Sommaire
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Marie Mercier, M. Jean-Claude Tissot.
2. Financement de la sécurité sociale pour 2021. – Adoption d’un projet de loi modifié
Adoption, par scrutin public n° 26, du projet de loi modifié.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE Mme Nathalie Delattre
3. Mises au point au sujet de votes
4. Alimentation locale et durable. – Débat organisé à la demande du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants
M. Frédéric Marchand, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation
Mme Martine Berthet ; M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Jean-Pierre Decool ; M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Joël Labbé ; M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation ; M. Joël Labbé.
Mme Nadège Havet ; M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Henri Cabanel ; M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation ; M. Henri Cabanel.
M. Fabien Gay ; M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation ; M. Fabien Gay.
Mme Anne-Catherine Loisier ; M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Hervé Gillé ; M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation ; M. Hervé Gillé.
M. Stéphane Ravier ; M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Laurent Duplomb ; M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Mme Évelyne Perrot ; M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation ; Mme Évelyne Perrot.
M. Jean-Jacques Michau ; M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Mme Kristina Pluchet ; M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Serge Mérillou ; M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Édouard Courtial ; M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Mme Laurence Muller-Bronn ; M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Mme Vivette Lopez ; M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Frédéric Marchand, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants
M. Julien Denormandie, ministre
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Georges Patient
5. Communication relative à deux commissions mixtes paritaires
6. Adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière. – Adoption en nouvelle lecture d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié
Discussion générale :
M. Jean Bizet, rapporteur de la commission des finances
Clôture de la discussion générale.
Articles 1 er, 3 et 4 – Adoption.
Amendement n° 1 du Gouvernement. – Rejet.
Adoption de l’article.
Articles 5 et 5 bis – Adoption.
Article 16 (pour coordination) – Adoption.
Articles 17, 18 et 19 bis – Adoption.
Articles 22 bis, 22 quater, 22 quinquies et 22 sexies – Adoption.
Articles 24 bis et 24 ter A – Adoption.
Amendement n° 2 du Gouvernement. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
M. Cédric O, secrétaire d’État
Adoption du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.
compte rendu intégral
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Marie Mercier,
M. Jean-Claude Tissot.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Financement de la sécurité sociale pour 2021
Adoption d’un projet de loi modifié
M. le président. L’ordre du jour appelle les explications de vote des groupes et le vote par scrutin public sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2021 (projet n° 101, rapport n° 107, avis n° 106).
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de passer au scrutin, je vais donner la parole à celles et ceux de nos collègues qui ont été inscrits par les groupes pour expliquer leur vote.
J’indique au Sénat que, compte tenu de l’organisation du débat décidée par la conférence des présidents, chacun des groupes dispose de sept minutes pour ces explications de vote, à raison d’un orateur par groupe, l’orateur de la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe disposant de trois minutes.
La parole est à M. Stéphane Ravier, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
M. Stéphane Ravier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avec un solde déficitaire de 49 milliards d’euros en 2020 et un déficit prévu de 27 milliards d’euros en 2021, les dépenses de la branche maladie explosent. Si vous aviez effectué des réformes structurelles pour préparer l’avenir, « prévoir pour anticiper » constituant l’essence même de l’action de tout gouvernement, nous pourrions tolérer un déficit de cette ampleur ; seulement là, ce n’est pas le cas.
La forte diminution des recettes est due à un ralentissement économique majeur engendré par un confinement aussi forcé qu’économiquement suicidaire. Nous sommes le pays européen qui impose les mesures les plus drastiques et les plus incohérentes à l’encontre de ses entreprises. Un exemple : les fleuristes pourront, ce vendredi, vendre des sapins en extérieur, pendant que les foires aux santons, toutes en extérieur elles aussi, sont interdites. Ou comment rayer de la carte quatre cents emplois, mais aussi une profession, une passion, une culture, une identité !
Si nous voulons redresser les comptes sociaux, il va falloir retrouver la raison et la liberté de travailler pour tous les commerçants, les artisans et les indépendants.
D’autres conséquences dramatiques, humaines celles-là, sont annoncées. Santé publique France a publié un rapport qui indique : « La santé mentale des Français s’est significativement dégradée entre fin septembre et début novembre, avec une augmentation importante des états dépressifs pour l’ensemble de la population. »
Car ce n’est plus un Président qui nous dirige, mais le Premier Soviet entouré d’un politburo contrôlant chaque pan de notre vie quotidienne. (Exclamations sur de nombreuses travées.) Vladimir Emmanuelovitch Macron (Mêmes mouvements.) nous impose l’heure de sortie et l’heure de retour à notre domicile, avec qui et où nous pouvons nous déplacer, qui a le droit de travailler, qui a économiquement le droit de vivre ou de mourir, ce que nous pouvons consommer, ce que nous devons penser, ce que nous pouvons exprimer et même où nous devons prier.
Et tout cela, en s’étant affranchi du devoir démocratique de rendre compte devant le Parlement ! Incapable de contrôler l’épidémie, votre gouvernement a décidé de contrôler le peuple. La République soviétique française est « en marche » ! (Nouvelles exclamations.)
Je rappelle que j’ai proposé deux pistes pour améliorer la situation financière et sanitaire. J’ai ainsi déposé une proposition de loi visant à verser le montant des amendes du confinement aux hôpitaux – cela représente au moins 165 millions d’euros. J’ai aussi cosigné une proposition de loi visant à indiquer le lieu de fabrication des médicaments et de leurs principes actifs sur leur conditionnement et notice. Il faut une transparence dans l’information et il faut soutenir la réorientation des dépenses de santé vers des médicaments français. Il en va de notre souveraineté, et donc de notre sécurité sanitaire.
En trois ans, la Macronie a fabriqué un million de pauvres supplémentaires, soit dix millions au total, et cent mille sans domicile fixe de plus ! Le voilà, le nouveau monde antisocial d’Emmanuel Macron, car tout ne peut pas être mis sur le dos du pangolin.
M. le président. Il faut conclure !
M. Stéphane Ravier. Pour répondre à cette France en souffrance, il est temps de rétablir une véritable politique de solidarité et de justice sociale, en appliquant la priorité nationale à l’embauche, en tordant le bras à la Commission de Bruxelles,…
M. le président. Veuillez conclure !
M. Stéphane Ravier. … en luttant contre la fraude sociale et fiscale qui nous coûte chaque année 150 milliards d’euros de manque à investir. (Marques d’impatience sur diverses travées.)
M. le président. Il faut vraiment conclure !
M. Stéphane Ravier. Je refuse de cautionner cette gestion court-termiste des comptes sociaux. Mon vote sera donc défavorable !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Deroche. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission des affaires sociales a entrepris l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2021 en responsabilité. Cette position l’a conduite à approuver certains des choix opérés par le Gouvernement et à s’opposer fermement à d’autres, tout en alertant sur ceux qui devront être faits demain, mais ne sont pas pour autant présents dans ce texte.
C’est en responsabilité que le Sénat a accepté des tableaux d’équilibre aux déficits historiques et un endettement record, considérant que l’urgence du moment est de tout faire pour éviter l’effondrement de notre économie et de répondre par la solidarité nationale à ceux que la crise prive de leur emploi ou revenu.
C’est en responsabilité que le Sénat a mené une « opération vérité » sur les charges respectives de l’État et de la sécurité sociale. À la sécurité sociale, les effets de la conjoncture sur les recettes et les dépenses de l’hôpital ; à l’État, la reprise de la dette hospitalière, les dépenses de Santé publique France et les compensations des mesures de compétitivité ou de pouvoir d’achat. Ce débat n’est ni théorique ni le fruit d’une vision corporatiste de la sécurité sociale. S’il faut un jour augmenter les cotisations, agir sur le niveau des prestations ou rembourser la dette, il faut que ce soit l’équilibre des assurances sociales qui le commande, et non la charge des transferts du budget de l’État.
Dans le même esprit, le Sénat a alerté sur les années à venir. Nous sommes comme anesthésiés par une mobilisation massive d’argent public, mais le réveil sera douloureux et nous n’avons pas souhaité l’occulter. Il faudra redresser la barre, certes pas aujourd’hui, ni même peut-être demain, mais certainement dès après-demain, en tout cas le plus tôt possible pour l’avenir même de la protection sociale et la préservation de cet acquis si précieux dans la crise.
Cela implique certes une réponse massive, mais pas forcément de laisser toutes les vannes ouvertes. La commission n’a pas toujours été audible sur ce point, mais elle maintient sa position et ne manquera pas de la rappeler le moment venu.
C’est encore en responsabilité que nous avons accepté la réforme de l’accès précoce aux médicaments ou la pérennisation des maisons de naissance, mais aussi fait part de nos interrogations sur l’allongement du congé de paternité et de nos questionnements, sinon de nos doutes, sur la capacité du Gouvernement à donner corps à ce projet porteur d’espoirs qu’est la nouvelle branche autonomie. Prenons garde aux promesses non tenues qui alimentent une défiance déjà très forte chez nos concitoyens !
De la même manière, la fraude aux prestations comme aux cotisations sape les fondements de notre contrat social et, à l’initiative du rapporteur général de notre commission, le Sénat a substantiellement enrichi le volet fraude de ce projet de loi.
La nécessité d’une réforme des retraites devant l’évolution de notre démographie s’était imposée avant la crise ; elle demeure d’actualité. La crise n’a pas fait disparaître ce problème, elle n’a fait que l’amplifier. Nous verrons si le Gouvernement mais aussi tous ceux à qui la position de la commission a fait pousser des cris d’orfraie ne sont pas contraints d’y revenir… Je rappelle que le texte transmis au Sénat sur le système universel de retraite n’a pas été retiré ; certains membres du Gouvernement ont rappelé l’actualité de cette réforme. Il faudra bien la mener un jour.
Nous ne pouvons pas non plus tarder sur la réforme du système de santé, dont la crise a certes montré les forces et l’excellence, mais aussi les rigidités et les cloisonnements.
L’innovation est coûteuse ; elle nous invite à revoir les organisations, à révolutionner les parcours, ou elle remettra en cause un modèle solidaire auquel nous sommes tous ici profondément attachés.
Il y a bien un modèle social « à la française » qui n’a pas fait défaut pendant la crise et continue à soutenir les malades, les retraités et les plus précaires. Pour qu’il continue de le faire demain, des réformes sont nécessaires. C’est le discours que la commission a souhaité porter.
Animé de cette même conviction, le groupe Les Républicains votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Olivier Henno et Mme Valérie Létard applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
Mme Colette Mélot. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous avons examiné la semaine dernière le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021. Les débats ont été l’occasion de dresser un premier état des lieux de notre système de santé, huit mois après le début de l’épidémie de covid-19.
Nul ne pouvait prévoir cette crise. En revanche, il nous appartient à tous de réagir de façon responsable pour en limiter les dommages. Cette responsabilité partagée, nous la devons aux soignants, aux infirmiers, aux aides-soignants, au personnel des Ehpad (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes), à tous les malades de la covid-19 hospitalisés. Nous la devons aussi à toutes les victimes collatérales de la crise sanitaire, les commerçants, les restaurateurs, les artisans, les artistes et tant d’autres dans de multiples secteurs qui font face aux répercussions économiques et sociales des mesures sanitaires. Des mesures graves mais nécessaires, qui appellent un financement exceptionnel, limité aux quelques années à venir.
Aussi, le texte que nous avons examiné comporte un certain nombre de mesures d’urgence, mais n’élude pas la question de réformes plus structurelles, issues notamment du Ségur de la santé.
Tout d’abord, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) pour 2020 est revalorisé de 10 milliards d’euros, auxquels s’ajoutent 2,4 milliards votés à l’Assemblée nationale et 800 millions au Sénat, ce qui permet d’atteindre 218,9 milliards d’euros contre les 205 milliards prévus initialement.
Une contribution exceptionnelle des organismes complémentaires d’assurance maladie (OCAM) sera mise en place au titre des années 2020 et 2021, sachant que le Sénat a adopté une mesure de différenciation des taux applicables selon le caractère lucratif ou non de l’organisme visé. Alors que la crise sanitaire a provoqué une forte augmentation des dépenses de la branche maladie, les organismes complémentaires ont économisé 2 milliards d’euros de remboursement durant la crise. Aussi, il nous semble que cette contribution est justifiée.
D’autres mesures conjoncturelles importantes ont été adaptées à l’évolution de la crise et votées. Il s’agit de la prolongation du dispositif d’indemnité en cas d’activité partielle et de la création d’un dispositif complémentaire d’exonération des bénéfices pour les secteurs fermés totalement ou situés dans les zones de couvre-feu et ayant subi une baisse d’activité. À l’initiative du Gouvernement, les conditions de baisse d’activité ont été assouplies pour les secteurs dépendants des secteurs les plus affectés. Il s’agit d’une mesure très attendue par de nombreuses entreprises, notamment dans le secteur culturel.
La concrétisation des conclusions du Ségur de la santé constitue l’une des principales avancées du PLFSS pour 2021.
Au premier rang figure la revalorisation des salaires des personnels soignants, paramédicaux et non médicaux à l’hôpital et en Ehpad. Ces mesures sont essentielles pour améliorer l’attractivité des métiers du soin et du secteur médico-social.
Nous saluons également l’adoption d’une enveloppe de 200 millions d’euros dédiée au secteur de l’aide à domicile, qui sera versée aux départements par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). Le Sénat a adopté plusieurs amendements visant à rationaliser le dispositif proposé par le Gouvernement.
Nous saluons aussi la dotation du fonds pour la modernisation et l’investissement en santé de 6 milliards d’euros, dont le champ des bénéficiaires a été étendu aux cabinets libéraux.
En réponse au problème de l’engorgement des urgences, le texte prévoit la mise en place d’un forfait payant de 18 euros en remplacement du forfait de réorientation jamais appliqué. Nous sommes sceptiques sur l’efficacité d’un tel dispositif qui pourrait se traduire par un renoncement aux soins et une aggravation de l’état de santé des patients les plus précaires. Néanmoins, nous saluons l’adoption des mesures d’exonération de ce forfait, notamment pour les personnes souffrant d’une affection de longue durée (ALD). Le Sénat a également adopté un nouveau dispositif, défendu par notre groupe, permettant à titre expérimental le développement de l’offre de téléconsultation en amont du passage aux urgences dans les établissements de santé.
Je voudrais saluer la création d’une dotation finançant une mission d’intérêt général dédiée à la prise en charge des femmes victimes de violences. Hier, le ministère de l’intérieur a rendu un premier bilan à la suite du Grenelle des violences conjugales, indiquant une hausse de 16 % du nombre de victimes en 2019.
Plusieurs dispositions visent à favoriser l’accessibilité des soins sur l’ensemble du territoire. Je pense notamment à l’amendement adopté par le Sénat qui vise à encourager la poursuite d’activité des professionnels de santé situés dans les déserts médicaux qui choisissent de continuer à exercer au-delà de l’âge légal de départ à la retraite. L’instauration d’une durée légale minimale de quatre mois de stockage pour les médicaments à intérêt thérapeutique majeur va également contribuer à renforcer la continuité des soins, notamment pour les malades du cancer.
Le texte prévoit des mesures importantes concernant la politique familiale.
Nous saluons ainsi l’adoption du doublement du congé de paternité. Les amendements visant à assouplir cette mesure ont tous été repoussés. Nous savons qu’il existe de fortes disparités de prise de ce congé selon le type de contrat de travail.
Le versement de la prime de naissance a été avancé avant la fin du mois civil suivant le sixième mois de grossesse. C’est une mesure très attendue qui permettra aux familles de mieux préparer l’accueil de l’enfant.
Enfin, nous sommes bien sûr favorables à la généralisation des maisons de naissance qui seront aussi des lieux de prévention, d’éducation thérapeutique et de formation pour les sages-femmes.
Nous saluons les avancées adoptées en matière de prise en charge de la dépendance et d’adaptation de la société au vieillissement de la population, mais nous restons dans l’expectative de la loi sur le grand âge et sur le financement de la cinquième branche, sachant que plus de 6 milliards d’euros sont attendus pour couvrir les besoins.
Le Sénat a fait le choix de supprimer la reprise des 13 milliards d’euros de dette hospitalière par la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades), en considérant que cette dette relève de l’État. Nous le regrettons.
Nous avons des réserves au sujet des dispositions relatives à la réforme des retraites. Si nous sommes favorables sur le fond au recul progressif de l’âge d’ouverture des droits à 63 ans, il ne nous paraît pas opportun d’introduire dans le contexte actuel une telle mesure paramétrique au détour d’un amendement.
Forts de ce constat partagé, une large majorité de notre groupe s’abstiendra et certains d’entre nous voteront en faveur de ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – M. François Patriat applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, après cette première lecture au Sénat, non seulement le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 n’a bénéficié que de peu d’amendements répondant aux défis sanitaires et sociaux, mais il repart lesté d’amendements régressifs.
Il nous a fallu défendre les quelques avancées que nous avions saluées, comme l’allongement du congé de paternité, et qui sous couvert de considérations économiques ont fait l’objet de tentatives pour en contraindre l’accès.
Alors que nous devrions consacrer l’essentiel de nos débats à construire la protection sociale de notre temps et à proposer les pistes de financement la rendant possible, ce projet de loi a moins que jamais suivi ce cheminement logique, seul susceptible de ne pas faire du PLFSS un outil d’austérité.
Comme d’habitude, le Gouvernement détermine l’enveloppe fermée des ressources et refuse toutes les propositions pour en desserrer l’étau par une taxation plus juste des revenus et des patrimoines.
La crise économique n’a que trop focalisé nos débats sur la politique d’exonération des cotisations sociales – celle-ci n’a rien de nouveau, mais elle connaît dans ce contexte une explosion inédite.
Si l’intervention de l’État en soutien de l’économie est nécessaire – elle devrait cependant être modulée, conditionnée, et exclure de l’aide ceux qui profitent du contexte pour licencier –, nous regrettons que n’aient pas été au centre de nos débats la crise sociale et les mesures sociales à prendre immédiatement pour contrer le basculement dans la pauvreté, le chômage, la précarité et la dégradation de l’état de santé de la population.
À chaque proposition de mesures sociales nouvelles, nos amendements sont déclarés irrecevables puisqu’ils entraînent des dépenses, et lorsque nous proposons de nouvelles ressources, celles-ci sont rejetées pour des raisons dogmatiques.
Pour le Gouvernement et la majorité du Sénat, il n’est donc pas d’actualité, par exemple, de réintégrer pour les oubliés du Ségur les revalorisations ou les primes covid. Ces travailleurs sociaux et médico-sociaux – assistants familiaux et bien d’autres – qui ont contribué, en première ligne, à répondre à la crise sanitaire resteront donc des invisibles.
Il n’est pas plus d’actualité de rechercher des ressources supplémentaires pour financer la cinquième branche, ou mettre fin à la destruction de l’hôpital public et à la marchandisation des champs du social et du médico-social, facteur de croissance des inégalités.
Nous pouvons certes acter l’adoption de quelques amendements : la différenciation des taxes selon le statut des organismes complémentaires, même si nous récusons l’augmentation de leur fiscalité ; une mesure destinée à lutter contre le non-recours aux prestations par les personnes en situation de précarité sociale ; ou encore le rétablissement de l’opposabilité des accords de la branche du domicile garantissant l’égalité territoriale.
Nous nous félicitons aussi de la suppression du transfert vers la sécurité sociale du financement de l’allocation supplémentaire d’invalidité (ASI), ainsi que de la suppression de la surcotisation salariale des sapeurs-pompiers.
La crise sanitaire inédite que nous traversons rend encore plus inacceptable l’absence de volonté politique de récupérer les milliards d’euros de l’évasion fiscale, d’imposer la moindre contrepartie ou conditionnalité sociale et environnementale aux plus grands groupes qui distribuent, y compris cette année, des milliards d’euros en dividendes, et enfin de soumettre à l’impôt les profits fabuleux d’Amazon, alors que le confinement est une incroyable aubaine pour cette entreprise.
Tous les amendements pour y remédier ont été rejetés, les nôtres comme ceux d’autres groupes que nous avons soutenus. Dès lors, comment combler ce déficit de ressources qui, face à des prestations dynamiques et à la création d’une nouvelle branche, fabrique le fameux trou de la sécurité sociale ? Pour la majorité du Sénat, il s’agit de le faire, toujours, en freinant les nouveaux droits sociaux ou en revenant sur la couverture des anciens, comme ce fut le cas en matière de retraites par un amendement adopté à la toute fin de l’examen de ce texte.
Or tous les partenaires sociaux refusent la réouverture inopportune, voire indécente, de ce dossier au vu des urgences immédiates de la crise actuelle et alors même que ce projet est contesté par une majorité de Français et d’organisations syndicales. Alors que la France enregistre des centaines de milliers de nouveaux chômeurs et que la moitié des retraités ne sont plus dans l’emploi au moment de la liquidation de leur retraite, la majorité sénatoriale n’a rien de plus urgent à proposer que de reculer l’âge de la retraite, véritable obsession idéologique. (Protestations sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
Cela n’aurait jamais dû être un sujet dans le cadre de l’examen d’un projet de loi qui devait s’attacher à 2021 ! Permettez-moi tout de même de rappeler la position des écologistes sur le projet gouvernemental de réforme des retraites, lequel répond si bien aux attentes de la droite que celle-ci en demande la mise en œuvre rapide, passant outre l’échec probable et annoncé d’une conférence de financement avec les partenaires sociaux.
Cette contre-réforme vise à transformer profondément la logique solidaire, à unifier par le bas, et à livrer ce risque aux produits de retraite par capitalisation de grands groupes à l’affût de ce qui n’est, pour eux, qu’un marché lucratif.
Les écologistes défendent le système par répartition et par annuité, militent pour la réduction du temps de travail, y compris sur l’ensemble de la carrière, s’opposent aux allongements successifs de l’âge légal de départ à la retraite et pour le bénéfice du taux plein. Ils proposent une prise en compte inédite de la pénibilité des activités en vue de réduire les années d’écart d’espérance de vie en bonne santé entre catégories socioprofessionnelles – je rappelle que cet écart est de presque dix ans entre un ouvrier et un cadre.
Nous sommes des opposants résolus à cette réforme, et nous le resterons si elle devait revenir devant le Sénat, même avec des modifications à la marge qui ne feraient que préserver son économie générale.
Nous défendons une autre réforme,…
M. Loïc Hervé. Laquelle ?
Mme Raymonde Poncet Monge. … qui s’appuie sur un paramètre volontairement occulté, devenu tabou – je sais que ce tabou fait frémir cette assemblée ! – et verrou d’une réforme progressiste.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Raymonde Poncet Monge. Je veux parler de la contribution des revenus du capital (Protestations sur les travées des groupes UC et Les Républicains. – Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.), qui demeure l’une des clés essentielles de l’équilibre d’un régime solidaire…
M. le président. Il faut vraiment conclure !
Mme Raymonde Poncet Monge. … tant pour cette branche que pour les quatre autres branches de la protection sociale. (Brouhaha.)
M. le président. Concluez !
Mme Raymonde Poncet Monge. Encore faudrait-il qu’ils se taisent !
Une raison de plus pour que le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires vote contre ce projet ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Xavier Iacovelli. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord d’avoir une pensée pour nos concitoyens touchés par le virus et leurs familles, ainsi que pour les salariés et les entreprises des secteurs les plus exposés. J’aurai une pensée, enfin, pour les deux millions de professionnels de santé mobilisés, alors que notre pays est frappé par la deuxième vague d’une épidémie mondiale.
L’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale est toujours un exercice particulier. Il l’est d’autant plus aujourd’hui qu’une crise sanitaire sans précédent a bouleversé nos sociétés.
Ce PLFSS devait être exceptionnel ; il l’est à bien des égards.
Il est exceptionnel par les moyens qui sont mis en œuvre pour lutter contre l’épidémie, en soutenant la modernisation de nos hôpitaux et les personnels soignants. Grâce à ce texte, ce sont 1,8 million de professionnels et, parmi eux, l’ensemble des personnels paramédicaux des hôpitaux et des Ehpad qui bénéficieront d’une revalorisation salariale inédite et tant attendue. La traduction des accords du Ségur de la santé constitue ainsi une avancée majeure et les 19 milliards d’euros dédiés à l’investissement permettront de s’assurer que notre système de soins devienne plus efficient et plus moderne.
Il est exceptionnel, aussi, par l’ambition des mesures sociétales qu’il permet de concrétiser.
Ainsi, nous nous félicitons de l’adoption de certaines dispositions essentielles, en particulier l’allongement du congé de paternité de quatorze à vingt-huit jours, dont sept jours obligatoires. Cette réforme historique répond à une demande de la société de mieux impliquer le deuxième parent dans l’éducation des enfants et de rééquilibrer les tâches familiales dès la naissance.
Par cette disposition, et malgré des débats parfois vifs, notamment sur le caractère obligatoire du congé, nous mettons en œuvre, mes chers collègues, un outil efficace pour promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes. Nous nous en réjouissons ! L’article 35 de ce texte répond également aux besoins des familles adoptantes, en allongeant le congé de dix à seize semaines.
La pérennisation des maisons de naissance est une autre belle concrétisation de ce projet de loi et donnera aux sages-femmes les possibilités nouvelles qu’elles méritent.
De même, l’adoption de l’amendement, porté par notre groupe, visant à s’assurer de la juste mise en œuvre de la peine de privation de la pension de réversion ou de veuf pour les conjoints survivants coupables de violences conjugales, est une avancée essentielle. La lutte contre ces violences se doit d’être menée en profondeur et nous nous félicitons que ces mesures soient prises dès à présent.
Enfin, nos débats ont aussi dessiné les prémices d’un nouvel engagement. Je pense à celui qu’a pris M. le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles, concernant le remboursement des capteurs de glycémie pour les enfants de moins de quatre ans insulinodépendants et insulinorequérants.
En permettant la mise en œuvre de la cinquième branche dédiée à l’autonomie, le PLFSS concrétise enfin une avancée majeure.
Nous entendons les critiques qui ont pu être émises sur son financement ou sa gouvernance, mais les faits sont là, mes chers collègues : promesse de longue date maintes fois repoussée par les gouvernements successifs, cette nouvelle branche dédiée au soutien à l’autonomie des personnes âgées et des personnes en situation de handicap était réclamée depuis vingt ans. C’est d’ailleurs, rappelons-le, la première fois qu’est créée une nouvelle branche depuis 1945.
La CNSA, qui sera chargée de la gestion de cette cinquième branche, sera dotée de recettes propres, ce qui permettra justement de répondre aux espoirs et aux attentes légitimes qu’elle suscite.
Le soutien accru aux secteurs les plus touchés par la crise sanitaire est un élément central de ce PLFSS. Je pense en particulier au tourisme, à la restauration, au sport, à la culture et à l’événementiel, dont l’activité est fortement réduite, pour ne pas dire inexistante, depuis plus de huit mois.
L’introduction d’un dispositif complémentaire d’exonération au bénéfice des entreprises des secteurs dits « S1 » apparaît également essentielle au regard des difficultés que rencontrent un certain nombre d’entreprises et, à travers elles, des millions de salariés.
Ce texte, par les avancées multiples qu’il concrétise, répond donc à la gravité de la situation, mais les débats au sein de notre assemblée ont aussi mis en lumière un certain nombre de désaccords sincères.
Je pense notamment à la suppression de l’expérimentation sur la pratique des IVG instrumentales par les sages-femmes, qui permettrait de pallier le manque de médecins pratiquant l’avortement, en particulier dans les territoires ruraux. Cela constitue un recul non négligeable.
De plus, l’encadrement de la reprise partielle de la dette des établissements de santé assurant le service public hospitalier répond à un devoir de solidarité, en permettant à ces établissements de santé publics d’investir. La suppression de cette disposition en séance publique nous paraît aller à l’encontre de la nécessité de les accompagner en favorisant la pérennité de leur financement.
Enfin, alors que nous débattions des mesures concrètes visant à lutter contre l’épidémie, sauver notre système de santé et soutenir les secteurs les plus touchés, la majorité sénatoriale a fait le choix de cliver sur une mesure controversée.
Je veux redire, au nom du groupe RDPI, notre opposition à l’amendement adopté par la majorité sénatoriale visant, notamment, à repousser l’âge de départ à la retraite à 63 ans. Nous nous y opposons tant sur la forme que sur le fond.
Nous regrettons la volonté de la majorité sénatoriale de profiter de cette crise sanitaire pour imposer aux Français une réforme paramétrique des retraites, laquelle aurait nécessité une large concertation associant l’ensemble des partenaires sociaux.
Nous nous interrogeons également sur le moment choisi pour faire une telle proposition, discutable sur le fond, alors que notre pays traverse une crise économique et sociale sans précédent, qui bouleverse notre quotidien et frappe un grand nombre de secteurs.
Les discussions sont d’ailleurs toujours en cours entre le Gouvernement et les partenaires sociaux. Il est donc particulièrement inopportun de vouloir accélérer le rythme d’une réforme profonde, qui nécessite du temps.
J’y insiste, nous regrettons ces mesures, tant la période que nous vivons implique, selon nous, un devoir de responsabilité afin d’apporter des réponses concrètes aux difficultés rencontrées par nos soignants, nos TPE, nos PME, nos indépendants et notre jeunesse, laquelle, nous le savons, lutte pour entrer sur le marché de l’emploi aujourd’hui encore plus qu’hier.
Pour conclure, je dirai que, en dépit des nombreuses avancées que comporte ce texte, les modifications apportées par la majorité sénatoriale suscitent plusieurs désaccords importants.
L’année 2020 restera exceptionnelle ; la question des retraites, remise chaque année sur la table par la majorité sénatoriale, n’avait aucunement sa place au sein de ce PLFSS 2021 ambitieux, examiné en période de crise.
Pour toutes ces raisons, le groupe RDPI s’abstiendra sur ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
Mme Véronique Guillotin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, c’est un budget de la sécurité sociale bien différent de ceux votés ces dernières années que nous achevons d’examiner en première lecture aujourd’hui. Et pour cause : après les événements qui se sont produits, éprouvant durement notre système sanitaire déjà fragilisé par la situation préalable de nos hôpitaux et notre économie, ce PLFSS ne pouvait être comme les autres.
Nous sommes, bien sûr, face à un budget de crise. À cet égard, le groupe RDSE ne peut que saluer la sincérité des comptes présentés par le Gouvernement, malgré des désaccords au sein de cet hémicycle.
Ces comptes sont douloureux, avec un déficit du régime général de la sécurité sociale de 49 milliards d’euros. C’est inédit, presque vertigineux ! Telle est la conséquence naturelle d’une chute spectaculaire des recettes et d’une augmentation tout aussi spectaculaire des dépenses. Oui, la pandémie et ses multiples conséquences ont durablement aggravé les comptes de la sécurité sociale, lesquels connaissaient une embellie depuis quelques années. Mais des choix ont été faits pour tenter de préserver la santé de nos concitoyens et de nos entreprises, des mesures qui étaient nécessaires. En ce sens, il s’agit aussi d’un PLFSS de responsabilité.
Malgré le contexte, ce PLFSS de crise ne renonce pas à tout et fait émerger de bonnes mesures, par lesquelles j’aimerais entamer mon propos.
Tout d’abord, il prévoit 8,8 milliards d’euros pour la revalorisation des salaires, avec notamment une augmentation visée de 15 % pour les aides à domicile, et de 183 euros par mois pour les personnels hospitaliers et des Ehpad. Ce rattrapage était attendu.
Ensuite, il contient une avancée sociale majeure qui a fait débat au sein de notre hémicycle, avant d’être adoptée à la quasi-unanimité : l’allongement du congé paternité. La vision patriarcale de la société a vécu. Les pères ne veulent plus être traités comme des parents de seconde zone. Aujourd’hui, l’arrivée d’un enfant est un événement qui bouleverse l’existence des deux parents, qui cherchent ensemble à construire une parentalité fondée sur la proximité affective.
Je ne reviendrai pas sur les nombreux bienfaits de cette mesure sur le développement de l’enfant. Je rappellerai seulement qu’il s’agit d’une véritable avancée pour l’égalité entre les femmes et les hommes, avancée très attendue par les jeunes générations. Nous pouvons collectivement être fiers du large soutien que lui a apporté le Sénat.
Le groupe RDSE se réjouit également de l’adoption d’une mesure, que nous avons soutenue, visant à faire des maisons de naissance des lieux de formation et de prévention, et à les déployer sur le territoire.
Nous saluons, par ailleurs, l’accord trouvé avec le Gouvernement sur le soutien aux entreprises touchées par le couvre-feu et le reconfinement, en particulier celles qui dépendent de secteurs directement touchés.
Attaché à la défense de la ruralité et des terroirs, le groupe RDSE se félicite aussi des mesures de soutien apportées au secteur agricole, notamment au bénéfice des travailleurs occasionnels et des jeunes agriculteurs. Nous nous félicitons particulièrement de l’allégement des cotisations sociales pour les non-salariés de la culture de la vigne ayant subi des pertes de chiffre d’affaires, combat porté par ma collègue Nathalie Delattre.
Concernant l’organisation de notre système de santé, il me faut évoquer l’adoption d’un amendement, que nous avons été nombreux ici à porter, prévoyant de réduire d’un an le report de la convention médicale actuelle entre l’assurance maladie et les médecins libéraux. Nous avons beaucoup parlé de l’hôpital, alors que les appels à remettre les généralistes au cœur du système se multiplient, à juste titre : les liens ville-hôpital sont les garants du bon fonctionnement de notre système de soins.
Nos médecins libéraux sont nos personnels de premier recours, mais ils se sentent aujourd’hui oubliés. Repousser trop loin les négociations conventionnelles sur leurs conditions de travail et de tarification ne serait pas un bon signal.
Les mesures de transparence adoptées par le Sénat vont aussi dans le sens d’une avancée, avec notamment une plus grande lisibilité demandée aux agences régionales de santé (ARS) sur l’utilisation des deniers publics et l’allocation des ressources financières aux activités de santé.
Enfin, je souligne une autre mesure d’importance sur un sujet que le Sénat porte depuis plusieurs années : l’instauration d’un stock minimal de quatre mois pour les médicaments d’intérêt thérapeutique majeur. Les pénuries de médicaments et de vaccins s’intensifient et mettent en danger la santé de nos concitoyens. La question de la responsabilité de l’État et des laboratoires ne doit pas être occultée. Ce sont des actes que nous attendons, et je me réjouis que le Sénat tienne ferme ses positions.
Cela étant dit, je m’abstiendrai à titre personnel sur ce PLFSS, mais la majorité du groupe RDSE votera contre.
Pas plus que la réduction de la durée de prise en charge à 100 % des actes de téléconsultation, que nous ne pouvons soutenir dans le contexte d’une pandémie exceptionnelle qu’il serait illusoire de croire achevée dans six mois, et pas plus le maintien du forfait patient urgences (FPU) qui, sans être assorti de mesures en amont, ne remplira jamais son rôle de désengorgement des urgences et ne fera qu’accroître le reste à charge des patients ou le renoncement aux soins, nous ne soutiendrons les dispositions votées par la majorité sénatoriale au sujet des retraites.
Certes, il existe un problème structurel, nous partageons ce constat. Mais dans cet hémicycle où nous prônons sur toutes les travées, les bienfaits de la concertation, il nous semble important de défendre, pour une réforme d’une telle ampleur, un débat et un véhicule législatifs à la hauteur de l’enjeu.
Pour conclure, je dirai que ce PLFSS voit émerger de bonnes mesures et quelques marqueurs pour l’avenir, telle la création de la cinquième branche autonomie, même si son financement reste encore à préciser.
Cependant, d’une part, l’État persiste à ne pas compenser certaines charges indûment confiées à la sécurité sociale, contrairement à l’esprit de la loi Veil de 1994. D’autre part, l’augmentation de l’Ondam est cette année conjoncturelle, et vise surtout à répondre à la crise.
Permettez-moi de rappeler, madame la ministre, que des changements majeurs sont attendus, notamment depuis le Ségur de la santé. Aucun texte n’y a, pour l’heure, répondu. Espérons donc que, dans les prochains mois, une nouvelle réforme d’organisation du système de santé verra le jour pour concrétiser, conformément aux engagements du Gouvernement, les attentes fortes des Français, des professionnels et des élus. Cette organisation doit laisser davantage de place à la proximité, à la décentralisation et à la souplesse pour les acteurs de terrain. Espérons aussi qu’elle ne subisse pas le sort des réformes des retraites et du grand âge, trop de fois reportées.
De grands défis vous attendent : ils ne doivent plus être repoussés. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Mme Laurence Cohen. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, après cinq jours d’examen de ce PLFSS pour 2021, c’est la déception et la colère qui dominent au groupe CRCE. L’absence, jusqu’au bout, du ministre de la santé n’est pas pour nous apaiser !
Déception et colère, car ce PLFSS n’est pas à la hauteur de la crise que nous affrontons et de ce qu’elle a révélé. Il ne résout aucun des problèmes soulevés par les personnels soignants et non soignants des secteurs de la santé et du médico-social.
Vous qualifiez d’extraordinaire ce PLFSS, madame la ministre, parce qu’il débloque les 8 milliards d’euros du Ségur de la santé et 4 milliards d’euros pour la covid-19. Mais vous oubliez de dire que c’est conjoncturel, et que vous avez prévu de « serrer les boulons » dès la crise passée.
Vous avez refusé, comme la majorité de droite du Sénat, de faire entrer de nouvelles recettes taxant le capital, qui profite de la crise. Les grands groupes du CAC 40 peuvent dormir sur leurs deux oreilles, notamment Sanofi, laboratoire pharmaceutique parmi les leaders européens qui va pouvoir continuer à fermer ses sites de recherche et de production en France et licencier à tour de bras, tout en versant des dividendes indécents à ses actionnaires !
Aucune intervention de l’État n’est envisagée pour avoir la maîtrise publique de la production et de la distribution des médicaments, alors que la crise de la covid-19 a révélé plus fortement que jamais une pénurie de médicaments, et que vous refusez de constituer des stocks suffisants.
Quant aux mesures censées renforcer notre système de santé, pallier les difficultés et les manques criants de personnel, de matériel, de locaux, elles vont à l’encontre de l’intérêt commun.
Au lieu d’ouvrir des lits d’amont et d’aval, vous imposez un forfait à 18 euros pour, soi-disant, lutter contre la saturation des urgences, ce qui est une absurdité économique et pose un grave problème de santé publique.
Au lieu d’œuvrer pour un meilleur maillage de l’offre de soins dans les communes, vous portez un coup grave aux centres de santé, en exigeant un conventionnement sélectif par les ARS pour toute nouvelle ouverture dans les zones surdotées.
C’est un obstacle supplémentaire pour les centres de santé. Vous faites preuve, une nouvelle fois, d’une méconnaissance totale des valeurs qui les fondent, après l’introduction il y a deux ans de la possibilité pour les libéraux d’y exercer leur activité ! Face aux départs de plus en plus nombreux de professionnels de santé, aucun plan de formation et de recrutement n’est envisagé. Inutile, dès lors, d’espérer une amélioration de leurs conditions de travail.
Pourtant, chacune et chacun, ici, a rendu hommage aux médecins, aux infirmières et infirmiers, aux aides-soignantes et aides-soignants, aux brancardiers. Mais quelle traduction réelle dans ce PLFSS ?
Alors que la psychiatrie et la pédopsychiatrie sont sinistrées, ce PLFSS n’ouvre même pas sur une grande loi de santé mentale et poursuit une réforme tarifaire à base de tarification à l’activité (T2A), ce qui aggravera la situation !
Il n’y a pas davantage de mesures significatives pour mettre en œuvre le fameux « tester, tracer, isoler ». Et aucune prise en charge à 100 % pour les masques, devenus obligatoires dès l’âge de 6 ans.
Quant à votre cinquième branche, ce n’est rien de moins que l’exclusion de la perte d’autonomie des principes de la sécurité sociale et la privatisation du système.
Finalement, ce PLFSS pour 2021 est un rendez-vous manqué, malgré quelques mesures positives que nous avons soutenues, comme l’allongement du congé paternité – mais nous en avons souligné les limites.
Rendez-vous manqué, madame la ministre, car le gouvernement auquel vous appartenez reste sur les mêmes orientations politiques qui ont conduit notre système de santé là où il en est aujourd’hui.
Vous refusez d’investir dans le système de santé pour ne pas augmenter la dette transmise aux futures générations. Mais si l’investissement consiste à construire des hôpitaux, des Ehpad, des centres médico-psychologiques (CMP), les futures générations seront bien contentes d’avoir cette créance pour leur prise en charge, dans un contexte de vieillissement de la population !
À cause de ce refus de suivre une autre voie, le jour d’après, avec vous, sera pire que le jour d’avant !
Cette voie conduit notre système de santé dans le mur, et pas seulement l’hôpital, car rien n’est prévu non plus pour la médecine de ville face au manque cruel de généralistes, et rien sur la mise à contribution des établissements privés pour la prise en charge des malades de la covid-19.
Hélas, quoique mortifère, cette voie est également suivie par la majorité de droite du Sénat qui a aggravé les mesures régressives de ce PLFSS en votant, en pleine crise de la covid, le recul de l’âge de départ à la retraite à 63 ans et l’allongement de la durée de cotisations à 43 annuités. (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.) Ce sont les faits, mes chers collègues !
C’est totalement indécent, au moment où les plans de licenciement explosent et où de nombreux jeunes en recherche d’un travail vont devoir pointer à Pôle emploi. Le prétexte du comblement du déficit de la caisse des retraites ne tient pas, car il se double d’un refus d’envisager d’autres recettes.
Pour l’ensemble des membres de notre groupe, ce PLFSS, c’est non !
Non à un budget insuffisant ! Non à un budget décalé de la réalité de la crise sanitaire ! (Protestations sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
Non au manque de reconnaissance des professionnels des secteurs de la santé et du médico-social ! Non à l’absence de plan de formation et de recrutements ! Non, enfin, au refus de mise à contribution des plus riches et des dividendes !
Nous disons, au groupe communiste républicain citoyen et écologiste, qu’un budget de la sécurité sociale pour 2021 tenant compte de la pandémie de covid-19, et s’inscrivant dans l’avenir, est possible.
Avec la suppression des allégements de cotisation patronale d’assurance maladie du CICE et sur les bas salaires, la suppression de la taxe sur les salaires des hôpitaux et Ehpad publics, nous pourrions, mes chers collègues, récupérer 50 milliards d’euros pour financer la prise en charge à 100 % des soins, le recrutement immédiat de 100 000 personnels dans les hôpitaux et les Ehpad, et revaloriser de 300 euros les salaires des personnels, ce qui améliorera véritablement l’attractivité de ces métiers.
C’est ainsi que l’on peut préparer la société de demain à faire face aux pandémies, sans lui imposer le confinement comme seul horizon.
En ce 75e anniversaire de la sécurité sociale, mes chers collègues, je conclurai en citant ces propos d’Ambroise Croizat, le bâtisseur de la sécurité sociale (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.) – normalement vous êtes friands de débats, mes chers collègues ; vous pouvez donc écouter, même si vous n’êtes pas d’accord ! – : « La sécurité sociale est la seule création de richesse sans capital. La seule qui ne va pas dans la poche des actionnaires mais est directement investie pour le bien-être de nos citoyens. Faire appel au budget des contribuables pour la financer serait subordonner l’efficacité de la politique sociale à des considérations purement financières. Ce que nous refusons. »
Le groupe CRCE le refuse aussi ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRCE et des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – Mme Catherine Deroche applaudit également.)
Mme Nadia Sollogoub. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 s’achève, nous laissant estourbis et pantois, quelque peu sonnés, je dois dire. Est-ce le manque de sommeil, l’intensité parfois des échanges, la valse des milliards, l’incongruité à vouloir prévoir l’avenir budgétaire, alors que personne ne sait où nous allons ? Ou encore les innovations, souvent importantes, introduites par ce texte, et quelques inévitables déceptions ?…
« Mieux vaut une amère vérité qu’un doux mensonge », dit un proverbe russe. Alors, regardons la réalité en face !
La crise sanitaire sans précédent de l’année 2020, qui n’a pas justifié pour le Gouvernement l’élaboration d’un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, tandis que le Parlement a planché sur quatre projets de loi de finances rectificative (PLFR) successifs, appelait des mesures d’ajustement budgétaire afin d’amortir, autant que faire se peut, le surcoût engendré par l’épidémie de covid, et les dispositions du Ségur de la santé.
Ainsi, le fait marquant de ce PLFSS est sans aucun doute cet abyssal déficit de 49 milliards d’euros de premiers secours.
À situation exceptionnelle, remèdes exceptionnels ! Ainsi, chronologiquement fut d’abord votée une contribution des organismes complémentaires en santé. La modulation pour les organismes mutualistes a entraîné, dès la première heure, un manque à gagner de 400 millions d’euros. J’ai alors songé que, dans nos collectivités territoriales, on ne votait pas une mesure sans connaître son impact budgétaire. Il serait bon que les parlementaires disposent systématiquement des mêmes outils d’appréciation. C’était une remarque préliminaire…
L’un des objets de ce PLFSS était de permettre la mise en œuvre des mesures du Ségur de la santé, en particulier l’augmentation salariale des personnels des établissements de santé et des Ehpad, et le financement de la prime exceptionnelle pour les personnels des services d’aide à domicile.
Je veux dire un mot, ici, pour tous ceux qui se sentent oubliés du Ségur, exclus de la reconnaissance nationale. Nous sommes nombreux, sur l’initiative de notre collègue Élisabeth Doineau, à avoir cosigné un courrier vous demandant, madame la ministre, d’accorder une bienveillante attention à tous ces « autres » professionnels qui ont, aussi, fait leur part. La santé est un système vaste et complexe qui va bien au-delà des murs de l’hôpital, et les applaudissements symboliques des Français sont allés, dans les moments les plus durs, à chacun des acteurs de cette longue chaîne humaine.
Dans la suite de nos débats, l’article 6 ter a marqué la volonté forte du Gouvernement d’aider les employeurs par une exonération totale de contributions sociales. Cela illustre le « quoi qu’il en coûte » qui, dans les heures de grand doute et de désespoir, doit être une planche de salut. Le champ de cette mesure est large. Espérons seulement qu’il n’y ait pas trop de trous dans la raquette… Merci, madame la ministre, de mettre en œuvre ces véritables outils de solidarité nationale.
