compte rendu intégral
Présidence de Mme Hélène Conway-Mouret
vice-présidente
Secrétaires :
Mme Agnès Canayer,
Mme Annie Guillemot.
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Procès-verbal
Mme la présidente. Le compte rendu intégral de la séance du jeudi 6 février 2020 a été publié sur le site internet du Sénat.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté.
2
Décès d’un ancien sénateur
Mme la présidente. Mes chers collègues, j’ai le regret de vous rappeler le décès de notre ancien collègue Gilbert Belin, qui fut sénateur du Puy-de-Dôme de 1974 à 1983 et de 1988 à 1992.
3
Questions orales
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.
importance de l’activité du tribunal judiciaire de bourg-en-bresse
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Chaize, auteur de la question n° 1110, adressée à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Patrick Chaize. Madame la garde des sceaux, je souhaite appeler votre attention sur l’importance de l’activité du tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse, dans l’Ain, et l’insuffisance de ses moyens.
L’Ain est classé au sixième rang national au titre de la croissance démographique, avec une augmentation de plus de 30 000 habitants en seulement cinq ans et une perspective à plus de 650 000 résidents d’ici à deux ans.
Dans ce contexte, l’activité pénale ne faiblit pas, bien au contraire, comme en témoignent le nombre de décisions rendues mais aussi le délai pour qu’une affaire soit jugée.
L’Ain subit l’influence de la criminalité des agglomérations lyonnaise et genevoise. Il est pourtant le seul des ressorts des cours d’appel de la région Rhône-Alpes-Auvergne à ne pas disposer de services d’enquête régionaux.
Comment ne pas conforter ainsi les professionnels de la délinquance dans l’idée que l’Ain est un territoire propice au développement des activités illicites ?
Pour illustration, le territoire du Pays de Gex, situé aux portes de Genève, connaît un taux de croissance démographique dix fois supérieur à la moyenne nationale ainsi qu’un développement économique fort. En parallèle, il connaît aussi un accroissement des trafics de stupéfiants et des activités illégales, sans toutefois la présence du moindre enquêteur spécialisé.
Cette sous-représentation n’est pas isolée lorsque l’on sait que l’Ain compte 46 agents de l’État pour 1 000 habitants, alors que la moyenne nationale est de 72 agents et même de 77 pour le département du Rhône.
Force est de constater que la juridiction de Bourg-en-Bresse est injustement sous-dotée en magistrats. En effet, 100 000 Aindinois ne peuvent compter que sur la présence de 1,4 magistrat du parquet, alors qu’à nombre identique d’habitants cette présence est de 2,8 parquetiers dans d’autres départements.
Devant cette incontestable réalité, une implantation locale des services spécialisés dans la lutte contre la criminalité organisée ainsi qu’un juste renforcement des effectifs du ministère public sont indispensables.
En réponse à ma question orale du 13 février 2018, vous m’aviez indiqué, madame la garde des sceaux, que les services de la Chancellerie seraient attentifs à cette situation. Mais l’Ain n’a pas vu celle-ci s’améliorer.
Aussi, par cette nouvelle question, je voudrais savoir quelles mesures urgentes vous comptez mettre en place.
Mme la présidente. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le sénateur Patrick Chaize, vous m’aviez effectivement interrogée en février 2018 sur la situation du tribunal de Bourg-en-Bresse ; vous me sollicitez de nouveau aujourd’hui sur deux points.
S’agissant du premier point, à savoir l’accroissement des effectifs des services d’enquête spécialisés, comme vous le savez, l’affectation des postes sur ces services d’enquête relève non pas des services de la Chancellerie, mais du ministère de l’intérieur. J’ai donc attiré l’attention de mon collègue Christophe Castaner sur ce point spécifique.
S’agissant du second point, à savoir le nombre de magistrats du parquet, notamment, présents au tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse, à titre liminaire, je souhaite vous rappeler qu’après une augmentation de 4,5 % en 2019 le budget du ministère de la justice augmente de nouveau cette année de 4 %. Cela me permet notamment de créer, en 2020, 384 emplois dans les services judiciaires, qui viendront en soutien de l’ensemble des juridictions.
