M. Roger Karoutchi. Si vous me le permettez, monsieur le président, je défendrai en même temps l’amendement n° II–706 rectifié bis.
M. le président. J’appelle donc en discussion l’amendement n° II-706 rectifié bis, présenté par MM. Karoutchi et D. Laurent, Mmes Sollogoub et Deromedi, MM. Laménie, Détraigne, Belin, Frassa, Vogel, Gremillet et Lefèvre, Mme Férat, MM. B. Fournier et Favreau, Mmes Raimond-Pavero, M. Mercier et V. Boyer, M. Chatillon, Mmes Garriaud-Maylam et Malet, M. A. Marc, Mme Di Folco, MM. Rapin, Cambon et Houpert, Mme Joseph, MM. Moga, Decool, Sido, Savin et Longeot, Mme Ventalon et M. Charon, et ainsi libellé :
Après l’article 58
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À la première phrase du II de l’article 137 de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique, après le mot : « territoriales », sont insérés les mots : « et pour les établissements publics de coopération intercommunale ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. Roger Karoutchi. En l’absence de notre collègue Thani Mohamed Soilihi, je soutiendrai deux amendements relatifs à Mayotte, qui sont similaires à des amendements présentés à l’Assemblée nationale par notre collègue député Mansour Kamardine.
L’amendement n° II-704 rectifié bis vise à ce que les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de Mayotte bénéficient du déplafonnement de la dotation d’intercommunalité qu’on leur attribue. La situation est simple : ces EPCI ne fonctionnent que depuis 2017 ou 2018 et ne profitent donc pas encore du même système et des mêmes avantages que les EPCI métropolitains. Nous demandons donc qu’un rattrapage soit prévu pour Mayotte.
Le dispositif de l’amendement n° II-706 rectifié bis est extrêmement simple lui aussi. Lorsque la loi du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer a été adoptée, la taxe d’enlèvement des ordures ménagères était encore perçue à Mayotte par un syndicat mixte. Aujourd’hui, comme en métropole, ce sont les EPCI qui s’en chargent. C’est pourquoi nous demandons que les EPCI mahorais puissent désormais faire partie des bénéficiaires de la compensation prévue par l’article 137 de la loi.
Il s’agit de deux mesures de justice, afin de tenir compte des évolutions ayant eu lieu à Mayotte.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Je demande l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Joël Giraud, secrétaire d’État. Monsieur le sénateur, en présentant votre premier amendement, vous êtes parti du présupposé que les EPCI de Mayotte avaient un besoin de rattrapage par rapport à d’autres groupements en ce qui concerne la dotation d’intercommunalité. Je ne peux que contester cette affirmation : la dotation dont bénéficie Mayotte est l’une des plus élevées de France, puisqu’elle s’élève à 43 euros par habitant, contre 22 euros par habitant en moyenne. Le rattrapage a donc en quelque sorte déjà eu lieu : les EPCI de Mayotte ont été exonérés de toute baisse de DGF pendant cinq ans.
Quant au second amendement, je rappelle que la TEOM est une taxe facultative, qui relève de la politique fiscale de la collectivité et qui n’entre donc pas du tout dans le champ des compensations.
L’avis est donc défavorable sur les deux amendements.
M. le président. Quel est donc l’avis de la commission ?
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-704 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-706 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° II-931 rectifié bis, présenté par MM. Bilhac, Artano, Cabanel, Gold, Requier et Roux, Mme Guillotin, M. Guiol et Mmes Pantel et M. Carrère, est ainsi libellé :
Après l’article 58
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 2° du IV de l’article L. 5211-28 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « 95 % de » sont supprimés ;
b) Les quatrième à dernier alinéas sont supprimés.
II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2022.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Christian Bilhac.
M. Christian Bilhac. Cet amendement vise à protéger l’ensemble des intercommunalités en leur permettant de percevoir au moins 100 % de la dotation d’intercommunalité par habitant perçue l’année précédente. Adopter un système garantissant le montant de la dotation par habitant perçu l’année précédente permettrait aux EPCI de comparer rapidement leur situation. Ceux qui perdent en population en percevraient bien sûr un peu moins ; ceux qui voient leur population augmenter en toucheraient un peu plus.
Cet amendement a également pour objet de supprimer les garanties qui deviendraient ainsi caduques. La garantie minimale de tous les EPCI devenant intégrale, il ne serait plus nécessaire de conserver les garanties existantes dédiées à certains EPCI à fiscalité propre.
