Sommaire
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, M. Jean-Claude Tissot.
2. Questions d’actualité au Gouvernement
proposition de la défenseure des droits de création de « zones sans contrôle » (i)
M. Dany Wattebled ; M. Jean Castex, Premier ministre.
réforme des études de médecine
Mme Catherine Deroche ; Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation ; Mme Catherine Deroche.
agressions de policiers et proposition choquante de la défenseure des droits
M. Michel Laugier ; M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur.
situation sociale des étudiants
M. Pierre Ouzoulias ; Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation ; M. Pierre Ouzoulias.
M. Frédéric Marchand ; Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable.
cyberattaque contre l’hôpital de dax
M. Éric Kerrouche ; M. Cédric O, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques.
M. Christian Bilhac ; Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable ; M. Christian Bilhac.
M. Guy Benarroche ; Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique ; M. Guy Benarroche.
conditions de visite dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes
M. Jean-Marc Boyer ; Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie ; M. Jean-Marc Boyer.
plafonnement des frais bancaires
M. Rémi Féraud ; Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable ; M. Rémi Féraud.
proposition de la défenseure des droits de création de « zones sans contrôle » (ii)
M. Stéphane Le Rudulier ; M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur.
projets d’infrastructures en france et exemple du contournement est de rouen
M. Pascal Martin ; Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique.
M. Bernard Fournier ; M. Clément Beaune, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé des affaires européennes.
effectifs de l’éducation nationale
Mme Claudine Lepage ; M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Alain Chatillon ; M. Jean Castex, Premier ministre ; M. Alain Chatillon.
siège du parlement européen à Strasbourg
Mme Elsa Schalck ; M. Clément Beaune, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé des affaires européennes.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE Mme Laurence Rossignol
3. Communication d’un avis sur un projet de nomination
4. Communication relative à une commission mixte paritaire
5. Candidatures à deux missions d’information
6. Amélioration du système de santé par la confiance et la simplification. – Discussion en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission
Discussion générale :
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé
M. Alain Milon, rapporteur de la commission des affaires sociales
Demande de renvoi à la commission
Clôture de la discussion générale.
Amendement n° 159 de M. Dominique Théophile. – Rejet.
L’article demeure supprimé.
Articles additionnels après l’article 1er
Amendement n° 178 rectifié de Mme Véronique Guillotin. – Retrait.
Amendement n° 71 rectifié de M. Bernard Jomier. – Rejet.
Amendement n° 15 rectifié bis de M. Michel Savin. – Rejet.
Amendement n° 14 rectifié de M. Michel Savin. – Rejet.
Amendement n° 3 rectifié bis de M. Bernard Bonne. – Retrait.
Amendement n° 45 rectifié de M. Jean-Michel Arnaud. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article 1er ter A (nouveau) – Adoption.
Amendement n° 73 de M. Bernard Jomier. – Rejet.
Adoption de l’article.
Articles additionnels avant l’article 2
Amendement n° 32 rectifié de M. Daniel Chasseing. – Retrait.
Amendement n° 36 rectifié bis de M. Daniel Chasseing. – Retrait.
Article additionnel après l’article 2
Amendement n° 27 rectifié bis de M. Daniel Chasseing. – Retrait.
Amendement n° 190 de Mme Laurence Cohen. – Retrait.
Amendement n° 48 rectifié ter de M. Jean-François Longeot. – Retrait.
Adoption de l’article.
Amendement n° 4 rectifié bis de M. Bernard Bonne. – Retrait.
Amendement n° 131 de Mme Laurence Cohen. – Devenu sans objet.
Amendement n° 28 rectifié ter de M. Daniel Chasseing. – Devenu sans objet.
Amendement n° 53 rectifié de M. Olivier Henno. – Devenu sans objet.
Amendement n° 92 de Mme Laurence Rossignol. – Devenu sans objet.
Amendements identiques nos 33 rectifié bis de M. Daniel Chasseing et 183 rectifié de Mme Véronique Guillotin. – Devenus sans objet.
Article additionnel après l’article 2 quater
Amendement n° 44 rectifié de M. Jean-Michel Arnaud. – Retrait.
Amendement n° 31 rectifié ter de M. Daniel Chasseing. – Retrait.
Amendement n° 206 de la commission. – Retrait.
Rejet de l’article.
Article 2 quinquies B (supprimé)
Amendement n° 199 rectifié bis de Mme Élisabeth Doineau. – Rejet.
Amendement n° 100 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 132 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
L’article demeure supprimé.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Roger Karoutchi
8. Amélioration du système de santé par la confiance et la simplification. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l’article 2 quinquies
Amendement n° 75 de M. Bernard Jomier. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 78 de M. Bernard Jomier. – Rejet.
Amendement n° 81 rectifié de Mme Émilienne Poumirol. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article additionnel après l’article 3
Amendement n° 119 rectifié de M. Claude Kern. – Retrait.
Amendement n° 107 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 161 de M. Dominique Théophile. – Rejet.
L’article demeure supprimé.
Amendement n° 80 de M. Bernard Jomier. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel après l’article 4 ter
Article additionnel après l’article 4 quater
Amendement n° 124 du Gouvernement. – Rejet.
Amendement n° 154 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 170 de M. Bernard Jomier. – Retrait.
Amendement n° 175 rectifié de Mme Véronique Guillotin. – Rejet.
Amendement n° 114 rectifié de M. Claude Kern. – Rejet.
Amendement n° 191 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 155 rectifié ter de M. Jean-François Longeot. – Adoption.
Amendement n° 171 de M. Bernard Jomier. – Rejet.
Amendement n° 169 de M. Bernard Jomier. – Rejet.
Amendement n° 134 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 109 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 204 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 52 rectifié de M. Olivier Henno. – Retrait.
Amendement n° 205 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 5
Amendement n° 108 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 120 de M. Bernard Jomier. – Adoption.
Amendement n° 97 de M. Bernard Jomier. – Adoption.
Amendement n° 141 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 117 rectifié de M. Claude Kern. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 69 rectifié de M. Jean-Marie Vanlerenberghe. – Retrait.
Amendement n° 125 du Gouvernement. – Rejet.
Amendement n° 88 de Mme Annie Le Houerou. – Rejet.
Amendement n° 85 de M. Bernard Jomier. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 118 rectifié bis de M. Claude Kern. – Retrait.
Adoption de l’article.
Article 7 (suppression maintenue)
Amendement n° 146 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 39 rectifié bis de M. Daniel Chasseing. – Rejet.
L’article demeure supprimé.
Articles additionnels après l’article 7
Amendement n° 43 rectifié de M. Claude Kern. – Rejet.
Amendement n° 110 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 136 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 5 rectifié bis de M. Bernard Bonne. – Adoption.
Amendement n° 126 du Gouvernement. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Renvoi de la suite de la discussion.
Nomination de membres de deux missions d’information
compte rendu intégral
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Jacqueline Eustache-Brinio,
M. Jean-Claude Tissot.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Questions d’actualité au Gouvernement
M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
Je rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.
Au nom du bureau du Sénat, j’appelle chacun de vous, mes chers collègues, à respecter à la fois le temps de parole et l’orateur.
Naturellement, vous n’oublierez pas les réflexes de protection sanitaire : les entrées et sorties de la salle des séances devront s’effectuer par les portes situées au pourtour de l’hémicycle, à l’exception de celles des membres du Gouvernement, lesquels entreront et sortiront par le devant, en étant attentifs aux gestes prophylactiques.
Enfin, je remercie nos collègues qui ont accepté de s’installer dans les tribunes pour que nous puissions respecter la jauge de présence dans l’hémicycle.
proposition de la défenseure des droits de création de « zones sans contrôle » (i)
M. le président. La parole est à M. Dany Wattebled, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Dany Wattebled. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, alors que la République se bat pour maintenir son autorité sur l’ensemble du territoire national, alors que nos forces de l’ordre font face à une dangereuse montée en puissance de la délinquance et de la violence, et alors que nos concitoyens subissent quotidiennement les effets de l’insécurité, la Défenseure des droits a une idée pour le moins saugrenue : expérimenter des zones sans contrôle d’identité.
Cette proposition est ahurissante : pourquoi ne pas exploiter des zones sans policiers, des zones sans pompiers, et, finalement, des zones sans droit ?
Ce dont souffrent notre pays et nos concitoyens, c’est non pas d’un trop grand respect de la loi mais de son insuffisante application. Notre pays et nos concitoyens souffrent du désordre, du manque de respect de certains pour la loi et l’autorité.
Mme la Défenseure des droits a le droit de défendre le droit, et bien sûr le droit des gens à vivre en sécurité. Dans leur immense majorité, les Français sont bien conscients de la nécessité de lutter contre cette insécurité qui les menace. Ils savent que les forces de l’ordre interviennent avec beaucoup de difficultés dans certains quartiers, et ils ne demandent pas moins de police, bien au contraire.
La discrimination n’a pas sa place dans notre pays, dans notre République. Mais la proposition de Mme la Défenseure des droits n’est qu’un renoncement, une République à deux vitesses où les lois s’appliqueraient selon les quartiers. Elle contient une insinuation insupportable : elle laisse entendre qu’un contrôle d’identité se ferait forcément au faciès et qu’il faudrait arrêter ces contrôles.
Policiers et gendarmes remplissent leur mission avec exemplarité, et ceux qui manquent à leurs devoirs sont sévèrement punis. Nous voulons assurer ici aux forces de l’ordre tout notre soutien.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous confirmer que cette expérimentation n’aura pas lieu, car il est vital d’assurer l’autorité de l’État dans tous les territoires de la République. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean Castex, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Wattebled, comme vous le savez toutes et tous, la Défenseure des droits, autorité pour laquelle nous avons beaucoup de respect, est une autorité administrative indépendante (AAI) qui formule un certain nombre de préconisations.
Il se trouve que le Gouvernement de la République est également indépendant de la Défenseure des droits ! (Exclamations amusées sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. Jérôme Bascher. Très bien !
M. Jean Castex, Premier ministre. Avec tout le respect dû, je le répète, à cette institution, je dis solennellement devant le Sénat et devant le pays qu’il n’y a pas et qu’il n’y aura pas de zones sans contrôle d’identité, en application des lois de la République. (Vifs applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, RDSE, UC et Les Républicains.)
réforme des études de médecine
M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Deroche. Ma question s’adresse à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Nous le savions bien, la fin du numerus clausus n’était pas la fin de la sélection. En effet, les murs des facultés ne sont pas extensibles, pas plus que les terrains de stage ou le nombre des enseignants chargés de former les étudiants. Néanmoins, la loi de 2019 promettait de mettre fin au gâchis des abandons après redoublement ; elle promettait de diversifier le parcours des recrutements ; elle promettait aussi un traitement équitable entre les étudiants passant par le parcours accès santé spécifique (PASS), la licence option accès santé (LAS) ou les redoublants de la première année commune aux études de santé (Paces).
Le nombre de postes devait être défini par les universités, en lien avec les agences régionales de santé (ARS), et ce pour tenir compte de chaque territoire mais également des capacités des universités.
Or, en cette année si particulière, les espoirs soulevés par le passage du numerus clausus au numerus apertus laissent place à du désarroi, à de l’angoisse et à une véritable inquiétude parmi les étudiants en médecine. Il semble en effet qu’un flou persiste sur le nombre de places réellement ouvertes et que, dans certaines facultés, le nombre de places déjà réservées aux redoublants de la Paces laisse la portion congrue à la première promotion de la réforme, qui, elle, ne pourra pas redoubler.
Madame le ministre, ma question est simple : qu’en est-il exactement ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Madame la sénatrice, vous l’avez rappelé, la loi Ma santé 2022 nous a permis de supprimer cette année, pour la première fois – il est vrai, dans des conditions universitaires très particulières –, la Paces et le numerus clausus.
L’objectif, vous l’avez dit également, est de faire en sorte que nous puissions diversifier les voies d’accès et, surtout, que nous puissions commencer à lutter efficacement contre la désertification médicale. En effet, permettre aux étudiants de commencer leurs études, de faire des stages et d’avoir des tuteurs, tout cela sur leur lieu de résidence, évitera de les en éloigner pendant quinze ans, tant il est parfois difficile de les faire revenir sur ce lieu de résidence.
Ce sont 457 licences avec une option accès santé qui ont été ouvertes partout sur le territoire. Là encore, la plus grande place a été donnée aux discussions entre les universités, les ARS et les acteurs locaux pour définir le nombre de places offertes en deuxième année d’études de santé ; ce nombre a évidemment été augmenté par rapport à l’année dernière, puisque c’est une obligation.
Comment les choses se mettent-elles en place ?
Pour les redoublants de la Paces ancienne version, il nous est apparu important de maintenir un nombre de places équivalent, en moyenne, à la réussite des trois dernières années des redoublants dans cette première année.
Pour les étudiants entamant la première année de ce parcours dans sa nouvelle formule consécutive à la réforme, le nombre de places correspond au minimum à la réussite moyenne des trois dernières années. C’est ici que nous constaterons une augmentation du nombre de places.
Vous le savez néanmoins, madame la sénatrice, au terme de la Paces, les reçus étaient majoritairement des redoublants et non des primo-entrants.
Bien sûr, tous ceux qui auront réussi leur première année dans cette nouvelle formule passeront en deuxième année et bénéficieront ainsi d’une deuxième chance pour accéder aux études de santé.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour la réplique.
Mme Catherine Deroche. Madame la ministre, je vous remercie. J’entends tous ces chiffres, qui correspondent en effet aux objectifs de la loi et aux engagements pris à travers elle. Bien évidemment, je vous fais confiance ; il n’en demeure pas moins que subsiste un problème de compréhension : nous sommes sollicités à la fois par des étudiants et par leurs familles, cependant que des doyens se sont exprimés sur le sujet.
La médecine est vraiment un métier de vocation. Les étudiants, dans cette période difficile, montrent d’ailleurs à quel point ils sont impliqués dans la gestion de cette crise. Il faut leur laisser de l’espoir. C’est pourquoi il importe de veiller à ce que cette réforme du numerus clausus ne leur soit pas moins bénéfique que ce qui était initialement prévu. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
agressions de policiers et proposition choquante de la défenseure des droits
M. le président. La parole est à M. Michel Laugier, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Michel Laugier. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
La ville de Trappes est à la une des médias. Pour avoir été maire de la ville voisine et président de la communauté d’agglomération dont Trappes fait partie, je suis meurtri par la stigmatisation médiatique dont cette ville fait l’objet.
Grâce au plan Borloo et à l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), des centaines de millions d’euros ont été investis, des immeubles démolis puis reconstruits, tandis que des équipements publics sont flambant neufs. Le changement visuel est évident, mais hélas, les problématiques sont toujours là et s’intensifient dans certains quartiers… Une véritable pandémie, avec un variant islamiste particulièrement nocif.
Toutefois, il ne faut pas résumer Trappes à cela, car un véritable travail est fait sur le terrain entre les représentants de l’État et les élus locaux.
Nous ne voudrions pas voir ces efforts anéantis par les déclarations tonitruantes d’un professeur, d’un maire qui tente de défendre sa ville, certes, mais qui se permet de distribuer des documents dans l’enceinte d’un lycée, de personnes menacées de mort qui sont aujourd’hui sous protection policière et de partis populistes qui surfent sur la vague en cette période préélectorale.
Cette polémique éclate alors que l’on ne compte plus les flambées de violence un peu partout sur le territoire : à Besançon, avec une agression raciste ultraviolente ; à Montbéliard, avec des actes de sauvagerie et de guérilla urbaine sur lesquels ma collègue Annick Jacquemet souhaitait aussi vous interpeller ; à Paris, avec le lynchage abominable du jeune Yuriy ; à Poissy, avec un guet-apens couplé à un appel au meurtre, pour ne citer que les plus récents.
Face à ces situations, la police semble dépassée. Et c’est dans ce contexte que la nouvelle Défenseure des droits propose d’expérimenter des « zones sans contrôle d’identité ». Ces déclarations ont semé le doute sur l’engagement du Gouvernement à lutter contre la criminalité et l’insécurité.
Pouvez-vous nous confirmer, monsieur le Premier ministre, que le Gouvernement va réagir avec les moyens nécessaires au climat d’incivilité qui sévit dans certains quartiers, partout en France ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser ce léger retard qui m’a empêché de répondre à la question de M. Wattebled ; je remercie M. le Premier ministre de l’avoir fait à ma place.
À travers votre question, monsieur le sénateur, vous soulevez trois sujets.
S’agissant de Trappes, il n’est pas question pour le Gouvernement de désigner un territoire plutôt qu’un autre. Étant moi-même l’élu d’un territoire difficile, je sais combien les élus, les acteurs associatifs et les enseignants, combien tous ceux qui concourent à donner toute sa beauté à une ville, même lorsqu’elle est confrontée à des problèmes, voient parfois leurs efforts ruinés par un événement médiatique.
Par ailleurs, un professeur, qui a le droit en République de dire ce qu’il veut et de dénoncer les menaces, les intimidations et l’état d’une société qu’il constate, et un maire doivent tous deux être protégés par la République, par les services de police, dès lors qu’ils sont menacés – dans les deux cas cités, ils le sont. Il ne nous appartient pas de trancher un différend politique.
Enfin, à Trappes comme ailleurs, il existe des endroits où l’islamisation gagne, où le travail des islamistes est fort. En face, l’offre républicaine doit être encore plus vigoureuse. C’est le sens de l’action de Jean-Michel Blanquer au travers de l’éducation nationale et d’Emmanuelle Wargon avec l’ANRU. Nous aurons l’occasion de le voir ensemble dans quelques jours, je l’espère, sur la question du séparatisme.
Vous avez dit également que des policiers semblaient parfois dépassés. Oui, on constate des actes de violence dans notre pays, mais c’est toujours la police qui gagne.
Dans l’affaire Yuriy, les personnes responsables de ces actes ont été arrêtées et sont sous la main de l’autorité judiciaire. Il en est de même dans l’affaire de Besançon, ainsi que dans celle de Valence. Pour ce qui est de Poissy, les policiers, dès le lendemain de l’agression, sont retournés sur le terrain et ont pu interpeller deux personnes.
Oui, les territoires de la République sont parfois attaqués et, bien évidemment, nous devons renforcer les moyens matériels et humains de la police. Nous devons surtout redire que l’autorité est au cœur du pacte républicain et qu’elle doit chaque fois l’emporter, à Trappes comme ailleurs. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
situation sociale des étudiants
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
M. Pierre Ouzoulias. J’ai pris la liberté de m’adresser à vous, monsieur le Premier ministre, parce que vous répondez souvent, ici, aux questions qui concernent l’université.
Les étudiants ont faim. Dans cet hémicycle, nous sommes nombreux à participer à des collectes alimentaires pour leur apporter, dans l’extrême urgence, des moyens de subsistance dont beaucoup sont cruellement privés.
Avant la pandémie, près de la moitié des étudiants travaillaient pour pouvoir étudier. Aujourd’hui, la très grande majorité d’entre eux est privée de ces emplois.
Votre gouvernement vient d’annoncer la prolongation de la prime versée aux salariés intermittents, qui n’ont pu travailler correctement en 2020 : ce sont 160 000 jeunes de moins de 30 ans qui vont bénéficier de cette mesure.
Le Président de la République a déclaré qu’un étudiant devait avoir les mêmes droits qu’un salarié. Pourquoi les étudiants ont-ils été exclus de ce dispositif ?
Votre gouvernement vient d’annoncer le versement d’une prime de 1 000 euros pour aider les jeunes à payer leur loyer. Les jeunes apprentis en alternance pourront bénéficier de cette prime. Pourquoi les étudiants ont-ils été exclus de ce dispositif ?
Monsieur le Premier ministre, pourquoi la politique du « quoi qu’il en coûte » s’est-elle arrêtée systématiquement à la porte des campus ? (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Monsieur le sénateur Ouzoulias, vous pointez les difficultés que rencontrent certains étudiants.
