Mme le président. Il faut conclure.
Mme Isabelle Briquet, rapporteur spécial. Vous l’aurez compris, mes chers collègues, j’émets certaines réserves à l’égard du budget qui nous est proposé. Cependant, alors que la logique de rabot semble être remise en cause…
Mme le président. Merci, chère collègue !
Mme Isabelle Briquet, rapporteur spécial. … et que les crédits et les emplois…
Mme le président. Vous avez épuisé votre temps de parole.
La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Cécile Cukierman, rapporteure pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » n’appelle pas d’observations particulières en ce qui concerne le programme 232 – la forte augmentation des crédits étant nécessaire au regard de l’actualité électorale de l’année 2021 – et le programme 216, dont le budget s’inscrit dans la continuité de l’année passée.
En revanche, nous ne saurions nous satisfaire de la stagnation des moyens humains et financiers consacrés au programme 354, « Administration territoriale de l’État », dont les crédits reculent de 3,7 % en autorisations d’engagement et augmentent très légèrement, de l’ordre de 1,7 % en crédits de paiement.
Contrairement à ce qui avait été annoncé par le Gouvernement en juillet dernier, la présence de l’État dans les territoires n’est pas renforcée par ce projet de loi de finances pour 2021.
Pour la première fois depuis 2008, les effectifs du programme ne subissent pas de réduction, ce que nous saluons. Pour autant, cette stabilisation n’est pas suffisante pour répondre aux attentes des citoyens et des élus locaux, qui dénoncent depuis des années des réformes administratives incessantes et des réductions budgétaires drastiques. Ces dernières ont abouti à la suppression de 5 000 postes, soit 25 % des effectifs en douze ans, et ont fait de certaines sous-préfectures des « vaisseaux fantômes » de la République.
Cette stagnation est d’autant plus regrettable que les objectifs fixés par le plan Préfectures nouvelle génération (PPNG), qui s’est achevé l’année dernière, ne sont toujours pas atteints en ce qui concerne le renforcement des effectifs des missions prioritaires : 231 équivalents temps plein supplémentaires sont nécessaires pour remplir les engagements du PPNG, mais le projet de loi de finances pour 2021 ne prévoit aucune création de poste pour le programme 354, « Administration territoriale de l’État ».
Nous ne pouvons donc nous satisfaire d’une telle situation à l’heure où nous traversons une crise sanitaire, économique et sociale majeure, qui nécessite un véritable renforcement de l’administration territoriale de l’État.
C’est la raison pour laquelle la commission des lois a émis un avis défavorable sur les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » inscrits au projet de loi de finances pour 2021.
Mme le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous nous attelons aujourd’hui à l’examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».
Outre l’organisation et le fonctionnement d’une partie des services déconcentrés du ministère de l’intérieur, cette mission inclut la budgétisation de l’acte fondateur de notre démocratie : le financement des élections.
Commençons par le programme 354. Au risque de me répéter, on apprend tout autant des priorités du Gouvernement en analysant les montants des crédits, leur évolution et leur ventilation qu’en étudiant les indicateurs de performance qu’il choisit.
J’ai été étonné, par exemple, de voir le taux retenu pour l’indicateur sur le respect des visites de sécurité des immeubles de grande hauteur accueillant du public, révisé à la baisse, les moyens n’étant pas au rendez-vous pour combler et lisser la part des visites programmées en 2020 n’ayant pas eu lieu à cause de la crise sanitaire. De là à dire que l’État cherche à faire des économies sur la sécurité…
Ce programme couvre également la délivrance de titres et prévoit d’ores et déjà, faute d’y mettre les moyens, un allongement d’un tiers des délais pour l’instruction des passeports biométriques et de plus de 50 % pour les cartes nationales d’identité électroniques, ces augmentations étant justifiées par l’anticipation de demandes accrues. Là encore, il n’y a pas d’anticipation financière.
Toujours au sujet de la gestion des titres, mon groupe proposera un amendement visant à permettre le recrutement au sein des centres d’expertise et de ressources des titres (CERT) d’agents titulaires au lieu des contractuels qui enchaînent aujourd’hui des contrats de courte durée.
