M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous proposons de supprimer la non-compensation de l’exonération de cotisations et contributions sociales de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle dans la fonction publique, en cohérence avec la position de la commission sur les mesures de non-compensation dans ce PLFSS.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° 349 rectifié bis.
Mme Nathalie Delattre. Cet amendement de repli par rapport aux amendements présentés par Mmes Guidez et Cohen tend à s’inscrire dans le prolongement de notre discussion sur l’article 3.
Il s’agit de revenir sur l’absence de compensation des exonérations sociales par l’État en cas de rupture conventionnelle dans la fonction publique.
Mme la présidente. La parole est à M. Yves Daudigny, pour présenter l’amendement n° 807 rectifié.
M. Yves Daudigny. Il s’agit effectivement d’un amendement de repli, qui tend à supprimer le seul alinéa 6, à l’origine de la non-compensation.
Les décisions de non-compensation prises par le Gouvernement dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale créent artificiellement un déficit des comptes sociaux et font de la sécurité sociale une variable d’ajustement du budget de l’État, ce qui en change la nature.
Le groupe socialiste et républicain considère ces non-compensations comme un point dur du texte.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. J’ai encore en tête nos débats sur l’article 3. Je serai bref, car il ne me semble pas que vous ayez changé d’avis…
De la même manière que nous avons voulu aligner les conditions d’accès à l’indemnité en cas de rupture conventionnelle dans la fonction publique sur celles du secteur privé, nous avons aussi souhaité aligner les conditions de prise en charge.
Les exonérations des indemnités de rupture conventionnelle du secteur privé ne sont pas compensées dans le budget de la sécurité sociale depuis 2008.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ce n’est pas bien !
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Certes, monsieur le rapporteur général, mais cela me permet d’illustrer mes propos tenus hier.
Comme je le soulignais, les exceptions au principe de compensation posé par la loi Veil sont déjà nombreuses et anciennes. La rupture conventionnelle dans le secteur privé en est une. Nous nous inscrivons dans cette logique.
Le Gouvernement est donc défavorable à ces trois amendements identiques.
Mme la présidente. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Ces amendements me semblent de bon sens.
Je suis saisi d’un doute. Nous sommes en train de changer de philosophie, puisqu’il s’agit d’aligner le secteur public sur ce qui se fait de mieux – apparemment – dans le secteur privé.
Avec la loi portant transformation de la fonction publique, vous avez introduit beaucoup de souplesse. Il me semble que les agents publics s’acquittent aujourd’hui d’une cotisation chômage équivalant à 1 % de leur traitement.
Demain, avec cette nouvelle philosophie, vous pourrez aligner le régime des cotisations chômage sur le secteur privé. La spécificité de la fonction publique française n’est-elle pas en train de voler en éclats à la faveur de ces amendements, qui paraissent anodins, voire progressistes ?
Pourriez-vous nous rassurer, monsieur le secrétaire d’État, si tant est que la chose soit possible ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Je vais essayer à la fois de rassurer M. Lurel et de le conforter dans sa démarche.
Sur nombre d’aspects, la convergence entre les deux secteurs se fait en faveur des agents publics. Nous en avons déjà discuté lors de l’examen de la loi du 6 août 2019.
Permettre aux agents publics, titulaires ou contractuels, d’accéder à la rupture conventionnelle est une avancée. Il en va de même de la création d’une prime de précarité pour les contrats courts dans le secteur public, de la portabilité du compte personnel de formation, du mécanisme de conversion en cas d’allers et retours entre les deux secteurs et de la portabilité du CDI entre les versants de la fonction publique… Tous ces alignements sur le secteur privé nous permettent d’améliorer les droits des agents publics.
Le régime des cotisations chômage des employeurs publics est très particulier. J’ai évoqué voilà quelques instants le système d’auto-assurance : lorsqu’un employeur public licencie, il doit auto-assurer. Il s’agit d’un élément fort de la régulation en matière de rupture conventionnelle dans le secteur public : au-delà du paiement de l’indemnité, il faut encore auto-assurer le montant de l’allocation de retour à l’emploi. En l’espèce, il n’est pas question de convergence. Nous respectons les différences entre les deux systèmes.