Concernant le nombre précis de magistrats au tribunal de Bourg-en-Bresse, je voudrais vous communiquer deux chiffres qui m’ont été fournis par mes services et qui sont fondés sur des données provisoires à la fin de 2019.
Ces chiffres tendent à indiquer une baisse de l’activité pénale du parquet. Ainsi, le nombre d’affaires enregistrées au parquet et le nombre d’affaires poursuivables diminueraient respectivement, à la fin de 2019, de 5 % et 6 % par rapport à l’année précédente.
En outre, l’activité pénale du tribunal correctionnel révélerait, pour 2019, une légère baisse de 2 % dans les jugements et de 3,5 % pour les autres types de décisions – par exemple, ordonnances pénales et comparutions sur reconnaissance préalable de culpabilité.
La circulaire de localisation des emplois pour l’année 2019 fixe à 37 le nombre de magistrats nécessaires au fonctionnement de la juridiction : 28 au siège et 9 au parquet.
Les effectifs sont aujourd’hui au complet, tant au siège qu’au parquet. Mes services travaillent actuellement sur les prochains mouvements de magistrats qui paraîtront en février et au mois de mars pour les élèves sortant d’école, lesquels prendront leurs fonctions au mois de septembre 2020. Dans ce cadre, le renforcement des parquets de première instance constitue une priorité.
Je puis d’ores et déjà vous affirmer que les effectifs du tribunal de Bourg-en-Bresse seront au complet.
Je voudrais de nouveau vous assurer, monsieur le sénateur, de mon attention précise à la situation du tribunal et à la situation de la cour d’appel de Lyon. Des magistrats placés, qui sont au nombre de 8 au siège et de 6 au parquet, peuvent venir renforcer en tant que de besoin les situations spécifiques des juridictions. Ce pourrait être le cas de Bourg-en-Bresse si un tel besoin devait se manifester.
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Chaize, pour la réplique.
M. Patrick Chaize. Madame la garde des sceaux, je vous remercie de ces informations, mais vous comprendrez qu’il se pose en fait un vrai problème systémique. Cette sous-dotation est aujourd’hui amplifiée par un phénomène, celui de l’augmentation de la population. Je ne conteste pas les chiffres que vous m’indiquez attestant une diminution du nombre d’affaires, mais, puisque la situation était déjà déficitaire au départ, elle ne comble pas le manque de magistrats. En l’occurrence, cette situation se répète d’année en année.
Vous avez été destinataire de rapports émanant du président du tribunal et du procureur exprimant ce besoin vraiment prégnant.
Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Patrick Chaize. Tant mieux si l’activité du tribunal diminue, mais, très franchement, un effet de rattrapage serait nécessaire pour placer ce tribunal au même niveau que les autres.
avènement et déploiement de la 5g
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Rossignol, auteure de la question n° 1114, adressée à Mme la ministre de la transition écologique et solidaire.
Mme Laurence Rossignol. Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur les conséquences sanitaires et environnementales du déploiement de la 5G.
À vrai dire, à cet instant précis, je préférerais vous interroger sur la lutte contre les allergènes source d’infections respiratoires… (Sourires.) J’imagine que vous auriez là aussi des réponses à m’apporter, mais, pour autant, ma voix resterait quelque peu éraillée.
La feuille de route publiée en juillet 2018 promettait transparence et dialogue sur le déploiement de la 5G, avec un bilan des conséquences sanitaires et environnementales. À ma connaissance, et au moins au moment où cette question orale a été déposée, le contenu de ce rapport informatif n’était pas encore connu. Aussi, je voudrais savoir si vous avez avancé et s’il l’est aujourd’hui. D’autant que, dans la mesure où l’attribution des fréquences est en cours, le projet pourrait voir prochainement le jour. Vous comprendrez que nos concitoyens ont besoin d’informations sur ces sujets.
J’attire particulièrement votre attention sur les conséquences environnementales du déploiement de la 5G, puisque les études faites aujourd’hui indiquent que, si internet était un État, il serait le sixième plus gros pollueur de la planète. La 4G serait déjà 23 fois plus énergivore que le wifi, selon le rapport négaWatt, auquel on peut en général faire totalement confiance. Compte tenu du mix énergétique mondial, la part d’émissions de gaz à effet de serre attribuables au numérique devrait être de 4 % en 2020.
