M. Patrick Kanner. Bravo !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteur. Nous avons eu un long débat sur cet amendement en commission. L’idée de cette mesure est issue d’un rapport que vous avez rédigé, madame Goulet, avec M. Reichardt sur l’islam de France, dans lequel un certain nombre de propositions étaient formulées.
Ce débat s’est déjà tenu au Sénat. D’ailleurs, lors de nos échanges en commission des lois, nous avons reconnu, tous bords politiques confondus, qu’il s’agissait d’un vrai sujet. C’est pourquoi M. Philippe Bas, président de notre commission, souhaite que nous travaillions de nouveau sur la question que vous posez au travers de cet amendement. À partir du mois de septembre ou, au plus tard, d’octobre, nous travaillerons donc, sur l’initiative de M. Bas, sur les liens entre les cultes et l’État.
M. Loïc Hervé. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État. Sur ce point, la position de la commission est la bonne. Cet enjeu dépasse toutefois l’objet de la présente proposition de loi, qui est de faciliter, d’une manière générale, la trésorerie des associations.
J’entends les préoccupations qui sont les vôtres, madame la sénatrice ; elles soulèvent un débat qui est tout de même un peu plus large que ce texte. Je me réjouis si un travail peut être engagé par votre commission des lois, et je le suivrai avec attention.
Par ailleurs, une partie de cet amendement est satisfaite par les dispositions légales actuelles, puisque la tenue de comptes annuels est aujourd’hui une obligation, y compris pour ces associations. Quant aux autres questions, je prendrai connaissance avec attention des travaux qui seront menés au Sénat.
M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.
M. André Reichardt. Comme l’a fort justement rappelé Mme la rapporteur, j’étais corapporteur de la mission d’information sur l’islam. Cet amendement reprend l’une de nos propositions. À la suite de notre travail, comme l’a indiqué Mme Goulet, le Sénat a approuvé cette disposition, de même que l’Assemblée nationale, mais le Conseil constitutionnel l’a retoquée parce qu’il s’agissait d’un cavalier.
On peut donc considérer que cette disposition a une certaine pertinence ; je dirais qu’elle est d’autant plus pertinente qu’elle gêne. Il est arrivé que quelqu’un vienne me voir pour me dire : « Écoutez, j’ai bien vu ce que vous faites, mais cela va me gêner. » Sans vous révéler qui m’a tenu ce discours, je vous dirai du moins que, étonnamment, ce n’était pas ceux que, si je puis dire, on entendait viser. Alors, quand on affirme dans cet hémicycle que, certes, cette disposition est pertinente, mais qu’elle pourrait gêner des associations organisées sous le régime de la loi de 1901 qui gèrent d’ores et déjà des lieux de culte de certaines religions dites « reconnues », vous me permettrez d’affirmer qu’il faut qu’on en discute sérieusement.
Je voulais insister, après Mme Goulet, sur la nécessité de faire enfin avancer ce dossier, définitivement. Si cela ne passe pas par ce texte-ci, relatif à la trésorerie des associations, pourquoi pas, mais je voudrais vraiment qu’on se préoccupe enfin de la question. Si M. le président de la commission des lois s’est engagé à cet égard, il n’y a pas lieu d’en douter. Il faut qu’on prenne enfin ce dossier à bras-le-corps. Encore une fois, si cela gêne, c’est qu’il y a manifestement lieu de s’en préoccuper.
M. le président. La parole est à M. Rachid Temal, pour explication de vote.
M. Rachid Temal. En effet, cette question gêne. Comme vous venez de le rappeler, il y a déjà eu une mission d’information, un vote au Sénat et à l’Assemblée nationale. Or on nous propose, de fait, de reporter le problème en créant une nouvelle mission.
