M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Il nous semble que le fonctionnement et l’organisation des commissions intercommunales, comme ils procèdent de la volonté d’associer le plus largement possible l’ensemble des conseillers municipaux, relèvent du pacte de gouvernance plutôt que du règlement intérieur.
Je sollicite donc le retrait de l’amendement n° 385 rectifié. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.
S’agissant de l’amendement n° 386 rectifié, l’article que vous évoquez ne définit pas les commissions municipales. En effet, l’article L. 5211-40-1 du CGCT rend seulement applicable aux EPCI l’article L. 2121-22, qui, lui, définit la composition des commissions municipales.
Je demande donc également le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Sébastien Lecornu, ministre. J’émets un avis de sagesse sur l’amendement n° 385 rectifié.
S’agissant de l’amendement n° 386 rectifié, la démonstration de M. Marie sur la référence aux commissions municipales crée un trouble. J’émets donc également un avis de sagesse.
M. le président. La parole est à M. Charles Guené, pour explication de vote.
M. Charles Guené. Sur le plan juridique, certes, on peut très bien estimer que les modalités de fonctionnement des commissions relèvent du règlement intérieur de l’EPCI. Mais celui-ci ne les prévoit pas nécessairement, alors qu’il s’agit pourtant d’un élément de gouvernance.
Il me semble donc positif de rendre obligatoire qu’elles sont fixées dans le pacte de gouvernance, même si, juridiquement, je conviens que ce n’est pas parfait.
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.
M. Didier Marie. Puisque le Gouvernement fait preuve de sagesse – nous l’en remercions –, nous maintenons nos amendements. Nos propositions permettront de clarifier la portée juridique de ces dispositions.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 435 rectifié est présenté par MM. Kerrouche, Durain, Marie, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Leconte, Sueur, Sutour et Bérit-Débat, Mme Blondin, MM. Courteau, Daunis, Montaugé, Antiste et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 584 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes et MM. Dantec, Gabouty, Gold, Jeansannetas, Labbé, Requier, Roux et Vall.
L’amendement n° 734 rectifié bis est présenté par MM. Delcros et Bonnecarrère, Mmes Vullien et Guidez, MM. Canevet, Henno, Capo-Canellas, Maurey et Laurey, Mmes C. Fournier et Billon, M. Lafon, Mmes Vérien et Sollogoub, M. Louault, Mme Saint-Pé, MM. Longeot, Moga et les membres du groupe Union Centriste.
L’amendement n° 807 est présenté par M. Bonnecarrère.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 11
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les moyens de renforcer les solidarités financières au sein du territoire, ainsi que les objectifs à poursuivre, le cas échéant, par la réalisation d’un pacte financier et fiscal entre l’intercommunalité et ses communes membres.
La parole est à M. Didier Marie, pour présenter l’amendement n° 435 rectifié.
M. Didier Marie. La commission des lois du Sénat a réécrit les dispositions du projet de loi relatives au pacte de gouvernance en vue d’en faire un rendez-vous en début de mandature, lors duquel les nouvelles équipes définiront les principaux fondements des relations entre l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre et les communes membres.
Outre les considérations liées au fonctionnement des instances politiques et à la mutualisation des services, déjà traités, prévoir que le pacte de gouvernance traite des moyens de renforcer les solidarités financières consoliderait la portée et la cohérence de cette étape initiale.
L’exercice de définition des objectifs d’un éventuel pacte financier et fiscal amène en effet les élus à prendre la mesure de la situation budgétaire et financière au sein du couple communes-communautés, et à définir la trajectoire des moyens financiers nécessaires à la mise en œuvre du projet de territoire intercommunal et à l’exercice des compétences par les communes et l’EPCI à fiscalité propre.
Ce temps trouvera donc toute sa place dans le cadre du pacte de gouvernance en début de mandature, pour faciliter le travail des élus municipaux et communautaires dans le cadre de leur intercommunalité.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° 584 rectifié.
Mme Nathalie Delattre. L’article 1er de ce projet de loi généralise à tous les EPCI à fiscalité propre l’adoption d’un pacte de gouvernance, qui vise principalement à créer un cadre de coordination entre collectivités territoriales.