Enfin, la DGF étant calculée avec les données de l’année n-1, cette garantie ne s’appliquerait qu’à compter de 2022, année où la DGF sera calculée avec le nouveau panier de recettes fiscales des EPCI.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Mon cher collègue, votre amendement vise à ce que la DGF par habitant des EPCI ne puisse plus baisser d’une année sur l’autre. À enveloppe constante, des garanties de cette nature se font nécessairement au détriment des communes dont le potentiel fiscal diminue ou qui se trouvent exposées à des charges croissantes. Une telle mesure bloquerait tout le dispositif : avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Joël Giraud, secrétaire d’État. On ne peut pas considérer la DGF comme une dotation perpétuelle. La dotation d’intercommunalité jouit déjà d’un régime favorable, puisqu’elle évolue dans un tunnel compris entre 95 % et 110 % de la dotation perçue l’année précédente, ce qui adoucit, d’une certaine manière, ses variations.
De plus, un certain nombre d’EPCI, dès lors qu’ils sont pauvres ou très « intégrateurs », bénéficient déjà de mesures garantissant une forme de stabilité.
Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à l’amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-931 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° II-755, présenté par MM. Marie, Raynal, Féraud, P. Joly et Sueur, Mme Artigalas, MM. Redon-Sarrazy et Bourgi, Mme de La Gontrie, M. Durain, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche, Leconte et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 58
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au plus tard le 30 septembre 2021, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant les conséquences de la suppression progressive de la taxe d’habitation et des transferts de ressources afférents, sur la pertinence des critères d’effort fiscal et de potentiels financier et fiscal, pour la détermination des dotations de l’État et de péréquation et formulant des propositions de substitution, à l’appui de simulations.
La parole est à M. Didier Marie.
M. Didier Marie. Le Gouvernement devait rendre un premier rapport en application du XI de l’article 250 de la loi de finances pour 2020, mais celui-ci n’a toujours pas été remis, ce qui nous empêche – nous l’avons largement illustré lors de nos précédentes discussions – de préparer les décisions nécessaires pour améliorer la situation, à la fois en ce qui concerne les dotations et les péréquations.
M. le président. L’amendement n° II-756, présenté par MM. Marie, Raynal, Féraud et Sueur, Mme Artigalas, MM. P. Joly, Redon-Sarrazy et Bourgi, Mme de La Gontrie, M. Durain, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche, Leconte et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 58
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au plus tard le 30 septembre 2021, le Gouvernement remet au Parlement un rapport, complétant le rapport produit en application de l’article 257 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 et relatif au coefficient logarithmique utilisé pour le calcul de la dotation forfaitaire et du fonds national de péréquation des ressources communales et intercommunales et formulant des propositions d’évolution de l’intervalle de population au sein duquel celui-ci varie et du niveau de cette variation.
La parole est à M. Didier Marie.
M. Didier Marie. Il s’agit là encore d’une demande de rapport pour poursuivre le travail engagé par le Gouvernement, en l’occurrence le rapport rendu en décembre 2019, dont l’objet est d’évaluer les effets de l’introduction du fameux coefficient logarithmique – qui nous a occupés une partie de l’après-midi –, qui varie de 1 à 2 en fonction croissante de la population des communes et des ensembles intercommunaux, sur la répartition de la dotation forfaitaire des communes et du FPIC.
Si ce rapport de 2019 a conclu à la pertinence de l’outil et à son efficacité dans l’appréhension du niveau de charges des collectivités au regard de leur population, il souligne néanmoins la nécessité d’approfondir la réflexion sur les bornes au sein desquelles ce coefficient évolue et, par incidence, sur le niveau de variation de celui-ci.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?
M. Charles Guené, rapporteur spécial. Il s’agit de demandes de rapport dans les deux cas. Vous le savez, en règle générale, la commission n’est pas très favorable à ce type d’exercice. Cependant, il s’agit là de rapports plutôt techniques, qui nous donneraient des renseignements que nous n’avons pas les moyens d’obtenir.
Comme nous le disons assez souvent, nous ne pouvons pas engager les réflexions nécessaires pour proposer certaines réformes, parce que nous ne disposons pas des informations suffisantes. En l’occurrence, ces deux rapports nous intéressent. C’est pourquoi la commission a émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Joël Giraud, secrétaire d’État. Monsieur le député… (Exclamations sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Gérard Longuet. Plaît-il, monsieur le commissaire ?