L’amendement va dans le bon sens. C’est pourquoi il faut le voter. Il permet de préciser la manière dont on finance les cultes et les contraintes applicables à ce financement. Aujourd’hui – n’ayons pas peur des mots –, c’est naturellement à l’islam de France que l’on pense. Mais encore faudrait-il s’assurer que ce culte n’est pas financé par des autorités établies hors de France. Pour cela, il est nécessaire de garantir la transparence et de s’assurer de sa capacité à se financer dans notre pays. Cet amendement est la première pierre d’un édifice permettant de construire un nouveau rapport de confiance entre la deuxième religion de notre pays et la puissance publique, dans le cadre de la loi de 1905.
Deux ans seulement après le vote de la loi Égalité et citoyenneté, portée par Patrick Kanner, je regrette que ma collègue du Val-d’Oise appelle simplement à la constitution d’une nouvelle mission, alors que je connais son engagement sur ces questions. Je pense qu’elle s’exprime davantage au nom de la commission des lois qu’en son nom personnel.
M. le président. Madame Goulet, l’amendement n° 3 rectifié quater est-il maintenu ?
Mme Nathalie Goulet. Cela ne pose aucun problème, par exemple, à l’Union des mosquées de France, l’une des associations les plus importantes de notre pays, de passer sous le régime de la loi de 1905 et d’aligner les obligations financières des associations relevant de la loi de 1901.
Nous sommes en train de reculer face à un problème extrêmement important et de refuser une disposition demandée par le culte musulman lui-même, qui estime en effet que, pour regagner la confiance des fidèles, les institutions doivent promouvoir des principes de moralisation et de transparence s’inspirant de la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, de la loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique et des textes encadrant les associations relevant de la loi de 1905. Pourtant, tous les jours, les uns et les autres – et plutôt les autres – demandent un contrôle de ceci ou de cela, une interdiction des subventions, une interdiction des financements étrangers et font part de leurs suspicions. Nous avons tous des suspicions dans le climat très compliqué qui règne aujourd’hui en France. Notre rapport avait fait le point de façon très claire et très républicaine.
De façon très républicaine, je maintiens cet amendement. De façon très républicaine, je considère que c’est la loi de 1905 qui doit s’appliquer aux associations loi 1901 qui gèrent un lieu de culte et, donc, qui détournent la législation pour pouvoir toucher des subventions et alléger leurs obligations financières.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez dit que cette loi s’appliquait aux joueurs de pétanque, aux comices agricoles et à toutes les autres associations, petites ou grandes. Le problème de la transparence se posant pour toutes les associations, cette disposition me semble indispensable, et j’espère que le Sénat la votera.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteur. J’entends vos arguments, mes chers collègues. Toutefois, si le président Bas a souhaité que nous réfléchissions de nouveau collectivement sur ce sujet, c’est qu’il n’est pas si simple à résoudre.
Nous devons réunir tous les cultes autour d’une table, et nous ne pouvons pas régler ce problème à travers un amendement. Il y a des sujets de fond qu’il nous faut aborder ensemble, clairement et courageusement, et je pense que la proposition de M. Bas pourra faire avancer les choses assez rapidement.
M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, pour explication de vote.
M. Loïc Hervé. Je veux me faire l’écho de nos discussions devant la commission des lois sur ce sujet, qui surgit au détour d’une proposition de loi visant, selon son intitulé, à « améliorer la trésorerie des associations ».
L’amendement de Nathalie Goulet, s’il était adopté, aurait des conséquences très importantes sur l’organisation historique des cultes en France et des associations qui concourent à l’exercice de cette liberté publique. Je ne pourrai donc pas le voter.
À l’heure où l’on réclame des études d’impact et où l’on veut mesurer précisément les conséquences des dispositions que nous adoptons, la position du président Bas me semble pertinente, même si je partage bon nombre des arguments de Nathalie Goulet.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.
Mme Françoise Gatel. Pour avoir été rapporteur de la loi Égalité et citoyenneté et de la proposition de loi de nos collègues Goulet et Reichardt, je confirme que nous tournons de façon assez empruntée autour de cette question difficile, mais très importante.
