclassement et à la mobilité professionnelle. Deuxièmement, les collectivités territoriales concluraient avec le centre de gestion auquel elles sont rattachées une convention d’accompagnement pour ces agents.

En conséquence, cet amendement vise à prévoir, pour les centres de gestion, la compétence en matière d’employabilité dans l’objectif de mobilité professionnelle.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Cet amendement a pour objet la formation des agents territoriaux en voie de reclassement. À mon sens, ses dispositions sont globalement satisfaites par le droit en vigueur : le CNFPT dispense déjà des formations de cette nature, et les centres de gestion proposent un accompagnement personnalisé des agents. D’ailleurs, l’adoption de cet amendement pourrait entraîner des confusions quant au rôle de chacun, en mettant sur le même plan le CNFPT et les centres de gestion.

En outre, la commission a déjà prévu un rendez-vous de carrière, à l’article 17 du projet de loi, pour mieux anticiper les reconversions professionnelles.

Enfin, l’article 22 du présent texte habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnances pour poursuivre la réflexion ou renforcer la formation des agents les plus exposés au risque d’usure professionnelle.

Pour ces raisons, je demande le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement demande, lui aussi, le retrait de cet amendement, pour une raison en particulier : le risque de confusion entre le rôle, voire les compétences, des centres de gestion et le CNFPT.

Pour le reste, nous souscrivons aux dispositions de cet amendement, d’autant plus qu’elles sont, pour l’essentiel, satisfaites.

À la suite de M. le rapporteur, je rappelle que, à l’article 22, nous avons prévu de renforcer le droit à la formation, et donc de faciliter l’accès à la formation pour trois types de public, notamment dans la fonction publique territoriale : les agents disposant de la formation initiale la plus faible, les agents en situation de handicap et les agents occupant des postes avec un risque d’usure professionnelle prononcé.

Mme la présidente. Monsieur Rambaud, l’amendement n° 539 est-il maintenu ?

M. Didier Rambaud. Non, je le retire.

Article additionnel après l'article 17 - Amendement n° 539
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 17 - Amendement n° 379

Mme la présidente. L’amendement n° 539 est retiré.

L’amendement n° 377, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 4123-2 du code de la défense, il est inséré un article L. 4123-2-…. ainsi rédigé :

« Art. L. 4123-2-. Les anciens militaires victimes, après leur radiation des cadres ou des contrôles, d’une rechute d’une maladie ou d’une blessure imputable aux services militaires et dans l’incapacité de reprendre leur activité professionnelle, bénéficient d’une prise en charge par l’État de leur perte de revenu selon des modalités définies par décret. »

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Nous avons constaté une absence de coordination des régimes accidents du travail et maladies professionnelles. Aussi, nous proposons d’assurer, par cet amendement, la prise en charge de la perte de revenus d’un ancien militaire qui doit cesser sa nouvelle activité du fait d’une blessure imputable à l’exercice militaire.

Il s’agit de personnes qui ont achevé leur carrière militaire, qui ont fait l’objet d’une blessure dans le cadre de cet exercice militaire et qui, quelques mois ou quelques années après, du fait des conséquences de cette blessure, doivent interrompre la nouvelle activité qu’ils ont engagée après avoir fait valoir leurs droits à la retraite de militaire. Ce faisant, le maintien de leurs revenus sera garanti.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Cet amendement vise à mieux prendre en charge les militaires qui rechutent après avoir quitté l’armée. Certes, il s’agit d’une mesure catégorielle, mais cette dernière semble nécessaire pour ce qui concerne les blessures imputables aux services militaires. La commission a donc émis un avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 377.

(Lamendement est adopté.)

Article additionnel après l'article 17 - Amendement n° 377
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article 17 bis

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 17.

L’amendement n° 379, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code des pensions civiles et militaires est ainsi modifié :

1° Après les mots : « prononcée en application », la fin du premier alinéa de l’article L. 27 est ainsi rédigée : « de l’article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ainsi que du deuxième alinéa des 2° et 3° de l’article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée. » ;

2° À l’article L. 29, les mots : « de l’article 36 (2°) de l’ordonnance du 4 février 1959 relative au statut général des fonctionnaires ou à la fin du congé qui lui a été accordé en application de l’article 36 (3°) de ladite ordonnance » sont remplacés par les mots : « du 2° de l’article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée ou à la fin du congé qui lui a été accordé en application des 3° et 4° du même article 34 ».

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Il s’agit d’un amendement de coordination.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 379.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 17.

L’amendement n° 433 rectifié n’est pas soutenu.

Article additionnel après l'article 17 - Amendement n° 379
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article 17 ter

Article 17 bis

La sous-section 1 de la section 5 du chapitre II du titre Ier du livre IV du code des communes est ainsi modifiée :

1° Au deuxième alinéa de l’article L. 412-55, les mots : « au grade ou, à défaut, à l’échelon immédiatement supérieur » sont remplacés par les mots : « au cadre d’emplois hiérarchiquement supérieur ou, à défaut, au grade ou à un échelon supérieur » ;

2° Il est ajouté un article L. 412-56 ainsi rédigé :

« Art. L. 412-56. – I. – À titre exceptionnel, les fonctionnaires des cadres d’emplois de la police municipale, après avis de la commission administrative paritaire :

« 1° Peuvent être promus à l’un des échelons supérieurs de leur grade ou au grade immédiatement supérieur s’ils ont accompli un acte de bravoure dûment constaté dans l’exercice de leurs fonctions ; ils peuvent en outre être nommés dans un cadre d’emplois supérieur s’ils ont été grièvement blessés dans ces mêmes circonstances ;

« 2° Peuvent être promus à l’un des échelons supérieurs de leur grade ou au grade immédiatement supérieur s’ils ont été grièvement blessés dans l’exercice de leurs fonctions.

« L’accès à un nouveau cadre d’emplois ou à un nouveau grade peut être subordonné à l’accomplissement d’une obligation de formation, dans des conditions définies par les statuts particuliers.

« II. – À titre exceptionnel, les fonctionnaires stagiaires dans l’un des cadres d’emplois de la police municipale mortellement blessés dans l’exercice de leurs fonctions peuvent, à titre posthume, être titularisés dans leur cadre d’emplois, après avis de la commission administrative paritaire.

« III. – Les promotions prononcées en application du présent article conduisent, en tout état de cause, à attribuer aux intéressés un indice supérieur à celui qui était le leur avant cette promotion.

« IV. – Les conditions d’application du présent article sont précisées par décret en Conseil d’État. »

Mme la présidente. L’amendement n° 380, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 4 à 7

Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 412-56. – I. – À titre exceptionnel, les fonctionnaires des cadres d’emplois de la police municipale peuvent faire l’objet des dispositions suivantes :

« 1° S’ils ont accompli un acte de bravoure dûment constaté dans l’exercice de leurs fonctions, ils peuvent être promus à l’un des échelons supérieurs de leur grade ou au grade immédiatement supérieur ; s’ils ont été grièvement blessés dans ces mêmes circonstances, ils peuvent en outre être nommés dans un cadre d’emplois supérieur ;

« 2° S’ils ont été grièvement blessés dans l’exercice de leurs fonctions, ils peuvent être promus à l’un des échelons supérieurs ou au grade immédiatement supérieur.

II. – Alinéa 8

Remplacer les mots :

peuvent, à titre posthume, être titularisés dans leur cadre d’emplois, après avis de la commission administrative paritaire

par les mots :

peuvent être titularisés dans leur cadre d’emplois

III. – Alinéa 9

Remplacer les mots :

conduisent, en tout état de cause,

par les mots :

doivent, en tout état de cause, conduire

IV. – Alinéa 10

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Cet amendement vise à supprimer la compétence des CAP en matière de promotion et d’avancement pour les policiers municipaux blessés ou tués en service.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Cet amendement tend à revenir sur l’ensemble des modifications introduites en commission à l’article 17 bis.

Comme pour toutes les autres décisions d’ordre individuel relatives à l’avancement ou à la promotion, il nous semble nécessaire de maintenir l’avis de la commission administrative paritaire pour les décisions d’avancement exceptionnel des policiers municipaux.

En outre, contrairement au Gouvernement, nous estimons que les obligations de formation actuellement prévues par les statuts particuliers en cas d’accès à un cadre d’emploi supérieur ne seraient pas applicables en cas de promotion ou d’avancement à titre exceptionnel.

Enfin, je réitère le rappel que j’ai formulé en commission : en vertu de l’article 34 de la Constitution, le Premier ministre ne peut exercer son pouvoir réglementaire dans des domaines afférents à la compétence des collectivités territoriales que sur habilitation expresse du législateur. Le renvoi à un décret en Conseil d’État doit donc absolument être maintenu.

Pour ces raisons, l’avis est défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 380.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 17 bis.

(Larticle 17 bis est adopté.)

Article 17 bis
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 17 ter - Amendement n° 151 rectifié bis

Article 17 ter

I. – (Non modifié) L’article 21 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les fonctionnaires en activité bénéficient d’autorisations spéciales d’absence liées à la parentalité et à l’occasion de certains évènements familiaux. Ces autorisations spéciales d’absence n’entrent pas en compte dans le calcul des congés annuels.

« Un décret en Conseil d’État détermine la liste de ces autorisations spéciales d’absence et leurs conditions d’octroi et précise celles qui sont accordées de droit. »

bis (nouveau). – Au II de l’article 32 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée, après les mots : « le chapitre II, » sont insérés les mots : « les deux derniers alinéas de l’article 21, ».

II. – (Non modifié) Le 4° de l’article 59 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée et le 6° de l’article 45 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 précitée sont abrogés.

Mme la présidente. L’amendement n° 152 rectifié bis, présenté par MM. Durain, Marie, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Sueur, Sutour, Tourenne, Montaugé, Temal et Raynal, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2, première phrase

Après le mot :

parentalité

insérer les mots :

, à la procréation

La parole est à M. Jérôme Durain.

M. Jérôme Durain. Avec cet amendement, nous proposons que des autorisations spéciales d’absence puissent être accordées à des agentes publiques en raison de démarches liées à la procréation.

L’article L. 1225-16 du code du travail, complété par l’article 87 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, permet déjà à une salariée du secteur privé bénéficiant d’une assistance médicale à la procréation, ainsi qu’à son conjoint, de bénéficier d’une autorisation d’absence. L’article 163 de la loi relative à l’égalité et à la citoyenneté étendait ces dispositions aux agentes publiques, mais le Conseil constitutionnel les a censurées dans sa décision du 26 janvier 2017, pour des motifs de procédure.

