M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 38 est présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 159 rectifié bis est présenté par MM. Marie, Durain, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Sueur, Sutour, Tourenne, Antiste, Bérit-Débat, Montaugé, Temal et Raynal, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 38.
Mme Éliane Assassi. L’article 22 vise à habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnances pour réformer les modalités de recrutement et de formation des fonctionnaires. Nous en demandons la suppression pour des raisons tant de principe que de contenu.
Sur le plan du principe, tout d’abord, pourquoi recourir aux ordonnances ? Pourquoi adopter une procédure verticale, brutale, expéditive, qui n’associe les parlementaires que de manière résiduelle, à la marge ? Nous rappelons à cet égard que, compte tenu de la sensibilité du régime de la fonction publique, l’article 34 de la Constitution réserve au législateur la fixation des règles concernant les garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires civils et militaires de l’État. Enfin, recourir aux ordonnances, alors même que le présent projet de loi vise une réforme d’ensemble et en profondeur de la fonction publique, nous semble a minima contradictoire.
Sur le fond, cet article va favoriser l’intégration des logiques du new management dès la formation initiale des fonctionnaires, ainsi que dans leur formation continue. De plus, en l’état, les objectifs sont trop flous pour que nous signions un chèque en blanc au Gouvernement. Que signifie concrètement la réforme des voies d’accès ? Le système universel du recrutement par concours sera-t-il mis à mal ? Quelle place attribuer aux contractuels et aux intervenants privés ? Nous rappelons à cet égard que l’égalité d’accès aux concours de la fonction publique est un principe général du droit depuis le fameux arrêt Barel du Conseil d’État de 1954.
Nous nous opposons donc à la philosophie même de cet article, qui met sur le même plan la mobilité entre les trois fonctions publiques et la mobilité vers le privé. Pour résumer, alors que de réels problèmes d’inégalité d’accès, de manque de formation et d’encadrement existent, les dispositions de cet article sont trop floues pour que l’on puisse s’en remettre au Gouvernement.
Enfin, un point nous choque particulièrement. La rédaction initiale du texte ne nous convenait déjà pas, mais la commission a encore aggravé les choses, en supprimant la référence aux « risques d’usure professionnelle », au mépris de la réalité vécue par nos fonctionnaires, souvent dévoués à leur métier et à leur vocation.
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour présenter l’amendement n° 159 rectifié bis.
M. Didier Marie. Cet amendement vise à supprimer l’article 22, qui habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnances en matière de formation des agents publics. Nous considérons que les droits à la formation représentent un enjeu majeur pour l’évolution de carrière des fonctionnaires et qu’il n’y a pas lieu, pour le Parlement, de se dessaisir de ce sujet et de ne pas en délibérer, d’autant que les contours de l’habilitation sont particulièrement vagues.
Par ailleurs, en pleine polémique sur la suppression de l’ENA, annoncée par le Président de la République, les questions de formation, de la base au sommet de l’échelle de la fonction publique, méritent plus qu’une ordonnance : un débat public au Parlement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. En amont de la réunion de la commission, nous nous sommes interrogés sur cet article : fallait-il le supprimer, le champ de la demande d’habilitation étant beaucoup trop large, et même douteux sur le plan constitutionnel, ou proposer une nouvelle rédaction au Gouvernement, plus encadrée et de nature à nous permettre de faire valoir nos arguments en commission mixte paritaire ?
Nous avons choisi la seconde option et fait des choix extrêmement forts, en refusant toute fusion d’écoles dans le cadre de l’ordonnance et toute réforme à l’aveugle du financement du CNFPT, en précisant nos attentes concernant la diversification de la haute fonction publique, notamment pour développer les classes préparatoires intégrées, et en encourageant l’État à mieux gérer les parcours de carrière de ses agents.
Par ailleurs, madame Assassi, à l’alinéa 10 de l’article 22, tel qu’il est rédigé, les risques d’usure professionnelle sont bien mentionnés expressis verbis.
L’avis est défavorable sur les deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Le Gouvernement est également défavorable à ces amendements de suppression.
Oui, madame Assassi, le concours restera la pierre angulaire de l’accès aux écoles de la fonction publique, quel que soit le niveau de qualification. Nous souhaitons que le concours reste le mode de recrutement des agents titulaires. J’ai déjà eu l’occasion de dire que nous avons ouvert une concertation avec les organisations syndicales sur la nature des épreuves, les modalités de sélection, ainsi qu’en vue de développer des concours de troisième voie, éventuellement des concours adaptés, notamment afin de permettre plus facilement l’accès à la titularisation de personnes formées par la voie de l’apprentissage.