Je comprends la volonté et la détermination de nos collègues qui s’expriment à l’occasion de l’examen de cet amendement, qui n’est pas qu’un amendement d’appel – il y a longtemps que l’appel a été lancé. Cela montre que nous devons travailler sérieusement sur la laïcité, l’organisation de certains cultes et leur rapport à la collectivité. Je salue donc la proposition du président Bas.
Monsieur le secrétaire d’État, le Sénat a déjà accompli un travail très sérieux sur le sujet, mais nous n’avancerons pas sans l’engagement du Gouvernement. Nous ne pouvons plus fuir cette question qui nous rattrape sans cesse. Elle cause des dégâts importants sur la cohésion sociale. Pour la traiter, il est nécessaire de respecter chacun et d’admettre qu’elle s’étend bien au-delà du culte musulman, car on voit aujourd’hui des Églises nouvelles se développer de manière sinon clandestine, du moins diffuse. Je vous demande donc de prendre cette question très au sérieux. Nous devons construire ensemble des réponses précises et nous fixer des échéances. Nous sommes prêts à le faire.
M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour explication de vote.
M. Thani Mohamed Soilihi. La question est en effet très importante, et je suis convaincu par les deux argumentaires.
Il me semble nécessaire d’aligner les obligations financières de toutes les associations cultuelles, quelles qu’elles soient. En même temps,…
M. André Reichardt. « En même temps »… (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Thani Mohamed Soilihi. … ce n’est pas au détour d’un tel texte que nous pouvons prendre cette décision, qui aura de grandes conséquences. C’est la raison pour laquelle je m’abstiendrai sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État. Je m’en voudrais de ne pas répondre à l’interpellation bienveillante de Mme Gatel.
Je prends ce sujet très au sérieux, tout comme je prends au sérieux la décision du président Bas et de la commission des lois d’engager un travail nourri sur ce sujet. Je ne suis toutefois pas le seul membre du Gouvernement légitime pour aborder cette question.
Mme Françoise Gatel. C’est vrai !
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État. Mon collègue ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, est tout à fait fondé également à s’asseoir autour de la table, étant chargé des relations avec les cultes.
Mme Françoise Gatel. Absolument !
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État. La solution avancée me semble être la bonne, et nous recevrons, Christophe Castaner et moi-même, vos propositions avec beaucoup d’attention, mesdames, messieurs les sénateurs.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 1er bis.
L’amendement n° 36 rectifié bis, présenté par Mmes M. Carrère, Costes et N. Delattre, MM. Artano, Cabanel, Castelli, Collin, Gabouty, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Jeansannetas, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Requier et Roux, est ainsi libellé :
Après l’article 1er bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Une annexe annuelle budgétaire comprend la liste et l’objet des associations entrant dans le champ du régime de l’article 200 du code général des impôts.
La parole est à Mme Maryse Carrère.
Mme Maryse Carrère. Comme l’illustre la rédaction des articles 2 et 4 de cette proposition de loi, l’article 200 du code général des impôts présente une importance particulière dès lors que, au-delà des exonérations fiscales qu’il permet, son champ d’application sert également de référence pour l’application d’un certain nombre de dispositions relatives aux associations.
Le domaine de l’article 200 est particulièrement vaste : il réunit des associations relevant du régime de la loi de 1901 et du régime de la loi de 1905. Dès lors qu’une disposition s’applique aux associations bénéficiant du dispositif de cet article 200, elle bénéficie aux associations non cultuelles comme cultuelles. C’est par exemple le cas de l’article 2, qui ouvre le droit à un prêt inter-associations, ou de l’article 4, qui permet à l’État de confier à des associations la gestion de biens immeubles dont il est devenu propriétaire à l’occasion d’une instance pénale.
