Mme le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, pour explication de vote.
M. Jean Louis Masson. Je suis quand même un peu interloqué qu’on m’accuse de ne pas avoir fait telle ou telle chose ! Avez-vous regardé, ma chère collègue, les interventions que, précisément, j’ai faites sur ce sujet ?
Je suis intervenu régulièrement, depuis trois ou quatre ans, sur un problème relatif à la fonction publique hospitalière, dont les agents, dans mon département, ont des difficultés considérables concernant le calcul de leur indemnité de résidence. Même vos amis de la CGT ont dit publiquement que j’étais le parlementaire qui les avait le mieux défendus !
Mme Cécile Cukierman. Je suis élue par les maires et pas par les syndicalistes, monsieur Masson !
M. Jean Louis Masson. Je ne comprends donc pas quelles sont les sources qui vous autorisent à me faire, à moi, personnellement – je ne suis pas responsable de ce que font nos collègues –, un tel procès d’intention.
Cet aparté étant fait, je voudrais dire à notre rapporteur que sa réponse – en substance : « vous avez raison, mais on ne peut pas faire mieux » – n’est pas satisfaisante. Mettez-vous à la place d’un candidat aux élections législatives ou d’une liste aux élections régionales qui voient leur profession de foi et leurs bulletins de vote arriver dans une autre circonscription ou dans une autre région – cela s’est déjà produit ; c’est une catastrophe pour le candidat !
Dire après coup qu’on va voir ce qu’on peut faire, c’est bien ; mais une fois que la personne a subi le préjudice, elle aura beau faire tout ce qu’elle veut, cela n’empêchera pas que les carottes sont cuites !
Il y a donc véritablement un problème. Avant 2017, quand l’État s’en occupait, ça se passait bien ; il n’y a pas de raison que, si l’État s’en charge de nouveau, ça ne se passe pas de nouveau bien, et certainement mieux qu’avec des adjudications au secteur privé.
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 16.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 3
L’ordonnance n° 2020-1304 du 28 octobre 2020 portant diverses mesures institutionnelles relatives à la création de la Collectivité européenne d’Alsace est ainsi modifiée :
1° À la fin du dernier alinéa de l’article 3, les mots : « au plus tard le 30 juin 2021 » sont remplacés par les mots : « dans un délai de trois mois à compter du renouvellement général des conseils départementaux de 2021 » ;
2° À la première phrase du II de l’article 11, les mots : « de la date de sa première installation » sont remplacés par les mots : « du renouvellement général des conseils départementaux de 2021 ».
Mme le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, sur l’article.
M. Jean Louis Masson. Cet article a pour objet la Collectivité européenne d’Alsace. Je reviens à ce que je disais précédemment : si l’on est obligé d’y consacrer un article, c’est justement parce que cette aberration qu’est la loi de 2015 a créé cette grande région qui n’a aucun sens et est démesurément étendue.
Je voudrais intervenir à nouveau sur ce sujet, parce que la problématique est bien réelle. Je voulais tout à l’heure – je n’ai pas pu car, ne disposant que de trois minutes, mon temps de parole était épuisé –, rappeler les propos très pertinents tenus par M. Bierry, président de la Collectivité européenne d’Alsace, lundi matin sur Public Sénat : « Bien évidemment, nous appelons de notre vœu le démembrement de la région Grand Est. Si nous pouvions reconstituer l’Alsace – nous l’avons fait institutionnellement avec la Collectivité européenne d’Alsace –, il suffirait de transférer toutes les compétences de la région et on aurait une collectivité d’un nouveau genre, mais qui serait beaucoup plus efficace et beaucoup plus lisible pour nos concitoyens. »
Je voudrais qu’à terme on ne soit plus obligé de faire des articles en plus pour la Collectivité européenne d’Alsace, qu’elle devienne une région de plein exercice et que les choses puissent fonctionner normalement et de façon satisfaisante aussi bien pour les Alsaciens que pour les Lorrains et les Champardennais, qui sont victimes des dimensions démesurées de cette région.
La discussion de cet article est l’occasion pour moi de souligner le caractère aberrant – c’est flagrant – de cette région Grand Est.
