M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement a une portée symbolique plus que pragmatique. Pour ma part, je ne sais pas distinguer une chaussure de luxe d’une chaussure normale, un alcool de luxe d’un alcool normal, etc. Le nombre d’étoiles sur une bouteille de cognac est-il pertinent ? (Sourires.) Très honnêtement, où donc commence le luxe ?
M. Éric Bocquet. Le sac Hermès, la Bugatti, le yacht…
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Mais qu’est-ce qu’une chaussure de luxe ?
Le droit fiscal se doit d’être précis. L’assiette doit être clairement définie, particulièrement pour de tels produits. Nous concevons clairement ce que peut être un jet privé. Pour un vêtement ou une chaussure de luxe, je reste sceptique. La notion de luxe n’est pas la même pour tous. Le caractère opérationnel de cet amendement me paraît donc assez faible.
Par ailleurs, vous évoquez le cas de l’achat de produits de luxe par les étrangers. S’ils ne sont pas résidents de l’Union européenne, ils peuvent bénéficier d’une détaxe. Dans la pratique, rien ne changerait en termes de recettes. L’acheteur chinois, dans un aéroport, ne payera pas un centime supplémentaire.
Ces produits de luxe sont très largement vendus à l’étranger. Le premier groupe français du luxe réalise entre 90 % et 95 % de son chiffre d’affaires à l’étranger. De surcroît, les touristes extra-européens qui achètent en France demandent une détaxe. Augmentez la TVA, vous n’obtiendrez pas de recettes. Cet amendement n’a qu’une portée symbolique.
Je me souviens également que, par le passé, sous des gouvernements de gauche, de telles mesures ont eu des effets pervers. Par exemple, une TVA sur les hôtels cinq étoiles a eu pour conséquence de voir l’ensemble de ces derniers demander leur déclassement en hôtels quatre étoiles… L’imagination est sans limites.
L’aspect opérationnel de cet amendement étant bien faible, j’émets un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État. Nous savons que cet amendement n’est pas applicable et qu’il est contraire aux règles européennes. Ses dispositions posent plus de problèmes qu’elles n’en résolvent. Nous comprenons sa portée narrative, et non seulement symbolique, puisque c’est bien cela qui est en jeu.
Je vous remercie d’indiquer que notre industrie du luxe se porte bien. Elle crée des emplois en France et commence à relocaliser sa production. Nous nous devons de ne pas freiner ce mouvement.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. L’amendement n° I-1053, présenté par MM. Bocquet et Savoldelli, Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article 281 nonies du code général des impôts, il est inséré un article 281… ainsi rédigé :
« Art. 281…. – La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux de 2,10 % en ce qui concerne les produits de protection hygiénique féminine. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Éric Bocquet.
M. Éric Bocquet. Nous abordons maintenant l’autre côté de l’échelle, celle des populations précaires, essentiellement, qui ne fréquentent pas les magasins de luxe, pour des raisons évidentes. Nous proposons de baisser le taux de la TVA à 5,5 % sur les protections périodiques, alors qu’elles étaient jusqu’à présent taxées à 20 %, autant que les produits de luxe.
En 2018, l’Écosse, par exemple, est allée plus loin en distribuant gratuitement ces produits d’hygiène aux écolières et aux étudiantes. Je sais que le Gouvernement envisage une expérimentation : la distribution gratuite des protections hygiéniques dans les écoles, hôpitaux ou prisons, pour lutter contre la précarité menstruelle.
Nous proposons un premier pas pour les femmes, notamment les plus précaires, qui parfois dorment dans la rue, et qui n’ont pas accès à ce produit de première nécessité – produit indispensable, cela va sans dire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Notre collègue Bocquet a lui-même cité des politiques gouvernementales. Le Gouvernement est plus à même de les défendre.
Sur le plan purement juridique, les règles régissant la TVA ne permettent pas d’appliquer un taux de 2,1 %, à mon grand regret.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État. Monsieur Bocquet, vous avez cité la politique du Gouvernement sur la précarité menstruelle.
Ce sujet, qui peut paraître anecdotique, concerne la moitié de la population en situation de précarité, voire plus de la moitié ; en effet, les personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté sont à 70 % des femmes. Nous sommes extrêmement sensibles à cette situation.