M. Joël Giraud, secrétaire d’État. Décidément, je n’y arriverai pas ! Pardonnez-moi, monsieur le sénateur…
M. Gérard Longuet. La troisième fois, c’est dehors ! (Sourires.)
M. Joël Giraud, secrétaire d’État. Remarquez que j’ai fait un effort cette fois-ci, puisque je n’ai pas cassé le micro, qui était celui de Jacqueline Gourault ! (Sourires.) Sans compter que le fait de confondre députés et sénateurs est la meilleure preuve que j’ai le même respect pour les deux assemblées.
Monsieur le sénateur, je voulais simplement vous dire que le rapport que vous appelez de vos vœux, et pour lequel nous avons effectivement du retard, est actuellement dans les tuyaux. Il devrait même être remis au Parlement cette semaine. En tout état de cause, nous ferons en sorte que vous puissiez en disposer très rapidement. Je considère par conséquent que votre premier amendement est satisfait et vous demande de bien vouloir le retirer.
S’agissant de votre second amendement, il s’agit d’un rapport qui a déjà été remis. Un amendement similaire a été déposé à l’Assemblée nationale par Christine Pires Beaune, avant d’être finalement retiré au motif que je me suis engagé, comme je le fais devant vous, à tester les différents scenarii qui sont proposés dans le rapport, de façon à le rendre opérationnel.
Je vous demanderai de nouveau, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer votre amendement.
M. le président. Monsieur Marie, les amendements nos II-755 et II-756 sont-ils maintenus ?
M. Didier Marie. Je maintiens mon amendement sur la pertinence des critères d’effort fiscal et de potentiels financier et fiscal, car, comme vient de le dire le rapporteur spécial, je considère que nous avons besoin d’éléments pour approfondir notre réflexion et d’informations objectives. Le rapport qui nous sera prochainement remis et que nous attendons déjà depuis quelque temps sera peut-être une première contribution, mais je suis persuadé que nous aurons besoin d’aller plus loin.
En revanche, au bénéfice des explications données par M. le secrétaire d’État, je retire mon second amendement.
M. le président. L’amendement n° II-756 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° II-755.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 58.
L’amendement n° II-767 rectifié bis, présenté par MM. P. Joly, Bourgi, Gillé, Antiste, Montaugé, Pla et Cozic, Mme Lepage, MM. Devinaz et Tissot et Mmes Poumirol, Jasmin, Monier, Conway-Mouret et Féret, est ainsi libellé :
Après l’article 58
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, permettant d’identifier les charges exceptionnelles assumées et les recettes perçues par les collectivités locales afin d’évaluer l’opportunité d’ouvrir des crédits exceptionnels en direction des collectivités territoriales.
La parole est à M. Patrice Joly.
M. Patrice Joly. Mon amendement vise à ce qu’un rapport soit élaboré pour faire une évaluation globale des conséquences de la crise sur les finances des collectivités locales, c’est-à-dire à la fois en termes de recettes perdues et de charges supplémentaires assumées : c’est un peu la vérité des prix.
Un rapport a été rendu en juillet dernier par le député Jean-René Cazeneuve. Après un premier semestre 2020 marqué par l’apparition de cette crise, nous abordons une nouvelle période, avec un nouveau confinement et de nouvelles conséquences à la fois sur l’économie et les ressources des collectivités locales. C’est pourquoi il est nécessaire de faire le point et d’être en mesure d’évaluer si les compensations accordées aux collectivités locales sont à la hauteur des enjeux et des charges ou des pertes subies.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles Guené, rapporteur spécial. Il s’agit d’une demande de rapport sur les charges exceptionnelles assumées et les recettes perçues par les collectivités locales.
Le rapport Cazeneuve a constitué pendant plusieurs mois une très bonne référence,…
M. Charles Guené, rapporteur spécial. … mais force est de constater qu’il est déjà un peu daté.
Je sollicite donc l’avis du Gouvernement pour savoir quand il pourra nous fournir de nouvelles estimations sur l’impact de la crise sur les finances locales. Pensez-vous nous communiquer des éléments rapidement ?
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Joël Giraud, secrétaire d’État. Monsieur le sénateur, la méthode de travail a déjà été arrêtée, puisque des groupes de travail ont été mis en place par le Gouvernement et l’ADF avec le bloc communal et les départements sur toutes les questions financières relatives à cette crise.
Je ne crois pas qu’il soit utile de mener deux exercices d’évaluation en parallèle : d’un côté, il y a ces groupes de travail qui me semblent assez efficaces, puisqu’ils ont pour objet d’examiner de manière précise, avec les départements, les communes et les intercommunalités, les effets de cette crise et, de l’autre, le deuxième rapport que vous demandez.
Au bénéfice de ces explications, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.
