M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Madame la sénatrice, comme vous l’avez rappelé, la conférence ministérielle de Séville a permis de décider 14,4 milliards d’euros d’investissements sur les trois à cinq prochaines années, dont 4 milliards d’euros pour les satellites.
Mon homologue portugais et moi-même, qui coprésidions cette conférence ministérielle, avons œuvré à répartir de la façon la plus intelligente possible sur l’ensemble des programmes les 14,4 milliards d’euros d’engagements pris par les États membres de l’ESA : 2,541 milliards d’euros seront ainsi consacrés aux programmes d’observation, essentiels au regard de la lutte contre le changement climatique et de la protection de l’environnement, un peu plus de 1,6 milliard d’euros aux programmes relatifs aux télécommunications et à la cybersécurité, 2,7 milliards d’euros à l’amélioration de nos connaissances scientifiques, 1,9 milliard d’euros à l’exploration.
Il est très important que le budget de l’Union européenne, qui est l’un des principaux donneurs d’ordres et clients de l’ESA, accorde au spatial une place à la hauteur de l’enjeu. L’ensemble des pays membres de l’ESA y sont très attentifs.
M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour la réplique.
Mme Laure Darcos. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.
Comme vous l’avez dit voilà quelques instants, le Brexit aura nécessairement des répercussions à moyen terme sur les contributions des États membres de l’Agence spatiale européenne et, surtout, sur celle de l’Union européenne. Par ailleurs, la Cour des comptes a récemment suggéré un engagement accru des Européens en faveur de l’innovation technologique. Ce sujet appelle toute notre vigilance.
Conclusion du débat
M. le président. Pour clore ce débat, la parole est à M. le président de la commission des affaires européennes.
M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier l’ensemble des orateurs pour la qualité et la pertinence de leurs interventions, qui témoignent non seulement d’un vif intérêt pour le sujet de l’espace, mais aussi d’une connaissance approfondie des enjeux de ce secteur, tant techniques et économiques que géopolitiques et sociétaux.
Ayant demandé l’inscription de ce débat à l’ordre du jour au nom de la commission des affaires européennes, j’insisterai, en conclusion, sur la valeur ajoutée de l’échelon européen pour affronter les enjeux du secteur spatial. Dans cette perspective, je reviendrai sur deux points.
D’abord, c’est dans ses applications que se trouve désormais la valeur ajoutée de l’écosystème spatial, avec plusieurs dizaines de milliards d’euros chaque année, contre environ 6 milliards d’euros, par exemple, pour les lanceurs. C’est là aussi que se trouvent les plus grands relais de croissance.
L’Union européenne devra donc jouer un rôle majeur, dans les mois et les années à venir, pour maximiser les retombées à la fois économiques et sociales des données tirées de l’activité spatiale. Je pense, par exemple, aux données météorologiques ou d’observation de la Terre. En effet, ces données, issues de programmes financés par les contribuables européens et aujourd’hui largement accessibles, sont pillées par les Gafam. Ces derniers sont d’ailleurs les seuls capables, pour l’instant, d’en tirer tous les bénéfices, grâce à leurs capacités de stockage et de calcul considérables. Nous devons mettre un frein à cette captation de valeur. À cet égard, nous plaçons beaucoup d’espoirs dans l’action de notre commissaire européen, Thierry Breton.
La Commission européenne a présenté hier sa stratégie pour les données, mentionnant notamment un cloud européen souverain, un accès centralisé aux données et aux outils de traitement. Cela existe d’ailleurs déjà en partie pour Copernicus, avec les plateformes DIAS (Data and Information Access Services). Nous suivrons attentivement la mise en œuvre de ce plan.
Par ailleurs, un accès souverain à l’espace est une nécessité stratégique pour l’Europe. Le Sénat réclamait déjà, dans sa résolution européenne du 9 août dernier, que l’Union européenne fasse preuve de volontarisme dans son soutien aux lanceurs spatiaux européens et mette en place une préférence européenne au bénéfice de ses entreprises qui opèrent dans ce secteur : une préférence de droit, mais aussi de fait, car il n’est pas acceptable que le budget des lancements institutionnels soit dix fois plus faible en Europe qu’aux États-Unis. Je salue, à cet égard, la commande, annoncée par Thierry Breton le 22 janvier dernier, de quatre lancements d’Ariane 6 pour mettre en orbite des satellites Galileo. Je souhaite que la dynamique se poursuive, voire puisse s’amplifier. Il faudrait aussi réfléchir à la possibilité d’une préférence européenne pour les commandes institutionnelles de satellites.
L’aventure spatiale fait rêver, mais gardons-nous de tout angélisme. Des actions convergentes se mettent en place pour donner à l’Europe les moyens d’une ambition spatiale. Cette ambition est une nécessité ; ne la laissons pas gâcher par des logiques court-termistes.
En attendant, souhaitons plein succès au vol inaugural d’Ariane 6, qui devrait advenir à la fin de cette année. Espérons pouvoir dresser, au début de 2021, un bilan positif de l’évolution du secteur spatial européen.
Madame la ministre, les propos de nos collègues – je pense notamment à Mme Primas, ainsi qu’à MM. Longuet et Sido, qui tirent leur expertise de leur engagement au sein de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques – vous ont peut-être donné à penser que dans chaque sénateur sommeille un astronaute. (Sourires.) Ce n’est pas le cas, quoique… Ils sont tout simplement l’expression de la culture d’avenir du Sénat. Or notre avenir, c’est aussi l’espace. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, Les Indépendants, UC, RDSE et LaREM, ainsi qu’au banc de la commission.)
M. le président. Nous en avons terminé avec le débat sur la politique spatiale de l’Union européenne.
5
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 25 février 2020 :
À quatorze heures trente et le soir :
Projet de loi relatif au Parquet européen et à la justice pénale spécialisée (procédure accélérée ; texte de la commission n° 336, 2019-2020).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-sept heures quarante.)
Pour la Directrice des comptes rendus du Sénat,
ÉTIENNE BOULENGER
Chef de publication