Cet amendement vise donc à évaluer la portée financière des ambiguïtés et les incohérences découlant de toutes les dispositions postérieures à la loi de 1905 qui entrent directement en contradiction avec son article 2, lequel prévoit que la République ne subventionne aucun culte – cette disposition a également valeur constitutionnelle.
Comme le soulignent les auteurs de la proposition de loi dans l’exposé des motifs, la part des exonérations fiscales dans le budget des associations est devenue supérieure à celle des subventions. Cela s’applique aussi aux associations cultuelles.
Ainsi, afin de préparer une clarification plus vaste des régimes entre les associations de type loi 1901 et celles de type loi 1905, cet amendement vise à introduire la liste et l’objet de toutes les associations demandant à bénéficier de l’exonération prévue à l’article 200 du code général des impôts dans les annexes annuelles au projet de loi de finances, afin de mesurer la part des associations cultuelles au sein de celles-ci.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteur. Cet amendement intéressant nous semble plutôt ressortir du projet de loi de finances. Nous vous demandons donc de bien vouloir le retirer et de le représenter dans ce cadre, ma chère collègue.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État. Je comprends vos intentions, madame la sénatrice, mais l’adoption de votre amendement aboutirait à consigner dans un registre les objets sociaux des 1,5 million d’associations environ dont le financement peut donner lieu à une déduction fiscale dans notre pays. Très concrètement, je ne vois pas comment on pourrait le faire aujourd’hui.
Je comprends votre objectif : garantir qu’aucun don à une association cultuelle ne puisse donner lieu à une déduction fiscale. Mais je rappelle que des contrôles existent, notamment pour garantir que ces associations relèvent bien de l’article 200 du code général des impôts si l’on suspecte un éventuel dévoiement.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Voilà quelques semaines, j’ai posé une question d’actualité au ministre de l’intérieur, ministre chargé des relations avec les cultes, au sujet d’une association tout à fait bienveillante qui a monté des dîners caritatifs et une tournée de collecte de fonds, notamment dans le département du président de séance, au profit d’une école d’oulémas en Mauritanie, fermée pour cause d’islamisme. Ces dîners étaient organisés par la frange dure des Frères musulmans, dont certains membres sont bannis du territoire. Sur l’invitation, il était écrit : « Don déductible des impôts ».
À un moment, il faut dire les choses ! Tracfin souhaite un registre des associations, de même que la mission de l’Assemblée nationale sur les associations d’extrême droite, qui a rendu son rapport le 6 juin dernier. En la matière, la transparence doit valoir pour tout le monde.
Nous renvoyer à la loi de finances, c’est un peu fort de café ! Voilà un certain nombre d’années que je siège dans cet hémicycle, et mes amendements sont souvent retoqués au motif que ce n’est pas le bon texte ou pas le bon moment. En l’occurrence, il s’agit pour moi du bon sujet !
Je soutiendrai donc cet amendement, et je suis prête, monsieur le secrétaire d’État, à vous transmettre tous les justificatifs que vous souhaitez sur ces dîners caritatifs organisés par des personnes absolument indésirables sur notre territoire, qui mettent en avant de surcroît une défiscalisation, ce qui signifie que tous les contribuables français vont d’une certaine manière soutenir les écoles d’oulémas en Mauritanie. Je ne veux pas de cela !
M. le président. Madame Carrère, l’amendement n° 36 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Maryse Carrère. Oui, monsieur le président.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
Mme Maryse Carrère. Cet amendement aurait sans doute davantage sa place au sein du projet de loi de finances, mais, comme le précédent, c’est surtout un amendement d’appel. S’il est adopté, il sera au moins gravé – certes, temporairement, car je ne me fais pas d’illusions – dans la loi.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 1er bis.