M. le président. Monsieur Joly, l’amendement n° II-767 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Patrice Joly. Cet amendement est cosigné par de nombreux sénateurs siégeant sur différentes travées de notre assemblée. Cependant, j’ai entendu ce que le secrétaire d’État vient de nous expliquer, et je le retire. Nous maintiendrons tout de même une vigilance particulière sur le sujet.
M. le président. L’amendement n° II-767 rectifié bis est retiré.
Article 59 (nouveau)
L’article L. 2334-35 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° À la fin du a du 1°, les mots : « établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre répondant aux critères d’éligibilité indiqués au 1° de l’article L. 2334-33 » sont remplacés par les mots : « communes caractérisées comme peu denses ou très peu denses, au sens de l’Institut national de la statistique et des études économiques, au 1er janvier de l’année précédant l’année au titre de laquelle la répartition est effectuée, situées dans les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre répondant aux critères d’éligibilité indiqués au 1° de l’article L. 2334-33 qui ont leur siège dans le département » ;
2° Les trois derniers alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Le montant de l’enveloppe calculée selon les critères définis aux 1° et 2° doit être au moins égal à 97 % ou, s’agissant des départements d’outre-mer et de Saint-Pierre-et-Miquelon, au moins égal à 100 %, et au plus égal à 103 % du montant de l’enveloppe calculée au profit du département l’année précédente. »
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, sur l’article.
M. Marc Laménie. L’article 59 modifie les règles de calcul de la subvention perçue au titre de la DETR entre les départements.
La DETR, qui a succédé à la DGE, est une subvention de l’État. Au fil des années, les départements ont fortement aidé les communes – je prends pour exemple mon département, les Ardennes –, mais, depuis 2015, compte tenu de leurs contraintes, ils les aident malheureusement beaucoup moins. Les régions aident aussi un peu, mais c’est en fait l’État qui reste le premier partenaire des collectivités locales en matière d’investissement, notamment pour soutenir les secteurs de l’artisanat, du bâtiment et des travaux publics.
Dans le cadre du droit existant, conformément au code général des collectivités territoriales, la DETR est calculée en tenant compte de la population de l’ensemble des communes qui sont situées dans les EPCI éligibles à la dotation. Au plan national, 97 % des communes et 90 % des EPCI sont éligibles. Pour 2021, le Gouvernement propose une DETR stable, à hauteur de 1,046 milliard d’euros en autorisations d’engagement et de 888 millions d’euros en crédits de paiement.
Les projets d’investissement sont portés par les communes et les groupements de communes. À cela, il faut ajouter la DSIL et la dotation politique de la ville. En revanche, on continue de regretter la suppression de la réserve parlementaire. Aujourd’hui, les enveloppes départementales de DETR sont gérées sous l’autorité des représentants de l’État, aidés d’une commission d’élus.
L’article 59 prend en compte le monde rural et favorise l’investissement dans les territoires ruraux. Seule la population des communes rurales serait comptabilisée dans le calcul de la part accordée aux départements. Il importerait donc d’encadrer plus strictement les variations de la DETR accordée à chaque département pour relier la dynamique de la dotation aux évolutions démographiques.
M. le président. L’amendement n° II-815 rectifié, présenté par MM. Belin, Bouloux et Babary, Mmes Bellurot, Belrhiti et Berthet, M. E. Blanc, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonne, Brisson, Burgoa, Cardoux et Courtial, Mme L. Darcos, M. de Nicolaÿ, Mmes Drexler et Dumont, MM. Duplomb et B. Fournier, Mme F. Gerbaud, M. Gremillet, Mmes Gruny, Imbert et Joseph, MM. Klinger et Laménie, Mme Lassarade et MM. D. Laurent, Le Gleut, Le Rudulier, Lefèvre, H. Leroy, Paccaud, Pointereau et Somon, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
…° Le 2° est ainsi modifié :
a) Après le a, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …) À raison de 25 % en fonction de la population des communes répondant aux critères d’éligibilité indiqués aux a et b du 2° de l’article L. 2334-33, en vue de favoriser les communes les moins peuplées ; »
b) Au b, le taux : « 50 % » est remplacé par le taux : « 25 % » ;
La parole est à M. Bruno Belin.
M. Bruno Belin. Les propos de notre collègue Marc Laménie constituent une bonne introduction à l’amendement que je présente.
Parlons un peu ruralité : aujourd’hui, la DETR est une subvention à laquelle des communes de 10 000 à 20 000 habitants peuvent prétendre. C’est très bien, mais, dans ce cas, appelons-la « dotation pour les communes de 10 000 à 20 000 habitants » !