Quand nous le pouvons, nous travaillons à des convergences. Je pense notamment aux cotisations de retraite des agents publics, qui étaient inférieures aux cotisations des salariés du secteur privé.
Le protocole Fillon-Woerth de 2010 a organisé la convergence, puis le protocole Ayrault-Sapin de 2012 a réajusté à la hausse les cotisations des salariés du secteur privé et donc également le tunnel de convergence des agents publics, dont les cotisations de retraite augmentent légèrement chaque année depuis dix ans pour converger avec celles du privé d’ici à 2020.
La convergence n’est donc pas un phénomène nouveau. Pour autant, elle ne doit pas être systématique, même si, très souvent, elle se fait au bénéfice des agents du secteur public.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 160, 349 rectifié bis et 807 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 9, modifié.
(L’article 9 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 9
Mme la présidente. Je suis saisie de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 435 rectifié bis, présenté par Mme Renaud-Garabedian, M. Magras, Mme Gruny, MM. Lefèvre, Longuet, Le Gleut et Danesi, Mme Noël, M. Babary et Mmes Lherbier et Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 136-6 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa du I, les mots « fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4B du code général des impôts » sont remplacés par les mots « qui sont à la fois redevables de l’impôt sur le revenu en France à raison de certains de leurs revenus et simultanément assujettis à quelque titre que ce soit à un régime obligatoire français d’assurance-maladie » ;
b) Les I bis et I ter sont abrogés ;
c) À la première phrase du premier alinéa du III, la première occurrence du mot : « à » est remplacée par le mot : « et » ;
2° L’article L. 136-7 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa du I, les mots : « fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts » sont remplacés par les mots : « qui sont à la fois redevables de l’impôt sur le revenu en France à raison de certains de leurs revenus et simultanément assujettis, à quelque titre que ce soit, à un régime obligatoire français d’assurance-maladie » ;
b) À la première phrase du 1° du même I, les mots : « fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts » sont remplacés par les mots : « qui sont à la fois redevables de l’impôt sur le revenu en France, à raison de l’origine de certains de leurs revenus et, simultanément assujettis à un régime obligatoire français d’assurance-maladie » ;
c) Les I bis et I ter sont abrogés ;
d) Le deuxième alinéa du VI est supprimé.
II. – L’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :
1° Au premier alinéa du I de l’article 15, les références : « aux I et I bis » sont remplacées par la référence : « au I » ;
2° À la première phrase du I de l’article 16, les références : « aux I et I bis » sont remplacés par la référence : « au I ».
III. – Le 1° du I s’applique aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2020.
IV. – Le 1° du même I s’applique aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 1er janvier 2020.
V. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian.
Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Pour se mettre en conformité avec le droit européen à suite de la décision de la Cour de justice européenne, le Gouvernement a décidé, dans le PLFSS pour 2019, d’exonérer de CSG et de CRDS les Français non-résidents affiliés à un système de sécurité sociale de l’Union européenne, de l’Espace économique européen ou de la Suisse, et ce pour les revenus fonciers encaissés en France.
Toutefois, les Français non-résidents établis dans un pays tiers ne bénéficient pas de cette exonération, ce qui constitue une inégalité de traitement fiscal et une discrimination devant l’impôt et décourage l’investissement immobilier en France de tous ces Français non-résidents établis dans des pays tiers.
Monsieur le secrétaire d’État, cet amendement vise à exonérer l’ensemble des Français non-résidents, où qu’ils se trouvent, du paiement de la CSG et de la CRDS sur les revenus patrimoniaux encaissés en France.
Je vous rappelle que, dans la majorité des cas, les Français non-résidents s’acquittent d’une cotisation soit à une caisse de sécurité sociale à adhésion volontaire telle que la Caisse des Français de l’étranger (CFE), soit au système de protection sociale de leur pays de résidence, ce qui conduit à une double imposition à caractère social.
Monsieur le secrétaire d’État, au titre des principes d’égalité et d’équité, je vous demande d’appliquer l’exonération de CSG et de CRDS à tous les Français non-résidents.