Comme je l’ai fait la semaine dernière, je voudrais vous rappeler l’ensemble des dispositifs qui ont été mis en œuvre pour les étudiants au plus près du terrain, avec eux, pour savoir ce dont ils ont le plus grand besoin, notamment sur le plan alimentaire, entre autres problèmes qui seront abordés dans les prochains jours.
Je ne peux pas vous rejoindre, monsieur le sénateur, quand vous dites que les étudiants sont exclus du dispositif « 1 jeune, 1 solution » mis en place par le Gouvernement. Pas du tout ! (Exclamations sur les travées du groupe CRCE.) Les étudiants font bien partie de cette catégorie plus large de jeunes.
De même, nous continuons à accompagner les étudiants en apprentissage, les jeunes en contrat de professionnalisation, tout comme les jeunes salariés ou les jeunes diplômés. D’ailleurs, s’agissant de ces derniers, c’est la raison pour laquelle leur taux d’embauche en CDI ou en CDD de plus de trois mois a été quasiment équivalent en 2020 à ce qu’il était en 2018 et en 2019.
Monsieur le sénateur, on ne peut pas dire que les étudiants sont exclus de la politique du Gouvernement. (Vives protestations sur les travées des groupes CRCE, SER et Les Républicains.)
Mme Éliane Assassi. Bien sûr que si !
Mme Frédérique Vidal, ministre. Mais non ! Vraiment pas ! Vous voyez peut-être les files d’attente ; il se trouve que, moi, j’y vais… (Exclamations.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous aussi !
M. Jérôme Bascher. Nous aussi !
Mme Frédérique Vidal, ministre. Dans ces files d’attente qui font, selon vous, tellement polémique, on voit notamment des jeunes, des étudiants internationaux… C’est pour cette raison que nous avons doublé les aides à destination de l’ensemble des étudiants, que plus de 1,5 million de repas à 1 euro sont servis dans les restaurants universitaires et que nous continuerons à soutenir l’ensemble des jeunes, y compris les étudiants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour la réplique.
M. Pierre Ouzoulias. Vous n’avez répondu à aucune de mes trois questions ! (Vifs applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER, GEST et Les Républicains.) Peut-être pourriez-vous demander au CNRS de lancer une enquête sur ce sujet ? (Rires et applaudissements sur les mêmes travées.)
Madame la ministre, 40 % des étudiants qui pouvaient retourner à l’université ne l’ont pas fait, et vous considérez que c’est parce qu’ils préfèrent l’enseignement à distance. Je crains qu’ils n’y reviennent jamais !
Pour éviter ce désastre, c’est maintenant que le Gouvernement doit agir ! (Applaudissements prolongés sur les mêmes travées.)
économie sociale et solidaire
M. le président. La parole est à M. Frédéric Marchand, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
M. Frédéric Marchand. L’économie sociale et solidaire (ESS), c’est aujourd’hui 10 % de notre PIB et 2,4 millions de salariés. Pour la seule région des Hauts-de-France, dont je suis issu, cela représente 180 000 emplois salariés et plus de 11 800 établissements employeurs.
Toutes ces entreprises ont un grand potentiel d’innovation, car elles sont ancrées dans le territoire et sont de parfaites réponses aux besoins ou aux opportunités.
Qu’il s’agisse de l’urgence sanitaire, alimentaire, éducative ou tout simplement citoyenne, des solutions innovantes ont, depuis plusieurs mois, été trouvées par toutes les coopératives et entreprises sociales dans notre pays, en coopération avec les autorités locales.
Oui, la crise actuelle souligne autant le rôle nécessaire des acteurs de la solidarité aujourd’hui, que le besoin de transformer le modèle économique en s’inspirant des pratiques et des valeurs de l’ESS demain.
Dans l’après-covid, il sera nécessaire de promouvoir la coopération en offrant les services de base d’une manière différente, en rétablissant et en créant des emplois décents grâce à des modèles d’organisation de la production divers et complémentaires.
Aujourd’hui, le monde de l’ESS est fortement secoué par la crise du covid-19. Nombre de ces structures, durement impactées par celle-ci, auront bien du mal à se relever.
Il y a urgence à sauver ce secteur, notamment toutes ces petites structures que nous connaissons bien sur nos territoires, qui font assaut d’imagination et de volontarisme dans leurs actions quotidiennes, mais qui, pour nombre d’entre elles, ont bien du mal à maîtriser les arcanes des dispositifs déployés par le Gouvernement.
L’urgence est là, madame la secrétaire d’État, et je sais que vous y êtes particulièrement sensible.
À l’aune de cette crise sans précédent, ma question sera donc simple : quelles mesures ont été mises en place pour sauver le soldat ESS ? (Applaudissements sur les travées du RDPI)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable.
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable. Monsieur le sénateur Marchand, oui, il y a urgence pour les entreprises et les structures de l’économie sociale et solidaire, et le Gouvernement est tout entier à leurs côtés.
Comme tous les acteurs, elles ont été frappées de plein fouet par la crise, mais comme de nombreux acteurs de la solidarité que vous avez mentionnés, elles sont aussi particulièrement sollicitées face à cette crise sanitaire.
Elles ont des fragilités inhérentes à leur modèle, en matière de trésorerie et de fonds propres. C’est à l’ensemble de ces fragilités que nous nous attelons dans l’urgence, et ce depuis plusieurs mois.
Vous l’avez dit aussi, pour le Gouvernement comme pour les élus, le fléau, c’est le non-recours aux aides qui sont à disposition de ces structures de l’ESS. C’est pourquoi, en plus de leur indiquer ce à quoi elles ont droit, je m’attelle à leur expliquer comment percevoir ces aides.
Vous me permettrez, mesdames, messieurs les sénateurs, de citer le guichet unique urgence-ess.fr, qui permet à nos associations, à nos structures de l’ESS de bénéficier d’une subvention directe pouvant atteindre 5 000 euros pour les structures comptant de un à trois salariés et 8 000 euros pour les structures de quatre à dix salariés.
Au-delà, je rappelle que le Gouvernement a augmenté de près de 30 % le dispositif local d’accompagnement de ces structures pour leur permettre de mieux répondre aux appels à projets du plan de relance destinés directement aux structures de l’ESS, et ce à hauteur de 1,3 milliard d’euros.
Le fonds UrgencESS de 30 millions d’euros a été lancé, avec l’accord du Premier ministre et le soutien de Bruno Le Maire, le 22 janvier dernier. Le 9 février, soit quinze jours plus tard, on comptait 5 291 demandes en cours d’instruction. Ce dispositif ne sera peut-être pas suffisant, mais partout où il y a un besoin, nous essayons d’apporter une solution.
Je me rendrai vendredi dans le Nord pour écouter les représentants des structures de l’ESS qui en ont besoin et les accompagner davantage encore. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
cyberattaque contre l’hôpital de dax
M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Éric Kerrouche. Monsieur le secrétaire d’État, comme vous le savez, en plein milieu de la pandémie, le centre hospitalier de Dax-Côte d’Argent a été victime, la semaine dernière, d’une cyberattaque massive de son système informatique, alors même que celui-ci était conforme aux exigences réglementaires du programme HOP’EN. De telles attaques sont désormais trop banales.
À Dax, les médecins n’avaient plus accès à l’historique des dossiers des patients. Les calculs de dose pour la chimiothérapie n’étaient plus possibles. Il a fallu faire ces calculs à la main, ce qui a limité la capacité de traitement quotidienne.
Même si le fonctionnement a été sous-optimal, j’ai été impressionné lors de ma visite par l’engagement sans faille de l’ensemble des agents, un engagement qu’il faut saluer. Toutes les équipes se sont mobilisées, conscientes de l’urgence d’assurer le maintien du service public. C’est ce qui a permis de réduire les pertes de chances pour les patients.
La professionnalisation de ces attaques comme des attaquants est un fait incontestable. L’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi) signale une augmentation de 255 % de ce type d’attaque en 2020. Le secteur de la santé est particulièrement touché. Le CHU de Bordeaux subit ainsi une vingtaine de cyberattaques chaque jour.
Cette cybercriminalité est à la hauteur de ce qu’elle peut rapporter : les demandes de rançon varient entre 200 000 et 10 millions de dollars. En parallèle, les coûts en matériels et en personnels dédiés sont de plus en plus importants, pour les structures privées comme publiques.
Cette situation rapidement décrite m’amène, monsieur le ministre, à vous poser plusieurs questions.
Localement d’abord, si l’ARS et l’Anssi ont tout de suite été au chevet de l’hôpital de Dax, celui-ci mettra du temps à récupérer. Pouvez-vous me garantir son accompagnement vers un retour à la normale, y compris s’agissant des répercussions financières engendrées par l’attaque ?
Comptez-vous accroître les moyens de l’Anssi, et selon quelles modalités ?
Enfin, en raison du caractère extraterritorial de ces attaques, la France va-t-elle favoriser la coopération européenne, par exemple en donnant plus de moyens à l’Enisa – European Union Agency for Cybersecurity –, pendant européen de l’Anssi ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de la transition numérique et des communications électroniques.
M. Cédric O, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques. Monsieur le sénateur Kerrouche, vous l’avez dit, la France est sous la menace d’attaques informatiques, comme d’autres pays. Je pense par exemple à l’attaque qui a touché 400 hôpitaux américains à la fin novembre 2020.
En France, c’est l’ensemble de notre économie, l’ensemble de notre société, qui est sous la menace. On a compté vingt-sept attaques majeures concernant des hôpitaux en 2020 ; il y en a une par semaine en 2021.
Je salue, comme vous, le travail des équipes hospitalières et des agents de l’Anssi ; ces derniers se sont rendus à l’hôpital de Dax dès le 9 février dernier, et voilà deux jours à Villefranche-sur-Saône – je vais y aller moi-même dans quelques jours –, pour aider les hôpitaux à faire face à cette menace.
La France et ses partenaires sont mobilisés. Les effectifs de l’Anssi ont augmenté de 200 personnels depuis 2017. Nous avons accompagné les 110 plus gros hôpitaux français au cours d’audits de sécurité, tandis que 11 d’entre eux sont suivis au jour le jour. Nous travaillons à une plus grande sensibilisation des hôpitaux, mais aussi des collectivités territoriales – la ville de Houilles a ainsi subi une attaque dernièrement – et de l’ensemble de nos concitoyens.
Le Président de la République devrait, dans les heures qui viennent, prendre la parole sur ce sujet pour nous amener à franchir encore un cap dans cette préparation et vers une plus grande vigilance de l’ensemble de l’économie et de la société.
S’agissant enfin de la réponse judiciaire, je souligne un succès récent : les organisations cybercriminelles Emotet et Egregor – cette dernière est à l’origine de l’attaque contre Ouest-France à la fin du mois de novembre 2020 – ont été arrêtées la semaine dernière grâce à une coopération entre les services français, la justice française, la justice américaine et nos partenaires européens.
L’État apporte donc une réponse extrêmement forte, mais nous devons continuer à mieux nous mobiliser et à mieux prévenir ce genre de danger. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
soutien aux associations
M. le président. La parole est à M. Christian Bilhac, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. Christian Bilhac. Madame la secrétaire d’État, voilà bientôt un an que nous vivons avec le virus et les mesures prises par le Gouvernement pour lutter contre la pandémie. Cette situation a modifié en profondeur les habitudes de nos concitoyens et n’a pas épargné le secteur du loisir, qu’il soit sportif ou culturel.
De multiples activités étaient auparavant proposées partout en France, parfois par des entreprises privées, mais le plus souvent par les communes ou par des associations. Chacun ici connaît et reconnaît le formidable travail de ces bénévoles associatifs, trop peu nombreux, portant souvent à bout de bras leur structure, sacrifiant leurs loisirs et leur vie de famille.
Avec la fermeture au public des lieux de pratique, les adhérents se sont tournés vers d’autres activités plus individuelles, y compris vers des supports informatiques ou numériques.
Certains ont demandé le remboursement des cotisations, mettant les associations en difficulté financière. De nombreux dirigeants associatifs, à bout de souffle, pensent abandonner. Des animateurs, désemparés et inquiets, s’interrogent sur leur avenir.
Demain, la fanfare ou la peña reprendront-elles après des mois d’inactivité ? L’école de musique ou le club de théâtre vont-ils redémarrer ? L’association sportive retrouvera-t-elle ses adhérents ? Les moyens financiers seront-ils suffisants pour poursuivre ? Autant de questions qui inquiètent dans nos villages comme dans nos quartiers urbains.
Toutes ces activités sont le ciment de notre société. Elles créent du lien social et du vivre ensemble. Au moment où le Parlement débat du séparatisme, nous sommes plus que jamais conscients de leur nécessité.
Madame la secrétaire d’État, je souhaite savoir si vous partagez ces inquiétudes et connaître les mesures que vous envisagez pour permettre à ces structures, toutes différentes, mais toutes nécessaires, de ne pas disparaître. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable.
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable. Monsieur le sénateur Bilhac, vous me demandez si le Gouvernement partage l’intégralité des préoccupations que vous inspire la situation de nos associations : la réponse est oui, trois fois oui !
Pendant que je vous écoutais, cette phrase de Victor Hugo me revenait en mémoire : « Le moi des grandes âmes tend toujours à se faire collectif. » Dieu sait si nos associations, qu’elles soient composées de bénévoles ou qu’elles soient employeuses, sont au service de notre collectif. De son côté, le Gouvernement dans son ensemble, et collectivement, accompagne les associations. Comment ?
D’abord et avant tout, il leur dédie des mesures génériques. Il s’agit du fonds d’urgence de 30 millions d’euros, que je viens de mentionner, mais aussi d’un appui de 85 millions d’euros venant renforcer les fonds propres de nos associations via la Banque des territoires. Cette action est menée par ma collègue Sarah El Haïry. S’y ajoute une autre initiative, que vous connaissez également : le renforcement du fonds pour le développement de la vie associative (FDVA), dont la dernière loi de finances a renforcé les crédits de 5 millions d’euros. Quant au dispositif local d’accompagnement (DLA), outil précieux pour nos associations, il est augmenté de 30 %.
Le Gouvernement tout entier mène aussi un travail de communication pour que les associations connaissent ces dispositifs et, ce faisant, qu’elles y aient recours.
Il déploie également une aide sectorielle en faveur du monde associatif : je pense bien entendu aux 60 millions d’euros consacrés aux associations culturelles organisatrices de festivals ou dédiées au théâtre, que Roselyne Bachelot défend avec cœur et engagement. Je songe aussi à la hausse des crédits du fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire (Fonjep), à hauteur de 15 millions d’euros, pour les associations de soutien à la jeunesse. Je pense également au sport, qui bénéficie d’un fonds territorial de solidarité de 15 millions d’euros, somme qui vient s’ajouter aux 120 millions d’euros que le plan de relance dédie au sport.
Monsieur le sénateur, nous devons combattre le non-recours et, une nouvelle fois, nous n’y parviendrons qu’ensemble. Il est indispensable que nous portions ensemble ces mesures dans les territoires. Pour vous convaincre, s’il le fallait encore, de l’investissement total du Gouvernement au service des associations, je vous informe que ma collègue Sarah El Haïry et moi-même aurons très prochainement l’occasion de recevoir, aux côtés du Premier ministre, les représentants de l’univers associatif. (M. le Premier ministre opine.) Nous allons les écouter ; surtout, nous allons continuer à les accompagner et, s’il le faut, faire encore davantage !
M. le président. La parole est à M. Christian Bilhac, pour la réplique.
M. Christian Bilhac. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse. J’espère que tous ces arguments auront convaincu les bénévoles du secteur associatif. Permettez-moi toutefois d’en douter…
centrale biomasse de gardanne
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Guy Benarroche. Ma question s’adressait au ministre de l’économie et des finances ; elle porte sur la méga-centrale biomasse de Gardanne, dans les Bouches-du-Rhône.
Cette méga-centrale biomasse s’inscrit dans le cadre d’une conversion à la biomasse de la tranche 4 de la centrale à charbon de Provence, située sur les communes de Meyreuil et de Gardanne.
Depuis l’annonce de la fermeture de la tranche 5 charbon d’ici à 2022, l’État tente de mettre en place un pacte de territoire pour l’avenir du site industriel, qui inclurait la méga-centrale et des projets classés Seveso en plein cœur d’une zone urbanisée.
Depuis 2017, après l’accord conclu entre l’État et Uniper, l’industriel repreneur s’est engagé à fournir 7 500 heures d’électricité par an, que l’État rachètera trois fois le prix du marché. Un tel procédé ne pourrait-il pas s’apparenter à une subvention déguisée de 1 milliard d’euros pendant la durée du contrat ?
Ce site rencontre des difficultés techniques pour fonctionner, au-delà des mouvements de grève connus par le passé. L’industriel ne remplit toujours pas ses obligations en matière de fourniture de kilowattheures en 2021 et l’État ne semble pas s’en inquiéter. Non seulement il ne remet pas en question ce contrat, mais il serait prêt à abandonner les indemnités que l’industriel aurait dû payer pour non-respect de ses engagements contractuels !
Le Gouvernement compte-t-il rendre publiques les conditions de ce contrat, qu’il ne semble pas vouloir rompre malgré tous les éléments que je viens d’apporter ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la transition écologique.
Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique. Monsieur le sénateur Benarroche, comme vous le signalez, le Président de la République s’est engagé à fermer les dernières centrales à charbon d’ici à 2022. C’est un pas important sur le plan écologique : nous économiserons ainsi l’équivalent des rejets de CO2 de 4 millions de véhicules.
Bien sûr, la fermeture des centrales implique de donner aux territoires concernés de nouvelles perspectives de développement. Nous le faisons, main dans la main, avec les collectivités, les partenaires sociaux et les associations, à travers les pactes territoriaux.
Vous citez la centrale de Gardanne. Vous n’ignorez pas que cette décision de politique énergétique, que vous soutenez, n’est pas aisée à mettre en œuvre. Disons-le : des emplois sont supprimés sur le site de la centrale, comme auprès des sous-traitants et sur le grand port de Marseille-Fos. C’est une difficulté supplémentaire sur le territoire de Gardanne.
C’est pourquoi nous avons apporté des solutions complémentaires, à travers des crédits supplémentaires de l’État et un accompagnement social renforcé des salariés.
Enfin, nous n’avons pas souhaité ajouter de la difficulté aux difficultés. En effet, la centrale de Gardanne-Meyreuil compte une tranche biomasse, autorisée il y a près de dix ans maintenant, par le gouvernement de l’époque. Le contrat de rachat de l’énergie produite suit un mécanisme classique, correspondant à l’ancienne politique de soutien à l’électricité produite à partir de biomasse.
J’y insiste, ce n’est pas une spécificité de Gardanne : plusieurs dizaines de lauréats ont été désignés entre 2005 et 2019, à l’issue d’appels d’offres. Certes, le contrat de rachat prévoit des pénalités si l’installation n’atteint pas une disponibilité minimale ; mais, dans le cas de Gardanne, il a été jugé que la longueur, l’ampleur et les causes de la grève qui a paralysé le site ces dernières années justifiaient de ne pas les appliquer pour les années 2018 à 2020, ce qui explique la situation que vous mentionnez ! (M. François Patriat applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour la réplique.
M. Guy Benarroche. Madame la ministre, je vous remercie de répondre à cette question posée au ministre de l’économie et des finances…
Je vous ai également adressé une question écrite sur les problèmes posés par les méga-centrales biomasse, notamment l’approvisionnement en bois : elle est toujours sans réponse. Cette préoccupation a d’ailleurs été relayée dans une tribune du Monde d’hier, signée par 500 scientifiques et experts internationaux.
De plus, cette centrale se trouve dans un bassin industriel à l’avenir obscur, avec les boues rouges aux incidences écologiques préoccupantes – toujours acceptées par votre gouvernement –, et au devenir économique incertain après le rachat de l’usine par une entreprise guinéenne.