Je note l’adoption, aux articles 13 et suivants, de l’exonération des cotisations sociales pour les salariés non agricoles des exploitations viticoles, ainsi que la pérennisation et le relèvement du taux du dispositif d’exonération pour les travailleurs occasionnels demandeurs d’emploi, dits « TO-DE ». Espérant pour ces filières que ces mesures puissent prospérer, je souligne ainsi un exemple concret de soutien aux professionnels.
Puis vint le moment de créer cette fameuse « cinquième branche », cette décision de traiter à part entière la dépendance, de donner un cadre aux futures mesures du grand âge et de la perte d’autonomie. De nombreuses questions et inquiétudes subsistent sur son financement, qui ne pourra pas reposer principalement sur la contribution sociale généralisée (CSG), son périmètre et sa gouvernance.
Était-ce le moment ? Le rapport Libault prévoyait cette création à l’occasion de l’extinction de la dette sociale, afin que puisse être utilisé le produit de la CRDS pour soutenir cette branche. Cette extinction a été reportée, hélas, à un horizon lointain. Fallait-il différer encore ?
Nous nous interrogeons aussi sur le transfert de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH). Le périmètre est-il amené à évoluer ultérieurement ?
Notre collègue Jocelyne Guidez, par ses remarques sur l’AEEH, nous invite par ailleurs à nous interroger sur la portée symbolique des dispositions. Un individu porteur d’un handicap est-il d’abord porteur de handicap, ou d’abord un enfant ? Puis, porteur de handicap ou retraité ? C’est la difficulté de classer les êtres humains dans des cases…
Ce texte apporte des avancées attendues et des propositions innovantes – versement anticipé de la prime de naissance ; création des maisons de naissance ; hôtels hospitaliers –, ainsi que cette mesure fort médiatisée visant à allonger le congé de paternité à vingt-huit jours, dont sept obligatoires.
Me singularisant un peu dans cet hémicycle, j’ai exprimé ma crainte que l’on aggrave ainsi le fossé existant dans notre société entre ceux qui ont un salaire et ceux qui n’en ont pas. Cependant, le Sénat, dans son immense majorité et sa très grande sagesse, a franchi ce pas.
Médicaments innovants, stocks, téléconsultation, pénurie de professionnels de santé, répartition territoriale des médecins, dette hospitalière, médecine hospitalière, médecine de ville, médecine privée, sport et santé, périnatalité, concertation sur l’âge de la retraite… tout le champ des sujets d’une brûlante acuité dans ce contexte sanitaire a été longuement balayé.
Je souhaite enfin m’attarder sur un sujet particulier, un de ceux que nos concitoyens attendent de voir évoqués, même s’il ne fit pas beaucoup frémir le banc des ministres : la fraude.
Notre collègue Nathalie Goulet a déposé de nombreux amendements relatifs à ce problème car elle maîtrise parfaitement ce dossier, qui est par ailleurs pointé dans nombre de rapports publics et officiels. Alors que le simple croisement de fichiers permettrait de mettre fin à bien des pratiques malhonnêtes, on se demande si l’atonie des débats ne confirme pas une forme de banalisation de la fraude.
Madame la ministre, devant tous ces amendements qui ont été déclarés « satisfaits », je réponds que nous ne sommes pas satisfaits ! Pour lutter contre la fraude, il faut plus que des lois, il faut une volonté ! Beaucoup de mesures relèvent du réglementaire, à vous de les prendre ! Plus que jamais, en période d’austérité et de rigueur, les Français vous attendent sur ce sujet.
Madame la ministre, avant de conclure, je veux souligner le nombre d’amendements partis au panier au titre de l’article 40 de la Constitution et consorts, ou repeints en une « demande de rapport ». Entendez derrière tout cela que nombre de sujets, remontés de nos territoires, ne trouvent pas d’écho ! Comment pouvons-nous les porter ?
Je vous donne un exemple : les préparations magistrales de mélatonine, qui permettent aux enfants autistes de trouver le sommeil, ne sont pas remboursées par la sécurité sociale. Sur ce sujet, on nous rétorque « article 40 », « rapport », quand ce n’est pas une question écrite qui reste sans réponse… C’est pourtant le souci de milliers de parents, qui ont besoin de dormir un peu pour faire face à un quotidien difficile ! Comment se faire entendre, lorsque le ministre des solidarités et de la santé ne souhaite pas prendre sa place sur ce banc ?
Je rejoins ceux de mes collègues qui ont appelé à une refonte profonde et concertée de notre système de santé.
Je conclus en remerciant ceux qui nous ont accompagnés pendant de longues heures, en soulignant le travail remarquable de mes collègues sénateurs centristes, notamment au banc des commissions, qui ont permis l’adoption de nombreux amendements.
Le groupe centriste votera cette version du PLFSS amendée par le Sénat.
Puisqu’il me reste quelques secondes, je citerai les mots pleins de sagesse du Nivernais Romain Rolland : « L’équilibre est la règle souveraine des plus grands comme des plus petits. » C’est un vœu pieux ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Bernard Jomier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, écrire une loi de financement de la sécurité sociale conforme à la réalité dans ses équilibres financiers est une gageure, alors que nul ne sait précisément ce que le coronavirus, qui a déjà coûté la vie à 45 000 de nos compatriotes, nous réserve pour 2021.
La question n’est évidemment pas de se prononcer sur cette adéquation : ce PLFSS établira probablement un record d’imprécisions. C’est plus que jamais le sens politique du texte qui engage notre avis.
Voilà huit jours, à cette même tribune, je dressais le constat d’un rendez-vous manqué. Au sortir de son examen par notre assemblée, quelques dispositifs intéressants utiles plus tard, mais aussi après quelques reculs voulus souvent par la majorité de notre assemblée, le constat reste le même. Le rendez-vous avec l’hôpital reste inachevé, partiel et conjoncturel. Rien ne change dans la gouvernance et trop peu dans les moyens. Les urgences sont encore et toujours abordées sous le seul angle d’un dispositif de nature financière.
Les soignants de ville, eux, restent destinataires de discours inappliqués sur leur rôle essentiel. Les aides à domicile devront se contenter de bien peu. Quant à la démocratie sanitaire, tellement malmenée depuis le printemps, oubliée jusqu’à compromettre l’adhésion de la population aux mesures de lutte contre l’épidémie, elle continuera à être marginalisée. Et si l’ajout de 100 millions d’euros déconcentrés vers les ARS doit être salué, rien dans votre amendement ne nous dit si la logique de leur engagement sera encore une fois purement verticale, ou si les acteurs des territoires y seront associés.
Comme toute loi de financement de la sécurité sociale, celle-ci comporte des points positifs qui méritent d’être relevés. C’est le cas du congé paternité et de la création de maisons de naissance, par exemple.
J’ajouterai plusieurs mesures qu’a proposées, ou auxquelles a contribué, notre groupe : la lutte contre le non- recours aux aides sociales ; la pérennisation du dispositif TO-DE ; l’obligation de constitution d’un stock de quatre mois pour les médicaments majeurs, alors que tant de malades sont victimes de ces ruptures ; le renforcement de la protection des patients soumis à des mesures de contrainte en psychiatrie ; le retour de l’Agence nationale de santé publique dans le budget de l’État.
Cela ne dissipe pas notre inquiétude face à votre choix de « charger la barque » du budget social dans son exécution annuelle et dans son endettement, lequel s’accroît de ce qui devrait être à la charge du budget de l’État.
Les conditions mêmes d’examen du texte disent beaucoup. Présenté très tardivement, dépourvu d’étude d’impact sur des dispositions introduites, elles aussi, tardivement, examiné en moins de temps qu’il n’en faut pour que le travail soit suffisamment approfondi, il a de plus été modifié significativement par le Gouvernement en cours de débat.
Tout cela aurait pu être largement évité si le Gouvernement avait accédé, l’été dernier, à notre demande d’un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale.
Cette demande, nous la réitérons pour le premier semestre 2021.
Concernant la cinquième branche, dont nous approuvons la création, ses conditions d’ébauche renforcent ce sentiment : l’État fait du paritarisme un façadisme ! La conférence des financeurs est certes un outil nécessaire, mais sans la visibilité qu’offrirait une nouvelle loi relative au grand âge et à l’autonomie, que pourra-t-elle décider ?
Le temps des crises doit être celui des changements. Cette crise n’est pas un accident de l’histoire. En son lendemain, il ne suffira pas de reprendre une trajectoire de rétablissement des comptes sociaux, comme certains discours le laissent entendre. Cette crise est systémique et doit nous amener à revoir notre système de santé et à repenser le sens de notre protection sociale. Elle a d’ores et déjà révélé des défauts organisationnels majeurs de l’État et de notre gouvernance en matière de santé publique, ainsi qu’une crise de la décision.
Le texte que vous nous proposez, madame la ministre, n’apporte pas la part de réponses à cette crise qu’il aurait dû contenir. Les silos que nous connaissons bien continueront d’exister. L’État central a présenté des failles inquiétantes et la part nécessaire de décentralisation de notre politique de santé est absente de ce texte. Ce n’est d’ailleurs pas surprenant, puisque le ministre de la santé, qui ne nous fait toujours pas l’honneur d’être présent dans cet hémicycle, a exprimé son opposition à cette orientation.
L’amendement n° 201 porte un privilège rare : à lui seul, il disqualifie le texte qui nous est proposé. Son objet est notre système de retraite. Il exprime un message politique : à l’heure où la situation sociale est dramatique pour nombre de nos compatriotes, ses auteurs leur demandent de travailler plus longtemps. Ils le demandent même aux plus pauvres, pour des pensions qui seront inévitablement plus faibles, et ce alors que la majorité sénatoriale refuse avec constance – je le regrette ! – l’idée d’une contribution des plus riches à la situation exceptionnelle que nous vivons. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe GEST.)
C’est votre choix, que vous avez fait devant la Nation par votre vote. Mais pour nous, c’est non ! Ce budget social est un budget d’injustice sociale ! (M. Roger Karoutchi et M. Bruno Sido protestent.)
Ce n’est pas acceptable, et nous l’exprimerons par un vote négatif sur ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes GEST et CRCE.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix, modifié, l’ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 26 :
Nombre de votants | 346 |
Nombre de suffrages exprimés | 296 |
Pour l’adoption | 190 |
Contre | 106 |
Le Sénat a adopté.
Avant de donner la parole à Mme la ministre déléguée, je souhaite remercier la présidente de la commission des affaires sociales, Mme Catherine Deroche, son rapporteur général, M. Jean-Marie Vanlerenberghe, ainsi que ses rapporteurs, pour le travail qu’ils ont accompli avant et pendant nos débats. Je veux également remercier l’ensemble de nos collègues, et vous aussi, madame la ministre déléguée, même si j’ai compris que l’absence de M. Véran suscitait des regrets : il faut dire les choses comme elles sont ! (Vifs applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et SER.)
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tenais à vous adresser quelques mots au terme de vos explications de vote et du vote lui-même.
Tout d’abord, je veux vous remercier pour ces échanges, pour les débats auxquels j’ai pu prendre part, avec mes collègues du Gouvernement, au cours de la semaine dernière. Vous savez que j’ai un profond respect pour le travail parlementaire, auquel j’ai pris part pendant bien des années. Si je ne pouvais, en revanche, faire valoir une telle connaissance de la Haute Assemblée, je dois dire que j’en ai reçu cette fois mon baptême ! (Sourires.)
Je dois dire que j’ai trouvé nos débats francs et intéressants. Il ne m’appartient évidemment pas de juger de votre vote, qui est souverain. Le travail parlementaire se poursuivra, puisque vous allez vous réunir avec vos collègues députés en commission mixte paritaire.
Sans préjuger de l’issue de celle-ci, je tiens à saluer quelques avancées majeures que vous avez introduites ou entérinées.
Dans le contexte sanitaire actuel, que chacun a rappelé, je pense en premier lieu au relèvement de 800 millions d’euros de l’Ondam, en plus des 2,4 milliards d’euros déjà votés par l’Assemblée nationale. Ce relèvement permet de financer la stratégie de tests de la population, ainsi que les surcoûts induits par les outils de protection supplémentaire des professionnels dans les établissements sociaux et médico-sociaux.
Je salue également le soutien que vous avez apporté à l’allongement du congé de paternité, qui ouvre une démarche essentielle. Celle-ci nous permettra, d’une part, de renforcer les liens intrafamiliaux au cours d’une période précieuse dans la vie des parents et, d’autre part, de parvenir progressivement à une nécessaire égalité entre les femmes et les hommes dans les carrières et leur organisation.
Je pense aussi à la revalorisation salariale dans les Ehpad, issue du Ségur de la santé, mais surtout à l’adoption conforme du financement conjoint de la prime destinée aux travailleurs de l’aide à domicile, en récompense de leur mobilisation auprès de nos concitoyens en perte d’autonomie, y compris pendant la crise sanitaire que nous connaissons. Cette mesure relevait à mon sens d’une double gageure : elle vise à entamer le virage domiciliaire que nous appelons de nos vœux, mais aussi à accompagner les départements, qui se préparent à assumer cette compétence dans ce secteur.
Une autre mesure de ce texte vise à ce que la nouvelle branche vienne cofinancer une revalorisation des aides à domicile. Je regrette que la rédaction adoptée par votre assemblée laisse entendre que cette revalorisation salariale s’arrêtera à mi-chemin et que les départements n’y contribueront pas, alors que c’est de leur compétence et que nous y travaillons déjà ensemble. Je suis persuadée que, par le dialogue avec l’ensemble des parlementaires des deux chambres, nous parviendrons à un équilibre.
Je suis très attachée à ce dialogue et j’espère que nous pourrons le poursuivre en bonne intelligence. Les Français l’attendent. Nous serons, ensemble, à la hauteur du moment ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures quarante, est reprise à quinze heures cinquante, sous la présidence de Mme Nathalie Delattre.)
PRÉSIDENCE DE Mme Nathalie Delattre
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
3
Mises au point au sujet de votes
Mme la présidente. La parole est à M. François Patriat.
M. François Patriat. Je souhaite rectifier le vote du groupe RDPI lors du scrutin n° 24 sur l’amendement n° 26 rectifié bis, présenté par Mme Sylvie Vermeillet et plusieurs de ses collègues, tendant à insérer un article additionnel après l’article 1er du projet de loi de finances rectificative pour 2020.
L’ensemble des membres de mon groupe souhaitait voter pour cet amendement, et non pas contre.
Mme la présidente. La parole est à Mme Frédérique Puissat.
Mme Frédérique Puissat. Je souhaite, pour ma part, apporter une mise au point concernant le scrutin n° 22 sur l’article 35 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021.
Ma collègue Muriel Jourda souhaitait voter contre cet article.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Hingray.
M. Jean Hingray. Lors du scrutin n° 23 sur l’amendement n° 201, présenté par M. René-Paul Savary au nom de la commission des affaires sociales, et tendant à insérer un article additionnel après l’article 47 quater du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, mon collègue Pierre-Antoine Levi et moi-même souhaitions nous abstenir.
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier.
Mme Anne-Catherine Loisier. Lors de ce même scrutin, je souhaitais voter contre l’amendement n° 201.
Mme la présidente. Acte est donné de ces mises au point. Elles seront publiées au Journal officiel et figureront dans l’analyse politique des scrutins concernés.
4
Alimentation locale et durable
Débat organisé à la demande du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle le débat, organisé à la demande du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, sur le thème : « Alimentation locale et durable. »
Nous allons procéder au débat sous la forme d’une série de questions-réponses, dont les modalités ont été fixées par la conférence des présidents.
Je rappelle que l’auteur de la demande dispose d’un temps de parole de huit minutes ; le Gouvernement répond ensuite pour une durée équivalente.
À l’issue du débat, l’auteur de la demande dispose d’un droit de conclusion pour une durée de cinq minutes.
Dans le débat, la parole est à M. Frédéric Marchand, pour le groupe auteur de la demande. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Frédéric Marchand, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la crise sanitaire sans précédent que nous connaissons a mis en lumière, parmi les sujets que nous pensions – funeste erreur ! – acquis ad vitam æternam, celui de l’alimentation, celui de notre alimentation.
Ce bien commun est sans conteste celui qui importera le plus dans les semaines, les mois et les années à venir, celui sur lequel il est urgent, sans transiger, de prendre des engagements forts. Les mesures du plan de relance que vous portez, monsieur le ministre, sont à cet égard significatives.
Oui, cette crise nous rappelle toute l’importance de ce que nous pouvons nommer la « sécurité alimentaire », le besoin de savoir que l’on pourra s’alimenter en quantité mais aussi en qualité suffisantes !
Cette question, la plus ancienne du monde, est celle que pose Stéphane Linou dans son ouvrage Résilience alimentaire et sécurité nationale, qui a d’ailleurs servi de base à une proposition de résolution déposée par notre ancienne collègue Françoise Laborde, que je veux ici saluer.
La question de l’alimentation durable et locale est aussi au cœur de l’excellent rapport d’information rendu au nom de la délégation sénatoriale à la prospective par notre collègue Jean-Luc Fichet et notre ancienne collègue Françoise Cartron, à qui je veux ici adresser un salut amical.
Oui, monsieur le ministre, nous sommes nombreux, sur ces travées et dans nos territoires, à penser qu’il est désormais urgent de donner à l’alimentation un véritable statut.
Il est temps d’en faire définitivement un secteur d’activité d’importance vitale, tel que défini par l’article R. 1332-2 du code de la défense, plutôt que de continuer de s’en tenir à sa seule dimension sanitaire. Alors, nous serions peut-être capables de doter notre pays, par exemple, de véritables indicateurs sur les flux d’approvisionnement alimentaire sur notre territoire, de manière à permettre une approche plus précise et préventive de la réalité alimentaire de notre pays.
Cette crise sanitaire a eu quelques vertus, si je puis me permettre cette expression : elle nous a ainsi fait redécouvrir la signification de concepts essentiels dont nous pensions parfois qu’ils n’étaient que des vœux pieux.
Concept de la solidarité, d’abord, avec nos agriculteurs, producteurs et maraîchers qui ont été, dans nos villes et nos campagnes, au moment du premier confinement, frappés de plein fouet par l’arrêt de la restauration collective et de la restauration hors foyer. Ils ont su se réinventer dans l’urgence, avec l’aide des restaurateurs et des collectivités ; depuis le début du deuxième confinement, ils sont toujours au rendez-vous.
Concept de la proximité, ensuite : certaines habitudes de consommation ont évolué, ce qui a suscité un développement sans précédent des circuits courts pour le bonheur d’un segment très large – les études le montrent – des consommateurs.
Concept de la qualité, aussi, avec une exigence renforcée au nom de principes sanitaires, mais également une plus grande appétence pour les bonnes choses produites de manière vertueuse.
Concept de la saisonnalité, enfin, avec la redécouverte de produits locaux et de saison, et une palette de productions qui permet de mélanger allégrement les goûts et les couleurs.
Ce constat posé, quelles pistes explorer pour faire en sorte que le monde d’après ne ressemble pas au monde d’avant, et pour que ce moment éphémère, dont certains producteurs nous disent qu’il n’est déjà plus qu’un vague souvenir pour des consommateurs qui ont retrouvé leurs habitudes antérieures, donne le top départ d’une résilience alimentaire partagée par toutes et tous ?
Derrière cela, c’est toute la question de notre souveraineté alimentaire qui ressurgit. Je sais, monsieur le ministre, que vous en avez fait la priorité des priorités.
« Nous ne pouvons plus déléguer notre alimentation », indiquait le 12 mars dernier le Président de la République.
La France est un grand pays agricole exportateur, mais elle est aussi un pays qui s’est inspiré du modèle américain mondialisé. Or ce modèle nous fait transférer d’énormes flux d’intrants, d’énergie ou d’azote du Brésil, pour nourrir des animaux que nous exportons ensuite vers le Moyen-Orient, le tout dans des conditions sociales difficiles et avec des coûts considérables pour la politique agricole commune (PAC).
En France, par ailleurs, nous ne produisons que 50 % des légumes que nous mangeons, et 40 % de nos besoins en fruits. Au risque d’enfoncer des portes ouvertes, il nous faut réaffirmer un principe fort : reconstituer nombre de filières qui ne peuvent être que maraîchères, ou presque, le sud de la France étant, par exemple, fort touché par le changement climatique.
Alors que nous exportons des volailles, nous importons 40 % des poulets que nous mangeons ; il convient de corriger cette inadéquation pour que la relocalisation de qualité prenne tout son sens. Pour les viandes, nous importons principalement les produits les moins chers, souvent pour la restauration collective.
Sécurité alimentaire, souveraineté alimentaire, garantie d’un accès à une alimentation de qualité pour nos concitoyens, notamment pour celles et ceux qui subissent le plus la précarité, préservation de la biodiversité : voilà, monsieur le ministre, les piliers qui devraient inspirer des contrats alimentaires territoriaux passés avec les collectivités, véritables feuilles de route pour une transition agricole et alimentaire partagée par le plus grand nombre.
On m’objectera que les projets alimentaires territoriaux (PAT) sont la réponse déjà mise en place. Ils représentent à l’évidence une avancée, mais leur prisme par trop restrictif, parce qu’articulé autour de la question – certes essentielle mais non unique – de la restauration collective, leur caractère facultatif et le peu de moyens financiers et humains qui leur sont consacrés, limitent leur portée. De belles réussites sont toutefois à mettre à leur crédit, comme vous avez pu vous en rendre compte, monsieur le ministre, au début de septembre, sur le territoire de la communauté d’agglomération du Douaisis.
À cette occasion, vous avez rappelé votre ambition de développer le nombre et la qualité de ces PAT en leur octroyant des moyens supplémentaires dans le cadre du plan de relance. Nous ne pouvons que saluer un engagement qui rejoint nombre de ceux pris lors des dernières élections municipales sur ce sujet majeur de l’alimentation durable et locale.
Alors, allons plus loin et portons cette belle ambition de développer les CAT.
Pour réussir, les contrats alimentaires territoriaux doivent revêtir un caractère obligatoire et être signés à l’échelle territoriale des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), qui sont de véritables bassins de vie. Ils doivent être conclus dans un horizon temporel raisonnable, qui pourrait être fixé à 2022, et faire l’objet de révisions régulières.
Ils doivent affirmer le primat de l’alimentation durable et de notre sécurité alimentaire, comme outils de développement par tous et pour tous.
Ils doivent devenir l’alpha et l’oméga des documents de planifications territoriales. Leur intégration dans les schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet) portés par les régions doit permettre de réaffirmer que les schémas de cohérence territoriale (SCOT) et autres plans locaux d’urbanisme (PLU) doivent être compatibles avec ces contrats.
Ils auront aussi pour vocation d’édicter des principes forts en matière de gestion du foncier agricole, ce qui me donne l’occasion de rappeler la nécessité d’ouvrir très rapidement le chantier sur le sujet, si ne voulons pas en rester au stade de l’incantation.
Ils devront intégrer de nouveaux objectifs chiffrés sanctionnables, la mise en place d’indicateurs de résilience, tels le pourcentage de l’autonomie alimentaire territoriale, le développement des circuits alimentaires de proximité, les installations ou les conversions en vente directe, sans oublier le nécessaire accompagnement des agriculteurs dans la régénération des sols.
Des moyens financiers nouveaux devront les rendre possibles, pour les redéployer, en y associant nombre d’acteurs citoyens, notamment celles et ceux qui interviennent dans le champ de la précarité alimentaire – la crise actuelle permet d’ailleurs d’en mesurer toute la prégnance – et auxquels nous ferons appel dans les semaines et les mois à venir, compte tenu des effets dévastateurs de l’épidémie sur la situation économique et sociale dans notre pays.
L’accès à une alimentation durable et de qualité est une priorité possible : c’est une question de moyens mais aussi de volonté, et je sais que vous n’en manquez pas.
Les collectivités territoriales, elles aussi, ont de la volonté à revendre. Elles ont montré, ces dernières semaines, à quel point elles étaient essentielles pour la vie quotidienne de nos concitoyens. Faire de nos EPCI des autorités organisatrices de l’alimentation durable et locale, et réunir tous les acteurs autour de la table pour prendre des décisions partagées et encouragées constitue une perspective à laquelle je vous sais très attaché. Je sais également que cette volonté, monsieur le ministre, est la vôtre, et que vous entendez consacrer énergie et moyens à la question de l’alimentation durable et locale.
N’attendons pas pour repenser notre alimentation ! Il est désormais urgent de penser des systèmes alimentaires territorialisés. Le contrat alimentaire territorial peut à ce titre s’avérer demain un outil majeur pour, ensemble, cultiver notre jardin et faire vivre notre belle exception alimentaire, laquelle est aujourd’hui plus qu’essentielle.
Cette ambition fonctionnera seulement si elle partagée par tous les acteurs qui font et qui représentent l’alimentation durable et locale. Mon ancienne collègue Nelly Tocqueville, que je salue, et moi-même avons ces derniers mois travaillé sur ce sujet. Nous remettons l’ouvrage sur le métier et formulons des propositions que, j’en suis sûr, vous partagerez.
Plusieurs choses me frappent : la qualité, l’envie et l’inventivité de tous les acteurs pour tendre vers une résilience alimentaire de qualité, mais aussi certaines incompréhensions, des méfiances entre acteurs et, parfois, le manque d’une véritable envie collective.
Permettez-moi de vous adresser une supplique. Soyez le ministre qui sera le grand ensemblier de toutes les énergies – on en trouve à foison en France ! – devant nous permettre de tendre vers cet objectif commun : faire de notre pays celui d’une alimentation durable et locale, pour toutes et tous. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à remercier le groupe RDPI d’avoir pris l’initiative de ce débat, crucial pour nos concitoyens, sur l’alimentation et l’agriculture saine et durable.
Vous l’avez évoqué, monsieur le sénateur, ce débat est inscrit de longue date à l’ordre du jour de la Haute Assemblée, et beaucoup d’entre vous ont déjà travaillé sur cette question. Il prend toutefois une résonnance particulière dans la période que nous vivons aujourd’hui : il est plus que jamais d’actualité, car la crise remet la santé au cœur de toutes les décisions, tant politiques que citoyennes.
Comme le disait Hippocrate, le premier des médicaments, c’est l’alimentation. Il est très important de le dire, l’alimentation constitue avant tout une question de santé nutritionnelle.
En tant que ministre de l’agriculture et de l’alimentation, ma conception est claire : il faut assurer la santé nutritionnelle de nos concitoyens via une alimentation de qualité, saine et durable, permise par nos agricultures partout sur le territoire. Il est capital que nous soyons clairs sur ce sujet et que nous donnions une vision à notre action. Cela suppose de partager avec vous, cet après-midi, plusieurs convictions.
Première conviction, il nous faut une agriculture forte. C’est précisément parce que nous devons assurer la santé nutritionnelle de nos concitoyens que nous devons regagner en souveraineté agroalimentaire. C’est à cette fin, vous l’avez dit monsieur le sénateur, que je me bats tous les jours.
Je crois en l’agriculture française. Beaucoup d’études montrent qu’elle est très probablement l’une des meilleures agricultures au monde, voire la meilleure, en termes de durabilité.
Il est important de le dire, nous devons être fiers de notre agriculture ! Elle a tenu pendant le premier confinement, elle continuera à tenir lors de ce nouveau confinement. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Évelyne Perrot applaudit également.)
Les agriculteurs et les éleveurs français, que je qualifiais dans cet hémicycle voilà quelques jours d’« entrepreneurs du vivant qui nourrissent le peuple français », je crois aussi en eux ! Ils exercent l’un des métiers les plus nobles, à savoir assurer la santé nutritionnelle de nos concitoyens, et je pense pouvoir affirmer qu’ils en ont pleinement conscience. Cela explique sûrement la passion qui anime ces femmes et ces hommes de la grande famille agricole française.
L’agriculture française fait face depuis longtemps à d’énormes défis et se trouve en perpétuel mouvement. Depuis l’après-guerre, peu de secteurs ont autant évolué et autant répondu à la demande sociétale. L’agriculture a nourri le peuple français et continue de le faire, en prenant en compte la santé et de l’environnement. Les agriculteurs sont bien les acteurs de cette mission nourricière et protectrice, si importante pour faire société !
Gardons néanmoins en tête que, pour permettre à nos agriculteurs de trouver ces solutions et de s’y adapter chaque fois, il faut absolument que leur travail soit rémunéré à sa juste valeur. Or les agriculteurs subissent parfois les injonctions contradictoires de la société. Nous leur demandons davantage, sans être forcément prêts à y mettre le prix. De telles injonctions doivent cesser, et il faut que des actes suivent nos demandes.
Deuxième conviction, il est nécessaire de développer l’accès à des produits frais et locaux. Toutes les études le montrent, d’un point de vue nutritionnel et environnemental, ces produits sont les meilleurs pour la santé. C’est aussi vrai sur le plan économique, puisque cela permet d’augmenter le revenu des agriculteurs par une meilleure répartition de la valeur ajoutée ; par ailleurs, contrairement à certaines idées reçues, cela peut s’avérer bénéfique pour le portefeuille des consommateurs.
Il ne s’agit en aucun cas d’opposer les modes d’agriculture ! Nous avons besoin non seulement d’une agriculture qui exporte, si nous voulons qu’elle soit forte, mais aussi d’une agriculture de proximité, et le premier confinement a démontré que tel était le souhait des Français. Pour pérenniser cette demande, j’ai signé voilà quelques jours avec toutes les enseignes de grande surface une série d’engagements importants, afin de mettre en avant les produits frais locaux dans les circuits de distribution.
Troisième conviction, comme M. Marchand l’a appelé de ses vœux, il nous faut partir des territoires car c’est à partir de ceux-ci que nous pouvons le mieux possible construire les filières, et donc améliorer la distribution des produits frais et locaux.
Tel est l’objet des PAT. Vous l’avez expliqué, monsieur le sénateur, en évoquant celui du Douaisis, ces projets fonctionnent : ils permettent de structurer des filières et de créer des dynamiques.
Actuellement, environ 190 PAT sont établis sur notre territoire. La question est désormais de les démultiplier. Vous proposez des contrats ; je suggère quant à moi, de commencer par y consacrer un financement très important. C’est pourquoi j’ai obtenu que, dans le cadre du plan de relance, 80 millions d’euros soient dédiés à ces projets au cours des deux prochaines années.
Songez, mesdames, messieurs les sénateurs, que lors des quatre dernières années, l’État avait financé les PAT à hauteur de 6 millions d’euros : le financement que je propose est donc vingt-cinq fois supérieur à celui qui existait auparavant !
Il nous faut en effet dynamiser, renforcer et créer de nouveaux PAT qui fonctionnent sur les territoires ; nous avons d’ores et déjà de nombreux exemples en tête. Cela doit s’accomplir à l’échelon territorial, et nous y travaillerons en déclinant le plan de relance.
Pour avoir une agriculture forte et souveraine, il nous faut donc développer les produits frais locaux en partant des territoires et garantir que leur production soit effectuée à l’échelon local.
J’en viens à ma quatrième conviction : il convient d’appréhender avec lucidité, humilité et honnêteté la question de l’inégalité alimentaire, ce fléau qui perdure dans notre pays.
J’ai été pendant trois années ministre de la ville et du logement. Jamais je n’oublierai que, lors du premier confinement, j’ai dû édicter des bons alimentaires, ce que mon ministère n’avait jamais fait depuis l’après-guerre. L’inégalité alimentaire perdure. Il suffit pour se convaincre de cette réalité de voir les files d’attente qui s’allongent devant les associations d’aide alimentaire. Je n’entrerai pas dans le détail de toutes les mesures prises par le Gouvernement dans ce domaine…
Un point me paraît essentiel, qui va dans le sens du discours du sénateur Marchand et du débat qu’il propose : le problème des cantines, lesquelles sont le premier lieu de lutte contre les inégalités alimentaires. Nous devons aider au maximum les collectivités, quel que soit leur échelon, à faire en sorte que s’y trouvent davantage de produits frais et locaux. Cela nécessite des investissements, parfois une autre organisation, en bref, un accompagnement financier par l’État des collectivités en vue d’une meilleure qualité des aliments dans les cantines.
Alors qu’au titre du plan de relance, le Gouvernement financera les PAT à hauteur de 80 millions d’euros, nous consacrerons 50 millions d’euros au fonctionnement des cantines, afin de mettre en place des mesures très concrètes.
Pourquoi croyez-vous qu’il y ait toujours des yaourts locaux dans les cantines, et très peu de carottes ou d’oignons produits au même échelon ? La raison en est simple, les plateformes de grande distribution ou les fermes de proximité fournissent les yaourts conditionnés en palettes qu’il suffit de déballer à l’arrivée. Lorsqu’il s’agit de carottes et d’oignons, en revanche, il faut commencer la journée par en éplucher plusieurs kilos ; ce n’est pas la même chose ! C’est une véritable barrière qui empêche les cantines de s’approvisionner en produits frais locaux.
À question de terrain concrète, réponse concrète : les 50 millions d’euros permettront notamment de financer des légumeries, qui existent déjà dans plusieurs territoires.
Je crois en notre agriculture et en notre alimentation ! Les convictions que j’ai exposées manifestent la détermination qui est la mienne. Je suis absolument ravi de pouvoir débattre de ce sujet avec vous ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et UC.)
Débat interactif
Mme la présidente. Nous allons maintenant procéder au débat interactif.
Je rappelle que chaque orateur dispose de deux minutes au maximum pour présenter sa question, suivie d’une réponse du Gouvernement pour une durée équivalente.
Dans le cas où l’auteur de la question souhaite répliquer, il dispose de trente secondes supplémentaires, à la condition que le temps initial de deux minutes n’ait pas été dépassé.
Dans le débat interactif, la parole est à Mme Martine Berthet.
Mme Martine Berthet. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la restauration collective sert chaque année plus de 3 milliards de repas. Elle est ainsi devenue un enjeu national, à la fois social, économique et environnemental. Elle doit permettre l’accessibilité de tous aux bons produits. Les cuisines centrales ont ainsi un rôle à jouer pour faire perdurer une alimentation durable et locale, meilleure tant pour l’environnement que pour la santé, grâce à l’apport des bons nutriments.
Toutefois, pour que les cuisines centrales puissent réaliser plus de 3 milliards annuels de repas à base de produits locaux, il devient absolument nécessaire de maîtriser la destination des terrains agricoles, lorsqu’ils sont libérés, et de pouvoir les attribuer aux cultures en déficit telles que le maraîchage ou les légumes de plein champ. L’alimentation collective nécessite en effet des cultures sur de grandes surfaces, afin de répondre aux besoins quantitatifs mais aussi parce que la massification de la production permet des prix plus bas, tout en laissant aux producteurs une marge suffisante. Or, jusqu’à présent, les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer) répartissent les terres agricoles disponibles entre les seules exploitations déjà existantes.
Un autre problème réside dans la vente d’exploitations pour une destination agricole autre, ne nécessitant pas toutes les terres disponibles. Il devrait être possible de réaliser des préemptions partielles pour les attribuer à d’autres fins agricoles, comme les cultures de plein champ.
Enfin, il apparaît nécessaire, sur le plan de la gouvernance, de structurer et de renforcer les filières et les interfilières afin d’améliorer les questions de logistique, en faisant en sorte que tous les acteurs concernés se parlent et s’organisent.
Sur tous ces points, les départements, détenteurs de la compétence en matière d’aménagement foncier rural et de protection des espaces agricoles naturels et périurbains, semblent être la bonne échelle pour l’organisation des discussions et des arbitrages, notamment entre Safer et établissements publics fonciers locaux (EPFL), pour la destination des terrains agricoles ainsi que sur tous les sujets logistiques.
Monsieur le ministre, quelles mesures comptez-vous mettre en œuvre pour que les conseils départementaux, au travers des PAT, soient les pilotes reconnus, légitimes et efficaces de l’organisation d’une production alimentaire locale et durable à destination des cuisines centrales ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Votre description de la réalité du terrain, madame la sénatrice, montre bien à quel point – c’était l’objet de ma deuxième conviction – il est important de partir des territoires en matière de PAT.
Les PAT souffrent certainement de leur nom : les élus jugent souvent ces projets ou contrats territoriaux affreusement techniques. Ils font cependant font l’objet d’un consensus, tous les acteurs s’accordant à dire qu’ils fonctionnent bien. Ils permettent en effet, comme vous l’avez dit, madame la sénatrice, de structurer la filière de l’aval à l’amont. On remonte donc de la gestion des terres, que celle-ci soit qualitative ou quantitative, jusqu’aux assiettes de nos enfants à la cantine, en passant par la distribution.
Pour cette raison, je crois fondamentalement en ces PAT, et que je me suis battu pour qu’ils soient financés massivement dans le cadre du plan de relance. Je rappelle, une fois encore, que l’affectation de 80 millions d’euros sur deux ans représente une somme sans commune mesure avec les crédits consacrés à ce poste jusqu’à présent !
Votre question porte sur le rôle des départements. Mon approche sur ce sujet est simple : l’objectif est de consolider les 190 PAT déjà existants et, pour ce faire, de passer par les acteurs qui contribuent à leur mise en œuvre. Je ne souhaite en aucune façon modifier la gouvernance.
Les PAT sont d’ores et déjà développés par les territoires, cependant qu’ils bénéficient d’un très faible financement par l’État. Je propose donc que ce dernier finance bien davantage, en laissant la gouvernance telle qu’elle est.
Il existe différents échelons de développement : les EPCI – c’est le cas la plupart du temps – ; les territoires englobant plusieurs communes ; les départements. Au final, les PAT sont souvent consolidés à l’échelon des contrats de plan État-région (CPER), lesquels seront donc la porte d’entrée du dispositif, mais tout en maintenant les gouvernances locales telles qu’elles existent.
Nous continuerons à nous appuyer sur les territoires et l’intelligence territoriale, je m’y engage !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Decool.
M. Jean-Pierre Decool. Dans mon territoire du Nord, sur la commune de Noordpeene en Flandres, un boulanger engagé montre la voie du circuit « ultracourt ». En juillet dernier, il a acheté un petit moulin autrichien pour moudre le blé d’une variété panifiable convenue avec l’agriculteur, cultivé sur la parcelle contiguë à sa boulangerie, et ainsi faire son pain.
La farine obtenue préserve les oligoéléments et le gluten du blé, grâce à un procédé plus lent que dans le circuit industriel et une température ne dépassant jamais les 40 degrés : ça, c’est du pragmatisme !
Les produits pâtissiers sont, eux aussi, fabriqués grâce au lait acheté à un laitier de la commune. Les fruits proviennent d’un maraîcher voisin respectant la saisonnalité. La qualité et la saveur des produits assurent à cet artisan de nombreux clients, certains n’hésitant pas à parcourir plusieurs dizaines de kilomètres pour acheter chez lui.
La période de crise que nous traversons met en lumière la nécessité de l’entraide. Le circuit « ultracourt » permet de recréer du lien et de développer une vie sociale parfois perdue dans certains de nos territoires. Ce nouveau dynamisme est un espoir pour nos communes.
Mais si l’alimentation locale est autant plébiscitée actuellement, c’est parce qu’elle est synonyme d’impact carbone moindre. L’alimentation représente le quart de l’empreinte carbone des ménages français. Or ces derniers sont de plus en plus attentifs à leur impact sur l’environnement, notamment dans leur choix de consommation alimentaire.
Votre ministère, avec le concours d’autres acteurs, a lancé au début du mois dernier un appel à candidatures pour expérimenter l’affichage environnemental des produits alimentaires. Cette initiative s’inscrit dans le cadre de la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre gaspillage et à l’économie circulaire. La Convention citoyenne pour le climat a aussi émis l’idée d’un « score carbone » sur tous les produits de consommation et les services.
Quelles sont donc, monsieur le ministre, vos pistes de réflexion sur l’affichage du poids carbone de notre alimentation ? Je pense notamment à une définition, à un mode de calcul clair, et plus particulièrement à l’encouragement de ces pionniers parmi lesquels figure mon boulanger des Flandres.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Je voudrais d’abord saluer, monsieur le sénateur, votre boulanger des Flandres et lui dire à quel point je soutiens son action !
La question que vous posez concerne la vertu des circuits courts. Comme je le disais plus tôt, je pense qu’il ne faut surtout pas opposer les systèmes agricoles en France. On a besoin d’une agriculture forte qui exporte, mais aussi d’une agriculture de proximité plus importante, dont les bénéfices sont d’ordre nutritionnel, économique, et environnemental.
Comment le consommateur doit-il être informé de l’ensemble de ces bénéfices ? Plusieurs expérimentations sont en cours : elles permettront de démontrer si un affichage environnemental est pertinent ou non. Nous travaillons sur ce sujet, et le défendrons avec détermination à l’échelon européen, dans la mesure où l’étiquetage est une compétence européenne, et parce qu’il est important au sein d’un marché commun de pouvoir comparer les produits.
Il faut cependant veiller à ce qu’un excès d’étiquetage ne tue pas l’étiquetage ! Les rayons de produits laitiers en sont « gavés »… Le consommateur doit bénéficier d’une information simple. C’est précisément pour cette raison que j’ai obtenu de la grande distribution que soit apposée, en plus de tous ces étiquetages, une bannière commune intitulée « plus près de chez vous et de vos goûts ! ». Grâce à cette formule très simple, le consommateur comprend que le produit ne vient pas de loin et que cela signifie de moindres émissions carbone. Car je crois à l’intelligence des consommateurs et de nos concitoyens en général.
À court terme, nous mettons en place cette bannière, qui sera généralisée au début de l’année prochaine ; dans le même temps, nous continuons à travailler sur les étiquetages.
Je veux délivrer un message clair à nos concitoyens : manger des produits frais et locaux, c’est ce qu’il y a de meilleur pour la santé, pour l’environnement et parfois, voire souvent, pour le portefeuille !
Mme la présidente. La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. À propos d’alimentation saine et durable, je souhaite vous interpeller, monsieur le ministre, sur une récente enquête réalisée en partenariat avec le laboratoire de toxicologie de l’hôpital Lariboisière, qui met en lumière la présence de cadmium dans les engrais phosphatés, les pommes de terre et, en bout de chaîne, dans les urines humaines.
Le cadmium est un métal lourd, classé comme « cancérigène certain » par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC). Dès 2019, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) alertait sur ce risque pour la population et critiquait la décision de l’Union européenne de fixer à 60 milligrammes par kilo la teneur en cadmium dans les engrais phosphatés. D’après ses modélisations, il serait recommandé de l’abaisser dès maintenant à 20 milligrammes par kilo.
Dans la droite ligne de ce rapport, les révélations de l’enquête sont sans appel : cinq engrais phosphatés sur six, provenant en très grande majorité du Maroc ou de la Tunisie, dépassent les recommandations actuelles de l’Anses. Trois engrais de ce type sur cinq dépassent les maximales autorisées qui entreront en vigueur dans un an. On retrouve deux fois plus de cadmium dans les pommes de terre que ce qu’avait estimé l’Anses !
Enfin, 21 % des analyses d’urine font apparaître un dépassement de la concentration critique définie par l’Anses, au-delà de laquelle ont été démontrés des risques de toxicité osseuse puis, à plus haute dose, de toxicité rénale.
Les agriculteurs sont aussi concernés : si leurs sols présentent une trop forte concentration en cadmium, ils se retrouvent dans l’impossibilité de vendre leur production.
Que compte faire le Gouvernement pour préserver l’alimentation des Français de cette pollution au cadmium via les engrais phosphatés ? (Applaudissements sur des travées du groupe GEST.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Votre question concerne à la fois les problématiques de santé et d’environnement.
Le cadmium, vous le savez, est un élément très répandu dans l’environnement à l’état naturel, du fait de l’activité humaine, notamment agricole, et de l’utilisation d’engrais minéraux.
Présent à l’état naturel dans les sols, le cadmium est aussi apporté par les matières fertilisantes qui en contiennent sous forme d’impuretés, en raison de la teneur des gisements de roche phosphatée, à partir desquels sont extraits les éléments servant à la composition des engrais. Autrement dit, il ne s’agit pas d’engrais dans lesquels on intègre volontairement du cadmium, mais plutôt de produits formés naturellement à partir de roche phosphatée, laquelle contient elle-même des impuretés, dont le cadmium, que les engrais embarquent au moment de leur production.
Je partage votre diagnostic sur les risques réels induits par cet élément chimique. Il faut donc impérativement trouver des solutions. Une fois présent dans les sols, le cadmium pénètre dans les végétaux destinés à l’alimentation humaine : cette problématique sanitaire doit être prise au sérieux, compte tenu des risques d’ostéoporose et de fractures osseuses.
Nous avons tous absolument intérêt, à limiter l’exposition au cadmium : les agriculteurs, pour préserver la fertilité et la qualité de leurs sols, comme les consommateurs.
Des travaux ont été lancés dès que les études ont confirmé ces risques. Sur la base des préconisations de l’Anses, un projet de décret limitant les apports de cadmium, tous usages confondus, est en cours de concertation. Notre objectif est de le publier à l’été 2021, après les phases de consultation du public et de notification européenne.
Mme la présidente. La parole est à M. Joël Labbé, pour la réplique.
M. Joël Labbé. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse.
D’après les données dont nous disposons, les industriels sont en mesure de dépolluer les engrais phosphatés pour un surcoût évalué à seulement 3 %. Nous attendons du Gouvernement qu’il agisse dès maintenant, en publiant un décret.
Sur le plus long terme, il est possible de mettre en place des alternatives pour se passer d’engrais minéraux, par l’utilisation de compost ou de fertilisation animale comme le fumier, entre autres. Le modèle agricole biologique peut se passer de phosphates issus des mines.
N’oublions pas que l’on importe 30 % des produits d’agriculture biologique, faute d’une production suffisante en France ! (Applaudissements sur des travées du groupe GEST.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Nadège Havet.
Mme Nadège Havet. L’alimentation saine et durable est inscrite à tous les agendas. Le 20 mai dernier, la Commission européenne présentait sa stratégie « De la ferme à la fourchette ». Les recommandations alors établies traduisaient une ambition forte : bâtir une « chaîne alimentaire bénéfique pour les producteurs, les consommateurs, l’environnement et le climat », dans le cadre du pacte vert pour l’Europe.
II a notamment été proposé de porter la part de l’agriculture biologique à 25 % des terres cultivées en Europe, à l’horizon 2030. D’autres propositions doivent être faites en lien avec la lutte contre le gaspillage alimentaire, ou concernant la nécessité d’un étiquetage nutritionnel, deux problématiques abordées au Sénat au cours de la session passée.