Mme la présidente. L’amendement n° 113 rectifié bis, présenté par MM. Yung, Dennemont et Mohamed Soilihi, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 136-6 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa du I, après le mot : « impôts », sont insérés les mots : « et à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire de sécurité sociale français » ;
b) Le I bis est complété par les mots : « et qui sont à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire de sécurité sociale français » ;
c) Le I ter est abrogé ;
2° L’article L. 136-7 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa du I, après le mot : « impôts », sont insérés les mots : « et à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire de sécurité sociale français » ;
b) À la première phrase du 1° du I, après le mot : « impôts », sont insérés les mots : « et à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire de sécurité sociale français » ;
c) Le I bis est complété par les mots : « qui sont à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire de sécurité sociale français » ;
d) Le I ter est abrogé.
II. – L’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :
1° Le premier alinéa du I de l’article 15 est complété par les mots : « qui sont à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire de sécurité sociale français » ;
2° La première phrase du I de l’article 16 est ainsi modifiée :
a) Après la première occurrence du mot : « sociale », sont insérés les mots : « et payés à des personnes physiques à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire de sécurité sociale français, » ;
b) Les mots : « et de ceux perçus par les personnes mentionnées au I ter du même article L. 136-7 » sont supprimés.
III. – 1° Le 1° du I et le 1° du II s’appliquent aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2020 ;
2° Le 2° du I et le 2° du II s’appliquent aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 1er janvier 2020.
IV. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I à III est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.
M. Thani Mohamed Soilihi. Cet excellent amendement de notre collègue Richard Yung vise également à exonérer de CSG et de CRDS les revenus immobiliers de source française de nos résidents affiliés au régime obligatoire de sécurité sociale d’un État tiers à l’Union européenne autre qu’un État membre de l’Espace économique européen ou de la Suisse.
Aucune norme supra-législative ne s’oppose à ce que tous les non-résidents ne relevant pas d’un régime obligatoire de sécurité sociale français soient placés sur un pied d’égalité.
Contrairement aux auteurs de l’amendement n° 435 rectifié bis, notre collègue propose de ne pas rendre cumulatifs les critères de résidence et d’affiliation à un régime obligatoire français. Il ne lui paraît pas opportun d’appliquer aux revenus du patrimoine et de placements perçus par les non-résidents les règles applicables aux revenus d’activité et de remplacement.
Un tel dispositif aurait pour effet d’exonérer de CSG et de CRDS sur les revenus immobiliers tous les non-résidents, y compris ceux qui relèvent d’un régime obligatoire de sécurité sociale français. Concrètement, cela reviendrait à exonérer les personnes ayant effectué toute leur carrière professionnelle en France et qui s’expatrient en Espagne ou au Maroc, au moment de leur retraite.
La solution envisagée par notre collègue Cadic dans l’amendement n° 353 rectifié n’emporte pas non plus l’adhésion de Richard Yung.
Cet amendement tend non seulement à exonérer de CSG et de CRDS les non-résidents à la charge d’un régime obligatoire de sécurité sociale français, mais aussi à remettre en cause l’application de la jurisprudence dite « de Ruyter » en assujettissant de nouveau à la CSG et à la CRDS les résidents relevant du régime obligatoire de sécurité sociale d’un pays de l’Espace économique européen ou de la Suisse.
Cette solution n’est pas raisonnable. C’est pourquoi notre collègue vous propose d’adopter le présent amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 353 rectifié, présenté par M. Cadic, Mme Guidez, M. Henno, Mmes Dindar, C. Fournier et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 136-6 est ainsi modifié :
a) Les I bis et I ter sont abrogés ;
b) À la première phrase du premier alinéa du III, la première occurrence du mot : « à » est remplacée par le mot : « et » ;
2° L’article L. 136-7 est ainsi modifié :
a) Les I bis et I ter sont abrogés ;
b) Le second alinéa du VI est supprimé.
II. – L’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :
1° Au premier alinéa du I de l’article 15, les références : « aux I et I bis » sont remplacées par la référence : « au I » ;
2° À la première phrase du I de l’article 16, les références : « aux I et I bis » sont remplacées par la référence : « au I ».