J’attendais aujourd’hui une position du Gouvernement sur l’aspect concurrentiel ou non de cette méga-centrale biomasse et des précisions sur un contrat qui reste opaque.
Enfin, j’aurais aimé apprendre du Gouvernement la véritable nature des relations liant sa politique énergétique au propriétaire, le groupe EPH du milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, acquéreur de nombreuses centrales à charbon en Europe,…
M. le président. Il faut conclure.
M. Guy Benarroche. … intéressé par l’énergie lorsqu’elle est subventionnée par l’État et par ailleurs repreneur de nombreux médias français ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
conditions de visite dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Boyer, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Marc Boyer. Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, le ressenti, le vécu de nos aînés au sein des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et de leurs familles est aujourd’hui sans appel : leur isolement et leur solitude sont mortifères.
L’environnement familial ou amical est le seul lien qui rattache de nombreux résidents au monde extérieur. C’est leur raison essentielle de vivre. Aussi, coupés du contact de leurs proches, nos anciens vivent un calvaire et éprouvent un cruel sentiment d’enfermement.
Les directeurs d’Ehpad doivent composer avec de nombreuses contraintes. Mais que signifie voir ses proches vingt minutes tous les quinze jours, le nombre de visiteurs étant limité à deux personnes à la fois ?
Vous souhaitez protéger nos aînés, mais à quel prix ? Est-ce les protéger que de les laisser mourir avec ce sentiment d’abandon ? Il est tel que certains disent : « Je préfère mourir du covid que d’isolement. »
Protéger, c’est aussi respecter la dignité humaine des personnes âgées et vulnérables. Cette dignité dans la vie ne peut pas être bafouée au motif de sauver des vies.
Protéger, c’est aussi gérer la fin de vie. Nous devons permettre à la famille d’accompagner son parent jusqu’au bout.
Protéger, c’est lutter contre le virus de la solitude. Le fait de vieillir enfermé entraîne un véritable risque de glissement pouvant conduire jusqu’à la mort, avec le refus brutal de communiquer, de s’alimenter et de recevoir des soins, malgré le dévouement exemplaire des personnels.
Monsieur le ministre, le tout-sanitaire n’a-t-il pas atteint sa limite aujourd’hui ? Quelles perspectives et quelles solutions proposez-vous pour rompre avec cette situation mortifère ? (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie. Monsieur le sénateur Jean-Marc Boyer, je vous remercie de votre question, qui me permet d’aborder un sujet éminemment humain, au-delà des enjeux sanitaires.
Face à un virus qui nous était inconnu – vous en conviendrez – et qui frappait notamment les personnes âgées de manière virulente – à preuve, 80 % des victimes sont des personnes âgées –, nous avons dû prendre des décisions parfois difficiles pendant la première vague. Vous le savez.
Lors de mes déplacements sur le terrain, j’ai entendu les personnels, les résidents et leurs familles. Comme vous, j’ai été confrontée à des vécus dramatiques, marqués parfois par des syndromes de glissement.
Ce virus, nous ne le connaissons pas encore sous toutes ses variantes, mais force est de constater que nous le connaissons mieux. Le personnel des Ehpad le dit : il se sent mieux aguerri pour le prévenir, pour mieux protéger et pour le dépister.
Dès ma nomination, j’ai été saisie de cette question profondément humaine, au-delà du sanitaire, et j’ai immédiatement donné des orientations aux Ehpad. Nous suivons une ligne de crête extrêmement étroite, en vertu d’un principe clé : protéger nos aînés sans les isoler.
Il ne s’agit donc pas de fixer des directives, mais d’énoncer des lignes de conduite très claires pour orienter les décisions des directeurs, qui ne sont jamais simples à prendre, car il faut faire en sorte que ces établissements ne soient jamais démunis face au virus.
À ces orientations s’ajoute le déploiement de tests à destination des professionnels et, très prochainement, de celles et ceux qui rendent visite aux résidents, grâce à l’arrivée des tests salivaires, qui auront l’avantage d’être moins invasifs. Nous espérons que ces pratiques s’en trouveront facilitées.
Je m’entretiens chaque semaine en visioconférence avec les acteurs du secteur, en particulier avec les fédérations d’Ehpad. En concertation avec eux, j’ai mis en place des modes de visite, sur rendez-vous, pour mieux encadrer les allées et venues et, surtout, pour assurer le maintien du lien social, ô combien nécessaire. Nous avons également demandé que les visites en fin de vie soient permises, pour accompagner nos aînés dans leurs derniers instants.
Enfin, la vaccination ouvre des perspectives aujourd’hui. Vous le savez : à la fin du mois de février, 80 % des résidents des Ehpad seront vaccinés dans notre pays et je tiens à saluer cet engouement. Il prouve qu’il fallait prendre du temps, expliquer,…
Mme Dominique Estrosi Sassone. Et la question ?
M. le président. Il faut conclure.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. … recueillir le consentement. C’est chose faite ! (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.)
Nous avons fait le choix de saisir le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) et le Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale…
M. le président. Il faut conclure !
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. … pour définir les modalités de visite les plus adéquates, dans un contexte de haute couverture vaccinale. (Brouhaha sur les mêmes travées.) Merci de votre écoute !
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Boyer, pour la réplique.
M. Jean-Marc Boyer. Mais les Français ne comprennent pas votre stratégie de vaccination : pas d’anticipation dans les commandes des vaccins ;…
M. Jean-Marc Boyer. … désorganisation des centres de vaccination ; listes d’attente interminables. (Mme la ministre déléguée s’agace.)
Le Président de la République a promis que 50 millions d’adultes seraient vaccinés à la fin du mois d’août prochain. Or, aujourd’hui, seulement 2,3 millions d’entre eux ont reçu une dose et 815 000 deux doses.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
M. Jean-Marc Boyer. La réalité, malheureusement, est que la France fait partie des pays les moins avancés dans la vaccination. Plutôt que d’autosatisfaction, faites preuve d’humilité et d’efficacité ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
plafonnement des frais bancaires
M. le président. La parole est à M. Rémi Féraud, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Rémi Féraud. La crise sanitaire et économique a encore accentué les inégalités, la précarité et les difficultés financières des plus modestes. Or, pour beaucoup de nos concitoyens, cette situation sociale est aggravée par les pratiques des établissements bancaires, qui continuent, l’air de rien, de prélever chaque mois leurs commissions diverses, frais de gestion et frais pour incidents de paiement.
Après une légère baisse ces deux dernières années, le montant moyen des frais bancaires est de nouveau à la hausse. Les prélèvements dont il s’agit, qui ne correspondent souvent à aucun service concret, concernent la plupart des Français. Cette facture annuelle s’élève en moyenne à 216 euros ; mais, en réalité, pour ceux qui ont des difficultés financières, elle est souvent bien plus élevée.
La mécanique des frais bancaires est une mécanique appauvrissante dont il est difficile, voire impossible, de s’extraire. Ces frais représenteraient une manne financière de 6,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires pour les banques. Il s’agit là d’une somme estimée, puisque ces données ne sont communiquées par aucune banque – personne ne les connaît, pas même les pouvoirs publics, lesquels ne dénoncent pas ce manque de transparence.
À plusieurs reprises, le Président de la République et le Gouvernement ont pris des engagements, mais sans jamais renforcer le cadre légal applicable aux frais bancaires.
Après le vote de notre proposition de loi visant à rendre effectif et à renforcer le plafonnement des frais bancaires, au Sénat, l’an dernier, vous vous êtes contentés d’un timide décret en juin dernier. Aujourd’hui, alors que la pauvreté explose dans notre pays, l’urgence sociale exige que vous n’attendiez plus pour protéger les Français de frais bancaires opaques, excessifs et injustes.
Ma question est donc simple : allez-vous enfin agir pour mettre fin à ces abus ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE. – Mme Catherine Morin-Desailly et M. René-Paul Savary applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable.
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable. Monsieur le sénateur Féraud, vous l’avez mentionné : depuis 2018, conformément aux engagements du Président de la République, le ministre Bruno Le Maire œuvre pour la protection des publics vulnérables contre les frais d’incidents bancaires excessifs.
Ni le Gouvernement ni, accessoirement, les parlementaires n’ont attendu cette crise sanitaire pour se pencher sur le sujet. Ainsi, depuis 2018, il existe un plafonnement à 25 euros par mois de tous les frais d’incidents pour les clients fragiles. S’y ajoute un plafonnement à 20 euros par mois et à 200 euros par an des frais d’incidents pour les bénéficiaires de l’offre spécifique à la clientèle fragile, que les banques doivent proposer à leurs clients en situation de fragilité.
Nous avons aussi obtenu des banques qu’elles s’engagent à accroître de 30 % le nombre de bénéficiaires de cette offre spécifique, et cet engagement est tenu : l’augmentation a même été de 33 % entre 2017 et 2019, ce qui représente plus de 500 000 bénéficiaires.
D’autres mesures protectrices ont été introduites en 2020, notamment le plafonnement automatique pour les publics à faibles revenus, qui connaîtraient des incidents répétés, ou en situation de surendettement.
Enfin, nous avons exigé des établissements bancaires la pleine transparence quant à leur appréciation des publics fragiles. Depuis mai 2020, la Banque de France a mis en place une cellule d’alerte en cas de difficultés rencontrées par un particulier en matière d’inclusion bancaire et d’application de frais bancaires.
Ainsi, depuis 2017, le Gouvernement, avec le concours des parlementaires, a fait davantage pour réduire les frais d’incidents bancaires appliqués aux publics fragiles qu’aucun gouvernement auparavant. Plus que des engagements, nous pouvons invoquer des résultats. En un mot, en 2019, 1,4 million de Français avaient déjà vu leurs frais bancaires totaux réduits ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. David Assouline. Tout cela n’est pas rassurant…
M. le président. La parole est à M. Rémi Féraud, pour la réplique.
M. Rémi Féraud. Madame la secrétaire d’État, vous rappelez les timides avancées accomplies par le Gouvernement ; mais je vous ai rappelé tout ce qu’il n’a pas fait…
M. Rémi Féraud. Je constate avec regret que la bonne volonté du Gouvernement est encore et toujours moins grande que la mauvaise volonté des banques. Pendant ce temps, les Français les plus modestes s’appauvrissent et les frais bancaires augmentent. Je vous le répète : agissez et reprenez notre proposition de loi, adoptée par le Sénat ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. David Assouline. Bravo !
proposition de la défenseure des droits de création de « zones sans contrôle » (ii)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Le Rudulier, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Stéphane Le Rudulier. Monsieur le Premier ministre, je tiens à revenir quelques instants sur un sujet qui a déjà été évoqué.
Mme Claire Hédon, ancienne journaliste nommée Défenseure des droits il y a peu par le Président de la République, imagine suspendre les contrôles d’identité dans certaines zones en France, car elle juge ceux-ci « insupportables pour certains jeunes ».
Ainsi, pour Mme Hédon, l’État ne pouvant pas lutter efficacement contre la délinquance dans certains secteurs de notre pays, il vaudrait mieux démissionner, mettre son cœur en bandoulière et créer un cadre juridique spécifique afin d’assurer la pleine sérénité de ceux que la justice, la police et la gendarmerie irritent et dérangent. Pourquoi ne pas créer des « fan zones » réservées aux délinquants et entièrement sanctuarisées pour que les honnêtes gens n’y entrent surtout pas ? (Très bien ! et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Toutefois, la violente attaque des forces de l’ordre par une bande de jeunes à Poissy, au cri de « Tuez-les ! », a certainement fait vaciller les certitudes de Mme Hédon. Ainsi, face au tollé provoqué par sa proposition, la Défenseure des droits est revenue hier sur ses dires, tout en réaffirmant cependant qu’il existe des « contrôles d’identité discriminatoires ».
Cette position est surréaliste. Elle incarne le penser faux et le renoncement qui gangrènent la France depuis de trop nombreuses années.
Monsieur le Premier ministre, vous venez de clarifier la position du Gouvernement. Mais, au-delà de cette actualité, pensez-vous réellement que le rôle du Défenseur des droits soit de jeter l’opprobre, de lancer des anathèmes sur nos forces de l’ordre,…
M. le président. Il faut conclure.
M. Stéphane Le Rudulier. … déjà suffisamment attaquées et éprouvées ces derniers temps ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur, vous avez évoqué le mode de désignation de Mme Hédon. En démocratie, le Président de la République, quel qu’il soit, ne nomme pas toujours des personnalités issues des courants de la majorité parlementaire, et c’est normal. D’ailleurs, les nominations dont il s’agit sont validées par les commissions parlementaires compétentes.
M. Claude Raynal. Ou pas !
M. Gérald Darmanin, ministre. De plus, je m’inscris dans la droite ligne de M. le Premier ministre : les propos de Mme la Défenseure des droits lui appartiennent – nous avons d’ailleurs constaté qu’elle les avait quelque peu corrigés – et il est évident que le ministère de l’intérieur ne mettra pas en place une telle expérimentation.
Il est évident que les contrôles d’identité sont nécessaires. S’il y a des abus, il faut évidemment pouvoir les sanctionner. Je tiens toutefois à rappeler les chiffres. Chaque année, 5 millions d’opérations de police et de gendarmerie sont menées par des femmes et des hommes courageux, qui risquent leur vie tous les jours – vous les connaissez comme je les connais. Or 99,7 % de ces opérations se passent bien : elles ne donnent lieu à aucun signalement.
C’est bien connaître le travail de la police que de le souligner. C’est mal connaître le travail des forces de l’ordre que de ne pas voir que les contrôles d’identité sont toujours menés sous l’autorité, soit du procureur de la République et donc du pouvoir judiciaire, soit d’un officier de police judiciaire, soit de policiers, lorsqu’ils constatent qu’un crime ou un délit a été commis à proximité.
Faisons confiance à nos forces de l’ordre. C’est le cas des parlementaires, représentants de la Nation ; c’est le cas du ministre de l’intérieur, vous le savez ; c’est le cas du Gouvernement tout entier ; c’est le cas du Président de la République et c’est le cas de l’immense majorité des Français. Nos concitoyens n’attendent qu’une seule chose, que notre pays tout entier soit une zone de droit,…
Mme Françoise Gatel. Eh oui !
M. Gérald Darmanin, ministre. … que les policiers soient partout chez eux. Dès lors, il y aura moins de contrôles d’identité, tout simplement parce qu’il y aura moins de délinquance ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
projets d’infrastructures en france et exemple du contournement est de rouen
M. le président. La parole est à M. Pascal Martin, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur des travées du groupe UC.)
M. Pascal Martin. Ma question s’adresse à M. le ministre délégué chargé des transports. Elle porte sur l’articulation entre défense de l’environnement et développement des grandes infrastructures, en partant de l’exemple du contournement est de Rouen.
En septembre 2017, après quasiment cinquante ans d’études, la région Normandie, le département de la Seine-Maritime, que je présidais à l’époque, et la métropole Rouen Normandie ont conclu un accord pour boucler le financement du contournement est de l’agglomération rouennaise.
Ce chantier est indispensable. Rouen est la seule métropole française de cette taille – plus de 500 000 habitants – à ne pas bénéficier aujourd’hui d’une telle infrastructure.
Or, le 8 février dernier, le nouveau président de la métropole a décidé d’y renoncer sous la pression de ses alliés écologistes. C’est un véritable électrochoc. La région et le département ont donc pris l’engagement d’accroître leur participation financière pour couvrir le renoncement de la métropole.
L’État est le maître d’ouvrage de cette infrastructure. Jusqu’à présent, la réalisation du projet était soumise à la participation de toutes les collectivités concernées. L’État va-t-il y renoncer parce que la métropole s’en est retirée ou bien va-t-il mener à son terme un engagement que le Conseil d’orientation des infrastructures (COI) et la loi d’orientation des mobilités (LOM) ont identifié parmi les plus importants pour le développement de notre pays ?
Plus globalement, l’exemple rouennais pose la question de l’articulation entre infrastructures et protection de la nature. On ne peut pas opposer les premières à la seconde par principe. En l’occurrence, un contournement fluide entraîne moins d’émissions de gaz à effet de serre qu’un engorgement urbain permanent – et je ne parle même pas de l’aspect sanitaire du problème, car la qualité de l’air s’en ressent pour les habitants.
L’inscription de la protection de la biodiversité dans la Constitution nous permettra-t-elle de continuer à faire les bons choix à l’avenir, de manière pragmatique, sans céder à une quelconque idéologie ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. François Bonhomme applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la transition écologique.
Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique. Monsieur le sénateur Martin, vous m’interrogez au sujet du projet de contournement est de Rouen. Il consiste en un tracé neuf de quarante kilomètres destiné à relier les autoroutes A28 et A13, afin de décongestionner la métropole rouennaise.
Il s’agit effectivement d’un projet ancien, qui a fait l’objet de nombreuses concertations depuis plus de dix ans ; ce chantier, me dites-vous, est même à l’étude depuis cinquante ans.
La déclaration d’utilité publique (DUP) a été délivrée le 14 novembre 2017 après un avis favorable du Conseil d’État. Les collectivités parties prenantes, c’est-à-dire la métropole de Rouen – c’était son nom à l’époque –, le département de la Seine-Maritime et la région de Normandie, avaient quant à elles confirmé leur engagement financier en 2017, pour 50 % de la subvention d’équilibre, et l’État devait prendre en charge l’autre moitié du financement. Ces dispositions étaient effectivement inscrites dans la LOM.
Néanmoins, comme vous le mentionnez, d’importants débats se sont élevés lors des élections municipales de 2020 à Rouen, au regard des enjeux généraux de protection de l’environnement et des besoins des habitants, qu’il s’agit évidemment de concilier : nous sommes tous d’accord sur ce point.
M. le préfet de région avait alors demandé aux collectivités de confirmer leurs intentions. Le département et la région ont renouvelé leur soutien quand la métropole a fait part de son désengagement financier de l’opération et proposé d’autres solutions.
Nous avons bien pris note du souhait de la région et du département de prendre en charge les 66 millions d’euros initialement dévolus à la métropole. Nous suivons ce dossier avec une attention particulière, mais nous ne souhaitons pas avancer contre les collectivités territoriales. Nous tenons à un débat apaisé sur le sujet et réaliste quant aux problématiques, notamment pour ce qui concerne le trafic aujourd’hui constaté dans ce territoire.
Nous en appelons donc au dialogue entre les parties prenantes. Nous sommes prêts à étudier sérieusement toutes les propositions qui sont soumises pour concilier ces deux nécessités absolues : d’une part, la mobilité des habitants de la métropole et des personnes qui la traversent, de l’autre, la protection de l’environnement. (M. Alain Richard applaudit.)
sommet g5 sahel
M. le président. La parole est à M. Bernard Fournier, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Bernard Fournier. Depuis maintenant huit ans, nos forces armées sont déployées au Sahel. Le courage, l’abnégation et la compétence de nos soldats ont permis d’y remporter de nombreux succès militaires et d’empêcher la constitution d’un sanctuaire islamiste.
Les défis à relever restent cependant considérables. Face à un ennemi toujours dangereux et en perpétuelle mutation, nos armées devront en permanence adapter leur dispositif opérationnel, mais aussi pouvoir s’appuyer sur la montée en puissance des forces armées de nos partenaires pour contrer efficacement la menace.
Face à un ennemi qui se nourrit des fragilités et des défaillances des États de la région, la paix et la sécurité ne pourront renaître à la seule faveur d’une action militaire. Les conditions de cette renaissance sont par ailleurs économiques et politiques. Ce n’est qu’en progressant sur cette voie que l’on pourra durablement consolider les acquis de l’opération et conjurer la tentation d’un retrait précipité, qui ruinerait tous les efforts et les sacrifices consentis.