Je ne cherche évidemment pas à opposer ruralité et ville, mais, comme vient de l’expliquer Marc Laménie, il faut soutenir la ruralité en introduisant le critère de la population communale dans le calcul de la DETR.
Ce matin, notre collègue Guylène Pantel a émis le souhait, au nom du groupe du RDSE, que les communes puissent être en deçà du seuil de participation minimal de 20 % sur les projets d’investissement. Très bien ! Personnellement, cela me va tout à fait, sauf que les communes n’ont aujourd’hui comme outil que la DETR, les conseils départementaux quand ils jouent effectivement le jeu de l’investissement, les fonds européens – personne n’y a jamais rien compris, moi le premier –, parfois les régions – mais c’est rare –, et c’est tout !
Il faut donc absolument que la DETR soit le levier indispensable des projets d’investissement des communes rurales. C’est la raison pour laquelle il faut que, à côté des critères de densité, de potentiel financier et de population de l’EPCI, on prenne en considération la population de la commune rurale. Tel est l’objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. L’amendement vise à modifier la répartition de la dotation d’équipement des territoires ruraux, qui serait attribuée à hauteur de 25 % selon la population et de 25 % selon le potentiel financier par habitant.
Nos travaux viennent après ceux de la mission de notre collègue députée Christine Pires Beaune,…
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. … qui a envisagé une réforme similaire en prenant davantage en compte la densité des communes. Elle a montré que cela conduirait à rendre inéligibles 3 304 communes qui ont toujours pu bénéficier de la DETR jusqu’à présent. Cette formule a donc été testée et donne le résultat que je viens d’évoquer.
Je suis en accord avec vous, mon cher collègue, sur le fait que cette réforme serait nécessaire pour redonner plus de poids aux communes rurales, mais elle ne peut être menée qu’après une négociation approfondie pour limiter au maximum le nombre des perdants. Nous nous rangerons donc à la position de l’Assemblée nationale. Je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement, faute de quoi j’y serai défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Joël Giraud, secrétaire d’État. Cette proposition est tout à fait comparable à celle de la mission de Jean-René Cazeneuve, dont le rapporteur était Christine Pires Beaune.
J’y suis défavorable pour une simple et bonne raison : en introduisant le critère de la population des communes, cet amendement peut se retourner contre un certain nombre de communes, notamment dans des départements très ruraux qui rassemblent des populations peu importantes. Ceux-ci profiteront très marginalement de la nouvelle enveloppe au profit de départements davantage peuplés et moins ruraux. Le risque est énorme, me semble-t-il, de ce point de vue. C’est la raison pour laquelle le rapporteur spécial a parlé de perdants.
Par ailleurs, votre dispositif favoriserait également les départements dont les communes sont les plus riches, dès lors que vous minorez la part de la dotation tenant compte de cet indicateur qu’est la richesse potentielle d’un territoire.
Je vous propose d’en rester à la position adoptée par l’Assemblée nationale, qui me semble, elle, équilibrée et raisonnable.
M. le président. Monsieur Belin, l’amendement n° II-815 rectifié est-il maintenu ?
M. Bruno Belin. Je veux simplement dire à l’attention du président Raynal que, ce qui fait la grandeur du Sénat, c’est justement que nous ne sommes pas l’Assemblée nationale !
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Pfft !
M. Bruno Belin. L’amendement est donc maintenu.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Tout d’abord, je rappelle que l’ex-réserve parlementaire n’est plus distribuée par des élus, mais attribuée par l’administration, notamment le préfet. Ce dernier nous tient cependant au courant, puisqu’un certain nombre de parlementaires sont associés, moins à la décision qu’aux choix des critères retenus. Ce processus fonctionne sûrement très bien dans nombre de départements – il en est ainsi en tout cas dans mon département.
Ensuite, il me semble que, ce qui importe, c’est certes que nous ayons connaissance des dossiers qui sont retenus – nous en sommes informés –, mais aussi des dossiers qui sont refusés. Quand le montant concerné est faible, le choix est laissé à la discrétion du sous-préfet alors que, pour un montant plus important, le dossier passe devant la commission DETR.
Si, un jour, vous décidez de modifier les critères – parce qu’il faudra bien y venir un jour quand même ! –, il sera très important que nous ayons tous connaissance, de façon très transparente, des dossiers qui ne sont pas retenus – ce sont souvent de petits dossiers. Cela nous aidera à redéfinir des critères si nous procédons à une réforme.
Cela fait près de dix ans que je suis là, et cela fait près de dix ans qu’à chaque projet de loi de finances j’entends parler des mêmes sujets…