Ces situations ne nous semblent pas couvertes par la rédaction de l’article 17 ter, lequel n’évoque que la parentalité. Nous proposons donc de préciser l’article 17 ter en ce sens.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Cet amendement vise à préciser que les autorisations spéciales d’absence pourront également être délivrées à l’occasion d’actes en lien avec la procréation.

Le terme de « parentalité » a été choisi pour son sens large, et le décret d’application de cet article le déclinera dans ses différents aspects, en y incluant la PMA, mais aussi l’adoption. Pour l’heure, la commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 152 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 587, présenté par Mme Di Folco, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 4

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

…. – Au deuxième alinéa de l’article 136 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée, après les références : « 20, premier et deuxième alinéas, » sont insérées les références : « 21, avant-dernier et dernier alinéas, ».

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Par souci de lisibilité et d’intelligibilité, cet amendement vise à toiletter les dispositions de l’article 136 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, afin d’ajouter un renvoi exprès aux deux derniers alinéas de l’article 21 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 587.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 17 ter, modifié.

(Larticle 17 ter est adopté.)

Article 17 ter
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Article 17 quater (nouveau)

Article additionnel après l’article 17 ter

Mme la présidente. L’amendement n° 151 rectifié bis, présenté par MM. Durain, Marie, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Sueur, Sutour, Tourenne, Antiste, Bérit-Débat, Montaugé, Temal et Raynal, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 17 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État est ainsi modifié :

1° La quatrième phrase du 9° est supprimée.

2° Après le 9°, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« … À un congé d’une durée minimale de cinq jours en décès d’un enfant, ou d’une durée minimale de trois jours en cas de décès du conjoint, du concubin ou du partenaire lié par un pacte civil de solidarité, du père, de la mère, du beau-père, de la belle-mère, d’un frère ou d’une sœur. L’autorité compétente peut fixer une durée supérieure, après consultation du comité social d’administration ;

« … À un congé d’une durée minimale de deux jours pour l’annonce de la survenue d’un handicap chez un enfant. L’autorité compétente peut fixer une durée supérieure, après consultation du comité social d’administration ; ».

II. – L’article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale est ainsi modifié :

1° La quatrième phrase du 10° est supprimée ;

2° Après le 10°, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« … À un congé d’une durée minimale de cinq jours en décès d’un enfant, ou d’une durée minimale de trois jours en cas de décès du conjoint, du concubin ou du partenaire lié par un pacte civil de solidarité, du père, de la mère, du beau-père, de la belle-mère, d’un frère ou d’une sœur. L’autorité compétente peut fixer une durée supérieure, après consultation du comité social territorial ; ».

« … À un congé d’une durée minimale de deux jours pour l’annonce de la survenue d’un handicap chez un enfant. L’autorité compétente peut fixer une durée supérieure, après consultation du comité social territorial ;

III. – L’article 41 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière est ainsi modifié :

1° La quatrième phrase du 9° est supprimée.

2° Après le 9°, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« … À un congé d’une durée minimale de cinq jours en décès d’un enfant, ou d’une durée minimale de trois jours en cas de décès du conjoint, du concubin ou du partenaire lié par un pacte civil de solidarité, du père, de la mère, du beau-père, de la belle-mère, d’un frère ou d’une sœur. L’autorité compétente peut fixer une durée supérieure, après consultation du comité social d’établissement ;

« … À un congé d’une durée minimale de deux jours pour l’annonce de la survenue d’un handicap chez un enfant. L’autorité compétente peut fixer une durée supérieure, après consultation du comité social d’établissement ; ».

La parole est à M. Didier Marie.

M. Didier Marie. Avec cet amendement, nous proposons d’aligner le régime des congés pour décès familial pour les trois versants de la fonction publique sur le régime, plus favorable, dont bénéficient les salariés relevant du code du travail.

Ainsi, le congé en cas de décès d’un enfant serait porté à cinq jours, contre trois actuellement dans la fonction publique. En outre, les congés pour décès familiaux seraient élargis aux cas de décès des beaux-pères et belles-mères. Enfin, un congé familial de deux jours serait créé en cas de survenance d’un handicap chez un enfant. Dans chacune de ces hypothèses, le texte prévoit une durée minimale, mais l’autorité compétente peut, après consultation du comité social, fixer un régime plus favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Les hypothèses mentionnées par M. Marie me semblent largement couvertes par le congé de solidarité familiale, qui peut être activé lorsque le pronostic vital d’un membre de la famille est engagé. De surcroît, la commission a créé « en dur » le congé de proche aidant, à l’article 17. En outre, des autorisations spéciales d’absence peuvent être accordées. Les autorisations d’absence sont d’ailleurs un instrument plus adapté à cette situation – le droit applicable au secteur privé en est la preuve.

Cela étant, ce débat va permettre de sensibiliser le Gouvernement, pour que le décret d’application de l’article 17 ter couvre ces hypothèses, parmi la liste des autorisations d’absence.

Voilà pourquoi je demande le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Je demande, moi aussi, le retrait de cet amendement. Le décret prévu à cet article, que j’ai déjà eu l’occasion de mentionner, traitera évidemment de ces questions.

D’ailleurs, préalablement à la publication de ce décret, nous tenons à disposer d’un temps de concertation avec les organisations syndicales et les représentants des employeurs publics, notamment territoriaux. En effet, un vrai travail d’harmonisation est nécessaire : de leur propre initiative, un certain nombre d’employeurs ont d’ores et déjà mis en place des autorisations spéciales d’absence. Parfois, les motifs d’ouverture de droits sont sensiblement différents, et les quotités de jours d’absence autorisés sont souvent très variables.

Mme la présidente. Monsieur Marie, l’amendement n° 151 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Didier Marie. Monsieur le secrétaire d’État, nous vous l’avons dit à plusieurs reprises au cours de ces débats : il aurait été opportun de nous communiquer les projets de décret en amont, parallèlement à l’examen du présent projet de loi – vous vous y étiez d’ailleurs engagé auprès des partenaires sociaux. Le sujet que l’on vient d’évoquer en est une preuve supplémentaire.

Cela étant, au regard des engagements pris au nom du Gouvernement et, notamment, de la concertation annoncée, je retire mon amendement.

Mme la présidente. L’amendement n° 151 rectifié bis est retiré.

Article additionnel après l'article 17 ter - Amendement n° 151 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article 18

Article 17 quater (nouveau)

La loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est ainsi modifiée :

1° Après l’article 21, il est inséré un article 21 bis A ainsi rédigé :

« Art. 21 bis A. – Pendant une année à compter du jour de la naissance, un fonctionnaire allaitant son enfant dispose à cet effet d’une heure par jour durant les heures de travail, au besoin sur son lieu de travail.

« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article. » ;

2° Au II de l’article 32, après les mots : « le chapitre II, » sont insérés les mots : « l’article 21 bis A, ».

Mme la présidente. L’amendement n° 382, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Cet amendement vise à supprimer l’article 17 quater, lequel crée un aménagement horaire pour les femmes allaitantes.

Tout d’abord, en l’état du droit, des autorisations d’absence sous forme d’aménagements d’horaires sont d’ores et déjà prévues pour les femmes allaitantes.

Ensuite, ces dispositions figurent parmi celles que nous voulons harmoniser, notamment au titre des autorisations spéciales d’absence, que je viens d’évoquer, dans le cadre du décret prévu à l’article 17 ter et après un temps de concertation.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer l’article 17 quater, introduit par la commission, qui inscrit dans la loi un droit à l’allaitement, au même titre que celui garanti par le code du travail.

Je précise que cet article est issu d’un amendement de Mme Annick Billon, présidente de la délégation sénatoriale aux droits des femmes. Il introduit le droit de disposer d’une heure par jour afin d’allaiter son enfant, au besoin sur son lieu de travail, pour les fonctionnaires et contractuels des trois versants de la fonction publique. Ce droit serait limité à la première année suivant la naissance du ou des enfants concernés.

Pour l’heure, il nous semble qu’aucune disposition ne donne un tel droit aux mères travaillant dans la fonction publique. Nous comprenons donc difficilement l’amendement de suppression déposé par le Gouvernement, et nous émettons un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Billon, pour explication de vote.

Mme Annick Billon. Monsieur le secrétaire d’État, je suis assez surprise par votre amendement de suppression « sèche » de l’article 17 quater. En effet, ce dernier part d’une idée à la fois simple et concrète : permettre aux agents publics de disposer, pendant un an, d’une heure par jour pour allaiter leur enfant. Ce n’est là que la reprise du droit applicable aux salariés du secteur privé et, plus précisément, de l’article L. 1225-30 du code du travail.

Pourquoi refuser la reconnaissance de ce droit aux agents publics ? L’objet de votre amendement, qui tient en deux phrases quelque peu sibyllines, avance qu’« il n’est pas nécessaire de créer un congé de la position d’activité ». Ce n’est toutefois pas le sens de notre article : nous créons simplement une autorisation d’absence d’une heure, et en aucun cas un congé supplémentaire !

Nous sommes à votre disposition pour apporter telle ou telle précision d’ici à la commission mixte paritaire ; mais rien n’impose de supprimer « sèchement » cet article !

L’objet de votre amendement précise que « des dispositions sont d’ores et déjà prévues en matière d’accompagnement des femmes allaitantes dans la fonction publique ». C’est un fait, des dispositions existent, mais elles sont défavorables aux femmes qui allaitent. La circulaire du 9 août 1995 précise que, dans la fonction publique de l’État, « en l’absence de dispositions particulières », il n’est pas possible d’accorder une autorisation d’absence aux mères qui allaitent. Une seule exception est prévue, lorsque l’administration possède « une organisation matérielle appropriée à la garde des enfants ». Dès lors, les services « devront accorder aux mères la possibilité d’allaiter leur enfant ». Mais – vous en conviendrez – c’est rarement le cas, malheureusement.

Cette interprétation a été confirmée par une réponse à une question écrite d’un sénateur, datée du 6 octobre 2016. Le Défenseur des droits a également regretté cette situation dans son rapport de 2018, intitulé De la naissance à 6 ans : au commencement des droits.

Mes chers collègues, nous devons avancer sur ce sujet, en adoptant l’article 17 quater tel que rédigé par la commission. (Mme Élisabeth Doineau applaudit.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 382.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 17 quater.

(Larticle 17 quater est adopté.)

Article 17 quater (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 18 - Amendement n° 203 rectifié bis

Article 18

I. – Les collectivités territoriales et les établissements publics mentionnés au premier alinéa de l’article 2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ayant maintenu un régime de travail mis en place antérieurement à la publication de la loi n° 2001-2 du 3 janvier 2001 relative à la résorption de l’emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique ainsi qu’au temps de travail dans la fonction publique territoriale disposent d’un délai de dix-huit mois pour définir, dans les conditions fixées à l’article 7-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée, les règles relatives au temps de travail de leurs agents.