Dans la version du texte issue des travaux de la commission des lois, il est prévu que ce pacte détermine notamment les modalités de mutualisation de services, les conditions de création ou de gestion d’équipements et de services, les conditions d’engagement de certaines dépenses d’entretien, etc.
Toutefois, il n’est pas prévu que le pacte de gouvernance traite d’un sujet clé du modèle intercommunal : le renforcement des solidarités financières entre les différentes collectivités. Cette composante est pourtant un élément déterminant de l’esprit communautaire, dans lequel il est important d’impliquer l’ensemble des maires.
Si l’objectif partagé du pacte de gouvernance est de mieux coordonner les interventions des communes au sein de l’EPCI et de rationaliser l’organisation, la question de la péréquation financière intercommunale ne peut être éludée dans ce cadre.
C’est pourquoi cet amendement, en toute simplicité, tend à garantir que le pacte de gouvernance traite des moyens de renforcer les solidarités financières dans les EPCI.
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour présenter l’amendement n° 734 rectifié bis.
M. Bernard Delcros. Nous avons tous rappelé l’importance du pacte de gouvernance. Je rejoins d’ailleurs tout à fait votre point de vue, monsieur le ministre, quant à la nécessité de distinguer le pacte de gouvernance et le projet de territoire. Le pacte de gouvernance vise à poser en début de mandat les bases des relations entre l’intercommunalité et les communes. (M. le ministre approuve.)
La commission a utilement souhaité préciser les sujets à débattre au sein du pacte de gouvernance. Comme mes collègues, je pense qu’il est important qu’à l’occasion de l’élaboration du pacte de gouvernance, la question des relations financières entre l’intercommunalité et les communes soit traitée. Elle se pose pour un certain nombre de dotations, pour la fiscalité, pour le fonds de péréquation intercommunal et communal. Par exemple, applique-t-on le droit commun ou pas en la matière ?
Il me semble très important d’inclure la question des solidarités financières dans le pacte de gouvernance, qui, le cas échéant, pourra d’ailleurs se traduire par un pacte fiscal et financier.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Il nous semble important que le sujet des solidarités financières soit intégré dans le pacte de gouvernance. Sachant que le délai pour élaborer un pacte de gouvernance est de neuf mois, toutes les conditions de solidarité financière auront toutefois été définies avant.
J’émets donc un avis favorable sur ces amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Sébastien Lecornu, ministre. Plus on rend les choses rigides, plus je me méfie…
En outre, ces questions liées à la mécanique de solidarité financière peuvent être abordées dans le cadre des discussions autour des attributions de compensation ou lors des grands débats budgétaires au sein de l’intercommunalité. Il y a tout de même plusieurs occasions de les évoquer dans l’année.
J’émets donc un avis de sagesse, et même de grande sagesse.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 435 rectifié, 584 rectifié et 734 rectifié bis.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 905 rectifié, présenté par M. Jacquin, Mmes Jasmin et Conway-Mouret et MM. Montaugé, Tissot et Daudigny, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 11
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les conditions dans lesquelles l’intercommunalité entend informer et associer les citoyens à la prise de décision.
La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Cet amendement vise à préciser un aspect du pacte de gouvernance. Il a tout simplement pour objet de définir les conditions dans lesquelles l’intercommunalité entend informer et associer les citoyens à la prise de décision – un mot que nous n’avons pas encore beaucoup entendu ce soir.
Nous sommes en train de définir le pacte de gouvernance. Il s’agit de préciser les grands principes de fonctionnement entre les communes et l’EPCI, donc sur le territoire et au bénéfice des citoyens concernés.
Les citoyens sont la finalité des politiques publiques, et dans la strate intercommunale, ils sont particulièrement éloignés de l’élu. (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.)
Outre l’indispensable information des citoyens, incluse dans l’objet de cet amendement, il s’agit de mieux associer ces derniers, pour plus d’efficacité. Presque tous les maires ont recours aux citoyens pour leur expertise d’usage dans des aménagements urbains, par exemple. Celle-ci est plus que reconnue.
Mme Sophie Primas. Pas besoin de loi pour cela !