Notre objectif est d’améliorer les voies d’accès et la diversité des profils de celles et ceux qui réussissent les concours. Cela passe par un travail sur la préparation à ceux-ci. Il s’agit de faire en sorte que, dans les programmes des écoles de service public, un tronc commun fonde une culture de l’État partagée par tous. Il convient aussi de mettre en œuvre un engagement pris envers les partenaires sociaux quant au renforcement de l’accès à la formation pour les agents ayant la formation initiale la plus faible, en situation de handicap ou occupant un poste qui expose à une usure professionnelle. Sur ce dernier point, madame Assassi, le rapporteur vous a indiqué que l’alinéa 10 est de nature à vous donner satisfaction.
Enfin, nous avons la volonté de réfléchir aussi aux modalités de sortie des écoles, notamment pour ce qui concerne la haute fonction publique et l’accès aux grands corps. Cela nécessite du temps, du travail et une concertation, d’où la mission confiée à M. Thiriez et cette demande d’habilitation à légiférer par ordonnance.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 38 et 159 rectifié bis.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission des lois. (Mme Éliane Assassi s’exclame.)
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 158 :
Nombre de votants | 328 |
Nombre de suffrages exprimés | 328 |
Pour l’adoption | 107 |
Contre | 221 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 441, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéas 2 à 9
Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés :
1° Organiser le rapprochement et modifier le financement des établissements publics et services qui concourent à la formation des agents publics pour améliorer la qualité du service rendu aux agents et aux employeurs publics ;
2° Réformer les modalités de recrutement, harmoniser la formation initiale et développer la formation continue, notamment en matière d’encadrement, des corps et cadres d’emplois de catégorie A en vue d’accroître leur culture commune de l’action publique, leur capacité d’adaptation à la diversité des missions qui leur sont confiées et leur mobilité géographique et fonctionnelle ;
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Il s’agit de rétablir la rédaction que l’Assemblée nationale avait adoptée, à la demande du Gouvernement, s’agissant à la fois de la coordination des écoles et des perspectives à ouvrir en matière de réforme de la haute fonction publique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement qui se borne à rétablir le texte adopté à l’Assemblée nationale.
Cette rédaction nous semble beaucoup trop large pour respecter la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui impose de connaître les finalités et le périmètre de l’ordonnance. Avec le texte du Gouvernement, toutes les écoles de service public de catégorie A pourraient être concernées, tout comme, d’ailleurs, une réforme du CNFPT.
La rédaction de la commission rend service au Gouvernement, en réalité, en réduisant le risque de censure si ce texte devait être déféré au Conseil constitutionnel après son adoption.
En outre, le texte du Sénat ne gêne en rien la mission Thiriez : nous nous sommes d’ailleurs inspirés de sa lettre de mission pour l’écrire et nous avons rencontré M. Thiriez, avec qui nous avons échangé longuement.
Enfin, il ne nous semble pas anormal que le Parlement précise ses attentes en matière de diversification de la haute fonction publique.
M. le président. Je mets aux voix l’article 22.
(L’article 22 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 22
M. le président. L’amendement n° 256, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 22
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 1er de la loi n° 90-8 du 2 janvier 1990 relative à la création d’un troisième concours d’entrée à l’École nationale d’administration est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « , d’une ou plusieurs activités professionnelles ou » sont supprimés ;
2° Au second alinéa, les mots : « activités ou » sont supprimés.
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Nous partageons évidemment la volonté de faire émerger de nouveaux profils et de valoriser des expériences diversifiées au sein de la haute fonction publique, mais une simple référence un peu trop vague aux activités professionnelles n’est pas complètement satisfaisante à cet égard.
La troisième voie du concours d’entrée à l’ENA doit, à notre sens, retrouver sa vocation première : faciliter l’admission de dirigeants associatifs, de représentants des personnels et d’acteurs du dialogue social, ayant acquis une expérience qui peut représenter un atout considérable pour exercer des responsabilités d’encadrement au sein de la fonction publique.
Recruter de tels profils permettrait de mettre en œuvre une gestion plus en phase avec les évolutions de la société, les difficultés vécues et ressenties tant par les usagers que par l’ensemble des agents des services publics.