Le délai mentionné au premier alinéa commence à courir :

1° En ce qui concerne les collectivités territoriales d’une même catégorie, leurs groupements et les établissements publics qui y sont rattachés, à la date du prochain renouvellement général des assemblées délibérantes des collectivités territoriales de cette catégorie ;

2° En ce qui concerne les autres établissements publics mentionnés au premier alinéa de l’article 2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée, à la date de publication de la présente loi.

II. – Le dernier alinéa de l’article 7-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée est supprimé à l’échéance du délai prévu au I du présent article.

III. – Au deuxième alinéa de l’article 136 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée, la référence : « 9, » est remplacée par les références : « 7-1, 9 et ».

Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, sur l’article.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet article sonne comme une provocation pour l’ensemble des fonctionnaires territoriaux, jetés en pâture à la vindicte populaire, suspectés d’être des tire-au-flanc alors que, le plus souvent, ils participent avec dévouement à l’exécution des services publics locaux, sans compter leur temps.

Ainsi, cet article engage les collectivités à opérer une harmonisation de la durée du travail dans la fonction publique territoriale en supprimant les régimes dérogatoires à la durée légale du travail, soit 1 607 heures annuelles. Pourtant, jusqu’à présent, l’article 7-1 de la loi du 26 janvier 1984 prévoit que « les règles relatives à la définition, à la durée et à l’aménagement du temps de travail des agents des collectivités territoriales et des établissements publics mentionnés au premier alinéa de l’article 2 sont fixées par la collectivité ». Conformément à l’article 72 de la Constitution, qui énonce le principe de libre administration des collectivités territoriales, c’est aux collectivités elles-mêmes de définir et de choisir la durée de travail des agents, bien sûr dans le cadre légal, en ne pouvant infléchir cette durée que dans un sens favorable à ces agents.

D’ores et déjà, cette faculté d’appliquer des temps de travail plus favorables est largement encadrée. Ainsi, le même article de la loi de 1984 prévoit la possibilité de maintenir des régimes inférieurs à la durée légale, à la double condition qu’ils aient été mis en place antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi de 2001 et que cette dérogation ait été formalisée par une décision expresse de l’organe délibérant de la collectivité, après avis du comité technique.

Selon l’étude d’impact, la durée annuelle de travail serait inférieure de moins de 30 heures à la durée légale. Pour 30 petites heures annuelles, est-ce bien sérieux d’obliger l’ensemble des collectivités à revoir leur régime de temps de travail ? N’ont-elles pas d’autres urgences à régler ? Est-ce le problème majeur affectant la qualité du service public local ? Nous ne le croyons pas.

Pour l’ensemble de ces raisons, nous proposerons la suppression de cet article provocateur, qui remet en cause la libre administration des collectivités territoriales et qui va se traduire par un recul des droits acquis pour les fonctionnaires territoriaux.

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, sur l’article.

M. Didier Marie. La question du temps de travail dans la fonction publique sert souvent de chiffon rouge pour dénigrer le fonctionnaire, voire la fonction publique dans son ensemble.

L’inspection générale des finances a consacré à la fonction publique de l’État un rapport opportunément publié le 26 mars dernier, soit la veille de la présentation du présent texte. Ce rapport portait sur 1,1 million d’agents, parmi les 2,4 millions que compte la fonction publique de l’État. Il constatait que 310 000 agents travaillaient moins de 35 heures par semaine, dont 120 000 en raison de compensations liées à des sujétions inhérentes à l’exercice de leurs fonctions. En résumé, seuls 190 000 agents bénéficient d’un régime plus favorable que les 35 heures, et, parmi eux, nous ne disposons pas de la répartition entre ceux qui ont bénéficié d’un accord avant 2001 et ceux qui auraient fait l’objet de dispositions particulières après.

Pour ce qui concerne la fonction publique territoriale, deux rapports sont aujourd’hui connus : celui de M. Philippe Laurent, qui atteste d’un temps annuel moyen de 1 578 heures, et celui de la Cour des comptes, qui, lui, avance une moyenne de 1 562 heures. Or, dans ce domaine également, on ne distingue pas précisément les situations relevant d’accords antérieurs ou postérieurs à 2001, même si la plupart des accords conclus après cette date ont été considérés comme illégaux.

Pour ce qui concerne la fonction publique hospitalière, on ne parle même pas des 35 heures : les heures supplémentaires y sont si nombreuses que, pour les compenser, il faudrait embaucher 30 000 agents !

Nous mesurons le degré d’acceptabilité de nos concitoyens sur ce sujet. C’est la raison pour laquelle nous ne proposons pas la suppression de cet article, qui vise à revenir sur les accords antérieurs à 2001. Toutefois, deux points méritent d’être rappelés.

Premièrement, les dernières lois modifiant le code du travail ayant favorisé les accords d’entreprise, il est paradoxal que ce projet de loi interdise aux collectivités territoriales de déroger à la durée légale du travail.

Deuxièmement, il est contradictoire de donner une valeur constitutionnelle au principe de libre administration des collectivités territoriales et de leur interdire cette possibilité de dérogation.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 36 est présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 83 rectifié quater est présenté par Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme G. Jourda, M. M. Bourquin, Mme Rossignol, M. Antiste, Mmes Préville et Meunier, M. P. Joly, Mme Monier, M. Joël Bigot et Mmes Blondin et Grelet-Certenais.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour présenter l’amendement n° 36.

Mme Michelle Gréaume. Par cet amendement, nous demandons la suppression de cet article, qui repose sur des études contestables ou, à tout le moins, sujettes à caution. En effet, si la Cour des comptes et les chambres régionales des comptes invitent régulièrement les collectivités à contenir leurs charges de personnel en agissant sur les effectifs et le temps de travail, d’autres études sont éclairantes.

Le rapport de la Dares, la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques du ministère du travail, sur la fonction publique territoriale, par exemple, ou celui du vice-président de l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité, M. Philippe Laurent, publié en 2016 et toujours d’actualité, nous apprennent ainsi que près de la moitié des fonctionnaires de la fonction publique territoriale – 46,5 % exactement – travaillent plus de 35 heures par semaine ; que 75 % des agents dépassent régulièrement – pour certains d’entre eux, tous les jours – leurs horaires de travail ; que 42 % des agents travaillent le samedi et 30 % le dimanche ; et que le temps de travail moyen, dans la fonction publique territoriale, atteint 1 637 heures par an, soit davantage que le temps légal annuel de 1 607 heures. Telle est la réalité des chiffres !

L’essentiel est ailleurs, toutefois : l’étude d’impact révèle les véritables motivations du présent article. Elle indique que, « si l’on se réfère à la durée légale retenue par la Cour des comptes dans son rapport annuel 2016 sur les finances publiques locales – 1 562 heures –, la mesure proposée constituerait une économie globale de l’ordre de 1,2 milliard d’euros selon la juridiction financière. L’impact, en termes d’effectifs, d’un retour de l’ensemble des agents territoriaux aux 1 607 heures annuelles a été chiffré par la Cour des comptes à un gain de 57 000 équivalents temps plein, ou ETP. »

Tel est l’objectif réel de ce texte : participer à la réduction du nombre de fonctionnaires territoriaux, comme l’a promis le Président Macron, une mesure à laquelle vous vous opposiez, monsieur le secrétaire d’État, lorsque vous étiez député.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Non !

Mme Michelle Gréaume. J’ajoute, pour terminer, que ces régimes dérogatoires que vous pointez du doigt répondent tous à des situations spécifiques imposant des organisations de service très particulières, car les métiers de la fonction publique territoriale sont innombrables, avec des astreintes, du travail de nuit et du travail le week-end. Il s’agit donc d’un simple prétexte pour poursuivre la mise en œuvre de votre plan de destruction de l’emploi public.

Mme la présidente. L’amendement n° 83 rectifié quater n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. L’article 18, que cet amendement tend à supprimer, harmonise le temps de travail au sein de la fonction publique en mettant fin aux régimes dérogatoires qui ont pu être maintenus dans le versant territorial.

Je veux rassurer nos collègues : les sujétions particulières auxquelles sont soumis certains emplois pourront toujours être prises en compte.

L’avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. L’avis du Gouvernement est défavorable, pour des raisons identiques à celles qu’a exposées Mme la rapporteur.

J’ajoute, d’une part, que les sujétions – travail de nuit, travail du week-end, fractionnement – sont évidemment prises en compte, comme dans le secteur privé, et, d’autre part, que la rédaction que nous avons proposée à l’Assemblée nationale permet d’écarter explicitement du champ de ce débat l’ensemble des personnels enseignants ou de recherche. Nous avons en outre indiqué à plusieurs reprises – comme certains d’entre vous viennent de le faire – que, s’agissant de la fonction publique hospitalière, la question ne se posait même pas.

Les interventions du groupe CRCE et celle de M. Marie ont avancé que, selon les rapports sur la fonction publique territoriale, certains agents travaillent aujourd’hui plus de 1 607 heures par an. C’est précisément par souci d’équité que nous entendons faire en sorte que la durée de travail de tous ceux qui ne peuvent justifier de sujétions particulières soit ramenée à 1 607 heures, durée pour laquelle ils sont d’ailleurs rémunérés. Les rapports cités pointent en effet un écart entre le contrat de travail, l’engagement, la durée du travail de l’agent et la réalisation effective ou non du temps de travail.

Madame Gréaume, vous avez affirmé que je me serais opposé à ces dispositions ; ce n’est pas vrai, et je vous invite à consulter un certain nombre de documents à ce sujet. Ainsi, à l’Assemblée nationale en octobre 2017, alors que j’étais encore député, j’avais dit à Gérald Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics, que je souscrivais au rétablissement de la journée de carence à l’aune de l’expérience de maire que j’ai eu la chance de connaître durant dix ans.

Dans ce cadre, j’ai mis en œuvre un certain nombre de dispositions pour réduire le nombre de jours de congé, qui ne paraissait pas justifié, et pour ouvrir la discussion sur l’annulation des congés d’ancienneté qui existaient dans ma collectivité, sans fondement légal. Ma successeur, auprès de qui je reste engagé comme conseiller municipal, a eu l’occasion de délibérer en mars 2018, comme l’a fait le mois suivant la communauté d’agglomération à laquelle j’ai la chance d’appartenir, pour revenir sur un accord antérieur à 2001 et ainsi, d’une certaine manière, appliquer avec quelques mois d’avance la disposition que je propose pour l’ensemble des collectivités.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 36.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 387, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1

Remplacer les mots :

de dix-huit mois

par les mots :

d’un an à compter du renouvellement général de leurs assemblées délibérantes

II. – Alinéas 2 à 4

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. L’abrogation de la possibilité de dérogation prévue à l’article 7–1 de la loi de 1984 entraîne la renégociation des protocoles d’accord visés. Le Gouvernement propose que celle-ci se déroule dans un délai de douze mois, à compter non pas de la publication de la loi, mais du renouvellement des assemblées délibérantes des collectivités concernées, c’est-à-dire douze mois après mars 2020 pour les communes et les intercommunalités et douze mois après le renouvellement de 2021 pour les régions et les départements.