En ce qui concerne les attentes des collectivités envers l’État, le rôle des préfectures en matière de contrôle de la légalité, mais aussi de conseil, apparaît comme en légère diminution, ce qui peut sembler contradictoire à l’heure où devrait se développer le rôle de conseil de la représentation de l’État et où le couple préfet-maire serait le bon niveau de réflexion.
Si la numérisation doit permettre une rationalisation des coûts, je profite de l’étude de ces crédits pour faire de nouveau part des inquiétudes émanant des élus de nos circonscriptions et du Défenseur des droits, qui voient les accueils physiques des services publics fermer les uns après les autres.
La « start-up nation » est une belle ambition, mais les difficultés liées au numérique sont nombreuses. Le fossé n’est pas qu’entre les générations. La présence d’un interlocuteur permet souvent de sortir de situations kafkaïennes que l’administration a parfois le don de créer, mais aussi de résoudre : autant qu’elle soit joignable et accessible physiquement.
Le programme 232 permet à chaque citoyen d’exercer pleinement son rôle, qu’il soit en position d’électeur ou de personne éligible. C’est aussi ce programme qui distribue le financement public aux partis politiques.
L’année prochaine verra se dérouler un grand nombre d’élections, ce qui justifie l’augmentation du budget consacré à leur organisation. En la matière, à quelques mois des échéances, beaucoup de questions restent encore non résolues.
Je soulignerai, outre les écarts des coûts et la part variable de la propagande selon les élections, l’utilité environnementale limitée de l’impression de millions de professions de foi quand une part non négligeable des électeurs a accès à des informations via d’autres moyens.
Enfin, le programme 216 concerne la conduite et le pilotage des politiques du ministère de l’intérieur. Je relèverai l’annonce des nominations de « sous-préfets à la relance », créant une inquiétude quant à la multiplication des interlocuteurs.
Le fonds interministériel de prévention de la délinquance est de nouveau en baisse sensible. Les actions de prévention sont remarquablement concernées par cette diminution : prévention de la radicalisation, prévention des violences faites aux femmes et aux familles, et prévention de la délinquance.
La prévention et le financement d’actions de prévention en association avec les collectivités territoriales et le milieu associatif sont vraiment les parents pauvres de l’action du ministère de l’intérieur. Les crédits sont en baisse : la différence entre les besoins et les moyens serait risible si ce n’était pas si triste.
Cela ne surprendra personne si, au vu des maigres montants inscrits sur la ligne budgétaire qui englobe l’aide aux victimes, l’aide en faveur des jeunes délinquants, mais aussi la sécurisation des sites sensibles aux risques terroristes, notre groupe propose une évolution importante de ces crédits.
Mme le président. Il faut conclure.
M. Guy Benarroche. C’est pourquoi le groupe GEST ne votera pas ces crédits.
Mme le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.
M. Thani Mohamed Soilihi. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous débutons l’examen de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » dans un contexte où l’ordre républicain est menacé et où un engagement fort de l’État est attendu.
Au sein de cette mission, pilotée par le ministère de l’intérieur, trois responsabilités fondamentales sont mises en œuvre : garantir l’exercice des droits des citoyens dans le domaine des grandes libertés publiques ; assurer la présence et la continuité de l’État sur l’ensemble du territoire de la République ; mettre en œuvre au plan local les politiques publiques nationales.
Pour mettre en œuvre ces responsabilités, les crédits de la mission sont en augmentation de 6 % par rapport à 2020, s’élevant ainsi à 4,2 milliards d’euros. Nous saluons cette augmentation, face à l’étendue de la tâche. Au travers du ministère de l’intérieur, c’est l’État dans sa proximité et son adaptation aux territoires qui s’exprime, et l’exercice des libertés individuelles et fondamentales des citoyens qui se manifeste.
La mission se décline en trois programmes.
Je m’attarderai quelques minutes sur le nouveau programme 354, « Administration territoriale de l’État ».
Il porte les moyens du réseau préfectoral, mais également ceux des services placés sous l’autorité des préfets de région et des directions départementales interministérielles (DDI). Pour 2021, le programme bénéficie de 2,37 milliards d’euros, soit 56,4 % des crédits de la mission. Il vise plusieurs objectifs.