Nous ne mettons pas en place des mesures passant par la TVA, car nous sommes arrivés au bout de l’exercice en la matière. La mandature précédente a déjà décidé un taux réduit de 2,1 %. La clause du grand-père s’applique, elle aussi, à des sujets liés à la TVA !
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable, car il se mobilise autrement. Dans la suite du PLF que vous allez examiner, sont visés d’ailleurs, pour le mécénat, des organismes qui interviennent dans la lutte contre la précarité et sur les questions d’hygiène. Notre politique est donc cohérente.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Je souhaite simplement intervenir pour valoriser le travail du Sénat. En effet, notre collègue Patricia Schillinger a réalisé une mission sur ce sujet. Elle a préconisé la distribution gratuite de protections hygiéniques dans les écoles, les hôpitaux et les prisons.
M. Claude Raynal. Tout à fait !
M. Pascal Savoldelli. J’aurais souhaité, madame la secrétaire d’État, que vous en teniez compte. C’est là que nous voyons combien le Sénat est utile.
M. Julien Bargeton. Cela n’a rien à voir avec la TVA !
M. le président. L’amendement n° I-373, présenté par M. Assouline, Mme S. Robert, M. Antiste, Mmes Blondin, Ghali et Lepage, MM. Lozach, Magner et Manable, Mme Monier, MM. Raynal, Éblé, Botrel et Carcenac, Mme Espagnac, MM. Féraud, P. Joly, Lalande et Lurel et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I – Au début du deuxième alinéa de l’article 298 octies du code général des impôts, est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Sont soumises au taux réduit de 5,5 % de la taxe sur la valeur ajoutée les fournitures d’éléments d’information faites par les agences de presse. »
II – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Claudine Lepage.
Mme Claudine Lepage. Il y a un an, lors de l’examen du PLF pour 2019, le Sénat a voté l’abaissement du taux de TVA pour les agences de presse de 10 % à 5,5 %. Malheureusement, l’amendement n’a pas été retenu en commission mixte paritaire. Mais ce n’est pas une raison pour baisser les bras aujourd’hui.
Historiquement, les agences de presse, comme d’ailleurs le livre, bénéficiaient d’un taux de TVA réduit à 5,5 % sur les cessions d’éléments d’information, et les éditeurs de presse un taux super-réduit de 2,1 %. En 2012, le taux de 5,5 % a été porté à 7 % pour les bénéficiaires de ce taux réduit. Les agences de presse ont accusé le coup.
Le 1er janvier 2014, le taux de 7 % a été porté à 10 %, sauf pour le livre, qui a obtenu de revenir à 5,5 %. Quant aux services de presse en ligne, conformément au rapport de la mission menée par Roch-Olivier Maistre, nous sommes parvenus, à force de dépôts récurrents d’amendements dans les lois de finances successives, à obtenir l’application du taux super-réduit de 2,1 % au 1er février 2014, au lieu du taux normal auquel ils étaient jusqu’alors assujettis.
Le manque à gagner pour l’État du passage d’un taux de 10 % à un taux de 5,5 % n’atteindrait même pas 6 millions d’euros. En effet, le passage de la TVA de 5,5 % à 10 % n’a entraîné qu’un bénéfice mineur pour l’État, mais s’est soldé par un appauvrissement des agences de presse et par une nouvelle baisse de leur activité, ce qui, mécaniquement, apporte moins de recettes de TVA dans les caisses de l’État.
Dans une économie de coûts fixes, constituée à 75 % de charges de personnel, la dégradation de la trésorerie des agences de presse menace directement l’emploi. Voilà un cercle vicieux extrêmement préjudiciable, qui fragilise des entreprises déjà en difficulté face aux Gafam, qui exploitent jusqu’à maintenant leurs contenus sans les rémunérer, et cela malgré la promulgation de la loi du 24 juillet 2019. Plus que jamais, les agences de presse ont besoin de la solidarité des acteurs politiques et d’un coup de pouce fiscal.
Notre amendement vise à rétablir un taux de TVA applicable aux agences de presse à 5,5 %. J’espère bien entendu que le Sénat, comme l’an passé, nous suivra et votera notre amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Avis favorable, comme l’année dernière.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État. Pour une fois, nous serons en désaccord avec M. le rapporteur général : notre avis sera défavorable.
Un grand nombre de dispositions fiscales existent en faveur des entreprises de presse, comme l’application d’un taux de 10 % sur la TVA. Nous estimons que la mesure que vous proposez aurait un impact réduit, en raison du nombre de prestations réalisées entre entreprises assujetties, ayant la possibilité de déduire la TVA.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Je me permets de m’exprimer en tant que rapporteur de la commission des finances sur cette mission.