Considérant que les mois précédant ces renouvellements pourront être consacrés à la réflexion et à la préparation et que ces dossiers relèvent plutôt d’un calendrier de début de mandat, cette solution nous a paru équilibrée. La disposition adoptée par la commission des lois portant ce délai à dix-huit mois nous semble aller trop loin, eu égard tant à la période de préparation qui s’ouvre qu’au délai suffisant que nous proposons.

Mme la présidente. L’amendement n° 344 rectifié bis, présenté par Mme Noël, M. D. Laurent, Mme Deromedi, M. Bonhomme, Mme Duranton et M. Mandelli, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Remplacer les mots :

dix-huit mois

par les mots :

deux ans maximum

La parole est à Mme Sylviane Noël.

Mme Sylviane Noël. L’article 18 permet une harmonisation de la durée du travail dans la fonction publique territoriale en supprimant les régimes dérogatoires, les collectivités territoriales disposant d’un délai d’un an à compter du prochain renouvellement des exécutifs locaux pour définir de nouvelles règles relatives au temps de travail des agents. Ce délai trop bref ne permettant pas un dialogue social de qualité, notamment en cas d’alternance politique, le présent amendement tend à le porter à deux ans, ainsi, d’ailleurs, que le recommandait le rapport Laurent de 2016 sur le temps de travail dans la fonction publique.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Le Gouvernement propose, par l’amendement n° 387, de ramener à douze mois le délai dont bénéficieront les employeurs publics territoriaux ayant maintenu des régimes dérogatoires pour redéfinir des règles de temps de travail conformes au droit commun.

Nous avons été sollicités par les employeurs territoriaux, qui nous ont fait part de leur souhait de bénéficier d’une année de plus, donc d’un total de vingt-quatre mois, ainsi que le demande Mme Noël, par l’amendement n° 344 rectifié bis.

Nous avons coupé la poire en deux en prévoyant un délai de dix-huit mois, qui nous semble raisonnable pour mener à bien la concertation avec le personnel. Nous attendons l’harmonisation du temps de travail depuis si longtemps qu’il ne paraît pas excessif d’y consacrer six mois de plus et de donner ainsi un peu plus de souplesse aux collectivités, notamment en cas d’alternance. De plus, la rédaction du Gouvernement ne nous semble pas fonctionner, dans la mesure où il existe des établissements publics soumis à la loi du 26 janvier 1984, comme les syndicats mixtes ou le CNFPT, dont l’assemblée délibérante ne se renouvelle pas intégralement en une fois.

La commission maintient donc sa position et demande le retrait des deux amendements en discussion ; à défaut, son avis sera défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 344 rectifié bis ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.

M. Didier Marie. Mme la rapporteur vient de le souligner, la commission a retenu dix-huit mois après discussions ; nous avions d’ailleurs déposé un amendement en ce sens.

Je rappelle à M. le secrétaire d’État comme à nos collègues que, en Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, le collège des employeurs territoriaux, qui était favorable à une application des 35 heures, avait lui-même déposé un amendement pour que cette période puisse atteindre deux ans, de manière que les nouveaux exécutifs aient le temps de s’installer et de mettre en place les conditions d’un dialogue social de qualité. Le Gouvernement s’y était opposé.

Il me semble que la proposition de la commission va dans le bon sens.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 387.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 344 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 146 rectifié bis, présenté par MM. Durain, Marie, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Sueur, Sutour, Tourenne, Antiste, Bérit-Débat, Montaugé, Temal et Raynal, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Ces règles entrent en application le 1er janvier suivant leur définition par les collectivités ou les établissements publics.

La parole est à M. Jérôme Durain.

M. Jérôme Durain. Cet amendement vise à fixer l’entrée en vigueur de ces nouvelles règles au 1er janvier qui suivra leur adoption.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Cet amendement tend à préciser que les nouvelles règles relatives au temps de travail entrent en application le 1er janvier suivant la date à laquelle elles auront été définies par l’autorité territoriale, ce qui ne me paraît pas souhaitable.

Pour les agents soumis à un cycle de travail correspondant à une année civile, il est évident que les nouvelles règles entreront pleinement en application au 1er janvier suivant, mais ce n’est pas le cas partout et pour tous les agents.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis sera défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Même avis.

M. Jérôme Durain. Je retire l’amendement !

Mme la présidente. L’amendement n° 146 rectifié bis est retiré.

L’amendement n° 355 rectifié bis, présenté par MM. Durain, Marie, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Sueur, Sutour, Antiste, Bérit-Débat, Montaugé, Temal et Raynal et Mme Monier, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Remplacer cet alinéa par sept alinéas ainsi rédigés :

II. – L’article 7-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « dans les limites applicables aux agents de l’État » sont remplacés par les mots : « sur une base de trente-cinq heures de travail effectif par semaine » ;

2° Après le même premier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Après avis du comité social territorial, l’organe délibérant des collectivités territoriales et des établissements publics mentionnés au premier alinéa du présent article adapte la durée du travail en cas notamment de travail de nuit, de travail le dimanche, de travail en horaires décalés, de travail en équipes, de modulation importante du cycle de travail ou de travaux pénibles ou dangereux.

« Après avis du comité social territorial, il fixe la durée du congé annuel de ses agents appréciée en nombre de jours effectivement ouvrés, d’une durée minimale de cinq fois leurs obligations hebdomadaires de service. » ;

3° À la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « du premier alinéa » sont remplacés par les mots : « des trois premiers alinéas » ;

4° Le dernier alinéa est supprimé à l’échéance du délai prévu au I du présent article.

La parole est à M. Jérôme Durain.

M. Jérôme Durain. Cet amendement tend à appliquer la définition du temps de travail par le code du travail, soit 35 heures par semaine, tout en permettant de réduire cette durée en cas de pénibilité et d’horaires atypiques.

L’article 18 oblige à renégocier les accords locaux sur le temps de travail conclus antérieurement à l’adoption de la norme des 1 607 heures annuelles dans les dix-huit mois qui suivent le renouvellement des assemblées. Dans sa rédaction actuelle, il fait l’impasse sur les raisons qui ont prévalu à la négociation de tels accords : la pénibilité et les sujétions particulières de certains emplois dans les collectivités et les établissements publics locaux, tels que les SDIS et les Ehpad, les services ouverts en continu, de nuit et/ou le week-end, mais aussi les faibles marges de manœuvre financières et statutaires pour compenser la disponibilité et la souplesse en cas d’aléa, d’urgence ou de situations exceptionnelles – intempéries ou événements festifs –, ou encore la volonté des employeurs, des agents et de leurs représentants de partager le travail et de créer des emplois.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Cet amendement vise à ce que les sujétions particulières auxquelles sont soumis certains agents territoriaux soient prises en compte dans la définition du temps de travail.

L’amendement est pleinement satisfait par la rédaction actuelle de l’article 7-1 de la loi statutaire et par le décret du 12 juillet 2001 pris pour son application. La commission en demande donc le retrait ; à défaut, l’avis sera défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Même avis.

Mme la présidente. Monsieur Durain, l’amendement n° 355 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Jérôme Durain. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 355 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 18.

(Larticle 18 est adopté.)

Article 18
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 18 - Amendement n° 198 rectifié bis

Articles additionnels après l’article 18

Mme la présidente. L’amendement n° 203 rectifié bis, présenté par M. Brisson, Mme Lavarde, MM. Bazin, Schmitz et Panunzi, Mme Bonfanti-Dossat, M. Bascher, Mme Micouleau, M. Piednoir, Mme Gruny, M. Dufaut, Mme Bruguière, M. Savary, Mmes L. Darcos et Deroche, MM. Savin, Cuypers, Courtial et Bouloux, Mmes Duranton, Imbert et Lamure, MM. Segouin et B. Fournier, Mme Chauvin, MM. Mandelli, Gremillet et Laménie et Mme Delmont-Koropoulis, est ainsi libellé :

Après l’article 18

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le deuxième alinéa de l’article L. 912-1 du code de l’éducation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les obligations de service des enseignants du second degré sont définies sur une base annuelle, en tenant compte de la durée annuelle de travail effectif mentionnée à l’article 65 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État. »

La parole est à M. Max Brisson.

M. Max Brisson. Si j’en crois les propos tenus précédemment, cet amendement ne me vaudra pas que des amis… Il porte en effet sur la définition hebdomadaire du service des enseignants du second degré, laquelle entraîne des rigidités dans le fonctionnement des établissements et a pour conséquence la perte d’un nombre appréciable d’heures d’enseignement pour les élèves.

Il ne s’agit pas, bien sûr, de faire enseigner davantage des professeurs devant les élèves, mais de concevoir leur service d’enseignement sur une base annuelle, comme dans l’enseignement supérieur. Je rappelle, en outre, que le temps passé par les enseignants devant les élèves ne constitue qu’une partie de leur temps de travail.

Cet amendement ne porte que sur la répartition des heures d’enseignement, afin de la rendre plus conforme aux besoins de l’institution et à l’intérêt des élèves. Il vise à définir les obligations de service des enseignants du second degré sur une base annuelle et non plus hebdomadaire, en tenant compte de la durée annuelle de travail effectif mentionnée à l’article 65 bis de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État. Les enseignants du second degré se trouveraient dès lors dans la même situation que leurs collègues certifiés ou agrégés détachés dans l’enseignement supérieur.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Cet amendement tend à annualiser les obligations de service des enseignants du second degré, définies aujourd’hui sur une base hebdomadaire. Il correspond à une recommandation ancienne, reprise par nos collègues Max Brisson et Françoise Laborde dans leur récent rapport sur le métier d’enseignant.

M. Brisson n’est pas de ceux qui entretiennent des fantasmes sur le temps de travail des enseignants : ce n’est pas parce que les enseignants du secondaire assurent entre 15 et 20 heures de cours hebdomadaires qu’ils ne travaillent que 15 à 20 heures par semaine ; il faut évidemment ajouter le temps de préparation des cours, de correction des copies, de participation aux travaux des équipes pédagogiques, de permanence dans l’établissement. Nous le savons tous, comme nous savons que le métier d’enseignant est difficile et souvent éprouvant physiquement et mentalement. La représentation nationale se doit de le reconnaître et de témoigner sa confiance à l’égard de ces professionnels, qui jouent un rôle déterminant pour la formation de la jeunesse comme pour la cohésion de notre société. Nos professeurs sont d’ailleurs moins bien payés que la moyenne de l’OCDE et même deux fois moins bien qu’en Allemagne en début de carrière.