Il s’agit, tout d’abord, du déploiement de la réforme de l’organisation territoriale de l’État, notamment par la mise en place des secrétariats généraux communs aux préfectures et aux directions départementales interministérielles, et par une nouvelle étape de la modernisation du réseau des agents affectés au sein des services des préfectures et des sous-préfectures, en regroupant l’ensemble des ressources de préfectures, des DDI, voire des secrétariats généraux aux affaires régionales (SGAR).
Le programme stabilise les effectifs des préfectures et sous-préfectures au niveau atteint en 2020. La transformation et la rénovation du réseau préfectoral entreprises par cette réforme sont à saluer. Les préfets et sous-préfets seront au cœur de l’action de l’État dans le cadre de la relance, et le couple maire-préfet démontre encore aujourd’hui toute sa pertinence.
Le programme 354 mobilise également l’administration territoriale de l’État en faveur du développement du réseau France Services et assure, à l’horizon 2021, le déploiement d’une carte nationale d’identité électronique conforme aux standards européens.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Thani Mohamed Soilihi. Ensuite, l’augmentation des crédits de la mission se justifie également par le programme 232, « Vie politique, cultuelle et associative », en forte hausse du fait de l’organisation des futures élections, à hauteur de 437 millions d’euros en 2021, et du financement de la vie politique, contrôlé par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP).
Enfin, le programme 216, « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur », qui finance des projets structurants du ministère de l’intérieur, bénéficiera de 33 % des crédits de la mission, soit 1,3 milliard d’euros pour 2021.
Il faut noter la mise en route de la carte d’identité numérique pour laquelle l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS) a obtenu des ressources supplémentaires de 42,8 millions d’euros au titre du plan de relance.
Je soulignerai également la situation du fonds interministériel de prévention de la délinquance, crédité de 65 millions d’euros pour 2021 répartis entre des programmes d’actions de prévention des violences faites aux femmes et aux familles, de prévention de la délinquance, de sécurisation des sites sensibles au risque terroriste et de prévention de la radicalisation.
Afin de mettre en œuvre toutes ces actions, le groupe RDPI votera en faveur des crédits de la mission.
Mme le président. La parole est à Mme Maryse Carrère.
Mme Maryse Carrère. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je le regrette, mais chaque année l’examen de cette mission nous conduit exactement au même constat, celui du recul de l’État dans nos territoires, notamment les plus ruraux.
Ce recul, c’est l’effacement progressif des services publics de proximité au profit de la dématérialisation et du tout-numérique. Non pas que nous soyons opposés à ces progrès, mais ils se heurtent à plusieurs réalités pratiques.
Tout d’abord, l’ensemble de nos concitoyens n’a tout simplement pas accès à une connexion internet haut débit suffisante.
Ensuite, cette volonté du tout-numérique méconnaît totalement la réalité qu’est l’illectronisme, qui touche près de 17 % de la population. À ce titre, j’espère que la mission d’information lancée l’année dernière par notre ancien collègue Raymond Vall apportera des solutions pour lutter contre ce phénomène.
On peut néanmoins noter que le Gouvernement est cohérent dans son objectif, puisque l’on constate une montée en puissance des crédits de la mission numérique au sein du programme 216, « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur ».
L’essentiel des 4,2 milliards d’euros des crédits de la mission sont concentrés sur le programme 354, « Administration territoriale de l’État ». Comme l’année dernière, l’augmentation des crédits de ce programme vient simplement acter l’augmentation du périmètre de la mission.
Pour ce qui concerne l’administration déconcentrée, on pourrait se réjouir que, pour la première fois depuis 2008, il n’y ait pas de baisses des effectifs. Hélas, la crise de la covid nous a ramenés à la réalité que je décrivais en préambule : celle d’une administration territoriale sous-dimensionnée.
Je regrette, une fois de plus, qu’à cette réalité on réponde par moins d’État et moins de services publics. Nous pouvons également le constater au travers de la poursuite, malgré le contexte, de la restructuration du service des impôts sur nos territoires ruraux.