Or la seule référence aux activités professionnelles conduit finalement à faire bénéficier de cette troisième voie d’accès des personnes dont le profil, les études et les parcours de vie ne sont pas fondamentalement différents de ceux des lauréats des autres concours. Ainsi, le rapport du jury du concours d’entrée à l’ENA de 2018 relevait que les profils des candidats au titre de la troisième voie s’apparentaient assez nettement à ceux des candidats aux autres concours. Il nous semble donc qu’il faut adopter une rédaction beaucoup plus précise afin d’ouvrir plus largement cette troisième voie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. L’adoption de cet amendement supprimerait la possibilité, pour les salariés du secteur privé, de se présenter au troisième concours de l’École nationale d’administration. En 2018, sur un total de quatre-vingts places, huit étaient ouvertes au titre de ce concours.
Le troisième concours a été créé pour diversifier les profils de recrutement de cette école. Le supprimer pénaliserait les salariés de grands groupes, mais également les responsables associatifs, ce qui n’est sans doute pas la volonté du groupe CRCE. L’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 333 rectifié n’est pas soutenu.
Article 22 bis AA (nouveau)
La section 5 du chapitre Ier du titre Ier du livre V du code de la sécurité intérieure est ainsi modifiée :
1° À l’intitulé, le mot : « continue » est supprimé ;
2° Il est ajouté un article L. 511-6-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 511-6-1. – Dans des conditions fixées par les statuts particuliers, les agents nommés au sein des cadres d’emploi de la police municipale et astreints à une formation d’intégration et de professionnalisation en application du 1° de l’article 1er de la loi n° 84-594 du 12 juillet 1984 relative à la formation des agents de la fonction publique territoriale et complétant la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale peuvent être dispensés de tout ou partie de cette formation à raison de la reconnaissance de leurs expériences professionnelles antérieures. »
M. le président. L’amendement n° 373, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
À l’article 2-2 de la loi n° 84-594 du 12 juillet 1984 relative à la formation des agents de la fonction publique territoriale et complétant la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant disposition statutaires relatives à la fonction publique territoriale, après le mot : « compte », sont insérés les mots : « , notamment pour la filière police municipale, ».
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Cet amendement vise à modifier les dispositions adoptées par la commission des lois en matière de formation des fonctionnaires de police ou de gendarmerie nationale qui intègrent le cadre d’emploi de la filière de la police municipale.
Le Gouvernement partage l’avis et l’objectif de la commission. Néanmoins, nous pensons préférable de modifier la loi du 12 juillet 1984 relative à la formation des agents de la fonction publique plutôt que le code de la sécurité intérieure, qui comporte d’ores et déjà une disposition permettant, pour toutes les filières, de tenir compte des formations professionnelles antérieures pour réduire la durée de la formation obligatoire dispensée aux fonctionnaires de la fonction publique territoriale.
La rédaction vise précisément la filière de la police municipale. Les décrets statutaires des différents cadres d’emploi de cette filière pourront ainsi être modifiés pour préciser les conditions dans lesquelles la durée des formations pourra être réduite, en particulier pour les fonctionnaires de police ou de gendarmerie nationale qui voudraient intégrer la police municipale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. Le Gouvernement propose une réécriture globale de l’article 22 bis AA, afin d’intégrer ces dispositions, non pas dans le code de la sécurité intérieure, mais dans la loi du 12 juillet 1984 relative à la formation des agents de la fonction publique territoriale.
Sur le fond, la rédaction proposée par le Gouvernement ne nous semble pas équivalente à celle que nous avons introduite en commission. Elle conduit en effet à moduler la durée de formation des agents de police municipale en fonction non pas de l’expérience professionnelle antérieure, mais des formations professionnelles et des bilans de compétences effectués par l’agent au cours de sa carrière.
Sur la forme, la loi du 12 juillet 1984 ne comporte que des dispositions générales. Il apparaît peu opportun de commencer à y intégrer des dispositions spécifiques à un cadre d’emploi, a fortiori quand il s’agit de la fonction publique territoriale. Notons d’ailleurs que le code de la sécurité intérieure comporte déjà des dispositions sur la formation des agents de police municipale.
Pour ces raisons, nous sommes défavorables à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’article 22 bis AA.
(L’article 22 bis AA est adopté.)