L’annualisation des obligations de service, comme le soulignent nos collègues Brisson et Laborde, n’aurait pas pour objet de faire davantage travailler les enseignants, mais de mieux répartir leur temps de travail et de mieux tenir compte du temps de présence en établissement en dehors des cours. Elle pourrait également limiter les situations dans lesquelles un enseignant se trouve contraint de partager son service hebdomadaire entre plusieurs établissements. Dans ces conditions, l’avis de la commission est favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement partage évidemment l’appréciation portée par Mme la rapporteur dans la première partie de son propos quant au rôle des enseignants et à la nécessité de dire et de répéter que le temps de travail d’un enseignant ne se résume pas au temps passé devant les élèves, mais qu’il inclut d’autres aspects, tels que l’accompagnement de projets, la préparation des cours, la correction des copies, et j’en passe. Il ne saurait donc y avoir de faux débat sur la durée effective du temps de travail des enseignants.

Contrairement à ce que vient d’exprimer Mme la rapporteur à l’instant, nous considérons que le maintien d’une norme hebdomadaire est un gage d’équité et d’organisation auquel le Gouvernement est attaché, même si – M. Brisson le sait en raison de son implication sur les textes relatifs à l’éducation – cette question fait l’objet de discussions récurrentes. Le Gouvernement reste donc sur la position qu’il a toujours défendue devant le Parlement, en faveur du maintien d’une norme hebdomadaire. Par conséquent, l’avis est défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Durain, pour explication de vote.

M. Jérôme Durain. Notre groupe s’est déjà exprimé sur la question de l’annualisation du temps de travail des enseignants dans le cadre de la discussion du projet de loi pour une école de la confiance. La disposition adoptée en commission mixte paritaire jeudi 13 juin prévoit la possibilité d’expérimenter la répartition des heures d’enseignement sur l’ensemble de l’année scolaire, sous réserve d’un accord majoritaire des enseignants, ce qui fait sauter un verrou supplémentaire. Nous avions exprimé nos inquiétudes quant à cette mesure.

Cet amendement tend à aller encore plus loin en sortant du seul domaine de l’expérimentation pour ouvrir la porte à une annualisation des heures, sans préciser la forme que celle-ci pourrait prendre. On ne sait ni qui en prendrait la décision ni si l’accord des enseignants concernés serait obligatoire.

Nous pouvons entendre que, dans des cas très précis, l’annualisation peut avoir quelques vertus, par exemple en EPS, mais les dispositions légales existantes permettent déjà ces adaptations.

Sa généralisation serait préjudiciable à la fois pour les élèves et pour les enseignants.

S’agissant des enseignants, vous avez vous-même déposé un autre amendement, dans l’objet duquel vous rappelez que ceux-ci effectueraient en moyenne entre 41 et 44 heures de travail effectif par semaine. Quel serait ce chiffre si leur temps de travail était annualisé ? Cette mesure risque de dégrader profondément leurs conditions de travail. Elle n’est donc pas acceptable.

Elle serait, surtout, préjudiciable pour les élèves, qu’elle se traduise par un changement d’enseignant en milieu d’année ou par un rythme d’apprentissage déséquilibré par le regroupement des heures de certaines matières sur des périodes plus courtes. Rien de tout cela n’est dans leur intérêt.

Nos enfants ont besoin de stabilité et de régularité, le processus d’apprentissage nécessite de prendre du temps. L’étalement sur une année leur permet d’assimiler petit à petit le savoir qui leur est transmis ; l’alternance des matières rythme une journée, puis une semaine. C’est ainsi que l’on apprend, en reprenant ce qui a été vu au cours précédent, durant l’ensemble de l’année scolaire.

Le cadre réglementaire du service des enseignants doit absolument être maintenu, car il s’agit d’un garde-fou essentiel pour préserver à la fois les conditions de travail des enseignants et celles des élèves.

Mme la présidente. Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il est minuit passé. Je vous propose de prolonger notre séance jusqu’à zéro heure trente, afin de poursuivre plus avant l’examen de ce texte.

Il n’y a pas d’observation ?…

Il en est ainsi décidé.

La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. Concernant cet amendement, dont le mérite revient à notre collègue Max Brisson, qui connaît bien ces sujets, et dont je suis cosignataire, avec d’autres collègues, je veux dire que je le soutiendrai. Notre collègue a insisté sur l’engagement des enseignants et sur l’intérêt des élèves. C’est en effet un sujet primordial qu’il convient d’évoquer.

Nous avons entendu des marques de respect et de reconnaissance pour les efforts fournis par l’ensemble des personnels des trois fonctions publiques en termes de temps de travail, mais aussi de salaires. Ceux-ci sont souvent modestes au regard de leur engagement.

On fait souvent référence aux lois de 1984, une date bien éloignée. Modestement, je me demande si ces textes sont toujours adaptés aux évolutions de la société et du travail. Nous devons sans doute nous poser la question.

En tout état de cause, je voterai cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.

M. Max Brisson. Je remercie Marc Laménie de son soutien appuyé.

Madame la rapporteur, j’apprécie beaucoup l’avis que vous avez rendu, ainsi que les propos que vous avez tenus sur les professeurs. Nous avons travaillé toute la semaine sur le projet de loi pour une école de la confiance, et la Haute Assemblée a dit la confiance qu’elle porte aux professeurs. C’est important par les temps qui courent, comme il est important de rappeler que leur temps de travail ne se résume pas au temps passé devant les élèves, mais qu’il inclut la préparation des cours et la correction des copies.

Monsieur Durain, je ne partage absolument pas vos remarques à propos de la pédagogie et des élèves. L’annualisation du temps de travail des enseignants est au service des élèves, dans la mesure où elle doit permettre une organisation pédagogique beaucoup plus souple et la construction de projets d’établissement. À ce titre, il est surprenant que celles et ceux qui, lorsqu’ils étaient aux affaires, ont beaucoup mis en avant lesdits projets se refusent à donner aux établissements les moyens de les mener à bien, en raison de la rigidité des obligations réglementaires de service hebdomadaire.

Il est vrai que la loi pour une école de la confiance va permettre d’en sortir, dans le cadre de l’expérimentation et avec l’accord de tous les professeurs concernés. C’est un premier pas que l’on doit au Sénat et à Jean-Michel Blanquer, mais les établissements ne seront capables de s’adapter à la réalité de leurs élèves, et donc de mettre en place des pédagogies différenciées, que lorsqu’ils pourront sortir de ce cadre très rigide qu’est l’obligation réglementaire de service.

Monsieur le secrétaire d’État, je me doutais de votre réponse, parce que je sais combien il a fallu négocier avec Jean-Michel Blanquer pour introduire cette mesure dans l’article 8 du projet de loi pour une l’école de la confiance. J’ai pourtant la ferme conviction que nous n’irons vers une école différenciée, mieux adaptée aux élèves, qu’en levant ce verrou et en donnant davantage de souplesse à chaque établissement pour organiser une pédagogie plus appropriée, sans pour autant que, sur une année, les professeurs passent plus d’heures devant les élèves. (MM. Yves Bouloux et Jean-Marc Boyer applaudissent.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 203 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

Article additionnel après l'article 18 - Amendement n° 203 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article 18 bis

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 18.

L’amendement n° 198 rectifié bis, présenté par MM. Brisson, Bascher et Bazin, Mmes L. Darcos et Bonfanti-Dossat, MM. Panunzi et Schmitz, Mmes Micouleau et Gruny, M. Dufaut, Mme Bruguière, MM. Savin, Cuypers, Bonhomme, Courtial et Bouloux, Mmes Duranton, Imbert et Lamure, MM. Segouin et B. Fournier, Mme Chauvin, MM. Mandelli et Laménie et Mme Delmont-Koropoulis, est ainsi libellé :

Après l’article 18

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement présente au Parlement, dans un délai d’un an à compter de la publication de la présente loi, un rapport recensant le temps de travail effectif des professeurs du premier et du second degré.

La parole est à M. Max Brisson.

M. Max Brisson. Cet amendement aura sans doute moins les faveurs de Mme la rapporteur, puisqu’il vise à demander un rapport.

Le temps de travail déclaré – c’est la seule source dont nous disposons – par les enseignants s’élève en moyenne à plus de 44 heures hebdomadaires dans le premier degré et à 41 heures dans le second degré, masquant de grandes disparités : il varie parfois du simple au double selon le corps d’appartenance ou l’âge.

Une part considérable du travail des professeurs, y compris en établissement, s’effectue au-delà du temps passé devant leurs élèves. Pourtant, ce travail n’est pas reconnu, et l’institution n’en connaît pas le détail autrement que sur des bases déclaratives. Les organisations syndicales sont d’ailleurs fondées à parler de « travail caché », ce qui ne permet pas de bien valoriser la fonction enseignante.

Voilà pourquoi, malgré le peu d’appétence de notre institution, de la commission des lois et particulièrement de son président, pour les rapports demandés au Gouvernement, cet amendement vise, dans un souci de bonne politique et de transparence, à ce que le Gouvernement présente au Parlement, dans un délai d’un an à compter de la publication de la présente loi, un rapport recensant le temps de travail effectif des professeurs du premier et du second degré.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Sans surprise, conformément à ce que M. Brisson a pressenti, la commission n’est pas favorable à cet amendement tendant à la remise d’un rapport au Parlement sur le temps de travail effectif des enseignants du premier et du second degré et en demande le retrait.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Même avis.

Mme la présidente. Monsieur Brisson, l’amendement n° 198 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Max Brisson. Je ne souhaite pas faire de peine à Mme la rapporteur à une heure si tardive, après les propos qu’elle a bien voulu tenir lors de la discussion de l’amendement précédent. (Sourires.) Par conséquent, je le retire.

Mme la présidente. L’amendement n° 198 rectifié bis est retiré.