En France, dans la continuité des travaux de la Convention citoyenne pour le climat, qui a défini un objectif de 50 % de fermes en agroécologie pour 2040, le Gouvernement vient d’annoncer un plan de relance ambitieux pour l’agriculture et l’agroalimentaire. C’est d’ailleurs ce qu’ont souligné plus de cent quarante acteurs de la transition agroécologique dans une tribune parue le 9 octobre dernier, en recommandant d’« accélérer la transformation de notre modèle agricole » et d’agir « pour une agriculture du vivant ».
Se pose en même temps, et de manière accrue aujourd’hui, la question de notre indépendance protéique et de notre souveraineté, alors que la crise sanitaire a mis en exergue les effets désastreux pour les populations que pourrait avoir la rupture des circuits mondiaux.
Pour permettre cette transition, 1,2 milliard d’euros a été dédié au volet « Transition agricole, alimentation et forêt » dans le plan de relance.
Quelle sera l’articulation de cette action politique forte, européenne et nationale, compte tenu du budget en hausse qui la soutient, avec les collectivités, en particulier pour les PAT ? Les sous-préfets de la relance interviendront-ils également sur ces sujets ?
Les élus auront besoin de pouvoir identifier précisément les aides auxquelles ils peuvent prétendre lors de la mise en œuvre de leurs propres feuilles de route. (M. François Patriat applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Madame la sénatrice, la question que vous posez est absolument essentielle.
Le plan de relance s’inscrit dans une vision assez claire : il faut bâtir une France plus forte qu’elle ne l’est aujourd’hui. Ma conviction, c’est que ce n’est pas possible sans une agriculture forte. C’est pourquoi j’ai obtenu ce montant significatif pour le volet agricole du plan de relance ; nous l’avons d’ailleurs aussi obtenu à l’échelon européen.
Comment faire en sorte que ce plan de relance irrigue nos territoires et que chaque agriculteur y ait accès ? Sont prévus 135 millions d’euros pour l’agroéquipement, et 250 millions d’euros pour les élevages ou les abattoirs – depuis combien d’années réclamez-vous que l’État accompagne les abattoirs ? Les forêts sont confrontées au drame des scolytes : l’État investit 150 millions d’euros pour réaliser ce qui constitue probablement le plus grand plan de reboisement depuis l’après-guerre, avec l’introduction de nombreux résineux dans notre pays.
Quid des collectivités territoriales ? Pour ma part, je privilégie les idées simples : aujourd’hui, de nombreux canaux existent. Ainsi, les PAT sont pris en charge par les collectivités et sont souvent définis à l’échelon du contrat de plan État-région (CPER). C’est le cas des abattoirs. La modernisation des élevages est très souvent cofinancée avec les régions au titre du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader). Pour ma part, je considère que, si un canal existe déjà, on l’utilise, on le renforce et on le finance.
Par ailleurs, on tente, car il faut être innovant ! C’est pourquoi j’essaie de lancer au maximum des appels à projets sur le modèle du catalogue.
Dans certains appels à projets, on en fait vraiment beaucoup… Pourquoi ne pas plutôt créer des listes de catalogue, par exemple pour l’agroéquipement ? Cela ne dispense pas de passer par un appel à projets, mais c’est beaucoup plus simple pour nos agriculteurs.
Mon rôle consiste à simplifier en bonne intelligence avec les territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Yves Détraigne. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Monsieur le ministre, dans un contexte de second confinement, avec une première période, de mars à mai, très tendue durant laquelle une grosse partie de l’économie a été paralysée, les agriculteurs nourrissent les Français. Cette crise sanitaire nous rappelle le cap à tenir, à savoir l’indépendance alimentaire, vous l’avez souligné.
La loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt de 2014 avait abordé cette problématique en créant les projets alimentaires territoriaux (PAT). Les états généraux de l’alimentation ont entraîné en 2018 l’adoption de la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite « loi Égalim », qui contraint la restauration collective à servir 50 % de produits de qualité, dont 20 % au moins sont issus de l’agriculture biologique, d’ici au 1er janvier 2022. Au mois de décembre 2019, ma collègue Françoise Laborde a été à l’origine de l’examen d’une proposition de résolution sur la résilience alimentaire des territoires et la sécurité nationale.
Toutes ces initiatives vont dans le même sens : favoriser une alimentation durable et locale. Pourtant, ce ne sera possible qu’avec une réelle volonté politique des territoires. Les PAT ont du mal à décoller. Pourtant, leurs enjeux sont nombreux : d’ordre économique, au travers de l’aménagement du territoire, de l’emploi non délocalisable, de l’installation ; d’ordre environnemental, avec la valorisation de nouveaux modes de production agroécologique ; d’ordre social, par l’éducation alimentaire, la création de liens, la valorisation du patrimoine.
Monsieur le ministre, vous allez annoncer des moyens considérables pour les PAT. Pour autant, comment rendre plus efficient cet outil et, surtout, quels moyens forts comptez-vous déployer pour sensibiliser les élus et les inciter à s’engager ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Monsieur le sénateur, je vous remercie d’avoir salué les travaux de votre collègue Françoise Laborde sur la question très importante de la résilience alimentaire de nos territoires.
Comment convaincre de la pertinence des PAT et comment faire pour accélérer leur mise en œuvre ?
D’abord, ce dispositif fait ses preuves dans de nombreux endroits. Frédéric Marchand a évoqué le PAT du Douaisis, qui se déploie très bien. Dans le Jura où je me suis rendu récemment, deux PAT m’ont été présentés : là aussi, cela fonctionne extrêmement bien.
Les PAT font partie de ces projets qui diffusent au fur et à mesure, car les élus qui les voient mis en œuvre dans d’autres territoires que les leurs se rendent compte que c’est utile ! Les projets alimentaires territoriaux pâtissent d’un sigle atroce – PAT ne veut pas dire grand-chose – et peut-être aussi de l’accumulation de contrats, plans et autres, ce qui peut expliquer une certaine réticence.
Ensuite, je crois à l’intelligence collective. Mon rôle consiste à accompagner et à trouver la faille. Ne nous mentons pas : en quatre ans, l’État a fait des projets alimentaires territoriaux un dispositif important, qu’il a financé à hauteur de 6 millions d’euros, soit 40 000 ou 50 000 euros sur quelques dizaines de PAT. Reste que, si l’on veut avoir les moyens de l’ambition qu’on affiche et si l’on croit à ces projets, il faut se retrousser les manches et mettre un paquet d’argent, c’est-à-dire passer de 6 millions d’euros sur quatre ans à 80 millions d’euros sur deux ans !
Enfin, derrière tout cela se trouve la grande famille agricole, que je salue, qui est composée d’individus à la fois passionnés mais aussi très bien organisés ; c’est d’ailleurs sa force. Elle nous accompagne dans la mise en œuvre de ce plan de relance. Nous travaillons énormément ensemble pour que, partout dans les territoires, les chambres d’agriculture deviennent des lieux d’accompagnement de toutes les parties prenantes – élus locaux, agriculteurs, éleveurs….
Le plan de relance, ce n’est pas celui du Gouvernement et encore moins celui du ministre de l’agriculture : c’est le plan de relance des Français, des agriculteurs et de ceux qu’ils nourrissent. Il nous faut donc absolument faire vivre toute cette famille. Les chambres d’agriculture jouent un rôle fondamental. C’est d’ailleurs pour cela que j’ai veillé à préserver leur budget dans le projet de loi de finances que vous examinerez bientôt, mesdames, messieurs les sénateurs.
Mme la présidente. La parole est à M. Henri Cabanel, pour la réplique.
M. Henri Cabanel. Il est vrai que les PAT ont du mal à décoller. En six ans, très peu ont vu le jour.
Vous allez mettre les moyens, dites-vous, monsieur le ministre. Vous vous étiez fixé un objectif de 500 PAT pour 2020. Aujourd’hui, vous pensez en réaliser un par département. Tout le monde a bien compris ici qu’ils sont des outils indispensables pour permettre une alimentation locale et de proximité. Je suis d’accord avec vous : avec les budgets que vous prévoyez, le bouche-à-oreille sera tel que d’autres élus s’engageront.
Toutefois, monsieur le ministre, il ne faudrait pas que votre volonté et votre objectif se limitent à un PAT par département. Si plusieurs projets se font jour, il faut permettre à ceux-ci, par les moyens que vous déploierez, d’aller à leur terme. Laissez les choses se faire pour le bien de tous ! (M. le ministre acquiesce.)
Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Nous remercions le groupe RDPI d’avoir inscrit ce débat sur l’agriculture durable et locale.
Notre groupe est un défenseur acharné et un fervent promoteur de l’agriculture paysanne, biologique, respectueuse de l’humain et de la planète, et rémunératrice pour le monde paysan. Or cette agriculture durable et locale est menacée, notamment par le libre-échange, dont le gouvernement auquel vous appartenez est un grand partisan, monsieur le ministre.
En effet, le libre-échange détruit l’agriculture durable et locale en cassant nos normes. Il aggrave le réchauffement climatique en augmentant les émissions de gaz à effet de serre, avec des produits qui font parfois trois fois le tour de la planète !
Le meilleur exemple en est le CETA, ce traité de deuxième génération, ou traité mixte, signé entre l’Union européenne et le Canada, qui fait tomber les barrières tarifaires et douanières mais aussi les barrières non tarifaires, en s’attaquant aux normes sociales et environnementales ainsi qu’à nos services publics. Pire, des tribunaux d’arbitrage privés seront mis en place, qui mettront les lois des entreprises au-dessus de celles des États.
Négocié pendant dix ans, ce traité a été mis en place de façon provisoire en 2017. Il devait être ratifié au bout d’un an. L’an dernier, il a été voté par l’Assemblée nationale en catimini au cœur de l’été. Il n’est toujours pas à l’ordre du jour du Sénat. Pourquoi ? De quoi avez-vous peur, monsieur le ministre ?
Notre interrogation est simple. Quand allez-vous cesser de faire appliquer un traité dans l’illégalité ? À quelle date le CETA sera-t-il inscrit à l’ordre du jour du Sénat, pour donner la parole à la totalité du Parlement et enfin permettre un débat démocratique ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Monsieur le sénateur, vous connaissez mon souci de toujours apporter des réponses précises.
M. Fabien Gay. Ce ne sera donc pas le cas aujourd’hui ! (Sourires sur les travées du groupe CRCE.)
M. Julien Denormandie, ministre. Malheureusement, je ne suis pas maître de l’inscription des textes à l’ordre du jour des travaux du Parlement, en particulier du Sénat.
M. Fabien Gay. Ah bon ?
M. Julien Denormandie, ministre. Je ne saurai donc vous dire à quel moment le texte sera inscrit. Qui plus est, vous l’avez constaté comme moi, l’ordre du jour du Parlement est quelque peu chamboulé.
M. Fabien Gay. Cela fait trois ans !
M. Julien Denormandie, ministre. Il n’en reste pas moins que je tiens à répondre à la question que vous posez, car elle est fondamentale.
Aujourd’hui, pour un agriculteur qui se bat pour produire selon les plus hautes normes de qualité, il est décourageant de constater que le concombre qu’il trouve au supermarché est parfois beaucoup moins cher et produit avec des substances qui n’ont strictement rien à voir… C’est aussi vrai pour le poulet et la liste est longue !
Sur ce sujet, ma conviction est simple et je le dis très clairement : l’Europe a fait preuve de naïveté pendant trop de temps. D’ailleurs, vous le savez, l’Europe est compétente pour la négociation des accords commerciaux. C’est pourquoi, comme plusieurs ministres de l’agriculture européens, je me bats avec force. Pour la première fois, la politique agricole commune sur laquelle nous nous sommes accordés pose un socle commun de normes environnementales dans le cadre du premier pilier.
À partir du moment où, au sein du marché commun, on s’est mis d’accord sur un socle décidé dans le cadre de la politique agricole commune, il faut que celui-ci soit transcrit dans la politique commerciale. C’est à mes yeux un minima ; cette première avancée doit être finalisée par le trilogue sur ce socle commun. Je l’ai redit pas plus tard qu’hier à tous mes homologues européens : maintenant que nous nous sommes mis d’accord sur un socle commun concernant la politique agricole, celui-ci doit trouver sa traduction dans la politique commerciale.
Ainsi, pour le Mercosur, puisque la question va se poser, c’est non ! Ce traité ne respecte en rien le socle commun environnemental, en termes de déforestation ou de production de poulets. Il n’est pas question de voir arriver tous les poulets brésiliens, ce n’est pas possible !
Je ne peux pas être plus clair dans ma réponse, monsieur le sénateur. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, pour la réplique.
M. Fabien Gay. Monsieur le ministre, je vous le dis, ce n’est pas entendable !
Mes chers collègues, combien de temps allons-nous laisser perdurer cette situation ? Allons-nous accepter encore longtemps qu’un traité de libre-échange qui fait débat et que vous défendez, monsieur le ministre, ne nous soit pas soumis ? Pour nous, la question est d’ordre démocratique : ce traité a été mis en place en 2017, il devait être ratifié par les deux chambres dans l’année qui suivait. Cela fait trois ans ! Avant la crise du covid, c’étaient les élections législatives au Canada… Il y a toujours une excuse !
Vous êtes dans l’incapacité de faire ratifier ce traité, parce que vous n’avez pas la majorité du peuple français pour vous soutenir. Si vous soumettez ce texte au Sénat, vous n’obtiendrez pas la majorité. L’ensemble des groupes politiques ici devraient interpeller le Gouvernement pour demander l’inscription dans l’année du CETA à l’ordre du jour de nos travaux et enfin avoir un débat démocratique sur cette question, qui est centrale pour l’avenir de notre agriculture et, au-delà, pour l’avenir du peuple français. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Anne-Catherine Loisier. Monsieur le ministre, je tiens à souligner une fois de plus votre engagement aux côtés de nos agriculteurs et de notre modèle agricole, dont nous sommes si fiers. Il n’est qu’à lire l’article de The Economist, qui salue le modèle français comme étant le plus durable, et ce pour la troisième année consécutive. Il faut le répéter !
J’évoquerai moi aussi les PAT et l’enjeu de leur mise en œuvre sur les territoires.
Monsieur le ministre, envisagez-vous des PAT à périmètre concentrique ? En effet, dans la mesure où l’on ne pourra pas trouver dans un même territoire toute la gamme de produits disponibles, malgré l’engagement fort des chambres d’agriculture que l’on peut attendre, peut-on imaginer une coopération avec différents PAT ? On aurait ainsi une complémentarité qui rendrait accessible à notre restauration collective et à nos cantines, dans moins d’un an, cette large gamme de denrées.
Serons-nous capables de relever ce défi à un coût accessible ? Faut-il le redire, le coût est devenu un sujet essentiel et les impayés dans les cantines scolaires sont en train d’exploser ! Pourrons-nous apporter cette alimentation saine et durable, telle qu’elle a été définie, à un coût accessible pour nos concitoyens ?
Enfin, concernant les démarches environnementales à haute valeur environnementale (HVE), qui se développent dans nos territoires, les chiffres montrent une réelle dynamique de cette certification environnementale. Selon vous, les efforts de nos agriculteurs seront-ils suffisants pour nous permettre d’atteindre les objectifs en termes de produits, de volume, de délais et de coûts fixés par la loi Égalim ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Madame la sénatrice, vous m’avez posé trois questions.
Premièrement, quel est le volet géographique des PAT ? Je m’adapte à ce que les territoires veulent : certains systèmes géographiques sont très concentrés, d’autres sont beaucoup plus larges. C’est aux territoires de le définir, mon rôle consiste à venir en appui.
Au regard de toutes les questions qui se posent, si le Sénat prenait un jour l’initiative d’organiser une présentation des différents PAT à l’ensemble des élus locaux, j’y participerais avec grand plaisir et je mettrais en avant ce que le plan de relance prévoit à ce sujet. Je fais cette proposition à Frédéric Marchand, à qui l’on doit le débat qui nous réunit cet après-midi ; je serai à votre disposition.
Deuxièmement, vous avez tout à fait raison, la question du coût est cruciale. Ce débat renvoie notamment à toutes les problématiques d’accompagnement, de dotation financière, etc.
Au-delà de ce débat purement financier, c’est parfois une question de faisabilité plus que de coût. Quand on demande aux enfants qui déjeunent à la cantine ce qui provient de la ferme voisine, ils citent toujours les yaourts. Le coût n’a rien à voir ! Que l’on s’approvisionne chez un grand distributeur ou à la ferme voisine, peu importe : c’est toujours une palette de yaourts qui demande la même manutention.
Si nous cherchons à créer le plus grand nombre de légumeries ou de conserveries possible, c’est pour accompagner la personne chargée de la logistique des cantines. Les carottes achetées au producteur ne sont pas plus chères que celles transformées ou déjà découpées que propose le grand distributeur. Le problème est que le chef de la cantine n’a pas le temps d’éplucher des kilos de carottes tous les matins !
Au-delà du coût, la question logistique est cruciale. C’est pourquoi l’État investit massivement pour éviter que la collectivité ne le fasse et ne répercute cet investissement sur le coût des repas.
Troisièmement, je crois beaucoup à la haute valeur environnementale. J’ai notamment accédé à une demande chère à la présidente de séance – j’imagine que c’est pour cette raison qu’elle m’autorise à dépasser mon temps de parole ! (Sourires) –, à savoir créer un crédit d’impôt HVE. Cela fait des années que de nombreuses professions, notamment viticoles, le demandent. C’est chose faite, mesdames, messieurs les sénateurs, et vous serez amenés à voter cette disposition importante dans le cadre du projet de loi de finances pour 2021.
Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Gillé.
M. Hervé Gillé. Je remercie le groupe RDPI d’avoir organisé ce débat.
Monsieur le ministre, 43 jours d’autonomie alimentaire pour l’Union européenne, 9 mois pour la Chine. Qu’en est-il de la France ? La crise sanitaire interroge de manière urgente notre autonomie et notre souveraineté alimentaires. La mondialisation crée des dépendances vitales malgré notre capacité à produire. Face à ce constat, comment envisagez-vous la nécessaire adaptation du Programme national pour l’alimentation (PNA) à l’éclairage de la crise actuelle ? Existe-t-il un nouveau plan Protéines végétales ? Ces sujets font-ils l’objet d’une réflexion partagée à l’échelle européenne ?
Paradoxalement, vous semblez avoir abandonné le projet de loi foncière pour préserver les terres agricoles, facteur de lutte contre le changement climatique et de souveraineté alimentaire. Quelles mesures allez-vous prendre pour territorialiser nos politiques alimentaires ? Vous souhaitez renforcer les PAT, mais leurs forces et leurs faiblesses pourraient faire l’objet d’une concertation afin que leur soient donnés une nouvelle dynamique et de nouveaux moyens.
Vous allez consacrer une partie du plan de relance à ces objectifs. Les 80 millions d’euros dont vous avez parlé seront-ils également mobilisés pour accompagner la diversification des exploitations en circuit long vers les circuits courts, et pour permettre les nécessaires reconversions sociales et économiques ?
Comme les plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET), les PAT pourraient être des obligations pertinentes pour engager les territoires en valorisant les subsidiarités, en organisant les besoins logistiques et les circuits de valorisation. L’intégration des PAT dans les SCOT et les Sraddet contribuerait à articuler ces politiques territoriales et faciliterait leur contractualisation.
Monsieur le ministre, où en sont vos réflexions sur ces sujets particulièrement sensibles, qui méritent des réponses concrètes et factuelles ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Monsieur le sénateur, je n’ai plus à vous le démontrer, ma conviction, ma vision du système agricole français, c’est que nous devons regagner en souveraineté. Pour répondre à votre question sur la dépendance de notre agriculture, je vous donnerai un seul exemple.
Concernant les protéines, le système est organisé depuis des décennies. Cela fait cinquante ans que les différents accords à l’échelle internationale ont conduit l’Europe, et singulièrement la France, à être dépendante d’approvisionnements de protéines d’Amérique – d’Amérique du Nord, d’abord, d’Amérique du Sud, ensuite.
À mes yeux, c’est inconcevable. C’est pourquoi je me bats avec force pour que notre pays gagne en souveraineté protéique pour les grandes cultures, d’une part, et pour nos élevages, d’autre part. Quand à cette situation s’ajoutent des épisodes de sécheresse qui font baisser les rendements de foin, on se retrouve de plus en plus dépendant de telles importations. Je le répète, ce n’est pas concevable. D’ailleurs, j’annoncerai dans les tout prochains jours le déploiement du plan Protéines végétales que nous mettons en place avec l’interprofession.
Faut-il inclure les PAT dans les SCOT ou les Sraddet, comme l’évoquait Frédéric Marchand ?
Aujourd’hui, 190 PAT existent. Pour ma part, je souhaite accélérer leur développement, mais c’est aux territoires de décider. Je connais bien les SCOT et les Sraddet, et je mesure le lien que ces documents peuvent avoir les uns avec les autres. Mais si je me présentais devant vous cet après-midi en annonçant que la solution consiste à inclure les PAT dans ces schémas, vous me répondriez sans doute qu’il y a moyen d’aller plus vite dans la période que traverse le pays.
C’est pourquoi je vous propose aujourd’hui de dégager massivement des financements pour aider d’ores et déjà les 190 PAT qui existent et qui fonctionnent. Comme le soulignait Henri Cabanel, il ne s’agit pas de mettre en place un PAT par département. Une fois cette étape terminée, si l’on réalise qu’il faut une coordination des différents documents, comme le propose Frédéric Marchand, pourquoi pas ?
À court terme, il est de ma responsabilité de booster ce qui est déjà en place, de mettre du diesel dans le tanker, comme on dit, pour faire en sorte que cela avance rapidement.
Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Gillé, pour la réplique.
M. Hervé Gillé. Monsieur le ministre, vous avez bien compris qu’il ne s’agissait pas de conditionner les financements à l’intégration dans les SCOT et les Sraddet. C’est une orientation qu’il faut essayer de donner. Sur ces questions, le grand problème, c’est la maîtrise foncière. Or, pour avoir une maîtrise foncière, il faut avoir une approche stratégique à l’échelon territorial.
Il faut également se demander comment créer des effets leviers en termes de contractualisation. L’intégration progressive de ces politiques dans les SCOT et les Sraddet présente l’intérêt d’améliorer la vision contractualisée et de créer des effets leviers avec l’ensemble des collectivités. En d’autres termes, c’est une orientation, pas une condition. Oui pour donner une impulsion, comme vous l’avez indiqué, monsieur le ministre, mais il faut essayer de voir à moyen et long termes !
Inscrire les PAT dans des politiques territoriales permet justement de se donner des outils, notamment pour la maîtrise foncière. Or, sur ce dernier point, vous n’avez pas répondu : vous avez abandonné le projet de loi foncière !
Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Ravier.
M. Stéphane Ravier. Mangeons local ! Mangeons français ! C’est synonyme de qualité et d’emplois. Redécouvrons les saveurs de notre terroir qui ont disparu sous les coups de la mondialisation des normes européennes !
Cela fait cinquante ans que nos agriculteurs se battent face à la concurrence déloyale et aux hauts fonctionnaires de la Commission européenne, à Bruxelles. À force, ils s’épuisent et sombrent dans le désespoir : tous les deux jours, un agriculteur français se suicide.
Nous étions autrefois l’un des plus grands pays agricoles du monde. Nous en sommes aujourd’hui réduits à consommer du bœuf aux hormones brésilien ou canadien, du poulet aux antibiotiques américain, du soja transgénique asiatique. Si nous voulons protéger nos agriculteurs et retrouver une alimentation durable, la première solution est de remettre des barrières douanières sur les produits que nos paysans produisent déjà.
Nous devons partout favoriser les produits français, imposer au moins 70 % de repas locaux dans nos cantines. L’initiative de la commune de Châteauneuf-le-Rouge dans les Bouches-du-Rhône est à ce titre un exemple à suivre.
Quid des accords que des ministres, inconnus ou disparus, ont signés et quid de l’Union européenne, me direz-vous ? Sincèrement, je me moque de ces accords ! Un accord international rédigé par des bureaucrates et signé par des énarques ne vaut pas la vie d’un seul paysan français. Même s’il a reculé sur l’accord avec l’Amérique du Sud, ce gouvernement signe à tout-va les accords de libre-échange avec le Canada ou le Vietnam.
Les paysans, ce gouvernement ne les comprendra jamais, car la paysannerie, c’est l’inverse de la Macronie : la paysannerie n’est pas en marche, elle n’est pas hors sol, elle a le corps et l’âme enracinés. On est paysan par amour et par passion, non pas pour « faire du blé », mais pour le faire pousser – nuance qui fait toute la différence ! La sachant fragile et précieuse, les paysans protègent la terre pour mieux la transmettre, en même temps qu’ils transmettent un savoir-faire et un art de vivre incomparables.
Aujourd’hui, dans nos campagnes, nous entendons non pas mugir, mais mourir des hommes et des femmes qui nous font vivre. Pour une alimentation durable et locale, faisons nôtre cette déclaration de Guy de Maupassant à la terre française : « J’aime ce pays, et j’aime y vivre parce que j’y ai mes racines, ces profondes et délicates racines, qui attachent un homme à la terre où sont nés et morts ses aïeux, qui l’attachent à ce qu’on pense et à ce qu’on mange, aux usages comme aux nourritures, aux locutions locales, aux intonations des paysans, aux odeurs du sol, des villages et de l’air lui- même. »
Monsieur le ministre, vous l’avez compris, ce n’est pas une question que je vous pose, mais c’est une déclaration d’amour dans les actes que je vous invite à faire au monde paysan, qui nous nourrit sainement et contribue à faire de la France le plus beau pays du monde.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Monsieur le sénateur, ça tombe bien : je ne suis pas énarque, je suis ingénieur agronome !
M. Stéphane Ravier. Pourtant…
M. Julien Denormandie, ministre. Cela devrait vous rassurer ! Pourtant, je suis macroniste et je partage cette même passion.
Les attaques contre les fonctionnaires m’étonnent toujours. D’ailleurs, si je ne dis pas de bêtises, vous aviez fait le choix de la fonction publique, quand vous étiez jeune. C’est tout à l’honneur de ces femmes et ces hommes de s’engager dans la fonction publique.
M. Loïc Hervé. Très bien !
M. Julien Denormandie, ministre. Nous en avons bien besoin ! Jamais, pour ma part je ne tomberai dans le bashing de la fonction publique ; qui plus est, dans cette période, c’est très mal venu.
Un autre point nous différencie absolument. L’amour pour le monde paysan ne se décrète pas, il se montre et se prouve dans l’action. La principale valeur du monde paysan, c’est le travail. Ces femmes et ces hommes travaillent ardemment. Ce ne sont pas des discours d’estrade qui leur feront croire qu’untel ou untel est de leur famille ou empreint de l’amour que vous appelez de vos vœux, ce sont le travail et les résultats.
Monsieur le sénateur, et je crois que ce point aussi nous différencie, vous avez une vision tronquée de l’agriculture. Je le dis comme je le pense.
Vous affirmez qu’il faut faire du local. Or je n’ai pas arrêté de dire qu’il fallait inciter tous nos concitoyens à manger des produits frais et locaux. C’est ce qu’il y a de meilleur pour leur santé, pour l’environnement, pour nos agriculteurs et, souvent, pour leur portefeuille.
Toutefois, vous vous trompez, monsieur le sénateur. Vous souhaitez un pays plus fort, mais, pour ce faire, il faut avoir une agriculture plus forte, et donc une agriculture qui exporte.
M. Loïc Hervé. C’est exact !
M. Julien Denormandie, ministre. Il ne faut pas opposer les uns aux autres. Si l’on veut avoir une filière qui pèse, il est important qu’elle exporte. Je l’assume : oui, je vais aider à exporter avec énormément de force et, oui, je vais aider à développer les circuits courts.
Cessez d’avoir cette vision simpliste pleine de « yakafokon » – on ne va faire que du circuit court, on va empêcher tous les autres, etc. Le monde dans lequel on vit est un monde de rapports de force. Pour peser lourd, il faut exporter. Pour que la France soit forte, il faut qu’elle ait une agriculture forte, à la fois exportatrice et de proximité.
Peut-être est-ce cela le « en même temps » macroniste, et c’est très bien ainsi. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et UC.)
M. Loïc Hervé. Bravo !
Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Duplomb.
M. Laurent Duplomb. Monsieur le ministre, je suis content d’avoir entendu ce que je viens d’entendre ! Si un bon gouvernement doit assurer à son peuple une alimentation durable et locale, ces termes peuvent toutefois revêtir des définitions très différentes dans la bouche des uns ou des autres.
À mes yeux, une alimentation durable passe nécessairement par l’autosuffisance alimentaire. Selon un dicton populaire dans mon pays, « pour être sûr d’en avoir assez, il faut en avoir trop » ! (Sourires.)
Local, pour moi, cela signifie français. Mon département produit 430 millions de litres de lait pour 230 000 habitants. Si l’on voulait limiter la distribution à quelques kilomètres seulement, il faudrait demander à tous les Altiligériens de boire du lait matin, midi et soir !
On doit être capables d’apporter du lait à Marseille, où il n’y a pas de vaches laitières, et des fruits là où le soleil n’est pas assez chaud pour les faire mûrir. Telle devrait être la réalité de notre agriculture durable et locale.
Vous dites qu’il faut favoriser l’export, monsieur le ministre. Je suis d’accord ! Encore une fois, pour en avoir assez, il faut en avoir trop. (Nouveaux sourires.) Et quitte à avoir des produits en excès, mieux vaut les vendre pour pouvoir, grâce à l’argent gagné, mettre en œuvre des politiques agricoles sur notre territoire.
En 2010, l’excédent commercial agricole français était de l’ordre de 12 milliards d’euros. En septembre 2020, il n’est plus que de 3,98 milliards d’euros. On ne peut pas continuer ainsi ! J’avais prédit, en 2019, que l’excédent commercial français se transformerait en déficit si nous n’y prenions pas garde. Or le risque est bien réel.
Nous avons perdu sur les céréales, nous perdons sur le vin. Plus de la moitié des fruits et légumes que nous mangeons aujourd’hui sont importés !
Vous devez avoir une politique offensive en la matière, monsieur le ministre. Vous en avez déjà parlé, mais j’espère que vous y reviendrez dans votre réponse.
Le deuxième élément…
Mme la présidente. Vous avez déjà dépassé votre temps de parole de trente secondes, mon cher collègue.
M. Laurent Duplomb. Un dernier point alors : il faut une organisation mondiale pour étudier la démographie de notre planète. Nous sommes 7,8 milliards d’habitants aujourd’hui ; nous serons 10 milliards demain. Si nous ne faisons pas attention, si nous en restons à des débats d’enfants gâtés, nous pouvons être certains que, demain, la population d’un pays comme le Nigéria, qui dépassera le milliard d’âmes, viendra se nourrir en France !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Les deux questions posées par le sénateur Duplomb mériteraient bien plus que deux minutes pour y répondre.
Je ne reviendrai pas en détail sur le sujet de l’export, mais je crois qu’il nous faut absolument une agriculture qui puisse exporter. Il fut un temps où mon métier était précisément d’aider à réaliser ces exportations. J’ai aidé pendant plusieurs années des céréaliers français à exporter en Égypte, car ce pays a besoin de céréales avec un taux de gluten particulier et il ne peut pas les produire.
Songez tout de même, mesdames, messieurs les sénateurs, que 40 % de l’action de Business France concerne aujourd’hui le monde agroalimentaire. Mais nous avons des défis de taille à relever sur nombre de filières, notamment le vin ou certains types de viande – nous n’arrivons pas, par exemple, à ouvrir de nouveaux marchés en Italie pour les broutards.
Nous essayons d’accompagner très fortement ces exportations. J’étais il y a dix jours avec les équipes de Business France pour accompagner le lancement d’un plan de relance export grâce auquel l’État va financer une grande partie des démarches pour conquérir de nouveaux marchés.
Moi qui suis très attaché à l’agriculture française, ce qui m’énerve le plus, au-delà de la diminution de notre balance commerciale, c’est que les Allemands sont devenus meilleurs exportateurs agricoles que nous ! Comment peut-on accepter cela quand on est, comme moi, convaincu de la pertinence des produits agricoles français ?
Je prends donc l’engagement de me battre corps et âme pour favoriser l’export.
J’en viens au deuxième élément, en lien avec le premier, la question de la démographie. Dans toute science humaine, l’approche démographique me semble essentielle. Hervé Le Bras vient de publier un ouvrage absolument éclairant, Métamorphoses du monde rural, qui explique que le monde agricole est passé en trente ans d’une agriculture de territoires, de propriétaires, à une agriculture menée par des « entrepreneurs du vivant ». Cette approche me paraît extrêmement juste.
Les enjeux démographiques doivent être considérés en lien avec la nutrition. Quand on parle par exemple de gestion de l’eau à l’échelle de la planète, l’eau importée, c’est-à-dire celle incluse dans les productions végétales qui font ensuite l’objet d’échanges commerciaux, représente un sujet massif à l’échelle démographique et géopolitique. Nous devons avoir une vision claire et donner un cap.
En la matière, l’Europe a aussi un rôle à jouer. Nous finalisons actuellement la nouvelle PAC. Faut-il privilégier tel ou tel outil ? Faut-il faire plus de redistribution ou aller vers plus de convergence ? Selon moi, la seule question que l’on doit se poser, c’est la vision de notre agriculture dans sept ans. Où veut-on amener notre agriculture à cette échéance, au regard des changements à l’œuvre dans le monde ? Je conserverai cette approche, qui est à mon avis la bonne, même si elle est plus complexe.
Mme la présidente. Je conçois qu’il soit assez frustrant de répondre en deux minutes, monsieur le ministre, mais nous devons tout de même essayer de respecter les temps de parole.
La parole est à Mme Évelyne Perrot. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Évelyne Perrot. Madame la présidente, monsieur le ministre, la crise sanitaire et ses conséquences éclairent d’un jour nouveau le sujet de l’alimentation durable et locale. Nous sommes face à l’opportunité historique de réaliser pleinement la transition écologique de notre modèle agricole. En effet, si une telle transition est amorcée dans de nombreux domaines et dans plusieurs États membres, l’empreinte environnementale de notre alimentation reste importante.
En mai dernier, l’Union européenne s’est dotée d’une stratégie, « De la ferme à la fourchette », qui ambitionne notamment de réduire de 50 % l’utilisation de pesticides chimiques, ou encore de disposer de 25 % de la superficie agricole en agriculture biologique d’ici à 2030.
Pour atteindre ces objectifs ambitieux et nécessaires, nous devons relever ensemble plusieurs défis : la souveraineté alimentaire, la rémunération des producteurs, la capacité de nos concitoyens à acheter leurs produits et, bien entendu, le développement durable.
Dans un récent ouvrage, Hubert Védrine explique que le concept de « compétitivité écologique » va s’imposer rapidement. Nous devons aujourd’hui tracer ce chemin.
Monsieur le ministre, face à l’indispensable transition agroécologique, quelle position la France va-t-elle défendre dans le cadre des prochains grands rendez-vous européens, qu’il s’agisse de la réforme de la PAC, de l’adoption du budget européen ou encore de la stratégie « De la ferme à la fourchette » ?
Pour la mise en œuvre de cette stratégie, la Commission a prévu un calendrier réglementaire et législatif allant presque jusqu’en 2024. Ce calendrier vous paraît-il adapté ? La France souhaite-t-elle que l’examen de certains textes soit avancé ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Madame la sénatrice, pour moi, la vision est claire. D’abord, que souhaite-t-on fondamentalement ? Où veut-on amener l’agriculture européenne dans les sept prochaines années ?
Le cadre politique sur lequel les ministres européens viennent de se mettre d’accord donne des orientations : une agriculture plus souveraine, qui développe plus de protéines et qui engage la transition agroécologique. Mais cette dernière doit bien évidemment être financée. Il ne suffit pas d’exiger cette transition des agriculteurs et de les laisser se débrouiller. Comment les accompagne-t-on ? Comment arrête-t-on de leur adresser des injonctions contradictoires ? Vous m’avez déjà entendu plus d’une fois dénoncer ces injonctions stériles, qui biaisent le débat et méconnaissent l’immense valeur ajoutée de notre agriculture et de nos agriculteurs.
Ensuite, le diable se niche toujours dans les détails, et cet adage est peut-être encore plus vrai s’agissant des politiques européennes…
Chaque État membre va à présent décliner ce cadre politique, arrêté entre les ministres et actuellement discuté avec la Commission et le Parlement, dans un plan stratégique national. Des discussions vont s’ouvrir à cette fin en France. Je ne l’ai pas encore obtenu, mais je me battrai, en profitant aussi de la présidence française de l’Union à partir du 1er janvier 2022, pour que ces fameux plans stratégiques nationaux soient considérés comme des documents politiques devant être examinés au niveau des ministres.
Nous nous sommes accordés sur la nécessité d’une convergence au sein du marché commun. Mais si cet objectif est ensuite décliné au niveau bilatéral et si l’on ne peut pas évaluer l’équivalence des chemins empruntés dans les différents États membres, ça ne peut pas marcher. Il faut, en d’autres termes, pouvoir vérifier que les règles ne sont pas beaucoup plus contraignantes d’un côté, et beaucoup moins de l’autre.
Je me bats donc pour que ces plans stratégiques nationaux soient in fine présentés au niveau des ministres. Je pourrai ainsi dire aux agriculteurs : si nous organisons la transition de cette manière, c’est parce que nos collègues européens la font aussi de cette manière, avec les mêmes ambitions.
L’ensemble forme une vision politique, et soyez assurés de mon engagement très fort sur ce point.
Mme la présidente. La parole est à Mme Évelyne Perrot, pour la réplique.
Mme Évelyne Perrot. Monsieur le ministre, je viens de vous remettre un document que je vous demande d’examiner avec grand intérêt.
Je vis dans un secteur de grandes cultures où les paysans sont pris dans une spirale infernale. Certains se sont réunis pour travailler la terre avec respect, cultiver du bio en circuits courts à portée de tous, en respectant les nappes phréatiques, mais surtout en donnant aux agriculteurs une rémunération honnête et un regard respectueux sur leur métier.
Il s’agit d’intelligence collective, monsieur le ministre. C’est ce que vous aimez, et ce que vous venez de nous donner comme exemple.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Michau.
M. Jean-Jacques Michau. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la crise sanitaire sans précédent que nous traversons, et qui touche durement nos concitoyens, nous conduit irrémédiablement à interroger nos modes de consommation, en particulier la qualité de notre alimentation.
De fait, la question alimentaire a pris une importance grandissante et elle est devenue aujourd’hui un nouvel enjeu de développement durable pour les territoires. Les collectivités, cela a été dit, sont mobilisées et s’engagent de manière volontaire sur la question alimentaire dans l’élaboration d’initiatives locales et de PAT, qui contribuent à la construction de nouvelles politiques transversales. C’est le cas en particulier dans mon département, l’Ariège, où le PAT du pays des Pyrénées cathares a été mis en place dès le mois de mai 2018.
La problématique de l’agriculture de proximité, de la préservation du foncier et des activités agricoles est prioritaire. Vous le savez, la maîtrise foncière est l’un des principaux outils dont nous disposons pour permettre et encourager l’installation de nouveaux agriculteurs, en mobilisant du foncier ou en achetant en fonction des opportunités, en lien avec les Safer.
Pourtant, alors même que le droit de préemption des Safer a été conforté par l’acquisition de la totalité des parts d’une société, il s’avère que de nombreuses acquisitions de terres agricoles par des sociétés parfois étrangères continuent de susciter interrogations et inquiétudes.
Ainsi, les fonds de gestion, par le biais de sociétés, continuent d’acheter à des exploitants et à des prix parfois très élevés des milliers d’hectares dont les productions sont en règle générale destinées à l’exportation.
Les mécanismes de contournement de notre législation mis en œuvre par ces acheteurs, notamment la pratique des cessions partielles, démontrent clairement l’inefficacité de nos outils de régulation. Les conséquences de cette spéculation sont néfastes pour nos territoires, en particulier pour les nouveaux agriculteurs.
Monsieur le ministre, ma question est donc simple : vous aviez annoncé en 2017 la préparation d’une grande loi foncière, qui devait être programmée d’ici à la fin du quinquennat. Quand proposerez-vous au Parlement ? Comment comptez-vous agir pour mieux réguler le foncier agricole et empêcher les contournements du droit de préemption des Safer ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Vous me posez plusieurs questions, monsieur le sénateur Michau, qui font également écho aux interrogations de plusieurs de vos collègues.
Oui, il faut profondément améliorer le foncier agricole. Les défis sont nombreux, vous l’avez dit : le statut de l’agriculteur, le fermage, la régulation. Ce sont autant de sujets sur lesquels nous avons déjà collégialement beaucoup travaillé. Le Sénat a énormément produit sur cette question et le ministère, notamment sous l’impulsion de mon prédécesseur, s’est aussi fortement engagé.
Va-t-on faire une grande loi foncière d’ici à la fin du quinquennat ? Vous connaissez ma franchise dans les réponses. De fait, le temps parlementaire a été énormément contraint par les textes liés à la situation exceptionnelle que nous vivons depuis plusieurs mois. Je ne crois pas, à titre personnel, que nous aurons la fenêtre de tir pour mener à bien cette grande loi foncière. En tout état de cause, cela ne doit pas nous empêcher de nous dire que nous la présenterons au début du prochain quinquennat, si toutefois vous le désirez, monsieur le sénateur… (Sourires.)
Nous pouvons aussi avancer sur de nombreux sujets qui ne nécessitent pas l’intervention de la loi.
Prenez par exemple la question de la régulation par les Safer. Vous connaissez comme moi la gouvernance de ces sociétés, monsieur le sénateur… Franchement, on n’a pas besoin de la loi pour améliorer leur gestion ici ou là. Bien entendu, cela ne veut pas dire qu’il faut renoncer à améliorer le cadre légal.
Le portage foncier ne nécessite pas non plus de modifications législatives. On ne le sait pas suffisamment, mais le foncier agricole coûte beaucoup moins cher en France que dans les pays voisins. Comment se fait-il que nous n’en tirions aucun avantage compétitif ? Un jeune agriculteur qui s’installe, avant même de commencer, contracte systématiquement 200 000 ou 300 000 euros d’emprunt. Nous travaillons à la recherche de solutions très concrètes, sans passer par la loi.
Nous devons aussi selon moi régler la question de la retraite de nos agriculteurs, qui présente un lien direct avec le foncier. Comment expliquer cette pression foncière sur l’acquisition des terres, surtout depuis la génération qui me précède ? Tout simplement parce que, aujourd’hui, quand vous êtes agriculteur, vous financez votre retraite par le foncier !
Si l’on veut réussir à trouver de nouvelles modalités permettant aux jeunes de moins s’endetter, la première des choses à faire, c’est de régler le problème de la retraite des agriculteurs. C’est tout le travail qui est en cours, à la suite d’une proposition de loi adoptée à l’Assemblée nationale.
Mme la présidente. La parole est à Mme Kristina Pluchet.
Mme Kristina Pluchet. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous alimenter de façon saine et durable est devenu un enjeu majeur et constitue une véritable attente de la part de tous nos concitoyens.
Des États généraux de l’alimentation en 2017 à la loi Égalim en 2018, l’ensemble des acteurs se sont prononcés. Ce sont autant d’enjeux sanitaires, écologiques, agricoles et économiques qui font la complexité du sujet.
Une impulsion a été donnée par l’article 24 de la loi Égalim, qui prévoit que les repas servis en restauration collective publique, d’ici au 1er janvier 2022, devront compter au moins 50 % de produits alimentaires durables de qualité, dont 20 % issus de l’agriculture biologique.
Nous souscrivons à cet objectif, mais nous sommes confrontés à des difficultés de mise en œuvre parce que nous n’avons pas les moyens sur le terrain. Nous ne comptons pas assez de producteurs, pas assez de maraîchers notamment.
Que l’on parle de souveraineté alimentaire ou d’alimentation saine et durable, les circuits courts devraient être notre objectif n° 1. C’est d’ailleurs une ambition tracée par le Green Deal européen, avec la stratégie « De la ferme à l’assiette » présentée le 20 mai dernier par la Commission européenne.
Pour atteindre l’objectif, il faut aider à l’installation de producteurs locaux et leur assurer des volumes et des prix rémunérateurs.
Prévus par la loi d’avenir pour l’agriculture en 2014, quelque 190 projets alimentaires territoriaux (PAT) ont vu le jour. Le Gouvernement en voulait 500, mais le développement est plus lent que prévu.
J’en viens à ma première question, monsieur le ministre. Quelle est votre stratégie pour accélérer l’implantation de ces PAT, afin qu’ils nous permettent de tenir nos engagements pour 2022 ?
Par ailleurs, quelles positions défendra la France, dans le cadre de la réforme de la PAC, pour concilier la transition agroécologique et la prise en compte de la situation financière critique de nos agriculteurs ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Pour répondre à votre première question, madame la sénatrice Pluchet, je pense fondamentalement que, pour accélérer, il faut des moyens.
C’est pourquoi, dans le plan de relance, 80 millions d’euros sont consacrés à l’accompagnement des PAT. Il y a aussi un gros travail d’accompagnement à faire. J’évoquais ce point avec les chambres d’agriculture, mais je pense que la Haute Assemblée a aussi son rôle à jouer, en montrant ce qui se passe ici ou là et en convainquant d’autres de participer à cette dynamique.
Vous avez raison, tout est lié. Ici, il n’y a pas suffisamment d’agriculture biologique – la surface agricole utile en bio représente aujourd’hui environ 8,5 % du total, ce qui est insuffisant – ; là, nous devons favoriser davantage les productions sous signe officiel de qualité (SIQO). C’est pourquoi je lance le crédit d’impôt haute valeur environnementale (HVE).
Enfin, vous l’avez souligné, il n’existe pas de définition du « produit local » : on ne sait pas s’il doit parcourir 60, 80 ou 150 kilomètres. Je suis toutefois très à l’aise avec la définition avancée par le sénateur Duplomb, et je peux même dire que je la partage. Mais c’est précisément parce que cette notion n’est pas définie, et probablement pas définissable, qu’elle n’a pas été insérée dans l’article 24 de la loi Égalim.