M. Olivier Jacquin. Nous proposons ainsi d’associer les forces vives, en ayant recours à l’expertise thématique des citoyens. Le pacte de gouvernance peut clarifier le rôle des différentes instances de cette concertation, sans rien ôter aux élus.
Mme le rapporteur m’a proposé une autre rédaction, mais, avant de l’envisager, je souhaiterais entendre l’avis de M. le ministre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. M. Jacquin vient de dévoiler ce qui n’était pas un secret, puisque nous en avons débattu en commission. (Sourires.)
Cet amendement vise à inclure dans le pacte de gouvernance la définition des conditions d’association des citoyens. La commission a formulé une proposition différente, sur laquelle M. le ministre pourra nous donner son avis, afin de mieux cibler les acteurs socio-économiques.
Ainsi, nous vous proposons d’insérer après l’alinéa 9 un alinéa ainsi rédigé : « Les modalités d’association des acteurs socio-économiques à la prise de décision ».
M. le président. Monsieur Jacquin, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens suggéré par la commission ?
M. Olivier Jacquin. Madame le rapporteur, nous avons déjà débattu de ce point. Vous dites préférer les termes d’« acteurs socio-économiques » à celui de « citoyens ». Tout à l’heure, je vous ai proposé de lier les deux concepts, en tentant d’expliquer comment l’on pourrait associer les citoyens et les forces socio-économiques d’un territoire.
Cela me semble être un bon compromis, mais je crains que votre proposition ne l’emporte sur la mienne, madame le rapporteur. Pour accélérer les choses, j’accepte votre suggestion, que je considère comme un repli.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 905 rectifié bis, présenté par M. Jacquin, Mmes Jasmin et Conway-Mouret et MM. Montaugé, Tissot et Daudigny, et ainsi libellé :
Après l’alinéa 9
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les modalités d’association des acteurs socio-économiques à la prise de décision ;
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Dans ce cas, l’avis de la commission est favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Sébastien Lecornu, ministre. Je comprends votre intention, monsieur le sénateur, mais, au risque de mettre de nouveau les pieds dans le plat, est-ce que l’on connaît beaucoup d’élus locaux, municipaux et communautaires, qui ne rendent de comptes à personne, qui s’enferment pendant six ans dans leur mairie, leur hôtel d’agglomération ou de communauté de communes sans consulter aucun acteur socio-économique ou aucun de leurs concitoyens ?
De plus, cet amendement n’a pas un caractère très normatif. Et il tend à envoyer le signal qu’il est indispensable d’inscrire dans la loi que les élus sont obligés d’associer leurs concitoyens à leur prise de décision…
C’est un peu comme si le ministre chargé des relations avec le Parlement vous demandait de bien veiller à ce que le règlement intérieur du Sénat comporte des dispositions permettant aux sénateurs de rendre des comptes à nos concitoyens et aux grands électeurs.
M. Martial Bourquin. C’est lamentable, monsieur le ministre !
M. Sébastien Lecornu, ministre. Pas du tout ! Je suis désolé, mais j’ai le droit de défendre mon point de vue, monsieur le sénateur, et vous devez le respecter.
M. Martial Bourquin. Apprenez à débattre autrement ! Cessez de donner des leçons !
M. Sébastien Lecornu, ministre. Je suis moi aussi élu local et j’entends pouvoir défendre mon opinion.
M. Martial Bourquin. Vous êtes insupportable ! (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Sébastien Lecornu, ministre. Vous avez le droit de le penser, mais j’ai le droit de défendre mes idées ! J’ai donc le droit de défendre les libertés et de considérer que la démocratie représentative mérite d’être défendue.
Je pense que la transparence va dans le bon sens et qu’il est possible de prendre un certain nombre de dispositions pour atteindre cet objectif. Je suis désolé, monsieur le sénateur, mais je pense que les élus n’ont pas besoin d’une loi pour rendre des comptes à leurs concitoyens !
J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement.
M. le président. Monsieur Bourquin, si vous souhaitez intervenir, il suffit de me le demander. Mes chers collègues, cessez de vous interrompre les uns les autres, s’il vous plaît !