Lors du récent débat sur le bilan et les perspectives de Barkhane, demandé par notre excellent collègue le président Christian Cambon, M. Le Drian a déclaré que le sommet de N’Djamena devait être celui « du sursaut diplomatique, du sursaut politique et du sursaut du développement ». Ces trois volets sont en effet indispensables pour redonner des perspectives, et d’une certaine manière du sens, à l’engagement de nos troupes sur le terrain.
Monsieur le secrétaire d’État, quels ont été, lors de ce sommet, les messages adressés par le Président de la République à nos partenaires ? Estimez-vous qu’ils ont permis de provoquer ces sursauts que vous appelez de vos vœux ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M le secrétaire d’État chargé des affaires européennes.
M. Clément Beaune, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé des affaires européennes. Monsieur le sénateur Fournier, comme vous, je tiens tout d’abord à rendre hommage au courage de nos troupes au Sahel, qui assurent depuis plusieurs années la sécurité de la France et de l’Europe.
Le Président de la République a participé au sommet du G5 Sahel, ou sommet de N’Djamena, par visioconférence, au début de cette semaine, lundi et mardi. Il a également pris part à une session élargie à la coalition pour le Sahel, constituée il y a quelques mois à l’issue du sommet de Pau, et qui regroupe aujourd’hui quarante-cinq partenaires internationaux.
Vous l’avez souligné : il était temps de faire le point sur ces engagements et d’amplifier la dynamique amorcée.
Le Président de la République a eu l’occasion de le dire publiquement : le sommet de N’Djamena a permis de dresser ce bilan, d’enregistrer des résultats et des réussites dans la lutte contre le terrorisme. Ainsi, il a indiqué un certain nombre d’avancées très concrètes, fruits de ce sommet de suivi.
Tout d’abord, il s’agit du déploiement d’un bataillon tchadien dans la zone des trois frontières, pour amplifier l’effort militaire de nos partenaires.
Ensuite, il s’agit de continuer et d’amplifier la lutte contre le haut commandement du groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) et de l’État islamique au Grand Sahara ; de poursuivre le financement de la force conjointe du G5 Sahel, notamment en amplifiant les financements européens ; et, conformément aux engagements de la ministre des armées, Florence Parly, d’assurer la montée en puissance de la force européenne Takuba, au sein de laquelle près de dix partenaires européens nous ont rejoints.
Compte tenu de cet alignement politique et militaire, et de l’implication accrue de nos partenaires africains et européens, le Président de la République a indiqué que nous maintiendrions notre effort militaire et que, si des évolutions devaient être apportées, nous les examinerions en temps voulu, après l’amplification de cette dynamique.
Le sommet de N’Djamena a permis de poser les jalons de ce sursaut politique et de développement que Jean-Yves Le Drian avait évoqué : sursaut politique par la relance de la mise en œuvre de l’accord d’Alger sur la question du Nord-Mali ; sursaut de développement, au moment même où le Parlement commence l’examen de notre projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales – Jean-Yves Le Drian sera à l’Assemblée nationale pour cela dès cet après-midi –, pour permettre le retour des services aux populations dans les zones libérées par l’action militaire.
Nous poursuivrons, avec un sommet au mois de mars,…
M. le président. Il faut conclure.
M. Clément Beaune, secrétaire d’État. … le suivi de ces engagements, pris lors du sommet de Pau. (M. François Patriat applaudit.)
effectifs de l’éducation nationale
M. le président. La parole est à Mme Claudine Lepage, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Claudine Lepage. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Un peu partout sur le territoire, l’inquiétude, voire la colère, des enseignants et des parents d’élèves du second degré gronde. En cause, les discussions autour de la dotation horaire globale, qui doit acter votre choix budgétaire de supprimer 1 800 emplois d’enseignants dans le second degré. Ce choix conduit de nombreux établissements à préparer la rentrée scolaire dans des conditions intenables.
Alors que votre gouvernement proclame à longueur d’interviews la priorité donnée à la jeunesse, cette mesure va emporter des conséquences désastreuses sur la qualité des enseignements : classes surchargées, restriction des choix d’enseignements, recours trop important aux heures supplémentaires, réduction du nombre de professeurs remplaçants, etc.
Notre jeunesse, durement touchée par les conséquences de l’épidémie de la covid-19, sera la victime collatérale de ces suppressions de postes incompréhensibles.
Incompréhensibles, car la situation sanitaire devrait, au contraire, nous conduire à recruter davantage d’enseignants pour diminuer le nombre d’élèves par classes et mieux les encadrer.
Incompréhensibles, car la réforme du lycée que vous avez souhaitée nécessite des moyens en heures et en postes.
Monsieur le ministre, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain vous avait déjà alerté sur les conséquences que vos choix budgétaires allaient emporter sur le terrain, mais il n’est pas trop tard pour agir !
Allez-vous entendre la colère des enseignants et des parents d’élèves, revenir sur votre décision et prévoir, à l’inverse, des mesures exceptionnelles d’accompagnement pour la rentrée 2021 ?
Ce serait un premier signal important envoyé aux enseignants, aux parents,…
M. le président. Il faut conclure.
Mme Claudine Lepage. … et tout particulièrement à notre jeunesse. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation, de la jeunesse et des sports.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Madame la sénatrice Lepage, vous abordez une question traditionnelle à cette période de l’année, au moment où les établissements reçoivent leur dotation horaire globale.
M. François Patriat. C’est un marronnier !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Vous faites référence à l’enseignement secondaire et non au primaire, probablement parce que vous reconnaissez implicitement qu’un effort budgétaire considérable a été fait en faveur de ce dernier (Rires sur les travées des groupes SER et CRCE.), avec 2 600 créations de postes, un nombre tout à fait significatif. Ce sera, historiquement, le meilleur taux d’encadrement à l’école primaire.
C’est le résultat d’un choix politique très fort : la priorité donnée à l’école primaire. Disons-le très clairement, la France dépensait jusqu’à maintenant moins que la moyenne des pays de l’OCDE pour son enseignement primaire et davantage pour son enseignement secondaire.
Cela signifie-t-il pour autant que nous sacrifions l’enseignement secondaire ? La réponse est évidemment non.
Tout d’abord, le taux d’encadrement reste le même, parce que nous compensons les éventuelles pertes de postes dans certains établissements par des heures supplémentaires, lesquelles, au passage, peuvent se traduire par une augmentation du pouvoir d’achat de ceux qui les effectuent.
Ensuite, nous avons mis en place une série de dispositifs, qui apparaissent dans le budget, lequel a connu une augmentation inédite de près de 2 milliards d’euros pour l’an prochain. Ce quinquennat aura apporté 6 milliards d’euros en plus à l’éducation nationale, contre 2 milliards d’euros sous le gouvernement que vous souteniez précédemment.
Ces moyens ne sont pas donnés de manière indistincte ; ils sont consacrés à des politiques en faveur des plus défavorisés. J’ai à l’esprit le dispositif Devoirs faits, au collège. Mais ces efforts concernent aussi l’ensemble des politiques qui ont trait aux facteurs sociaux de la réussite éducative, par exemple les cités éducatives que nous mettons en place avec Nadia Hai.
Cette politique publique est qualitative et cible ses bénéficiaires : les plus défavorisés. Il ne s’agit pas d’une politique aveugle, non plus que d’une politique de saupoudrage. Elle prête attention aux territoires, notamment aux territoires ruraux, qui font l’objet d’une attention particulière, y compris dans le cadre du plan de relance. (Marques de dénégation sur les travées des groupes SER et CRCE.)
Ce plan recèle ainsi une série de bonnes nouvelles pour les territoires, par exemple pour ceux qui, en ce moment, apprennent qu’ils ont été choisis pour accueillir un internat d’excellence,…
M. le président. Il faut conclure !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. … ou encore pour ceux qui bénéficient du plan informatique en zone rurale. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
canal du midi
M. le président. La parole est à M. Alain Chatillon, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Alain Chatillon. Madame la ministre de la transition écologique, l’une de vos prédécesseurs m’avait chargé, il y a dix ans, d’établir un rapport sur le devenir du canal du Midi, qui proposait des modifications de l’organisation et de la stratégie afin de préparer la réhabilitation et d’assurer la vie de ce grand site historique, patrimonial, paysager et très fortement touristique pour notre grande région.
L’arrivée du chancre coloré nous a obligés, dès 2010, à effectuer de nombreux abattages d’arbres et à lancer des investissements importants, mais la gestion globale de l’ouvrage nous inquiète aujourd’hui très fortement.
Votre ministère a en effet réduit de façon drastique, depuis plusieurs années, les crédits dédiés au fonctionnement général, à l’entretien des abords et à l’environnement. En outre, les responsables en charge changent très régulièrement. Heureusement, nous avons la chance d’avoir un préfet de région remarquable qui s’occupe de nos dossiers.
À ce jour, nous rencontrons de gros problèmes en raison de différences entre l’urbain et le rural : les nouvelles règles s’opposent aux plans locaux d’urbanisme (PLU), aux plans locaux d’urbanisme intercommunal (PLUi), aux schémas de cohérence territoriale (SCoT), mais aussi à la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) et à la direction départementale des territoires (DDT).
Il vous faut véritablement faire un effort important sur le plan tant financier qu’organisationnel pour que nous puissions assurer l’avenir du canal du Midi. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Alain Richard applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Roger Karoutchi. C’est le régional de l’étape !
M. Jean Castex, Premier ministre. Monsieur le sénateur Chatillon, je revendique de très bien connaître cet ouvrage magnifique qu’est le canal du Midi, qui est, je vous le rappelle, classé au patrimoine mondial de l’Unesco. Je connais également les travaux que vous avez conduits par le passé sur ce sujet et qui sont très importants pour la région Occitanie et pour la France, pour leur attractivité historique.
Par ma réponse, je voudrais simplement vous rassurer, si vous étiez inquiet, quant à l’implication très forte de l’État aux côtés des collectivités territoriales, non seulement pour la sauvegarde, mais aussi pour la restauration et le rayonnement de cet ouvrage historique construit, chacun le sait, au XVIIe siècle par Pierre-Paul Riquet.
Il est au cœur des priorités de l’État, notamment de la ministre de la transition écologique, qui aurait parfaitement pu vous répondre puisque sont concernés l’irrigation, le tourisme, les pistes cyclables ; nous allons également investir dans le numérique le long du canal latéral. Vous savez tout cela par cœur…
Je veux vous rassurer quant à la dotation de Voies navigables de France (VNF), notre opérateur : celle-ci a été augmentée d’un tiers depuis 2019 et 75 millions d’euros sont prévus globalement dans le plan de relance.
Pour ce qui concerne les investissements, j’ai signé avec la présidente de la région Occitanie il y a quelques semaines, à Tarbes, un accord de relance extrêmement ambitieux qui, s’agissant de l’État et dans le prolongement des efforts antérieurement consentis, prévoit un investissement additionnel de 25 millions d’euros sur les deux prochaines années pour la restauration des plantations et des berges, ainsi que pour la fibre optique.
Je voudrais également souligner la mobilisation des collectivités territoriales dans le cadre d’une entente que vous connaissez et qui démontre ce partenariat territorial auquel le Gouvernement et votre serviteur sont particulièrement attachés.
Oui, le canal du Midi a un avenir ; oui, il contribuera au développement économique, écologique et touristique de la région Occitanie ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Alain Chatillon, pour la réplique.
M. Alain Chatillon. Monsieur le Premier ministre, je ne peux que vous remercier. J’ajouterai toutefois deux éléments concrets.
Tout d’abord, il y avait vingt-cinq salariés entre le bassin naturel du canal du Midi, en haut de la Montagne noire, et le canal lui-même, sur soixante kilomètres ; il n’y en a plus que cinq aujourd’hui. On a transformé des cols bleus en cols blancs. Ensuite, sur le fond, je m’interroge à nouveau sur le problème d’iniquité entre le rural et l’urbain.
M. le président. Il faut conclure.
M. Alain Chatillon. On a zoné certaines terres agricoles jusqu’à 600 ou 800 mètres, sur lesquelles on ne peut même pas stocker certains produits agricoles, tandis que, dans les grandes villes, on laisse construire de très grands immeubles à proximité du canal.
Nous appelons de nos vœux un juste équilibre entre le rural et l’urbain. Merci de votre compréhension ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
siège du parlement européen à strasbourg
M. le président. La parole est à Mme Elsa Schalck, pour le groupe Les Républicains. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Elsa Schalck. Monsieur le Premier ministre, en novembre dernier, avec mes collègues du Grand Est, nous vous faisions part de notre vive préoccupation quant à la situation de Strasbourg, siège du Parlement européen. Nous appelions à des actions fortes du Gouvernement pour défendre et conforter la place de la capitale française de l’Union européenne.
Cela fait désormais un an qu’aucune session plénière du Parlement européen ne s’est tenue à Strasbourg, et nous venons d’apprendre que la session de mars ne s’y tiendrait toujours pas ! C’est une atteinte aux traités européens et au principe de l’Europe polycentrique, au cœur même de l’idée européenne.
La tenue des sessions plénières à Strasbourg ne saurait être optionnelle et la pandémie, qui concerne aussi bien la Belgique que la France, ne saurait plus longtemps être un prétexte pour remettre en cause la vocation européenne de Strasbourg.
Actuellement, le format hybride des sessions plénières est piloté non depuis Strasbourg, mais depuis Bruxelles, avec près de 350 à 450 députés présents physiquement à Bruxelles.
Le Parlement européen a tenu vendredi dernier, depuis Strasbourg, un exercice de simulation parlementaire rassemblant plus de 2 500 jeunes, preuve qu’il est parfaitement capable de piloter en ligne un événement qui dépasse le nombre de députés européens participant aux sessions plénières.
Fin janvier, le Conseil de l’Europe a tenu, en présence physique et à distance, son Assemblée parlementaire avec des élus venus de quarante-sept États membres, dans de parfaites conditions d’organisation. Ce qui est possible pour le Conseil de l’Europe doit l’être pour le Parlement européen.
Monsieur le Premier ministre, vous nous aviez indiqué votre total engagement pour défendre la vocation européenne de Strasbourg, mais les paroles ne suffisent plus. Nous ne pouvons plus assister passivement à cette situation et nous limiter à des réactions à chaque remise en cause du statut de Strasbourg.
Face à une situation qui ne saurait perdurer, pouvez-vous nous dire ce que compte faire votre gouvernement pour permettre aux députés européens de revenir enfin dans la capitale européenne ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. André Gattolin, Jacques Fernique et Mme Émilienne Poumirol applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des affaires européennes.
M. Clément Beaune, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé des affaires européennes. Madame la sénatrice Schalck, je partage, au nom du Gouvernement et sous l’autorité du Premier ministre, votre préoccupation et vous assure de notre total engagement, rappelé par le Président de la République lui-même, pour un retour le plus rapide possible des sessions du Parlement européen à leur siège prévu par les traités, qui se situe à Strasbourg. Cela n’a que trop duré.
La situation sanitaire pose d’évidentes difficultés, mais elle ne saurait justifier ce type de comportements et la situation qui perdurera jusqu’à la session du mois de mars. Nous poursuivrons les démarches diplomatiques au plus haut niveau auprès du président du Parlement européen, M. David Sassoli, ainsi que le Premier ministre en avait pris l’engagement en répondant au courrier que vous aviez porté avec un certain nombre d’autres élus. Je relaierai de nouveau ces messages lors des prochains jours.
Vous savez que la situation du Parlement européen est particulière par rapport à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, puisqu’elle implique des déplacements beaucoup plus importants. Cela ne saurait toutefois justifier une situation qui n’est pas conforme aux traités, aux intérêts nationaux et à notre conception d’une Europe polycentrique, comme vous l’avez indiqué.
Pour être offensifs sur ce sujet et montrer l’engagement partagé que nous consacrons au statut de Strasbourg, nous sommes en train de finaliser entre l’État et les collectivités territoriales un nouveau contrat triennal « Strasbourg, capitale européenne », qui verra les moyens financiers augmenter : ceux de l’État – nous en avons pris l’engagement – mais aussi, nous l’espérons, ceux des collectivités territoriales impliquées. Je tiendrai une nouvelle réunion dans les prochains jours avec l’ensemble des élus de tous bords concernés par la situation de Strasbourg.
Nous préparons aussi la présidence française de l’Union européenne. Dans ce cadre, nous portons, avec Jean-Yves Le Drian, auprès de tous les membres du Gouvernement, l’instruction donnée par le Premier ministre que des événements politiques et ministériels se tiennent le plus possible dans la capitale européenne afin que Strasbourg soit valorisée. Cela ne saurait compenser la situation actuelle, mais c’est un renforcement de son statut de capitale européenne.
Vous savez également qu’un hommage sera rendu au Parlement européen au président Valéry Giscard d’Estaing dans les prochaines semaines. Ce sera l’occasion de réaffirmer cette vocation européenne le plus solennellement possible. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.
Je vous rappelle que les prochaines questions d’actualité au Gouvernement auront lieu le mercredi 3 mars 2021, à quinze heures.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures trente, sous la présidence de Mme Laurence Rossignol.)
PRÉSIDENCE DE Mme Laurence Rossignol
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
3
Communication d’un avis sur un projet de nomination
Mme la présidente. En application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, ainsi que de la loi organique n° 2010-837 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 prises pour son application, la commission des finances a émis, lors de sa réunion de ce jour, un avis favorable (13 voix pour, 1 voix contre) au renouvellement de M. Patrick de Cambourg à la présidence de l’Autorité des normes comptables.
4
Communication relative à une commission mixte paritaire
Mme la présidente. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la bioéthique n’est pas parvenue à l’adoption d’un texte commun.
5
Candidatures à deux missions d’information
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la nomination des membres de deux missions d’information : l’une relative aux conditions de la vie étudiante en France ; l’autre intitulée : « La méthanisation dans le mix énergétique : enjeux et impacts. »
Conformément à l’article 8 de notre règlement, les listes des candidats remises par les groupes politiques ont été publiées.
Elles seront ratifiées s’il n’y a pas d’opposition dans le délai d’une heure prévu par le règlement.
6
Amélioration du système de santé par la confiance et la simplification
Discussion en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification (proposition n° 200, texte de la commission n° 357 rectifié, rapport n° 356).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la proposition de loi soumise à votre examen est un texte important par les engagements qu’il concrétise comme par les ambitions dont il est porteur. Ces engagements sont ceux du Ségur de la santé ; ces ambitions répondent à la situation d’un système de santé qui, depuis un an, fait face à l’impensable.
Voilà un an, je franchissais les portes d’un ministère sur le point d’affronter une crise historique, qui n’est pas encore derrière nous. D’une brutalité inouïe, l’épidémie qui nous frappe est combattue par nos soignants depuis le premier jour : ces femmes et ces hommes, en ville comme à l’hôpital, ont fait face et permis à la France de tenir.
Il fallait les applaudir, mais aussi et surtout les reconnaître ; j’allais dire : les reconnaître enfin.
Le Ségur de la santé n’a pas été un énième grand barnum, une consultation de plus avant un rapport qui terminerait dans je ne sais quel tiroir. Des sommes extrêmement importantes ont été mises sur la table, pour des revalorisations sans précédent. C’est un fait. Signées le 13 juillet dernier à Matignon, ces revalorisations profitent à l’ensemble des personnels médicaux et paramédicaux de l’hôpital, notamment public.
Au-delà de ces revalorisations, attendues depuis bien longtemps par-delà les âges et les alternances, le Ségur de la santé a permis de dresser un diagnostic solide et partagé de l’ensemble de notre système de santé. Nous n’avons éludé aucun sujet : investissements, pour regarder l’avenir avec confiance ; gouvernance, pour redonner le pouvoir à ceux qui soignent – en tout cas, partager les processus de décision ; élargissement des compétences des professionnels de santé.
Après la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, cette proposition de loi vient donner force de loi aux engagements pris dans ce cadre. Je salue le travail et la rigueur de son auteure, Mme Stéphanie Rist, ainsi que sa détermination à changer la donne pour l’ensemble de notre système de santé.