Article additionnel après l'article 18 - Amendement n° 198 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 18 bis - Amendement n° 211 rectifié

Article 18 bis

I. – Le chapitre VII de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée est ainsi modifié :

1° L’intitulé est complété par les mots : « et temps de travail » ;

2° Il est ajouté un article 65 bis ainsi rédigé :

« Art. 65 bis. – Sans préjudice des dispositions statutaires fixant les obligations de service pour les personnels enseignants et de la recherche, la durée du travail effectif des agents de l’État est fixée à trente-cinq heures par semaine. Le décompte du temps de travail est réalisé sur la base d’une durée annuelle de travail effectif de 1 607 heures, sans préjudice des heures supplémentaires susceptibles d’être effectuées, dans des conditions prévues par un décret en Conseil d’État précisant notamment les mesures d’adaptation tenant compte des sujétions auxquelles sont soumis certains agents. »

II. – (Non modifié) Le Gouvernement présente au Parlement dans un délai d’un an à compter de la publication de la présente loi un rapport sur les actions mises en œuvre au sein de la fonction publique de l’État pour assurer le respect des dispositions mentionnées à l’article 65 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État.

Mme la présidente. L’amendement n° 37, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous assistons au retour de la vieille rengaine, selon laquelle les fonctionnaires ne travaillent pas assez. Il me semble donc nécessaire de faire trois observations.

Premièrement, le Gouvernement a pris bien garde à ne pas intégrer les personnels de l’école primaire dans son article. C’est probablement un choix judicieux pour lui, au vu des derniers chiffres rendus publics par la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance, qui a dressé le tableau des heures de travail effectuées chaque semaine par les enseignants : 38 heures et 38 minutes pour les professeurs de maternelle, 43 heures et 27 minutes pour ceux qui enseignent en élémentaire et 45 heures et 26 minutes pour les directeurs d’école. Ces chiffres élevés ne peuvent pas s’expliquer par le nombre de jours de congé des enseignants, puisque le rapport de la DEPP pointe que ces derniers consacrent au travail entre deux et trois semaines de congés.

Deuxièmement, poser la question du temps de travail n’a qu’un seul objectif : faciliter le plan de départ massif souhaité par le Gouvernement. La mesure proposée permettrait ainsi de diminuer de 30 000 le nombre de fonctionnaires.

Troisièmement, l’article semble intégrer les personnels à statut particulier ; je pense notamment aux militaires, qui connaissent aujourd’hui un surdéploiement atteignant tout de même cent quarante jours annuels hors du domicile.

Je m’interroge, à ce titre, sur la possibilité de mettre en œuvre cette mesure en même temps que les dispositions de la directive européenne 2003/88/CE concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail, dont l’application a été rendue obligatoire à la suite de la saisine du Conseil d’État par une APNM.

J’ai également à l’esprit le personnel diplomatique, au sens large, dont la plupart des fiches de poste, s’agissant notamment des emplois à responsabilité, mentionnent aujourd’hui une situation d’astreinte 7 jours sur 7, 24 heures sur 24. Rappelons que ces fonctionnaires offrent à l’État un total d’heures atteignant 70 ETPT.

Pour tout dire, le rapport produit par l’IGF, qui est à la source de cette disposition, pose question. Il évalue à 310 000 fonctionnaires sur 5,5 millions ceux qui travailleraient moins de 35 heures par semaine. Pour arriver à ce chiffre, on cloue au pilori, notamment, les 30 000 agents concernés par la journée d’ancienneté supprimée en 1982.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Cet amendement de suppression est contraire à la position de la commission. Il ne nous a pas paru choquant que la durée hebdomadaire de travail des agents de l’État soit fixée dans la loi, sans préjudice d’éventuelles adaptations pour tenir compte de sujétions particulières. L’avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Il est évidemment défavorable.

Il y a quelques instants, M. Marie a fait référence au rapport de l’IGF sur le temps de travail des fonctionnaires. Je ne partage pas tout à fait sa conclusion sur ce rapport, mais il a eu raison de rappeler que celui-ci concerne les agents qui ne bénéficient pas d’un temps de travail défini, en particulier les militaires, évoqués par Mme Apourceau-Poly, et les enseignants.

Lorsqu’on retranche des 2,4 millions d’agents de l’État ceux qui bénéficient ou, plutôt, font l’objet – dire « bénéficient » serait un jugement de valeur – d’un temps de travail particulier, il en reste 1,1 million. Parmi ceux-ci, 310 000 agents présentent un temps de travail inférieur à 1 607 heures par an : 120 000 à raison de sujétions particulières reconnues et 190 000 pour lesquels nous devons réinterroger les raisons de ce temps.

Par cet arrimage au code du travail, l’État s’engage à s’appliquer à lui-même ce qu’il attend des autres collectivités et employeurs publics.

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.

M. Didier Marie. Puisque M. le secrétaire d’État fait référence au rapport de l’IGF, j’aimerais lui demander ce qu’il pense du rapport annuel sur l’état de la fonction publique pour 2018. Ce rapport mentionne, pour les temps pleins dans la fonction publique de l’État, un temps de travail annuel de 1 749 heures – bien supérieur, donc, aux 1 607 heures…

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. J’en pense que c’est un bon rapport, comme tous les états annuels de la fonction publique. Ce document fournit en effet un nombre considérable de données statistiques.

Sur le point que vous soulevez, même si nous avons quelques interrogations en termes de méthodologie, les chiffres démontrent qu’il y a un besoin d’équité : certains agents de l’État travaillent bien au-delà des 1 607 heures, d’autres ne sont pas dans ce cas. La disposition que nous soumettons à votre adoption permettra aussi de rétablir cette équité.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 37.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 385, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 4

1° Remplacer les mots :

fixée à trente-cinq heures par semaine

par les mots :

celle fixée à l’article L. 3121-27 du code du travail

2° Supprimer les mots :

, sans préjudice des heures supplémentaires susceptibles d’être effectuées,

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Il s’agit de rétablir la référence à la durée légale du travail telle que définie par le code du travail, pour des raisons d’équité avec le secteur privé.

Par ailleurs, nous proposons de supprimer la référence aux heures supplémentaires, qui, selon nous, pourrait être source de confusion dans l’application de la durée effective du travail.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. La commission n’a pas souhaité porter atteinte à l’équité entre le secteur public et le secteur privé. Nous avons seulement considéré qu’il était curieux de procéder par renvoi au code du travail pour la détermination de la durée de travail hebdomadaire, tout en inscrivant dans le « dur » de la loi statutaire la base annuelle de décompte de 1 607 heures. Si l’on retenait la rédaction du Gouvernement, il faudrait modifier la loi statutaire le jour où l’on modifierait la durée hebdomadaire de travail dans le secteur privé.

Quant aux heures supplémentaires, notre rédaction n’est source d’aucune confusion. Nous n’avons fait que reprendre, d’ailleurs sur l’initiative du groupe La République En Marche, la rédaction de l’article 1er du décret du 25 août 2000.

L’avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 385.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 18 bis.

(Larticle 18 bis est adopté.)

Article 18 bis
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Article 19

Article additionnel après l’article 18 bis

Mme la présidente. L’amendement n° 211 rectifié, présenté par Mme Gatel, M. Henno, Mmes Loisier et Férat, MM. Laugier, Mizzon, Canevet et Bonnecarrère, Mme Vullien, M. Prince, Mmes Billon et Joissains, M. Moga, Mme Goy-Chavent, MM. Janssens et Lafon, Mmes C. Fournier et Sollogoub et MM. Delcros, Détraigne, Capo-Canellas et Maurey, est ainsi libellé :

Après l’article 18 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au dernier alinéa de l’article 133 de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, après les mots : « organisation du télétravail », sont insérés les mots : « et les possibilités de passage ponctuel en télétravail ».

La parole est à Mme Michèle Vullien.

Mme Michèle Vullien. Il s’agit simplement d’aligner la fonction publique sur le code du travail, qui, depuis 2017, ne précise plus que le télétravail doit être effectué de manière régulière.

Faute de précision dans la loi, le décret a restreint les possibilités de télétravail à une organisation régulière et durable. Or les employeurs publics doivent être exemplaires dans leur capacité d’adaptation aux nouvelles demandes sociétales. C’est pourquoi nous proposons que l’employeur puisse autoriser, à la demande de l’agent, une période ponctuelle de télétravail.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Cet amendement vise à assouplir les dispositions légales relatives au télétravail dans la fonction publique, afin d’autoriser le passage ponctuel au télétravail, sur décision de l’employeur public et à la demande de l’agent.

Cette proposition est cohérente avec les modifications apportées au régime de télétravail dans le secteur privé par l’ordonnance du 22 septembre 2017. La commission est donc favorable à l’amendement, d’autant que le télétravail, s’il est organisé convenablement et d’un commun accord entre l’employeur et l’agent, peut contribuer au bien-être au travail et à l’amélioration du service rendu aux usagers, mais aussi à la réduction des émissions polluantes dues aux transports.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Initialement, le Gouvernement considérait cette demande comme satisfaite. À la réflexion, nous estimons que la précision peut être utile. Nous nous en remettons donc à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 211 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 18 bis.

Article additionnel après l'article 18 bis - Amendement n° 211 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 19 - Amendement n° 61 rectifié quinquies

Article 19

Le chapitre II de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée est ainsi modifié :

1° A (nouveau) L’article 12 est ainsi modifié :

a) Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;

b) Il est ajouté un II ainsi rédigé :

« II. – Une délégation du Centre national de la fonction publique territoriale est établie dans chaque région. Son siège est fixé par le conseil d’administration. » ;

1° Après le premier alinéa de l’article 12-4, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Chaque année, avant le 30 septembre, le Centre national de la fonction publique territoriale remet au Parlement un rapport portant sur son activité et sur l’utilisation de ses ressources. Ce rapport présente, notamment, les actions de formation menées, en formations initiale et continue, en matière de déontologie. » ;

2° L’article 14 est ainsi modifié :

a) À la fin de la première phrase du deuxième alinéa, la référence : « et 18-2 » est remplacée par les références : « , 18-2 et 18-3 » ;

b) Les trois dernières phrases du quatrième alinéa sont remplacées par quatre phrases ainsi rédigées : « Ils élaborent un schéma régional ou interrégional de coordination, de mutualisation et de spécialisation, qui désigne parmi eux un centre chargé d’assurer leur coordination. À défaut, le centre coordonnateur est le centre chef-lieu de région. Ce schéma détermine les modalités d’exercice des missions que les centres de gestion gèrent en commun ainsi que les modalités de remboursement des dépenses correspondantes. L’exercice d’une mission peut être confié par ce schéma à un ou plusieurs centres pour le compte de tous. » ;

c) À la fin du cinquième alinéa, les mots : « la charte » sont remplacés par les mots : « le schéma de coordination, de mutualisation et de spécialisation » ;

d) Après le même cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Une convention est conclue entre chaque centre de gestion coordonnateur et le Centre national de la fonction publique territoriale, visant à définir l’articulation de leurs actions territoriales, notamment en matière d’organisation des concours et des examens professionnels, de prise en charge des fonctionnaires momentanément privés d’emploi, de reclassement des fonctionnaires devenus inaptes à l’exercice de leurs fonctions, d’accompagnement personnalisé à la mobilité et d’emploi territorial. Un bilan annuel de la convention est établi et présenté à la conférence mentionnée à l’article 27. » ;

e) À la fin du 2°, les mots : « et B » sont remplacés par les mots : « , B et C » ;

f) Après le 6°, sont insérés des 7° à 11° ainsi rédigés :