M. Martial Bourquin. Monsieur le président, puisque vous me donnez la parole…
M. le président. Non, monsieur Bourquin, plusieurs de vos collègues me l’ont demandée avant vous !
M. Martial Bourquin. Pardonnez-moi, monsieur le président, j’ai cru que vous me l’aviez donnée.
J’aurais pu aussi m’exprimer dans le cadre d’un rappel au règlement. En effet, la manière dont le ministre mène les débats est assez incroyable ! (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.
M. Didier Marie. Monsieur le ministre, il n’est pas de bon ton de vouloir simplifier à l’extrême les propos tenus par les sénatrices et les sénateurs dans cet hémicycle.
M. Martial Bourquin. En effet, vous caricaturez, monsieur le ministre !
M. Didier Marie. La caricature n’est jamais bonne. Je crois préférable de discuter du fond.
De quoi est-il question ? Si je ne m’abuse, le Président de la République a demandé au Gouvernement de désigner par tirage au sort un certain nombre de citoyens pour participer à une convention citoyenne pour le climat au cours de laquelle ceux-ci devront faire des propositions, qui pourront acquérir une valeur législative si le Gouvernement les transmet au Parlement.
Avec cet amendement, nous sommes exactement dans le même esprit : il s’agit non pas de créer des conseils de citoyens pour obliger les élus à rendre des comptes, mais d’associer nos concitoyens à la vie locale, de faire en sorte qu’ils soient parties prenantes et codécident avec nous de tout ce qui concerne leur vie quotidienne, en leur permettant de formuler un certain nombre de propositions. Tel est l’objet des instances participatives.
Mme Sophie Primas. Il est inutile de légiférer pour cela !
Mme Catherine Troendlé. C’est du bon sens !
M. Didier Marie. Aujourd’hui, le Président de la République considère lui-même qu’il faut beaucoup mieux associer nos concitoyens que l’on ne le faisait auparavant.
Mme Sophie Primas. On le sait !
M. Didier Marie. Nous vous demandons donc tout simplement de transférer au niveau local ce qui existe au niveau national, en associant davantage nos concitoyens dans des conditions qui restent à déterminer dans le cadre du pacte de gouvernance.
Mme Catherine Troendlé. Mais non !
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Je vous remercie de me rendre la parole, monsieur le président. Je remercie également mes collègues d’avoir clairement réagi aux propos du ministre.
Je remarque en effet que vous avez tenté de réduire mes propos à une caricature, monsieur le ministre. Alors que j’ai moi-même été élu local, vous me prêtez des propos que je n’ai pas tenus : je ne cherche pas à imposer des contraintes aux élus quand ils communiquent avec les citoyens. Les élus sont assez grands pour le faire par eux-mêmes !
Monsieur le ministre, il y a quelques mois, lors du grand débat, je vous ai vu à la télévision tenir un discours totalement inverse sur la nécessaire implication de nos concitoyens. Mon collègue Didier Marie vient par ailleurs de rappeler que certaines propositions actuelles visent à mieux associer les citoyens aux décisions, et ce n’est pas par démagogie.
En présentant cet amendement, je défends l’efficacité de démarches entreprises par certaines associations d’habitants. Il me semble de bonne gestion pour les communes, les intercommunalités et les différentes forces vives d’un territoire de proposer un tel dispositif dans un pacte de gouvernance.
M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.
M. Éric Kerrouche. Monsieur le ministre, il faut faire attention à ce que l’on dit quand on parle des citoyens.
Je vous rappelle les termes de l’article VI de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen : « La loi est l’expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs représentants, à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse. Tous les citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents. »
Parler d’associer les citoyens à la prise de décision des élus n’est donc pas un gros mot, monsieur le ministre. C’est le sens de la démocratie, et cela ne mérite pas la caricature. (Applaudissements sur des travées des groupes SOCR et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour explication de vote.
M. François Bonhomme. À trop vouloir compliquer les choses, on oublie l’essentiel : la démocratie s’exerce d’abord par ses représentants.
M. Éric Kerrouche. Et par le peuple !
Mme Éliane Assassi. Par les citoyens !
M. François Bonhomme. C’est le principe originel, j’en suis désolé. On en arrive à inciter ou à inviter les élus à mieux consulter, mieux concerter ou informer les populations de leur prise de décision, alors que, vous m’excuserez, c’est inhérent à la démocratie et au principe représentatif.