Après l’Assemblée nationale voilà quelques semaines, le Ségur de la santé franchit donc à nouveau les portes du Parlement. S’il était indispensable de donner la parole aux soignants, il ne l’était pas moins que les représentants de la Nation s’emparent d’un sujet qui concerne tous nos concitoyens. Je remercie chacune et chacun d’entre vous pour le travail d’enrichissement et de consolidation que vous avez mené en commission et qui, je n’en doute pas, sera poursuivi dans cet hémicycle.
Parlons-nous clairement : le texte qui résulte des travaux de la commission des affaires sociales présente, à l’évidence, de nombreuses qualités, mais le Gouvernement ne partage pas l’ensemble de ses orientations.
Le Ségur a préconisé la réhabilitation du rôle et de la place du service au sein de l’hôpital, pour mettre fin aux excès de la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite HPST, en reprenant notamment une préconisation, consensuelle, formulée dans son rapport par le professeur Olivier Claris.
Cette proposition de loi répond également à la revendication, ancienne et renforcée par la crise sanitaire, visant à laisser une plus grande liberté d’organisation interne des établissements de santé à la main des acteurs locaux. La crise a montré que les collectifs de soins savaient s’adapter, s’organiser et surmonter des situations extrêmement sensibles sans attendre un accord, une validation ou un feu vert venu d’en haut.
Si, dans un hôpital, les communautés sont d’accord pour adapter l’organisation médicale, pour mettre en place une gouvernance un peu différente de celle de l’établissement d’à côté, au nom de quoi les en empêcherait-on ? Faut-il vraiment que les règles applicables à un centre hospitalier universitaire de plusieurs dizaines de milliers de salariés soient, au mot près, calquées sur celles d’un hôpital de périphérie, plus petit et aux missions parfois différentes ?
Nous devons continuer à progresser en matière de démocratie hospitalière. À cet égard, ce texte prévoit de faire siéger au sein du directoire des établissements publics hospitaliers un représentant des personnels non médicaux, un représentant des étudiants en santé et un représentant des usagers. Cela semble aller de soi, mais ce n’est pas actuellement le cas. Nous le devons aux personnels paramédicaux, aux étudiants et aux usagers, parce que l’expérience vécue, quelle qu’elle soit, a sa place quand il s’agit de prendre des décisions.
Certains membres de la commission des affaires sociales se sont inquiétés, émus même, du manque d’ambition de ce texte, notamment en matière de gouvernance, craignant des dissonances normatives et une forme d’insécurité juridique.
Je tiens à rassurer chacun : l’ordonnance prévue à l’article 37 de la loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santé (loi OTSS), relative aux groupements hospitaliers de territoire (GHT), est en cours de concertation avec l’ensemble des acteurs, et les commissions médicales de groupement (CMG) seront demain des instances décisionnelles dans la vie de ces établissements. Par voie de conséquence, les missions des commissions médicales d’établissement (CME), des présidents de commission médicale d’établissement (PCME) et des présidents de commission médicale de groupement (PCMG) sont revues dans l’ordonnance, ainsi que certaines recommandations du rapport Claris, qui ont fixé le cap que nous suivons.
La réforme de la gouvernance hospitalière, j’y tiens ; elle est en train de se dessiner, avec celles et ceux qui, demain, présideront aux destinées de l’hôpital public dans notre pays.
Par ailleurs, le Gouvernement poursuit sa la lutte contre l’intérim médical – une orientation déjà au cœur du plan « Investir pour l’hôpital » défendu par ma prédécesseure. Ce mercenariat désorganise l’offre de soins dans nos territoires et peut mettre à mal les finances de nos hôpitaux : le déficit de certains établissements correspond, à l’euro près, aux surdépenses liées au recours contraint à l’intérim médical…
Plus précisément, la proposition de loi rend effectif, une bonne fois pour toutes, le plafond réglementaire de l’intérim médical, en obligeant le comptable public à rejeter tout paiement au-delà de cette limite. L’intérim n’est pas à jeter, comme l’on dirait, avec l’eau du bain : il peut être intéressant, important même, en tout cas avoir sa place ; mais lorsqu’il devient la règle, en dehors de tout cadre budgétaire, la situation peut devenir proprement scandaleuse. Pour qui connaît la vie d’un service, c’est aussi et surtout une plaie qui mine la cohésion de toute une équipe.
Par ailleurs, ce texte renforce un certain nombre de mouvements nés l’été dernier, avec le Ségur de la santé. Je pense en particulier à l’extension du champ de compétences de certaines professions, au premier rang desquelles les sages-femmes et les masseurs-kinésithérapeutes. Permettre à des professions comme celles-là d’accomplir des actes qui leur étaient jusqu’alors impossibles, c’est faire le choix de la confiance et de l’efficacité ; c’est faire le pari que notre système de santé ne relèvera pas les défis qui l’attendent en ménageant les guerres de chapelles et les prés carrés.
J’ai énuméré les grands axes de la proposition de loi : à bien les regarder, je les trouve nombreux et importants pour un texte qui manquerait d’ambition… Il est vrai qu’il est toujours temps d’enrichir, d’améliorer, de renforcer un texte ; tel est évidemment l’objet de nos travaux.
Une ambition, ce sont d’abord des moyens. Or les moyens sont là et bien là, en monnaie sonnante et trébuchante, personne ne pourra le contester.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je me réjouis de voir le Ségur de la santé se poursuivre à partir de cet après-midi dans votre hémicycle. Les enjeux sont clairs : nous devons trouver ensemble les voies et moyens par lesquels les mesures décidées l’été dernier trouveront à s’appliquer concrètement, sur le terrain, dans les territoires, dans chaque service hospitalier de France.
Je salue encore une fois le travail de toutes celles et de tous ceux qui ont déjà enrichi ce texte et qui contribueront à lui donner la force d’une promesse tenue. Je ne doute pas que nous parviendrons à surmonter nos désaccords pour faire avancer ensemble, et pour de bon, des sujets qui ne peuvent plus attendre !
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Alain Milon, rapporteur de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, faire confiance et simplifier : l’intitulé de cette proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, est riche de promesses.
La crise sanitaire a contribué, depuis un an, à inscrire ces objectifs fédérateurs au cœur des attentes des acteurs de santé. Exprimée tant dans le Ségur de la santé que dans la mission sur la gouvernance hospitalière présidée par le professeur Claris, leur aspiration, légitime, est de se recentrer sur leur cœur de métier : le soin.
Malheureusement, le choc de confiance et de simplification tant attendu n’est clairement pas au rendez-vous de ce texte. La commission en a déploré le contenu disparate et, sur certains volets, chétif, le prisme et le manque de vision stratégique.
De fait, cette proposition de loi ne nous paraît pas porter haut l’ambition pour notre système de santé que ses acteurs de première ligne, au front de l’épidémie depuis un an, sont aujourd’hui en droit d’attendre. Cette ambition appellerait, selon moi, la discussion d’un texte à l’ossature plus forte, plutôt que procédant à des ajustements.
Surtout, la cohérence de certaines mesures que nous sommes appelés à examiner est mise à mal par le calendrier de la discussion, des ordonnances structurantes pour l’hôpital, prévues par la loi relative à l’organisation et la transformation du système de santé, dite loi Ma santé 2022, n’ayant pas encore été publiées.
Bien que contraints par les règles de recevabilité des amendements, les membres de la commission des affaires sociales ont adopté une version largement remaniée de ce texte.
D’abord, nous en avons d’abord recentré l’objet en supprimant dix articles sur trente-sept, portant principalement sur des évolutions de trop faible portée ou, selon nous, insuffisamment préparées. En particulier, nous avons supprimé l’article 1er, qui créait une profession médicale intermédiaire aux contours indéfinis : engagée, je crois, sans concertation avec les professionnels intéressés, cette mesure n’avait pas sa place dans un texte censé rétablir la confiance avec les acteurs.
D’autres évolutions envisagées dans les missions des professionnels de santé sèment la confusion dans la logique du parcours de soins, sans répondre à la demande légitime de ces professionnels de voir leurs compétences reconnues. Là aussi, nous avons déploré l’absence d’une ligne directrice claire.
Ensuite, nous avons rejeté des mesures engagées dans la précipitation, dont les potentiels effets collatéraux ne nous ont pas paru maîtrisés. Ainsi, la commission a réaffirmé le rôle majeur des associations dans l’encadrement des bénévoles qui interviennent dans le contexte, si sensible, des lieux de soins, en refusant les dérives que pourrait entraîner la notion de bénévole individuel.
En ce qui concerne les dispositions relatives à la gouvernance hospitalière, je ne puis vous cacher, monsieur le ministre, que la déception de la commission est réelle.
Nous déplorons d’abord un problème de méthode : la proposition de loi, d’une part, traite de plusieurs sujets pour lesquels le Parlement a très largement habilité le Gouvernement à légiférer par ordonnances et, d’autre part, se borne, malgré l’ambition de son titre, à hisser au niveau législatif des dispositions réglementaires existantes.
Surtout, nous regrettons que les propositions traduites par le texte soient, pour la plupart, des traductions, parfois édulcorées, des recommandations émises par le professeur Claris au terme de sa mission sur la gouvernance hospitalière ou issues de la concertation du Ségur de la santé.
La possibilité de former une commission médico-soignante, le droit d’option en matière d’organisation interne, la recomposition du directoire, le plan de gouvernance et de management et même la lutte contre l’intérim médical sont autant de mesures dont l’annonce produit certes un effet de courte durée, mais dont la faible envergure est unanimement regrettée par les acteurs médicaux et administratifs que nous avons auditionnés.
Devant ce texte, la commission avait deux options, chacune pouvant se justifier aux yeux de l’opinion : le rejeter en bloc, son adoption devant en fin de compte n’entraîner que peu de changements, ou tenter de l’améliorer en profondeur. C’est la seconde voie que nous avons choisie.
Nous avons adopté une position qui me paraît équilibrée, de prudence mais de méfiance, à l’égard des GHT, à propos desquels la commission avait commandé à la Cour des comptes une étude spécifique, dont elle a tenté de tirer profit.
Nous avons supprimé l’article 4 quater, le considérant comme une véritable provocation à l’égard des praticiens hospitaliers, dont la vie privée subissait une atteinte manifestement disproportionnée.
La commission a fait part de son intérêt pour plusieurs initiatives qui seront discutées en séance en ce qui concerne l’inégalité de traitement entre l’activité libérale exercée par un praticien hospitalier d’un établissement public de santé et l’activité libérale exercée par un praticien salarié d’un établissement de santé privé à intérêt collectif (Espic).
Surtout, la commission a réécrit les articles 5 et 6, pour exploiter à fond les opportunités ouvertes par les dispositions à peine esquissées du texte initial. Elle a sécurisé les compétences du chef de service afin d’éviter tout chevauchement avec celles des chefs de pôle. Elle a fait droit à la demande très ancienne d’approfondir la délégation de gestion au sein de l’établissement.
Enfin, elle s’est attelée à traiter l’une des causes du défaut d’attractivité de l’hôpital public pour les personnels paramédicaux. Mes auditions ont montré qu’il est en grande partie lié à un défaut de représentation auprès de la direction. Nous avons donc prévu l’inscription de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques (CSIRMT) au rang des organes représentatifs de l’établissement public de santé, ainsi que l’élection de son président par ses membres.
À toutes ces avancées, saluées par les acteurs, le Gouvernement a opposé une fin de non-recevoir peu constructive, en déposant une série d’amendements visant à rétablir l’ensemble des articles touchant à la gouvernance hospitalière dans la rédaction issue de l’Assemblée nationale. Leur examen donnera lieu, dans la discussion des articles, à des explications plus détaillées.
Fidèle à ses positions, la commission a accueilli favorablement les initiatives, de tous bords politiques, servant la construction d’un hôpital public moins contraint et plus soucieux d’assurer à ses personnels l’attractivité qui lui fait aujourd’hui tant défaut. Nul doute que le texte qui résultera de nos débats répondra davantage aux maux et aux attentes de nos soignants.
Néanmoins, notre tâche est encore loin d’être achevée. Face au problème, désormais structurel, de l’abandon résigné de l’hôpital public par nos gouvernements successifs, la commission a une nouvelle fois rappelé qu’aucune mesure législative ne pourrait durablement se substituer aux revalorisations salariales qui s’imposent. L’urgence est là, impérieuse. Mais avec le mauvais génie français de la réforme, il semble que les évidences les plus criantes restent encore ignorées…
Mes chers collègues, ayant eu le souci de tirer le meilleur parti possible de ce texte, la commission peut vous en présenter une version, sinon parfaite, du moins nettement améliorée. Elle recommande au Sénat d’adopter la proposition de loi dans le texte issu de ses travaux. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)
Mme la présidente. Je suis saisie, par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, d’une motion n° 144.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l’article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture, visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification (n° 357 rectifié, 2020-2021).
Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 7, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour dix minutes, un orateur d’opinion contraire, pour dix minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas deux minutes et demie, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour la motion.
Mme Laurence Cohen. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre groupe a fait le choix de déposer cette motion tendant à opposer la question préalable, car nous sommes opposés aux orientations de cette proposition de loi. D’ailleurs, soignants comme non-soignants sont vent debout contre la plupart des mesures qu’elle contient.
Monsieur le ministre, vous avez utilisé la proposition de loi de la députée Stéphanie Rist pour compléter certaines mesures du Ségur de la santé, voire en ajouter d’autres. L’adoption de ce texte serait lourde de conséquences pour notre système de santé – des conséquences bien éloignées de la volonté de simplification affichée…
Ainsi, il s’agit notamment de renforcer l’échelon des groupements hospitaliers de territoire, qui devient davantage encore la référence, alors même que le rapport de la Cour des comptes d’octobre dernier est plutôt mitigé.
De même, cette proposition de loi offre une place prépondérante aux gestionnaires et technocrates, ceux-là mêmes qui ont conduit l’hôpital public à l’asphyxie.
Parallèlement, ou paradoxalement, le texte autorise le bénévolat à l’hôpital, ce que mon collègue député Pierre Dharréville a comparé, à juste titre, à une forme d’ubérisation des activités associatives.
Notre groupe a déposé cette motion car nous nous opposons au texte non seulement sur le fond, les mesures étant en deçà des attentes et des besoins, mais aussi sur la forme. De fait, le Gouvernement a travesti cette proposition de loi en véritable projet de loi, engageant en outre la procédure accélérée. Cette méthode présente l’avantage pour lui de l’exonérer d’une étude d’impact et d’un avis du Conseil d’État, ce qui laisse de fortes incertitudes sur les conséquences de ce texte que nous refusons.
Le plus grave est le décalage entre ce texte et le vécu des professionnels de santé et du médico-social. Comment oublier que ce texte, présenté comme le prolongement du Ségur de la santé, fait suite à la première vague de covid-19 et, surtout, à des mois de mobilisation de collectifs et de syndicats des personnels ?
Contradiction supplémentaire, malgré la volonté affichée d’enrichir le Ségur, ce texte contient seulement cinq des trente-huit propositions qui y figurent.
Alors qu’il faudrait s’attaquer aux racines du malaise des personnels soignants – manque de moyens, pilotage comptable, gestion calquée sur le privé –, ce texte prolonge une vision libérale de l’hôpital public en assumant l’introduction des règles du management privé dans le secteur public. Dans la lignée du New Public Management, il vise à renforcer la vision gestionnaire et managériale de l’hôpital.
Cette conception détourne le système public de sa fonction première : le soin. Il s’agit de rapprocher le fonctionnement de l’hôpital public de celui des cliniques privées, au mépris de l’histoire du service public hospitalier, des valeurs incarnées par ses agents et des services rendus aux populations dans le respect de l’égalité de toutes et tous, quels que soient l’origine sociale et le territoire.
Derrière l’argument des contraintes organisationnelles se dissimulent l’autonomie de gestion et l’autonomie de moyens des établissements de santé. L’autonomie n’est donc qu’un paravent pour justifier, plus tard, une baisse supplémentaire des dépenses de l’État ou de la sécurité sociale.
De plus, en renforçant l’autonomie des hôpitaux, vous forcez la main aux réorganisations des services et des métiers administratifs et techniques.
Il faut au contraire renforcer l’égalité d’accès aux soins, plutôt que de casser le cadre national du service public de santé en prenant modèle sur l’autonomie des universités, qui a aggravé la mise en concurrence des établissements et encouragé le financement privé.
La crise semble ainsi vous fournir un prétexte pour aller plus loin dans la déréglementation. Vous ne le faites pas au hasard : vous le faites pour pousser le plus loin possible les logiques gestionnaires et technocratiques qui ont contribué à affaiblir l’hôpital public.
Voilà qui va encore alimenter la mise en concurrence des structures et favoriser la gestion pyramidale et centralisée des hôpitaux. Par exemple, le départ d’un directeur d’hôpital pourrait être le prétexte à faire de cet établissement, au bout du compte, une annexe de l’hôpital support du GHT.
Alors que les bilans financiers démontrent l’échec des groupements hospitaliers de territoire, vous décidez d’accélérer ce que vous appelez l’intégration par l’installation de méga-GHT. Pourtant, les personnels que je rencontre lors de mes nombreux déplacements dans les hôpitaux et les Ehpad publics continuent, comme ils l’ont toujours fait, de remettre en cause ce pilotage à distance par des superstructures.
Redonner de l’attractivité aux professions de la santé et du médico-social passe par la revalorisation des métiers et l’augmentation salariale, mais aussi par le partage des pouvoirs et donc des décisions.
À cet égard, la réhabilitation des chefs de service est totalement amoindrie par le maintien des pôles. Pourquoi ce maintien, alors que la majorité des professionnels, à l’image du collectif interhôpitaux, demandent leur suppression, critiquant la bureaucratie qu’ils engendrent ?
A contrario, ce que vous appelez la gouvernance doit redonner à chacune et à chacun sa place et s’appuyer sur deux piliers : la fin des politiques d’austérité, avec un objectif national des dépenses d’assurance maladie à la hauteur, a minima, de l’évolution naturelle des dépenses ; et l’instauration d’une véritable démocratie sanitaire, avec une représentation plus importante de l’ensemble des professionnels médicaux, administratifs et techniques, des étudiantes et étudiants internes de médecine, des usagers et des élus locaux, totalement absents des prises de décision.
Or rien de tout cela ne se retrouve dans le texte, à part une mesure à l’article 9.
En outre, il manque dans ce texte des éléments fondamentaux pour un meilleur maillage de proximité, donc une offre de soins égale pour l’ensemble des territoires.
Ainsi, les centres de santé sont totalement oubliés. Pourtant d’après les chiffres du Conseil national de l’ordre des médecins, le nombre de médecins exerçant au moins une partie de leur activité en centre de santé a presque doublé entre 2010 et 2018. De fait, le salariat et l’exercice regroupé séduisent de plus en plus les jeunes médecins : malgré les tentatives de certains pour les maintenir dans le sacro-saint exercice libéral, nous assistons à un développement indiscutable de la médecine salariée, notamment chez les généralistes.
Il est donc nécessaire de renforcer l’attractivité des centres de santé, qui assurent l’accès aux soins non programmés que les médecins libéraux ont abandonnés depuis le décret Mattei supprimant les gardes les nuits, les week-ends et les jours fériés.
C’est d’autant plus nécessaire que, selon l’Association des maires de France et les maires ruraux, la désertification médicale s’accélère, en sorte que les habitantes et habitants des zones rurales ont de moins en moins accès aux hôpitaux. Ainsi, en 2019, ce sont 7,4 millions de Françaises et de Français qui habitaient dans un désert médical, soit 11 % de la population ; ils n’étaient que 5,7 millions trois ans plus tôt…
Le manque de médecins est l’une des causes fondamentales de l’accélération de la désertification médicale. Mme Buzyn y avait répondu par la suppression du numerus clausus dans les études de santé. Mais sans moyens supplémentaires accordés aux universités, sans investissements immobiliers et sans revalorisation du tutorat, cela revient à la situation actuelle de stagnation du nombre de médecins formés.