Les PAT constituent toutefois le bon levier pour assumer le caractère local du produit, quel qu’il soit, à une échelle compréhensible par le citoyen. Celui-ci voit bien, à son niveau, ce qu’est un produit local.
Sur la transition agroécologique, je fais partie de ceux qui disent qu’elle a un coût. Il est trop facile d’adresser aux agriculteurs des injonctions de faire sans vouloir les rémunérer pour la réalisation de cette transition.
Il ne s’agit en aucun cas d’opposer les uns aux autres – les agriculteurs sont les premiers à souhaiter la transition agroécologique –, mais de mettre en cohérence nos demandes et nos actes.
Ce n’est pas un gros mot de dire qu’il faut rémunérer l’agriculteur qui met en œuvre cette transition. Ce n’est pas être anti-écologiste, juste pragmatique, car nos agriculteurs, ces « entrepreneurs du vivant », ont besoin de vivre pour convaincre les générations futures d’entrer dans cette grande famille agricole qui peut créer de nombreux emplois, à condition qu’ils soient rémunérés.
C’est ainsi que l’on avancera, et la PAC doit nous y aider.
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Mérillou.
M. Serge Mérillou. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le travail de nos éleveurs fait notre fierté collective. Malheureusement, le confinement et les mesures de restriction appliquées à la restauration collective, aux restaurateurs ainsi qu’aux professionnels du tourisme renforcent aujourd’hui les difficultés que certaines filières animales connaissaient depuis plusieurs années.
Je voudrais attirer particulièrement votre attention sur la situation des abattoirs de proximité, qui sont nombreux à rencontrer des difficultés en milieu rural.
Ainsi, l’abattoir de Ribérac, qui emploie 21 personnes dans mon département de la Dordogne, est au bord du gouffre à la suite d’une diminution drastique du nombre de bêtes abattues : 1 200 aujourd’hui, contre 4 000 il y a quelques années.
Le retrait de la société Arcadie au printemps a réduit son activité de moitié et porté un coup fatal à cet abattoir, qui cumule 700 000 euros de dette, dont 200 000 euros de redevance due à la commune.
Le maintien de ces abattoirs locaux est pourtant nécessaire : pour limiter le temps de transport des animaux et l’impact sur l’environnement, pour favoriser les circuits courts et une économie circulaire conforme aux nouvelles attentes de nos concitoyens, pour maintenir aussi des emplois dans des territoires en difficulté.
Si rien n’est fait, leur disparition entraînera le déséquilibre de nombreuses filières. Le label « veau élevé sous la mère », qui fait la fierté du Ribéracois, est aujourd’hui menacé.
Monsieur le ministre, le volet « filières animales » du plan France relance a été doté d’une enveloppe de 250 millions d’euros, dont 130 millions d’euros spécifiquement dédiés à la modernisation des abattoirs et aux outils de première transformation.
Que comptez-vous faire pour sauver nos abattoirs ruraux ? Quels leviers comptez-vous activer pour inciter les acteurs privés à investir dans ces structures essentielles à une alimentation durable et locale ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre, pour deux minutes seulement !
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Je connais bien la situation en Dordogne et les conséquences des difficultés du groupe Arcadie, qui ont impliqué différentes reprises, notamment celle de l’abattoir de Ribérac par Carnivor à la suite d’une procédure douloureuse devant le tribunal de commerce de Montpellier – je parle sous votre contrôle, monsieur le sénateur.
J’irai même plus loin que vous : c’est l’identité même d’un territoire qui est parfois menacée. Si l’abattoir disparaît, l’indication géographique tombe. Ce serait le cas pour les agneaux du Quercy, par exemple.
Il est pour moi essentiel de pouvoir aider ces abattoirs de proximité. C’est pourquoi j’ai décidé d’inclure dans le plan de relance une enveloppe très importante pour les accompagner.
Les abattoirs territoriaux font parfois quelques bénéfices, mais le plus souvent ils gagnent peu ou pas d’argent, alors même que les collectivités locales les soutiennent souvent avec beaucoup de détermination.
Nous devons pouvoir leur apporter un soutien financier. Aujourd’hui, l’enveloppe est disponible ; le sujet est donc de faire remonter les projets, en lien avec les préfectures localement. Je vise plus particulièrement deux objectifs, d’une part la modernisation et la rentabilité de ces abattoirs, d’autre part la question du bien-être animal, pour diminuer le stress des animaux. Nous avons les moyens de notre ambition et je serai ravi d’en discuter avec vous, monsieur le sénateur.
Mme la présidente. La parole est à M. Édouard Courtial.
M. Édouard Courtial. Monsieur le ministre, qu’il me soit d’abord permis de dédier cette question à la mémoire de Laurent Darras, agriculteur décédé à la suite d’un accident dans son exploitation, hier, à Villers-Saint-Frambourg-Ognon, dans l’Oise.
Voilà quelques jours, le Président de la République déclarait : « Être jeune en 2020 n’est pas facile. » Être agriculteur ne l’est pas davantage. Violences à leur encontre, surenchérissement du coût du travail, surtranspositions récurrentes, complexités administratives, désertification vétérinaire, transmission des exploitations : la liste des défis auxquels ils sont confrontés est longue et en découragerait plus d’un. Vivre honnêtement et décemment de leur travail arrive en tête de ces défis.
Pour les relever, l’État n’est pas à la hauteur des attentes des agriculteurs. De perpétuels allers-retours voient chaque avancée immédiatement chassée par une nouvelle déception.
Ainsi, la loi Égalim, qui a fait naître tant d’espoirs, n’a rien résolu ! Elle laisse aujourd’hui place à la colère, tandis que sont signés des traités internationaux qui mettent en péril notre production.
C’est le cas encore lorsque vous devez assumer l’interdiction des néonicotinoïdes, tout en promettant une solution alternative qui n’arrive toujours pas. Et vous voilà obligés – le Parlement vous en sait gré – de demander une dérogation indispensable !
Résultat, l’agriculture française décroche par rapport à ses concurrents. Pourtant, elle est un atout indéniable pour notre avenir, non seulement parce qu’elle assure notre souveraineté et notre sécurité alimentaire, et qu’elle est l’ADN de nos territoires ruraux, mais aussi parce qu’elle est un formidable moteur pour l’ensemble de notre économie et la vitrine d’un savoir-faire unique, reconnu et envié dans le monde entier.
Nos agriculteurs sont les premiers écologistes. Ils respectent cette terre qu’ils ont su apprivoiser. Notre agriculture est sans doute l’une des plus durables, voire la plus durable, du monde. Elle atteint un niveau d’exigence inégalé, avec des produits de qualité dont nous pouvons être fiers.
Monsieur le ministre, à quand une campagne de sensibilisation et une politique qui revalorisent la profession et défendent nos agriculteurs ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Monsieur Courtial, je vous remercie sincèrement pour votre question. Vous avez, ô combien, raison de ne pas tomber dans la critique facile, mais bien plutôt de valoriser ce beau métier d’agriculteur et d’éleveur !
J’en appelle à toute la jeunesse de France. Le monde agricole recrute, et il s’agit de métiers de passion. Quelle plus belle passion que celle du vivant, de la terre, de l’environnement ? Voilà ce qui anime nos agriculteurs !
L’agriculture est un métier d’innovation. Contrairement à nombre d’idées reçues, l’innovation est au cœur des métiers agricoles : machinisme, gestion raisonnée de l’ensemble des intrants, outils de transformation, autant de secteurs d’innovation dans lesquels notre pays est souvent leader mondial.
Au-delà de cette passion et de cette innovation, le métier d’agriculteur a l’une des plus importantes finalités qui soit, au service du peuple français : nourrir l’ensemble de nos concitoyens et leur donner confiance dans la santé nutritionnelle que j’évoquais, à l’instant, à cette tribune de la Haute Assemblée.
Le départ à la retraite d’un agriculteur sur deux dans les dix prochaines années constitue aujourd’hui un défi majeur. Nos lycées agricoles représentent un actif absolument considérable, ces lycées du vivant qui forment celles et ceux qui le souhaitent, tout au long de leur vie, en formation initiale comme en formation continue, aux métiers du vivant.
Ce sont des métiers de passion, d’innovation, de noblesse, des valeurs que nous devons défendre. J’ai pris cet engagement auprès des agriculteurs, celui de toujours me battre pour qu’ils puissent vivre dignement de leur métier. Je ne lâcherai rien !
Le deuxième engagement que je prends, monsieur le sénateur, est de faire en sorte que nous puissions lancer très rapidement cette campagne de communication. Dans le plan de relance, 10 millions d’euros y seront consacrés. Nous avons beaucoup travaillé à cette campagne avec les Jeunes agriculteurs (JA), car il y va de notre souveraineté : une agriculture sans agriculteurs est impossible.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn.
Mme Laurence Muller-Bronn. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le développement des circuits courts est une tendance émergente de la consommation alimentaire, largement confirmée depuis l’épidémie de la covid-19. Cette crise sanitaire a développé l’attrait des consommateurs pour les produits locaux et pour la traçabilité des aliments. Elle a également révélé le soutien et la solidarité des Français envers les producteurs de proximité. Une relation de confiance s’est construite ; il est indispensable qu’une politique de soutien économique et fiscale vienne pérenniser cette relation.
Certes, ces filières bénéficient des aides de l’État, au même titre que les entreprises des secteurs touchés par la crise sanitaire. Cependant, au-delà des mesures d’urgence, nous devons conforter leur avenir.
À ce titre, la loi Égalim n’a pas permis de mieux structurer l’offre alimentaire produite sur le sol français, comme le Sénat a pu le constater dans son bilan d’application de la loi. Elle n’a pas non plus apporté les bénéfices économiques attendus pour les agriculteurs locaux. En effet, leurs revenus restent insuffisants, alors que la demande pour leurs produits augmente et que des emplois pourraient être créés, si l’État soutenait ces filières de manière pérenne.
Monsieur le ministre, vous avez évoqué au début de ce débat la signature d’une série d’engagements avec les supermarchés, pour favoriser l’agriculture de proximité. Pourtant, permettez-moi de ne pas y voir la bonne solution.
Rendre les agriculteurs dépendants de la grande distribution, est-ce pertinent ? Les habitants ont pris de nouvelles habitudes d’achat de proximité. Nous devons garantir l’indépendance des agriculteurs, pour qu’ils puissent répondre aux attentes des clients d’aujourd’hui, lesquels participent aujourd’hui à la revitalisation des villages et villes de la France rurale, et favorisent le lien social dans nos communes rurales.
Monsieur le ministre, quelles mesures structurelles par le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour soutenir l’ensemble de ces acteurs des filières locales ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Cet accord et ces engagements passés avec la grande distribution n’obèrent en rien nos autres actions. Ils ne sont en rien exclusifs d’autres mesures !
Lors du premier confinement, nous avons constaté l’attrait d’un grand nombre de nos concitoyens pour ces produits frais et locaux dans les supermarchés. Il m’a semblé très important de pouvoir pérenniser cette tendance, au bénéfice de nos agriculteurs.
Cela ne veut pas dire que nous ne devons pas, en même temps, structurer les filières localement. Le plan de relance prévoit 60 millions d’euros à cette fin.
Nous créons aussi les PAT, qui permettent de développer les débouchés de proximité grâce à une meilleure articulation avec l’amont de la chaîne de production. Le plan de relance y consacre 80 millions d’euros.
Enfin, 50 millions d’euros sont destinés, dans le cadre dudit plan, aux cantines scolaires. Nous nous intéressons aussi à la restauration collective, qui représente un enjeu absolument essentiel. Nous devons jouer sur tous les tableaux, et la grande distribution en fait partie.
Nous allons finaliser cet accord avec la grande distribution. Nous avons déjà commencé ce travail avec les commerçants qui, depuis toujours, valorisent les circuits locaux ; les artisans, notamment, créent la valeur ajoutée de leurs produits. Il en va de même dans le domaine de la restauration collective. Pas plus tard que la semaine dernière, en dépit des grandes difficultés que rencontre ce secteur, tous les acteurs ont souhaité participer à cette démarche.
Il me semble fondamental de développer aussi bien l’export que les circuits courts, et pour ces derniers dans toutes leurs facettes, de l’amont à l’aval, quels que soient les circuits de distribution. Pour chacun de ces circuits, je m’y emploierai avec la même détermination.
Mme la présidente. La parole est à Mme Vivette Lopez.
Mme Vivette Lopez. Le débat qui nous réunit aujourd’hui, monsieur le ministre, vient opportunément mettre le sujet de l’alimentation durable, et donc celui de l’agriculture, au cœur de nos discussions. Nous ne pouvons que nous en féliciter.
Bien que cette thématique ne soit pas vraiment nouvelle, elle a pris ces derniers mois, à la faveur de la pandémie, un relief particulier. En effet, chaque Français a pu constater par lui-même, au fur et à mesure que les frontières fermaient, à quel point la souveraineté alimentaire de la France était nécessaire, à quel point le circuit court pouvait répondre aux besoins d’une population, à quel point la démultiplication des circuits d’achat devait faire l’objet de toute notre attention.
À cet égard, la mise en place de maisons des producteurs au sein de plusieurs bassins de vie semble avoir apporté des réponses satisfaisantes, pour les consommateurs comme pour les agriculteurs.
Le principe de ces structures est assez simple : il s’agit de réunir des producteurs qui s’engagent à respecter une charte des bonnes pratiques garantissant la qualité de leurs produits, et de mettre à leur disposition des locaux ou du foncier pour qu’ils puissent vendre directement leurs produits de saison. Aujourd’hui, 37 départements participent à cette démarche et organisent plus de 2 500 marchés qui sont, en outre, devenus de véritables outils d’animation et de développement des territoires, tout au long de l’année.
Néanmoins, si l’objectif est simple, la mise en œuvre se heurte à deux difficultés majeures : le financement et la lisibilité.
En ce qui concerne le financement, chaque création d’une nouvelle maison des producteurs est le fruit d’un partenariat entre les producteurs, la chambre d’agriculture et les collectivités locales. Or les budgets respectifs sont contraints et l’aide de l’État s’avère nécessaire.
Pour ce qui est de la lisibilité, l’écueil semble être le même que pour le développement de sites marchands en ligne favorisant la consommation locale – voyez la campagne « Dans ma zone » en Occitanie…
Toutes les initiatives sont pertinentes, mais entre les plateformes des chambres consulaires, des associations d’élus, des collectivités, des commerces et des artisans de proximité, les professionnels et les consommateurs finissent par s’y perdre.
Au sortir de la pandémie, face à des budgets contraints, nous verrons un élan réel pour mailler le territoire avec des structures nouvelles, qui mutualisent les forces de chacun. Les agriculteurs le souhaitent, les Français y souscrivent également. Vous savez combien les Français ont toujours manifesté un attachement historique et culturel à leur alimentation.
Aussi, ma question est simple : quelle aide l’État serait-il prêt à apporter pour la création de nouveaux marchés des producteurs ou la professionnalisation des marchés existants ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Madame la sénatrice, je crois beaucoup à ces maisons des producteurs, ainsi qu’aux marchés de gros. Nous parlons souvent de Rungis, qui est un formidable exemple de l’excellence française, mais un peu moins des autres marchés qui maillent notre territoire et ne sont pas souvent associés à certaines initiatives et politiques publiques que nous mettons en œuvre.
Je suis tout à fait d’accord pour accélérer et soutenir le développement de ces maisons des producteurs. Nous pouvons les financer au titre des PAT. Puisque ces projets visent à consolider les filières de l’amont à l’aval, en fonction des projets de territoire, ils peuvent parfaitement soutenir ces structures.
Lorsque l’État engageait entre 40 000 et 50 000 euros en faveur d’un PAT, la collectivité n’utilisait pas forcément ces sommes pour financer d’abord la maison des producteurs, tant les défis étaient déjà nombreux. En engageant des sommes vingt-cinq fois supérieures, soit 80 millions d’euros sur deux ans, versus 6 millions d’euros sur quatre ans, l’État donne des moyens à la hauteur de cette forte ambition, notamment – mesure que j’appelle de mes vœux – pour l’inclusion de ces maisons dans des PAT. Je suis prêt à travailler avec vous sur ces questions.
Madame la présidente, puisque je n’ai pas complètement épuisé mon temps de parole, je me permets de vous remercier pour la manière dont vous avez présidé ce débat et pour la mansuétude dont vous avez fait preuve à l’égard de mes réponses un peu longues.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. Monsieur le ministre, vous savez combien ce débat m’est cher !
Conclusion du débat
Mme la présidente. En conclusion de ce débat, la parole est à M. Frédéric Marchand, pour le groupe auteur de la demande.
M. Frédéric Marchand, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. Là où il y a une volonté, il y a un chemin. Nous sommes tous unanimes, et vous le premier, monsieur le ministre, pour dire que l’accès à une alimentation saine, durable et locale est une priorité. Il s’agit d’une question autant de justice sociale que de santé publique, vous l’avez dit et répété.
Notre débat a permis de mesurer combien les territoires sont essentiels au développement d’une alimentation de qualité et de proximité accessible à tous. Cet enjeu est au cœur du plan de relance et des mesures que vous avez pu, monsieur le ministre, tout au long de ce débat, exposer : création de circuits courts et lutte contre le gaspillage, pratiques exemplaires et filières locales. Il est évident que les territoires ont un rôle clé à jouer pour développer de véritables synergies alimentaires.
Nos territoires ont un rôle clé d’assemblier à jouer, notamment sur la question de l’accélération de la transition agroécologique au service d’une alimentation saine, sûre, durable, locale et de qualité pour tous. Y répondre nécessite une transition vers des modèles plus résilients. L’importance de notre souveraineté alimentaire, les demandes pour des produits locaux exprimées tout au long de cette crise sanitaire, tant par les citoyens que par la Convention citoyenne pour le climat, ne font que confirmer ce besoin.
Monsieur le ministre, ce grand dessein que vous incarnez, lequel est l’alpha et l’oméga de votre action quotidienne, ne peut réussir que si l’on s’appuie – vous l’avez dit – sur la dynamique territoriale partagée par tous les acteurs. Nos agriculteurs ont besoin d’un soutien toujours plus fort pour s’engager dans des modes de production vertueux, pour valoriser leur démarche et trouver des débouchés qui récompensent les efforts réalisés.
Un autre enjeu, dont nous sommes toutes et tous convaincus de l’importance, est la relocalisation de la production agricole par l’encouragement du développement de filières ancrées dans les territoires, le développement des circuits courts et la structuration de nouvelles relations sur l’ensemble de la chaîne entre producteurs et consommateurs.
Ce mois dédié à l’économie sociale et solidaire (ESS) nous donne l’occasion de marteler le message suivant : cette économie et l’alimentation durable et locale doivent, encore et toujours, développer des liaisons heureuses. Le renforcement des circuits de proximité doit être une priorité en vue, et ce n’est pas anodin, de redévelopper l’emploi dans les territoires et de réduire l’impact environnemental de notre alimentation.
Cette crise sanitaire a montré un véritable élan de nos concitoyens vers un retour à la terre. Il convient donc d’amplifier la dynamique en milieu rural et en milieu urbain. Le sujet a été au cœur de nombre de programmes municipaux. Pour ne prendre que l’exemple du département du Nord, un grand nombre de communes et d’intercommunalités ont fait de l’alimentation durable et locale un véritable objet politique. Je ne compte plus le nombre d’élus délégués à l’alimentation durable et locale ; chacun pourra s’en féliciter.
Enfin, nous devons collectivement relever l’immense défi d’une alimentation durable et locale de qualité accessible à tous – vous l’avez également répété, monsieur le ministre. L’accès de nos concitoyens les plus modestes, les plus isolés, à une alimentation locale saine, sûre, durable et de qualité est une priorité à laquelle nous devons consacrer tous les moyens financiers et toutes les énergies. Nous pouvons collectivement saluer l’effort financier que vous avez évoqué, dans le cadre des PAT.
Pour conclure, et ainsi respecter à la lettre les consignes de madame la présidente, vous me permettrez de citer Brillat-Savarin, qui, dans son traité La Physiologie du goût, propose cette formule que je nous invite à faire nôtre collectivement, et qui est sans doute votre mantra quotidien, monsieur le ministre : « La destinée des nations dépend de la manière dont elles se nourrissent. »
Mme la présidente. Merci, mon cher collègue, vous avez été exemplaire ! Monsieur le ministre, je vous cède la parole.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Je souhaite remercier le sénateur Marchand d’avoir inscrit ce débat à l’ordre du jour.
La période actuelle nous montre qu’il convient de ne pas dissocier les sujets. L’alimentation est aussi une question de santé. La santé ne concerne pas seulement l’homme, mais l’ensemble de ses interactions avec le règne animal et le règne végétal. La politique « Une seule santé », en laquelle croient beaucoup d’entre vous, montre que cette approche holistique, globale et d’unité au sein du monde vivant est très certainement pertinente.
La complexité de la nature rend nos chemins certes difficiles à appréhender, mais passionnants à explorer. (M. Frédéric Marchand applaudit.)
Mme la présidente. Nous en avons terminé avec le débat sur le thème : « Alimentation durable et locale. »
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Georges Patient.)
PRÉSIDENCE DE M. Georges Patient
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
5
Communication relative à deux commissions mixtes paritaires
M. le président. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2020 est parvenue à l’adoption d’un texte commun.
En revanche, la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 n’est pas parvenue à l’adoption d’un texte commun.
6
Adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière
Adoption en nouvelle lecture d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière (projet n° 114, texte de la commission n° 121 rectifié, rapport n° 120).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Cédric O, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, nous voici de nouveau réunis, afin d’examiner le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière, dit « Ddadue ».
Ce texte comporte des dispositions intéressant un large spectre de notre activité économique et financière : conformité des produits, gestion du Fonds européen agricole pour le développement rural, le Feader, protection des consommateurs, lutte contre le blanchiment d’argent. Il participe aussi au soutien de la culture, avec les dispositions relatives à la transposition des directives SMA – Services de médias audiovisuels – et Droit d’auteur.
Cette diversité témoigne de l’importante activité normative des différentes instances de l’Union européenne, conduisant les États membres à adapter leur droit économique et financier à l’horizon des années 2020-2021.
Ces adaptations auront un impact considérable. Je prendrai, à ce titre, deux exemples parmi d’autres.
Tout d’abord, le projet de loi élargit le champ d’action des agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF. Cette mesure est une avancée supplémentaire dans la protection de nos consommateurs.
Ensuite, le texte autorise la transposition de la directive SMA et de la directive relative au droit d’auteur. Présentées devant votre assemblée par la ministre de la culture, Mme Bachelot, dont je salue le travail, les dispositions en question visent, d’une part, à assujettir les plateformes installées à l’étranger aux obligations de financement de la production audiovisuelle et cinématographique, et, d’autre part, à garantir aux artistes une rémunération proportionnelle aux fruits de l’exploitation des œuvres.
La transposition de ces directives revêt aujourd’hui un caractère primordial pour les créateurs, dont les rémunérations ont été fortement affectées par la crise sanitaire.
Ce projet de loi permettra également à notre pays, qui présidera le Conseil de l’Union européenne en 2022, d’être exemplaire en matière d’application du droit communautaire.
Déposé le 12 février dernier sur le bureau de votre assemblée, ce texte est de nouveau en discussion dans cet hémicycle, après la réunion d’une commission mixte paritaire non conclusive.
Permettez-moi de saluer le travail de qualité que le Sénat a accompli, à la fois en commission mardi dernier et lors de la première lecture, même si, comme vous le savez, il subsiste un petit point d’achoppement dans les discussions que vous avez avec le Gouvernement.
Le projet de loi comporte ainsi des dispositions issues de vos travaux. Je pense en particulier aux trois nouveaux articles concernant les vétérinaires, dont le dispositif de lutte contre la désertification vétérinaire, sur le modèle de la lutte contre les déserts médicaux.
Je remarque également que le Sénat a été attentif aux impératifs liés à la transposition des directives, en acceptant qu’une partie de ces dernières puisse être transposée par voie d’ordonnance, ce dont je vous remercie.
Il est évidemment dommage que la commission mixte paritaire n’ait pu aboutir, en dépit d’un large consensus sur la plupart des mesures, faute d’accord sur le seul article 4 bis – j’imagine que nous y reviendrons –, qui reprenait la proposition de loi de la présidente Primas visant à garantir le libre choix du consommateur dans le cyberespace. Comme vous le savez, cet article a été supprimé par l’Assemblée nationale, à la suite de l’adoption d’un amendement gouvernemental.
Le Gouvernement avait eu l’occasion de souligner les raisons pour lesquelles il ne pouvait accueillir favorablement ces dispositions. Nous aurons certainement l’occasion d’y revenir tout à l’heure. Je pourrai alors expliquer pourquoi le Gouvernement était convaincu, et le reste, qu’il était préférable de renoncer à l’introduction de telles mesures au niveau national ; nous pensons notamment que celles-ci desserviraient la négociation européenne en cours.
Ce projet de loi complexe comporte des dispositions multiples. Son objet est simple : faire évoluer la réglementation européenne, en la traduisant dans notre droit national. Ces avancées renforceront la protection de nos concitoyens, donneront à l’Union européenne une dimension protectrice et la rendront plus proche des citoyens.
C’est dans cet esprit que sera menée la négociation sur la régulation du numérique, qui ne doit pas à elle seule éclipser, ainsi que je le soulignais, l’ampleur du travail accompli sur ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. André Gattolin. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je serai très bref et n’utiliserai pas les dix minutes de temps de parole qui me sont imparties.
Le 22 octobre dernier, la commission mixte paritaire n’est pas parvenue à l’adoption d’un texte commun. Dieu sait pourtant que tous les sénateurs présents avaient réalisé des efforts en ce sens ! Nous avions fait un pas vers nos amis députés, notamment en ce qui concerne une question sur laquelle étaient apparues quelques oppositions, à savoir la gestion des crédits du Feader.
Ce sont les mesures relatives à la protection des consommateurs sur les plateformes numériques, figurant à l’article 4 bis, qui ont constitué la pierre d’achoppement.
Les députés de la majorité n’ont pas souhaité reprendre ces dispositions, elles-mêmes issues d’une proposition de loi de Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques, estimant inopportune une initiative française en la matière.
J’avoue être toujours aussi surpris à ce sujet. Classiquement, en effet, il existe trois procédures pour faire passer des messages à la Commission européenne : on peut utiliser une résolution de la commission des affaires européennes – je parle sous le contrôle de Colette Mélot (Mme Colette Mélot opine.) –, qui devient, au terme d’un petit périple, la résolution du Sénat ; on peut aussi transmettre un avis politique – je regarde André Gattolin, car nous en avons fait ensemble plusieurs (M. André Gattolin opine) – ; enfin, on peut voter un texte, qui fait savoir à Bruxelles ce que pense la représentation nationale.
Aujourd’hui, le Gouvernement et les députés privilégient un accord européen, que nous appelons certes tous de nos vœux, car l’échelon européen est bien l’échelon pertinent, mais qui risque de prendre du temps. Je le rappelle souvent : l’Europe, c’est le temps long.
C’est pourquoi, au début du mois, le projet de loi a été examiné en nouvelle lecture par l’Assemblée nationale, sur la base du texte que celle-ci avait adopté en octobre dernier en première lecture. Sans surprise, les positions sont restées les mêmes : un accord large sur la plupart des dispositions, mais un désaccord profond et tenace sur l’article 4 bis, dont la suppression a été maintenue par l’Assemblée nationale.
Nous l’avons rétabli en commission la semaine dernière, pour réaffirmer notre point de vue et souligner ainsi ce que nous considérons être une erreur d’appréciation du Gouvernement. Je ne puis imaginer qu’il s’agisse d’une posture de sa part !
Je le dis avec beaucoup de respect à votre endroit, monsieur le secrétaire d’État : entre posture et incohérence, il y a un pas que, je crois, vous avez franchi. (M. le secrétaire d’État s’exclame.)
Je rappellerai tout d’abord que la proposition de loi de Sophie Primas a été adoptée à l’unanimité du Sénat et cosignée par plus de la moitié des sénateurs, sur toutes les travées.
L’enjeu est à la fois de conférer davantage de pouvoir au consommateur en ligne, en ouvrant plus largement le champ des possibles, et de donner, par voie de conséquence, plus de place à l’innovation sur des marchés numériques dominés par quelques géants.
Le dispositif « clé en main » que nous vous proposons permet de consacrer un principe dit « de neutralité des terminaux » – c’est très important – et de favoriser l’interopérabilité des plateformes – cela ne l’est pas moins. Il prévoit également de consacrer un article du code de la consommation à la lutte contre les interfaces trompeuses, toutes ces conceptions d’interface en ligne qui manipulent nos choix, l’exemple type étant celui de la case précochée. Jusqu’ici, les professionnels du numérique ont largement utilisé ces mécanismes.
Or le Gouvernement refuse cette initiative. Il considère qu’il serait malvenu d’agir au niveau national, car une proposition de texte rejoignant ces orientations doit être présentée au début du mois de décembre par la Commission européenne.
Je le répète, c’est méconnaître un fait pourtant bien connu : l’Europe, c’est le temps long, en particulier sur les dossiers de ce type. Il aura par exemple fallu sept années pour qu’aboutisse le règlement général sur la protection des données, le RGPD.
Si nous appelons tous de nos vœux le Digital Services Act européen ou son pendant le Digital Rights Management, on sait très bien que mettre d’accord les 27 États membres risque de prendre beaucoup plus de temps qu’on ne l’imagine.
Voter cet article ne vous ferait courir aucun risque, car, dans l’hypothèse où le texte européen arriverait, celui-ci deviendrait sans objet. Dès lors, pourquoi ne pas avoir joué le jeu en amendant le texte que l’on vous proposait ?
C’est également agir de façon bien différente de ce que vous nous aviez proposé de faire pour la taxation des géants du numérique.
J’ajoute que nos amis allemands, eux, ont légiféré à l’échelon national, ce qui ne les empêchera pas, lorsque le texte européen aura été voté, de se trouver placés sous l’autorité de la même directive transposée.
Nous avons donc l’occasion de faire de la France le fer de lance de cette adaptation de notre droit économique à l’économie numérique, en attendant qu’un texte soit adopté au niveau européen dans les années à venir. C’est pourquoi nous nous sommes assez braqués sur ce texte, monsieur le secrétaire d’État !
Je ne sais pas si vous parviendrez à nous convaincre du bien-fondé de votre position,…
M. Jean Bizet, rapporteur. … mais nous percevons la position du Gouvernement comme une posture politique, que nous ne comprenons pas. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme l’iceberg, la majeure partie de l’Union européenne n’est pas dans la lumière. L’Europe fait surtout parler d’elle en période de crise, mais elle ne se résume pas au Brexit. Elle comprend notamment un marché unique, dont bénéficient chaque jour nos concitoyens. Celui-ci est si présent qu’il finit par n’être même plus remarqué.
Ce marché commun n’est cependant un progrès véritable que si la concurrence y est loyale, si les règles y sont les mêmes pour tous. Le projet de loi que nous examinons en nouvelle lecture contribue à cette harmonisation, puisqu’il vise à adapter diverses dispositions de notre droit aux règles européennes.
En première lecture, le groupe Les Indépendants avait eu l’occasion d’évoquer tout l’intérêt que revêtent les mesures de ce texte, notamment en ce qui concerne les domaines agricole et vétérinaire. Ce texte ne pose d’ailleurs aucune difficulté dans son ensemble.
Pourtant, si nous en débattons de nouveau, c’est parce que la commission mixte paritaire n’est pas parvenue à un accord. La discorde s’est cristallisée sur les dispositions de l’article 4 bis, c’est-à-dire sur celles qui ont été proposées par la présidente Sophie Primas en vue de protéger le consommateur dans le cyberespace.
Je le disais au début de mon propos, l’Union apporte beaucoup aux Européens, mais elle ne fait pas tout. La protection des consommateurs dans le cyberespace reste pour l’instant incomplète.
Bien sûr, le Digital Services Act, qui sera présenté au début du mois prochain, devrait comporter des dispositions à ce sujet, mais son entrée en vigueur est encore lointaine et pourrait prendre des mois, voire des années.
« Ce que Paris conseille, l’Europe le médite ; ce que Paris commence, l’Europe le continue », disait Victor Hugo. (Exclamations admiratives sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean Bizet, rapporteur. Très bien !
Mme Colette Mélot. Ce génie visionnaire a déjà eu raison pour ce qui concerne la protection des données personnelles, domaine dans lequel la France a fait figure de précurseur. C’est encore le cas au sujet de la taxe dite « Gafam », pour Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft.
La France est un acteur essentiel de l’Union européenne. Il est sain qu’elle ne se censure pas dans les initiatives qu’elle peut prendre, au motif que l’Union pourrait s’en saisir plus tard. Notre pays doit assumer sa place et son rôle moteur.
Les dispositions proposées par la présidente Primas sont de qualité. Elles ont d’ailleurs été votées à l’unanimité du Sénat, par mon groupe comme par les autres.
Le cyberespace est présent depuis plusieurs années dans la vie de nos concitoyens, mais la crise que nous traversons le rend encore plus prégnant. À l’heure où les Français sont appelés à télétravailler le plus possible et où le commerce en ligne devient de plus en plus incontournable, la protection du consommateur en ligne doit être une priorité.
Sur internet, le consentement, c’est-à-dire le libre choix du consommateur, n’est pas seulement un enjeu capital des transactions commerciales ; il est aussi un élément majeur de la protection des données personnelles.
Nous espérons donc que les dispositions de l’article 4 bis seront maintenues dans le texte, pour que les Français soient protégés à brève échéance, quitte, le moment venu, à faire évoluer le dispositif au vu des règles européennes.
Mon groupe soutiendra l’adoption de ce texte et la protection du libre choix du consommateur dans le cyberespace. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique.
M. Jacques Fernique. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’interviens au nom du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires et en tant que membre de la commission des affaires européennes : même si je n’étais pas encore sénateur lors des précédentes étapes de ce texte – il y en a eu ! –, c’est sur l’avis de collègues plus anciens dans mon groupe que je fonde mon intervention.
Nous arrivons au terme de l’examen de ce texte dans nos deux assemblées. Cette navette vient de se terminer par un constat d’échec en commission mixte paritaire.
Sur la forme, nous avons dû travailler dans l’urgence un texte dense, dont les dispositions sont très techniques. De nombreux sujets sont abordés : adaptation de nos règles fiscales et financières, modification de notre droit bancaire, droit des consommateurs, droit commercial, gestion des fonds européens, organisation de notre médecine vétérinaire… La liste est longue.
La France présidera le Conseil européen lors du premier semestre de 2022, ce qui implique que nous soyons à jour de la transcription de ces obligations européennes dans notre droit.
Nous pouvons admettre que la période post-Brexit nécessite des adaptations incontournables dès 2021 – nous en avons conscience –, mais nous sommes particulièrement gênés par les dégâts que cette façon de traiter une sorte d’inventaire à la Prévert donne à la qualité du débat parlementaire. Pour moi qui entame un premier mandat sénatorial, j’avoue que la découverte d’une telle méthode me laisse perplexe.
Si nos gouvernements traitent ainsi, par des listes de courses sans cohérence, le nécessaire travail d’adaptation du droit français aux directives et règlements de l’Union, notre travail et nos débats parlementaires perdront considérablement en consistance et en tenue.
Ce texte reflète également la tendance du Gouvernement à privilégier le recours aux ordonnances. Une telle démarche n’est pas de nature à renforcer les liens à nouer entre l’Union européenne et les parlements nationaux, me semble-t-il.
Nous nous trouvons donc à la fin du processus législatif et devons nous prononcer sur l’ensemble de ces articles, qui touchent à des domaines très différents. La commission mixte paritaire a, elle, acté un désaccord. En ce qui nous concerne, nous approuvons les dispositions relatives au secteur vétérinaire, aux droits des consommateurs, au service numérique universel, ou encore aux règles de concurrence et aux télécommunications.
Ce texte prévoit des améliorations en matière d’adaptation du droit de la consommation à l’ère du numérique. Il augmentera les capacités d’action de la direction générale de la concurrence de la consommation et de la répression des fraudes. Il essaie de faire progresser la lutte contre les pratiques commerciales déloyales et vise à améliorer l’organisation de la santé animale et du médicament vétérinaire.
Nous avons en revanche quelques problèmes avec l’article 24 relatif à la gestion du Feader. Cet article prévoit une habilitation à revoir, par ordonnance, la répartition des compétences pour la prochaine programmation pluriannuelle. Or nous doutons que l’ordonnance soit le meilleur moyen de trouver un accord entre l’État et les régions sur la distribution des fonds européens à nos agriculteurs.
Passons du coq à l’âne, puisque ce texte nous y invite. (Mme Sophie Primas rit.) Nous regrettons vivement que l’Assemblée nationale ait supprimé sans autre forme de procès l’article 4 bis, qui avait été adopté à l’unanimité par le Sénat. Cet article reprenait une proposition de loi elle-même votée à l’unanimité du Sénat et cosignée par plus de la moitié des sénateurs, tous groupes confondus.
M. Jérôme Bascher. Tout à fait !
M. Jacques Fernique. Cet article mettait en œuvre les conditions d’une certaine maîtrise de l’activité des géants du numérique, les fameux Gafam.
M. Laurent Duplomb. Grâce à l’excellente présidente Sophie Primas !
M. Jacques Fernique. Pour ce faire, il prévoyait de mettre en place une plus grande neutralité des terminaux, l’interopérabilité des plateformes et le renforcement du contrôle des concentrations, afin de limiter la croissance externe de ces géants du numérique, qui s’opère par des acquisitions agressives. Enfin, il tendait à protéger les consommateurs contre les interfaces trompeuses.
Pour justifier la suppression de cet article, les députés ont simplement argué qu’il gênerait les négociations actuelles et futures sur le sujet au niveau de l’Union européenne. L’exemple de la taxe Gafam montre pourtant que la France peut avancer seule sur un sujet et créer ainsi le débat dans les autres pays européens.
La commission mixte paritaire a échoué sur ce point, ce qui nous conforte dans notre réticence à voter ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Jérôme Bascher. Très bien !
M. le président. La parole est à M. André Gattolin.
M. André Gattolin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous y revoici ! Nous examinons une nouvelle fois ce Ddadue, après une première lecture au Sénat en juillet dernier, l’échec de la commission mixte paritaire le 22 octobre et le vote d’une nouvelle version ce mois-ci à l’Assemblée nationale.
L’ancien président de la commission des affaires européennes qu’est Jean Bizet s’est livré à un exercice pédagogique assez intéressant sur la manière d’intervenir et d’influer sur le droit européen.
Aussi, permettez-moi à mon tour de faire un peu de pédagogie européenne et d’expliquer ce qu’est un Ddadue : c’est un texte portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne. Celles-ci ont succédé aux DDAC, les diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire, qui leur préexistaient avant que le traité de Lisbonne ne transforme la Communauté européenne en Union européenne.
La création de ce type de textes date du milieu des années 1990 en France. Notre pays s’est alors inspiré de la procédure législative italienne. Comme quoi, on critique beaucoup le parlement de l’Italie, mais celui-ci dispose tout de même de procédures qui fonctionnent plutôt bien, notamment pour ce qui concerne sa manière de transposer les textes communautaires dans le droit national de manière groupée.
Nous n’agissions pas ainsi auparavant et transposions systématiquement les textes avec du retard, lequel était parfois colossal, ce qui nous exposait à des sanctions. C’est la raison pour laquelle il a été décidé, au milieu des années 1990, de créer cet objet législatif spécifique à la transposition du droit européen.
À cause des atermoiements autour de ce texte, c’est précisément ce qui risque de se passer, y compris pour des textes qu’il faut transposer en urgence.
Prenons l’exemple de la directive SMA : nous sommes à la limite du délai de transposition, et chaque jour perdu nous fait perdre des millions d’euros ! En effet, cette directive permet de lever des impôts sur Netflix et un certain nombre d’opérateurs de ce type. (M. Laurent Duplomb s’exclame.)
Or le confinement a provoqué l’explosion des recettes de Netflix, qui, en fin d’année, aura 200 millions d’abonnés dans le monde, dont au moins 7 millions en France : chaque minute que nous perdons, c’est de l’argent qui n’entre pas dans les caisses. Le premier objet d’un Ddadue est donc de transposer du droit européen.
Pour en venir à l’objet du délit, je soutiens l’article 4 bis sur le fond, puisque mon groupe et moi-même avons voté la proposition de loi de Mme Primas (Exclamations ironiques sur des travées du groupe Les Républicains.), et que j’ai même défendu l’intérêt de ce texte en commission mixte paritaire.
Simplement, il s’agit d’une mesure de droit interne, qui n’a rien à faire dans un Ddadue. On détourne de plus en plus le sens de ces textes : peu à peu, ils deviennent des sortes de véhicules balais législatifs, dans le cadre desquels, à force d’ajouter des dispositions, on favorise souvent ce que l’on critiquait et ce que l’on passe son temps par la suite à réparer, à savoir les surtranspositions. Il faut donc raison garder.
J’apprécie beaucoup le travail de Sophie Primas, mais, lors de l’examen des articles, j’évoquerai peut-être les reproches que nous lui adressons sur le fond et sur la forme.
Tout d’abord, ce texte est français, voire très franco-français, dans sa façon d’aborder la question de la régulation numérique, puisqu’il passe par l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse, l’Arcep, pour garantir le libre choix du consommateur.
En outre, le texte fait allusion à la loi allemande, alors que celle-ci n’a pas été votée. Or c’est précisément parce qu’il s’agit d’un projet qu’il parvient à faire pression sur l’état de l’art et qu’il pousse la Commission à avancer. Je ne suis donc pas sûr que ce soit en suivant une logique de prétransposition, par anticipation d’un texte que nous ne connaissons pas, que nous respecterons fidèlement la rigueur du travail législatif.
Pour ces raisons, nous ne voterons pas ce texte. Nous ne nous prononcerons pas contre non plus, parce que nous sommes d’accord avec 95 % de ce qu’il prévoit. Il est temps d’avancer et de régler les problèmes qui sont les plus pressés, à savoir la transposition en urgence de certaines directives.
M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
Mme Maryse Carrère. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ces projets de loi Ddadue sont désormais des marronniers de l’éventail parlementaire.
Derrière cet acronyme et l’apparente complexité qu’il revêt, ce sont près de dix-huit directives et quatorze règlements européens que nous nous apprêtons à introduire dans le droit français. Parmi eux, nombre d’entre eux auront pourtant un impact important sur le quotidien de nos compatriotes, et leur apport mériterait d’être davantage souligné.
En première lecture, le RDSE, par la voix de Josiane Costes, avait insisté sur l’harmonisation des règles financières pour prévenir les infractions relatives au blanchiment, notamment liées au terrorisme.
Elle avait aussi mis en avant l’importance du Feader pour nos agriculteurs et nos territoires ruraux. La clarification de la répartition des tâches entre États et régions est la bienvenue. Le transfert vers la région doit être non pas la marque d’un désengagement de l’État, mais celle d’une recherche de subsidiarité, où le niveau le plus efficient – ici la région – doit être compétent, car il est le plus à même de fluidifier l’octroi de ces aides.
Lors de la première lecture, nous étions parvenus à pointer les réels apports de ce texte concernant la protection des consommateurs sur les plateformes en ligne, que ce soit l’information ou la protection des utilisateurs de réseaux sociaux ou le délai de rétractation face à des pratiques commerciales déloyales.
Dans cette période où nos petits commerces sont menacés, c’est adresser un signal important que de sanctionner davantage les fraudeurs et protéger les consommateurs.
Les dispositifs inspirés par la proposition de loi, adoptée par le Sénat le 19 février dernier, visant à garantir le libre choix du consommateur dans le cyberespace, dispositifs introduits dans ce projet de loi à l’article 4 bis, répondent parfaitement à cette exigence.
En ce qui concerne l’interopérabilité, mon groupe avait déjà eu l’occasion de souligner son importance lors de l’examen de la proposition de loi visant à lutter contre les contenus haineux sur internet. Cette faculté d’aller simplement d’une plateforme à l’autre nous permettra, dans un cas comme dans l’autre, de lutter contre les dérives.
S’y ajoute un arsenal législatif permettant de lutter contre les interfaces numériques trompeuses, qui, encore aujourd’hui, mettent à mal notre liberté de choix en ligne.
Aussi, les arguments de nos collègues de l’Assemblée nationale, qui nous expliquent que l’article 4 bis serait un cavalier législatif, me convainquent peu.
Quel signal envoie-t-on à nos concitoyens lorsque l’on identifie un problème, que l’on trouve une solution pour le résoudre, que le Sénat vote celle-ci à l’unanimité, mais que l’on nous explique qu’elle ne peut être maintenue dans le texte, faute d’examen par l’Assemblée nationale ?
Ce qui dérange aujourd’hui nos collègues députés ne les gênait pas il y a deux semaines quand ils examinaient le projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique, ou ASAP, dans lequel ce n’était pas un article, mais bien quatre-vingt-un, qui auraient mérité d’être réexaminés de manière classique.
Certes, il y a la perspective d’un accord européen, mais personne ne peut dire quand il sera conclu, et la protection de nos concitoyens ne peut plus attendre.
Au-delà de ces réserves, il n’y a pas de grands désaccords de fond avec l’Assemblée nationale. Le groupe RDSE, s’il conserve certaines interrogations, votera donc dans sa grande majorité le texte issu de la commission des finances. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, INDEP et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Jérémy Bacchi.
M. Jérémy Bacchi. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’examen des projets de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne constitue un exercice parlementaire que nous n’apprécions guère : trop de sujets essentiels sont réunis dans un même texte, alors qu’ils mériteraient un examen approfondi.
Le projet dont nous débattons pour la seconde fois aujourd’hui n’échappe malheureusement pas à la règle.
Il touche à de nombreux domaines : droit de la consommation, réglementation financière et douanière, santé animale, transparence dans les relations interentreprises au sein de la chaîne d’approvisionnement agricole et alimentaire, droit de la concurrence, lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, etc.
Sur le fond, certaines de ses dispositions vont dans le bon sens. Les mesures en faveur de la protection des droits des consommateurs, ainsi que les mesures de lutte contre les pratiques commerciales déloyales dans la chaîne d’approvisionnement agricole et alimentaire sont les bienvenues. Celles qui sont destinées à lutter contre les fausses déclarations d’origine douanière des marchandises ou à mieux contrôler les flux d’argent liquide ne peuvent que recueillir notre assentiment.