L’impact de la 5G sur la dégradation de l’environnement est de nature à inquiéter nos concitoyens, au moins autant d’ailleurs, à mon sens, que son impact sanitaire.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Brune Poirson, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la sénatrice Rossignol, la technologie 5G a été conçue pour faire face à l’augmentation de la demande de téléphonie mobile et pour les nouveaux usages liés au développement des objets connectés.
Les valeurs limites réglementaires d’exposition du public aux champs électromagnétiques s’appliquent indépendamment de la technologie, et les réseaux 5G doivent donc bien évidemment respecter ces limites.
Le Gouvernement a donc saisi l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) pour évaluer, d’une part, l’exposition aux ondes électromagnétiques de la population, et, d’autre part, les éventuels impacts sur la santé.
L’ensemble de ces travaux ont été présentés au Comité national de dialogue de l’Agence nationale des fréquences, qui est composé d’organisations non gouvernementales d’opérateurs, de constructeurs, de collectivités et de services de l’État. La mission de ce comité consiste à permettre un échange sur toute question liée à l’exposition aux ondes engendrée par les antennes.
La consommation énergétique du numérique est un sujet absolument majeur. C’est un problème qui est par définition mondial, qui ne connaît pas de frontières, et qui ne pourra être résolu sans un travail extrêmement étroit avec les entreprises privées du numérique. C’est pour cette raison-là que le Président de la République réunit chaque année, à l’Élysée, les acteurs du numérique à l’occasion de Tech for Good afin de leur demander de prendre des engagements très clairs. En France, ces engagements ne sont pas pris sur une base uniquement volontariste ; ils répondent également à des contraintes légales.
Madame la députée, vous avez activement participé aux débats lors de l’examen de la loi anti-gaspillage et pour une économie circulaire, que j’ai portée dans cet hémicycle et qui a été votée le 30 janvier dernier. Elle contient justement une mesure destinée à informer les consommateurs de l’impact environnemental de leur consommation de données, de façon à leur permettre de prendre pleinement conscience de l’impact que peut avoir leur consommation sur les gaz à effet de serre.
Bien sûr, ce n’est pas la solution magique, mais c’est un élément parmi d’autres dans la préservation de l’environnement et la lutte contre l’impact du numérique sur l’environnement.
Le déploiement de la 5G devrait accélérer le développement de nouveaux usages, lesquels entraîneront une augmentation du trafic de données, mais également – c’est tout le paradoxe de la transition numérique – amélioreront l’efficacité énergétique des réseaux.
Les données de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) mettent en avant une amélioration de l’efficacité énergétique du réseau 5G par rapport au réseau 4G, qui peut atteindre un facteur 100 pour certaines applications.
Il est ainsi difficile d’estimer précisément, à ce stade, la consommation de la 5G. Quant à la consommation numérique en général, je le disais, un des paradoxes, c’est que la transition numérique aide aussi parfois à accélérer la transition écologique. Je pense, par exemple, à tout ce qui est internet des objets.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour la réplique.
Mme Laurence Rossignol. Madame la secrétaire d’État, je ne suis pas députée, je suis sénatrice, et je n’ai pas pris part aux débats lors de l’examen de votre loi.
Mme Laurence Rossignol. Sans doute avez-vous repris la fiche destinée à être lue devant l’Assemblée nationale.
Mme Laurence Rossignol. Cela étant dit, ce n’est pas si grave, d’autant que la réponse est probablement la même que celle que vous y avez faite. Et je ne vous cache pas qu’elle n’est pas plus satisfaisante ici, au Sénat.
En ce qui concerne les mesures sanitaires, vous nous dites qu’il existe un comité. Un comité, c’est bien ; encore faudrait-il qu’il fasse des recommandations, mène des expertises pour rassurer nos concitoyens.
S’agissant de l’impact du numérique sur la transition écologique, on ne sait pas trop ce qu’il en est, on pense que ce sera un peu mieux, mais on n’est pas totalement sûr.
Il faut essayer de donner aux citoyens des réponses plus précises, plus encourageantes pour eux et peut-être plus responsabilisantes que celles que vous donnez à cet instant, même si j’imagine bien que ce n’est pas si simple.
avenir des agents de la brigade mobile d’intervention pour les loups
Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud, auteure de la question n° 1102, adressée à Mme la ministre de la transition écologique et solidaire.