Article 2
(Non modifié)
Après le 1 de l’article L. 511-6 du code monétaire et financier, il est inséré un 1 bis ainsi rédigé :
« 1 bis. Aux associations régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association ou inscrites au registre des associations en application du code civil local applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, déclarées depuis trois ans au moins et dont l’ensemble des activités est mentionné au b du 1 de l’article 200 du code général des impôts ainsi qu’aux associations et fondations reconnues d’utilité publique qui octroient sur leurs ressources disponibles à long terme des prêts à moins de deux ans à taux zéro aux membres de l’union mentionnée à l’article 7 du décret du 16 août 1901 pris pour l’exécution de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association ou de la fédération d’associations constituée sous forme d’association dont elles sont membres ; ». – (Adopté.)
Article 3
(Non modifié)
I. – Après le 2° du I de l’article L. 312-20 du code monétaire et financier, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu’il dépose les dépôts et avoirs mentionnés au premier alinéa du présent I à la Caisse des dépôts et consignations, l’établissement lui communique les informations qu’il détient permettant de distinguer les personnes physiques et les personnes morales et, pour ces dernières, leur statut juridique. Les conditions d’application du présent alinéa sont déterminées par décret. »
II. – L’article 15 de la loi n° 2014-617 du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d’assurance vie en déshérence est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ce rapport précise le montant des sommes acquises à l’État qui sont reversées au bénéfice du développement de la vie associative. » – (Adopté.)
Articles additionnels après l’article 3
M. le président. L’amendement n° 37 rectifié, présenté par Mmes N. Delattre, M. Carrère et Costes, MM. Artano, Cabanel, Castelli, Collin, Gabouty, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Jeansannetas, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Requier et Roux, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au troisième alinéa des articles L. 521-3-1 et L. 525-6-1 du code monétaire et financier, les mots : « par les associations cultuelles ainsi que par les établissements publics des cultes reconnus d’Alsace-Moselle » sont supprimés.
La parole est à Mme Nathalie Delattre.
Mme Nathalie Delattre. Cet amendement s’oppose à une disposition introduite dans la loi pour un État au service d’une société de confiance, contre laquelle je m’étais battue, qui étend les dons par SMS aux associations cultuelles, selon le même régime que celui des organismes faisant appel à la générosité publique.
Ces derniers bénéficient d’un régime d’agrément allégé pour l’utilisation de services de paiement dématérialisés et d’une possibilité de défiscalisation à hauteur de 66 % du don, introduite par la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique. Or il apparaît que ce régime n’offre pas de garanties suffisantes concernant l’usage à venir de ce mode de paiement, même si ces dons sont limités à 300 euros par mois et par numéro.
Son extension aux associations cultuelles pose de véritables problèmes de sécurité, qu’il s’agisse du manque de transparence de ce moyen de financement, de la question de la provenance, de l’utilisation du don ou encore de l’identité du donateur et du bénéficiaire. De telles opérations auraient dû a minima faire l’objet d’une demande d’agrément auprès de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, plutôt que de bénéficier de ce régime allégé.
Cette disposition a modifié la loi de 1905, qui établit la séparation des Églises et de l’État et qui reste un texte constitutif de notre République. Cette modification de la loi de 1905 aurait mérité un temps d’étude et de débat dédié. C’est pourquoi je tente de nouveau, à travers cet amendement, de vous alerter et de vous mobiliser contre l’extension des dons par SMS aux associations cultuelles.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État. Je connais votre mobilisation pour tout ce qui touche à la laïcité, madame Delattre, mais je ne souscris pas à cet amendement.
Le don par SMS s’est beaucoup développé, de même que le don par cagnotte, via le numérique. Il me semble logique que toutes les associations puissent en bénéficier. J’entends votre argument selon lequel ces dons seraient difficilement traçables, mais il me semble curieux d’exclure certaines associations, a fortiori cultuelles, de cette pratique du don. Si l’on suit votre raisonnement, il faudrait aussi supprimer la quête à la messe, qui, par définition, n’est pas traçable non plus.
En conséquence, l’avis est défavorable.