Selon Emmanuel Vigneron, géographe de la santé, plus on est loin, moins on a d’informations et moins il y a de médecins. Pourtant, la crise sanitaire de la covid-19 souligne l’enjeu que constitue l’investissement dans l’éducation à la santé et dans un maillage territorial d’accès aux soins.
Mes chers collègues, nous vous invitons à voter la question préalable, et ce malgré deux éléments positifs – la suppression de l’article 1er, qui créait des professions médicales intermédiaires, article vilipendé de tous ; le maintien de plusieurs articles renforçant les prérogatives des sages-femmes et contribuant ainsi à une meilleure reconnaissance de cette profession médicale –, parce que nous sommes en désaccord avec la conception générale de ce texte. Quelle que soit notre appétence pour le débat, nos désaccords de fond rendent l’adoption de nos amendements très hypothétique.
Le plus grave, monsieur le ministre, est qu’aucun enseignement n’a été tiré de la pandémie que nous vivons depuis près d’un an et qui ne s’éteint toujours pas. Vous continuez à prendre des mesures dans le droit-fil des réformes qui ont conduit notre système de santé là où il en est aujourd’hui – loi HPST de Roselyne Bachelot, loi Santé de Marisol Touraine, loi Ma santé 2022 d’Agnès Buzyn –, avec en supplément la casse du cadre national du service public de santé.
Mes chers collègues, Cathy Apourceau-Poly et moi-même avons entendu des critiques virulentes contre ce texte en commission ; nous avons même entendu monter de la colère, depuis tous les groupes politiques. Nous invitons donc toutes celles et tous ceux d’entre vous qui prétendent défendre le service public de santé et refuser la casse du système hospitalier à voter notre motion. Ne remettez pas à plus tard ce que vous pouvez faire maintenant ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et GEST.)
M. Alain Milon, rapporteur. La commission est défavorable à cette motion, dont l’adoption mettrait un terme à nos débats. Nous souhaitons débattre !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Mon intervention vaudra explication de vote sur les deux motions.
Personne n’est dupe : cette proposition de loi hétéroclite, incomplète, dépourvue de souffle, de méthode et de cohérence est un énième projet de loi dissimulé en prétendu travail parlementaire. Le Gouvernement entend ainsi accélérer ses réformes en contournant l’avis du Conseil d’État et en s’exonérant d’une étude d’impact.
Ce texte est censé compléter le Ségur de la santé pour les dimensions non financières, s’agissant notamment de la gouvernance et de la démocratie sanitaires. Alors que ces questions ont donné lieu à de nombreuses contributions et rencontres à la suite du mouvement social, la marche forcée à laquelle nous assistons s’explique par la faible prise en compte des enseignements issus des rapports de la Cour des comptes et du professeur Claris et, surtout, de la mobilisation qui s’est produite, pendant la pandémie, autour des longues négociations du Ségur de la santé.
Il s’agit donc pour le Gouvernement de passer en force en prenant le risque d’avoir simulé la concertation, consentie il est vrai sous la pression de la mobilisation des professionnels de santé, pour poursuivre selon la même logique : celle qui fragilise encore et toujours notre système de santé et affaiblit l’hôpital public, lequel, en pleine pandémie, perd encore des lits.
Enfin, le Parlement n’est pas respecté ; il est même instrumentalisé. Dans le cadre de la procédure accélérée, la commission des affaires sociales du Sénat n’a pu valablement travailler, d’autant que nous sommes en attente des ordonnances en lien avec certaines mesures de cette proposition de loi.
Le Sénat ne peut accepter ce déni du travail parlementaire. Mes chers collègues, il est de notre responsabilité de ne pas le tolérer.
Cette proposition de loi fait l’objet de deux motions, l’une tendant à opposer la question préalable, l’autre demandant le renvoi à la commission. En cohérence avec les protestations issues de tous les bancs, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera pour ces deux motions car nous partageons nombre des arguments qui ont présidé à leur dépôt. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
Mme la présidente. Je mets aux voix la motion n° 144, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet de la proposition de loi.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 82 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 281 |
Pour l’adoption | 27 |
Contre | 254 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Demande de renvoi à la commission
Mme la présidente. Je suis saisie, par M. Jomier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain d’une motion n° 70.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l’article 44, alinéa 5, du règlement, le Sénat décide qu’il a lieu de renvoyer à la commission la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture, visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification (n° 357 rectifié, 2020-2021).
Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 7, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour dix minutes, un orateur d’opinion contraire, pour dix minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas deux minutes et demie, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à Mme Monique Lubin, pour la motion.
Mme Monique Lubin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, certaines manières de légiférer installées par l’actuelle majorité gouvernementale étaient déjà très contestables avant l’irruption de la covid-19 dans nos vies. La crise sanitaire les rend encore plus difficilement supportables, a fortiori quand il s’agit de réformer dans la précipitation le système de santé, comme c’est le cas avec la présente proposition de loi.
Très insatisfaisante sur le fond, celle-ci atteste la constance du mépris exprimé par l’exécutif aussi bien à l’encontre du Parlement que des partenaires sociaux. Tels sont les constats qui motivent la motion demandant le renvoi à la commission que je présente aujourd’hui au nom du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain du Sénat.
Il y a en effet beaucoup à redire quant au traitement réservé au Parlement et au travail législatif. La genèse, le contenu et les modalités d’examen de la présente proposition de loi en témoignent.
Nul ne l’ignore, si le texte soumis à discussion aujourd’hui est marqué du sceau de l’initiative parlementaire, il est d’abord une commande du Gouvernement.
La proposition de loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification est censée traduire dans notre droit les mesures non budgétaires annoncées dans le cadre du Ségur de la santé. Il aurait été opportun que ces mesures fassent l’objet d’un projet de loi et non d’un texte d’origine parlementaire.
Il s’agit pour l’exécutif d’obtenir la transposition dans la loi d’un certain nombre des dispositions du Ségur de la santé, mais en se soustrayant aux contraintes qui sont liées à l’élaboration et à l’examen d’un texte d’origine gouvernementale. En procédant de la sorte, le Gouvernement se libère de deux obligations : le texte n’a fait l’objet ni d’un avis du Conseil d’État ni d’une étude d’impact.
Pourtant, le respect que nous devons aux soignants aurait exigé qu’un tel texte soit non seulement sécurisé juridiquement par un avis du Conseil d’État, mais qu’il fasse également l’objet d’une étude d’impact afin que ces conséquences soient analysées.
Les études d’impact ne sont décidément pas le fort de ce gouvernement : on se souvient de celle qui accompagnait le projet de loi portant réforme des retraites, étrillé par le Conseil d’État.
Cette proposition de loi se veut pourtant ambitieuse. Par conséquent, elle est susceptible d’affecter lourdement un système de santé dont nous avons plus que jamais besoin qu’il fonctionne efficacement.
Je m’interroge donc sur le sens des circonstances et l’appréhension par la majorité de la gravité de ses responsabilités et de ses obligations. Elle improvise sans méthode et sans rigueur la réforme d’un système de santé dont le bon fonctionnement est aujourd’hui plus que jamais impératif. C’est pourtant le moment de bien faire les choses ou de ne pas les faire. Nous n’y sommes pas !
Les sénateurs du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain estiment que les dispositions que porte cette proposition de loi ne sont pas inscrites dans le bon véhicule législatif. Celui-ci pose d’emblée problème : à l’absence d’avis du Conseil d’État et d’enquête publique s’ajoute le fait que ce texte a été élaboré au mépris de toute véritable concertation avec les parties prenantes.
Ce n’est pas un hasard si la majorité des professions concernées par cette proposition de loi sont vent debout contre ses dispositions, qui ont également suscité la profonde indignation des syndicats et des professionnels de santé, et un rejet unanime de la part de l’ensemble des acteurs.
La suppression de l’article 1er, portant initialement création d’une profession médicale intermédiaire, est à ce titre emblématique. La fronde qu’il a provoquée a conduit à sa piteuse évolution, à l’Assemblée nationale, en demande de rapport relatif à la création d’une profession médicale intermédiaire, puis à sa suppression pure et simple dès le stade de l’examen en commission au Sénat.
Ce manque de concertation relève d’une méthode et traduit une conception très descendante de la politique. Elle joue des tours au Gouvernement, car elle se manifeste notamment par un recours accru aux ordonnances et aux mesures réglementaires qui empiètent excessivement sur le domaine du Parlement.
Ainsi, la commission des affaires sociales n’a pas manqué de souligner le paradoxe consistant pour le Gouvernement à promouvoir des dispositions qui ont aussi fait l’objet d’ordonnances et de mesures réglementaires. Les dispositions déjà modifiées par la loi d’accélération et de simplification de l’action publique, promulguée il n’y a même pas deux mois et demi, le sont, par ailleurs, de nouveau dans cette proposition de loi.
Il en va de même pour les dispositions concernant le recrutement des praticiens hospitaliers et la gouvernance des hôpitaux. Comme les dispositifs de coopération renforcée, ils étaient pourtant au cœur du décloisonnement censé être porté par la loi de juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation de notre système de santé.
Comment les professionnels peuvent-ils s’emparer des modalités d’exercice coordonné et de coopération locale, alors que celles-ci sont constamment remaniées ? Il en va de même pour les instances de gouvernance de l’hôpital : faute de vision globale, le Gouvernement s’enlise au milieu du gué.
Aujourd’hui, alors même que la plupart des ordonnances concernées n’ont pas encore vu le jour, le Gouvernement via sa majorité parlementaire accroît le flou en revenant sur des dispositifs non encore appliqués. Non seulement le Parlement a été dessaisi de ses prérogatives en 2019, mais si l’on en croit le résultat, il l’a été pour rien. Quant au Gouvernement, il n’est toujours pas au clair sur sa conception de notre système de santé.
Le manque de sérieux dans la démarche est encore confirmé par le temps imparti pour l’examen de ce texte. À l’origine, cette proposition de loi, qui se veut pourtant ambitieuse et compte plus d’une trentaine d’articles, et dont certaines dispositions sont susceptibles de changer la gouvernance des hôpitaux, ne devait être discutée qu’en une demi-journée. Comprenant son erreur, le Gouvernement a demandé une modification de l’ordre du jour en dernière minute afin de permettre une demi-journée supplémentaire de débat.
Ce changement contraint n’a cependant rien de satisfaisant. On nous demande de travailler dans la précipitation, sans pouvoir nous appuyer sur une enquête publique, pourtant nécessaire, pas plus que sur un avis du Conseil d’État, tout aussi nécessaire. Cette absence d’éléments justifierait à elle seule de siéger pendant plusieurs jours pour pallier les incohérences du texte et pour éviter l’adoption de mesures qui risquent de déstabiliser notre système de santé au plus mauvais moment.
De fait, de l’Assemblée nationale au Sénat, cette proposition de loi, très succincte lorsqu’elle a été déposée par ses auteurs sur le bureau de la chambre basse, a d’ores et déjà fait l’objet d’un travail de réécriture extrêmement important, témoignant du grand manque de rigueur rédactionnelle et juridique de certains articles. Ce travail de réécriture a été aussi bien l’œuvre du Gouvernement que des rapporteurs ; c’est dire l’impréparation de ce texte.
Procéder ainsi est irresponsable et irrespectueux à l’égard du travail parlementaire, mais aussi vis-à-vis des soignants. L’examen de cette proposition de loi aurait pu être l’occasion d’un débat et d’une réforme de la gouvernance hospitalière que la pandémie de la covid-19 a rendue plus que jamais nécessaire. Mais le choix du véhicule législatif, le temps très restreint imparti aux débats et l’engagement de la procédure accélérée nous empêchent de les mener sereinement.
Il est ainsi flagrant que cette proposition de loi dépourvue de fil conducteur n’est qu’une tentative incomplète d’assemblage de mesures mal articulées entre elles. Il n’y a pas de vision globale de ce que devrait être notre système de santé rénové, pas de projet pour lui. Nous ne pouvons pourtant pas nous payer le luxe de voter des dispositions redondantes, insatisfaisantes, créant de nouvelles contraintes dont les conséquences n’ont pas été préalablement évaluées.
Sur les trente-trois mesures que comporte le Ségur de la santé, seulement cinq sont reprises dans la proposition de loi. Elles ne font l’objet que de six des quarante-deux articles que comporte le texte après son passage à l’Assemblée nationale. C’est bien mince pour un texte censé traduire le volet non financier des conclusions du Ségur de la santé.
L’article 10 de la proposition de loi correspond à la mesure 3 de ce Ségur, qui vise à mettre fin aux abus de l’intérim médical.
La mesure 7 du Ségur, relative au renforcement du déploiement de la pratique avancée, permet à des infirmiers de réaliser des missions élargies par rapport à leur champ de compétences initial afin de répondre aux évolutions de l’organisation des soins. Cette mesure, qui était prévue à l’article 1er, a été supprimée au profit d’une demande de rapport par l’Assemblée nationale, puis, comme je l’indiquais, cette demande de rapport a elle aussi été supprimée lors de l’examen en commission par le rapporteur.
La mesure 18, reprise à l’article 5 de la proposition de loi, vise à donner plus d’autonomie aux services des hôpitaux en matière de gestion et d’adaptation de leur organisation. Il s’agit de revenir à des unités plus concrètes, par exemple les services d’oncologie ou de cardiologie, plutôt que de renvoyer aux superstructures.
La mesure 19, liée à la précédente, prévoit la fin de l’obligation pour les hôpitaux de s’organiser en pôles d’activité réunissant plusieurs services.
La mesure 22 du Ségur vise, quant à elle, à mieux associer les soignants et les usagers à la vie de l’hôpital. Elle trouve sa traduction dans plusieurs dispositions du texte, notamment celle qui prévoit la possibilité de fusionner les CME et les CSIRMT.
La mesure 27 du Ségur visant à lutter contre les inégalités en santé, ou encore la mesure 31 visant à renforcer l’offre de soutien psychiatrique et psychologique, entre autres, sont absentes de la présente proposition de loi. La mise en place d’un un numéro national de prévention du suicide disponible 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, le recrutement de 160 psychologues supplémentaires dans les centres médico-psychologiques ou l’ouverture de consultations de psychologues ambulatoires seraient pourtant des mesures nécessaires dans une période où la santé mentale des Français est mise à mal par la pandémie de covid-19 et ses conséquences.
Enfin, si les dispositions concernant les sages-femmes vont dans le bon sens, elles auraient pu faire l’objet d’un texte à part.
Je conclurai mon intervention en soulignant que ce texte manque cruellement d’une vision globale. Nous n’avons pas suffisamment de recul pour nous prononcer sur des mesures dont les effets n’ont pour l’instant pas pu faire l’objet d’une quelconque évaluation. Nous ne pouvons pas légiférer sans visibilité.
Par conséquent, nous demandons un renvoi du présent texte en commission afin de nous donner les moyens de l’examiner dans des délais plus appropriés et de disposer de davantage de visibilité quant aux ordonnances. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
M. Alain Milon, rapporteur. Le renvoi à la commission ne nous permettrait pas de légiférer en disposant d’une plus grande visibilité, notamment sur les ordonnances en cours.
Cela reviendrait de plus à nier le travail important que nous sommes parvenus à conduire, dans des délais certes réduits, et à l’issue duquel la commission, comme je l’ai précédemment indiqué, a adopté une version largement remaniée de ce texte.
En outre, même si nous connaissions le contenu des ordonnances en cours de publication, nous ne pourrions empiéter, par nos amendements, sur le champ de ces habilitations, en application de l’article 38 de la Constitution.
Enfin, je doute qu’un délai supplémentaire nous permette de lever toutes les limites que nous reconnaissons à ce texte. En particulier, l’appréciation de son périmètre resterait contrainte de la même façon, nous empêchant de compléter la proposition de loi par d’autres volets intéressants.
Au final, je crains que l’effet concret de l’adoption de cette motion ne se limite à retarder l’avancée de nos travaux. Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Madame la sénatrice Monique Lubin, en espérant que nous aurons le débat – évidemment légitime – sur le fond, permettez-moi de revenir sur la forme.
Vous avez évoqué un mépris du Parlement et des partenaires sociaux. Or, croyez-le ou non, ce texte est le fruit d’une initiative parlementaire de A à Z ! (M. Bernard Jomier rit.) C’est une parlementaire qui l’a écrit de la première à la dernière ligne, et cela avant la mise en place des accords du Ségur de la santé.
Le texte a été transmis au Sénat lors de la première semaine du mois de décembre, c’est-à-dire il y a un peu plus de deux mois. En l’occurrence, madame la sénatrice, j’ai donc le sentiment que le Parlement a été respecté.
On peut certes considérer que les propositions de loi sont une mauvaise option dans la mesure où elles nous privent, de fait, d’une analyse du Conseil d’État. Mais la Constitution les autorise, et ce serait mépriser le Parlement – ce n’est pas mon cas – que d’être défavorable à l’initiative parlementaire en matière législative.
Quant aux partenaires sociaux, pour la première fois depuis des décennies, les accords du Ségur de la santé ont convaincu une majorité de soignants, de médecins, de non-soignants et d’étudiants. Ces accords ont été signés par Force ouvrière, l’UNSA et la CFDT.
Si ces organisations avaient été méprisées, elles n’auraient pas apposé leur signature au bas de ces accords. Elles ne nous auraient pas non plus renouvelé leur confiance, le 11 février, quand nous avons étendu le périmètre du Ségur aux personnels du secteur médico-social rattachés à un établissement de santé publique, un sujet auquel les parlementaires de tous bords nous avaient sensibilisés.
Enfin, la mission Claris – mission de très grande qualité dont s’est beaucoup inspirée la députée Stéphanie Rist – a mobilisé des dizaines de milliers de soignants et la plupart des conférences, des collèges, des syndicats. Le consensus qui s’est dégagé atteste du fait que ces mesures sont partagées. Vous pouvez ne pas être d’accord, mais je ne perçois pas le mépris que vous évoquez.
J’émets un avis défavorable sur la motion demandant le renvoi à la commission.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Les arguments avancés par ma collègue Monique Lubin rejoignent pour beaucoup les critiques formulées par le groupe communiste républicain citoyen et écologiste, lesquelles ont justifié que nous déposions une motion tendant à opposer la question préalable.
En réponse à ces critiques, la majorité de droite de la commission indique que nous allons débattre. Or nous savons que le débat sera très restreint. Nous savons aussi que les mesures prises aujourd’hui s’inscrivent absolument dans la même logique que les politiques ayant conduit notre système de santé dans sa situation actuelle.
Certains se sentent peut-être offensés, mais telle est la réalité des faits : les hôpitaux sont en surchauffe et les mesures du Ségur, censées répondre aux revendications des personnels, n’ont pas satisfait leurs attentes. Ces derniers souhaitent certes que leurs métiers soient revalorisés, mais ils attendent aussi que l’on arrête de fermer des lits, que l’on embauche et que l’on rende les carrières attractives. Or ces revendications n’ont pas été prises en compte à la hauteur des besoins.
Lorsque nous essayons de dialoguer au sein de cet hémicycle avec le Gouvernement, on nous répond que celui-ci est sachant tandis que les autres ne savent pas. Ce n’est pas ainsi que nous élaborerons des politiques permettant de répondre aux besoins des populations et aux attentes des personnels !
Nous n’avons guère d’illusions quant au sort de cette motion demandant le renvoi à la commission puisque la majorité Les Républicains de la commission demande son rejet. Nous la voterons cependant, par principe, parce que nous pensons que les dés sont pipés, qu’un véritable débat n’a pas eu lieu et que les mesures à la hauteur des besoins n’ont pas été prises. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER.)