S’agissant du droit de la consommation, la nouvelle donne européenne se veut une avancée concrète dans la protection des consommateurs, avec une meilleure prise en compte de leurs droits, notamment dans le cyberespace. J’indique, à cet égard, que le Sénat a récemment débattu et adopté une proposition de loi sur le sujet.
Vu les délais de transposition – les États membres ont, je le rappelle, jusqu’au 1er juillet 2021 pour transposer ces directives, qui seront applicables à compter du 1er janvier 2022 –, il eût été pour nous opportun de soumettre un projet de loi dédié de transposition sur le sujet, d’autant que cette nouvelle donne européenne est composée d’un volet traitant des recours collectifs, volet en voie de finalisation.
Sur les aspects financiers du projet de loi, les dispositions permettant de sécuriser l’espace européen en matière de fraudes à la douane, de non-respect des lois anti-dumping et de contrôle des flux d’argent, par le renforcement des obligations et sanctions, semblent positives.
Pour autant, nous ne cautionnons pas que l’on développe, en parallèle, une Union européenne des capitaux. Il n’est pas acceptable de participer à la construction d’une forteresse européenne solidifiée autour des intérêts des marchés financiers et de la spéculation par la libre circulation interne des capitaux.
Alors que l’on donne un pouvoir croissant aux acteurs financiers, on a le sentiment d’une « invisibilisation » des États membres dans une union qu’ils subissent trop souvent. Les États doivent pouvoir agir et ne pas avoir les mains liées au nom de principes tels que la concurrence ou la libre circulation des capitaux. Les crises nous montrent l’importance d’une régulation.
C’est pourquoi nous ne sommes pas favorables à la transposition, dans ces conditions, des dispositions européennes relatives à la transparence des aides d’État à caractère fiscal.
Il ne s’agit pas, comme on pourrait naïvement le croire, de faire en sorte que les citoyens et acteurs économiques soient informés de manière transparente de l’emploi de l’argent public et des allégements de charges accordées aux entreprises ; il s’agit, en réalité, de mieux identifier et contrôler les potentielles atteintes à la libre concurrence et d’éviter que l’État ne soutienne, par des mesures ciblées, un secteur industriel en péril, au moment même où nous avons plus que jamais besoin d’un État stratège et interventionniste.
Enfin, nous ne comprenons pas, comme d’autres l’ont dit avant moi, la suppression de l’article 4 bis par l’Assemblée nationale et la volonté du Gouvernement de confirmer cette suppression.
Adopté à l’unanimité par le Sénat, l’article 4 bis propose un nouvel encadrement des géants du numérique, au travers de trois grandes dispositions : la neutralité des terminaux, l’interopérabilité des plateformes et le renforcement du contrôle des concentrations afin d’appréhender les acquisitions dites prédatrices.
Après avoir repoussé tout moratoire sur les implantations d’Amazon, monsieur le secrétaire d’État, vous refusez à présent de porter le fer contre les géants du numérique, servant ainsi des intérêts qui ne sont pas, de notre point de vue, conformes à l’intérêt général.
Pour toutes ces raisons, le groupe CRCE votera contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Michel Canevet. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Michel Canevet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le groupe Union Centriste, particulièrement attaché à l’Europe, apprécie de trouver dans ce texte un certain nombre de règles allant dans le sens de la construction de l’Union européenne et du marché unique européen.
Ce que nous regrettons, monsieur le secrétaire d’État, c’est le recours beaucoup trop important aux ordonnances. Nous vous le disons clairement, nous préférons, de manière générale, que les règles soient élaborées par le Parlement et inscrites dans le dur de la loi.
Ce texte est néanmoins très attendu, comme André Gattolin a pu le souligner, pour tout ce qui concerne les droits d’auteur et droits voisins ou les services de médias audiovisuels. Oui, il est urgent que ces dispositions puissent être traduites dans notre droit.
Le groupe Union Centriste tient aussi à saluer les apports du Sénat tout au long de l’examen de ce projet de loi.
Je pense notamment aux questions vétérinaires, chères à notre rapporteur, même si je sais que, sur le sujet, nous devons ces apports à la commission des affaires économiques. Il est important de travailler sur le maillage et la présence en zone rurale.
C’est tout autant le cas en matière de gestion du Feader, gestion que notre groupe, monsieur le secrétaire d’État, souhaite la plus déconcentrée possible. Pourquoi ne pas envisager, d’ailleurs, de mettre en place une gestion déconcentrée pour les régions qui souhaiteraient gérer directement ces fonds et de laisser cette responsabilité à l’État pour celles qui ne le souhaiteraient pas ? Même si l’attribution des aides européennes pour la période 2014-2020 a été laborieuse dans sa mise en place, nous pensons qu’une attribution au plus près du terrain apporterait une plus grande efficience au dispositif.
Ce projet de loi traite aussi de la question du service universel en matière de télécommunications – un sujet qui vous est cher, monsieur le secrétaire d’État, puisque nous affichons des ambitions dans le domaine du numérique, notamment s’agissant du déploiement des réseaux dans notre pays.
Le plan France très haut débit, que vous pilotez, vise l’objectif suivant : à la fin de 2020, tous nos concitoyens doivent bénéficier d’une desserte d’au moins 8 mégabits par seconde. Je crois qu’un effort s’impose, monsieur le secrétaire d’État, sans quoi nous n’y parviendrons pas partout. Chez moi, nous sommes en moyenne à 1,26 mégabit par seconde ; c’est dire l’effort à fournir pour que cet objectif ambitieux qui a été fixé – je le rappelle : 8 mégabits par seconde pour tous, à la fin de 2020 – soit atteint.
Je profite donc de l’examen de ce texte, qui aborde cette question du service universel, pour rappeler le sens du principe d’universalité : chacun doit avoir accès au numérique, d’autant que ce dernier prend une place chaque jour plus grande au sein de notre société.
Comme l’ont dit les orateurs précédents et comme le dira Laurent Duplomb, que je sais particulièrement attaché au sujet, la régulation économique des plateformes numériques est tout à fait essentielle.
Le Sénat, sous l’égide de Sophie Primas, a beaucoup travaillé, et de façon extrêmement efficace, sur la question. Je rejoins Jean Bizet : il faut maintenant avancer – nous l’avons fait sur un certain nombre d’autres sujets, comme la taxe sur les services numériques, dite « GAFA », sur laquelle nous avons été précurseurs.
M. Laurent Duplomb. Exactement !
M. Michel Canevet. Oui, malgré le travail collectif engagé, nous n’avons pas attendu que l’on se mette d’accord à l’échelle internationale. Il faut savoir être précurseur à certains moments ! Dans ce domaine, on le voit bien, tout évolue très rapidement. Si nous ne sommes pas capables de mettre en place rapidement des outils de régulation, c’est l’impasse et, comme l’a souligné André Gattolin, nous risquons non seulement de perdre des recettes, mais aussi de perdre en efficience dans cette mise en place.
Dans le domaine du numérique, on le sait, il y a le déploiement des réseaux, que j’ai évoqué précédemment, et le développement des usages.
Ces usages ne peuvent se développer que si l’on y met les moyens, en affichant une ambition numérique extrêmement forte. Cela passe, notamment, par le fait de permettre aux entreprises de poursuivre la mise au point de dispositifs digitaux, en particulier par le recours au crédit d’impôt recherche – nous avons là un outil essentiel, que nous devons manier avec souplesse.
Au sein du groupe Union Centriste, nous pensons que nous avons une place importante à prendre dans ce domaine du numérique. Mais pour cela, il faut que, au plus haut niveau de l’État, il y ait la volonté d’avancer, de réguler et d’imposer des règles du jeu extrêmement claires.
Ce fut le sens du combat mené par le Sénat sur ce texte et, comme l’ensemble de mes collègues, je ne puis que déplorer que le Gouvernement n’ait pas saisi cette chance de proposer une orientation claire, permettant de faire progresser le traitement de cette question à l’échelle internationale. Je tenais à le dire.
Cela étant, le groupe Union Centriste votera ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Patrice Joly. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Patrice Joly. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, d’autres avant moi ont expliqué les raisons pour lesquelles nous sommes réunis ici, aujourd’hui, afin de nous prononcer une nouvelle fois sur ce projet de loi.
La commission mixte paritaire à laquelle j’ai eu l’honneur de participer s’est réunie le 22 octobre dernier et n’est pas parvenue à un accord. L’ensemble des membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain le regrettent véritablement.
Au-delà de cette déception, on ne peut pas dire que nous soyons extrêmement surpris de la tournure prise par l’examen du texte… Celle-ci témoigne de la difficulté qu’éprouvent le Gouvernement et sa majorité avec le fonctionnement normal d’une démocratie parlementaire.
Sur la forme, nous avons déjà eu l’occasion de le dénoncer à de multiples reprises, l’ensemble de ce texte reflète la tendance du Gouvernement à privilégier le recours aux ordonnances. Nous le déplorons. Cette démarche n’est pas de nature à renforcer les liens indispensables entre les instances européennes et les instances nationales, ainsi que l’articulation de leurs travaux.
Cette réserve étant formulée, face à l’urgence de certaines transpositions, nous avions néanmoins accepté l’essentiel des habilitations sollicitées, en précisant parfois leur portée.
Sur le fond, ce texte sorti du Sénat et enrichi de nos propositions apparaissait comme globalement positif, au-delà même du fait qu’il permettait la transposition de nombreuses dispositions très attendues.
Ces dispositions ayant été déclinées par de précédents orateurs, je n’en mentionnerai que quelques-unes.
Je pense, en particulier, aux moyens accordés aux autorités françaises pour lutter contre la fraude fiscale, le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, par la mise en œuvre de nouvelles règles relatives aux mouvements d’argent liquide en provenance ou à destination des pays tiers et le renforcement des sanctions en cas de violation de la réglementation douanière.
Je pense également aux dispositions relatives aux techniques des plateformes numériques de vente en ligne, qui créent des blocages géographiques injustifiés au sein du marché intérieur. Il fallait bien évidemment interdire ces pratiques, pour favoriser la fluidité des marchés dans l’intérêt des consommateurs.
Ces dispositions étaient particulièrement souhaitables. Malheureusement, lors de la CMP, nous avons dû faire face à plusieurs points de désaccord, aboutissant, malgré notre bonne volonté, à un échec.
Ainsi, sur l’initiative du Gouvernement, l’Assemblée nationale a rétabli l’article 24 relatif à la répartition future des compétences entre l’État et les régions en matière de gestion du Feader. Nous n’en voulions pas.
Nous avions supprimé cette habilitation pour deux raisons : d’une part, les intentions du Gouvernement n’étaient pas clairement établies à l’époque, ce qui suscitait l’inquiétude des régions ; d’autre part, pour un tel sujet touchant à l’aménagement du territoire et à la décentralisation, nous jugions préférable de passer par l’examen d’une loi, permettant un vrai et large débat en séance.
Nous n’avons malheureusement pas été écoutés. Mais nous étions prêts à y renoncer, en contrepartie d’une avancée sur les mesures que nous avions introduites dans le projet de loi, à savoir les dispositions de la proposition de loi de notre collègue Sophie Primas visant à garantir le libre choix du consommateur dans le cyberespace, texte cosigné par un grand nombre de sénateurs et voté à l’unanimité en février dernier.
L’article 4 bis, adopté lui aussi à l’unanimité au Sénat, proposait un nouvel encadrement des géants du numérique, au travers de trois grandes dispositions : la neutralité des terminaux, l’interopérabilité des plateformes et le renforcement du contrôle des concentrations, afin d’appréhender les acquisitions dites « prédatrices » des géants du numérique. Un quatrième dispositif avait été ajouté pour protéger les consommateurs contre les interfaces trompeuses.
Ces enjeux sont décisifs, et le Gouvernement avait pourtant indiqué en séance qu’ils étaient au cœur de sa réflexion. Mais il a rejeté l’intégralité des propositions du Sénat, au motif, notamment, qu’elles pourraient créer des distorsions majeures et affecter le dynamisme de l’écosystème des start-up du numérique, qui, pour bon nombre d’entre elles, se développent dans une perspective de rachat par une plateforme plus grande.
On ne peut que regretter cette appréciation, d’autant que l’Assemblée nationale a fini par suivre le Gouvernement dans ce rejet de l’article 4 bis. Nous aurions pu ainsi orienter les travaux de la Commission européenne vers une régulation plus agile, plus efficace, qui ne bride ni n’empêche l’innovation et qui permette de mettre un terme à la dynamique actuelle d’enfermement du consommateur.
Il semble que l’Allemagne s’engage dès à présent dans cette direction à laquelle nous renonçons… Les États-Unis, eux-mêmes, semblent affermir leur régulation des géants du numérique, comme en témoigne l’action engagée par le Département de la justice contre Google pour abus de position dominante. Il est essentiel que la France ouvre la voie en Europe, en attendant qu’une solution européenne soit arrêtée.
Oui, c’est au niveau de l’Union européenne qu’il faut agir ! Celle-ci s’est imposée comme un acteur majeur de la régulation numérique, et la Commission européenne fait preuve de volontarisme sur le dossier. Notre ambition au Sénat est de peser dans les négociations, notamment celles qui auront lieu autour du futur Digital Services Act.
C’était le sens de nos propositions, qui fixaient un cap et une exigence française. C’était aussi le sens des dispositions que nous avions adoptées pour, enfin, donner du pouvoir aux consommateurs et, derrière eux, à toutes les entreprises qui se retrouvent impuissantes face aux géants du numérique, et cela en agissant dès à présent.
Aujourd’hui, nous devons faire face à ce rendez-vous manqué, qui aurait été, sans nul doute, un signe encourageant et un soutien à notre gouvernement dans les négociations. N’ayez peur ni du Parlement ni des corps intermédiaires, monsieur le secrétaire d’État ! Sachez, au contraire, vous appuyer sur eux !
Opposés au texte de l’Assemblée nationale, nous voterons donc le texte tel que la commission des finances l’a amendé, c’est-à-dire reprenant les dispositions de l’article 4 bis. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE. – Mme Sophie Primas et M. Laurent Duplomb applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Laurent Duplomb. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la commission mixte paritaire a failli être conclusive.
Nos collègues députés, y compris, j’y insiste, certains qui appartiennent à la majorité, étaient d’accord pour aboutir à un tel résultat, car ils ne concevaient pas une seconde que nos négociations puissent échouer sur un sujet aussi consensuel que la régulation des géants du numérique.
Pourtant, au dernier moment, le Gouvernement a tranché : ce sera non ! Non, les consommateurs n’ont pas le droit de recouvrer leur libre choix en matière de smartphone. Non, ils ne pourront pas facilement migrer d’une plateforme à une autre grâce à l’interopérabilité. Non, la lutte contre les interfaces trompeuses n’est pas une priorité.
Pourquoi ce non, me direz-vous ? Pourquoi refuser ces nouveaux droits aux Français ? Parce que la Commission européenne a enfin décidé de publier ses propositions sur le sujet en décembre prochain ? C’est la raison avancée par le Gouvernement pour ne pas agir au niveau national.
Je souhaite tout d’abord rappeler qu’il n’y a pas de débat entre nous sur la question de savoir s’il faut agir au niveau européen ; très clairement, c’est l’idéal !
Le débat se situe ailleurs, sur la question de savoir si, dans l’attente d’un texte européen, les parlements nationaux doivent se dessaisir de leur pouvoir et se faire hara-kiri. Pour notre part, nous répondons par la négative : il ne faut pas que les parlements nationaux renoncent à leurs prérogatives sous prétexte que la Commission européenne est sur le point de publier une première version de texte. Ce serait dangereux, non seulement d’un point de vue démocratique, mais aussi parce que, dans les cas comme celui qui nous occupe, les négociations européennes prennent beaucoup de temps, on le sait.
Qui peut croire que la bataille au niveau européen durera quelques mois seulement ? Elle sera d’une très grande intensité. À la fin du mois d’octobre dernier, la presse a révélé les intentions de Google pour contrer le texte proposé par la Commission européenne. Tous les moyens seront les bons : aide au gouvernement américain, sollicitation des alliés transatlantiques, exploitation des divisions entre ministères européens, etc. Bref, il faudra du temps avant que l’initiative européenne ne trouve une application sur le terrain.
Or du temps, monsieur le secrétaire d’État, nous n’en avons pas ! Pour mettre fin à l’hégémonie de quelques-uns sur internet, hégémonie qui se fait au détriment des consommateurs et de nos entreprises, c’est maintenant qu’il faut agir. Nous avons besoin d’un texte applicable sans délai.
D’ailleurs, si j’en crois une récente interview que vous avez donnée sur le sujet connexe de la haine en ligne, c’est aussi, désormais, votre conviction. Permettez-moi de vous citer : « Le processus législatif européen est long, et le texte pourrait ne pas être adopté avant plusieurs mois […]. Il est donc indispensable d’agir dans l’intervalle pour responsabiliser davantage les plateformes. » Ce n’est pas moi qui le dis, c’est vous !
Dois-je comprendre que vous vous ralliez à notre méthode, monsieur le secrétaire d’État, et que, puisque vous nous rejoignez sur le fond, il n’y a plus de désaccord ?… Si tel est le cas, il vous suffit de retirer votre amendement de suppression. Faites-le sans délai ! (Rires sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Sophie Primas applaudit.)
Mais non, l’amendement de suppression est toujours là ! Comment voulez-vous que les Français comprennent l’action du Gouvernement, si vous dites tout et son contraire ? D’un côté, il faut avancer sans attendre l’Europe ; de l’autre, il ne faut surtout pas avancer tant que l’Europe n’a pas entamé son processus législatif. Comment voulez-vous que les Français comprennent ? Et, dans l’un et l’autre cas, vous êtes d’accord sur le fond. C’est vraiment compliqué de vous suivre !
Au-delà de cette contradiction interne dans votre raisonnement, comment pouvez-vous assumer devant nous une telle position, quand l’Allemagne avance de son propre côté ?
Je souhaite évoquer brièvement ici l’action menée par le gouvernement allemand en la matière, car c’est un sujet que notre propre gouvernement prend un soin tout particulier à ne pas mentionner.
À l’occasion de l’examen de l’équivalent du présent texte, l’Allemagne va instaurer une régulation économique des géants du numérique. Certes, M. André Gattolin a raison de dire que le texte n’est pas encore voté, mais cette régulation est proposée, ce qui n’est pas le cas en France. En effet, c’est exactement ce que nous voulons faire, nous, les sénateurs, et ce à quoi le gouvernement français s’oppose.
L’Allemagne va même plus loin que ce que nous proposions d’expérimenter au niveau national, car notre perspective était, depuis le début, de trouver un consensus ; je vous rappelle à ce titre que nous avons consenti, avec Jean Bizet, à retirer certains articles en commission mixte paritaire.
Je termine sur ce sujet en vous citant de nouveau, monsieur le secrétaire d’État – là, c’est le pompon : « L’initiative présentée le 9 septembre dernier fait consensus en Allemagne et devrait être adoptée en début d’année prochaine ».
Franchement, soyons sérieux ! Qu’est-ce qui vous pousse à refuser d’agir au niveau national, alors que, d’une part, nous ne serions pas les seuls à le faire et que, d’autre part, vous avez accepté de le faire dans d’autres domaines, comme la fiscalité, les fausses informations ou la haine en ligne, pour ne prendre que trois exemples ?
Partout sur la planète, il y a une prise de conscience. Nous proposons que la France soit précurseur, pour offrir à l’Europe et au monde un premier retour d’expérience.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez ici une occasion de faire taire toutes les critiques que l’on entend depuis des années sur le renoncement des élites françaises en matière numérique, sur l’impuissance publique numérique. C’est votre dernière chance. Saisissez-la ! (Sourires.) L’histoire et les Français nous regardent, et ces derniers, comme la plupart de nos collègues députés, qui n’envisageaient pas un échec en CMP, ne comprendraient pas bien non plus la situation si on la leur expliquait.
Rien que pour cela – je me permets de vous le dire, monsieur le secrétaire d’État –, vous auriez pu vous passer de l’attitude, que l’on pourrait qualifier de vexatoire, que vous avez adoptée devant nos collègues députés lors de la nouvelle lecture du texte. Vous avez osé dire que la présidente Sophie Primas avait écrit l’article sur les dark patterns « avec les pieds ». Ce n’est pas très correct !
M. Laurent Duplomb. On dit tellement de choses que l’on regrette ensuite, monsieur le secrétaire d’État… Mais vous l’avez bien dit, et je ne trouve pas cela très correct ! Connaissant très bien Mme Sophie Primas, comme vous, il n’était pas nécessaire d’entrer dans ce genre de débats.
La proposition que nous faisions était honnête ; elle allait dans le sens de l’évolution de la société. Vous n’avez pas voulu l’entendre, préférant faire de la politique, plutôt que d’agir concrètement.
D’ailleurs, interrogeons-nous : à qui cette situation profitera-t-elle ? Certainement pas aux Français ! Aux quelques firmes américaines concernées, qui, entre nous, n’avaient pas besoin de ce cadeau de la part du gouvernement français.
En conclusion, et parce que cette question ne doit pas, à elle seule, expliquer la totalité du texte, je souhaite rappeler que nous étions parvenus à une rédaction globalement consensuelle, pour ne pas dire totalement consensuelle, hormis, justement, ce point.
Par ailleurs, si la plupart des dispositions étaient issues de textes européens, nous en avons également inséré certaines, par exemple sur les déserts vétérinaires – notez ici encore, monsieur le secrétaire d’État, que nous n’avons pas attendu l’Europe.
Je dirai même que, sur le fond, il y a consensus sur pratiquement tout le texte, y compris sur l’article 4 bis. Dès lors, monsieur le secrétaire d’État, dans un élan de générosité, après avoir reconnu votre erreur et regretté vos propos concernant la présidente Sophie Primas,…
Mme Sophie Primas. Et ses pieds ! (Sourires.)
M. Laurent Duplomb. … acceptez de retirer votre amendement de suppression. Cela vous honorera et vous ferez œuvre utile envers les Français ! (Vifs applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’union européenne en matière économique et financière
Chapitre Ier
Dispositions relatives à la protection des consommateurs
Article 1er
(Non modifié)
I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances, dans un délai de dix mois à compter de la publication de la présente loi, les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la transposition de la directive (UE) 2019/770 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2019 relative à certains aspects concernant les contrats de fourniture de contenus numériques et de services numériques et de la directive (UE) 2019/771 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2019 relative à certains aspects concernant les contrats de vente de biens, modifiant le règlement (UE) 2017/2394 et la directive 2009/22/CE et abrogeant la directive 1999/44/CE, ainsi que les mesures de coordination et d’adaptation de la législation liées à cette transposition.
II. – (Non modifié)
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er.
(L’article 1er est adopté.)
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Article 3
(Non modifié)
Le code de la consommation est ainsi modifié :
1° La section I du chapitre II du titre III du livre Ier est complétée par une sous-section 10 ainsi rédigée :
« Sous-section 10
« Blocage géographique injustifié
« Art. L. 132-24-1. – Est passible d’une amende administrative, dont le montant ne peut excéder 15 000 euros pour une personne physique et 75 000 euros pour une personne morale, tout manquement aux dispositions du règlement (UE) 2018/302 du Parlement européen et du Conseil du 28 février 2018 visant à contrer le blocage géographique injustifié et d’autres formes de discrimination fondée sur la nationalité, le lieu de résidence ou le lieu d’établissement des clients dans le marché intérieur, et modifiant les règlements (CE) n° 2006/2004 et (UE) 2017/2394 et la directive 2009/22/CE, constitué par le fait :
« 1° De bloquer ou de limiter l’accès d’un client à une interface en ligne ou de le rediriger sans son consentement vers une version différente de l’interface à laquelle il a initialement voulu accéder en violation des interdictions prévues à l’article 3 du même règlement ;
« 2° D’appliquer des conditions générales d’accès aux biens et aux services en méconnaissance de l’article 4 dudit règlement ;
« 3° D’appliquer des conditions de paiement discriminatoires en violation de l’article 5 du même règlement.
« Cette amende est prononcée dans les conditions prévues au chapitre II du titre II du livre V du présent code. » ;
2° Après le 24° de l’article L. 511-7, il est inséré un 25° ainsi rédigé :
« 25° Du règlement (UE) 2018/302 du Parlement européen et du Conseil du 28 février 2018 visant à contrer le blocage géographique injustifié et d’autres formes de discrimination fondée sur la nationalité, le lieu de résidence ou le lieu d’établissement des clients dans le marché intérieur, et modifiant les règlements (CE) n° 2006/2004 et (UE) 2017/2394 et la directive 2009/22/CE. » ;
3° L’article L. 141-2 est ainsi rétabli :
« Art. L. 141-2. – Les règles en vigueur en application des dispositions du règlement (UE) 2018/302 du Parlement européen et du Conseil du 28 février 2018 visant à contrer le blocage géographique injustifié et d’autres formes de discrimination fondée sur la nationalité, le lieu de résidence ou le lieu d’établissement des clients dans le marché intérieur, et modifiant les règlements (CE) n° 2006/2004 et (UE) 2017/2394 et la directive 2009/22/CE sont applicables à Saint-Barthélemy et à Saint-Pierre-et-Miquelon. » – (Adopté.)
Article 4
(Non modifié)
Le code de la consommation est ainsi modifié :
1° La section XII du chapitre Ier du titre II du livre Ier est ainsi rétablie :
« Section XII
« Blocage géographique injustifié
« Art. L. 121-23. – Sous réserve des dispositions de l’article L. 132-24-1, il est interdit à un professionnel :
« 1° De bloquer ou de limiter l’accès d’un consommateur à son interface en ligne, par l’utilisation de mesures technologiques ou autres, pour des motifs liés au lieu de résidence sur le territoire national de ce consommateur.
« Il est également interdit à un professionnel de rediriger, pour des motifs liés à son lieu de résidence, un consommateur vers une version de son interface en ligne qui est différente de celle à laquelle il a initialement voulu accéder, sauf s’il a expressément donné son consentement à cet effet. Lorsque le consommateur est redirigé après avoir donné son consentement, il doit pouvoir continuer à accéder facilement à la version de l’interface en ligne du professionnel à laquelle il a initialement voulu accéder.
« Les interdictions énoncées aux deux premiers alinéas du présent 1° ne sont pas applicables lorsque le blocage, la limitation de l’accès ou la redirection sont nécessaires en vue de satisfaire une exigence légale applicable aux activités du professionnel ; dans de tels cas, le professionnel fournit une explication claire et précise au consommateur sur les raisons pour lesquelles le blocage, la limitation d’accès ou la redirection sont nécessaires à des fins de mise en conformité ;
« 2° D’appliquer, pour des motifs liés au lieu de résidence sur le territoire national du consommateur, des conditions générales de vente de biens ou de fourniture de services différentes dans les cas où ce consommateur cherche à :
« a) Acheter des biens auprès d’un professionnel et que ces biens sont soit livrés en un lieu vers lequel la livraison est proposée dans les conditions générales de vente du professionnel, soit retirés en un lieu défini d’un commun accord entre le professionnel et le consommateur et pour lequel le professionnel propose une telle option dans ses conditions générales de vente ;
« b) Obtenir des services fournis par un professionnel par voie électronique ;
« c) Obtenir des services d’un professionnel autres que des services fournis par voie électronique, en un lieu situé dans la zone géographique où le professionnel exerce son activité.
« Les interdictions énoncées aux quatre premiers alinéas du présent 2° n’empêchent pas le professionnel de proposer des conditions générales de vente, notamment des prix de vente nets, qui varient d’un endroit à l’autre et qui sont proposées, de manière non discriminatoire, à des clients résidant dans une zone géographique spécifique ou à certains groupes de clients ;
« 3° D’appliquer, pour des motifs liés à la localisation, sur le territoire national, de la résidence du consommateur, de son compte de paiement, du prestataire de services de paiement ou de l’émission de l’instrument de paiement, des conditions différentes aux opérations de paiement réalisées par les consommateurs à l’aide des moyens de paiement acceptés par ce professionnel, lorsque :
« a) L’opération de paiement est effectuée au moyen d’un service de paiement mentionné aux 1° à 7° du II de l’article L. 314-1 du code monétaire et financier ;
« b) Les exigences en matière d’authentification sont remplies en application de l’article L. 133-4 du même code ;
« c) L’opération de paiement est effectuée dans une devise que le professionnel accepte.
« Lorsque des raisons objectives le justifient, l’interdiction énoncée au présent 3° ne fait pas obstacle à ce que le professionnel suspende la livraison des biens ou la prestation du service jusqu’à ce qu’il reçoive la confirmation que l’opération de paiement a été dûment engagée. » ;
2° La sous-section 10 de la section I du chapitre II du titre III du même livre Ier, telle qu’elle résulte de l’article 3 de la présente loi, est complétée par un article L. 132-24-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 132-24-2. – Le fait pour tout professionnel de méconnaître les interdictions prévues aux 1° à 3° de l’article L. 121-23 est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 15 000 euros pour une personne physique et 75 000 euros pour une personne morale.
« Cette amende est prononcée dans les conditions prévues au chapitre II du titre II du livre V. » ;
3° Au 1° de l’article L. 511-5, la référence : « et 11 » est remplacée par les références : « , 11 et 12 ». – (Adopté.)
Article 4 bis
I. – Le code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° Après le 9° de l’article L. 32, il est inséré un 9° bis… ainsi rédigé :
« 9° bis… Interopérabilité.
« L’interopérabilité est la capacité que possède un produit ou un système, dont les interfaces sont intégralement connues, à fonctionner avec d’autres produits ou systèmes existants ou futurs et ce, sans restriction d’accès ou de mise en œuvre. » ;
2° Le titre Ier du livre III est ainsi modifié :
a) Au début, il est ajouté un chapitre Ier intitulé : « Recommandé, identification et coffre-fort électroniques » qui comprend les articles L. 100 à L. 103 ;
b) Sont ajoutés des chapitres II et III ainsi rédigés :
« CHAPITRE II
« Protection du libre choix de l’utilisateur de terminaux
« Art. L. 104. – Dans le cadre de leurs attributions respectives, le ministre chargé du numérique et l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse prennent, dans des conditions objectives et transparentes, des mesures raisonnables et proportionnées en vue d’atteindre l’objectif de protection de la liberté de choix des utilisateurs d’équipements terminaux, dans les conditions prévues au présent chapitre.
« Art. L. 105. – I. – Est qualifiée de fournisseur de système d’exploitation toute personne qui, à titre professionnel, édite ou adapte le système d’exploitation d’équipements terminaux permettant l’accès à des services de communication au public en ligne ou qui édite ou adapte tout autre logiciel contrôlant l’accès aux fonctionnalités desdits équipements.
« II. – Le fournisseur de système d’exploitation s’assure que les systèmes d’exploitation et les logiciels mentionnés au I du présent article, dont les magasins d’application, proposés à des utilisateurs non professionnels situés sur le territoire français, ne limitent pas de façon injustifiée l’exercice, par les utilisateurs non professionnels de tout équipement terminal au sens du 10° de l’article L. 32, du droit, sur internet, d’accéder aux informations et aux contenus de leur choix et de les diffuser, ainsi que d’utiliser et de fournir des applications et des services.
« Ne sont pas considérées comme limitant de manière injustifiée l’exercice, par les utilisateurs non professionnels, du droit mentionné au premier alinéa du présent II les pratiques qui sont strictement nécessaires à la mise en œuvre d’obligations législatives ou réglementaires, à la sécurité de l’équipement terminal et des contenus et données gérés par celui-ci, ou au bon fonctionnement de l’équipement terminal et des services disponibles au bénéfice des utilisateurs non professionnels et auxquelles des pratiques moins limitatives du droit énoncé au même premier alinéa ne peuvent se substituer.
« Après consultation des acteurs concernés et du public, l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse établit et publie des lignes directrices, recommandations ou référentiels portant sur l’application du présent article.
« Art. L. 106. – Le ministre chargé du numérique et l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peuvent, de manière proportionnée aux besoins liés à l’accomplissement de leurs missions et sur la base d’une décision motivée, recueillir auprès des fournisseurs de système d’exploitation mentionnés au I de l’article L. 105 les informations ou documents nécessaires pour s’assurer du respect, par ces personnes, de l’obligation prévue au II du même article L. 105.
« Art. L. 107. – I. – L’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse encourage la mise à disposition, dans le respect des secrets protégés par la loi, des informations susceptibles de favoriser la liberté de choix des utilisateurs non professionnels d’équipements terminaux. Elle met en place ou accompagne la mise en place par des tiers, dans les conditions prévues au II du présent article, des outils d’évaluation et de comparaison des pratiques mises en œuvre par les fournisseurs de système d’exploitation mentionnés au I de l’article L. 105.
« II. – Dans le respect des dispositions du présent code et de ses règlements d’application, l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse précise les règles concernant les contenus, conditions et modalités de transmission ou de mise à disposition, y compris à des organismes tiers recensés par l’autorité, d’informations fiables relatives aux équipements terminaux et à leurs systèmes d’exploitation, dans la mesure où cela s’avère justifié pour la réalisation de l’objectif mentionné à l’article L. 104.
« Art. L. 108. – I. – En cas de différend entre un utilisateur professionnel et un fournisseur de système d’exploitation sur la mise en œuvre des obligations prévues à l’article L. 105, l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut être saisie par l’une des parties.
« L’autorité se prononce, dans le délai fixé par le décret en Conseil d’État mentionné au deuxième alinéa du I de l’article L. 36-8, après avoir mis les parties à même de présenter leurs observations et, le cas échéant, procédé à des consultations techniques, économiques ou juridiques, ou expertises respectant le secret de l’instruction du litige dans les conditions prévues par le présent code. Les frais engendrés par ces consultations et expertises peuvent être mis à la charge de la partie perdante, sauf si les circonstances particulières du différend justifient qu’ils soient mis à la charge d’une autre partie ou partagés entre les parties. Sa décision est motivée et précise les conditions équitables et non discriminatoires, d’ordre technique et financier, dans lesquelles l’exercice du droit mentionné au II de l’article L. 105 par les utilisateurs non professionnels de tout équipement terminal doit être assuré. L’autorité peut, à la demande de la partie qui la saisit, décider que sa décision produira effet à une date antérieure à sa saisine, sans toutefois que cette date puisse être antérieure à la date à laquelle la contestation a été formellement élevée par l’une des parties pour la première fois et, en tout état de cause, sans que cette date soit antérieure de plus de deux ans à sa saisine. Lorsque les faits à l’origine du litige sont susceptibles de restreindre de façon notable l’offre de services de communication audiovisuelle, l’autorité recueille l’avis du Conseil supérieur de l’audiovisuel qui se prononce dans un délai fixé par le décret en Conseil d’État mentionné au deuxième alinéa du I de l’article L. 36-8.
« L’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut refuser la communication de pièces mettant en jeu le secret des affaires. Ces pièces sont alors retirées du dossier.
« En cas d’atteinte grave et immédiate au droit mentionné au II de l’article L. 105, l’autorité peut, après avoir entendu les parties en cause, ordonner des mesures conservatoires. Ces mesures doivent rester strictement limitées à ce qui est nécessaire pour faire face à l’urgence.
« L’autorité rend publiques ses décisions, sous réserve des secrets protégés par la loi. Elle les notifie aux parties.
« II. – Les décisions prises par l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse en application du I peuvent faire l’objet d’un recours en annulation ou en réformation dans le délai d’un mois à compter de leur notification.
« Le recours n’est pas suspensif. Toutefois, le sursis à exécution de la décision peut être ordonné, si celle-ci est susceptible d’entraîner des conséquences manifestement excessives ou s’il est survenu, postérieurement à sa notification, des faits nouveaux d’une exceptionnelle gravité.
« Les mesures conservatoires prises par l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peuvent, au maximum dix jours après leur notification, faire l’objet d’un recours en annulation ou en réformation. Ce recours est jugé dans le délai d’un mois.
« III. – Les recours contre les décisions et mesures conservatoires prises par l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse en application du présent article sont de la compétence de la cour d’appel de Paris.
« Le président de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut présenter des observations devant la Cour de cassation à l’occasion d’un pourvoi en cassation formé contre un arrêt par lequel la cour d’appel de Paris a statué sur une décision de l’autorité.
« Le pourvoi en cassation formé, le cas échéant, contre l’arrêt de la cour d’appel est exercé dans le délai d’un mois suivant la notification de cet arrêt.
« Art. L. 109. – L’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut, soit d’office, soit à la demande du ministre chargé du numérique, d’une association agréée d’utilisateurs ou d’une personne physique ou morale concernée, sanctionner les manquements qu’elle constate de la part des fournisseurs de système d’exploitation mentionnés au I de l’article L. 105. Ce pouvoir de sanction est exercé dans les conditions prévues au présent article.
« I. – En cas de manquement par un fournisseur de système d’exploitation mentionné au I de l’article L. 105 aux dispositions du présent chapitre au respect desquelles l’autorité a pour mission de veiller ou aux textes et décisions pris en application de ces dispositions, le fournisseur est mis en demeure par l’autorité de s’y conformer dans un délai qu’elle détermine.
« La mise en demeure peut être assortie d’obligations de se conformer à des étapes intermédiaires dans le même délai. Elle est motivée et notifiée à l’intéressé. L’autorité peut rendre publique cette mise en demeure.
« Lorsque l’autorité estime qu’il existe un risque caractérisé qu’un fournisseur de système d’exploitation mentionné au I de l’article L. 105 ne respecte pas à l’échéance prévue initialement ses obligations résultant des dispositions et prescriptions mentionnées au présent I, elle peut mettre en demeure l’exploitant ou le fournisseur de s’y conformer à cette échéance.
« II. – Lorsqu’un fournisseur de système d’exploitation mentionné au I de l’article L. 105 ne se conforme pas dans les délais fixés à la mise en demeure prévue au I du présent article ou aux obligations intermédiaires dont elle est assortie, l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut, après instruction conduite par ses services, notifier les griefs à la personne en cause. Elle transmet alors le dossier d’instruction et la notification des griefs à la formation restreinte.
« III. – Après que la personne en cause a reçu la notification des griefs et a été mise à même de consulter le dossier et de présenter ses observations écrites, et avant de prononcer une sanction, la formation restreinte procède, selon une procédure contradictoire, à l’audition du représentant de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse chargé de l’instruction et de la personne en cause.
« La formation restreinte peut, en outre, entendre toute personne dont l’audition lui paraît utile.
« La formation restreinte peut prononcer à l’encontre du fournisseur de système d’exploitation en cause une sanction pécuniaire dont le montant est proportionné à la gravité du manquement et aux avantages qui en sont tirés, sans pouvoir excéder 2 % du montant du chiffre d’affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé par l’entreprise en cause au cours de l’un des exercices clos depuis l’exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre, taux qui est porté à 4 % en cas de nouvelle violation de la même obligation. Si les comptes de l’entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d’affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l’entreprise consolidante ou combinante. À défaut d’activité permettant de déterminer ce plafond, le montant de la sanction ne peut excéder 150 000 €. Ce montant est porté à 375 000 € en cas de nouvelle violation de la même obligation.
« Lorsque le manquement est constitutif d’une infraction pénale, le montant total des sanctions prononcées ne peut excéder le montant de la sanction encourue le plus élevé.
« Lorsque la formation restreinte a prononcé une sanction pécuniaire devenue définitive avant que le juge pénal ait statué définitivement sur les mêmes faits ou des faits connexes, ce dernier peut ordonner que la sanction pécuniaire s’impute sur l’amende qu’il prononce.
« Les conditions d’application du présent III sont déterminées par le décret mentionné à l’article L. 36-11.
« Les sanctions pécuniaires sont recouvrées comme les créances de l’État étrangères à l’impôt et au domaine.
« IV. – En cas d’atteinte grave et immédiate aux règles mentionnées au premier alinéa du I du présent article, l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut ordonner, sans mise en demeure préalable, des mesures conservatoires dont la validité est de trois mois au maximum. Ces mesures peuvent être prorogées pour une nouvelle durée de trois mois au maximum si la mise en œuvre des procédures d’exécution n’est pas terminée, après avoir donné à la personne concernée la possibilité d’exprimer son point de vue et de proposer des solutions.
« V. – L’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse et la formation restreinte ne peuvent être saisies de faits remontant à plus de trois ans, s’il n’a été fait aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction.
« VI. – Les décisions de la formation restreinte sont motivées et notifiées à l’intéressé. Elles peuvent être rendues publiques dans les publications, journaux ou services de communication au public par voie électronique choisis par la formation restreinte, dans un format et pour une durée proportionnés à la sanction infligée. Elles peuvent faire l’objet d’un recours de pleine juridiction et d’une demande de suspension présentée conformément à l’article L. 521-1 du code de justice administrative, devant le Conseil d’État.
« VII. – Lorsqu’un manquement constaté dans le cadre des dispositions du présent article est susceptible d’entraîner un préjudice grave pour une entreprise ou pour l’ensemble du marché, le président de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut demander au président de la section du contentieux du Conseil d’État statuant en référé qu’il soit ordonné à la personne responsable de se conformer aux règles et décisions applicables et de supprimer les effets du manquement ; le juge peut prendre, même d’office, toute mesure conservatoire et prononcer une astreinte pour l’exécution de son ordonnance.
« CHAPITRE III
« Interopérabilité des plateformes en ligne
« Art. L. 110. – Dans le cadre de leurs attributions respectives, le ministre chargé du numérique et l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse prennent, dans des conditions objectives et transparentes, des mesures raisonnables et proportionnées en vue d’atteindre l’objectif d’interopérabilité des services proposés par les opérateurs de plateformes en ligne au sens de l’article L. 111-7 du code de la consommation, dans les conditions prévues au présent chapitre.
« Art. L. 111. – Lorsque la capacité des utilisateurs non professionnels à accéder à des services proposés par des opérateurs de plateformes en ligne au sens de l’article L. 111-7 du code de la consommation et à communiquer par leur intermédiaire est compromise en raison d’un manque d’interopérabilité des données et des protocoles pour des motifs autres que ceux visant à assurer le respect d’obligations législatives ou réglementaires, la sécurité, l’intégrité ou le bon fonctionnement de tels services, l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut imposer, après consultation de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, des obligations aux fournisseurs de ces services afin de les rendre interopérables.
« Les obligations mentionnées au premier alinéa du présent article ne peuvent s’appliquer qu’aux opérateurs de plateforme en ligne dont l’activité dépasse un seuil de nombre de connexions défini par décret.
« Elles sont raisonnables et proportionnées. Elles peuvent consister en :
« 1° La publication des informations pertinentes ;
« 2° L’autorisation de l’utilisation, de la modification et de la retransmission de ces informations par l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse ou d’autres opérateurs de plateformes en ligne ;
« 3° La mise en œuvre des standards techniques d’interopérabilité identifiés par l’autorité.
« Les décisions de l’autorité prises en application du présent article font l’objet de la consultation prévue au V de l’article L. 32-1.
« Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État.
« Art. L. 112. – Le ministre chargé du numérique et l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peuvent, de manière proportionnée aux besoins liés à l’accomplissement de leurs missions et sur la base d’une décision motivée, recueillir auprès des opérateurs de plateformes en ligne les informations ou documents nécessaires pour s’assurer du respect, par ces personnes, des obligations édictées en vue d’assurer l’interopérabilité de ces services en application de l’article L. 111.
« Art. L. 113. – L’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut, soit d’office, soit à la demande du ministre chargé du numérique, d’une association agréée d’utilisateurs ou d’une personne physique ou morale concernée, sanctionner les manquements qu’elle constate de la part des opérateurs de plateforme en ligne mentionnés à l’article L. 111. Ce pouvoir de sanction est exercé dans les conditions prévues au présent article.
« I. – En cas de manquement par un opérateur de plateforme en ligne mentionné à l’article L. 111 aux dispositions du présent chapitre au respect desquelles l’autorité a pour mission de veiller ou aux textes et décisions pris en application de ces dispositions, le fournisseur est mis en demeure par l’autorité de s’y conformer dans un délai qu’elle détermine.
« La mise en demeure peut être assortie d’obligations de se conformer à des étapes intermédiaires dans le même délai. Elle est motivée et notifiée à l’intéressé. L’autorité peut rendre publique cette mise en demeure.
« Lorsque l’autorité estime qu’il existe un risque caractérisé qu’un opérateur de plateforme en ligne mentionné au même article L. 111 ne respecte pas à l’échéance prévue initialement ses obligations résultant des dispositions et prescriptions mentionnées au présent I, elle peut mettre en demeure l’exploitant ou le fournisseur de s’y conformer à cette échéance.
« II. – Lorsqu’un opérateur de plateforme en ligne mentionné à l’article L. 111 ne se conforme pas dans les délais fixés à la mise en demeure prévue au I du présent article ou aux obligations intermédiaires dont elle est assortie, l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut, après instruction conduite par ses services, notifier les griefs à la personne en cause. Elle transmet alors le dossier d’instruction et la notification des griefs à la formation restreinte.
« III. – Après que la personne en cause a reçu la notification des griefs, a été mise à même de consulter le dossier et de présenter ses observations écrites, et avant de prononcer une sanction, la formation restreinte procède, selon une procédure contradictoire, à l’audition du représentant de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse chargé de l’instruction et de la personne en cause.
« La formation restreinte peut, en outre, entendre toute personne dont l’audition lui paraît utile.
« La formation restreinte peut prononcer, à l’encontre de l’opérateur de plateforme en ligne en cause pour non-respect des obligations édictées en application de l’article L. 111, une sanction pécuniaire dont le montant est proportionné à la gravité du manquement et aux avantages qui en sont tirés, sans pouvoir excéder 2 % du montant du chiffre d’affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé par l’entreprise en cause au cours de l’un des exercices clos depuis l’exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre, taux qui est porté à 4 % en cas de nouvelle violation de la même obligation. Si les comptes de l’entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d’affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l’entreprise consolidante ou combinante. À défaut d’activité permettant de déterminer ce plafond, le montant de la sanction ne peut excéder 150 000 €, porté à 375 000 € en cas de nouvelle violation de la même obligation.
« Lorsque le manquement est constitutif d’une infraction pénale, le montant total des sanctions prononcées ne peut excéder le montant de la sanction encourue le plus élevé.