Si un représentant, un maire par exemple, ne sait pas qu’il a tout intérêt à promouvoir la concertation et à inviter ses concitoyens à participer aux discussions s’il souhaite se faire entendre et être réélu, il n’a rien compris.
M. Martial Bourquin. C’est un discours politicien !
M. François Bonhomme. Tout ce débat me paraît tout à fait inutile, superfétatoire et, d’une certaine façon, contre-productif ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – M. Jean-Marc Gabouty applaudit également.)
Mme Éliane Assassi. Vos propos sont réactionnaires ! (Vives exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. François Bonhomme. Cela faisait longtemps !
M. Jacques Grosperrin. Toujours dans la nuance !
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Mes chers collègues, je ne comprends pas de quoi l’on parle depuis quelques instants.
Je croyais que nous examinions un projet de loi visant à simplifier les relations entre les collectivités, à faciliter la vie des maires et à faire jouer de nouveau à ces derniers un rôle central dans le lien de proximité qui existe entre élus et citoyens. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Les notions de « citoyens » ou « d’acteurs socio-économiques » ne sont certes pas des gros mots, mais on n’a pas besoin de les faire figurer dans le pacte !
Mme Éliane Assassi. Mais les citoyens, qu’en faites-vous ?
Mme Sophie Primas. Comme un certain nombre d’entre vous, mes chers collègues, j’ai été maire. Dans la rue, on parle aux citoyens, on ne parle pas qu’aux électeurs !
Mme Éliane Assassi. Eux aussi parlent !
Mme Sophie Primas. Parfois, ces citoyens sont mécontents et vous invectivent.
On organise des réunions de quartier, des réunions de projets. On interroge en permanence nos concitoyens, sans avoir besoin d’inscrire cette pratique dans le dur de la loi.
Je ne comprends pas ce que vous voulez faire : on est en train de remettre des barrières, de restaurer des contraintes dans les instances, alors que l’on voulait au contraire libérer et donner un peu d’air aux maires, et les remettre à la place qui est la leur, c’est-à-dire dans une relation de proximité avec nos concitoyens. Je ne comprends vraiment pas cette logique.
Je m’en excuse par avance, madame le rapporteur, mais j’aurai du mal à voter cet amendement, même rectifié par vos soins. En réalité, en procédant ainsi, on annihile le lien de proximité que le maire noue avec nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-François Husson. Rétablissez le cumul ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour explication de vote.
M. Jérôme Durain. Mes chers collègues, on a le sentiment de revenir aux débats d’il y a quinze ans. On a l’impression qu’il n’y a aucune désaffection des citoyens à l’égard de la démocratie, notamment locale, qu’il n’y a aucune défiance vis-à-vis des élus,…
Mme Sophie Primas. Pas à l’égard des maires !
Mme Catherine Troendlé. Les maires ne sont pas concernés !
M. Jérôme Durain. … qu’il n’y a pas d’abstentionnisme, de montée des extrêmes, qu’il n’y a pas eu de crise des « gilets jaunes ». (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-François Husson. Cela n’a rien à voir !
M. Jérôme Durain. Faut-il que le Gouvernement ait beaucoup à se faire pardonner des élus pour défendre des arguments aussi démagogiques – passez-moi le terme, monsieur le ministre ? L’élu local connaît son territoire, ses élus, il n’a pas besoin de conseils citoyens !
M. Jérôme Durain. Je perçois une forme de régression dans cette façon d’aborder la relation entre les citoyens et la démocratie locale.
Ce que nous souhaitons, c’est que la machine communale et intercommunale fonctionne mieux. Quand on nous renvoie à une espèce de sens naturel et inné des élus dans leur relation aux concitoyens, comme si tout allait bien dans tous les territoires, on se trompe ! En effet, tout ne va pas pour le mieux.
Je trouve tout de même particulièrement osé que le Gouvernement défende cette position après qu’il nous a expliqué, il y a deux ans, qu’il y avait trop d’élus en France, qu’il fallait plus de verticalité et que, finalement, les corps intermédiaires ne servaient à rien. Faites donc preuve d’un peu d’écoute et d’ouverture !