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. La commission a indiqué que le renvoi à la commission ne présenterait pas d’intérêt en termes de calendrier. Cela revient à devancer les desiderata du Gouvernement !
Cette motion de renvoi à la commission vise à nous donner le temps de prendre connaissance des ordonnances qui concernent directement ce texte. Puisque celles-ci seront publiées en mars, nous pourrions examiner le texte ensuite.
Ce délai permettrait également au Gouvernement, qui, encore aujourd’hui, déposait des amendements relatifs aux diététiciennes ou aux préparateurs en pharmacie, de les inclure dans la proposition de loi. En effet, bien que ces sujets soient importants, ces amendements sont à ce stade irrecevables.
Cela montre l’impréparation de ce texte et la nécessité de délibérer de façon éclairée, en ayant connaissance des ordonnances y afférentes. On anticipe ici la volonté du Gouvernement de passer en force, et le fait qu’il demanderait à la commission, si la motion était adoptée, de se réunir immédiatement et nous ferait siégeait vendredi, samedi et peut-être dimanche…
Pour ma part, je ne suis pas soumis au travers de mes votes aux positions supposées du Gouvernement ! Je veux croire qu’il reste à celui-ci suffisamment de sagesse pour constater, comme nous, qu’il est temps de reporter l’examen de ce texte après la publication des ordonnances.
Par ailleurs, monsieur le ministre, la concertation et l’accord ont porté non pas sur cette proposition de loi, mais sur le Ségur de la santé. Les auditions conduites par le rapporteur et par la commission ont montré un désaccord général sur le contenu de ce texte. Celui-ci ne fait pas l’objet d’un large accord – et encore moins d’un consensus – des professionnels de santé, qu’ils exercent à l’hôpital public et ou en ville.
Pour toutes ces raisons, nous estimons que nous avons besoin de davantage de temps et qu’il est plus raisonnable de renvoyer ce texte en commission.
Mme la présidente. Je mets aux voix la motion n° 70, tendant au renvoi à la commission.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 83 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 345 |
Pour l’adoption | 91 |
Contre | 254 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Discussion générale (suite)
Mme la présidente. Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Véronique Guillotin.
Mme Véronique Guillotin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons revêt par son titre de nombreux espoirs : « améliorer le système de santé par la confiance et la simplification ».
La crise sanitaire qui a frappé notre pays de plein fouet a mis en lumière les forces de notre système de soins, mais elle en a également relevé les faiblesses.
Pendant la lente décrue de la première vague de contaminations, le Gouvernement a annoncé l’initiative intéressante d’un Ségur de la santé qui doit permettre une évolution tant attendue de l’organisation de notre système de santé.
La proposition de loi dont nous débattons aujourd’hui a pour objectif de traduire le versant non financier des conclusions du Ségur, enrichi des propositions du rapport Claris sur la gouvernance de l’hôpital. Toutefois, le véhicule législatif utilisé et la préparation concomitante d’ordonnances par le ministère de la santé compliquent l’exercice et nous privent d’une étude d’impact et d’un avis du Conseil d’État.
Pour autant, la majorité du groupe RDSE, tout en entendant les raisons qui ont présidé à leur dépôt, n’a voté ni la motion tendant à opposer la question préalable ni la motion demandant le renvoi à la commission, car poursuivre les débats sur des sujets majeurs tels que la gouvernance des hôpitaux, les coopérations, l’attractivité des carrières ou encore l’intérim permettra – j’en suis sûre – d’enrichir le texte. Tel est l’état d’esprit qui est le nôtre.
J’évoquerai en premier lieu les protocoles locaux de coopération. Le texte de la commission, dans son article 1er, revient au cadre juridique issu de la loi Santé de juillet 2019 et permet ainsi d’étendre ces protocoles aux professionnels de santé travaillant de manière coordonnée et hors établissement. Cette disposition répond aux besoins d’une médecine plus coordonnée au bénéfice du patient, en ville comme à l’hôpital.
La faible démographie médicale, mais aussi l’explosion des maladies chroniques, l’aspiration des jeunes à trouver un équilibre entre vie professionnelle et vie privée ainsi que l’appétence pour l’exercice en équipe pluridisciplinaire, impliquent absolument et nécessairement l’évolution du champ des compétences des professionnels de santé.
Nous aurons à examiner de nombreux amendements relatifs aux sages-femmes et aux auxiliaires médicaux. Certaines propositions vont plus loin que d’autres, mais une seule philosophie doit nous guider : il faut améliorer et fluidifier le parcours du patient sans le détricoter. Le médecin généraliste est et doit en rester le pivot.
Le Ségur a également mis en évidence l’existence, bien antérieure à la crise du covid, d’une perte d’attractivité des métiers de la santé. Les hôpitaux et les structures médico-sociales peinent d’ailleurs à recruter.
La revalorisation légitime des salaires ne permettra pas, seule, d’y remédier. De bonnes conditions de travail, davantage d’effectifs dans les services, une gouvernance moins technocratique et plus médicalisée, une CME aux missions et au rôle renforcés, des recrutements simplifiés : telles sont les propositions du Ségur et du rapport Claris, dont certaines seront examinées dans cette proposition de loi.
Un sujet, en revanche, n’y est pas abordé, alors qu’il constitue une préoccupation forte des fédérations. Il s’agit de l’asymétrie des contraintes et des rémunérations entre les carrières médicales publiques, privées ou associatives, et des freins à l’exercice d’un médecin sous différents statuts. Aussi, je proposerai d’y remédier en partie par la réintroduction de deux articles, dont l’article 14 bis, lequel, au-delà de la remise d’un rapport, permettra de ne pas enterrer trop précocement cette problématique.
S’il est un sujet dont la crise a relevé les limites, c’est bien celui de la gouvernance des établissements. L’article 5 consacré à l’organisation interne restaure la fonction de chef de service non pas en opposition, mais en complémentarité de celle de chef de pôle.
L’organisation des pôles doit absolument rester une possibilité pour chaque établissement. La création de chefs de service et de chefs de pôle adjoints améliorerait encore le fonctionnement de l’hôpital. Le groupe RDSE a déposé des amendements en ce sens.
Comment parler d’organisation sans évoquer les GHT ? Installés à marche forcée, leur fonctionnement est hétérogène. S’il n’est pas souhaitable d’imposer aux établissements de se rapprocher, les rapprochements méritent d’être encouragés, sur la base du volontariat.
L’article 9 de la proposition de loi ouvre le directoire de l’hôpital en prévoyant la possibilité pour le directeur de désigner des personnalités qualifiées. C’est à notre sens une bonne chose. Je regrette cependant l’exclusion des étudiants au sein de ce directoire.
Je terminerai en évoquant les abus de l’intérim médical qui pénalisent lourdement, à la fois, les finances et le fonctionnement de l’hôpital. Ce n’est plus acceptable aujourd’hui. Malgré la volonté exprimée en 2017 par le Gouvernement d’y mettre un terme, force est de constater que le problème perdure.
Il est devenu urgent de mettre fin à ces pratiques que je qualifierais de scandaleuses, et de permettre enfin l’application du plafond des rémunérations. L’hôpital ne peut pas et ne doit pas être une zone de non-droit dans laquelle certains professionnels imposeraient des exigences financières déraisonnables.
Cette proposition de loi se présente comme un patchwork de mesures qui s’expliquent par le destin singulier de ce texte, pensé avant la crise sanitaire, puis saisi opportunément comme le moyen d’y intégrer quelques mesures du Ségur et tout ce qui n’entre pas dans le champ des ordonnances. Suffira-t-elle à satisfaire les attentes ?
En tout état de cause, le groupe RDSE réservera son vote en fonction de l’évolution des discussions et il émet le vœu que les mesures consensuelles issues du Ségur et du rapport Claris puissent trouver une traduction législative. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, UC et INDEP.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre groupe a déposé une motion tendant à opposer la question préalable, car nous pensons que ce texte ne peut pas être amélioré.
Comme l’a rappelé ma collègue Laurence Cohen, sa philosophie globale est contraire au service public national de la santé que nous défendons depuis plusieurs années. Derrière les mots « simplification » et « confiance », il faut lire : « management public des hôpitaux et autonomie renforcée pour gérer l’austérité ».
La proposition de loi de la députée Rist, qui est en réalité celle du Gouvernement, est pour le moins hétéroclite mais non dépourvue de cohérence puisqu’elle tend à l’affaiblissement du service public. Plutôt que d’investir massivement et durablement dans notre système de santé, ce texte propose de ronger les murs porteurs de l’hôpital. Après un Ségur raté, vous nous proposez une loi fourre-tout qui ne répond en rien aux attentes des soignants, ni même des usagers.
Depuis trente ans, les politiques d’austérité ont entraîné la fermeture d’hôpitaux, de maternités, de centres de santé publique, de caisses d’assurance maladie. L’éloignement des services publics a créé une véritable rupture d’égalité, notamment pour les plus fragiles.
À l’heure des débats sur le séparatisme, votre politique d’affaiblissement des services publics renforce le séparatisme financier qui met son argent au Luxembourg.
Vous renforcez aussi le séparatisme économique qui licencie après avoir bénéficié de milliards d’aides publiques.
Enfin, vous renforcez le séparatisme social de celles et ceux qui n’ont pas les moyens d’accéder aux soins.
Cette proposition de loi donne l’illusion aux personnels hospitaliers qu’en contrepartie du renforcement de l’autonomie des hôpitaux, ils pourront dégager des économies suffisantes pour sortir des baisses des dotations. Quelle déception ! Quels mensonges !
Alors que certains services n’ont même plus les moyens d’acheter des couvertures pour les malades ni de renouveler le matériel vétuste, ce texte va aggraver la situation.
En renforçant l’autonomie des hôpitaux, vous accélérez la mise en concurrence des établissements publics de santé entre eux, comme si celle avec les établissements privés lucratifs et non lucratifs ne suffisait pas.
Vous créez une profession d’auxiliaire médical en pratique avancée. Vous avez certainement oublié l’activité professionnelle des infirmiers anesthésistes diplômés d’État, qui se livrent depuis de nombreuses années à un exercice de pratique avancée ! Je suis certaine que vous allez revoir votre copie et que vous allez les écouter…
Ne pensez-vous pas qu’il est temps, monsieur le ministre, de satisfaire les véritables besoins des personnels médicaux et paramédicaux ? C’est urgent et nécessaire. Arrêtez donc de présenter des lois qui ne sont que du bricolage à cinq sous !
Les personnels ont besoin de considération, de recrutements, de revalorisation salariale et d’amélioration de leurs conditions de travail. Telles sont les solutions pour remédier à la pénurie.
Plutôt que de renforcer le pouvoir des chefs de service, il faut renforcer la démocratie sanitaire et garantir une meilleure représentation de l’ensemble des usagers, des personnels et étudiants en santé, dans la prise de décision.
La réforme des universités qui a suivi le même chemin que celle de la santé offre un exemple instructif. Le renforcement de l’autonomie des facultés s’est traduit par une baisse du budget de l’enseignement supérieur de 10 % entre 2008 et 2018. Dans le même temps, le nombre d’étudiants progressait de 20 %.
L’accélération de l’intégration des hôpitaux dans les GHT, prévue à l’article 7, ne répond absolument pas aux revendications des personnels hospitaliers. Elle éloigne des usagers les dispositifs de santé dont ils pourraient avoir besoin.
Votre dispositif anti-intérim se retourne contre les directeurs d’établissement, qui devront fermer des services plutôt que recourir à l’intérim s’ils veulent éviter les sanctions financières. Il conviendrait au contraire de sanctionner les entreprises de travail temporaire qui ne respectent pas le plafond de rémunération.
Nous proposons de rétablir les gardes de nuit, du week-end et des jours fériés, en indemnisant correctement les médecins qui effectuent ces astreintes.
Quant aux besoins des personnes en situation de handicap, vous y répondez par la mise en place d’une plateforme unique d’accès aux droits. Pourquoi pas ? Il est en effet indéniable que l’accès aux droits est un vrai parcours du combattant tant pour ces personnes que pour les aidants.
Cependant, où sont les mesures pour les établissements médico-sociaux ? Où sont les revalorisations salariales ? Les décrets pris à l’automne ont exclu du Ségur de la santé les personnels exerçant dans ce secteur. Or la négociation en cours pour la fusion des conventions collectives risque de dégrader encore leurs conditions de travail. Un numéro vert ou une plateforme peuvent être un progrès, mais celui-ci ne doit pas cacher la misère !
Pour toutes ces raisons, le groupe CRCE votera contre cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Élisabeth Doineau. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Élisabeth Doineau. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la crise sanitaire a révélé les limites de notre système de santé. Elle nous a aussi permis de « reprendre » conscience du travail remarquable réalisé au quotidien par tous les professionnels qui participent à notre parcours de santé. Sommes-nous à la hauteur de leur investissement ? Répondons-nous clairement à leurs attentes légitimes ?
Lancé en mai 2020, à l’issue du premier confinement, le Ségur de la santé a suscité beaucoup d’espoirs. Cet effort inédit est incontestablement une belle avancée. En revanche, nombreux sont ceux qui nous disent avec amertume qu’il ne s’agissait pas du Ségur de la santé mais plutôt du Ségur de l’hôpital public
Jour après jour, les parlementaires ont été et sont encore interpellés par des professionnels qui se retrouvent exclus des revalorisations sans en comprendre les raisons. Récemment, ce sont les personnels de certains établissements médico-sociaux qui nous ont alertés.
À la fin de l’année dernière, nous étions soixante-quatre sénateurs à interpeller le ministère de la santé pour qu’il trouve une réponse adaptée à l’ensemble des professions « oubliées du Ségur ».
Aujourd’hui, nous examinons la proposition de loi de notre collègue députée, Mme Stéphanie Rist, visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification. Elle a pour objet de concrétiser les mesures non budgétaires du Ségur de la santé signé par les partenaires sociaux.
Avant d’entrer dans le détail de l’examen du texte, je souhaite vous faire part de quelques remarques générales.
Alors que nous examinons cette proposition de loi composée de trente-cinq articles dans le cadre d’une semaine gouvernementale, l’ordre du jour prévoyait initialement de ne lui consacrer qu’une seule et unique demi-journée. Cela promettait un examen au pas de course ! Je salue donc l’ouverture de la journée de jeudi pour examiner ce texte dans de bonnes conditions.
Une proposition de loi ne permet ni étude d’impact ni avis du Conseil d’État. Je le regrette, car ce texte porte sur des questions fondamentales.
Un autre sujet qui m’inquiète tient au peu d’enthousiasme qu’ont manifesté celles et ceux que j’ai entendus lors des auditions. Les demandes d’entretiens et le nombre d’amendements proposés corroborent ce sentiment d’un manque total d’adhésion à cette proposition de loi. Je ne peux que regretter que les uns se sentent injustement écartés, quand les autres sont pour le moins déconcertés. Nous devons y prendre garde, car nous ne sommes pas loin d’observer une réelle démotivation des professionnels.
Je salue notre rapporteur, Alain Milon, qui a mené un important travail d’auditions auquel j’ai essayé de participer le plus possible, ce qui m’a permis de livrer ce témoignage sur le manque d’enthousiasme suscité par le texte.
Enfin, cette proposition de loi se veut la traduction de la partie non budgétaire des conclusions du Ségur de la santé. Force est de constater qu’elle n’atteint pas cet objectif, puisque seulement cinq des trente-trois mesures du Ségur se retrouvaient dans le texte de commission de l’Assemblée nationale.
J’entends les arguments de son auteure : « Nombre de mesures attendues par les professionnels de la santé relèvent du niveau réglementaire et des ordonnances prévues dans le cadre de la loi Ma santé 2022, et ne figurent donc pas dans ce texte. »
Cependant, nous sommes en droit de nous interroger sur l’intitulé de cette proposition de loi. Vise-t-elle réellement à améliorer notre système de santé par la confiance et la simplification ? J’en doute.
S’il y a urgence à redonner de l’attractivité aux carrières au sein des hôpitaux publics, les sentiments d’injustice et de frustration ne cessent de monter sur le terrain. Il faudra un jour y répondre !
Je m’arrête là pour les considérations générales, et j’en viens aux articles de la proposition de loi.
Je commencerai par ce que je considère comme des avancées bienvenues. Il s’agit du chapitre II relatif à l’évolution des professions de sage-femme et de certains auxiliaires médicaux.
Si les articles 2 et suivants n’engagent pas de révolution, ils sont autant de bouffées d’oxygène pour les professions concernées et surtout pour les patients. Il conviendrait d’amplifier ce mouvement.
Aussi, une fois n’est pas coutume, je ne partage pas la position de notre rapporteur – qu’il me pardonne ! – sur l’article 2 quinquies B qui permettait aux sages-femmes d’adresser leurs patientes à un médecin spécialiste, sans pénaliser celles-ci en termes de remboursement des frais de soins par l’assurance maladie.
Je ne crois pas que cette disposition induise une confusion dans la logique du parcours de soins coordonné, articulé autour du médecin traitant. C’est au contraire une mesure de simplification du parcours des patientes qui serait bienvenue, d’autant qu’elle est conforme à l’objet de la proposition de loi.
Nous le savons, le temps de la grossesse est un temps à part dans la vie d’une femme. Les sages-femmes n’ont donc pas vocation à se substituer aux médecins.
Aussi, dans un objectif de simplification du parcours de santé et d’un meilleur accès aux soins, j’ai déposé plusieurs amendements pour amplifier ce qui restait à l’état d’esquisse dans ce chapitre II.
J’appelle cependant le ministre à la vigilance sur le fait que nous ne pouvons pas étendre indéfiniment le champ d’intervention de ces professionnels sans améliorer leur statut.
Concernant la mesure phare portée initialement par l’article 1er, je partage en tout point l’analyse de notre rapporteur. Introduire une nouvelle strate de professionnels de santé ne peut se faire sans l’assentiment des principaux concernés. Cela n’a pas été le cas. Dont acte.
Le chapitre IV relatif à la gouvernance des établissements publics de santé suscite de vives réactions. Nombreux sont les acteurs de proximité qui ne comprenaient pas que les préconisations du professeur Claris n’aient pas été reprises. Je remercie notre rapporteur d’avoir respecté ce travail unanimement salué en réécrivant ces articles.
Dans la même dynamique, l’article 5 modifié par la commission est bienvenu tant la notion de « service » fait consensus chez les professionnels.
Enfin, nous ne pouvons que souscrire à l’objectif d’associer davantage le personnel soignant à la gestion de l’hôpital, notamment par le biais de l’élaboration du projet médical, dont la finalité est de répondre aux besoins de santé de la population.
Pour conclure, cette proposition de loi a fait naître des sentiments très ambivalents, oscillant entre l’espoir et la déception. Les mesures contenues dans le texte ne parviennent pas à se hisser à la hauteur des ambitions et des attentes bien légitimes de celles et ceux qui donnent le meilleur d’eux-mêmes en cette période particulièrement éprouvante.
Le Sénat apporte un certain nombre d’améliorations salutaires. Aussi, le groupe Union Centriste votera favorablement le texte ainsi modifié. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi qu’au banc de la commission.)
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je crains que ce texte ne simplifie pas plus qu’il ne crée davantage de confiance.
À l’issue de son passage en commission au Sénat, neuf articles ont été supprimés. Le texte a un peu dégonflé, sans atteindre toutefois la taille usuelle d’une proposition de loi. Le rapporteur a procédé à un important travail de réécriture sur de nombreux sujets complexes et pourtant absolument essentiels pour notre système de santé.
Nous ne pouvons que déplorer le rejet de la motion de renvoi à la commission, qui aurait pu nous octroyer le temps nécessaire pour effectuer un travail à la hauteur des enjeux, en pleine conscience notamment des ordonnances en préparation.
Monsieur le ministre, vous faites le choix d’un examen du texte bâclé. Or nous considérons que les soignants mobilisés depuis un an pour faire face aux différentes vagues de l’épidémie méritent mieux.