Article 22 bis A
(Non modifié)
Le livre III de la quatrième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Le 2° de l’article L. 4311-12 est ainsi modifié :
a) À la première phrase, après le mot : « étudiants », sont insérés les mots : « et apprentis » et, après la première occurrence du mot : « stage », sont insérés les mots : « ou d’apprentissage » ;
b) À la seconde phrase, après le mot : « étudiants », sont insérés les mots : « et apprentis » ;
2° Au dernier alinéa de l’article L. 4323-4-1, après le mot : « masso-kinésithérapie », sont insérés les mots : « ni aux apprentis en masso-kinésithérapie » ;
3° Au dernier alinéa de l’article L. 4323-4-2, après le mot : « pédicurie-podologie », sont insérés les mots : « ni aux apprentis en pédicurie-podologie » ;
4° Au second alinéa de l’article L. 4344-4-1, après le mot : « orthoptie », sont insérés les mots : « ni aux apprentis en orthoptie » ;
5° Au dernier alinéa de l’article L. 4344-4-2, après le mot : « orthophonie », sont insérés les mots : « ni aux apprentis en orthophonie ».
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 79 rectifié quater est présenté par Mme Lassarade, M. Milon, Mmes Deseyne, Bruguière, Micouleau et L. Darcos, M. Lefèvre, Mme Deromedi, MM. D. Laurent, Rapin et Panunzi, Mme Malet, MM. Husson, Perrin, Raison et Bonne, Mme Berthet, MM. Chaize et B. Fournier, Mme Procaccia, MM. Bonhomme et Schmitz, Mmes Imbert et Lopez, M. Gremillet, Mme Garriaud-Maylam et MM. Mayet et Cazabonne.
L’amendement n° 468 rectifié est présenté par Mmes N. Delattre et Costes, MM. Collin et Guérini, Mme Guillotin, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Requier, Vall, Castelli et Gold.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Chantal Deseyne, pour présenter l’amendement n° 79 rectifié quater.
Mme Chantal Deseyne. Cet article suscite de grandes inquiétudes pour les professions de masseur-kinésithérapeute, d’infirmier, de pédicure-podologue, d’orthoptiste et d’orthophoniste, en raison de la création d’un statut d’apprenti pour les auxiliaires médicaux.
Le recours à cette solution sacrifierait la qualité des soins, la formation des étudiants, et pourrait entraîner des dérives. La formation se ferait « sur le tas », sans formateur compétent. Elle fournirait une main-d’œuvre à bas prix, en particulier pour les structures de type Ehpad qui pourraient employer ces apprentis.
Alors que nous venons d’achever l’examen d’un texte portant sur l’organisation du système de santé, pourquoi parler de la formation de ces auxiliaires de santé au détour de la discussion d’un texte relatif à la fonction publique ?
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour présenter l’amendement n° 468 rectifié.
Mme Françoise Laborde. L’article 22 bis A a été introduit à l’Assemblée nationale sur l’initiative de députés de la majorité, avec l’approbation du Gouvernement, alors même que son dispositif aurait pu être discuté dans le cadre de l’examen du projet de loi Santé, que nous venons d’achever, et faire l’objet d’une concertation, et surtout d’une étude d’impact.
Ses dispositions apparaissent aussi contraires à l’esprit du texte, à visée non catégorielle. En effet, l’article 22 bis A vise clairement quatre filières : les masso-kinésithérapeutes, les orthoptistes, les pédicures-podologues et les orthophonistes.
La question de sa pertinence se pose, dès lors qu’il confère aux employeurs hospitaliers la possibilité d’avoir recours à des apprentis. Dans certains cas, comme celui des orthophonistes, son dispositif paraît particulièrement inadapté, dès lors qu’il est déjà difficile, pour les étudiants orthophonistes, de trouver des maîtres de stage disposés à l’accueillir.
De façon globale, cet article laisse craindre un recours dévoyé à l’apprentissage, destiné à combler les vacances de postes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. L’article 22 bis A vise à encourager le développement de l’apprentissage dans la fonction publique hospitalière.
Il suscite l’inquiétude chez certains professionnels, notamment les masseurs-kinésithérapeutes et les orthophonistes. Il faut dire que la méthode suivie par le Gouvernement n’est pas idéale : l’article a été introduit à l’Assemblée nationale, sans étude d’impact et sans véritable concertation avec les professionnels, alors même que le Sénat discutait du projet de loi Santé.