III. – Le 1° du I s’applique aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2020.
IV. – Le 1° du même I s’applique aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 1er janvier 2020.
V. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. Cet amendement et l’amendement n° 352 rectifié visent à rectifier une injustice que subissent les Français non-résidents établis notamment en Polynésie française. Ceux-ci sont affiliés à un régime obligatoire de protection sociale, la Caisse de prévoyance sociale, et leur domicile fiscal n’est pas en France. Pour autant, ils ne sont pas exonérés de CRDS et se retrouvent soumis à une double imposition.
Cette inégalité de traitement est d’autant plus importante que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 du 3 décembre 2018 prévoit une exonération de ces prélèvements pour les Français résidant au sein de l’Espace économique européen et en Suisse.
Mes chers collègues, nous vous invitons donc à corriger cette injustice en adoptant ces amendements.
Mme la présidente. L’amendement n° 751 rectifié, présenté par M. Leconte, Mme Lepage, MM. Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Artigalas, MM. Montaugé, Sueur et Antiste, Mmes Blondin, Bonnefoy et Conconne, MM. Courteau, Duran, Fichet et Gillé, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Lalande, Mmes Monier, Perol-Dumont, Préville et Taillé-Polian, MM. Temal, Tissot, Bérit-Débat et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 136-6 est ainsi modifié :
a) Le I ter est ainsi rédigé :
« I ter. – Par dérogation aux I et I bis, ne sont pas redevables de la contribution les personnes qui ne sont pas à la charge d’un régime obligatoire de sécurité sociale français. » ;
b) À la première phase du premier alinéa du III, la première occurrence du mot : « à » est remplacée par le mot : « et ».
II. – L’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :
1° Le dernier alinéa du I de l’article 15 est supprimé ;
2° À la première phrase du I de l’article 16, les références : « aux I et I bis » sont remplacées par la référence : « au I ».
III. – Le 1° du I du présent article s’applique aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2012.
IV. – Le 1° du II du même article s’applique aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2012.
V. – Le 2° du même II s’applique aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 1er janvier 2012.
VI. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I à IV est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
M. Jean-Yves Leconte. Le droit européen, il s’applique ou il se change !
Selon le règlement du 29 avril 2004, seuls les bénéficiaires d’un système de protection sociale européen peuvent contribuer à son financement. Il n’est donc pas possible de soumettre à la CSG les personnes non affiliées à un régime de protection sociale français.
Malheureusement, il en est allé différemment. Depuis des années, des personnes ont dû régler des cotisations indues. Le système a été revu une première fois en 2015, puis de nouveau l’année dernière, en prévision des nouvelles condamnations de la Cour de justice de l’Union européenne.
Il reste cependant une difficulté : les décisions de la Cour de justice s’appliquant uniquement dans l’Espace économique européen, les personnes résidant en dehors de cet espace continuent de s’acquitter de la CSG, même lorsqu’elles ne bénéficient pas de notre système de protection sociale.
Nous proposons d’annuler cet assujettissement pour tous ceux qui ne bénéficient pas de la sécurité sociale française, afin de nous mettre en conformité avec le droit européen.
Il faudrait que le Conseil constitutionnel – il ne manquera pas de le faire un jour – constate une inégalité devant l’impôt –, puisque, selon lui, la CSG est un impôt, contrairement à l’interprétation de la Cour de justice, entre les citoyens vivant dans l’Espace économique européen et les autres. Il y aura inévitablement des condamnations.
Il est absolument inadéquat de continuer d’assujettir ces non-résidents à la CSG. Cette situation entraîne un fort contentieux auprès de la Direction des impôts des non-résidents (DINR), à un moment où celle-ci devrait porter son attention sur bien d’autres choses.