Mme Patricia Morhet-Richaud. Madame la secrétaire d’État, depuis 2015, les agents de la brigade nationale loup œuvrent dans tous les territoires où leur présence est nécessaire pour contenir le phénomène de prédation sur les troupeaux et pour sauvegarder les élevages de plein air.
Si les mesures de protection des troupeaux ont montré leurs limites avec 92 % des troupeaux attaqués qui sont des troupeaux protégés, les tirs létaux apparaissent quant à eux comme la seule voie possible pour contenir – je n’ose dire « faire diminuer » – le nombre d’attaques.
En effet, la politique de surprotection mise en œuvre ces dernières années a fait perdre, au fil des portées, leur caractère sauvage aux loups, qui s’approchent toujours plus près des activités humaines et qui massacrent toujours plus d’animaux.
Chaque année, 12 500 animaux domestiques sont prédatés. Dans ces conditions, difficile d’imaginer un avenir pour l’agropastoralisme.
Dans ce contexte, l’utilité de cette brigade nationale, placée sous l’autorité fonctionnelle de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) – maintenant de l’Office français de la biodiversité (OFB) – et du préfet coordonnateur n’est plus à démontrer, tant les besoins des territoires sont importants et les attentes des éleveurs nombreuses.
Je tenais donc à attirer votre attention, madame la secrétaire d’État, sur la fin programmée des brigades mobiles d’intervention loup puisque, dans les prochains mois, prendront fin les contrats de travail à durée déterminée des agents, désormais dans l’impossibilité réglementaire de voir le renouvellement de leur CDD.
Je tenais aussi à vous sensibiliser sur leur connaissance fine des territoires et sur leur collaboration technique avec les lieutenants de louveterie, qui sont autant de raisons pour pérenniser cette organisation qui fonctionne bien.
C’est pourquoi je vous remercie de bien vouloir m’indiquer quelles mesures sont envisagées pour maintenir les agents de la brigade mobile d’intervention loup actuellement en place.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Brune Poirson, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la sénatrice, la brigade loup, créée en 2015, a été pérennisée en 2018 par l’intégration des effectifs dédiés sous plafond de l’établissement public, conformément à l’engagement pris dans le plan national d’actions « loup et activités pastorales » 2018-2023.
Je vous confirme que la brigade loup est bien maintenue et pérennisée au sein de l’OFB, auquel l’ONCFS a été intégré le 1er janvier 2020.
L’OFB étudie actuellement les meilleures modalités de renouvellement ou de reconduction des dix agents de la brigade sous forme de CDD.
Leur échéance, à l’automne, n’impactera toutefois pas la mobilisation de la brigade sur le terrain puisque cette échéance interviendra, pour l’essentiel, après la saison d’estive.
Compte tenu de l’expérience acquise en matière de défense des troupeaux, l’OFB tiendra compte des enseignements des premières années de fonctionnement de la brigade pour ajuster le profil des agents et les adapter aux attentes des acteurs locaux.
L’objectif est d’assurer la continuité et la qualité du service apporté aux éleveurs, mais également d’améliorer les performances de cette nouvelle brigade.
Enfin, un observatoire sur l’efficacité des mesures de protection sera lancé en 2020 pour mieux comprendre les réussites et les échecs de ces mesures et produire les retours d’expérience permettant de les améliorer.
Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud, pour la réplique.
Mme Patricia Morhet-Richaud. Merci de votre réponse, madame la secrétaire d’État. En fait, il s’agit bien de pérenniser la brigade actuelle, dont les agents ont acquis une grande expérience qu’il serait très difficile de reproduire avec d’autres. Ils forment les lieutenants de louveterie et interviennent dans le cadre de multiples missions. Former de nouveaux agents impacterait énormément l’élevage de plein air et aurait un coût financier non négligeable.
Il s’agit bien de pérenniser les emplois actuels.
ligne ferroviaire de la vallée de l’arve
Mme la présidente. La parole est à M. Loïc Hervé, auteur de la question n° 1061, adressée à Mme la ministre de la transition écologique et solidaire.