Quelle incohérence ! D’un côté, vous augmentez la TVA sur les agences de presse, et, de l’autre, au nom du soutien à la diversité, de l’indépendance de l’information et face à la concurrence avec les agences de presse étrangère, l’État est obligé d’accorder des dotations et des subventions aux mêmes agences de presse. D’une part, vous soumettez ces agences à des taux de TVA supérieurs, et, d’autre part, comme vous constatez que ces agences de presse sont en difficulté, vous ajoutez de l’argent dans les lignes budgétaires pour les soutenir.
Un peu de cohérence serait bienvenue ! Soutenir les agences de presse françaises, qui sont extrêmement concurrencées par des agences de presse internationales, voilà qui n’est pas indécent. Par ailleurs, ce que l’État perdra en TVA, il le gagnera en accordant moins de subventions.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10.
L’amendement n° I-1062 rectifié, présenté par MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le I de l’article 219 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé : « Le taux normal de l’impôt est fixé à 33,3 % pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019. » ;
2° À la fin du premier alinéa du c, le taux : « 28 % » est remplacé par le taux : « 33,3 % » ;
3° Après le même c, sont insérés cinq alinéas ainsi rédigés :
« …. Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2020, le taux normal de l’impôt sur les sociétés mentionné au deuxième alinéa du présent I est fixé à :
« – 20 % pour la fraction de bénéfice imposable par période de douze mois comprise entre 38 120 € et 76 240 € ;
« – 25 % pour la fraction de bénéfice imposable par période de douze mois comprise entre 76 241 € et 152 480 € ;
« – 30 % pour la fraction de bénéfice imposable par période de douze mois comprise entre 152 481 € et 304 960 €.
« Ces taux s’appliquent aux redevables mentionnés au b du I et, dans la limite de 76 420 € de bénéfice imposable par période de douze mois, aux redevables autres que ceux mentionnés au même b qui relèvent de la catégorie des micro, petites et moyennes entreprises définie à l’annexe I du règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Éric Bocquet.
M. Éric Bocquet. Nous parlons à présent de l’impôt sur les sociétés, et nous contestons une nouvelle fois la volonté du Gouvernement de baisser d’un bloc le taux de l’impôt sur les sociétés d’ici à 2025.
Madame la secrétaire d’État, vous entendez baisser ce taux de 33 à 25 % en cinq ans. Même si vous nous proposez cette année de ralentir la baisse pour les grosses entreprises, la trajectoire est maintenue, quoi qu’il en coûte.
Je me permettrai un petit rappel, madame la secrétaire d’État : vous-même et d’autres martelez que le taux appliqué est élevé, alors qu’il a baissé dans le monde, en particulier en Europe, sous la pression du marché. Comme l’indiquait un article du journal Les Échos, bon connaisseur de la question, « malgré un taux qui reste élevé aujourd’hui, l’impôt sur les sociétés rentre mal dans les caisses de l’État ».
Une étude de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), publiée au début de cette année, indiquait que la France se situait presque en dernière position, si nous considérions la part de l’impôt sur les sociétés dans les recettes fiscales, soit 5 % contre 9 % en moyenne par pays membre de l’OCDE. Notre pays se trouve en soixante-treizième position sur les quatre-vingt-huit pays étudiés, si l’on rapporte le rendement de l’impôt sur les sociétés au PIB.
Madame la secrétaire d’État, quand vous nous parlez d’impôt sur les sociétés, vous n’évoquez ni le crédit d’impôt recherche (CIR), ni le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), ni son nouvel avatar, évacué du budget de l’État vers les comptes sociaux ; vous ne nous parlez pas non plus des abattements fiscaux sur les dividendes, qui s’élèvent à 40 % ; vous ne parlez pas non plus de la flat tax, de l’exit tax ou de l’abrogation de l’impôt sur la fortune (ISF), qui bénéficie principalement aux détenteurs de capitaux dans les entreprises.
Nous proposons, par notre amendement, de maintenir le taux de 33,3 % pour les grosses entreprises, qui doivent participer à la solidarité nationale, plutôt que de dégager des fonds pour leurs actionnaires.