Sur le fond, il s’agit de sécuriser la situation des 1 851 apprentis des professions paramédicales. En Dordogne, un kinésithérapeute, également maître d’apprentissage, est actuellement poursuivi pour complicité d’exercice illégal de la profession.
Il faut donc mieux articuler le code du travail, qui autorise l’apprentissage, et le code de la santé publique, qui interdit l’exercice illégal de la profession. Développer l’apprentissage dans la fonction publique hospitalière semble nécessiter de tels ajustements. Le Gouvernement doit toutefois rassurer les professionnels sur la formation des apprentis et apporter les moyens nécessaires.
Pour autant, la commission est, à ce stade, défavorable à ces amendements de suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. M. le rapporteur a pointé la motivation principale de l’introduction de cet article par voie d’amendement parlementaire à l’Assemblée nationale, avec le soutien du Gouvernement : il s’agit de sécuriser la pratique des apprentis, qui existe déjà aujourd’hui et a vocation à se développer. Comme M. le rapporteur l’a indiqué, les apprentis peuvent être poursuivis pour exercice illégal de la profession. L’article vise à lever ce risque.
Il va sans dire que le développement de l’apprentissage ne doit pas conduire à remettre en cause la qualité de la formation. Celles et ceux qui s’inscrivent dans des cursus d’apprentissage ne sont pas des soignants. Les pratiques et les actes qu’ils sont appelés à commettre doivent être encadrés et proportionnés aux compétences qu’ils ont acquises.
L’avis est défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 79 rectifié quater et 468 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements identiques.
L’amendement n° 258 est présenté par Mmes Cohen, Lienemann, Brulin, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 430 rectifié est présenté par M. Duran, Mme Bonnefoy, MM. Antiste et Daudigny, Mme Grelet-Certenais, M. P. Joly, Mme Préville, MM. Raynal et Tissot et Mme Tocqueville.
L’amendement n° 432 est présenté par Mme G. Jourda.
L’amendement n° 469 rectifié est présenté par Mmes N. Delattre, M. Carrère et Costes, MM. Collin et Guérini, Mme Guillotin, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Requier, Roux, Vall, Castelli et Gold.
L’amendement n° 475 rectifié bis est présenté par Mme Berthet, M. de Nicolaÿ, Mmes Estrosi Sassone, Deromedi, Lassarade et Morhet-Richaud, M. Paccaud, Mme Delmont-Koropoulis, M. B. Fournier et Mmes Gruny et Lherbier.
Ces amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 8
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l’amendement n° 258.
M. Fabien Gay. Le certificat de capacité d’orthophoniste est un diplôme universitaire de grade master.
Les étudiants et étudiantes en orthophonie préparent leur diplôme uniquement au sein de l’université. Leurs frais de scolarité sont limités aux frais d’inscription à l’université. Actuellement, vingt universités proposent cette formation théorique, mais aussi pratique, via des stages réalisés auprès de maîtres de stage non rémunérés.
La formation d’orthophoniste n’existe pas sous la forme de l’apprentissage. Il n’y a donc pas de raison d’étendre le statut de l’apprentissage qui existe éventuellement dans d’autres professions de santé. De plus, cette profession connaît une pénurie au sein de la fonction publique hospitalière et des structures médico-sociales, du fait d’un statut et de salaires peu attractifs.
Il serait donc inenvisageable, pour des apprentis en orthophonie, de trouver des maîtres d’apprentissage conformément à l’article L. 6223-5 du code du travail, sachant que les étudiants en orthophonie n’arrivent déjà plus à en trouver dans les établissements de santé publics et privés.
Il n’est envisageable ni pour la profession, ni pour les étudiants, ni pour les centres de formation que les apprentis fassent office de salariés orthophonistes pour compenser les vacances de postes.
Enfin, ni les professionnels, ni les étudiants, ni les centres de formation en orthophonie n’ont été sollicités quant à l’éventualité de faire évoluer les études en permettant le recours à l’apprentissage, et aucune de ces trois catégories d’acteurs ne souhaite introduire cette modalité de formation dans la formation initiale des futurs orthophonistes.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour présenter l’amendement n° 430 rectifié.
M. Jean-Claude Tissot. C’est le même amendement et le même argumentaire. On peut craindre une « ubérisation » insidieuse de la profession, susceptible d’altérer la qualité des soins et la formation des étudiants. Nous souhaitons donc supprimer une mesure introduite dans le projet de loi sans concertation avec les acteurs concernés et sans étude d’impact.