Mme le président. Je mets aux voix l’article 3.
(L’article 3 est adopté.)
Article additionnel après l’article 3
Mme le président. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 46 rectifié, présenté par M. Masson, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À titre dérogatoire, les élections régionales de 2021 dans les régions créées par la loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral et dont la superficie est de plus de 30 000 km², sont organisées séparément dans le cadre de circonscriptions correspondant aux anciennes régions qui existaient jusqu’en 2015.
Le nombre total de conseillers régionaux de chaque région reste inchangé, chacune des circonscriptions élisant un nombre de conseillers régionaux proportionnel à sa population. Le nombre de candidats prévu par section départementale est modifié en conséquence.
Pour l’attribution des sièges entre les listes, la prime majoritaire prévue à l’article L. 338 du code électoral est appliquée séparément pour chacune de ces trois circonscriptions.
L’amendement n° 42 rectifié, présenté par M. Masson, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À titre dérogatoire, les élections régionales de 2021 dans la région Grand Est, sont organisées séparément dans le cadre de trois circonscriptions correspondant aux trois anciennes régions qui existaient jusqu’en 2015.
Le nombre total de conseillers régionaux de la région Grand Est reste inchangé, chacune des trois circonscriptions élisant un nombre de conseillers régionaux proportionnel à sa population. Le nombre de candidats prévu par section départementale est modifié en conséquence.
Pour l’attribution des sièges entre les listes, la prime majoritaire prévue à l’article L 338 du code électoral est appliquée séparément pour chacune de ces trois circonscriptions.
La parole est à M. Jean Louis Masson, pour présenter ces deux amendements.
M. Jean Louis Masson. Ces deux amendements relèvent de la même logique, l’un concernant plus particulièrement la région Grand Est.
L’épidémie va perturber le déroulement des campagnes électorales. Cette perturbation sera d’autant plus forte que la circonscription électorale concernée est plus étendue. Ce sera tout particulièrement le cas des grandes régions fusionnées en 2015. Certaines, notamment la région Grand Est, sont de véritables monstres administratifs, dont l’étendue tentaculaire est totalement incompatible avec le déroulement normal d’une élection déjà perturbée par l’épidémie.
Dans son discours du samedi 23 janvier, le Premier ministre Jean Castex a reconnu cette problématique : « Au-delà de l’Alsace, je voudrais vous faire une confidence personnelle : je n’ai jamais été convaincu par la création de ces immenses régions, dont certaines ne répondent à aucune légitimité historique et surtout ne me paraissent pas répondre aux besoins grandissants de nos concitoyens pour une action publique de proximité. Le désir de retrouver une Alsace reconnue, que vous avez unanimement et continument exprimé depuis 2015, ne constitue ni une lubie folklorique ni une menace à l’unité de la République comme on l’a parfois, malheureusement, entendu. »
L’augmentation de la taille des régions repose en fait sur une erreur fondamentale, qui consiste à croire que, plus on fait grand, plus il y a d’économies d’échelle. Or une taille optimale correspond à chaque type d’organisation territoriale. Au-delà de cet optimum, les pesanteurs administratives et le manque de proximité de la gestion entraînent des surcoûts et des dysfonctionnements.
Compte tenu des frais de déplacement et de l’éloignement des centres de décision, les grandes régions n’ont permis aucune économie réelle de gestion. C’est d’ailleurs ce qu’a confirmé en 2017 la Cour des comptes, qui, dans un rapport, évoquait une augmentation, dans le Grand Est, de 51 % des frais de déplacement et de représentation.
La création de cette région a donc bien entraîné des gaspillages. Son cas est en fait emblématique. D’une part, son étendue territoriale est démesurée, en l’espèce 57 433 kilomètres carrés, soit presque le double de celle de la Belgique, qui n’a que 30 689 kilomètres carrés, alors qu’elle est divisée en trois régions – la Flandre, la Wallonie et Bruxelles. D’autre part, les anciennes régions fusionnées autoritairement dans le Grand Est ont une identité forte, notamment l’Alsace. Il est donc important que, dans le cadre des élections régionales, ces trois anciennes régions puissent exprimer leur sensibilité propre dans trois scrutins séparés.