« Lorsque la formation restreinte a prononcé une sanction pécuniaire devenue définitive avant que le juge pénal ait statué définitivement sur les mêmes faits ou des faits connexes, ce dernier peut ordonner que la sanction pécuniaire s’impute sur l’amende qu’il prononce.
« Les conditions d’application du présent III sont déterminées par le décret mentionné à l’article L. 36-11.
« Les sanctions pécuniaires sont recouvrées comme les créances de l’État étrangères à l’impôt et au domaine.
« IV. – En cas d’atteinte grave et immédiate aux règles mentionnées au premier alinéa du I du présent article, l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut ordonner, sans mise en demeure préalable, des mesures conservatoires dont la validité est de trois mois au maximum. Ces mesures peuvent être prorogées pour une nouvelle durée de trois mois au maximum si la mise en œuvre des procédures d’exécution n’est pas terminée, après avoir donné à la personne concernée la possibilité d’exprimer son point de vue et de proposer des solutions.
« V. – L’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse et la formation restreinte ne peuvent être saisies de faits remontant à plus de trois ans, s’il n’a été fait aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction.
« VI. – Les décisions de la formation restreinte sont motivées et notifiées à l’intéressé. Elles peuvent être rendues publiques dans les publications, journaux ou services de communication au public par voie électronique choisis par la formation restreinte, dans un format et pour une durée proportionnés à la sanction infligée. Elles peuvent faire l’objet d’un recours de pleine juridiction et d’une demande de suspension présentée conformément à l’article L. 521-1 du code de justice administrative, devant le Conseil d’État.
« VII. – Lorsqu’un manquement constaté dans le cadre des dispositions du présent article est susceptible d’entraîner un préjudice grave pour une entreprise ou pour l’ensemble du marché, le président de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse peut demander au président de la section du contentieux du Conseil d’État statuant en référé qu’il soit ordonné à la personne responsable de se conformer aux règles et décisions applicables et de supprimer les effets du manquement ; le juge peut prendre, même d’office, toute mesure conservatoire et prononcer une astreinte pour l’exécution de son ordonnance. » ;
c) L’article L. 130 est ainsi modifié :
– à la première phrase du cinquième alinéa, la référence : « et L. 36-11 » est remplacée par les références : « , L. 36-11, L. 109 et L. 113 » ;
– le sixième alinéa est ainsi modifié :
i) après la référence : « L. 36-8 », la fin de la première phrase est ainsi rédigée : « , des I et II de l’article L. 36-11, de l’article L. 108, et des I et II des articles L. 109 et L. 113. » ;
ii) à la dernière phrase, les mots : « de l’article L. 36-11 » sont remplacés par les mots : « des articles L. 36-11, L. 109 et L. 113 » ;
– le septième alinéa est ainsi modifié :
i) à la première phrase, les références : « et des I et II de l’article L. 36-11 » sont remplacées par les références : « , des I et II de l’article L. 36-11, de l’article L. 108 et des I et II des articles L. 109 et L. 113 » ;
ii) à la dernière phrase, les mots : « de l’article L. 36-11 » sont remplacés par les mots : « des articles L. 36-11, L. 109 et L. 113 ».
II. – Le code de la consommation est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 111-7-2, il est inséré un article L. 111-7-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 111-7-3. – Les opérateurs de plateforme en ligne s’abstiennent de concevoir, de modifier ou de manipuler une interface utilisateur ayant pour objet ou pour effet de subvertir ou d’altérer l’autonomie du consommateur dans sa prise de décision ou d’obtenir son consentement. » ;
2° Le premier alinéa de l’article L. 131-4 est ainsi modifié :
a) Les mots : « d’information » sont supprimés ;
b) Les mots : « à l’article L. 111-7 et à l’article L. 111-7-2 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 111-7, L. 111-7-2 et L. 111-7-3 » ;
III. – Le présent article entre en vigueur le premier jour du troisième mois suivant la publication de la présente loi au Journal officiel.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, sur l’article. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. Je n’allongerai pas les débats, monsieur le secrétaire d’État, puisque vous savez déjà ce que je vais dire.
Je commencerai par remercier Laurent Duplomb de ses propos, non pas pour la remarque concernant mes pieds (Sourires.), mais pour le fond de son intervention.
Je voudrais également dire à l’ensemble de mes collègues, que je remercie aussi beaucoup de leur soutien, que la proposition de loi dont il a été question est, non pas un texte de Sophie Primas, mais un texte de la commission des affaires économiques dans son entier. C’est elle qui l’a élaboré, qui l’a soumis au Conseil d’État, qui a inclus, dans sa rédaction finale, les remarques formulées par ce dernier et qui l’a voté et fait voter en séance.
Sans m’appesantir, je reviendrai tout de même sur certains arguments.
Oui, l’Europe est la bonne échelle, monsieur le secrétaire d’État, mais comme pour la taxe GAFA ou la lutte contre la haine en ligne.
Je sais que, même si l’on peut discuter de la nature et du rôle des autorités de régulation, nous sommes d’accord sur les mécanismes de régulation figurant dans notre proposition de loi.
Nous attendons le Digital Services Act et le Digital Markets Act, qui devraient être rendus publics au mois de décembre, après un report de quelques jours lié à des imperfections dans l’étude d’impact. Néanmoins, permettez-moi de vous dire, monsieur le secrétaire d’État, que ce sont là seulement des documents d’orientation, et non pas un projet de directive de la Commission européenne.
Aussi, dès lors que ces orientations seront connues, le travail ne fera que commencer. De fait, il s’écoulera encore des mois, voire des années, avant que des mécanismes de régulation ne s’appliquent effectivement sur le territoire européen.
Nous perdons du temps ! Faut-il le rappeler, cela fait maintenant dix mois que le Sénat a voté cette proposition de loi sur l’encadrement des géants du numérique. Si elle avait abouti, nous aurions déjà pu engager des actions de régulation des plateformes opérant en France.
Je comprends que la France veuille aboutir au premier trimestre 2022, lorsque M. Macron présidera le Conseil européen. Je comprends que le Président de la République veuille profiter de ce moment pour faire des annonces. Mais, de grâce, ne perdons pas trop de temps !
Dans le cadre du dialogue que nous avons avec les instances européennes, j’ai essayé de joindre Thierry Breton pour lui demander si, vraiment, cela le dérangerait que ces différentes propositions de loi soient définitivement adoptées. Puisqu’il n’a pas pris la peine de me rappeler, je pense que cela ne le gêne pas beaucoup et que ce ne constituerait pas, pour lui, une révolution… (Sourires.)
Par conséquent, faisons-le ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, sur l’article.
M. Laurent Duplomb. L’article 4 bis porte sur l’interopérabilité, la neutralité des opérateurs, les dark patterns et les acquisitions prédatrices.
Par souci de compromis, seuls ont été maintenues dans le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire les dispositions relatives à l’interopérabilité et aux dark patterns, même si vous estimez, monsieur le secrétaire d’État, que les relatives à sur ces derniers ont été « écrits avec les pieds »…
Pour ma part, je ne connais rien aux dark patterns, mais je constate que, si je veux utiliser mon smartphone (M. Laurent Duplomb brandit son téléphone portable.), Google me demande d’accepter certaines clauses et de lui fournir, à cette fin, différentes informations ; à défaut de quoi, il m’est impossible d’aller plus loin ! Refuser, c’est, au bout du bout, disposer d’une interface trompeuse, sans solution de sortie.
En tant que Français de base, en tant qu’agriculteur de base pas très intelligent, je me dis que c’est totalement inadmissible.
Or le Gouvernement nous répond : « On est tellement intelligents qu’on va attendre. » Cela, je ne peux pas l’accepter ! Comme je ne peux admettre, je le répète, de ne pas disposer d’une liberté totale d’utilisation de mon téléphone. Tous les sénateurs présents ici et tous ceux qui nous regardent en ce moment, nous vivons la même chose. Comment comprendre, alors, que le Gouvernement ne fasse rien, attendant que l’Europe agisse, comme si celle-ci était une planche de salut pour tout le monde, comme si ce qu’elle écrivait était la Bible ?
Pardonnez-moi, monsieur le secrétaire d’État, mais, comme le disait ma grand-mère, « mieux vaut un je te tiens que deux tu l’auras ! ». (Sourires.) Acceptons donc ce soir le « un je te tiens », en attendant le « deux tu l’auras » de l’Europe ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Pierre Louault applaudit également.)
M. le président. L’amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Cédric O, secrétaire d’État. Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous indique d’ores et déjà que je ne retirerai pas cet amendement, pour les raisons que je vais indiquer.
Au préalable – votre propos m’en donne l’occasion, mais je comptais de toute façon le faire, monsieur Duplomb –, je reconnais m’être probablement laissé un peu emporter lors du débat, un peu ardent, que j’ai eu avec vos collègues de l’Assemblée nationale : bien évidemment, je n’ai jamais voulu évoquer les pieds de la présidente Primas.
Je regrette ces mots prononcés quelque peu à l’emporte-pièce, qui n’avaient pas leur place dans un débat parlementaire, que je n’aurais pas dû employer et pour lesquels je présente mes excuses.
M. Laurent Duplomb. C’est bien de le reconnaître !
M. Cédric O, secrétaire d’État. En dépit de certains désaccords qui existent entre nous, je tiens à me garder de tout esprit polémique.
Voilà quelques jours, j’étais présent dans cet hémicycle pour l’examen d’une proposition de loi relative à la cybersécurité déposée par le groupe Union Centriste. Nous l’avons communément amendée, ce qui montre bien que le Gouvernement sait trouver des accords avec la chambre haute quand celle-ci prend des initiatives de cette sorte.
Pourquoi la majorité a-t-elle bloqué un accord en commission mixte paritaire, à l’article 4 bis, sur cette question de la régulation des terminaux ?
Madame la présidente Primas, je passerai le message au commissaire Breton. Cependant, je ne fais pas exactement la même lecture que vous de son absence de rappel… Jeudi dernier encore, je me suis entretenu avec lui particulièrement du Digital Markets Act et du Digital Services Act, qui, comme vous le savez, doivent être présentés par la Commission européenne au début du mois de décembre prochain, ce dont nous avons eu confirmation, alors qu’un certain nombre d’incertitudes subsistaient.
Vous noterez d’ailleurs que le Gouvernement, y compris après les tragiques événements qui sont survenus à Conflans-Sainte-Honorine, s’est abstenu, à ce stade, de présenter un nouveau texte, en dépit de l’urgence à réguler les contenus haineux sur internet ; nous avions eu ce débat lors de l’examen de la loi Avia. Nous aurions pu immédiatement, dans l’urgence, présenter un certain nombre de textes et décliner plusieurs mesures. Mais nous ne l’avons pas fait, en dépit du contexte, parce que nous attendons des textes européens.
Qu’il s’agisse de sujets relevant du Digital Services Act, qui porte sur les contenus, ou du Digital Markets Act, qui a pour objet la concurrence, Thierry Breton et l’ensemble des parlementaires européens, tous partis confondus, sont formels : les initiatives qui peuvent être prises isolément par la France desservent notre cause.
Vous avez cité, avec raison, l’exemple de la taxation des géants du numérique. Je ne puis qu’aller dans votre sens, mais je ne puis également que vous répéter ce que m’a dit Thierry Breton au sujet du Digital Markets Act, texte fondateur en matière de régulation pour les prochaines années.
Si les textes qui seront présentés au début de mois de décembre ne sont pas à la hauteur, je m’engage devant vous – je l’ai déjà dit à la présidente Primas – à remettre l’ouvrage sur le métier. Mais, à deux ou trois semaines de cette échéance, laissons-nous toutes les chances de réussir.
M. Laurent Duplomb. Aujourd’hui, il n’y a pas de texte !
M. Cédric O, secrétaire d’État. Je veux maintenant revenir sur plusieurs points qui ont été abordés lors de la discussion générale.
Effectivement, il a été proposé de renvoyer à 2023 ou 2024 l’entrée en vigueur de ces dispositions. Toutefois, nous avons considéré que reporter les échéances n’était pas forcément la meilleure manière de surmonter nos désaccords et n’était pas respectueux du travail parlementaire.
Monsieur Duplomb, la sunset clause n’existe pas en matière législative. Vous noterez d’ailleurs que, s’agissant de la taxation des Gafam, nous avons indiqué que nous recourrions certes à cette clause, mais sur la base d’un engagement politique : à savoir, le jour où l’Europe aura mis en place une telle taxation, nous abrogerons la loi nationale.
Juridiquement, je le répète, il est impossible, par une disposition législative, de définir un champ identique à ce qu’il est au niveau européen. De fait, jamais le Parlement français n’a adopté un texte contenant une sunset clause ; encore une fois, il ne peut s’agir que d’un engagement politique. Une telle disposition serait probablement retoquée par le Conseil d’État, en amont, ou par Conseil constitutionnel.
S’agissant des dark patterns et de la lutte conte les interfaces trompeuses, objet également de cet article, il nous est apparu, confortant notre opposition de principe, que la mesure qui est envisagée était redondante avec les dispositions prévues au code de la consommation en matière de pratiques commerciales trompeuses, dont elle ne ferait qu’expliciter un cas particulier.
En effet, pour entrer dans le détail, ses articles L. 121-2 et suivants, issus de la transposition du droit européen, interdisent les pratiques commerciales trompeuses et couvrent déjà les agissements visés par ces dispositions en les sanctionnant d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 300 000 euros.
Le montant de la sanction peut-être porté, de manière proportionnée aux avantages tirés du délit, à 10 % du chiffre d’affaires moyen annuel, ce qui va au-delà des sanctions prévues en cas de non-respect du RGPD, à savoir 4 % du chiffre d’affaires moyen annuel.
M. Laurent Duplomb. Retirez donc votre amendement !
M. Cédric O, secrétaire d’État. Monsieur le sénateur Duplomb, je sens votre impatience ! À ce propos, je vous remercie d’avoir cité dans votre intervention certains grands auteurs qui se sont exprimés dernièrement.
Toutefois, pour conclure mon intervention, et alors que j’étais sur le point de vous donner satisfaction en retirant l’amendement du Gouvernement (Sourires sur les travées du groupe RDPI.), je me suis, malheureusement pour vous, moi aussi rappelé les propos prononcés par un autre grand auteur, le président du groupe Les Républicains au Sénat, M. Bruno Retailleau – que je remercie, au passage, de son soutien à l’application TousAntiCovid –, au cours de l’examen de la loi Avia.
Lors d’un échange resté fameux, voici ce qu’il me déclarait : « D’ailleurs, j’ai bien noté que […] la Commission européenne […] proposerait prochainement une initiative législative. Il eût été beaucoup plus prudent, beaucoup plus sage, me semble-t-il, d’attendre cette initiative européenne plutôt que de se précipiter […]. »
M. André Gattolin. Du grand Retailleau ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Bizet, rapporteur. Je ne reviendrai pas en détail sur les raisons qui motivent notre avis défavorable sur cet amendement de suppression présenté par le Gouvernement.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous concède un point et un seul : le niveau pertinent en la matière est bien le niveau européen, même si rien n’empêche la représentation nationale, dans son expression démocratique, d’indiquer dans quel sens elle souhaiterait légiférer sur ce sujet.
Si j’ai bien compris, vous vous dites prêt à revenir devant le Sénat si, par hypothèse, le Digital Services Act n’était pas présenté aux alentours du 9 décembre, ou un peu après. Très bien, nous vous prenons au mot !
Vous avez également indiqué que la sunset clause n’avait pas valeur législative, en effet, et correspondait seulement à un engagement politique. Plus généralement, je vous rappelle que, dès lors qu’il sera adopté par les instances communautaires, le Digital Services Act devra être transposé en droit national. À ce moment, on pourra « comparer » son contenu avec celui de la proposition de loi Primas.
Toujours est-il qu’une procédure de transposition demande du temps : deux ans au minimum, parfois beaucoup plus ; il ne s’agit pas d’un règlement d’application directe.
M. Jean Bizet, rapporteur. Peut-être, mais, d’après les informations dont nous disposons, ce texte fera l’objet d’une directive, dont la transposition prendra donc un peu de temps.
À cet égard, j’imagine mal que les instances communautaires prennent autoritairement la décision d’en passer par un règlement. Cette voie est souvent beaucoup plus saine, à défaut, avouez-le, d’être très démocratique. Nous aurions pu gagner du temps, mais vous avez fait le choix d’une autre approche. Dont acte !
La commission, ainsi que le Sénat, et moi-même, à titre personnel, émettons un avis défavorable sur votre amendement.
M. le président. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.
M. Jérôme Bascher. Nous sentons que nous sommes d’accord sur le fond, mais en désaccord à la fois sur le calendrier et sur la méthode, laquelle, comme vient de l’expliquer très clairement Jean Bizet, est bien la preuve de l’entêtement du Gouvernement sur ce point.
Vous êtes en train de commettre une erreur, monsieur le secrétaire d’État, pour ne servir qu’une seule personne, plutôt que d’écouter la volonté générale, telle que l’a exprimée le Sénat à plusieurs reprises.
C’est une erreur, je le répète, comme c’est parfois une erreur de ne s’en tenir qu’à la technique, diplomatique ou européenne, plutôt que de prendre en compte la volonté du peuple dans l’élaboration de la loi. Car c’est bien de cela qu’il s’agit.
Il s’agit aussi, monsieur le secrétaire d’État, de montrer que la France est prête à montrer la voie que doit emprunter l’Union européenne, au nom de ce fameux leadership.
Honnêtement, en 2017, nous avons tous cru que le Président de la République voulait redonner un élan à l’Europe, voulait que la France redonne un élan à l’Europe. Or, c’est à l’Allemagne qu’il a redonné de l’élan en Europe ! (M. André Gattolin s’exclame.)
On le voit bien que, sur nombre de sujets, nous sommes dorénavant en retrait. C’est bien dommage.
Vous nous dites maintenant que c’est désormais une affaire de trois semaines. Mais alors, monsieur le secrétaire d’État, que faisons-nous ce soir ? Nous étions prêts à attendre trois semaines de plus et à voter les bons amendements si nous avions été assurés que, le 9 décembre, l’Union européenne aurait tranché. Mais non, il faut aller vite, pour servir une personne, plutôt que la France !
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Monsieur le secrétaire d’État, vous ne nous avez pas du tout répondu sur l’initiative de l’Allemagne.
Si la France dérange M. Breton dans la conduite des négociations autour de ces deux projets d’Act, l’Allemagne, elle, avance. Son gouvernement a en effet déposé le 9 septembre un projet de loi, lequel devrait être adopté le 4 février prochain, dans le cadre de la dixième réforme de sa législation sur la concurrence.
Je le répète, les Allemands avancent et n’ont pas attendu la publication, au début du mois de décembre, du Digital Services Act. Ils ont raison de continuer et d’avoir ainsi ce rôle moteur. En tout cas, je ne comprends pas ce « deux poids, deux mesures ».
Je vous indique également que la sunset clause est une solution qui a été proposée non pas par le Sénat, mais par un député membre de votre majorité. Et puisque vous avez cité un grand auteur vendéen (Sourires.), je vous rappelle que, malgré tout, nous avons voté la loi Avia. Certes avec certaines précautions, indiquant qu’elle soulevait des problèmes constitutionnels, mais nous l’avons votée !
Monsieur le secrétaire d’État, je vous engage donc à retirer votre amendement, que je ne voterai pas dans le cas contraire.
Enfin, la DGCCRF a-t-elle été saisie au sujet des dark patterns ? Celles-ci existent, les Français en sont victimes. A-t-elle déjà mené des actions ? Si tel n’est pas le cas, c’est qu’il y a quelque chose qui coince.
M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.
M. Laurent Duplomb. Comme l’a rappelé Sophie Primas, la sunset clause est apparue dans le débat dès lors qu’il s’est agi d’essayer de parvenir à un consensus. Et cette proposition, d’une grande intelligence, émane en effet d’une députée membre de votre majorité. Son raisonnement a été le suivant : puisque les règles sont aujourd’hui inexistantes, votons une loi pour y remédier, en attendant que l’Europe fasse son travail ; et dès qu’elle l’aura fait, nous abrogerons cette loi.
S’agissant de la loi Avia, comme l’a rappelé Sophie Primas, nous l’avons votée. Par conséquent, vous ne pouvez pas nous reprocher quoi que ce soit.
Par ailleurs, en commission mixte paritaire, les parlementaires membres de la majorité n’ont pas voulu prendre part au vote – ils n’ont pas voté contre. Si le vote avait été totalement démocratique, la CMP aurait donc été conclusive sur le texte issu des travaux du Sénat, en retenant donc les modifications apportées à l’article 4 bis.
Tous les sénateurs, sauf peut-être M. Gattolin, qui, comme ses collègues de la majorité, n’a pas pris part au vote,…
M. André Gattolin. Il n’y a pas eu vote !
M. Laurent Duplomb. … ont donc exprimé leur soutien à ce texte, dessinant ainsi une large majorité.
Il y a là, en quelque sorte, un déni de démocratie : on provoque la réunion d’une commission mixte paritaire pour décider, sans qu’elle se prononce vraiment parce que la majorité qui se dégage ne peut pas véritablement prendre de décision ! C’est tout de même un peu bancal.
Enfin, comme l’a dit Sophie Primas, si la DGCCRF nous apportait la preuve qu’elle est aujourd’hui en mesure de régler les problèmes posés par les dark patterns, vous pourriez nous dire, monsieur le secrétaire d’État : « Les sénateurs, allez vous coucher, vous n’avez rien compris, la DGCCRF est en train de traiter le problème ! » Mais tel n’est pas le cas. Faites donc ce qu’il faut pour que, dans l’intervalle, entre aujourd’hui et demain, après-demain, après-après-demain, ou même encore peut-être encore plus tard, quand l’Europe aura pris une décision, on traite véritablement le problème.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous le dis une nouvelle fois : retirez votre amendement de suppression ; vous en serez soulagé, et nous avec ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Cédric O, secrétaire d’État. Malheureusement, et vous m’en voyez désolé, je vais encore vous décevoir, monsieur le sénateur Duplomb ; c’est la quatrième fois que nous débattons de ce sujet dans cette assemblée ; et je crois bien que nous ne parviendrons pas à tomber d’accord.
M. Laurent Duplomb. On l’a compris…
M. Cédric O, secrétaire d’État. La DGCCRF a-t-elle déjà été saisie au sujet des dark patterns ? Je ne suis pas en mesure de vous répondre, madame la présidente Primas. Je me renseignerai et je reviendrai vers vous.
S’agissant du leadership sur le Digital Markets Act et de la régulation des plateformes structurante, je ne puis vous laisser dire que ce sont les Allemands qui mènent la danse au niveau européen : je vous invite notamment à lire les derniers articles que la presse anglo-saxonne a consacrés aux dynamiques à l’œuvre au sein de la Commission, singulièrement à l’action de deux pays, à savoir la France et les Pays-Bas.
Autant nous pouvons avoir avec nos partenaires des désaccords, par exemple sur les questions budgétaires, autant, sur cette question de la régulation des grandes plateformes, nous nous rejoignons. Ainsi, voilà quelques semaines, mon homologue néerlandaise et moi-même avons cosigné un texte explicitant nos attentes et détaillant les avancées que nous avions enregistrées. Les administrations nationales se réunissent quasiment chaque semaine avec la Commission européenne pour travailler sur le sujet.
Autant dire que nous poussons vraiment en interne et que nous sommes vraiment à la manœuvre. Nous avons d’ailleurs eu l’occasion de faire un point d’étape détaillé avec Mme la présidente de la commission des affaires économiques sur le travail de nos administrations.
Effectivement, les Allemands ont mis sur la table un texte de portée assez large, qui va au-delà de la seule question de l’interopérabilité. C’est leur choix que de rester au milieu du gué. Attendons de voir ce qui va se passer.
J’indique à ce sujet à M. le rapporteur que la volonté qui s’exprime est plutôt d’en passer par un règlement, texte d’application uniforme, et ce pour une raison simple : sur un sujet aussi important et aussi structurant, il est indispensable que les règles soient appliquées aussi uniformément que possible sur l’ensemble du territoire européen, pour éviter les phénomènes de dumping que l’on rencontre parfois.
Nous-mêmes sommes partisans d’un règlement, ce qui semble être aussi le cas, peu ou prou, de la Commission et des services de Thierry Breton. C’est donc ce vers quoi nous nous dirigeons, même si la dialectique européenne peut conduire à des décisions différant quelque peu.
Malgré notre désaccord qui subsiste, ce que je regrette, croyez-le bien, monsieur le sénateur Duplomb, je tenais à vous faire part de ces différents éléments, non pas pour vous convaincre – je crois que je n’y réussirai pas –, mais pour enrichir le débat et la connaissance de la Haute Assemblée sur le sujet.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. À l’évidence, chacun campe ses positions : il est donc temps de conclure sur ce point. Nous confirmons notre avis défavorable, puisque le Gouvernement refuse de faire un pas dans notre direction.
M. Laurent Duplomb. Et c’est dommage !
M. Jean Bizet, rapporteur. Monsieur le secrétaire d’État, vous espérez que ces dispositions prendront la forme d’un règlement. Comme un certain nombre de mes collègues, je suis un Européen convaincu. Il faut l’avouer : cette solution est sans doute un peu moins démocratique que d’autres, mais elle est bien plus efficace, surtout sur des sujets de cette nature.
Le règlement établissant un cadre pour le filtrage des investissements directs à l’étranger, ou règlement IDE, en apporte la preuve : en l’espace de dix-huit mois, ce texte a mis les 27 États membres en ordre de marche.
Aussi, je ne vous demande qu’un engagement à cet égard : faites remonter à Bruxelles les quatre points soulevés par la proposition de loi de Mme Primas,…
M. Jean Bizet, rapporteur. … afin qu’ils soient inscrits dans ce règlement. Dès lors, nous n’aurons pas complètement perdu notre temps ce soir, et M. Duplomb n’aura pas vainement forcé sur ses cordes vocales ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. André Gattolin, pour explication de vote.
M. André Gattolin. J’ai écouté attentivement les différents orateurs et, en entendant Jérôme Bascher, je me suis demandé si nous ne marchions pas sur la tête.
Cher collègue, en résumé, vous déclarez à M. le secrétaire d’État : « Si vous voulez réellement mener à bien ce projet, attendez trois semaines, pour laisser aboutir le Digital Services Act ou le Digital Markets Act » – le second des deux textes porte plus précisément sur la régulation du marché internet.
À l’évidence, vous vous trompez de véhicule législatif ! Ce projet de loi a vocation à transposer des textes en urgence. Il a été demandé parce que la France accusait, notamment, un retard dans la transposition de la directive sur les services de médias audiovisuels, ou directive SMA. Il faut bien le dire : pendant trois ou quatre mois, le confinement nous a empêchés de légiférer et d’être présents sur ces terrains. Nous avons perdu beaucoup de temps !
Je le répète, nous sommes face à l’urgence. De leur côté, les Allemands ont eux aussi déposé un texte, qu’ils vont étudier en février prochain, pour se mettre en conformité avec les futures propositions de la Commission. Et je n’imagine pas un instant le Parlement allemand et la Chancelière Merkel prétendre adopter cette législation coûte que coûte, même si ces sujets sont aussi brûlants chez nos voisins que chez nous !
J’ajoute que, entre l’excellente proposition de loi de Mme Primas, et l’excellente proposition de loi allemande, la symétrie n’est pas parfaite. L’Allemagne propose de recourir à la Commission de la concurrence ; la France veut se tourner vers l’Arcep. Au-delà, j’ai relu les quinze pages de cette proposition de loi : elle est véritablement d’inspiration franco-française… Tout tourne autour du Conseil d’État ! Mais ce n’est pas ce dernier qui fait le droit européen.
La base d’un tel travail, ce sont les directives européennes. Commençons par examiner les textes que nous devons voter en urgence et revenons sur la question en février prochain.
Le Sénat a déjà adopté cette proposition de loi. Je l’ai moi-même votée. À présent, examinons le Digital Services Act et le Digital Markets Act : si, à nos yeux, la Commission ne va pas assez loin, transmettons le texte de Mme Primas à l’Assemblée nationale et demandons au Gouvernement de le soutenir !
Toutefois, attendons de voir concrètement ce que la Commission propose : un texte fédérant les 27 sera dix fois plus efficace qu’une législation purement française. On le sait bien, l’extraterritorialité des opérateurs nous empêchera d’agir efficacement dans le cadre national !
M. le président. Je mets aux voix l’article 4 bis.
(L’article 4 bis est adopté.)
Article 5
Le livre V du code de la consommation est ainsi modifié :
1° La section I du chapitre Ier du titre II est complétée par un article L. 521-3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 521-3-1. – Lorsque les agents habilités constatent, avec les pouvoirs prévus au présent livre, une infraction ou un manquement aux dispositions mentionnées aux articles L. 511-5, L. 511-6 et L. 511-7 ainsi qu’aux règles relatives à la conformité et à la sécurité des produits à partir d’une interface en ligne et que l’auteur de la pratique ne peut être identifié ou qu’il n’a pas déféré à une injonction prise en application des articles L. 521-1 et L. 521-2, l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation peut :
« 1° Ordonner aux opérateurs de plateformes en ligne au sens du I de l’article L. 111-7 du présent code, aux personnes mentionnées au 1 du I de l’article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique ou à celles exploitant des logiciels permettant d’accéder à une interface en ligne l’affichage d’un message avertissant les consommateurs du risque de préjudice encouru lorsqu’ils accèdent au contenu manifestement illicite ;
« 2° Lorsque l’infraction constatée est passible d’une peine d’au moins deux ans d’emprisonnement et est de nature à porter une atteinte grave à la loyauté des transactions ou à l’intérêt des consommateurs :
« a) Notifier aux personnes relevant du I de l’article L. 111-7 du présent code les adresses électroniques des interfaces en ligne dont les contenus sont manifestement illicites pour qu’elles prennent toute mesure utile destinée à faire cesser leur référencement ;
« b) Notifier aux opérateurs et personnes mentionnés au 1° du présent article ou au 2 du I de l’article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 précitée les adresses électroniques des interfaces en ligne dont les contenus sont manifestement illicites afin qu’ils prennent toute mesure utile destinée à en limiter l’accès ;
« c) Ordonner aux opérateurs de registre ou aux bureaux d’enregistrement de domaines de prendre une mesure de blocage d’un nom de domaine, d’une durée maximale de trois mois renouvelable une fois, suivie, si l’infraction constatée persiste, d’une mesure de suppression ou de transfert du nom de domaine à l’autorité compétente.
« Ces mesures sont mises en œuvre dans un délai, fixé par l’autorité administrative, qui ne peut être inférieur à quarante-huit heures.
« Une interface en ligne s’entend de tout logiciel, y compris un site internet, une partie de site internet ou une application, exploité par un professionnel ou pour son compte et permettant aux utilisateurs finals d’accéder aux biens ou aux services qu’il propose. » ;
2° (Non modifié) Au dernier alinéa de l’article L. 522-9-1, après le mot : « accord », sont insérés les mots : « ou en cas de non-versement au Trésor du montant prévu au deuxième alinéa du présent article » ;
3° (Non modifié) La section unique du chapitre II du titre III est complétée par une sous-section 3 ainsi rédigée :
« Sous-section 3
« Mesures spécifiques applicables aux contenus illicites en ligne
« Art. L. 532-5. – Le non-respect des mesures ordonnées ou devant être appliquées aux adresses électroniques notifiées en application de l’article L. 521-3-1 est puni des peines prévues au 1 du VI de l’article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique. » – (Adopté.)
Article 5 bis
(Non modifié)
L’article L. 45-2 du code des postes et des communications électroniques est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En outre, l’office d’enregistrement supprime ou transfère sans délai à l’autorité compétente le nom de domaine sur injonction de l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation en application du c du 2° de l’article L. 521-3-1 du code de la consommation. » – (Adopté.)
Chapitre II
Dispositions relatives à la surveillance du marché et à la conformité des produits
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Article 6 bis
I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances, dans un délai de huit mois à compter de la promulgation de la présente loi, les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires afin d’adapter le chapitre VII du titre V du livre V du code de l’environnement aux dispositions introduites par le règlement (UE) 2019/1020 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 sur la surveillance du marché et la conformité des produits, et modifiant la directive 2004/42/CE et les règlements (CE) n° 765/2008 et (UE) n° 305/2011.
II. – (Non modifié) Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance mentionnée au I. – (Adopté.)
Chapitre III
Dispositions relatives à la lutte contre les pratiques commerciales déloyales et pour l’équité et la transparence dans les relations interentreprises
Article 7
(Non modifié)
I. – A. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de sept mois à compter de la publication de la présente loi, les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires afin de :
1° Transposer la directive (UE) 2019/633 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 sur les pratiques commerciales déloyales dans les relations interentreprises au sein de la chaîne d’approvisionnement agricole et alimentaire, de manière à ce qu’elle soit applicable aux relations entre fournisseurs et acheteurs dans la chaîne d’approvisionnement agricole et alimentaire, sans condition de chiffre d’affaires ;
2° (Supprimé)
B. – Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance prévue au A du présent I.
II. – (Supprimé)
III. – Le code de commerce est ainsi modifié :
1° L’article L. 442-1 est complété par un III ainsi rédigé :
« III. – Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne proposant un service d’intermédiation en ligne au sens du règlement (UE) 2019/1150 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 promouvant l’équité et la transparence pour les entreprises utilisatrices de services d’intermédiation en ligne, de ne pas respecter les obligations expressément prévues par ce règlement.
« Toute clause ou pratique non expressément visée par ce règlement est régie par les autres dispositions du présent titre. » ;
2° L’article L. 470-1 est ainsi modifié :
a) Le I est complété par une phrase ainsi rédigée : « Dans les mêmes conditions, ils peuvent enjoindre à tout professionnel de se conformer aux dispositions du règlement (UE) 2019/1150 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 promouvant l’équité et la transparence pour les entreprises utilisatrices de services d’intermédiation en ligne ainsi que lui enjoindre de cesser tout agissement ou de supprimer toute clause contraire à ces dispositions. » ;
b) Il est ajouté un III ainsi rédigé :
« III. – 1. Lorsque l’injonction est notifiée à raison d’un manquement passible d’une amende civile, les agents mentionnés au I du présent article peuvent assortir leur mesure d’une astreinte journalière ne pouvant excéder un montant de 0,1 % du chiffre d’affaires mondial hors taxes réalisé au cours du dernier exercice clos. Si les comptes de l’entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d’affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l’entreprise consolidante ou combinante.
« Dans ce cas, l’injonction précise les modalités d’application de l’astreinte encourue, notamment sa date d’applicabilité, sa durée et son montant. Le montant de l’astreinte est proportionné à la gravité des manquements constatés et tient compte notamment de l’importance du trouble causé.
« L’astreinte journalière court à compter du jour suivant l’expiration du délai imparti au professionnel pour se mettre en conformité avec la mesure d’injonction notifiée.
« En cas d’inexécution, totale ou partielle, ou d’exécution tardive, l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation procède, dans les conditions prévues au IV de l’article L. 470-2, à la liquidation de l’astreinte. Toutefois, le total des sommes demandées au titre de la liquidation de l’astreinte ne peut être supérieur à 1 % du chiffre d’affaires mondial hors taxes réalisé au cours du dernier exercice clos. Si les comptes de l’entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d’affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l’entreprise consolidante ou combinante.
« La décision prononçant la mesure d’injonction et celle prononçant la liquidation de l’astreinte journalière sont motivées. Elles sont susceptibles d’un recours de pleine juridiction et le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner leur suspension dans les conditions prévues à l’article L. 521-1 du code de justice administrative.
« 2. L’injonction mentionnée au premier alinéa du 1 du présent III peut faire l’objet, en cas d’inexécution totale ou partielle ou d’exécution tardive, d’une mesure de publicité sur le site internet de l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation ainsi que, aux frais de la personne sanctionnée, sur un support habilité à recevoir des annonces légales que cette dernière aura choisi dans le département où elle est domiciliée. La décision peut en outre être publiée, à ses frais, sur d’autres supports.
« Dans ce cas, le professionnel est informé, lors de la procédure contradictoire préalable au prononcé de l’injonction, de la nature et des modalités de la mesure de publicité encourue. » – (Adopté.)
Chapitre IV
Dispositions en matière de fiscalité et de règlementation douanière
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Article 9
(Non modifié)
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au 2° du II de l’article 302 L, la référence : « 793 du règlement (CEE) n° 2454/93 de la Commission du 2 juillet 1993 » est remplacée par la référence : « 329 du règlement d’exécution (UE) 2015/2447 de la Commission du 24 novembre 2015 établissant les modalités d’application de certaines dispositions du règlement (UE) 952/2013 du Parlement européen et du Conseil établissant le code des douanes de l’Union » ;
2° Après le mot : « prévus », la fin du second alinéa du I de l’article 302 M est ainsi rédigée : « au iii du a du 1 de l’article 10 du règlement délégué (UE) 2018/273 de la Commission du 11 décembre 2017. » ;
3° et 4° (Supprimés)
5° Le III de la section III du chapitre Ier du titre III de la première partie du livre Ier est abrogé ;
5° bis L’intitulé du IV de la même section III est ainsi rédigé : « Vendanges » ;
5° ter La division et l’intitulé du 1° du même IV sont supprimés ;
6° L’article 466 est ainsi rédigé :
« Art. 466. – À l’exception des raisins de table, les vendanges fraîches sont soumises aux obligations prévues aux articles 8 à 10 du règlement délégué (UE) 2018/273 de la Commission du 11 décembre 2017 et sont passibles des mêmes droits que les vins à raison d’un hectolitre de vin pour 130 litres ou 130 kilogrammes de vendanges. » ;
7° Le 3° du IV de la section III du chapitre Ier du titre III de la première partie du livre Ier est abrogé ;
8° Après le mot : « production », la fin de la première phrase du 3° de l’article 1794 est ainsi rédigée : « , de stock et de documents d’accompagnement des produits vitivinicoles, prévus aux articles 8 à 10 et 21 à 33 du règlement délégué (UE) 2018/273 de la Commission du 11 décembre 2017 et aux articles 22 à 24 du règlement d’exécution (UE) 2018/274 de la Commission du 11 décembre 2017. » ;
9° Au premier alinéa de l’article 1798 ter, les mots : « par le règlement (CE) n° 436/2009 de la Commission du 26 mai 2009 portant modalités d’application du règlement (CE) n° 479/2008 du Conseil en ce qui concerne le casier viticole, les déclarations obligatoires et l’établissement des informations pour le suivi du marché, les documents accompagnant les transports des produits et les registres à tenir dans le secteur vitivinicole » sont remplacés par les mots : « aux articles 28 à 30 du règlement (UE) 2018/273 de la Commission du 11 décembre 2017 et aux articles 13 à 20 du règlement d’exécution (UE) 2018/274 de la Commission du 11 décembre 2017, complétant le règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles ».
II. – (Supprimé) – (Adopté.)
Article 10
(Non modifié)
Le code des douanes est ainsi modifié :
1° Le f du 1° de l’article 65 est ainsi rédigé :
« f) chez les représentants en douane ou transitaires ; »
2° L’article 86 est ainsi rédigé :
« Art. 86. – Les conditions dans lesquelles un représentant en douane peut fournir ses services en application de l’article 18 du règlement (UE) n° 952/2013 du Parlement européen et du Conseil du 9 octobre 2013 établissant le code des douanes de l’Union sont fixées par l’arrêté prévu à l’article 17 bis du présent code. » ;
3° L’article 87 est ainsi rédigé :
« Art. 87. – Outre les mentions obligatoires prévues au II de l’article 289 du code général des impôts, le représentant en douane mentionne sur les factures émises pour ses mandants la date de versement au comptable des douanes des droits et taxes acquittés à l’importation en application de l’article 114 du présent code. » ;
4° Les articles 89, 92, 93 et 94 sont abrogés ;
5° À la fin du premier alinéa du 2 de l’article 285 quinquies, les mots : « commissionnaire en douane agréé » sont remplacés par les mots : « représentant en douane » ;
6° Le début du 1 de l’article 396 est ainsi rédigé : « 1. Les représentants en douane sont… (le reste sans changement). » ;
7° À l’intitulé de la section 2 du chapitre Ier du titre IV, le mot : « commissionnaires » est remplacé par le mot : « représentants » ;
8° Au début de l’intitulé du paragraphe 4 de la section I du chapitre V du titre XII, les mots : « Commissionnaires en douane agréés » sont remplacés par les mots : « Représentants en douane » ;
8° bis Le b du 2 de l’article 410 est abrogé ;
9° Au 3° de l’article 413 bis, la référence : « du 1 » est supprimée. – (Adopté.)
Article 11
(Non modifié)
I. – Le code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° L’article L. 152-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 152-1. – Les porteurs transportant de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant égal ou supérieur à 10 000 €, vers un État membre de l’Union européenne ou en provenance d’un tel État doivent en faire la déclaration auprès de l’administration des douanes. Ils mettent cet argent à la disposition de l’administration des douanes en cas de contrôle lors de ce transport.
« Est considérée comme porteur toute personne physique qui, pour elle-même ou pour le compte d’un tiers, transporte de l’argent liquide sur elle, dans ses bagages ou dans ses moyens de transport.
« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article. » ;
2° Après le même article L. 152-1, sont insérés des articles L. 152-1-1 et L. 152-1-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 152-1-1. – Lorsque de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant égal ou supérieur à 10 000 € fait partie d’un envoi en provenance d’un autre État membre de l’Union européenne ou vers un tel État, sans l’intervention d’un porteur, les agents des douanes peuvent exiger que l’expéditeur ou le destinataire ou leur représentant, selon le cas, fasse une déclaration de divulgation dans un délai et des conditions fixés par décret en Conseil d’État.
« Les agents des douanes peuvent retenir l’argent liquide jusqu’à ce que l’expéditeur, le destinataire ou leur représentant dépose la déclaration de divulgation.
« Art. L. 152-1-2. – I. – L’obligation de déclaration et l’obligation de divulgation mentionnées aux articles L. 152-1 et L. 152-1-1 ne sont pas réputées exécutées si les informations fournies sont incorrectes ou incomplètes ou si l’argent liquide n’est pas mis à la disposition de l’administration des douanes à sa demande, à l’occasion d’un contrôle lors d’un transport. Il en va de même lorsque la déclaration de divulgation n’est pas établie dans le délai applicable.
« II. – Les obligations mentionnées au I du présent article sont également considérées comme non exécutées si les déclarations portant sur de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant égal ou supérieur à 50 000 € ne sont pas accompagnées des documents dont la production permet de justifier de sa provenance. Un décret fixe la liste de ces documents et leurs modalités de transmission. » ;
3° L’article L. 152-4 est ainsi modifié :
a) Au I, la référence : « à l’article L. 152-1 » est remplacée par les références : « aux articles L. 152-1 à L. 152-1-2 », la référence : « (CE) n° 1889/2005 du Parlement européen et du Conseil, du 26 octobre 2005, relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant ou sortant de la Communauté » est remplacée par la référence : « (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement n° 1889/2005 » et les mots : « de la somme sur laquelle » sont remplacés par les mots : « du montant de l’argent liquide sur lequel » ;
b) Le premier alinéa du II est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :
« II. – En cas de constatation de l’infraction mentionnée au I du présent article par les agents des douanes, ceux-ci peuvent prononcer la retenue temporaire de la totalité de l’argent liquide sur lequel a porté l’infraction ou la tentative d’infraction, pendant une durée ne pouvant être supérieure à trente jours, renouvelable jusqu’à un maximum de quatre-vingt-dix jours. Les motifs de la retenue temporaire sont notifiés à l’auteur de l’infraction mentionnée au même I.
« Au terme de la durée de quatre-vingt-dix jours, si les nécessités de l’enquête l’exigent, les agents des douanes peuvent consigner l’argent liquide, sur autorisation du procureur de la République du lieu de la direction des douanes dont dépend le service chargé de la procédure, dans la limite de douze mois décomptés à partir du premier jour de la retenue temporaire.
« Les agents des douanes peuvent retenir, pour les besoins de l’enquête, les documents se rapportant à l’argent liquide retenu temporairement ou en prendre copie. » ;
c) Le deuxième alinéa du même II est ainsi modifié :
– au début, est ajoutée la mention : « III. – » ;
– au début, les mots : « La somme consignée est saisie » sont remplacés par les mots : « L’argent liquide est saisi par les agents des douanes » ;
– après le mot : « durée », sont insérés les mots : « de la retenue temporaire ou » ;
d) Après le même deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l’argent liquide n’est pas disponible pour la saisie mentionnée au premier alinéa du présent III, la juridiction compétente prononce, pour tenir lieu de confiscation, la condamnation au paiement d’une somme équivalant à son montant. » ;
e) Le dernier alinéa du même II est ainsi modifié :
– à la première phrase, les mots : « de consignation et saisie » sont supprimés ;
– la dernière phrase est supprimée ;
f) Le III devient le IV et, au premier alinéa du même III, après la référence : « I », sont insérés les mots : « et les investigations nécessaires à la mise en œuvre du III » ;
4° Après le même article L. 152-4, il est inséré un article L. 152-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 152-4-1. – I. – Lorsqu’il existe des indices que de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant inférieur à 10 000 €, transporté par porteur ou faisant partie d’un envoi sans l’intervention d’un porteur, en provenance d’un État non-membre de l’Union européenne ou d’un État membre, ou à destination de tels États, est lié à l’une des activités énumérées au 4 de l’article 3 de la directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, modifiant le règlement (UE) n° 648/2012 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil et la directive 2006/70/CE de la Commission, les agents des douanes peuvent le retenir temporairement selon les modalités prévues au II de l’article L. 152-4 du présent code.
« Les motifs de la retenue temporaire sont notifiés au porteur, à l’expéditeur ou destinataire de l’argent liquide, ou à leur représentant, selon le cas. Ces derniers sont tenus de fournir à l’administration des douanes des informations dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État.
« II. – Les dispositions du I du présent article sont applicables dans le cas où cet argent liquide fait l’objet d’une déclaration en application du présent chapitre ou des articles 3 et 4 du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005.
« III. – Pour l’application du présent article, les agents des douanes exercent les pouvoirs qui leur sont conférés par le code des douanes. » ;
4° bis L’article L. 152-5 est ainsi rétabli :
« Art. L. 152-5. – La décision de retenue temporaire mentionnée au II de l’article L. 152-4 et à l’article L. 152-4-1 peut faire l’objet d’un recours, exercé par la personne à laquelle la décision de retenue temporaire est notifiée, devant le président de la chambre de l’instruction de la cour d’appel du lieu de la direction des douanes dont dépend le service chargé de la procédure. La décision de retenue temporaire mentionne les voies et délais de recours.