Mme la présidente. L’amendement n° 15 rectifié bis, présenté par M. Frassa, Mme Deromedi, MM. del Picchia et Le Gleut, Mme Garriaud-Maylam, M. Regnard, Mme Eustache-Brinio, M. Bascher, Mme Procaccia, M. Bizet, Mme Duranton, MM. Karoutchi, Houpert, Danesi et Brisson, Mme Gruny, MM. Charon, Mouiller et Bonne, Mmes L. Darcos et Lherbier et M. Dufaut, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I – Au premier alinéa du I ter de l’article L. 136-6 et au premier alinéa du I ter de l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale, les mots : « , par application des dispositions du règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, relèvent en matière d’assurance maladie d’une législation soumise à ces dispositions et » sont supprimés.
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Jacky Deromedi.
Mme Jacky Deromedi. Les Français de l’étranger résidant hors de l’Union européenne sont soumis aux prélèvements sociaux – CSG et CRDS – et aux prélèvements de solidarité pour un taux de 17,20 %, alors qu’ils ne bénéficient d’aucune prestation sociale en France.
Ceux qui résident dans l’Union européenne, en raison du refus du Gouvernement de supprimer ces prélèvements, ont saisi la Cour de justice de l’Union européenne. Ils ont ainsi obtenu de ne plus avoir à s’acquitter des cotisations de CSG et de CRDS dont ils sont exemptés.
Les Français résidant hors de l’Union européenne, eux, se sont vu refuser cette exemption. Ils continuent donc d’être soumis à cette cotisation de 17,20 %, qui s’ajoute à la retenue à la source et qui conduit à des prélèvements totalement confiscatoires de 37,20 % à 47,20 % sur leurs revenus français, dès le premier euro, ou sur leur retraite française, sans bénéficier d’aucune couverture sociale, de retraite ou de chômage.
Il s’agit d’une discrimination insupportable et d’une véritable injustice. Il me paraîtrait normal que le Sénat soutienne tous les Français, y compris ceux qui ne résident pas dans l’Hexagone, ceux qui vivent outre-mer et ceux qui résident en dehors de l’Union européenne mais qui n’en demeurent pas moins Français.
Mme la présidente. L’amendement n° 352 rectifié, présenté par M. Laurey, Mme Tetuanui, M. Cadic, Mme Guidez, M. Henno, Mmes Dindar, C. Fournier et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après le I ter de l’article L. 136-6, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Par dérogation aux I et I bis, ne sont pas redevables de la contribution les personnes qui relèvent, en matière d’assurance maladie, de la caisse de prévoyance sociale de Polynésie française et qui ne sont pas à la charge d’un régime obligatoire de sécurité sociale français. » ;
2° Après le I ter de l’article L. 136-7, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Par dérogation aux I et I bis, ne sont pas redevables de la contribution les personnes qui relèvent, en matière d’assurance maladie, de la caisse de prévoyance sociale de Polynésie française et qui ne sont pas à la charge d’un régime obligatoire de sécurité sociale français. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Comme cela a été indiqué l’année dernière lorsque le nouveau régime a été mis en place, le principe reste de considérer la CSG et la CRDS comme des impôts dus par tous, car elles ne créent pas de droit à des prestations de sécurité sociale.
Les États-Unis viennent de valider cette analyse, confortant en quelque sorte celle du gouvernement français sur ce point. Un accord vient d’ailleurs d’être conclu concernant résidents français aux États-Unis.
L’exonération des personnes affiliées à un régime de sécurité sociale d’un autre pays de l’Union européenne ne vise qu’à répondre à la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne. Il n’est pas opportun d’aller au-delà des exigences du droit communautaire.
À quelques nuances près, ces amendements sont identiques, même si celui de M. Young est quelque peu différent de celui de M. Cadic. Ma réponse sera donc la même : il est important de noter que la CSG et la CRDS sont des impôts, qui ne donnent pas lieu à des prestations sociales. Par conséquent, si vous êtes résident étranger, mais que vous avez des biens en France, vous êtes taxé.
S’agissant de la Polynésie, il s’agit d’un territoire français. Je demande donc l’avis du Gouvernement sur ce point. Je le répète, la CSG et la CRDS ne sont pas des cotisations et ne créent donc pas de droits. Il n’y a donc pas de double imposition pour les personnes qui s’en acquittent, tout en relevant du régime de la caisse de prévoyance sociale de la Polynésie française.