Nous souhaitons tout simplement que l’intercommunalité fonctionne bien, que les communes occupent leur juste place, que les maires soient respectés – c’est un point important –, et que l’on travaille dans un esprit de concorde.
L’argument selon lequel tout va bien, les élus savent tout et ces « machins » sont inutiles est un peu désuet et pas de saison !
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.
M. Jean-François Husson. Ramenez-nous un peu de calme, mon cher collègue ! (Sourires.)
M. Martial Bourquin. Le débat que nous avons en ce moment est celui qui oppose démocratie représentative et démocratie participative.
M. Jean-François Husson. Ségolène ! (Rires.)
M. Martial Bourquin. Il s’agit d’un vieux débat, qui prend une dimension particulière avec les réseaux sociaux et avec ce qui s’est passé lors des mouvements sociaux. Tous les élus devront s’imprégner de ce problème et devront changer leurs habitudes sur ces questions.
Je prends la parole pour dire que l’on ne partage pas toujours les mêmes opinions sur ces travées, ce qui est une bonne chose. Je remarque que nous avons des débats de qualité, que ce soit au sein de la commission des affaires économiques ou ici, dans cet hémicycle, tout en n’étant pas d’accord les uns avec les autres.
J’observe aussi que, depuis quelque temps, le ministre plombe le débat. Je m’explique : comme je n’ai pas la mémoire courte, je me souviens que l’on disait il y a peu qu’il y avait trop d’élus en France.
M. Jérôme Durain. Tout à fait !
M. Martial Bourquin. Je me souviens également du #BalanceTonMaire, que le président du Sénat jugeait, en séance, tout à fait inacceptable.
Si l’on décide aujourd’hui de promouvoir le #CajoleTonMaire, pourquoi pas ! Mais, à un moment donné, il faut cesser de se poser en donneur de leçons.
On nous parle en permanence de liberté. Mais, dans la ville où j’ai été maire pendant plus d’une vingtaine d’années, la perception a été supprimée. C’est cela la liberté ? On est en train de supprimer les deux tiers des perceptions de mon département, et on me rebat les oreilles avec des histoires de liberté ! Quelle liberté ? Celle de ne plus avoir de services de proximité ?
M. François Bonhomme. Quel rapport avec le débat ?
M. Martial Bourquin. La seule chose que je demande – c’est autant une intervention qu’un rappel au règlement –, c’est que l’on se respecte les uns les autres. Ne caricaturons pas les interventions de ceux avec lesquels nous ne sommes pas d’accord.
Vous connaissez la formule : « Je ne suis pas d’accord avec vous, mais je me battrai jusqu’au bout pour que vous puissiez le dire. »
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote. (Exclamations.)
M. Jean-François Husson. Ramenez la sérénité, monsieur Laménie !
M. Marc Laménie. Ce débat est animé et passionnant. Certains parlent de leurs expériences, ce qui nous rappelle que, malheureusement, il n’est plus possible d’être à la fois sénateur et maire d’une petite commune ou président d’un exécutif local, quel qu’il soit. Aujourd’hui, cette situation ne peut que nous inspirer beaucoup de regrets.
Il faut naturellement respecter les auteurs des amendements – il y en a beaucoup sur ce texte –, mais il est également important d’évoquer le passé.
Il y a quelques années, les élus avaient le choix entre les intercommunalités, d’un côté, et ce que l’on appelle les « pays », de l’autre. Ces pays, produits d’une démarche volontaire, fédéraient les acteurs socio-économiques et les associations.
Pour parler de mon expérience dans les Ardennes, département que vous connaissez bien, monsieur le ministre, j’ai été longtemps, en tant que maire, membre d’une intercommunalité rurale regroupant 94 communes – pour la plupart, il s’agissait de petites villes –, pour un peu plus de 20 000 habitants.
Parallèlement au conseil de communauté, un conseil de développement réunissait élus, acteurs socio-économiques et associations. Cet organe avait le mérite de faire participer les citoyens, de les faire débattre.
Néanmoins, doit-on pour autant alourdir les instances ? Selon moi, il ne faut pas non plus tomber dans la « réunionite », même si je n’aime pas ce mot. Défendons la légitimité de nos élus de proximité ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)