« Ce recours doit être exclusivement formé par déclaration remise ou adressée, par pli recommandé ou par voie électronique, au greffe de la cour dans un délai de quinze jours qui court à compter de la notification de la décision de retenue temporaire. Ce recours n’est pas suspensif.
« L’ordonnance du président de la chambre de l’instruction est susceptible d’un pourvoi en cassation, selon les règles prévues par le code de procédure pénale. » ;
5° L’article L. 721-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 721-2. – Les porteurs transportant de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant égal ou supérieur à 10 000 €, en provenance ou à destination de l’étranger, doivent en faire la déclaration auprès de l’administration des douanes. Ils mettent cet argent à la disposition de l’administration des douanes en cas de contrôle lors de ce transport.
« Est considérée comme porteur toute personne physique qui, pour elle-même ou pour le compte d’un tiers, transporte de l’argent liquide sur elle, dans ses bagages ou dans ses moyens de transport.
« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article. » ;
6° La sous-section 1 de la section 2 du chapitre Ier du titre II du livre VII est complétée par des articles L. 721-2-1 et L. 721-2-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 721-2-1. – Lorsque de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant égal ou supérieur à 10 000 € fait partie d’un envoi en provenance ou à destination de l’étranger, sans l’intervention d’un porteur, les agents des douanes peuvent exiger que l’expéditeur ou le destinataire ou leur représentant, selon le cas, fasse une déclaration de divulgation dans un délai et des conditions fixés par décret en Conseil d’État.
« Les agents des douanes peuvent retenir l’argent liquide jusqu’à ce que l’expéditeur, le destinataire ou leur représentant dépose la déclaration de divulgation.
« Art. L. 721-2-2. – I. – L’obligation de déclaration et l’obligation de divulgation mentionnées aux articles L. 721-2 et L. 721-2-1 ne sont pas réputées exécutées si les informations fournies sont incorrectes ou incomplètes ou si l’argent liquide n’est pas mis à la disposition de l’administration des douanes à sa demande, à l’occasion d’un contrôle lors d’un transport. Il en va de même lorsque la déclaration de divulgation n’est pas établie dans le délai applicable.
« II. – Les obligations mentionnées au I du présent article sont également considérées comme non exécutées si les déclarations portant sur de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant égal ou supérieur à 50 000 € ne sont pas accompagnées des documents dont la production permet de justifier de sa provenance. Un décret fixe la liste de ces documents et leurs modalités de transmission. » ;
7° L’article L. 721-3 est ainsi modifié :
a) Au I, la référence : « à l’article L. 721-2 » est remplacée par les références : « aux articles L. 721-2 à L. 721-2-2 » et les mots : « au quart » sont remplacés par les mots : « à 50 % » ;
b) Les II et III sont ainsi rédigés :
« II. – En cas de constatation de l’infraction mentionnée au I du présent article par les agents des douanes, ceux-ci peuvent prononcer la retenue temporaire de la totalité de l’argent liquide sur lequel a porté l’infraction ou la tentative d’infraction, pendant une durée ne pouvant être supérieure à trente jours renouvelable jusqu’à un maximum de quatre-vingt-dix jours. Les motifs de la retenue temporaire sont notifiés à l’auteur de l’infraction mentionnée au même I.
« Au terme de la durée de quatre-vingt-dix jours, si les nécessités de l’enquête l’exigent, les agents des douanes peuvent consigner l’argent liquide, sur autorisation du procureur de la République du lieu de la direction des douanes dont dépend le service chargé de la procédure, dans la limite de douze mois décomptés à partir du premier jour de la retenue temporaire.
« Les agents des douanes peuvent retenir, pour les besoins de l’enquête, les documents se rapportant à l’argent liquide retenu temporairement ou en prendre copie.
« III. – L’argent liquide est saisi par les agents des douanes et sa confiscation peut être prononcée par la juridiction compétente si, pendant la durée de la retenue temporaire ou de la consignation, il est établi que l’auteur de l’infraction mentionnée au I est ou a été en possession d’objets laissant penser qu’il est ou a été l’auteur d’une ou plusieurs infractions prévues et réprimées par le code des douanes applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon ou qu’il participe ou a participé à la commission de telles infractions ou s’il y a des raisons plausibles de penser que l’auteur de l’infraction mentionnée au même I a commis une infraction ou plusieurs infractions prévues et réprimées par le code des douanes applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon ou qu’il a participé à la commission de telles infractions.
« Lorsque l’argent liquide n’est pas disponible pour la saisie mentionnée au premier alinéa du présent III, la juridiction compétente prononce, pour tenir lieu de confiscation, la condamnation au paiement d’une somme équivalant à son montant.
« La décision de non-lieu ou de relaxe emporte de plein droit, aux frais du Trésor, mainlevée des mesures ordonnées. Il en est de même en cas d’extinction de l’action pour l’application des sanctions fiscales. » ;
c) Il est ajouté un IV ainsi rédigé :
« IV. – La recherche, la constatation et la poursuite des infractions mentionnées au I ainsi que les investigations nécessaires à la mise en œuvre du III sont faites dans les conditions fixées par le code des douanes applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon. » ;
8° Après le même article L. 721-3, sont insérés des articles L. 721-3-1 et L. 721-3-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 721-3-1. – I. – Lorsqu’il existe des indices que de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant inférieur à 10 000 €, transporté par porteur ou faisant partie d’un envoi sans l’intervention d’un porteur, en provenance ou à destination de l’étranger est lié à l’une des activités énumérées au 4 de l’article 3 de la directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, modifiant le règlement (UE) n° 648/2012 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil et la directive 2006/70/CE de la Commission, les agents des douanes peuvent le retenir temporairement selon les modalités prévues au II de l’article L. 721-3 du présent code. La décision de retenue peut faire l’objet du recours prévu à l’article L. 721-3-2.
« Les motifs de la retenue temporaire sont notifiés au porteur, à l’expéditeur ou au destinataire de l’argent liquide, ou à leur représentant, selon le cas. Ces derniers sont tenus de fournir à l’administration des douanes des informations dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État.
« II. – Les dispositions du I du présent article sont applicables dans le cas où cet argent liquide fait l’objet d’une déclaration en application de la présente section.
« III. – Pour l’application du présent article, les agents des douanes exercent les pouvoirs qui leur sont conférés par le code des douanes applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon.
« Art. L. 721-3-2. – La décision de retenue temporaire mentionnée au II de l’article L. 721-3 et à l’article L. 721-3-1 peut faire l’objet d’un recours, exercé par la personne à laquelle la décision de retenue temporaire est notifiée, devant le président du tribunal supérieur d’appel de Saint-Pierre-et-Miquelon. La décision de retenue temporaire mentionne les voies et délais de recours.
« Ce recours doit être exclusivement formé par déclaration remise ou adressée, par pli recommandé ou par voie électronique, au greffe du tribunal supérieur d’appel dans un délai de quinze jours qui court à compter de la notification de la décision de retenue temporaire. Ce recours n’est pas suspensif.
« L’ordonnance du président du tribunal supérieur d’appel de Saint-Pierre-et-Miquelon est susceptible d’un pourvoi en cassation, selon les règles du code de procédure pénale. » ;
9° À l’article L. 721-4, les mots : « et L. 721-3 » sont remplacés par les mots : « à L. 721-3-2 » ;
10° L’article L. 741-4 est ainsi rédigé :
« Art. L. 741-4. – Les porteurs transportant de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant égal ou supérieur à 1 193 317 francs CFP, en provenance ou à destination de l’étranger, doivent en faire la déclaration auprès de l’administration des douanes. Ils mettent cet argent à la disposition de l’administration des douanes en cas de contrôle lors de ce transport.
« Est considérée comme porteur toute personne physique qui, pour elle-même ou pour le compte d’un tiers, transporte de l’argent liquide sur elle, dans ses bagages ou dans ses moyens de transport.
« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article. » ;
11° La sous-section 2 de la section 5 du chapitre Ier du titre IV du livre VII est complétée par des articles L. 741-4-1 et L. 741-4-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 741-4-1. – Lorsque de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant égal ou supérieur à 1 193 317 francs CFP fait partie d’un envoi en provenance ou à destination de l’étranger, sans l’intervention d’un porteur, les agents des douanes peuvent exiger que l’expéditeur ou le destinataire ou leur représentant, selon le cas, fasse une déclaration de divulgation dans un délai et des conditions fixés par décret en Conseil d’État.
« Les agents des douanes peuvent retenir l’argent liquide jusqu’à ce que l’expéditeur, le destinataire ou leur représentant dépose la déclaration de divulgation.
« Art. L. 741-4-2. – I. – L’obligation de déclaration et l’obligation de divulgation mentionnées aux articles L. 741-4 et L. 741-4-1 ne sont pas réputées exécutées si les informations fournies sont incorrectes ou incomplètes ou si l’argent liquide n’est pas mis à la disposition de l’administration des douanes à sa demande, à l’occasion d’un contrôle lors d’un transport. Il en va de même lorsque la déclaration de divulgation n’est pas établie dans le délai applicable.
« II. – Les obligations mentionnées au I du présent article sont également considérées comme non exécutées si les déclarations portant sur de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant égal ou supérieur à 5 966 500 francs CFP ne sont pas accompagnées des documents dont la production permet de justifier de sa provenance. Un décret fixe la liste de ces documents et leurs modalités de transmission. » ;
12° L’article L. 741-5 est ainsi modifié :
a) Au I, la référence : « à l’article L. 741-4 » est remplacée par les références : « aux articles L. 741-4 à L. 741-4-2 » et les mots : « au quart » sont remplacés par les mots : « à 50 % » ;
b) Les II et III sont ainsi rédigés :
« II. – En cas de constatation de l’infraction mentionnée au I du présent article par les agents des douanes, ceux-ci peuvent prononcer la retenue temporaire de la totalité de l’argent liquide sur lequel a porté l’infraction ou la tentative d’infraction, pendant une durée ne pouvant être supérieure à trente jours renouvelable jusqu’à un maximum de quatre-vingt-dix jours. Les motifs de la retenue temporaire sont notifiés à l’auteur de l’infraction mentionnée au même I.
« Au terme de la durée de quatre-vingt-dix jours, si les nécessités de l’enquête l’exigent, les agents des douanes peuvent consigner l’argent liquide, sur autorisation du procureur de la République du lieu de la direction des douanes dont dépend le service chargé de la procédure, dans la limite de douze mois décomptés à partir du premier jour de la retenue temporaire.
« Les agents des douanes peuvent retenir, pour les besoins de l’enquête, les documents se rapportant à l’argent liquide retenu temporairement ou en prendre copie.
« III. – L’argent liquide est saisi par les agents des douanes et sa confiscation peut être prononcée par la juridiction compétente si, pendant la durée de la retenue temporaire ou de la consignation, il est établi que l’auteur de l’infraction mentionnée au I est ou a été en possession d’objets laissant penser qu’il est ou a été l’auteur d’une ou plusieurs infractions prévues et réprimées par le code des douanes applicable en Nouvelle-Calédonie ou qu’il participe ou a participé à la commission de telles infractions ou s’il y a des raisons plausibles de penser que l’auteur de l’infraction mentionnée au même I a commis une infraction ou plusieurs infractions prévues et réprimées par le code des douanes applicable à la Nouvelle-Calédonie ou qu’il a participé à la commission de telles infractions.
« Lorsque l’argent liquide n’est pas disponible pour la saisie mentionnée au premier alinéa du présent III, la juridiction compétente prononce, pour tenir lieu de confiscation, la condamnation au paiement d’une somme équivalant à son montant.
« La décision de non-lieu ou de relaxe emporte de plein droit, aux frais du Trésor, mainlevée des mesures ordonnées. Il en est de même en cas d’extinction de l’action pour l’application des sanctions fiscales. » ;
c) Il est ajouté un IV ainsi rédigé :
« IV. – La recherche, la constatation et la poursuite des infractions mentionnées au I ainsi que les investigations nécessaires à la mise en œuvre du III sont faites dans les conditions fixées par le code des douanes applicable en Nouvelle-Calédonie. » ;
13° Après le même article L. 741-5, sont insérés des articles L. 741-5-1 et L. 741-5-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 741-5-1. – I. – Lorsqu’il existe des indices que de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant inférieur à 1 193 317 francs CFP, transporté par porteur ou faisant partie d’un envoi sans l’intervention d’un porteur, en provenance ou à destination de l’étranger est lié à l’une des activités énumérées au 4 de l’article 3 de la directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, les agents des douanes peuvent le retenir temporairement selon les modalités prévues au II de l’article L. 741-5 du présent code. La décision de retenue peut faire l’objet du recours prévu à l’article L. 741-5-2.
« Les motifs de la retenue temporaire sont notifiés au porteur, à l’expéditeur ou destinataire de l’argent liquide, ou à leur représentant, selon le cas. Ces derniers sont tenus de fournir à l’administration des douanes des informations dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État.
« II. – Les dispositions du I du présent article sont applicables dans le cas où cet argent liquide fait l’objet d’une déclaration en application de la présente section.
« III. – Pour l’application du présent article, les agents des douanes exercent les pouvoirs qui leur sont conférés par le code des douanes applicable à la Nouvelle-Calédonie.
« Art. L. 741-5-2. – La décision de retenue temporaire mentionnée au II de l’article L. 741-5 et à l’article L. 741-5-1 peut faire l’objet d’un recours, exercé par la personne à laquelle la décision de retenue temporaire est notifiée, devant le président de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Nouméa. La décision de retenue temporaire mentionne les voies et délais de recours.
« Ce recours doit être exclusivement formé par déclaration remise ou adressée, par pli recommandé ou par voie électronique, au greffe de la cour dans un délai de quinze jours qui court à compter de la notification de la décision de retenue temporaire. Ce recours n’est pas suspensif.
« L’ordonnance du président de la chambre de l’instruction est susceptible d’un pourvoi en cassation, selon les règles du code de procédure pénale. » ;
14° À l’article L. 741-6, les mots : « et L. 741-5 » sont remplacés par les mots : « à L. 741-5-1 » ;
15° L’article L. 751-4 est ainsi rédigé :
« Art. L. 751-4. – Les porteurs transportant de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant égal ou supérieur à 1 193 317 francs CFP, en provenance ou à destination de l’étranger, doivent en faire la déclaration auprès de l’administration des douanes. Ils mettent cet argent à la disposition de l’administration des douanes en cas de contrôle lors de ce transport.
« Est considérée comme porteur toute personne physique qui, pour elle-même ou pour le compte d’un tiers, transporte de l’argent liquide sur elle, dans ses bagages ou dans ses moyens de transport.
« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article. » ;
16° La sous-section 2 de la section 5 du chapitre Ier du titre V du livre VII est complétée par des articles L. 751-4-1 et L. 751-4-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 751-4-1. – Lorsque de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant égal ou supérieur à 1 193 317 francs CFP fait partie d’un envoi en provenance ou à destination de l’étranger, sans l’intervention d’un porteur, les agents des douanes peuvent exiger que l’expéditeur ou le destinataire ou leur représentant, selon le cas, fasse une déclaration de divulgation dans un délai et des conditions fixés par décret en Conseil d’État.
« Les agents des douanes peuvent retenir l’argent liquide jusqu’à ce que l’expéditeur, le destinataire ou leur représentant dépose la déclaration de divulgation.
« Art. L. 751-4-2. – I. – L’obligation de déclaration et l’obligation de divulgation mentionnées aux articles L. 751-4 et L. 751-4-1 ne sont pas réputées exécutées si les informations fournies sont incorrectes ou incomplètes ou si l’argent liquide n’est pas mis à la disposition de l’administration des douanes à sa demande, à l’occasion d’un contrôle lors d’un transport. Il en va de même lorsque la déclaration de divulgation n’est pas établie dans le délai applicable.
« II. – Les obligations mentionnées au I du présent article sont également considérées comme non exécutées si les déclarations portant sur de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant égal ou supérieur à 5 966 500 francs CFP ne sont pas accompagnées des documents dont la production permet de justifier de sa provenance. Un décret fixe la liste de ces documents et leurs modalités de transmission. » ;
17° L’article L. 751-5 est ainsi modifié :
a) Au I, la référence : « à l’article L. 751-4 » est remplacée par les références : « aux articles L. 751-4 à L. 751-4-2 » et les mots : « au quart » sont remplacés par les mots : « à 50 % » ;
b) Les II et III sont ainsi rédigés :
« II. – En cas de constatation de l’infraction mentionnée au I du présent article par les agents des douanes, ceux-ci peuvent prononcer la retenue temporaire de la totalité de l’argent liquide sur lequel a porté l’infraction ou la tentative d’infraction, pendant une durée ne pouvant être supérieure à trente jours renouvelable jusqu’à un maximum de quatre-vingt-dix jours. Les motifs de la retenue temporaire sont notifiés à l’auteur de l’infraction mentionnée au même I.
« Au terme de la durée de quatre-vingt-dix jours, si les nécessités de l’enquête l’exigent, les agents des douanes peuvent consigner l’argent liquide, sur autorisation du procureur de la République du lieu de la direction des douanes dont dépend le service chargé de la procédure, dans la limite de douze mois décomptés à partir du premier jour de la retenue temporaire.
« Les agents des douanes peuvent retenir, pour les besoins de l’enquête, les documents se rapportant à l’argent liquide retenu temporairement ou en prendre copie.
« III. – L’argent liquide est saisi par les agents des douanes et sa confiscation peut être prononcée par la juridiction compétente si, pendant la durée de la retenue temporaire ou de la consignation, il est établi que l’auteur de l’infraction mentionnée au I est ou a été en possession d’objets laissant penser qu’il est ou a été l’auteur d’une ou plusieurs infractions prévues et réprimées par le code des douanes applicable à la Polynésie française ou qu’il participe ou a participé à la commission de telles infractions ou s’il y a des raisons plausibles de penser que l’auteur de l’infraction mentionnée au même I a commis une infraction ou plusieurs infractions prévues et réprimées par le code des douanes applicable en Polynésie française ou qu’il a participé à la commission de telles infractions.
« Lorsque l’argent liquide n’est pas disponible pour la saisie mentionnée au premier alinéa du présent III, la juridiction compétente prononce, pour tenir lieu de confiscation, la condamnation au paiement d’une somme équivalant à son montant.
« La décision de non-lieu ou de relaxe emporte de plein droit, aux frais du Trésor, mainlevée des mesures ordonnées. Il en est de même en cas d’extinction de l’action pour l’application des sanctions fiscales. » ;
c) Il est ajouté un IV ainsi rédigé :
« IV. – La recherche, la constatation et la poursuite des infractions mentionnées au I et les investigations nécessaires à la mise en œuvre du III sont faites dans les conditions fixées par le code des douanes applicable à la Polynésie française. » ;
18° Après le même article L. 751-5, sont insérés des articles L. 751-5-1 et L. 751-5-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 751-5-1. – I. – Lorsqu’il existe des indices que de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant inférieur à 1 193 317 francs CFP, transporté par porteur ou faisant partie d’un envoi sans l’intervention d’un porteur, en provenance ou à destination de l’étranger est lié à l’une des activités énumérées au 4 de l’article 3 de la directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, modifiant le règlement (UE) n° 648/2012 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil et la directive 2006/70/CE de la Commission, les agents des douanes peuvent le retenir temporairement selon les modalités prévues au II de l’article L. 751-5 du présent code. La décision de retenue peut faire l’objet du recours prévu à l’article L. 751-5-2.
« Les motifs de la retenue temporaire sont notifiés au porteur, à l’expéditeur ou destinataire de l’argent liquide, ou à leur représentant, selon le cas. Ces derniers sont tenus de fournir à l’administration des douanes des informations dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État.
« II. – Les dispositions du I du présent article sont applicables dans le cas où cet argent liquide fait l’objet d’une déclaration en application de la présente section.
« III. – Pour l’application du présent article, les agents des douanes exercent les pouvoirs qui leur sont conférés par le code des douanes applicable à la Polynésie française.
« Art. L. 751-5-2. – La décision de retenue temporaire mentionnée au II de l’article L. 751-5 et à l’article L. 751-5-1 peut faire l’objet d’un recours, exercé par la personne à laquelle la décision de retenue temporaire est notifiée, devant le président de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Papeete. La décision de retenue temporaire mentionne les voies et délais de recours.
« Ce recours doit être exclusivement formé par déclaration remise ou adressée, par pli recommandé ou par voie électronique, au greffe de la cour dans un délai de quinze jours qui court à compter de la notification de la décision de retenue temporaire. Ce recours n’est pas suspensif.
« L’ordonnance du président de la chambre de l’instruction est susceptible d’un pourvoi en cassation, selon les règles du code de procédure pénale. » ;
19° À l’article L. 751-6, les mots : « et L. 751-5 » sont remplacés par les mots : « à L. 751-5-2 » ;
20° L’article L. 761-3 est ainsi rédigé :
« Art. L. 761-3. – Les porteurs transportant de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant égal ou supérieur à 1 193 317 francs CFP, en provenance ou à destination de l’étranger, doivent en faire la déclaration auprès de l’administration des douanes. Ils mettent cet argent à la disposition de l’administration des douanes en cas de contrôle lors de ce transport.
« Est considérée comme porteur toute personne physique qui, pour elle-même ou pour le compte d’un tiers, transporte de l’argent liquide sur elle, dans ses bagages ou dans ses moyens de transport.
« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article. » ;
21° La sous-section 2 de la section 4 du chapitre Ier du titre VI du livre VII est complétée par des articles L. 761-3-1 et L. 761-3-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 761-3-1. – Lorsque de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant égal ou supérieur à 1 193 317 francs CFP fait partie d’un envoi en provenance ou à destination de l’étranger, sans l’intervention d’un porteur, les agents des douanes peuvent exiger que l’expéditeur ou le destinataire ou leur représentant, selon le cas, fasse une déclaration de divulgation dans un délai et des conditions fixés par décret en Conseil d’État.
« Les agents des douanes peuvent retenir l’argent liquide jusqu’à ce que l’expéditeur, le destinataire ou leur représentant dépose la déclaration de divulgation.
« Art. L. 761-3-2. – I. – L’obligation de déclaration et l’obligation de divulgation mentionnées aux articles L. 761-3 et L. 761-3-1 ne sont pas réputées exécutées si les informations fournies sont incorrectes ou incomplètes ou si l’argent liquide n’est pas mis à la disposition de l’administration des douanes à sa demande, à l’occasion d’un contrôle lors d’un transport. Il en va de même lorsque la déclaration de divulgation n’est pas établie dans le délai applicable.
« II. – Les obligations mentionnées au I du présent article sont également considérées comme non exécutées si les déclarations portant sur de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant égal ou supérieur à 5 966 500 francs CFP ne sont pas accompagnées des documents dont la production permet de justifier de sa provenance. Un décret fixe la liste de ces documents et leurs modalités de transmission. » ;
22° L’article L. 761-4 est ainsi modifié :
a) Au I, la référence : « à l’article L. 761-3 » est remplacée par les références : « aux articles L. 761-3 à L. 761-3-2 » et les mots : « au quart » sont remplacés par les mots : « à 50 % » ;
b) Les II et III sont ainsi rédigés :
« II. – En cas de constatation de l’infraction mentionnée au I du présent article par les agents des douanes, ceux-ci peuvent prononcer la retenue temporaire de la totalité de l’argent liquide sur lequel a porté l’infraction ou la tentative d’infraction, pendant une durée ne pouvant être supérieure à trente jours renouvelable jusqu’à un maximum de quatre-vingt-dix jours. Les motifs de la retenue temporaire sont notifiés à l’auteur de l’infraction mentionnée au même I.
« Au terme de la durée de quatre-vingt-dix jours, si les nécessités de l’enquête l’exigent, les agents des douanes peuvent consigner l’argent liquide, sur autorisation du procureur de la République du lieu de la direction des douanes dont dépend le service chargé de la procédure, dans la limite de douze mois décomptés à partir du premier jour de la retenue temporaire.
« Les agents des douanes peuvent retenir, pour les besoins de l’enquête, les documents se rapportant à l’argent liquide retenu temporairement ou en prendre copie.
« III. – L’argent liquide est saisi par les agents des douanes et sa confiscation peut être prononcée par la juridiction compétente si, pendant la durée de la retenue temporaire ou de la consignation, il est établi que l’auteur de l’infraction mentionnée au I est ou a été en possession d’objets laissant penser qu’il est ou a été l’auteur d’une ou plusieurs infractions prévues et réprimées par le code des douanes applicable aux îles Wallis et Futuna ou qu’il participe ou a participé à la commission de telles infractions ou s’il y a des raisons plausibles de penser que l’auteur de l’infraction mentionnée au même I a commis une infraction ou plusieurs infractions prévues et réprimées par le code des douanes applicable dans les îles Wallis et Futuna ou qu’il a participé à la commission de telles infractions.
« Lorsque l’argent liquide n’est pas disponible pour la saisie mentionnée au premier alinéa du présent III, la juridiction compétente prononce, pour tenir lieu de confiscation, la condamnation au paiement d’une somme équivalant à son montant.
« La décision de non-lieu ou de relaxe emporte de plein droit, aux frais du Trésor, mainlevée des mesures ordonnées. Il en est de même en cas d’extinction de l’action pour l’application des sanctions fiscales. » ;
c) Il est ajouté un IV ainsi rédigé :
« IV. – La recherche, la constatation et la poursuite des infractions mentionnées au I et les investigations nécessaires à la mise en œuvre du III sont faites dans les conditions fixées par le code des douanes applicable aux îles Wallis et Futuna. » ;
23° Après le même article L. 761-4, sont insérés des articles L. 761-4-1 et L. 761-4-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 761-4-1. – I. – Lorsqu’il existe des indices que de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant inférieur à 1 193 317 francs CFP, transporté par porteur ou faisant partie d’un envoi sans l’intervention d’un porteur, en provenance ou à destination de l’étranger est lié à l’une des activités énumérées au 4 de l’article 3 de la directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, modifiant le règlement (UE) n° 648/2012 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil et la directive 2006/70/CE de la Commission, les agents des douanes peuvent le retenir temporairement selon les modalités prévues au II de l’article L. 761-4 du présent code. La décision de retenue peut faire l’objet du recours prévu à l’article L. 761-4-2.
« Les motifs de la retenue temporaire sont notifiés au porteur, à l’expéditeur ou destinataire de l’argent liquide, ou à leur représentant, selon le cas. Ces derniers sont tenus de fournir à l’administration des douanes des informations dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État.
« II. – Les dispositions du I du présent article sont applicables dans le cas où cet argent liquide fait l’objet d’une déclaration en application de la présente section.
« III. – Pour l’application du présent article, les agents des douanes exercent les pouvoirs qui leur sont conférés par le code des douanes applicable aux îles Wallis et Futuna.
« Art. L. 761-4-2. – La décision de retenue temporaire mentionnée au II de l’article L. 761-4 et à l’article L. 761-4-1 peut faire l’objet d’un recours, exercé par la personne à laquelle la décision de retenue temporaire est notifiée, devant le président de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Nouméa. La décision de retenue temporaire mentionne les voies et délais de recours.
« Ce recours doit être exclusivement formé par déclaration remise ou adressée, par pli recommandé ou par voie électronique, au greffe de la cour dans un délai de quinze jours qui court à compter de la notification de la décision de retenue temporaire. Ce recours n’est pas suspensif.
« L’ordonnance du président de la chambre de l’instruction est susceptible d’un pourvoi en cassation, selon les règles du code de procédure pénale. » ;
24° À l’article L. 761-5, les mots : « et L. 761-4 » sont remplacés par les mots : « à L. 761-4-2 » ;
25° L’article L. 771-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 771-1. – Les porteurs transportant de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant égal ou supérieur à 10 000 €, en provenance ou à destination de l’étranger, doivent en faire la déclaration auprès de l’administration des douanes. Ils mettent cet argent à la disposition de l’administration des douanes en cas de contrôle lors de ce transport.
« Est considérée comme porteur toute personne physique qui, pour elle-même ou pour le compte d’un tiers, transporte de l’argent liquide sur elle, dans ses bagages ou dans ses moyens de transport.
« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article. » ;
26° La section I du chapitre Ier du titre VII du livre VII est complétée par des articles L. 771-1-1 et L. 771-1-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 771-1-1. – Lorsque de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant égal ou supérieur à 10 000 € fait partie d’un envoi en provenance ou à destination de l’étranger, sans l’intervention d’un porteur, les agents des douanes peuvent exiger que l’expéditeur ou le destinataire ou leur représentant, selon le cas, fasse une déclaration de divulgation dans un délai et des conditions fixés par décret en Conseil d’État.
« Les agents des douanes peuvent retenir l’argent liquide jusqu’à ce que l’expéditeur, le destinataire ou leur représentant dépose la déclaration de divulgation.
« Art. L. 771-1-2. – I. – L’obligation de déclaration et l’obligation de divulgation mentionnées aux articles L. 771-1 et L. 771-1-1 ne sont pas réputées exécutées si les informations fournies sont incorrectes ou incomplètes ou si l’argent liquide n’est pas mis à la disposition de l’administration des douanes à sa demande, à l’occasion d’un contrôle lors d’un transport. Il en va de même lorsque la déclaration de divulgation n’est pas établie dans le délai applicable.
« II. – Les obligations mentionnées au I du présent article sont également considérées comme non exécutées si les déclarations portant sur de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant égal ou supérieur à 50 000 € ne sont pas accompagnées des documents dont la production permet de justifier de sa provenance. Un décret fixe la liste de ces documents et leurs modalités de transmission. » ;
27° L’article L. 771-2 est ainsi modifié :
a) Au I, la référence : « à l’article L. 771-1 » est remplacée par les références : « aux articles L. 771-1 à L. 771-1-2 » et les mots : « au quart » sont remplacés par les mots : « à 50 % » ;
b) Les II et III sont ainsi rédigés :
« II. – En cas de constatation de l’infraction mentionnée au I du présent article par les agents des douanes, ceux-ci peuvent prononcer la retenue temporaire de la totalité de l’argent liquide sur lequel a porté l’infraction ou la tentative d’infraction, pendant une durée ne pouvant être supérieure à trente jours renouvelable jusqu’à un maximum de quatre-vingt-dix jours. Les motifs de la retenue temporaire sont notifiés à l’auteur de l’infraction mentionnée au même I.
« Au terme de la durée de quatre-vingt-dix jours, si les nécessités de l’enquête l’exigent, les agents des douanes peuvent consigner l’argent liquide, sur autorisation du procureur de la République du lieu de la direction des douanes dont dépend le service chargé de la procédure, dans la limite de douze mois décomptés à partir du premier jour de la retenue temporaire.
« Les agents des douanes peuvent retenir, pour les besoins de l’enquête, les documents se rapportant à l’argent liquide retenu temporairement ou en prendre copie.
« III. – L’argent liquide est saisi par les agents des douanes et sa confiscation peut être prononcée par la juridiction compétente si, pendant la durée de la retenue temporaire ou de la consignation, il est établi que l’auteur de l’infraction mentionnée au I est ou a été en possession d’objets laissant penser qu’il est ou a été l’auteur d’une ou plusieurs infractions prévues et réprimées par le code des douanes applicable à Saint-Barthélemy ou qu’il participe ou a participé à la commission de telles infractions ou s’il y a des raisons plausibles de penser que l’auteur de l’infraction mentionnée au même I a commis une infraction ou plusieurs infractions prévues et réprimées par le code des douanes applicable à Saint-Barthélemy ou qu’il a participé à la commission de telles infractions.
« Lorsque l’argent liquide n’est pas disponible pour la saisie mentionnée au premier alinéa du présent III, la juridiction compétente prononce, pour tenir lieu de confiscation, la condamnation au paiement d’une somme équivalant à son montant.
« La décision de non-lieu ou de relaxe emporte de plein droit, aux frais du Trésor, mainlevée des mesures ordonnées. Il en est de même en cas d’extinction de l’action pour l’application des sanctions fiscales. » ;
c) Il est ajouté un IV ainsi rédigé :
« IV. – La recherche, la constatation et la poursuite des infractions mentionnées au I et les investigations nécessaires à la mise en œuvre du III sont faites dans les conditions fixées par le code des douanes applicable à Saint-Barthélemy. » ;
28° Après le même article L. 771-2, sont insérés des articles L. 771-2-1 et L. 771-2-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 771-2-1. – I. – Lorsqu’il existe des indices que de l’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005, d’un montant inférieur à 10 000 €, transporté par porteur ou faisant partie d’un envoi sans l’intervention d’un porteur, en provenance ou à destination de l’étranger est lié à l’une des activités énumérées au 4 de l’article 3 de la directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, modifiant le règlement (UE) n° 648/2012 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil et la directive 2006/70/CE de la Commission, les agents des douanes peuvent le retenir temporairement selon les modalités prévues au II de l’article L. 771-2 du présent code. La décision de retenue peut faire l’objet du recours prévu à l’article L. 771-2-2.
« Les motifs de la retenue temporaire sont notifiés au porteur, à l’expéditeur ou destinataire de l’argent liquide, ou à leur représentant, selon le cas. Ces derniers sont tenus de fournir à l’administration des douanes des informations dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État.
« II. – Les dispositions du I du présent article sont applicables dans le cas où cet argent liquide fait l’objet d’une déclaration en application du présent chapitre.
« III. – Pour l’application du présent article, les agents des douanes exercent les pouvoirs qui leur sont conférés par le code des douanes applicable à Saint-Barthélemy.
« Art. L. 771-2-2. – La décision de retenue temporaire mentionnée au II de l’article L. 771-2 et à l’article L. 771-2-1 peut faire l’objet d’un recours, exercé par la personne à laquelle la décision de retenue temporaire est notifiée, devant le président de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Basse-Terre. La décision de retenue temporaire mentionne les voies et délais de recours.
« Ce recours doit être exclusivement formé par déclaration remise ou adressée, par pli recommandé ou par voie électronique, au greffe de la cour dans un délai de quinze jours qui court à compter de la notification de la décision de retenue temporaire. Ce recours n’est pas suspensif.
« L’ordonnance du président de la chambre de l’instruction est susceptible d’un pourvoi en cassation, selon les règles du code de procédure pénale. » ;
29° À l’article L. 771-3, les mots : « et L. 771-2 » sont remplacés par les mots : « à L. 771-2-2 ».
I bis. – L’article 1649 quater A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « des sommes, titres ou valeurs » sont remplacés par les mots : « d’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005 » et la référence : « à l’article L. 152-1 » est remplacée par les références : « aux articles L. 152-1 à L. 152-1-2 » ;
2° Au début du second alinéa, les mots : « Les sommes, titres ou valeurs transférés » sont remplacés par les mots : « L’argent liquide, au sens du règlement (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 précité, transféré », le mot : « constituent » est remplacé par le mot : « constitue », la référence : « à l’article L. 152-1 » est remplacée par les références : « aux articles L. 152-1 à L. 152-1-2 » et, à la fin, les mots : « (CE) n° 1889/2005 du Parlement européen et du Conseil, du 26 octobre 2005, relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant ou sortant de la Communauté » sont remplacés par les mots : « (UE) 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 précité ».
II. – (Non modifié) – (Adopté.)
Chapitre V
Dispositions en matière financière
Article 12
(Non modifié)
I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance, au plus tard le 8 juillet 2021, les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour :
1° Transposer la directive (UE) 2019/2162 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 concernant l’émission d’obligations garanties et la surveillance publique des obligations garanties et modifiant les directives 2009/65/CE et 2014/59/UE ;
2° Rendre applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, avec les adaptations nécessaires, les articles du code monétaire et financier et, le cas échéant, les articles d’autres codes et lois dans leur rédaction résultant des ordonnances prises sur le fondement du 1° du présent I pour celles qui relèvent de la compétence de l’État et procéder, le cas échéant, aux adaptations nécessaires de ces articles en ce qui concerne les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon.
II. – (Non modifié) – (Adopté.)
Article 13
I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance, au plus tard le 26 juin 2021, les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour :
1° Transposer la directive (UE) 2019/2034 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 concernant la surveillance prudentielle des entreprises d’investissement et modifiant les directives 2002/87/CE, 2009/65/CE, 2011/61/UE, 2013/36/UE, 2014/59/UE et 2014/65/UE ;
2° Rendre applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, avec les adaptations nécessaires, les articles du code monétaire et financier et, le cas échéant, les articles d’autres codes et lois dans leur rédaction résultant des ordonnances prises sur le fondement du 1° du présent I pour celles qui relèvent de la compétence de l’État et procéder, le cas échéant, aux adaptations nécessaires de ces articles en ce qui concerne les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon.
II. – (Non modifié) – (Adopté.)
Article 14
(Non modifié)
I. – A. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance, au plus tard le 2 août 2021, les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour :
1° Transposer la directive (UE) 2019/1160 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 modifiant les directives 2009/65/CE et 2011/61/UE en ce qui concerne la distribution transfrontalière des organismes de placement collectif et mettre en cohérence avec les mesures issues de cette transposition les dispositions du code monétaire et financier et, le cas échéant, celles d’autres codes et lois, relatives à la commercialisation et la distribution de placements collectifs ;
2° Rendre applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, avec les adaptations nécessaires, les articles du code monétaire et financier et, le cas échéant, les articles d’autres codes et lois dans leur rédaction résultant des ordonnances prises sur le fondement du 1° du présent I pour celles qui relèvent de la compétence de l’État et procéder, le cas échéant, aux adaptations nécessaires de ces articles en ce qui concerne les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon.
B. – Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance.
II. – (Supprimé)
III et IV. – (Non modifiés) – (Adopté.)
Article 15
(Non modifié)
Le A du III de l’article 200 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « dans un délai de vingt-quatre mois à compter de la promulgation de la présente loi » sont remplacés par les mots : « au plus tard le 31 janvier 2021 » ;
2° Le 1° est ainsi rédigé :
« 1° Compléter et modifier les dispositions du code monétaire et financier et, le cas échéant, celles d’autres codes et lois, afin de transposer :
« a) La directive (UE) 2019/878 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2019 modifiant la directive 2013/36/UE en ce qui concerne les entités exemptées, les compagnies financières holding, les compagnies financières holding mixtes, la rémunération, les mesures et pouvoirs de surveillance et les mesures de conservation des fonds propres, en prévoyant les mesures de coordination nécessaires pour étendre ces règles aux sociétés de financement ;
« b) La directive (UE) 2019/879 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2019 modifiant la directive 2014/59/UE en ce qui concerne la capacité d’absorption des pertes et de recapitalisation des établissements de crédit et des entreprises d’investissement et la directive 98/26/CE ; ». – (Adopté.)
Article 16
[Pour coordination]
(Non modifié)
Le code de commerce est ainsi modifié :
1° (Non modifié) L’article L. 442-3 est ainsi modifié :
a) À la fin du premier alinéa, les mots : « de bénéficier » sont supprimés ;
b) Au début du a, sont ajoutés les mots : « De bénéficier » ;
c) Au début du b, sont ajoutés les mots : « De bénéficier » ;
d) Il est ajouté un c ainsi rédigé :
« c) D’interdire au cocontractant la cession à des tiers des créances qu’il détient sur elle. » ;
2° (Non modifié) La dix-huitième ligne du tableau du second alinéa du 4° du I de l’article L. 950-1 dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … d’accélération et de simplification de l’action publique est remplacée par trois lignes ainsi rédigées :
« |
Articles L. 442-1 et L. 442-2 |
L’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 |
|
Article L. 442-3 |
La loi n° … du … portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière |
||
Articles L. 442-4 à L. 442-6 |
L’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 |
» |
– (Adopté.)
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Article 16 ter
(Non modifié)
I. – (Non modifié)
II. – L’article L. 211-5-2 du code des assurances est applicable aux contrats en cours à la date de la publication de la présente loi. – (Adopté.)
Chapitre VI
Dispositions améliorant le fonctionnement du marché intérieur
Article 17
(Non modifié)
La section I du chapitre III du titre II de la première partie du livre des procédures fiscales est complétée par un 3° ainsi rédigé :
« 3° : Publicité des bénéficiaires d’aides d’État à caractère fiscal
« Art. L. 112 B. – L’administration fiscale peut rendre publiques les informations suivantes relatives aux bénéficiaires d’aides d’État, au sens de l’article 107 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, à caractère fiscal lorsque le montant d’aide individuelle excède le montant le plus faible prévu, selon les cas, au 5° ou au 12° du présent article :
« 1° Le nom et l’identifiant du bénéficiaire ;
« 2° Le type d’entreprise au moment de l’octroi de l’aide ;
« 3° La région d’établissement du bénéficiaire, au sens de la nomenclature des unités territoriales statistiques ;
« 4° Le secteur d’activité, au sens de la nomenclature statistique des activités économiques dans la Communauté européenne ;
« 5° L’élément d’aide, en indiquant, s’agissant du montant des aides individuelles, si ce montant est compris dans les tranches de montant listées par arrêté du ministre chargé du budget, en fonction des règles de transparence définies par la Commission européenne pour chaque catégorie d’aide ;
« 6° L’instrument d’aide ;
« 7° La date d’octroi de l’aide ;
« 8° L’objectif de l’aide ;
« 9° L’autorité d’octroi de l’aide ;
« 10° Pour les aides visant à promouvoir les investissements en faveur du financement des risques, les noms de l’entité mandatée et des intermédiaires financiers sélectionnés ;
« 11° Le numéro de la mesure d’aide attribué par la Commission européenne ;
« 12° Par dérogation aux 1° à 11°, pour les aides d’État sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général, le mandat définissant les obligations de service public ou une synthèse de celui-ci et le montant annuel de l’aide, lorsqu’il est supérieur à 15 millions d’euros. » –(Adopté.)
Article 18
(Non modifié)
I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de cinq mois à compter de la publication de la présente loi, les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour modifier les dispositions du code rural et de la pêche maritime afin :
1° D’apporter aux dispositions du chapitre III du titre V du livre VI du même code les adaptations rendues nécessaires par l’entrée en application du règlement (UE) 2016/1012 du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2016 relatif aux conditions zootechniques et généalogiques applicables à l’élevage, aux échanges et à l’entrée dans l’Union de reproducteurs de race pure, de reproducteurs porcins hybrides et de leurs produits germinaux et modifiant le règlement (UE) n° 652/2014 et les directives du Conseil 89/608/CEE et 90/425/CEE, et abrogeant certains actes dans le domaine de l’élevage d’animaux, ainsi qu’avec les actes délégués et d’exécution qu’il prévoit ;
2° De prévoir d’autres modifications permettant d’adapter aux évolutions induites pour le secteur de la génétique animale par le règlement et les actes de l’Union européenne mentionnés au 1° du présent I les règles applicables à la reproduction animale, à l’amélioration génétique, au contrôle et à l’enregistrement des performances, à la préservation des ressources génétiques animales et à leur disponibilité pour les éleveurs ainsi qu’aux organismes et établissements intervenant dans ces secteurs, dans l’objectif de préserver la diversité génétique et l’accès des éleveurs à des ressources génétiques de qualité ;
3° De prévoir les modalités selon lesquelles sont obtenues et conservées les données zootechniques et les ressources zoogénétiques nationales, dans un but de préservation et d’amélioration du patrimoine génétique commun ainsi que les modalités d’accès à ces mêmes données et ressources ;
4° D’étendre et d’adapter, en tout ou partie, aux animaux d’autres espèces les dispositions prises sur le fondement du présent I ;
5° De prévoir les modalités de contrôle et de sanction des manquements et infractions aux dispositions du chapitre III du titre V du livre VI du code rural et de la pêche maritime ainsi que les conditions dans lesquelles certaines de ces missions peuvent être déléguées ;
6° De préciser les conditions d’application des dispositions du même chapitre III à l’outre-mer ;
7° De réorganiser les dispositions dudit chapitre III compte tenu des modifications qui leur sont apportées et d’apporter au même chapitre III les modifications permettant d’assurer leur cohérence avec les autres dispositions du livre VI du même code et le respect des règles de répartition entre partie législative et partie réglementaire, de corriger les éventuelles erreurs rédactionnelles et d’abroger les dispositions devenues sans objet ;
8° D’assurer la cohérence des autres dispositions législatives du code rural et de la pêche maritime avec les dispositions prises sur le fondement du présent I.
II. – (Non modifié) – (Adopté.)
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Article 19 bis
(Non modifié)
L’article L. 513-1 du code rural et de la pêche maritime est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« – elle assure la collecte et le traitement de données relatives aux exploitations, collectées par les établissements mentionnés à l’article L. 212-7, qui sont notamment requises par le règlement (UE) 2016/429 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 relatif aux maladies animales transmissibles et modifiant et abrogeant certains actes dans le domaine de la santé animale, dit “législation sur la santé animale” ;
« – elle peut assurer la collecte et le traitement de données relatives à l’identification et à la traçabilité des animaux, qui sont requises par le même règlement. » – (Adopté.)
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Chapitre VII
Dispositions relatives à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme
Article 21
(Non modifié)
I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance, au plus tard le 1er août 2021, les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour :
1° Transposer la directive (UE) 2019/1153 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 fixant les règles facilitant l’utilisation d’informations financières et d’une autre nature aux fins de la prévention ou de la détection de certaines infractions pénales, ou des enquêtes ou des poursuites en la matière, et abrogeant la décision 2000/642/JAI du Conseil et mettre en cohérence avec les mesures issues de cette transposition les dispositions du code monétaire et financier et, le cas échéant, celles d’autres codes et lois, relatives à l’échange d’informations financières ;
2° Rendre applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, avec les adaptations nécessaires, les articles du code monétaire et financier et, le cas échéant, les articles d’autres codes et lois dans leur rédaction résultant des ordonnances prises sur le fondement du 1° du présent I pour celles qui relèvent de la compétence de l’État et procéder, le cas échéant, aux adaptations de ces articles en ce qui concerne les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon.
II. – Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance prévue au I du présent article.
III. – (Non modifié) – (Adopté.)
Chapitre VII bis
Dispositions relatives aux médicaments vétérinaires et aliments médicamenteux
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Article 22 bis
(Non modifié)
Le 9° de l’article L. 5141-16 du code de la santé publique est complété par les mots : « et celles sous réserve desquelles est autorisée la publicité pour les vaccins vétérinaires à destination des éleveurs professionnels dans les publications qui leur sont destinées ». – (Adopté.)