Tel est le sens de ces deux amendements. L’amendement n° 42 rectifié concerne le Grand Est, tandis que l’amendement n° 46 rectifié vise toutes les régions fusionnées, dont la population est supérieure ou égale à celle de la Belgique.
Mme Cécile Cukierman. Et pourquoi pas les autres ?
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. L’avis est défavorable, madame la présidente.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 42 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 4
Pour les élections mentionnées au I de l’article 1er de la présente loi :
1° La période pendant laquelle s’appliquent les interdictions prévues à l’article L. 50-1, au troisième alinéa de l’article L. 51 et aux premier et second alinéas de l’article L. 52-1 du code électoral, qui a commencé à courir le 1er septembre 2020, est prorogée jusqu’à la date du tour de scrutin où chaque élection est acquise ;
2° La période prévue à l’article L. 52-4 du même code pendant laquelle le mandataire recueille les fonds destinés au financement de la campagne et règle les dépenses en vue de l’élection, qui a commencé à courir le 1er septembre 2020, est prorogée jusqu’au dépôt du compte de campagne du scrutin concerné ;
3° Les plafonds de dépenses prévus à l’article L. 52-11 dudit code sont majorés de 20 %.
Mme le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, sur l’article.
M. Vincent Delahaye. Je voudrais attirer l’attention du Gouvernement et de la commission sur les conséquences du report de trois mois des élections départementales et régionales sur les comptes de campagne – j’espère que ces élections ne seront pas décalées davantage, mais je partage les craintes d’un certain nombre de collègues à ce sujet…
Normalement, les comptes de campagne démarrent six mois avant ce type d’élection. Pour les prochaines, l’option retenue jusqu’à maintenant est de proroger les délais et d’augmenter le plafond de dépenses.
Pour ma part, je ne suis pas très favorable à cette option. C’est pourquoi j’ai cosigné l’amendement n° 40 rectifié qui sera défendu par mon collègue Pierre Louault dans un instant. Il prévoit que les comptes de campagne commencent le 1er janvier 2021.
En fait, je m’inquiète des éventuelles mises en cause, si l’on ne change rien au droit actuel, d’élus locaux qui appartiennent à des exécutifs de collectivités ayant décidé d’apporter un soutien à des entreprises, à des commerçants, voire à des particuliers dans le cadre de la crise sanitaire. Ces soutiens pourraient en effet être mis sur le dos du président ou du maire, mais aussi des membres de l’exécutif qui seraient candidats aux élections départementales ou régionales.
Je ne sais pas, si la réponse apportée par l’amendement de mon collègue Pierre Louault est correcte. Je demande en tout cas au Gouvernement et à notre excellent rapporteur Philippe Bas d’avoir cette question en tête et d’essayer de rédiger une disposition qui permette d’éviter l’important risque contentieux lié à l’éventuelle intégration, dans les comptes de campagne, des différents soutiens apportés par les collectivités pendant la crise.
Mme le président. L’amendement n° 40 rectifié, présenté par MM. Louault, Folliot et Kern, Mmes Sollogoub et Férat, MM. Delahaye et Canevet, Mme Perrot, M. Le Nay, Mmes Loisier et Létard et M. Moga, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Pour les élections mentionnées au I de l’article 1er de la présente loi :
1° La date à partir de laquelle s’appliquent les interdictions prévues à l’article L. 50-1, au troisième alinéa de l’article L. 51 et aux premier et second alinéas de l’article L. 52-1 du code électoral, est fixée au 1er janvier 2021 ;
2° La date à partir de laquelle le mandataire recueille les fonds destinés au financement de la campagne et règle les dépenses en vue de l’élection est fixée, par dérogation à l’article L. 52-4 du même code, au 1er janvier 2021.
La parole est à M. Pierre Louault.
M. Pierre Louault. Le projet de loi entend proroger certaines périodes prévues par le code électoral jusqu’à la date du tour de scrutin où l’élection est acquise ou jusqu’au dépôt du compte de campagne du scrutin concerné, ce qui est tout à fait justifié.