Mme Cécile Cukierman. Exactement !
Mme Maryse Carrère. Vous me direz que vous n’êtes pas responsables, et vous aurez raison : c’est le fruit des politiques menées depuis de nombreuses années. Qu’elles s’appellent « révision générale des politiques publiques » ou « modernisation de l’action publique », l’objectif est toujours le même : réaliser des économies, sans s’interroger sur les incidences en termes de service rendu au public. C’est la principale raison de la défiance de nos concitoyens envers les politiques.
Cette défiance est également ressentie par certains élus, face au faible accompagnement de l’État.
Prenons l’exemple de l’Agence nationale de la cohésion des territoires, chère au RDSE : force est de constater que les 30 équivalents temps plein prévus sont insuffisants par rapport à la demande en ingénierie dans nos territoires.
Un autre exemple est celui des maisons de services au public, dites aussi France Services. Là encore, l’État prend trop peu sa part et les deux tiers des maisons créées sont financées par les collectivités.
J’en viens au programme 232, « Vie politique, cultuelle et associative ». Comme l’année dernière, il connaîtra une hausse de ses crédits du fait de la tenue des élections régionales et départementales. À ce titre, et à la suite des recommandations de Jean-Louis Debré, il nous faudra voter pour le report en juin de ces élections, mais également prévoir les surcoûts que cela occasionnera.
Enfin, la disparition de la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes), couplée à la baisse du fonds interministériel de prévention de la délinquance, dans lequel elle a été fondue, nous inquiète quant à la priorité que le Gouvernement accorde à la lutte contre les dérives sectaires.
Malgré ces réserves, la majorité des membres du groupe du RDSE votera les crédits de cette mission.
Mme le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Madame le président, madame la ministre, mes chers collègues, je commencerai par un mot sur la gestion de la prévention de la radicalisation.
Comme chaque année, je souhaite vous faire part de mes doutes sur le comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR), qui ne fait pas l’objet d’une évaluation suffisante et dont la stratégie est compliquée. Si l’on y ajoute sa fusion avec la Miviludes et la baisse des crédits, on est en droit de s’inquiéter.
La lutte contre la radicalisation est extrêmement importante. Or, lorsque l’on regarde le « jaune » budgétaire des comités Théodule qui sont associés aux ministères, on constate que le conseil scientifique sur les processus de radicalisation, institué par la loi du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, dite loi SILT, et qui compte 31 membres, s’est réuni zéro fois en 2017, trois fois en 2018, six fois en 2019… Il s’agit, certes, d’une croissance exponentielle, mais cela ne va pas nous aider à beaucoup réfléchir sur la radicalisation !
Je focaliserai mon intervention sur la fraude documentaire, qui fait partie aussi des missions de ce conseil scientifique. Il y aurait beaucoup à dire, madame la ministre, sur ce sujet.
Pour ceux qui, par pudeur ou par dogmatisme, s’évertuent à minimiser la gravité de la fraude documentaire et de ses effets, je souhaite vous raconter une petite histoire. Un individu fiché S, chef d’un réseau sophistiqué de faussaires – faux papiers d’identité, comptes bancaires usurpés, escroquerie aux prêts automobiles – a détourné, au moyen de 73 fausses identités, 193 véhicules alors qu’il était mis en examen depuis 2010 dans le cadre d’une procédure de financement du terrorisme. Les faux documents, cela existe !
Toujours au sujet de la fraude documentaire, je me permets de vous lire un courriel du 25 février 2020, donc assez récent, adressé par le responsable d’un commissariat de l’Orne à l’association des maires de ce département : « Par le biais de ce mail, je souhaite vous sensibiliser sur le point suivant : lors de la demande de carte nationale d’identité en mairie, les usagers présentent un certificat de naissance. Ce certificat de naissance peut être vérifié par les agents de la mairie via le logiciel Comedec, qui est facultatif pour les mairies, car très onéreux. »
Ne croyez-vous pas, madame la ministre, que les mairies pourraient accéder à ce logiciel gratuitement ? Cela permettrait d’éviter un certain nombre de délires…
Le responsable du commissariat poursuit : « Les voyous profitent de cette faille pour se présenter dans les mairies de ces communes avec un faux certificat de naissance et une demande de carte nationale d’identité. Si l’agent de la mairie ne s’assure pas de l’authenticité du certificat de naissance, le demandeur se retrouve avec une vraie carte d’identité, mais avec une identité frauduleuse. » Sécuriser les actes d’état civil, cela relève de cette mission, et c’est absolument déterminant !