« 7° La mission définie au I de l’article 23 ;

« 8° La publicité des listes d’aptitude établies en application des articles 39 et 44 ;

« 9° L’aide aux fonctionnaires à la recherche d’un emploi après une période de disponibilité ;

« 10° Une assistance juridique statutaire, y compris pour la fonction de référent déontologue prévue à l’article 28 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

« 11° Une assistance à la fiabilisation des comptes de droits en matière de retraite. » ;

g) Au début du quatorzième alinéa, les mots : « La charte est transmise » sont remplacés par les mots : « Le schéma de coordination, de mutualisation et de spécialisation est transmis » ;

2° bis L’article 15 est ainsi modifié :

a) La dernière phrase de l’avant-dernier alinéa est supprimée ;

b) Après le même avant-dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu’une collectivité territoriale ou un établissement public facultativement affilié à un centre de gestion souhaite s’en retirer, il en adresse la demande écrite au président du centre de gestion. Ce dernier saisit pour avis les organes délibérants des autres collectivités et établissements affiliés, qui disposent d’un délai de trois mois pour se prononcer. À défaut de délibération dans ce délai, leur avis est réputé défavorable. Si les deux tiers des collectivités et établissements affiliés représentant au moins les trois quarts des fonctionnaires concernés ou les trois quarts de ces collectivités et établissements représentant au moins les deux tiers des fonctionnaires concernés s’y opposent, le retrait ne peut avoir lieu. » ;

3° Après l’article 18-2, il est inséré un article 18-3 ainsi rédigé :

« Art. 18-3. – Des centres de gestion de départements limitrophes ou de collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution situées dans la même zone géographique peuvent décider, par délibérations concordantes de leurs conseils d’administration et après avis de leurs comités sociaux territoriaux, de constituer un centre interdépartemental unique compétent sur le territoire des centres de gestion auxquels il se substitue. Les communes des départements concernés et les établissements publics mentionnés à l’article 2 de la présente loi et remplissant les conditions d’affiliation obligatoire définies à l’article 15 sont alors affiliés obligatoirement au centre interdépartemental de gestion. Les départements concernés, les communes situées dans ces départements et leurs établissements publics mentionnés à l’article 2 dont l’affiliation n’est pas obligatoire peuvent s’affilier volontairement au centre interdépartemental de gestion, dans les conditions mentionnées à l’article 15. Les délibérations mentionnent le siège du centre interdépartemental et, pour les centres relevant de régions différentes, le centre de gestion chargé d’assurer la coordination au niveau régional ou interrégional. » ;

4° (Supprimé)

Mme la présidente. L’amendement n° 347 rectifié bis, présenté par Mme Noël, M. D. Laurent, Mme Deromedi, M. Bonhomme, Mme Duranton et MM. Gremillet et Mandelli, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 10

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…) Après le même quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le schéma de coordination, de mutualisation et de spécialisation prévoit notamment l’impact prévisionnel de la mutualisation sur les effectifs des centres de gestion concernés et sur leurs dépenses de fonctionnement. Le schéma est transmis pour avis à chacun des conseils d’administration des centres de gestion concernés qui dispose d’un délai de trois mois pour se prononcer. » ;

La parole est à Mme Sylviane Noël.

Mme Sylviane Noël. Cet amendement vise à établir un schéma de mutualisation des centres de gestion, avec une charte de coordination : pas de gouvernance au niveau supérieur, mais une charte suffisamment contraignante sur le fonctionnement intercentres, avec des missions obligatoires et d’autres optionnelles. L’objectif est d’homogénéiser les missions assurées sur tout le territoire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. En premier lieu, les auteurs de cet amendement proposent que le schéma de coordination, de mutualisation et de spécialisation conclu par les centres de gestion au niveau régional ou interrégional prévoie notamment l’incidence prévisionnelle de la mutualisation sur les effectifs des centres de gestion concernés et sur leurs dépenses de fonctionnement. Cet ajout nous semble superflu : la coordination, la mutualisation et la spécialisation ont bien pour objet, notamment, de dégager des économies d’échelle.

En second lieu, il est proposé que le schéma soit transmis pour avis au conseil d’administration de chaque centre. Cela nous semble impossible, puisque les centres de gestion sont les autorités décisionnaires en la matière : dans la mesure où ils approuvent le schéma, ils ne peuvent pas en plus être consultés.

Je sollicite donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Même avis.

Mme la présidente. Madame Noël, l’amendement n° 347 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Sylviane Noël. Non, je le retire.

Mme la présidente. L’amendement n° 347 rectifié bis est retiré.

L’amendement n° 388, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéas 22 à 25

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Le texte de la commission aurait pour effet de durcir les conditions actuelles de désaffiliation d’un centre de gestion pour les collectivités territoriales et établissements publics affiliés volontairement. Nous proposons de maintenir les dispositions actuelles, qui semblent plus équilibrées, en supprimant les alinéas introduits par la commission des lois.

Par transparence, je reconnais qu’il y a eu débat au sein de la majorité et du Gouvernement. Nous étions saisis de demandes de modification du seuil qui détermine si l’affiliation est obligatoire ou volontaire, plutôt dans le sens d’un abaissement, destiné à faciliter la désaffiliation, en tout cas le maintien d’une simple affiliation socle.

Nous avons fait le choix du statu quo sur les seuils ; nous proposons de faire le même choix sur les règles qui encadrent les demandes de désaffiliation.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. La disposition que le Gouvernement entend supprimer ne nous paraît pas constituer un durcissement. Elle modifie les conditions de retrait d’une collectivité territoriale ou d’un établissement volontairement affilié à un centre de gestion.

Nous n’avons pas modifié les conditions de majorité requises pour s’opposer au retrait, soit les deux tiers des employeurs affiliés représentant au moins les trois quarts des fonctionnaires concernés ou les trois quarts des employeurs représentant au moins les deux tiers des fonctionnaires.

En revanche, nous avons prévu que, si les collectivités territoriales et établissements affiliés ne se prononcent pas dans un délai de trois mois, leur avis sera réputé défavorable. Ce dispositif nous paraît garantir un bon équilibre entre la liberté des collectivités territoriales volontairement affiliées et la nécessité de protéger les centres de gestion contre les décisions de retrait abrupt susceptibles de les déstabiliser fortement.

L’avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 388.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 255, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéas 26 et 27

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Mme Michelle Gréaume. Les centres de gestion de la fonction publique territoriale sont des établissements publics locaux à caractère administratif. Organisés sur une base départementale, ils sont chargés d’assister les collectivités territoriales et leurs établissements publics dans la gestion de leurs ressources humaines.

Leurs missions ne sont pas mineures, puisque ces centres assurent notamment la publicité des listes d’aptitude et des créations et vacances d’emploi. Ils sont également en charge des fonctionnaires momentanément privés d’emploi, ainsi que du reclassement de ceux devenus inaptes à l’exercice de leurs fonctions. Autant de missions qui nécessitent proximité et dialogue permanent.

L’article 19, qui favorise la création de centres interdépartementaux de gestion se substituant aux centres départementaux, ne peut donc nous convenir. S’il était adopté, le centre interdépartemental de gestion assurerait, demain, les missions normalement dévolues aux centres départementaux, qui seraient fusionnés.

Nous ne sommes pas dupes : ces possibilités de fusion sont décidées selon des considérations uniquement budgétaires, puisqu’une fusion ne permet ni d’augmenter ni de mutualiser les moyens. L’étude d’impact du projet de loi précise d’ailleurs qu’il s’agit de « faire des économies sur les fonctions supports ».

Nous proposons la suppression des alinéas encourageant ces fusions, qui nuiraient à la proximité nécessaire à l’exercice des fonctions de ressources humaines.

Mme la présidente. L’amendement n° 588, présenté par Mme Di Folco et M. L. Hervé, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 27

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les agents des centres de gestion qui décident de constituer un centre interdépartemental unique en application du premier alinéa du présent article relèvent de celui-ci, de plein droit, à la date de sa création, dans les conditions de statut et d’emploi qui sont les leurs. Les articles L. 5111-7 et L. 5111-8 du code général des collectivités territoriales leur sont applicables. Les agents contractuels conservent, à titre individuel, le bénéfice des stipulations de leur contrat. »

La parole est à Mme le rapporteur, pour présenter cet amendement et donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 255.

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. L’amendement n° 588 vise à permettre le transfert de plein droit des agents des centres de gestion qui décideraient de fusionner au centre de gestion issu de la fusion.

Quant à l’amendement n° 255, visant à supprimer la possibilité offerte aux centres de gestion de départements limitrophes de fusionner, la commission n’y est pas favorable. La fusion librement consentie par les centres de gestion, c’est-à-dire par les collectivités et établissements adhérents, peut être un moyen d’améliorer le service rendu aux employeurs publics territoriaux comme aux agents. Le principe de mutualisation est toujours bénéfique.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Il est identique à celui de la commission sur l’amendement n° 255. Nous souhaitons que les centres de gestion, s’ils le souhaitent, puissent fusionner. À la demande des représentants de ces centres, nous avons même élargi cette possibilité aux départements limitrophes ne faisant pas partie de la même région.

Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 588.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 255.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 588.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 528, présenté par MM. de Belenet, Mohamed Soilihi, Amiel, Bargeton et Buis, Mme Cartron, MM. Cazeau, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Navarro, Patient, Patriat et Rambaud, Mme Rauscent, M. Richard, Mme Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :

Alinéa 28

Rétablir le 4° dans la rédaction suivante :

La seconde phrase du premier alinéa de l’article 27 est complétée par les mots : « ainsi que d’établir un bilan du schéma de coordination, de mutualisation et de spécialisation et de le réviser en tant que de besoin ».

La parole est à M. Bernard Buis.

M. Bernard Buis. La commission a approuvé le renforcement de la mutualisation des moyens des centres de gestion aux niveaux interdépartemental et régional. Toutefois, elle n’a pas jugé opportun de donner compétence à la conférence régionale de l’emploi et de la formation pour dresser et réviser le bilan du schéma de coordination, de mutualisation et de spécialisation établi par les centres de gestion. Je rappelle que ce schéma remplacera les chartes élaborées par les centres qui décident d’organiser des missions au niveau régional.