Cependant, la rédaction maintient un délai de six mois précédant le scrutin pour un certain nombre de dispositions et règles applicables, tout en faisant courir le délai à compter du 1er septembre 2020. De ce fait, les interdictions qui sont prévues dureront non pas six, mais dix mois.
Nous proposons de modifier le texte pour apporter une précision quant à la date de départ des délais, ce qui évitera, à mon avis, une inflation des recours. Il s’agit bien d’une précision ; elle n’est peut-être pas fondamentale, mais elle me semble nécessaire.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. La commission a besoin d’entendre la position du Gouvernement sur ce sujet.
Cette matière est déjà très réglementée, la commission chargée du contrôle et de la vérification des comptes de campagne ayant développé une large jurisprudence ; en général, les collectivités savent bien ce qui se passe quand on approche d’élections : il est possible de continuer à faire une communication officielle au nom de sa collectivité, mais il ne faut pas franchir la ligne rouge – cette communication officielle ne doit pas avoir les caractéristiques d’une communication de campagne.
Beaucoup d’élus tout à fait de bonne foi s’inquiètent et se demandent si le bulletin municipal qui contient leur photo leur sera reproché en cas de candidature aux élections départementales ou régionales. Dans ce cas, on ne peut pas répondre de manière générale et absolue ; il faut regarder précisément le bulletin municipal en question pour savoir s’il a le caractère d’un document de campagne électorale.
Il est vrai que, à partir du moment où l’on reporte de trois mois les élections, la question se pose de manière rétrospective pour des documents qui auraient été publiés par les collectivités à une période où le report avait déjà été annoncé publiquement, mais pas encore voté. Cette période a pu entraîner une certaine confusion dans l’esprit des responsables territoriaux, qu’ils soient élus ou fonctionnaires.
Mais il faut aussi faire attention à un point, auquel le Gouvernement a été, me semble-t-il, attentif : certains candidats ont, de bonne foi, ouvert un compte de campagne dès le mois d’octobre et ont déjà réalisé des dépenses – l’achat d’une photocopieuse, la location d’un local, que sais-je encore… Si le début de la campagne est reporté au mois de janvier, comment va-t-on faire pour prendre en compte ce type de frais de campagne, c’est-à-dire des dépenses exposées au cours du dernier trimestre de l’année 2020, en vue de leur remboursement ?
Tout cela est en réalité assez complexe. C’est pourquoi j’aimerais connaître l’analyse du Gouvernement.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. C’est effectivement une matière complexe qui doit répondre à des questions très concrètes, comme celles qu’a évoquées M. le rapporteur.
C’est justement pour ne pas créer d’incertitudes que le Gouvernement a proposé de proroger la période initialement ouverte le 1er septembre, plutôt que de l’interrompre pour la reprendre six mois avant le scrutin, soit au 1er décembre ou au 1er janvier comme cela est proposé dans l’amendement.
Les interdictions dont il est question ont trait à la communication préélectorale ; elles s’appliqueront sans discontinuer depuis le 1er septembre afin de garantir l’égalité de moyens entre les candidats. De même, les candidats sont tenus de tracer dans leurs comptes de campagne les recettes et les dépenses exposées depuis le 1er septembre.
Si nous créions une période interstitielle, il existerait un flou sur les règles applicables au financement de cette campagne.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement. J’espère avoir répondu, monsieur le rapporteur, à votre question.
Mme le président. Quel est donc l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Mes chers collègues, je me demande si la sagesse ne voudrait pas que nous prenions un peu plus de temps pour examiner cette question, ce que nous pourrons faire à la faveur de la prochaine réunion de la commission mixte paritaire.
Si nous adoptons cet amendement, les dépenses faites au dernier trimestre de l’année dernière par les candidats ne pourront plus être remboursées. En revanche, les candidats seront mieux protégés contre le risque de requalifier rétrospectivement un document à finalité institutionnelle en document de campagne.
Certes, le texte de la commission comme celui du Gouvernement ne règlent pas parfaitement la question soulevée par cet amendement, mais celui-ci ne le fait pas non plus, puisqu’il ne traite pas le problème du remboursement des dépenses déjà effectuées par les candidats.