M. Loïc Hervé. Madame la secrétaire d’État, ma question concerne la modernisation de la ligne ferroviaire entre La Roche-sur-Foron et Saint-Gervais-les-Bains. C’est un serpent de mer.
Quand j’ai déposé ma question, c’était pour appeler, une énième fois, l’attention du Gouvernement sur la nécessité de moderniser cette voie dans cette vallée, qui donne tant au pays par sa fréquentation touristique comme par la puissance de son industrie. Oui, cette vallée donne beaucoup, mais elle est fragile. Vous le savez, madame la secrétaire d’État, la question de la pollution de l’air y est particulièrement aiguë.
Ces sujets ont été abordés avec le Président de la République, jeudi dernier, sur place, en présence de vos collègues Élisabeth Borne et Emmanuelle Wargon. C’est à cette occasion qu’il a pu annoncer que l’État contribuerait au financement de cette modernisation, par l’apport de 60 millions d’euros, quand le conseil régional et le conseil départemental apporteraient chacun 50 millions d’euros.
Je veux vous le dire ici, ce matin : cette décision est historique et laisse entrevoir la possibilité de disposer d’un véritable réseau de transport, de type RER, pour irriguer une vallée dense et dynamique de La Roche-sur-Foron à Saint-Gervais-les-Bains, en passant par Saint-Pierre-en-Faucigny, Bonneville, Marignier, Cluses, Magland et Sallanches.
Il s’agit non seulement de mieux connecter vers Annemasse et Genève, en donnant ainsi une réelle ampleur au Léman Express, mais aussi de mieux connecter la vallée vers Annecy, Aix-les-Bains et Chambéry.
Madame la secrétaire d’État, nous sommes impatients de voir la promesse présidentielle devenir une réalité tangible et nous avons besoin de savoir quand les études de SNCF Réseau pourront pleinement démarrer, les travaux être réalisés et les trains enfin circuler.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Brune Poirson, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur, je me félicite comme vous de la mise en service réussie du Léman Express, le 15 décembre dernier. Ce projet inédit de réseau métropolitain transfrontalier constitue la colonne vertébrale des transports publics régionaux du bassin franco-genevois.
Le Léman Express doit désormais s’étendre à tous les territoires alentour. C’est essentiel pour trois raisons : améliorer la desserte de la vallée de l’Arve, permettre de lutter contre les épisodes de pics de pollution que ce territoire connaît, favoriser le développement économique et touristique.
Par ailleurs, pour atteindre un cadencement de deux trains par heure et par sens aux heures de pointe, les études menées par SNCF Réseau ont démontré la pertinence d’investissements dans l’automatisation de la signalisation et la modernisation des appareils de voie sur la ligne entre La Roche-sur-Foron et Saint-Gervais-les-Bains-Le Fayet.
Je peux vous assurer que les études d’avant-projet relatives à cette opération seront bien financées par le redéploiement des 10 milliards d’euros. Ainsi, 3 milliards d’euros seront apportés par l’État, dans le cadre du contrat de plan État-région 2015-2020 de la région Auvergne-Rhône-Alpes, dont le volet mobilité est prolongé jusqu’en 2022.
Par ailleurs, je vous confirme que la mobilité continuera jusqu’en 2022 de bénéficier chaque année de crédits au sein des CPER (contrats de plan État-régions), puis au travers d’une nouvelle contractualisation à partir de 2023.
Ces modalités permettront de respecter l’engagement réaffirmé par le Président de la République, consistant à mettre en service l’offre Léman Express dans la vallée de l’Arve à l’horizon de 2025.
Mme la présidente. La parole est à M. Loïc Hervé, pour la réplique.
M. Loïc Hervé. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de cette réponse. Techniquement, nous le savons, SNCF Réseau doit mener non pas des études de préfiguration, mais les études opérationnelles qui permettront d’accomplir les travaux. Il va de soi que 2025 est un délai très court pour réaliser des études lourdes et des travaux.
J’ai bien entendu que l’engagement serait tenu. Sachez que nous serons extrêmement vigilants, car ce sujet est absolument vital pour notre vallée de l’Arve, qui a vivement besoin de changement, en particulier en matière de mobilité.
camions porteurs à quatre essieux
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Nougein, auteur de la question n° 1067, adressée à M. le secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports.