Il existe un lien avec la mission précédemment examinée : la majorité des pays d’Afrique subsaharienne accusent un retard absolument gigantesque pour ce qui est de la sécurisation des actes d’état civil. Des personnes n’ayant pas d’état civil sécurisé vont donc voyager, ou éventuellement émigrer, et l’on ne parviendra jamais à garantir leur identité. L’Unicef avait fait part de ses grandes inquiétudes à cet égard l’année dernière et celle qui précédait.
Madame la ministre, allez-vous suivre les préconisations des différents rapports et commissions d’enquête sur la fraude documentaire ? Travaillerez-vous avec les pays étrangers qui sont nos partenaires pour sécuriser les actes d’état civil ?
Il suffirait de compléter l’article 47 du code civil par l’alinéa suivant : « Un décret en Conseil d’État établit une liste de pays pour lesquels la présomption de l’alinéa précédent ne s’applique pas. Ce décret détermine les pays concernés et les modalités d’admission des documents destinés à prouver l’identité de leurs ressortissants. »
C’est un véritable sujet ! Il faut établir – c’est très important – un plan de sécurisation de l’identité auprès des organismes sociaux via le développement des outils de biométrie.
Je souhaite vous demander, madame la ministre, de bien vouloir consulter vos homologues étrangers pour mettre en place une coopération massive de sécurisation des identités et des états civils.
Un programme du Fonds européen pour la sécurité intérieure (FSI), doté de 3,8 millions d’euros pour la période 2014-2020, va être reconduit. Peut-être est-ce le moment d’utiliser ces fonds européens pour mener des opérations de sécurisation des titres, qu’il s’agisse de titres français ou de titres étrangers de personnes qui viennent en France.
Par ailleurs, il n’existe toujours pas de formulaire Cerfa pour les actes de naissance en France. Si le contenu de l’acte de naissance est partout le même, ce n’est pas le cas pour le document qui le porte : chaque mairie émet les documents sur son propre papier à lettres.
Tous ces éléments sont des causes absolument évidentes de fraude documentaire, que nous retrouvons ensuite tout au long d’un processus.
Je conclurai mon propos en vous remerciant, ainsi que vos services, pour la qualité du document de politique transversale (DPT) Prévention de la délinquance et de la radicalisation.
Je le redis, je demeure très interrogative et perplexe sur le CIPDR, dont j’espère que la nouvelle gouvernance permettra de faire avancer les choses. En effet, nous sommes appelés à parler encore de terrorisme et de sécurité, et à débattre d’un texte sur le séparatisme. Mais il faut d’abord que les dossiers de la fraude documentaire et de la prévention de la radicalisation soient bouclés. Aucune mesure de politique pénale ne vaudra une bonne prévention ! (Mme Dominique Vérien applaudit.)
Mme le président. La parole est à M. Édouard Courtial. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Édouard Courtial. Madame le président, madame la ministre, mes chers collègues, si le budget général de la mission, s’établissant à 4,2 milliards d’euros, est en légère augmentation par rapport à l’année précédente, soit +3,6 % en autorisations d’engagement et +6 % en crédits de paiement, il révèle, en réalité, une hausse en trompe-l’œil en fonction des programmes budgétaire concernés.
Cette mission appelle donc trois remarques.
Tout d’abord, sur la présence de l’État dans nos territoires, avec le programme 354 : s’il est vrai que, pour la première fois depuis 2008, l’administration territoriale de l’État ne subit pas de diminution de ses effectifs en 2021, la stabilisation des moyens humains et financiers va à l’encontre de la déclaration de politique générale du Premier ministre du 16 juillet dernier.