C’est pourquoi l’avis de la commission est défavorable à ce stade, mais je m’engage à ce que nous en discutions en commission mixte paritaire.
Mme le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour explication de vote.
Mme Laure Darcos. J’avais déposé un amendement qui allait dans le même sens, mais les échanges que j’ai eus avec le rapporteur, notamment l’argument selon lequel des candidats avaient déjà ouvert des comptes de campagne et que l’adoption de cet amendement les aurait mis dans des difficultés importantes, m’ont convaincue de le retirer.
Pourquoi sommes-nous si nombreux à nous exprimer sur ce sujet, comme Vincent Delahaye l’a fait tout à l’heure ? Parce que la candidature d’un certain nombre de maires aux élections départementales ou régionales, qui, en fin d’année dernière, ont fait voter en toute bonne foi des aides aux commerces de centre-ville, aux associations ou à d’autres acteurs touchés par la crise du covid pourrait faire l’objet de recours. Malheureusement, certains pourraient dire, de mauvaise foi cette fois, que ces maires candidats ont utilisé leur notoriété et leur fonction en vue de ces élections.
Je dis cela, parce que nous avons connu l’inverse au moment des élections municipales de l’année dernière : des recours ont été déposés contre des candidats, parce qu’ils étaient conseillers départementaux ou régionaux et qu’ils avaient en toute bonne foi distribué des masques durant le printemps, ce qui n’avait évidemment rien à voir avec la campagne des municipales. Pourtant, heureusement que les élus locaux étaient là pour pallier l’absence de l’État !
Monsieur le rapporteur, vos prochaines discussions en commission mixte paritaire pourront-elles intégrer ce problème ? Est-il possible de prévoir un dispositif juridique robuste pour exclure des dépenses de campagne ce qui a trait à la crise sanitaire ? Nous devons faire en sorte de limiter au maximum le risque de recours sur ce sujet. Nous devons éviter les faux procès qui seraient faits aux candidats aux élections départementales et régionales.
Mme le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Je comprends l’objectif de cet amendement, mais son adoption pourrait effectivement gêner celles et ceux qui ont déjà engagé des dépenses. Il n’y a aucun secret, chacun sait que certains candidats ont déjà embauché depuis un certain temps des salariés et engagé des dépenses, que ce soit pour les élections départementales ou régionales – c’est le cas dans ma région.
Cet amendement viendrait fragiliser ces candidats, sans pour autant lever les inquiétudes évoquées par Laure Darcos à l’instant, ou par ma collègue Céline Brulin à l’occasion de l’examen d’un précédent texte, ni régler le problème : comment prendre en compte, dans le cadre d’une campagne électorale, de nouvelles politiques décidées durant la période de réserve institutionnelle – disons-le ainsi – pour répondre à des problématiques sanitaires ou économiques et aux besoins de la population par des élus qui se représentent ?
L’amendement ne règle pas une autre problématique qui pourrait aussi être une source de contentieux : la crise a obligé les élus à adapter les modalités de leur communication officielle – typiquement, aucun élu n’a présenté ses vœux pour 2021 de la même manière que les années précédentes… Ces évolutions peuvent prêter à interprétation et être source de contentieux.
Les auteurs de cet amendement soulèvent donc un véritable problème, mais leur proposition ne le règle pas. C’est pourquoi nous avons certainement besoin de ce temps supplémentaire évoqué par le rapporteur.
J’ajoute qu’il restera un point non résolu : le fait que certains collaborateurs ont dû démissionner de leur poste, ce qui est nécessaire pour pouvoir se présenter aux élections quand vous exercez certaines fonctions, bien avant le délai habituel en de telles circonstances et pour une durée plus longue que ce qu’ils avaient prévu à l’origine. Nous ne réglerons donc pas tout !
Mme le président. La parole est à M. Alain Richard, pour explication de vote.
M. Alain Richard. Nous devons tout de même veiller à conserver les conditions d’une compétition électorale loyale.
Le candidat ou le futur candidat qui a choisi, par exemple en octobre dernier, d’utiliser les moyens de sa collectivité pour promouvoir son action connaissait la loi en vigueur à cet instant et il savait que les élections départementales et régionales devaient avoir lieu en mars et qu’il prenait ainsi un risque.