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour explication de vote.
M. François Bonhomme. Je comprends l’intention de notre collègue Delattre, mais il ne faut pas confondre le mode à travers lequel on fait appel à la générosité publique et les moyens de contrôle. En l’espèce, depuis la loi pour une République numérique, c’est un moyen très favorable pour développer des ressources qui manquent parfois cruellement, notamment pour le denier du culte. Je ne voudrais pas que cet amendement produise l’effet inverse de celui recherché par son auteur.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Vous évoquez le denier du culte, soit, mais une mosquée moyenne comme celle d’Asnières, regroupant 2 000 fidèles, collecte 1 million d’euros en espèces pendant le ramadan au titre de la zakat ! Jean-Pierre Sueur le sait bien, lui qui a été rapporteur de l’excellente commission d’enquête dont j’avais demandé la création.
Par ailleurs, tous les comptes Nickel, Orange et autres sont aujourd’hui très suspicieux. Les travaux de l’Autorité de contrôle prudentiel, de la Banque de France et de Tracfin montrent qu’il y a un problème. On ne peut pas ouvrir grand les vannes aux réseaux de blanchiment et de financement du terrorisme, lesquels empruntent les mêmes circuits.
L’ouverture des dons par SMS a créé des difficultés. C’est un peu plus compliqué que le Téléthon ! En fait, chaque fois que l’on ouvre une facilité aux entreprises pour créer de l’emploi ou que l’on dématérialise, on crée immédiatement de nouvelles possibilités de fraude. Ne serait-ce que pour évoquer ce sujet en commission mixte paritaire, je voterai cet amendement.
L’Autorité de contrôle prudentiel fait son travail, notamment avec les banques dématérialisées, qui n’ont plus de guichets. Mais il va falloir appliquer à ces comptes ouverts dans les bureaux de tabac la même jurisprudence que celle appliquée à la suite de la commission d’enquête sur les réseaux djihadistes : au bout d’un mois, faute d’identité prouvée, le compte devra être fermé, tout comme la ligne téléphonique. Je vous charge, monsieur le secrétaire d’État, de transmettre le message à Gérald Darmanin.
M. le président. L’amendement n° 32 rectifié ter, présenté par MM. H. Leroy, Frassa, Guerriau, Laménie, Meurant, Longeot et Regnard, Mme Goy-Chavent, MM. Paccaud, Menonville, Duplomb et J.M. Boyer, Mme Guillotin, M. Vogel, Mme Kauffmann et M. Moga, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la troisième et à l’avant-dernière phrase de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 52-5 du code électoral, les mots : « établissements reconnus d’utilité publique » sont remplacés par les mots : « associations déclarées depuis trois ans au moins et dont l’ensemble des activités est mentionné au b du 1 de l’article 200 du code général des impôts ou inscrites au registre des associations en application du code civil local applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ».
La parole est à M. Joël Guerriau.
M. Joël Guerriau. Cet amendement vise à ouvrir de nouvelles voies de financement aux associations.
Aujourd’hui, le code électoral permet à un candidat, lorsque celui-ci a recours à une association de financement électoral, de reverser l’excédent qui figure sur son compte de campagne à une association de financement politique ou à un établissement reconnu d’utilité publique.
La notion d’établissement reconnu d’utilité publique est trop restrictive. Nous proposons donc d’élargir la liste des organismes bénéficiaires de cet excédent à tous ceux qui sont visés à l’article 200 du code général des impôts. Ainsi, un candidat, une fois les élections passées, pourra par exemple reverser l’excédent de son compte de campagne à des œuvres ou à des organismes d’intérêt général présentant un caractère philanthropique, éducatif, social, humanitaire ou encore lié à la défense de l’environnement.
Cette disposition vise à ajouter de la souplesse à notre droit et permet de diversifier les sources de financement des associations, dans un contexte où beaucoup ont du mal à boucler leur budget.