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Article 22 quater
(Non modifié)
I. – Le chapitre unique du titre Ier du livre V de la première partie du code général des collectivités territoriales est complété par un article L. 1511-9 ainsi rédigé :
« Art. L. 1511-9. – I. – Les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent attribuer des aides aux vétérinaires contribuant à la protection de la santé publique et assurant la continuité et la permanence des soins aux animaux d’élevage dans les zones définies à l’article L. 241-13 du code rural et de la pêche maritime. À cette fin, des conventions, pouvant prévoir une obligation d’installation ou de maintien dans une de ces zones, sont passées entre les collectivités territoriales ou les groupements qui attribuent l’aide et les vétérinaires ou leurs sociétés d’exercice intéressés. Les conventions signées sont transmises par les collectivités territoriales et groupements concernés au représentant de l’État dans le département et au conseil régional de l’ordre des vétérinaires compétent. La nature, les conditions d’attribution de ces aides et leur montant maximal sont fixés par décret en Conseil d’État.
« II. – Une indemnité d’étude et de projet professionnel vétérinaire peut être attribuée par les collectivités territoriales ou leurs groupements à tout étudiant régulièrement inscrit dans des études conduisant à la délivrance d’un diplôme ou d’un titre de formation vétérinaire mentionné au 1° de l’article L. 241-2 du code rural et de la pêche maritime, s’il s’engage à exercer en tant que vétérinaire dans l’une des zones définies à l’article L. 241-13 du même code en contribuant à la protection de la santé publique et en assurant la continuité et la permanence des soins aux animaux d’élevage pendant au moins cinq années consécutives. Pour bénéficier de cette aide, l’étudiant signe un contrat avec la collectivité territoriale ou le groupement qui attribue l’aide. Ce contrat peut prévoir une obligation d’installation dans la zone précitée.
« Les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent également accorder des indemnités de logement et de déplacement aux élèves et aux étudiants mentionnés au 2° de l’article L. 243-3 dudit code lorsqu’ils effectuent leurs stages, comprenant des mises en situation professionnelle de soins aux animaux d’élevage, dans les zones définies à l’article L. 241-13 du même code.
« Les conditions générales d’attribution des indemnités prévues aux deux premiers alinéas du présent II, leurs montants maximaux ainsi que, le cas échéant, les modalités de leur remboursement total ou partiel et de leur réévaluation sont déterminés par décret. »
II. – Le titre IV du livre II du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° L’article L. 241-13 est ainsi rétabli :
« Art. L. 241-13. – Des zones caractérisées par une offre insuffisante de soins et un suivi sanitaire insuffisant des animaux d’élevage, dans les zones rurales à faible densité d’élevages, sont fixées par arrêté du ministre chargé de l’agriculture en prenant en compte les données fournies par l’organisme mentionné au dernier alinéa du II de l’article L. 242-1. » ;
2° Le II de l’article L. 242-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Il anime un observatoire national démographique de la profession vétérinaire qui est chargé de collecter, traiter, diffuser et tenir à jour les données relatives à la démographie de la profession vétérinaire, notamment en ce qui concerne son implantation territoriale, ses modes d’exercice et l’offre de soins pour les différentes espèces animales. » – (Adopté.)
Article 22 quinquies
Le 3° de l’article L. 255-1 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :
« 3° Les matières, notamment les biostimulants tels que définis par le règlement (UE) 2019/1009 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 établissant les règles relatives à la mise à disposition sur le marché des fertilisants UE, modifiant les règlements (CE) n° 1069/2009 et (CE) n° 1107/2009 et abrogeant le règlement (CE) n° 2003/2003, dont la fonction, une fois appliquées au sol ou sur la plante, est de stimuler des processus naturels des plantes ou du sol, afin de faciliter ou de réguler l’absorption par celles-ci des éléments nutritifs, d’améliorer leur résistance aux stress abiotiques ou d’améliorer les caractéristiques qualitatives de végétaux. » – (Adopté.)
Article 22 sexies
(Non modifié)
Aux 1° et 3° du I et aux 1° et 2° du II de l’article L. 255-18 du code rural et de la pêche maritime, après le mot : « norme », sont insérés les mots : « , le règlement mentionné au 2° de l’article L. 255-5 ». – (Adopté.)
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Chapitre VIII
Dispositions relatives à la gestion du fonds européen agricole pour le développement rural
Article 24
(Non modifié)
I. – L’article 78 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 précitée, ainsi que l’article L. 1511-1-2 et le 13° de l’article L. 4221-5 du code général des collectivités territoriales, dans leur rédaction résultant de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 précitée, demeurent applicables au Fonds européen agricole pour le développement rural au-delà du 31 décembre 2020 et jusqu’au terme de la programmation qui a débuté en 2014.
II. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances, dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la présente loi, les dispositions relevant du domaine de la loi nécessaires pour modifier, en ce qui concerne le Fonds européen agricole pour le développement rural, les articles 78 et 80 à 91 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles ainsi que l’article L. 1511-1-2 et le 13° de l’article L. 4221-5 du code général des collectivités territoriales, afin :
1° D’assurer, au titre de la programmation suivant celle qui a débuté en 2014, leur conformité avec le droit de l’Union européenne en matière de politique agricole commune ;
2° De prévoir, au titre de la même programmation, les conditions dans lesquelles, d’une part, l’État est chargé des aides surfaciques et des aides assimilées du Fonds européen agricole pour le développement rural et, d’autre part, les régions ou, dans les régions d’outre-mer, lorsque celles-ci décident d’y renoncer, les départements peuvent être chargés des aides non surfaciques, en précisant notamment la répartition des compétences, les transferts de services et de moyens en résultant et les modalités d’instruction des demandes et de paiement des aides ;
3° De prévoir les adaptations justifiées par la situation spécifique de la Corse.
Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance prévue au présent II. – (Adopté.)
Chapitre VIII bis A
Dispositions relatives à la modernisation des règles de la communication audiovisuelle et au renforcement de la protection de la souveraineté culturelle
Article 24 bis
(Non modifié)
I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances toute mesure relevant du domaine de la loi visant à :
1° Modifier les dispositions du code de la propriété intellectuelle en vue de transposer en droit français les dispositions de la directive (UE) 2019/790 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 sur le droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique et modifiant les directives 96/9/CE et 2001/29/CE autres que celles qui sont mentionnées au 6 de l’article 2 et aux articles 17 à 23 de la même directive et celles qui ont été transposées par la loi n° 2019-775 du 24 juillet 2019 tendant à créer un droit voisin au profit des agences de presse et des éditeurs de presse, en procédant dans le code de la propriété intellectuelle aux mesures d’adaptation ainsi qu’aux mises en cohérence et corrections matérielles, légistiques et rédactionnelles rendues nécessaires par la directive ;
2° Modifier les dispositions du code de la propriété intellectuelle en vue de transposer en droit français le 6 de l’article 2 et les articles 17 à 23 de la directive (UE) 2019/790 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 précitée, dont les dispositions selon lesquelles les services de communication au public en ligne dont l’objet principal est de porter atteinte aux droits d’auteur et aux droits voisins ne peuvent bénéficier du mécanisme d’exonération de responsabilité prévu à l’article 17 de la même directive ainsi que les dispositions assurant la liberté contractuelle des titulaires de droits d’auteur et de droits voisins dans leurs relations avec les fournisseurs de services de partage de contenus en ligne, en prévoyant l’intervention de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet pour veiller à la mise en œuvre effective des dispositions de l’article 17 de la même directive, en procédant dans ce code aux mesures d’adaptation ainsi qu’aux mises en cohérence et corrections matérielles, légistiques et rédactionnelles rendues nécessaires par ladite directive ;
3° Modifier les dispositions du code de la propriété intellectuelle en vue de transposer en droit français les dispositions de la directive (UE) 2019/789 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 établissant des règles sur l’exercice du droit d’auteur et des droits voisins applicables à certaines transmissions en ligne d’organismes de radiodiffusion et retransmissions de programmes de télévision et de radio, et modifiant la directive 93/83/CEE du Conseil, en procédant dans le code de la propriété intellectuelle aux mesures d’adaptation ainsi qu’aux mises en cohérence et corrections matérielles, légistiques et rédactionnelles rendues nécessaires par la même directive.
II et III. – (Non modifiés) – (Adopté.)
Article 24 ter A
(Non modifié)
Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée et des actions contentieuses introduites avant la date de publication de la présente loi, les sommes perçues en application de l’article L. 214-1 du code de la propriété intellectuelle et utilisées conformément au 2° de l’article L. 324-17 du même code avant le 8 septembre 2020 sont acquises à leurs bénéficiaires et leur utilisation est validée en tant qu’elle serait contestée par le moyen tiré de ce qu’il résulte de l’article 8, paragraphe 2, de la directive 2006/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative au droit de location et de prêt et à certains droits voisins du droit d’auteur dans le domaine de la propriété intellectuelle que seul le législateur de l’Union européenne peut introduire des limitations du droit à une rémunération équitable et unique à l’égard des ressortissants des États tiers ayant notifié des réserves à l’article 15 du traité de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes. – (Adopté.)
Chapitre VIII bis
(Suppression maintenue de la division et de l’intitulé)
Article 24 ter
(Non modifié)
I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par ordonnances, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi permettant de modifier la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, le code du cinéma et de l’image animée et le livre des procédures fiscales afin :
1° De transposer la directive (UE) 2018/1808 du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 modifiant la directive 2010/13/UE visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels (directive « Services de médias audiovisuels »), compte tenu de l’évolution des réalités du marché, en prenant en compte la nécessité d’assurer la diversité et la souveraineté culturelles ainsi que la nécessité de protéger les publics vulnérables, notamment les mineurs et les personnes handicapées, en procédant aux mesures d’adaptation et aux mises en cohérence et corrections matérielles, légistiques et rédactionnelles rendues nécessaires par la directive, dont notamment les dispositions :
a) Visant à soumettre les services relevant de la compétence d’un autre État membre de l’Union européenne et visant la France à une contribution au développement de la production, notamment indépendante, respectivement d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles ;
b) Visant à assurer l’accessibilité des programmes aux personnes en situation de handicap ;
c) Visant à assurer une visibilité appropriée aux services de médias audiovisuels d’intérêt général ;
2° De procéder aux mesures d’adaptation et de tirer les conséquences nécessaires de la transposition du 18 de l’article 1er de la directive (UE) 2018/1808 du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 précitée en vue notamment d’assurer un traitement équitable entre services de télévision et de médias audiovisuels à la demande en fonction de la catégorie de ces services et de la nature de leur programmation, s’agissant en particulier de la nature des œuvres et de l’étendue territoriale des droits pris en compte au titre de la contribution au développement de la production et de la part consacrée à la production d’œuvres d’expression originale française et à la production indépendante, en :
a) Introduisant une faculté de mutualisation, respectivement pour les œuvres cinématographiques et pour les œuvres audiovisuelles, de la contribution à la production de plusieurs services de télévision ou de médias audiovisuels à la demande d’un même éditeur, d’un éditeur et de ses filiales ou d’un éditeur et des filiales de la société qui le contrôle au sens du 2° de l’article 41-3 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée ;
b) Prévoyant, pour la partie de ces accords qui affecte directement leurs intérêts, l’association des organisations professionnelles et organismes de gestion collective représentant les auteurs aux accords conclus entre les éditeurs de services et les organisations professionnelles de l’industrie cinématographique et audiovisuelle dont le Conseil supérieur de l’audiovisuel tient compte pour la fixation des modalités de contribution au développement de la production d’œuvres ;
c) Prévoyant qu’une œuvre n’est pas prise en compte au titre de la contribution d’un éditeur à la production lorsque les contrats conclus pour sa production ne sont pas compatibles avec les dispositions des articles L. 121-1 et L. 121-5 du code de la propriété intellectuelle relatives à la protection des droits moraux des auteurs et les principes énoncés aux articles L. 131-4 et L. 132-25 du même code relatifs à leur rémunération et en subordonnant l’attribution des aides du Centre national du cinéma et de l’image animée à l’inclusion, dans les contrats conclus pour la production d’une œuvre, de clauses types assurant le respect de ces mêmes articles ;
d) Introduisant une procédure de conventionnement des services de médias audiovisuels à la demande par le Conseil supérieur de l’audiovisuel au-delà d’un seuil de chiffre d’affaires fixé par décret, et en prévoyant que cette convention précise notamment les conditions d’accès des ayants droit aux données relatives à l’exploitation de leurs œuvres ;
e) Soumettant à contribution à la production sur la base de leur activité en France les autres éditeurs de services de télévision et de médias audiovisuels à la demande visant le territoire français qui ne sont pas établis en France et qui ne relèvent pas de la compétence de la France ;
f) Permettant au Conseil supérieur de l’audiovisuel de recevoir de l’administration des impôts tous les renseignements relatifs au chiffre d’affaires des éditeurs et à cette autorité et au Centre national du cinéma et de l’image animée de se communiquer les informations qu’ils détiennent relatives au chiffre d’affaires et au nombre d’utilisateurs des éditeurs de services et des redevables des impositions mentionnées aux articles L. 115-6 à L. 115-13 du code du cinéma et de l’image animée et à l’article 1609 sexdecies B du code général des impôts ;
g) Prévoyant les conditions dans lesquelles peuvent être définis par décret en Conseil d’État, à défaut d’accord professionnel rendu obligatoire dans les conditions prévues à l’article L. 234-1 du code du cinéma et de l’image animée, dans un délai déterminé par décret et qui ne peut être supérieur à six mois à compter de la publication de l’ordonnance prise sur le fondement du présent g et jusqu’à l’entrée en vigueur d’un tel accord, les délais aux termes desquels une œuvre cinématographique peut être mise à la disposition du public par un éditeur de services de médias audiovisuels à la demande ou diffusée par un éditeur de services de télévision.
II. – (Non modifié) – (Adopté.)
Chapitre IX
Dispositions en matière de concurrence
Article 25
I. – (Non modifié)
II. – (Non modifié)
III. – Le code de commerce est ainsi modifié :
1° L’article L. 420-2-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Est également prohibé dans les collectivités mentionnées au premier alinéa du présent article le fait, pour une entreprise exerçant une activité de grossiste importateur ou de commerce de détail ou pour un groupe d’entreprises dont au moins une des entités exerce une de ces activités, d’appliquer à l’encontre d’une entreprise dont elle ne détient aucune part du capital des conditions discriminatoires relatives à des produits ou services pour lesquels existe une situation d’exclusivité d’importation de fait. » ;
2° L’article L. 450-4 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « doit vérifier » sont remplacés par le mot : « vérifie » ;
b) Les deuxième et dernière phrases du troisième alinéa sont remplacées par trois phrases ainsi rédigées : « Celui-ci désigne le ou les chefs de service territorialement compétents, lesquels nomment autant d’officiers de police judiciaire que de lieux visités. Les officiers de police judiciaire sont chargés, chacun en ce qui les concerne, d’assister à ces opérations, d’y apporter leur concours en procédant, le cas échéant, aux réquisitions nécessaires et de tenir le juge informé du déroulement de ces opérations. Le juge ayant autorisé les opérations de visite et de saisie peut, pour en exercer le contrôle, délivrer une commission rogatoire au juge des libertés et de la détention dans le ressort duquel s’effectue la visite. » ;
3° Le dernier alinéa de l’article L. 461-3 est ainsi modifié :
a) À la première phrase, après les mots : « décisions prévues », est insérée la référence : « au III de l’article L. 462-5, » ;
b) La seconde phrase est ainsi rédigée : « Il peut faire de même s’agissant des décisions prévues à l’article L. 430-5, des décisions de révision des mesures mentionnées aux III et IV de l’article L. 430-7, des décisions nécessaires à la mise en œuvre de ces mesures et des décisions de révision des engagements prises en application de l’article L. 464-2. » ;
4° (Supprimé)
5° Le dernier alinéa de l’article L. 462-2-1 est supprimé ;
6° À la fin du quatrième alinéa et à la fin de la première phrase du cinquième alinéa de l’article L. 462-8, les références : « 81 et 82 du traité instituant la Communauté européenne » sont remplacées par les références : « 101 et 102 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne » ;
7° L’article L. 463-3 est ainsi modifié :
a et b) (Supprimés)
b bis) À la première phrase, les mots : « , lors de la notification des griefs aux parties intéressées, » sont supprimés ;
c) La seconde phrase est ainsi rédigée : « Il en informe les parties et le commissaire du Gouvernement préalablement à la notification des griefs. » ;
d) Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« Dans ce cas, si le chiffre d’affaires cumulé réalisé en France lors du dernier exercice clos de l’ensemble des parties dépasse 200 millions d’euros et dès lors qu’au moins une des parties intéressées en formule la demande, le délai prévu à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 463-2 est allongé de deux mois. La demande doit être formulée dans un délai maximal de trente jours à compter de la notification des griefs. Au vu des observations des parties destinataires des griefs, le rapporteur général peut décider d’adresser un rapport aux parties selon les modalités prévues au même article L. 463-2.
« Lorsque le rapporteur général décide de ne pas établir de rapport, la notification des griefs doit mentionner les déterminants de la sanction encourue. » ;
8° Les deuxième et dernière phrases du IV de l’article L. 464-2 sont remplacées par quatre phrases ainsi rédigées : « Le rapporteur général informe le commissaire du Gouvernement de la démarche engagée par l’entreprise. Il informe l’entreprise par écrit, le cas échéant, de son éligibilité à une exonération totale ou partielle des sanctions pécuniaires encourues et lui indique les conditions de coopération définies par l’Autorité de la concurrence. Lors de la décision prise en application du I du présent article, l’Autorité peut, si ces conditions ont été respectées, accorder une exonération de sanctions pécuniaires proportionnée à la contribution apportée à l’établissement de l’infraction. Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’organisation et d’application de cette procédure. » ;
9° L’article L. 464-5 est abrogé ;
10° Au premier alinéa de l’article L. 464-8, la référence : « L. 464-5, » est supprimée ;
11° Au premier alinéa de l’article L. 464-9, les mots : « affectent un marché de dimension locale, » sont supprimés et les références : « 81 et 82 du traité instituant la Communauté européenne » sont remplacées par les références : « 101 et 102 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne » ;
12° L’article L. 752-27 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa du I, les mots : « exploitant un ou plusieurs magasins de commerce » sont remplacés par les mots : « exerçant une activité de commerce de gros ou » ;
b) Après le mot : « constate », la fin du même premier alinéa est ainsi rédigée : « que cette position dominante soulève des préoccupations de concurrence du fait de prix ou de marges élevés pratiqués par l’entreprise ou le groupe d’entreprises en comparaison des moyennes habituellement constatées dans le secteur concerné. » ;
c) Les 1° et 2° sont abrogés ;
d) Au premier alinéa du II, les mots : « l’atteinte à une concurrence effective » sont remplacés par les mots : « ses préoccupations de concurrence » ;
13° À l’article L. 954-15, les références : « 81 et 82 du traité instituant la Communauté européenne » sont remplacées par les références : « 101 et 102 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ». – (Adopté.)
Chapitre X
Dispositions relatives aux postes et communications électroniques
Article 26
(Non modifié)
I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi :
1° Les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la transposition de la directive (UE) 2018/1972 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 établissant le code des communications électroniques européen ainsi que les mesures d’adaptation de la législation liées à cette transposition, sans porter atteinte aux pouvoirs d’information et de décision du maire en cas d’implantation d’une nouvelle infrastructure de téléphonie mobile ;
2° Toutes mesures relevant du domaine de la loi, autres que celles mentionnées au 1° du présent I, visant à :
a) Permettre la présence d’un officier de police judiciaire au cours des visites et saisies effectuées par les agents habilités de l’Autorité de régulation des communications électroniques, de la poste et de la distribution de la presse ;
b) Prévoir le contrôle par un organisme indépendant des engagements pris par les opérateurs dans le cadre de l’article L. 33-13 du code des postes et des communications électroniques ;
c) Confier à l’Autorité de régulation des communications électroniques, de la poste et de la distribution de la presse la mission d’évaluer le coût net de la mission de service public de transport et de distribution de la presse par voie postale dont est chargé le prestataire de service universel du service postal ;
d) Dématérialiser la procédure d’attribution, par l’Autorité de régulation des communications électroniques, de la poste et de la distribution de la presse, de ressources en numérotation ou d’autorisation d’utilisation de fréquences ;
e) Supprimer le critère de la date de la sanction pour déterminer la composition de la formation restreinte de l’Autorité de régulation des communications électroniques, de la poste et de la distribution de la presse, compétente en matière de sanctions ;
3° Toutes dispositions modifiant la partie législative du code des postes et des communications électroniques afin de remédier aux éventuelles erreurs et de clarifier en tant que de besoin les dispositions du même code.
Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance.
II. – Le quatrième alinéa du I de l’article L. 36-11 du code des postes et des communications électroniques est ainsi rédigé :
« – aux dispositions du règlement (UE) 2015/2120 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 établissant des mesures relatives à l’accès à un internet ouvert et aux prix de détail pour les communications à l’intérieur de l’Union européenne réglementées et modifiant la directive 2002/22/CE et le règlement (UE) n° 531/2012 ; ».
III. – Le livre Ier du code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Le service postal et les services de livraison de colis » ;
2° L’intitulé du chapitre II du titre Ier est complété par les mots : « et des services de livraison de colis » ;
3° L’article L. 5-2 est complété par un 9° ainsi rédigé :
« 9° Est l’autorité compétente pour mettre en œuvre les articles 4, 5 et 6 du règlement (UE) 2018/644 du Parlement européen et du Conseil du 18 avril 2018 relatif aux services de livraison transfrontière de colis. À ce titre, les prestataires de services de livraison de colis mentionnés à l’article 4 du même règlement lui communiquent les informations précisées par les articles 4 et 5 dudit règlement et les textes pris pour son application. » ;
4° L’article L. 5-3 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi modifié :
– après le mot : « postal », le mot : « ou » est remplacé par le signe : « , » ;
– après les deux occurrences de la référence : « L. 3 », sont insérés les mots : « ou d’un prestataire de services de livraison de colis, tel que défini à l’article 2 du règlement (UE) 2018/644 du Parlement européen et du Conseil du 18 avril 2018 relatif aux services de livraison transfrontière de colis » ;
b) Au premier alinéa du I, après la seconde occurrence du mot : « dispositions, », sont insérés les mots : « ou en cas de manquement d’un prestataire de services de livraison de colis aux dispositions des articles 4, 5 et 6 du règlement (UE) 2018/644 du Parlement européen et du Conseil du 18 avril 2018 relatif aux services de livraison transfrontière de colis, » ;
c) La première phrase du b et le dixième alinéa du III sont ainsi modifiés :
– après le mot : « universel », le mot : « ou » est remplacé par le signe : « , » ;
– après la référence : « L. 3 », sont insérés les mots : « ou un prestataire de services de livraison de colis, tel que défini à l’article 2 du règlement (UE) 2018/644 du Parlement européen et du Conseil du 18 avril 2018 relatif aux services de livraison transfrontière de colis » ;
5° Le premier alinéa de l’article L. 5-9 est ainsi modifié :
– après le mot : « universel », le mot : « et » est remplacé par le signe : « , » ;
– après la référence : « L. 3 », sont insérés les mots : « et des prestataires de services de livraison de colis, tels que définis à l’article 2 du règlement (UE) 2018/644 du Parlement européen et du Conseil du 18 avril 2018 relatif aux services de livraison transfrontière de colis ». – (Adopté.)
Article 27
(Non modifié)
Le titre Ier du livre II du code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° A Après l’article L. 33-13, il est inséré un article L. 33-13-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 33-13-1. – Le ministre chargé des communications électroniques peut accepter, après avis de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse, les engagements souscrits auprès de lui par les opérateurs portant sur la fourniture d’offres de services de communications électroniques en position déterminée de nature à contribuer à la disponibilité pour tout utilisateur final, sur tout ou partie du territoire, des services mentionnés à l’article L. 35-1 à un tarif abordable. L’acceptation par le ministre de ces engagements fait l’objet d’une publication au Journal officiel.
« L’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse contrôle le respect des engagements mentionnés au premier alinéa du présent article et sanctionne les manquements constatés dans les conditions prévues à l’article L. 36-11. » ;
1° L’article L. 35 est ainsi modifié :
a) À la fin du a, les références : « L. 35-1 à L. 35-4 » sont remplacées par les références : « L. 35-1 à L. 35-5 et L. 35-7 » ;
b) Le b est abrogé ;
2° L’article L. 35-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 35-1. – Le service universel des communications électroniques permet à tout utilisateur final d’avoir accès, en position déterminée, à un tarif abordable :
« 1° À un service d’accès adéquat à l’internet haut débit ;
« 2° À un service de communications vocales.
« Cet accès comprend le raccordement sous-jacent aux services mentionnés aux 1° et 2°.
« Le service universel fournit des mesures particulières en faveur des utilisateurs finals handicapés afin d’assurer, d’une part, un accès aux services mentionnés aux mêmes 1° et 2° qui soit équivalent à l’accès dont bénéficient les autres utilisateurs finals et, d’autre part, le caractère abordable de ces services.
« Les modalités d’application du présent article et le contenu de chacune des composantes du service universel sont précisés par décret en Conseil d’État. » ;
3° Avant l’article L. 35-2, est insérée une section I intitulée : « Fourniture d’un service universel des communications électroniques abordable aux utilisateurs finals à faibles revenus ou ayant des besoins sociaux particuliers » et comprenant l’article L. 35-2 ;
4° Le même article L. 35-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 35-2. – Au titre des obligations de service universel, le ministre chargé des communications électroniques peut exiger des opérateurs qu’ils offrent des options, des formules tarifaires ou des réductions tarifaires qui diffèrent de celles offertes dans des conditions normales d’exploitation commerciale aux utilisateurs finals disposant de faibles revenus ou ayant des besoins sociaux particuliers lorsqu’il constate, notamment sur la base du rapport prévu au 2° de l’article L. 36-7, que, sur tout ou partie du territoire, le fonctionnement du marché ne permet pas à ces derniers d’accéder à un tarif abordable aux composantes du service universel mentionnées à l’article L. 35-1.
« Le ministre peut, à titre exceptionnel, n’exiger ces options, formules ou réductions tarifaires qu’auprès de certains opérateurs désignés par appel à candidatures, en particulier lorsque leur mise en œuvre par l’ensemble des opérateurs entraînerait une charge administrative ou financière excessive pour eux-mêmes ou pour l’administration.
« L’appel à candidatures porte sur les conditions techniques et financières ainsi que, le cas échéant, sur le coût net de fourniture des options, formules ou réductions tarifaires concernées.
« Dans le cas où un appel à candidatures s’avère infructueux, le ministre chargé des communications électroniques désigne un ou plusieurs opérateurs en vue de fournir les options, formules ou réductions tarifaires concernées sur tout ou partie du territoire national.
« Par ailleurs, le ministre chargé des communications électroniques peut fixer un seuil annuel de chiffre d’affaires en deçà duquel l’opérateur concerné n’est pas soumis à la fourniture d’options, formules ou réductions tarifaires.
« Les modalités d’application du présent article sont précisées par décret en Conseil d’État. » ;
5° L’article L. 35-2-1 est abrogé ;
6° Après le même article L. 35-2-1, est insérée une section II intitulée : « Disponibilité du service universel des communications électroniques » et comprenant les articles L. 35-3 et L. 35-4 ;
7° Les articles L. 35-3 et L. 35-4 sont ainsi rédigés :
« Art. L. 35-3. – Lorsque le ministre chargé des communications électroniques établit que la fourniture des services mentionnés à l’article L. 35-1 n’est pas assurée, compte tenu des résultats du relevé géographique prévu à l’article 22 de la directive (UE) 2018/1972 du Parlement et du Conseil du 11 décembre 2018 établissant le code des communications électroniques européen et de l’insuffisance des initiatives privées et des mécanismes d’intervention publique ainsi que des éventuels engagements prévus à l’article L. 33-13-1, il peut imposer des obligations de service universel afin de répondre aux demandes raisonnables d’accès à ce service des utilisateurs finals.
« À cette fin, le ministre chargé des communications électroniques peut désigner un ou plusieurs opérateurs, sur tout ou partie du territoire national, pour la fourniture de tout ou partie des services mentionnés à l’article L. 35-1 du présent code ou de prestations nécessaires pour la fourniture de ces services. Il peut désigner un ou plusieurs opérateurs chargés exclusivement de la fourniture du raccordement sous-jacent de ces services.
« La désignation intervient à l’issue d’appels à candidatures portant sur les conditions techniques et financières ainsi que, le cas échéant, sur le coût net de fourniture de ces services ou prestations.
« Dans le cas où un appel à candidatures s’avère infructueux, le ministre chargé des communications électroniques désigne un ou plusieurs opérateurs en vue d’assurer ces services ou prestations sur tout ou partie du territoire national.
« Le cahier des charges des opérateurs désignés, soumis pour avis à la Commission supérieure du numérique et des postes, comprend notamment :
« 1° Des obligations de qualité de service que l’opérateur est tenu de fournir et qui sont définies pour l’ensemble de la zone de désignation, y compris au niveau local dès lors que la zone de désignation comprend plusieurs territoires hétérogènes d’un point de vue géographique, économique et technique ;
« 2° Des obligations tarifaires ainsi que les conditions de leur fourniture.
« Il peut imposer des obligations de péréquation géographique des tarifs.
« Les modalités d’application du présent article sont précisées par décret en Conseil d’État. Ce décret fixe, notamment, les conditions dans lesquelles les tarifs du service universel et sa qualité sont contrôlés et précise les cas dans lesquels les tarifs du service universel peuvent faire l’objet d’une opposition ou d’un avis préalable de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse.
« Art. L. 35-4. – Tout opérateur désigné en application de l’article L. 35-3 qui a l’intention de céder une partie substantielle ou la totalité de ses actifs de réseau d’accès local à une entité juridique distincte en informe à l’avance et en temps utile le ministre chargé des communications électroniques ainsi que l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse.
« Au vu des effets de la transaction projetée sur la fourniture des services mentionnés à l’article L. 35-1 et après avis de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse, le ministre peut adapter les obligations imposées à l’opérateur, prévoir un nouveau cahier des charges imposé au cessionnaire et, le cas échéant, procéder à un nouvel appel à candidatures.
« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. » ;
8° Après l’article L. 35-4, est insérée une section 3 intitulée : « Financement du service universel des communications électroniques » et comprenant l’article L. 35-5 ;
9° L’article L. 35-5 est ainsi rédigé :
« Art. L. 35-5. – I. – Les coûts nets imputables aux obligations de service universel sont évalués sur la base d’une comptabilité appropriée tenue par les opérateurs pour assurer ces obligations et auditée, à leurs frais, par un organisme indépendant désigné par l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse.
« L’évaluation de ces coûts nets prend en compte l’avantage sur le marché que les opérateurs soumis à des obligations de service universel retirent, le cas échéant, de ces obligations. Les coûts nets pris en compte en application du II ne peuvent être supérieurs aux engagements pris, le cas échéant, dans le cadre des appels à candidatures prévus aux articles L. 35-2 et L. 35-3, par les opérateurs pour assurer les obligations du service universel.
« La contribution de chaque opérateur au financement du service universel est calculée au prorata de son chiffre d’affaires réalisé au titre des services de communications électroniques, à l’exclusion de celui réalisé au titre des prestations d’interconnexion et d’accès faisant l’objet des conventions définies au I de l’article L. 34-8 et des autres prestations réalisées ou facturées pour le compte d’opérateurs tiers.
« Toutefois, les opérateurs dont le chiffre d’affaires est inférieur à un montant fixé par décret en Conseil d’État sont exonérés de contribution au financement du service universel.
« II. – Lorsqu’un opérateur soumis à des obligations de service universel formule une demande de compensation auprès de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse et que les coûts nets imputables à ses obligations de service universel définis au I représentent une charge excessive, ces coûts nets font l’objet d’une compensation.
« Cette compensation est financée par un fonds de service universel des communications électroniques constitué à cet effet.
« III. – Le montant des contributions nettes dont les opérateurs sont redevables au fonds en application du I et le montant des sommes dues par le fonds aux opérateurs pour assurer les obligations du service universel sont déterminés annuellement par l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse.
« La gestion comptable et financière du fonds est assurée par la Caisse des dépôts et consignations dans un compte spécifique. Les frais de gestion exposés par la caisse sont imputés sur le fonds. Les contributions des opérateurs sont recouvrées par la caisse, selon les modalités prévues pour le recouvrement des créances de cet établissement.
« En cas de défaut de versement de sa contribution par un opérateur, l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse prononce une des sanctions prévues à l’article L. 36-11. En cas de nouvelle défaillance, elle peut prononcer l’interdiction d’exploiter un réseau ouvert au public ou de fournir au public des services de communications électroniques. Si les sommes dues ne sont pas recouvrées dans un délai d’un an, elles sont imputées sur le fonds lors de l’exercice suivant.
« IV. – Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État, qui précise notamment les conditions d’attribution, les méthodes de l’évaluation qui répondent à des exigences de transparence et de publicité, de la compensation et du partage des coûts nets du service universel ainsi que des modalités de gestion du fonds de service universel des communications électroniques.
« Il détermine les catégories d’activités pour lesquelles, en raison de leur nature, les opérateurs ne sont pas tenus de participer au financement des coûts imputables aux obligations de service universel. Ces activités comprennent notamment l’acheminement et la diffusion de services de radio et de télévision. » ;
10° Après le même article L. 35-5, est insérée une section 4 intitulée : « Missions d’intérêt général et dispositions diverses » et comprenant les articles L. 35-6 et L. 35-7 ;
11° La première phrase du premier alinéa de l’article L. 35-7 est ainsi modifiée :
a) La référence : « L. 35-2 » est remplacé par la référence : « L. 35-3 » ;
b) Les mots : « la composante du service universel prévue au 1° de » sont remplacés par les mots : « les services ou prestations mentionnés à » ;
c) Les mots : « dans le cadre de la procédure prévue aux deuxième ou troisième alinéas » sont remplacés par les mots : « en application » ;
12° Le 2° de l’article L. 36-7 est ainsi rétabli :
« 2° Surveille le niveau et l’évolution des prix de détail des services mentionnés à l’article L. 35-1 par rapport au niveau des prix nationaux et aux revenus nationaux des consommateurs et transmet tous les trois ans un rapport au ministre chargé des communications électroniques ; ». – (Adopté.)
Article 27 bis
(Non modifié)
I. – Le titre Ier du livre II du code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 33-12, il est inséré un article L. 33-12-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 33-12-1. – I. – Le relevé géographique établi par l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse comprend les informations relatives à la couverture actuelle des réseaux de communications électroniques ouverts au public ainsi que des prévisions de couverture des réseaux, pour une durée qu’elle détermine, dès lors que les données nécessaires à l’élaboration de ces prévisions sont disponibles.
« L’autorité précise les modalités de restitution de ces informations et les modalités selon lesquelles les opérateurs, y compris les collectivités territoriales et leurs groupements agissant dans le cadre de l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, fournissent, moyennant des efforts raisonnables, les prévisions de couverture de leurs réseaux.
« II. – Sur la base du relevé géographique élaboré par l’autorité mentionnée au I du présent article, le ministre chargé des communications électroniques peut lancer un appel à manifestation d’intention afin d’inviter les opérateurs, y compris les collectivités territoriales et leurs groupements agissant dans le cadre de l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, à déclarer leur intention de déployer un réseau offrant un débit descendant d’au moins 100 mégabits par seconde dans des zones qu’il détermine et dans lesquelles il est établi que, pour une période triennale, aucun opérateur n’a déployé ni ne prévoit de déployer un tel réseau.
« III. – Lorsqu’une zone fait l’objet d’une déclaration d’intention mentionnée au II du présent article, le ministre chargé des communications électroniques la porte à la connaissance du public et peut demander aux autres personnes intéressées qu’elles manifestent leur intention de déployer des réseaux de communications électroniques permettant d’offrir un débit descendant d’au moins 100 mégabits par seconde.
« IV. – La fourniture d’informations trompeuses, erronées ou incomplètes, en connaissance de cause ou du fait d’une négligence grave par la personne concernée, dans le cadre des procédures prévues aux II et III, est constitutive d’un manquement pouvant être sanctionné dans les conditions prévues à l’article L. 36-11.
« Dans son appréciation de la gravité du manquement, l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse prend en compte les conséquences de ce dernier sur la concurrence, en particulier lorsque, en l’absence de justification objective :
« 1° Le déploiement d’un réseau est intervenu sans avoir été déclaré en application du III du présent article ou en contradiction avec les intentions déclarées en application du II, dans une zone où au moins une autre personne a déclaré son intention de déployer un réseau ;
« 2° Le déploiement d’un réseau déclaré en application du II n’est pas intervenu.
« V. – Un arrêté du ministre chargé des communications électroniques précise les informations à inclure dans les déclarations prévues aux II et III. Les déclarations reçues sont transmises à l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse, qui peut les publier. » ;
2° Le 10° de l’article L. 36-7 est ainsi rétabli :
« 10° Établit et met à la disposition du public, tous les trois ans, le relevé géographique prévu à l’article L. 33-12-1 ; ».
II. – Le I de l’article L. 33-12-1 du code des postes et des communications électroniques entre en vigueur le 21 décembre 2023.
M. le président. L’amendement n° 2, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3
Après les mots :
qu’elle détermine
supprimer la fin de cet alinéa.
II. – Après l’alinéa 3
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
« À cette fin, les opérateurs de communications électroniques sont tenus de fournir à l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse des informations relatives à la couverture actuelle de leurs réseaux, ainsi que des prévisions de couverture de leurs réseaux pour une durée qu’elle détermine dès lors que les données susceptibles d’être utilisées pour l’élaboration de ces prévisions sont disponibles. Ces prévisions comprennent notamment, et le cas échéant, des informations sur les déploiements de réseaux à très haute capacité et les mises à niveau ainsi que sur les extensions de réseaux visant à offrir un débit descendant d’au moins 100 mégabits par seconde.
« L’Autorité précise les modalités de restitution de ces informations et les modalités selon lesquelles les opérateurs fournissent, moyennant des efforts raisonnables, les prévisions de couverture de leurs réseaux.
« Les collectivités territoriales et leurs groupements agissant dans le cadre de l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, qui n’interviendraient pas en tant qu’opérateur de communications électroniques, et les personnes publiques chargées d’élaborer le schéma directeur territorial d’aménagement numérique du territoire conformément à l’article L. 1425-2 du même code, font leurs meilleurs efforts pour fournir à l’Autorité les informations disponibles relatives aux projets de déploiements de réseaux à très haute capacité et aux prévisions de couverture des réseaux sur leurs territoires qui en résultent.
III. – Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
IV. – Alinéa 14
Rédiger ainsi cet alinéa :
II. – Le présent article entre en vigueur le 21 décembre 2023, à l’exception du I de l’article L. 33-12-1 du code des postes et des communications électroniques, qui entre en vigueur le lendemain de la publication de la présente loi au Journal officiel.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Cédric O, secrétaire d’État. Cet amendement vise à autoriser l’Arcep à recueillir un certain nombre d’informations, conformément à l’article 22 de la directive européenne 2018/1972 du 11 décembre 2018 établissant le code des communications électroniques européen.
L’article en question traite des cartes de couverture numérique et de prévision de déploiement des réseaux : l’Arcep doit pouvoir demander aux personnes publiques qui exploitent un réseau d’initiative publique ou qui ont élaboré un schéma directeur territorial d’aménagement numérique des informations quant à la couverture et au déploiement des réseaux de leur territoire. Ce faisant, cette autorité connaîtra plus en détail les prévisions de déploiement des réseaux.
Il s’agit d’un enjeu essentiel de la lutte contre la fracture numérique, que plusieurs orateurs, notamment M. Canevet, ont évoquée précédemment.
En revanche, l’adoption de cet amendement ne modifierait pas le régime applicable aux opérateurs mentionnés à l’article 27 bis du présent texte : ces derniers devront transmettre à l’Arcep leurs prévisions de déploiement.
Enfin, ces mesures permettront à l’Arcep de lancer ses travaux pour la mise en place du relevé géographique des déploiements dès le lendemain de la publication de la loi, les autres dispositions de l’article entrant en vigueur au plus tard le 21 décembre 2023.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Bizet, rapporteur. À l’origine, nous n’avions pas très bien compris la logique de cet amendement : pourquoi les collectivités territoriales devraient-elles communiquer à l’Arcep les informations dont elles disposent pour la construction d’un relevé géographique des déploiements de télécommunications ?
Toutefois, à la réflexion, il nous semble que ces dispositions vont dans le bon sens. La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’article 27 bis, modifié.
(L’article 27 bis est adopté.)
Chapitre XI
Dispositions relatives aux marques de produits ou de services
Article 28
(Non modifié)
I. – (Non modifié)
II. – Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Après la première phrase du premier alinéa de l’article L. 712-9, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Le titulaire de la marque est informé par l’Institut national de la propriété industrielle de l’expiration de l’enregistrement, sans que l’institut puisse être tenu responsable de l’absence de cette information. » ;
2° La dixième ligne du tableau du deuxième alinéa du a du 5° de l’article L. 811-1-1 est ainsi rédigée :
« |
Article L. 712-9 |
Loi n° … du … portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière |
» |
III. – La dixième ligne du tableau du quatrième alinéa du 3° du I de l’article 12 de l’ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019 relative aux marques de produits ou de services est ainsi rédigée :
« |
Article L. 712-9 |
Loi n° … du … portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière |
» |
– (Adopté.)
Article 29
(Non modifié)
L’ordonnance n° 2020-535 du 7 mai 2020 relative à l’extension de la loi n° 96-542 du 19 juin 1996 relative au contrôle de la fabrication et du commerce de certaines substances susceptibles d’être utilisées pour la fabrication illicite de stupéfiants ou de substances psychotropes à tous les outre-mer est ratifiée. – (Adopté.)
M. le président. Les autres dispositions du projet de loi ne font pas l’objet de la nouvelle lecture.
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. Monsieur le secrétaire d’État, je reviens une nouvelle fois à la charge : si le Digital Services Act et le Digital Markets Act devaient se transformer en règlement, nous irions effectivement beaucoup plus vite.
Or, je le répète, l’Europe s’inscrivant dans le temps long, il est impératif de ne pas temporiser.
Sauf erreur de ma part, vous vous êtes engagé à faire remonter à Bruxelles les différents volets de la proposition de loi de Mme Primas, qu’il s’agisse de la neutralité des terminaux, de l’interopérabilité des plateformes ou de la transparence face aux dark patterns. Ainsi, malgré nos désaccords persistants, nous n’aurons pas totalement perdu notre soirée !
M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.
M. Laurent Duplomb. Mes chers collègues, au terme d’un assez long travail, mené notamment par Jean Bizet et moi-même – nous nous sommes réparti les articles du présent texte –, nos débats s’achèvent de manière peu satisfaisante.
Avec ce projet de loi, nous aurions pu tous nous retrouver autour de plusieurs sujets concernant directement les Français, qu’il s’agisse des garanties liées au numérique, des stocks stratégiques pétroliers, des déserts vétérinaires qui s’étendent dans nos campagnes ou encore de l’encadrement des pratiques restrictives de concurrence.
Monsieur le secrétaire d’État, ce soir, nous aurions pu aboutir à un texte consensuel. Mais, malgré nos différents appels, malgré mes sollicitations pressantes, vous n’avez pas accepté de retirer votre amendement. En conséquence, nos divergences avec l’Assemblée nationale persistent : quand je pense au temps que nous avons dédié au présent projet de loi, ce constat me désole un peu.
Ainsi va le travail parlementaire… Rassurez-vous, je dormirai bien cette nuit (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.), mais c’est dommage pour les Français : nous allons, une fois de plus, échouer à contrer les géants du numérique !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Cédric O, secrétaire d’État. Monsieur le rapporteur, au sujet de la proposition de loi de Mme Primas, c’est bien volontiers que je prends l’engagement que vous me demandez.
Contrecarrer la mainmise des grandes plateformes sur tels marchés ou tels outils, comme les téléphones portables : c’est le but de la France depuis très longtemps. C’est même le cœur de notre action en la matière. J’en ai déjà débattu avec mes homologues américains il y a un an environ.
J’y insiste, la position de la France a fait l’objet de plusieurs déclarations publiques : elle est sans ambiguïté.
Ces plateformes sont devenues structurantes. Sur un certain nombre de marchés, elles occupent une position monopolistique ou oligopolistique, si bien que le consommateur n’a d’autre choix que de recourir à leurs services. Elles sont devenues, pour ainsi dire, des infrastructures vitales.
Cette situation exige une régulation, dont vous avez rappelé les différents principes : interopérabilité, liberté d’accès, liberté de choix, transparence d’un certain nombre d’algorithmes et de schémas. Au-delà de la maîtrise des contenus, l’enjeu est, bien entendu, de nature économique. Sur ce sujet, nous sommes donc parfaitement d’accord, car nous défendons les mêmes valeurs.
Nous espérons que les nouvelles normes communautaires prendront la forme d’un règlement. La Commission européenne a déjà avancé plusieurs propositions : elles vont dans le bon sens. Elles sont même extrêmement intéressantes, qu’elles soient issues du Digital Services Act ou du Digital Markets Act, lesquels résultent d’un travail conjoint de la direction générale des réseaux de communication, du contenu et des technologies, la DG Connect, et de la direction générale de la concurrence, la DG Comp.
Comme on le dit en bon français, nous en sommes au money time ! Les négociateurs sont à pied d’œuvre. Espérons que le résultat de leurs travaux soit à la hauteur de nos ambitions et qu’il puisse prendre la forme d’un règlement : l’application de ces mesures n’en sera que plus rapide et plus uniforme.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
7
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, mercredi 18 novembre 2020 :
À quinze heures :
Questions d’actualité au Gouvernement :
De seize heures trente à vingt heures trente :
(Ordre du jour réservé au groupe RDSE)
Débat portant sur l’Agence nationale de la cohésion des territoires, un an après sa création ;
Débat sur le thème : « La France peut-elle devenir un champion de l’énergie hydrogène ? »
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt-trois heures cinq.)
Pour la Directrice des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
ÉTIENNE BOULENGER