Il ne découvre pas cette règle, qui permet d’assurer une égalité des armes entre les candidats déjà détenteurs d’un mandat et les autres. D’ailleurs, cette règle est claire et elle est appliquée avec rigueur, mais aussi compréhension, par la commission nationale des comptes de campagne.
Il existe finalement deux arguments pour s’opposer à cet amendement.
D’une part, les candidats qui, prévoyants, ont commencé à réaliser des dépenses en vue des élections doivent pouvoir les inscrire sur leur compte de campagne et être remboursés.
D’autre part, les candidats qui ont manqué à la réserve, dont ils doivent faire preuve pendant la période de préparation des élections, doivent bien être soumis à l’appréciation de la commission nationale des comptes de campagne et, le cas échéant, du tribunal dans les conditions prévues par la loi.
Mme le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.
M. Guy Benarroche. Nous ne voterons pas cet amendement pour deux raisons.
Tout d’abord, chacun d’entre nous connaît des candidats qui ont déjà engagé des frais de campagne et parfois recruté des salariés – certains d’entre eux ont même dû démissionner de leur précédent poste pour cela. Cet argument me semble rédhibitoire.
Ensuite, nous ne devons pas être naïfs ! Il ne s’agit pas de remettre en cause le fait que de nouvelles politiques doivent être lancées en lien avec la crise sanitaire – M. Alain Richard l’a très bien rappelé. Il s’agit juste de dire qu’à l’automne dernier chacun savait déjà très bien, puisque les élections étaient prévues pour le mois de mars, qu’il ne fallait pas engager des frais qui pouvaient être reliés à une campagne électorale.
Cette règle existe et il faut l’appliquer. Il est vrai que cela peut être difficile, parce que la limite est parfois ténue et que la façon de qualifier certaines dépenses peut varier en fonction de la jurisprudence. Pour autant, la règle est absolue.
Je le redis, ne soyons pas naïfs ! Certains élus essayent de tirer profit des nouvelles actions décidées par leur collectivité pour répondre à la crise du covid dans le cadre de la campagne des prochaines élections départementales et régionales. Nous devons évidemment être vigilants sur ce point.
Mme le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.
M. Vincent Delahaye. Nous avons bien conscience que l’amendement de notre collègue Pierre Louault ne répond pas pleinement à nos inquiétudes. Nous ne souhaitons évidemment pas empêcher le remboursement de dépenses engagées avant le 1er janvier 2021, mais nous nous préoccupons de la manière dont les actions nouvelles, lancées par les collectivités pour répondre à la crise sanitaire, seront considérées au titre des comptes de campagne.
M. le rapporteur a insisté sur les dépenses liées à la communication. Ce sont effectivement des dépenses qui sont regardées avec une grande attention au moment d’une élection, en particulier celles qui sont réalisées dans la période qu’on pourrait qualifier de suspecte.
Mais il ne s’agit pas seulement de ce type de dépenses. Il peut aussi être question de dépenses liées à des actions nouvelles, parfois pour des montants non négligeables, par exemple pour soutenir certaines activités. Je le répète, ces actions n’existaient pas auparavant, par définition !
J’ai bien entendu, monsieur le rapporteur, que vous preniez acte de ces inquiétudes et que vous alliez approfondir la question.
Vous avez dit fort justement qu’on pouvait parfois être inquiet des propos du Gouvernement et même de son silence. En l’espèce, c’est bien le silence de Mme la ministre qui m’inquiète ! Malgré les différentes interventions que mes collègues ou moi-même avons pu faire, je ne l’ai pas entendue dire qu’elle allait prendre en compte les inquiétudes que nous relayons.
Or il faut vraiment faire attention, parce que beaucoup de collectivités ont fourni des efforts exceptionnels pour faire face à la crise et il ne faudrait pas que les exécutifs de ces collectivités soient mis en cause pour cela, s’ils sont candidats aux prochaines élections départementales ou régionales.