M. Claude Nougein. Madame la secrétaire d’État, je souhaite appeler l’attention du Gouvernement sur le passage à trente-cinq ou trente-six tonnes des camions à quatre essieux.
Aujourd’hui, le secteur de la nutrition animale, secteur très important dans un département rural comme celui de la Corrèze dont je suis élu, utilise des camions aménagés pour le transport des aliments de différents types : à deux essieux, avec un poids total autorisé en charge (PTAC) à dix-neuf tonnes ; à trois essieux, avec un PTAC à vingt-six tonnes ; à quatre essieux, avec un PTAC à trente-deux tonnes ; ou à cinq essieux, avec un PTAC à quarante-quatre tonnes. Il en va de même pour les autres secteurs des transports.
Autoriser le passage à trente-cinq ou trente-six tonnes des camions à quatre essieux permettrait l’utilisation de véhicules plus maniables que les cinq essieux et plus fiables pour circuler dans les conditions hivernales, notamment dans les zones de montagne.
De plus, sur les quatre essieux dernière génération, l’actuelle réglementation prévoit que la charge utile est de l’ordre de dix-sept tonnes. Le passage à trente-cinq tonnes permettrait d’augmenter de 17,6 % cette même charge, ce qui aurait un avantage non seulement économique, mais surtout écologique : cela se traduirait par moins de kilomètres parcourus pour une même quantité livrée et par moins de carburant consommé par tonne transportée, environ 10 % d’économie.
En augmentant le PTAC des camions porteurs à quatre essieux de trente-deux à trente-cinq tonnes, la quantité de gaz à effet de serre et autres polluants serait réduite d’au moins 15 %.
Cette modification pourrait se faire sans pour autant réduire la sécurité, puisque la charge par essieu – donnée essentielle – serait moins élevée que celle qui est autorisée pour un véhicule à cinq essieux, d’autant que les capacités techniques établies par les constructeurs varient de trente-cinq à trente-sept tonnes, certains allant même jusqu’à quarante tonnes.
Si la directive du Conseil du 25 juillet 1996 fixant, pour certains véhicules routiers circulant dans la Communauté, les dimensions maximales autorisées en trafic national et international et les poids maximaux autorisés en trafic international a également fixé le PTAC des quatre essieux à trente-deux tonnes, elle laisse la possibilité à chaque État membre de modifier cette charge. La France l’a déjà fait avec le PTAC pour cinq essieux, qui est passé de quarante tonnes à quarante-quatre tonnes.
Aussi, dans un souci tant économique qu’écologique, serait-il envisageable de porter le PTAC de trente-deux à trente-cinq tonnes pour un véhicule porteur à quatre essieux ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Brune Poirson, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur, vous souhaitez appeler mon attention sur les camions porteurs à quatre essieux.
Une étude confiée au Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) a évalué l’impact potentiel d’une telle mesure sur les infrastructures routières. L’enjeu était de savoir si l’augmentation de ce poids maximal autorisé pouvait être compatible avec le maintien des charges maximales à l’essieu, comme le prévoit le code de la route. Ce sont en effet ces charges à l’essieu qui sont la source principale de dégradation des routes et des ouvrages d’art.
Les résultats de cette étude montrent des différences importantes de répartition des charges selon les configurations des véhicules. Ainsi, pour la plupart d’entre elles, il est impossible d’augmenter le PTAC sans dépasser la charge maximale à l’essieu. La simulation de l’impact de ces dépassements montre également une dégradation bien plus forte sur les chaussées.
Par conséquent, autoriser un PTAC supérieur à trente-deux tonnes pour ces véhicules conduirait à amplifier ce phénomène et à aggraver la dégradation des infrastructures routières. Il faut rappeler que les ponts et chaussées empruntés à l’occasion des livraisons de nutrition animale ne sont pas dimensionnés pour de tels trafics.
Une telle décision renchérirait donc, d’une part, les coûts d’entretien du réseau routier qui pèsent sur les collectivités, d’autre part, la consommation de matériaux pour assurer un renouvellement plus fréquent des infrastructures, au détriment de l’environnement. Or, comme vous le savez, c’est contraire à l’orientation du Gouvernement.