Nous avons à cet égard un léger désaccord de fond. Il faut bien se représenter que cette présentation va de pair avec l’obligation prévue par le projet de loi d’établir ce schéma au niveau régional. Quoi de mieux, en l’espèce, que de soutenir l’effort de mutualisation et de spécialisation des expertises par la valorisation de cet échelon ?

Nous proposons de mettre en avant le rôle des conférences régionales, organisations souples et lieux de dialogue pour coordonner les missions des collectivités territoriales et des centres de gestion. Il me paraît cohérent que le bilan des schémas de coordination se fasse au sein des conférences régionales, chargées de la coordination des missions en matière d’emploi public territorial.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Il n’appartient pas à la conférence régionale de l’emploi d’établir un bilan du schéma de coordination conclu par les centres de gestion, encore moins de le réviser. Par ailleurs, on ne voit pas comment, en droit, un organe dépourvu de la personnalité morale pourrait réviser un schéma conclu entre personnes morales. L’avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. L’amendement présenté par M. Buis vise à rétablir une disposition que le Gouvernement avait fait figurer dans le projet de loi. Je ne puis qu’y être favorable. Madame la rapporteur, nous continuerons, je pense, à avoir cette discussion.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 528.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 303 rectifié, présenté par MM. Canevet, Delcros, Moga et Médevielle, Mme Goy-Chavent et MM. Longeot et Laugier, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

… La dernière phrase du I de l’article 23 est ainsi rédigée : « Les centres de gestion accompagnent la collecte des données mentionnées à l’article 9 bis A de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et présentent chaque année au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale une synthèse des rapports sociaux uniques. »

La parole est à M. Michel Canevet.

M. Michel Canevet. Il convient d’inscrire dans la loi que les centres de gestion accompagnent les collectivités territoriales pour le recueil des données sociales tendant à la réalisation des bilans sociaux, mais surtout que ceux-ci sont présentés au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale. Il importe en effet de se projeter dans la gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences. Or c’est à partir de l’exploitation de ces données qu’on peut y arriver.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Cet amendement, tendant à ce que les centres de gestion accompagnent la collecte des données sociales des collectivités territoriales, est largement satisfait par l’article 3 A du projet de loi dans la rédaction que nous avons adoptée. J’en demande donc le retrait.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Je sollicite également le retrait de cet amendement, pour la même raison. J’ajoute qu’il nous paraît difficilement envisageable d’imposer aux collectivités territoriales de transmettre à leur centre de gestion des informations relatives à leur personnel sans lien avec les missions de ces centres. L’amendement est d’autant plus satisfait qu’une synthèse nationale bisannuelle élaborée par la DGCL et le Centre national de la fonction publique territoriale est déjà présentée au CSFPT pour nourrir le débat que M. le sénateur appelle de ses vœux.

M. Michel Canevet. Je retire l’amendement !

Mme la présidente. L’amendement n° 303 rectifié est retiré.

L’amendement n° 345 rectifié bis, présenté par Mme Noël, M. D. Laurent, Mme Deromedi, M. Bonhomme, Mme Duranton et MM. Gremillet et Mandelli, est ainsi libellé :

Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

… L’article 23-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« … Les informations contenues dans le rapport sur l’état de la collectivité mentionné à l’article 33. »

La parole est à Mme Sylviane Noël.

Mme Sylviane Noël. Dans le cadre de leur mission d’information sur l’emploi public territorial, les centres de gestion sont chargés d’établir un bilan de la situation de l’emploi public territorial et de la gestion des ressources humaines et d’élaborer les perspectives à moyen terme d’évolution de cet emploi, des compétences et des besoins de recrutement.

Ils ont également compétence pour la collecte des données sociales en vue de l’élaboration du rapport sur l’état de la collectivité territoriale, de l’établissement ou du service, au travers des bilans sociaux présentés par l’autorité territoriale au comité technique.

C’est ainsi que les centres de gestion ont pu, lors de leur dernière campagne de recueil de données, collecter les données sociales relatives à près de 1,5 million d’agents de la fonction publique territoriale. L’exploitation de ces données étant particulièrement utile aux collectivités territoriales pour répondre aux enjeux auxquels elles sont confrontées, les auteurs de cet amendement proposent que l’ensemble des collectivités territoriales et établissements mentionnés à l’article 2 de la loi du 26 janvier 1984 communiquent au centre de gestion de leur ressort les informations constitutives du bilan social.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Cet amendement nous semble incompatible avec l’article 3 bis A du projet de loi, qui crée un rapport social unique et supprime le rapport sur l’état de la collectivité territoriale. J’en sollicite donc le retrait.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Même avis.

Mme la présidente. Madame Noël, l’amendement n° 345 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Sylviane Noël. Non, je le retire.

Mme la présidente. L’amendement n° 345 rectifié bis est retiré.

L’amendement n° 562 n’est pas soutenu.

Je mets aux voix l’article 19, modifié.

(Larticle 19 est adopté.)

Article 19
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 19 - Amendement n° 60 rectifié sexies

Articles additionnels après l’article 19

Mme la présidente. L’amendement n° 61 rectifié quinquies, présenté par MM. Canevet et Delcros, Mme Goy-Chavent et MM. Janssens, Laugier, Henno, Le Nay, Kern, Longeot, Cadic, Bonnecarrère, Moga, Détraigne, Capo-Canellas et D. Dubois, est ainsi libellé :

Après l’article 19

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Avant le dernier alinéa de l’article 13 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le président peut déléguer, sous sa surveillance et sa responsabilité, une partie de ses attributions à un membre du conseil d’administration. Dans le cas où les membres du bureau perçoivent des indemnités de fonction, le conseil d’administration peut choisir d’en verser une partie au membre bénéficiaire de la délégation, dans les limites de l’enveloppe indemnitaire globale. Cette délégation subsiste tant qu’elle n’est pas rapportée. »

II. – Le I du présent article entre en vigueur le 1er janvier 2020.

La parole est à M. Michel Canevet.

M. Michel Canevet. Avec votre permission, madame la présidente, je présenterai en même temps l’amendement n° 60 rectifié sexies.

Article additionnel après l'article 19 - Amendement n° 61 rectifié quinquies
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article 20 (début)

Mme la présidente. J’appelle donc en discussion l’amendement n° 60 rectifié sexies, présenté par MM. Canevet et Delcros, Mme Goy-Chavent et MM. Janssens, Laugier, Henno, Le Nay, Kern, Longeot, Cadic, Bonnecarrère, Moga, Détraigne, Capo-Canellas et D. Dubois, et ainsi libellé :

Après l’article 19

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après le sixième alinéa de l’article 12 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le président peut déléguer, sous sa surveillance et sa responsabilité, une partie de ses attributions à un vice-président ou à un membre du conseil d’administration. Dans le cas où le président perçoit des indemnités de fonction, le conseil d’administration peut choisir d’en verser une partie au membre bénéficiaire de la délégation, dans les limites de l’enveloppe indemnitaire globale destinée au président. Cette délégation subsiste tant qu’elle n’est pas rapportée. »

II. – Le I du présent article entre en vigueur le 1er janvier 2020.

Veuillez poursuivre, monsieur Canevet.

M. Michel Canevet. Ces deux amendements importants portent, l’un, sur les centres de gestion et, l’autre, sur le Centre national de la fonction publique territoriale. Il s’agit de permettre aux élus du conseil d’administration de ces deux instances importantes pour la gestion des carrières dans la fonction publique et la formation des agents publics d’obtenir délégation du président pour exercer un certain nombre de missions. Ils pourraient à ce titre percevoir des indemnités, dans le respect, bien entendu, de l’enveloppe globale.

Je ne propose pas d’induire des charges supplémentaires pour les centres de gestion et le CNFPT. Simplement, le travail que représente, par exemple, le fait d’assister pendant une journée entière à la commission de réforme mérite une petite indemnisation.

Il faut laisser aux conseils d’administration de ces instances la liberté de s’organiser et de répartir le travail, ainsi que les indemnités, dans le cadre de l’enveloppe globale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Avis favorable sur les deux amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement considère que ces questions liées à l’exercice des fonctions des élus siégeant dans les centres de gestion et au CNFPT ne relèvent pas directement du présent projet de loi, relatif à la fonction publique, mais davantage du projet de loi sur l’engagement des élus, que Sébastien Lecornu présentera au Parlement très prochainement. Dans l’attente de ce texte, plus opportun pour examiner ce type de dispositions, je sollicite le retrait des amendements ; avis défavorable s’ils sont maintenus.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 61 rectifié quinquies.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 19.

Je mets aux voix l’amendement n° 60 rectifié sexies.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 19.

Article additionnel après l'article 19 - Amendement n° 60 rectifié sexies
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article 20 (interruption de la discussion)

Article 20

(Non modifié)

La loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 précitée est ainsi modifiée :

1° L’article 4 est ainsi rédigé :

« Art. 4. – Les fonctionnaires appartiennent à des corps qui comprennent un ou plusieurs grades et sont régis par un même statut particulier.

« Toutefois, les emplois supérieurs hospitaliers dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État peuvent, eu égard aux fonctions exercées et au niveau de recrutement, ne pas être organisés en corps. » ;

2° L’article 6 est ainsi rédigé :

« Art. 6. – I. – Les personnels de direction et les directeurs des soins sont recrutés et gérés au niveau national.

« Toutefois, leur gestion peut être déconcentrée.

« II. – Les membres des autres corps et emplois sont recrutés et gérés par les autorités investies du pouvoir de nomination conformément aux dispositions relatives à l’organisation des établissements. » ;

3° À la fin de l’article 19, les mots : « en application de l’avant-dernier alinéa de l’article 4 » sont supprimés ;

4° L’article 79 est ainsi rédigé :

« Art. 79. – L’échelonnement indiciaire applicable aux corps, grades et emplois de la fonction publique hospitalière est fixé par décret. » – (Adopté.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous avons examiné 91 amendements au cours de la journée ; il en reste 145 à examiner sur ce texte.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Article 20 (début)
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Discussion générale

12

Ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 26 juin 2019, à quatorze heures trente et le soir :

Désignation des vingt et un membres de la mission commune d’information sur la sécurité maritime.

Suite de la proposition de loi visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral (texte de la commission n° 444, 2018-2019) et de la proposition de loi organique visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral, présentées par M. Alain Richard et les membres du groupe La République En Marche (texte de la commission n° 445, 2018-2019).

Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à préserver les intérêts de la défense et de la sécurité nationale de la France dans le cadre de l’exploitation des réseaux radioélectriques mobiles (texte de la commission n° 580, 2018-2019).

Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de transformation de la fonction publique (texte de la commission n° 571, 2018-2019).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le mercredi 26 juin 2019, à zéro heure trente-cinq.)

Direction des comptes rendus

ÉTIENNE BOULENGER