Je le rappelle, la France est championne du monde des versements de dividendes aux actionnaires, qui, pour la plupart, s’empressent de les placer sur les marchés financiers.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Malheureusement, cet amendement est rigoureusement contraire à la position de la commission, qui regrette justement que le Gouvernement revienne sur ses engagements de baisser de manière pluriannuelle l’impôt sur les sociétés, au moins pour les plus grandes entreprises. L’on nous a déjà fait le coup, et cela recommence !
Hier soir, le ministre Bruno Le Maire nous disait que la cible restait 25 %. Ces propos relèvent plus de la méthode Coué, puisque la marche va devenir particulièrement haute à franchir. Je n’ai plus beaucoup d’illusions quant à notre capacité à atteindre cet objectif.
Pour une fois, me disais-je, que l’on nous annonce une trajectoire !
M. Philippe Dallier. C’est alors qu’il faut se méfier !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Je pensais que l’on allait s’y tenir.
Vous savez en effet que, en matière fiscale, en France, le drame est non seulement que les taux nominaux soient élevés, ou que le taux d’imposition figure parmi les plus élevés du monde et soit le plus élevé au sein de l’OCDE, mais aussi que l’imprévisibilité soit chronique, que l’on change les règles en permanence, que notre cadre fiscal soit si instable, au contraire de celui de nos voisins.
M. Jean Bizet. Absolument !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Pour l’impôt sur les sociétés, on avait annoncé une trajectoire aboutissant à un taux de 25 %. Ce faisant, la France aurait figuré dans la moyenne haute par rapport à ses voisins. Beaucoup d’États ont déjà baissé leur taux pour rendre leurs entreprises plus compétitives ; et je n’évoque même pas la course à la baisse dans laquelle nombre de pays, comme peut-être demain le Royaume-Uni, risquent de s’engager.
Pour l’ensemble de ces raisons, ces dispositions sont totalement contraires à la position de la commission ; d’ailleurs, dans quelques instants, nous examinerons un amendement tendant à aller précisément dans le sens inverse.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État. Monsieur Bocquet, pourquoi le rendement de l’impôt sur les sociétés est-il, en France, plus faible que dans d’autres pays ? Parce que les marges y sont plus faibles, et pour cause : les prélèvements commencent avant même le premier euro de bénéfice, via les impôts de production. Ces derniers sont sept fois plus élevés chez nous qu’en Allemagne ! Il ne faut pas évacuer ces sujets.
M. Julien Bargeton. Tout à fait !
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État. Précisément, nos entreprises partent, mais elles se lancent dans la course avec des boulets aux pieds. Cette réalité est documentée, non seulement par le Gouvernement, mais aussi par l’OCDE, par le Fonds monétaire international (FMI), par l’Union européenne et par l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Ce constat est donc largement admis.
En outre, avec cet amendement, vous proposez étrangement d’augmenter l’impôt sur les PME : en effet, ces dernières bénéficient déjà d’un taux réduit de 15 %.
De plus, il est assez curieux de considérer sans distinction les multinationales et les ETI ; avec le dispositif que vous défendez, ces dernières verraient leurs impôts augmenter. Or ce sont les entreprises qui créent le plus d’emplois en France et qui réinvestissent la plus grande part de leurs bénéfices dans leur appareil productif. Une nouvelle fois, avec cette mesure, vous vous inscrivez davantage dans un narratif que dans le réel.
Le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. Julien Bargeton. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1062 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 11 (priorité)
I. – Le deuxième alinéa du I de l’article 219 du code général des impôts, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2019-759 du 24 juillet 2019 portant création d’une taxe sur les services numériques et modification de la trajectoire de baisse de l’impôt sur les sociétés, est complété par trois phrases ainsi rédigées : « Par dérogation, pour les exercices ouverts du 1er janvier au 31 décembre 2020, le taux normal de l’impôt est fixé, pour les redevables ayant réalisé un chiffre d’affaires égal ou supérieur à 250 millions d’euros, à 31 % pour la fraction supérieure à 500 000 euros de bénéfice imposable apprécié par période de douze mois. Par dérogation, pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2021, le taux normal de l’impôt est fixé, pour les mêmes redevables, à 27,5 %. Pour l’application des deuxième à quatrième phrases du présent alinéa, le chiffre d’affaires est apprécié selon les modalités fixées au II de l’article 4 de la loi n° 2019-759 du 24 juillet 2019 portant création d’une taxe sur les services numériques et modification de la trajectoire de baisse de l’impôt sur les sociétés. »
I bis (nouveau). – Au premier alinéa du II de l’article 182 B du code général des impôts, les mots : « fixé au taux prévu au » sont remplacés par les mots : « celui prévu à la première phrase du ».