Or les préfectures, notamment de département, ont été progressivement dépouillées de leurs leviers d’action par les réformes menées depuis des décennies. Ainsi, dans de nombreux territoires, les moyens humains et matériels de l’État déconcentré sont aujourd’hui minimes, donc insuffisants, notamment – nous l’avons vu – pour faire face à la crise sanitaire, et ce malgré l’engagement des agents, que je tiens à saluer.
Pour y répondre, le Gouvernement annonce la création d’une nouvelle catégorie de représentants de l’État, les sous-préfets à la relance. L’occasion est donc donnée de doter les services départementaux de l’État qui en ont le plus besoin de ces moyens exceptionnels. Or il n’y a rien de précis sur ce point dans le PLF, pas plus que dans les axes de déploiement de la réforme de l’organisation territoriale de l’État.
Pourtant, la territorialisation du plan de relance est la condition de sa réussite. Et seules les préfectures de département peuvent être l’échelle garante de l’efficacité escomptée.
En outre, la nouvelle rationalisation proposée dans ce budget, associée à la montée en puissance de la direction numérique du programme 216, ne doit pas être synonyme, comme c’est trop souvent le cas, de baisse de la qualité de service, comme nous avons pu le constater avec la fermeture de trop nombreuses trésoreries locales.
Ma deuxième remarque concerne les prochaines échéances électorales, dont le financement relève du programme 232. L’augmentation des crédits de ce programme explique, presque à elle seule, la hausse du budget de la mission.
En effet, le calendrier de 2021 sera chargé, avec les élections départementales et régionales en mars prochain. Il faut donc anticiper certaines dépenses, notamment celles permettant de garantir la sécurité sanitaire. Mais il est regrettable que, malgré les leçons budgétaires que nous aurions pu tirer des élections municipales passées, l’éventuel report des élections au mois de juin et la majoration du plafond des dépenses de campagne, proposés par Jean-Louis Debré, ne soient pas budgétés dans le cadre de cet exercice budgétaire.
Par ailleurs, madame la ministre, au nom des principes qui fondent notre démocratie, il y a urgence à lever le flou qui entoure la date des scrutins. L’absence de décision prend aujourd’hui en otages élus et collectivités. Ces rendez-vous sont des moments importants pour nos territoires et leurs habitants, qui ont besoin de lisibilité.
Enfin, je souhaite faire part de mon incompréhension face à la baisse continue, depuis 2018, du budget alloué au fonds interministériel de prévention de la délinquance, alors que notre pays est confronté à une menace terroriste élevée, à une montée de la violence et à une radicalisation dont nous avons pu mesurer encore récemment les conséquences tragiques.
Ainsi, et contrairement à ce que son titre pourrait laisser entendre, cette mission a une incidence directe et très concrète pour nos compatriotes dans les territoires, surtout les plus ruraux. Le maillage territorial de l’État et sa capacité d’action dans nos territoires doivent être renforcés, à plus forte raison dans le contexte actuel, marqué par une crise sanitaire sans précédent, un ordre républicain abîmé et une société plus que jamais fracturée.
L’État doit prendre ses responsabilités et ne peut constamment se reposer sur les collectivités territoriales, pour lesquelles faire mieux avec moins n’est pas seulement un slogan, mais une réalité – fortement accentuée par le contexte financier de baisse attendue des recettes et d’explosion actuelle, mais aussi à venir, des dépenses. Je pense à cet égard aux conseils départementaux, et notamment à celui de l’Oise, que je connais bien pour avoir eu l’honneur de le présider, et qui va sûrement voir la charge du revenu de solidarité active (RSA) bondir, sans parler de celle relative aux mineurs étrangers isolés.
Vous le savez, les collectivités agissent au cœur de la crise sanitaire pour préserver les services rendus à leurs administrés et pour limiter l’impact économique de ladite crise. En retour, elles doivent pouvoir compter sur l’État.
Madame la ministre, constance et cohérence ont guidé mon intervention, par rapport à celle de l’année précédente. Je vous invite à faire de même afin de renforcer la parole de l’État vis-à-vis de nos élus, de nos territoires et de leurs habitants. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)