I ter (nouveau). – Au dernier alinéa du 1° du 1 de l’article 187 du code général des impôts, le taux : « 30 % » est remplacé par les mots : « celui prévu à la première phrase du deuxième alinéa du I de l’article 219 ».
I quater (nouveau). – À la première phrase du premier alinéa de l’article 244 bis du code général des impôts, la seconde occurrence du mot : « au » est remplacée par les mots : « à la première phrase du ».
I quinquies (nouveau). – Au premier alinéa du 1 du III bis de l’article 244 bis A du code général des impôts, les mots : « fixé au » sont remplacés par les mots : « prévu à la première phrase du ».
I sexies (nouveau). – À la première phrase du deuxième alinéa de l’article 244 bis B du code général des impôts, la troisième occurrence du mot : « au » est remplacée par les mots : « à la première phrase du ».
I septies (nouveau). – Le III de l’article 84 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 est ainsi modifié :
1° Après le B, il est inséré un B bis ainsi rédigé :
« B bis. – Le D du I s’applique aux retenues à la source dont le fait générateur est intervenu à compter du 1er janvier 2022. » ;
2° Au C du III, les mots : « D et le 5° du F du I s’appliquent » sont remplacés par les mots : « 5° du F du I s’applique ».
II. – À la première phrase du II de l’article 4 de la loi n° 2019-759 du 24 juillet 2019 portant création d’une taxe sur les services numériques et modification de la trajectoire de baisse de l’impôt sur les sociétés, les mots : « à la seconde phrase du deuxième alinéa » sont remplacés par les mots : « au deuxième alinéa ».
III. – Les I et II s’appliquent aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2020.
IV (nouveau). – A. – Les I bis et I quater à I sexies s’appliquent aux retenues et prélèvements à la source dont le fait générateur est intervenu entre le 6 mars 2019 et le 31 décembre 2021.
B. – Le I ter s’applique aux retenues à la source dont le fait générateur est intervenu entre le 1er janvier 2020 et le 31 décembre 2021.
M. le président. La parole est à M. Thierry Carcenac, sur l’article.
M. Thierry Carcenac. Suivant la logique détaillée à l’instant par M. Bocquet, l’article 11 aménage de nouveau le taux de l’impôt sur les sociétés pour les entreprises dont le chiffre d’affaires excède 250 millions d’euros. Il confirme donc la baisse d’impôt sur les sociétés pour les grandes entreprises tout en l’atténuant, dans la droite ligne des mesures dites « gilets jaunes » de l’an dernier.
En effet, la loi de finances pour 2018 avait fixé le taux normal de l’impôt sur les sociétés à 28 % pour les 500 000 premiers euros de bénéfice ; à 31 % au-delà pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019 ; à 28 % quel que soit le montant du bénéfice pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2020 ; et à 26,5 % pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2021.
Si la distinction entre les grandes entreprises et les autres va dans le bon sens, un système considérant bien plus finement les entreprises selon leur taille, voire en fonction de leur comportement, aurait pu être envisagé.
Madame la secrétaire d’État, vous l’avez souligné vous-même : si un effort devait être accompli au titre de l’impôt sur les sociétés, c’est prioritairement en faveur des PME et de TPE, qu’il conviendrait de soutenir un peu plus encore.
Le Gouvernement confirme sa politique de baisse des charges en faveur des sociétés, mais il ne résout en rien le problème de fond, à savoir le niveau adéquat de taxation des entreprises. Par ailleurs, il contribue à affaiblir la parole de l’État pour les entreprises : au lieu de suivre une règle fixe, nous ne cessons de fluctuer.
À nos yeux, une réforme globale du niveau de l’imposition des entreprises eût été plus appropriée. On le constate en se penchant sur les niches fiscales : ce qui compte, c’est moins le taux nominal que le taux réel d’imposition des entreprises.
Or, en examinant ce taux réel, l’on observe que les grandes entreprises payent beaucoup moins d’impôts que toutes les autres.
M. le président. L’amendement n° I-1107 rectifié, présenté par MM. P. Dominati et Retailleau, Mme Bories et M. Buffet, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Dominati.