Je m’attarderai brièvement sur quelques articles qui ont particulièrement retenu notre attention.
L’article 1er, supprimé par le rapporteur, visait à créer une profession médicale intermédiaire entre infirmiers et médecins sans en détailler les modalités techniques et juridiques. Face au mécontentement général, il est devenu une simple demande de rapport dressant un état des lieux de la mise en place des auxiliaires médicaux en pratique avancée et des protocoles de coopération. Or ce sont ces mêmes protocoles de coopération que l’article 1er bis visait à étendre, avant donc qu’ils ne soient évalués ! Cherchez la logique…
L’article 1er bis n’était, en outre, guère compréhensible dans sa version initiale, puisqu’il avait pour objet d’étendre les protocoles de coopération à tout le champ de l’exercice coordonné, alors même que les dispositions votées dans la loi Santé de 2019 sont encore à peine appliquées.
Le chapitre II introduit quelques dispositions attendues et réclamées par les sages-femmes depuis longtemps. Même si c’est un progrès, d’autres professions nécessitent encore qu’on leur prête attention. Par exemple, le rôle des infirmières et des infirmiers dans l’offre de soins demeure insuffisamment reconnu. Nous proposerons des amendements pour que de nouvelles compétences leur soient octroyées.
En ce qui concerne la gouvernance de l’hôpital, l’article 5 part d’une intention positive, puisqu’il a pour ambition de réaffirmer le rôle des services et du chef de service. Nous pensons en effet que ces derniers constituent une unité pertinente dans la prise de décision, d’organisation et de mise en œuvre de l’offre de soins, et que les réformes successives de l’hôpital les ont trop éloignés des instances décisionnelles.
Pour autant, l’article 5 procède-t-il réellement à ce changement de cap ? Je ne le crois pas, et je doute que nous puissions promettre aux personnels hospitaliers le changement qu’ils attendent, si nous ne posons pas clairement la question de la répartition des compétences entre les pôles d’activités et les services.
Dans la même logique, nous défendons une place plus importante donnée à la parole des personnels paramédicaux représentés au sein de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques. La gestion de la crise de la covid à l’hôpital a souvent permis de « mettre autour de la table » la direction, les médecins et les soignants, dans le cadre d’un travail collectif pour organiser la prise en charge. Les verrous financiers ne sont pas les seuls à être passés au second plan pendant cette crise : celui de la verticalité, souvent bureaucratique, qui caractérise la prise de décision à l’hôpital a lui aussi sauté temporairement. Telle est la direction dans laquelle il nous faut travailler pour faciliter la reconnaissance de l’implication des soignants dans la prise en charge quotidienne des patients.
Pour cette raison, nous nous opposerons aux dispositions de l’article 6 qui prévoient la fusion de la commission médicale d’établissement et de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques (CSIRMT).
Nous sommes convaincus qu’il faut au contraire conforter une plus grande autonomie de la CSIRMT, et par conséquent ne pas permettre une telle fusion.
L’article 8 vise à introduire la possibilité pour un établissement de santé, sur son initiative, de déroger à une organisation des soins en pôles d’activités, ou d’adopter une gouvernance sans directoire, qu’il s’agisse de la CME ou de la CSIRMT.
Il nous paraît surprenant d’avoir introduit dans le texte plusieurs articles visant à modifier la gouvernance de l’hôpital, afin d’accorder davantage de place aux services et aux soignants, alors que cet article 8 permettrait d’y déroger ! De plus, celui-ci ne répond à aucun souhait exprimé sur le terrain et il ne satisfait aucune demande formulée dans les rapports Claris et Notat.
Enfin, la proposition de loi s’achève sur un énième article décevant sur le handicap. Le Ségur de la santé n’a-t-il pas d’autres ambitions pour le secteur médico-social que la commande d’un rapport et l’instauration d’une plateforme en ligne venant s’ajouter à un numéro vert déjà en place et dont tout le monde s’accorde à dire qu’il ne remplit pas son rôle ?
Monsieur le ministre, il est difficile de masquer notre grande insatisfaction, voire notre colère, alors que nous entamons l’examen de ce texte.
Vous avez refusé d’inscrire le sujet de la gouvernance dans les discussions du Ségur de la santé. Or cette proposition de loi, censée mettre en œuvre les mesures issues de ces discussions, comprend plus d’une dizaine d’articles, et non des moindres, sur la gouvernance !
La vérité, c’est que seulement quatre ou cinq mesures du Ségur figurent dans ce texte.
La vérité, c’est que vous avez refusé d’ouvrir des états généraux de l’hôpital public qui auraient permis de traiter convenablement de l’organisation et de la gouvernance de l’hôpital.
La vérité, c’est que l’on attend toujours le Ségur de la santé publique.
La vérité, c’est que vous nous demandez de voter cette loi dans la confusion. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)
Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Ravier.
M. Stéphane Ravier. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la crise du coronavirus aura eu un mérite : celui d’avoir mis en lumière l’état d’extrême fragilité, pour ne pas dire de délabrement, dans lequel se trouvaient nos hôpitaux, conséquence d’un abandon délibéré des pouvoirs publics, qui ont considéré la santé des Français comme un luxe qu’il convenait de réduire au nom d’une gestion financière saine.
Le résultat de l’approche prioritairement financière de la santé, nous le connaissons : le deuil des familles, la fatigue et la colère d’un personnel médical dont le courage ne suffit plus à encaisser la mutation du serment d’Hippocrate en discours d’hypocrite de la part de leurs ministres de tutelle successifs.
Le mal ne se résume pas à l’état catastrophique dans lequel se débat l’hôpital public. Il frappe tous les domaines liés à la santé. Au manque de places, d’équipements et de personnels dans nos hôpitaux s’ajoutent la pénurie de médecins en ruralité, la suradministration, les numerus clausus étriqués et dépassés, la disparition de notre production nationale de produits pharmaceutiques – qu’il s’agisse des masques chirurgicaux, mais aussi des vaccins et des médicaments –, l’abandon par l’État des chercheurs et des entreprises innovantes, les restrictions budgétaires sans vision de long terme imposées par Bruxelles.
Or, dans un pays qui se veut l’un des plus riches, des plus accueillants, des plus protecteurs, la santé des citoyens ne devrait pas être considérée d’abord comme un coût, mais comme un investissement. Ce texte est encore bien éloigné d’une telle perspective.
Les leçons de la crise sanitaire, qui est loin d’être terminée, ne sont manifestement pas tirées. Se préparer au pire, pour éviter de le vivre ou de le revivre, n’est toujours pas à l’ordre du jour.
Continuer de refuser le principe de précaution est une erreur, et refuser la souveraineté et donc l’indépendance sanitaire est une faute.
Dans cette proposition de loi je retiendrai et soutiendrai néanmoins la revalorisation de la profession de sage-femme.
En effet, les sages-femmes sont les garantes d’un accompagnement personnalisé optimal pour les femmes et les nouveau-nés. Elles mettent en place les meilleures conditions pour que se développe la natalité française, dans un contexte où l’on craint pour l’avenir. Elles suivent et rassurent les femmes pendant la grossesse, assurent l’accouchement et accompagnent la mère et l’enfant pour les soins de post-natalité.
Je soutiendrai dans ce texte l’élargissement du périmètre de leur activité. Trop souvent considérées comme exerçant une profession paramédicale, les sages-femmes doivent pouvoir varier leurs prérogatives médicales et obtenir une rémunération à la hauteur de leur diplôme, de leur statut et surtout de leurs responsabilités.
Cependant, le salaire ne fait pas tout, et il n’efface pas l’épuisement. Tout cela ne servira à rien si l’on n’augmente pas le nombre de sages-femmes.
Le mouvement populaire « Une femme = une sage-femme » pointe l’insuffisance des effectifs qui conduit à une prise en charge des patientes insatisfaisante, dans bien des cas.
Si nous souhaitons adapter les compétences des sages-femmes aux demandes actuelles, veillons aussi à introduire, dans les prochaines lois de finances, des crédits permettant une revalorisation de leur statut ainsi qu’un accroissement du personnel et des moyens mis à leur disposition, notamment en matière de formation.
Dans l’ensemble, alors que tout devrait être revu de fond en comble, ce texte présenté dans la précipitation manque cruellement d’ambition.
Pourtant, nous le savons, les économies d’hier nous coûtent très cher aujourd’hui, et pas seulement financièrement.
Malgré ces insuffisances et devant l’urgence de la situation, je voterai ce texte.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Ségur de la santé a prévu des aides importantes de revalorisation, avec un rattrapage à hauteur de 8 milliards d’euros pour les salaires et une aide de 19 milliards d’euros pour l’investissement. Cette proposition de loi a pour objet d’apporter des précisions sur la mise en œuvre des mesures concernant les soins, le management et la gestion de l’hôpital.
Il est important de débattre pour améliorer ce texte. C’est ce que fait le Sénat, et je voudrais saluer le rapporteur qui a œuvré en ce sens.
La création de l’exercice d’infirmier en pratique avancée, accessible après trois ans, est une bonne initiative. Le médecin généraliste est déjà bien secondé par les infirmiers dans la surveillance des maladies chroniques, qu’il s’agisse du diabète, des traitements anticoagulants, de l’insuffisance respiratoire ou rénale, des troubles psychiatriques ou encore du suivi de l’état général des patients. Toutes ces pratiques sont bien intégrées dans les maisons de santé où les infirmières et les médecins travaillent de concert avec les pharmaciens, dans le cadre de la société interprofessionnelle des soins ambulatoires (SISA)
Je ne suis pas favorable, à ce stade, à la création d’une nouvelle profession médicale intermédiaire. Mieux vaut privilégier le dispositif de pratique avancée, en incluant les infirmiers anesthésistes, comme le propose mon collègue Alain Marc.
En revanche, nous devons mieux travailler avec les pharmaciens, qui contrôlent les ordonnances et conseillent les patients, qui sont des acteurs de premier plan en matière de prévention, qui participent aux vaccinations et font des substitutions de médicaments, mais qui ne sont pas autorisés, pour l’instant, à prescrire un médicament pour les cystites, pas même un examen d’urine. Commençons par améliorer l’existant plutôt que de créer une nouvelle profession !
Le pharmacien est un maillon essentiel dans l’organisation des soins, et ces officines sont ouvertes du lundi au samedi.
À ce sujet, je souhaite réagir aux propos quelque peu méprisants qu’une élue du Bas-Rhin a récemment tenus. Nous devons au contraire applaudir les pharmaciens et saluer leur dévouement et leur sérieux.
En ce qui concerne l’évolution des compétences des sages-femmes, aucun obstacle médical ne s’oppose à ce qu’elles prescrivent des arrêts de travail au-delà de quinze jours. Je suis également favorable à ce qu’elles puissent prescrire l’examen de dépistage des infections sexuellement transmissibles (IST) du conjoint de leur patiente.
L’article 3 vise à simplifier le recrutement des praticiens hospitaliers. En effet, il faut donner aux établissements la possibilité d’être plus réactifs en simplifiant les procédures trop lourdes. Il faut aussi revaloriser les salaires.
L’article 5 tend à donner plus de place à la CME ainsi qu’au chef de service, dont il reste à préciser le rôle par rapport au chef de pôle. Il vise aussi à mieux associer le personnel, les internes et les paramédicaux au projet de l’hôpital.
L’article 7 avait pour objet de renforcer l’intégration des GHT par le prisme des directions communes. Cela permettait, avec l’accord des élus locaux et des CME, de développer une vision cohérente du territoire. Cette direction commune entre établissements d’un même GHT me semble être la solution la plus efficace et la plus adaptée pour mettre en œuvre un projet médical partagé avec l’établissement support, en veillant dans la mesure du possible à faire du département l’échelon préférentiel d’organisation du GHT.
Je soutiendrai l’amendement de mon collègue Franck Menonville visant à renforcer le rôle des élus locaux au sein des conseils de surveillance.
L’article 7 bis a pour objet la création d’un service d’accès aux soins non programmés qui aura pour tâche d’améliorer la demande de soins en amont des urgences, et de diriger les patients vers un professionnel de santé pour une consultation sans rendez-vous.
Nous devons mettre en place ce dispositif sur l’ensemble du territoire. Là où il n’y a pas de centre hospitalier, ce service devra reposer sur les maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP) et il faudra organiser une sorte de garde avec les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS).
L’article 10 vise à lutter contre les abus de l’intérim médical. Il faut savoir que les établissements sont dépendants de ce recours pour assurer la continuité des soins, notamment dans certaines spécialités. C’est en revalorisant la rémunération des gardes que l’on diminuera le recours à l’intérim.
Monsieur le ministre, faire confiance et simplifier sont des objectifs que l’on pourrait appliquer aux départements, en leur confiant la responsabilité de l’ensemble du dispositif de maintien à domicile des personnes âgées et des personnes handicapées, ce qui inclut la gestion des services de soins infirmiers à domicile (Ssiad). La coordination des intervenants serait facilitée, grâce au numéro d’appel unique. Pourquoi ne pas confier aussi aux départements le budget pour les soins dans les Ehpad ?
Dans les améliorations apportées par le Ségur de la santé, le Ssiad a été oublié. Nous espérons que le personnel médico-social travaillant dans le secteur du handicap pourra bénéficier rapidement d’une augmentation de rémunération.
Pour conclure, monsieur le ministre, je veux insister sur la nécessité d’amplifier les capacités de formation des futurs médecins, aides-soignantes et infirmières. De nombreux emplois restent non pourvus dans les Ehpad, notamment en ville.
Cette proposition de loi, modifiée par les amendements du Sénat, procède à des améliorations pragmatiques dans le fonctionnement de l’hôpital. Nous y sommes favorables et nous espérons, monsieur le ministre, que ces mesures seront retenues dans le prochain budget. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, tout a été dit sur l’immense déception de la quasi-totalité des acteurs de santé quant à cette proposition de loi – après le Ségur, le rapport Claris, le mouvement social et surtout la crise sanitaire –, tant sur le fond que sur la méthode.
Si nous saluons l’abandon de la création d’une profession médicale intermédiaire, il convient de rappeler que la reconnaissance et l’évolution attendues des compétences, en vue d’un décloisonnement des professions de santé, ne doivent pas correspondre à un glissement des tâches vers des personnels formés « sur le tas », sans parcours qualifiant, dans le seul but de libérer du temps médical.
Ce mouvement doit au contraire consacrer un réel niveau d’autonomie et être cadré par des diplômes nationaux.
Nous sommes favorables à des délégations de tâches, de missions et de responsabilités au sein d’un véritable parcours de formation professionnelle. La montée en charge du diplôme d’État d’infirmier en pratique avancée doit être obligatoirement couplée avec le renforcement des moyens humains.
Cette offre doit s’articuler et non se confondre ou entrer en concurrence avec les spécialisations infirmières en bloc opératoire, puériculture ou anesthésie, dont le champ de compétences et d’exercice comprend, de fait, celles requises pour la pratique avancée paramédicale.
Dès lors, avec des moyens humains à la hauteur des besoins, l’effet sur l’efficience du temps médical aura un impact positif.
La proposition de loi poursuit la lente mais nécessaire reconnaissance du métier de sage-femme, profession médicale à part entière, à compétences définies mais sous-déployées.
II est temps de poursuivre l’élargissement du champ de compétences des sages-femmes à partir de leur cœur de métier, et de reconnaître leur place dans le parcours de soins, et le décloisonnement entre la médecine de ville et l’hôpital.
Nous ne prendrons pas le tournant attendu et nécessaire vers plus de prévention et de promotion de la santé, parents pauvres des politiques publiques de santé, sans nous appuyer sur cette profession médicale qui maille finement le territoire, pour la santé des femmes et du nouveau-né.
C’est pourquoi le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires soutient les articles en ce sens et les enrichira.
Rappelons que pour cette profession comme pour d’autres, le compte des accords du Ségur n’y est pas, ce qui justifie le mouvement social actuel.
Autre occasion manquée de la proposition de loi, l’accès aux soins de kinésithérapie et d’orthophonie n’a pas été amélioré, alors qu’il contribuerait à éviter des passages tardifs aux urgences ou – pire – des renoncements aux soins, dans le cadre d’une politique de prévention et de fluidité du parcours.
L’article relatif à la lutte contre l’intérim est révélateur, par son coût indécent, d’une volonté politique obligée de se manifester quand les conséquences des logiques austéritaires deviennent insupportables et contreproductives.
La solution pour assécher l’intérim réside en partie dans la revalorisation sensible des missions de service public, notamment les gardes et les astreintes, mais il faut aussi améliorer rapidement les conditions d’exercice à l’hôpital, en recrutant massivement pour renouer avec le sens du travail bien fait, et permettre la réduction du temps de travail et du recours obligé aux heures supplémentaires.
L’intérim reste parfois le seul moyen de maîtriser son temps.
En attendant, l’injonction paradoxale entre continuité du service et soumission au chantage des sociétés intérimaires ne peut peser sur le seul directeur d’établissement.
Autre axe de cette proposition de loi, la gouvernance acte le retour du service ou, du moins, sa réaffirmation après la contestation majoritaire de l’organisation par pôles.
En revanche, aucun enseignement n’est vraiment tiré de ce qui a permis à l’hôpital de fonctionner pendant la crise. Cette dernière aurait pu inspirer de véritables avancées en matière de démocratie participative, au-delà du seul management participatif, notamment en s’appuyant sur tous les acteurs du terrain.
Or l’hôpital reste largement médico-centré, vertical et descendant, loin des aspirations des jeunes générations de salariés qui, au-delà de salaires décents, aspirent à davantage de participation aux décisions. La gouvernance, élément essentiel de l’attractivité, attend toujours sa réforme en profondeur. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.)
Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Théophile.
M. Dominique Théophile. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification se veut la traduction législative des conclusions du Ségur de la santé, celles du moins qui ne relèvent pas du domaine budgétaire.
À l’Assemblée nationale, ce texte a été profondément modifié, complété, amélioré pour que les attentes et les besoins du personnel médical et des patients soient mieux pris en compte.
Ce texte, mes chers collègues, n’a pas pour objet de révolutionner l’organisation de notre système de santé. Il n’a pas non plus vocation à répondre à l’ensemble des difficultés que la crise sanitaire a mis en exergue. Il s’agit d’une pierre supplémentaire qui s’ajoute aux réformes déjà menées par le Gouvernement, et qui en appelle évidemment d’autres.
En septembre 2018, le plan Ma santé 2022 prévoyait ainsi de transformer en profondeur notre système de santé. Cinq actions prioritaires étaient définies, parmi lesquelles l’accélération de la mise en place des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), le déploiement de médecins généralistes dans les territoires prioritaires et la création de postes d’assistants médicaux.
Dans la foulée, et pour répondre à la mobilisation du personnel urgentiste, le pacte de refondation des urgences a permis d’affirmer la nécessité des services d’accès aux soins, de renforcer l’offre de consultations médicales sans rendez-vous, et de généraliser les parcours dédiés aux personnes âgées.
Enfin, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 a assuré la mise en œuvre des engagements budgétaires du Ségur de la santé.
Le Ségur de la santé, rappelons-le, ce sont des engagements sans précédent en faveur du monde médical et paramédical. C’est aussi la revalorisation des salaires du personnel des établissements de santé et des Ehpad. C’est un plan d’investissement de 19 milliards d’euros en faveur des établissements de santé. C’est enfin la poursuite des innovations organisationnelles et la promotion de la télémédecine.
Mais la crise sanitaire a également révélé l’urgence de simplifier l’organisation de notre système de santé et le besoin de reconnaissance de tous les professionnels. Telle est l’ambition affichée par notre collègue députée Stéphanie Rist dans sa proposition de loi. Ses travaux se sont appuyés autant sur les conclusions du Ségur de la santé que sur les recommandations du rapport Claris.
Le texte que nous examinons aujourd’hui a été profondément remodelé en commission des affaires sociales. Force est de constater qu’il reste bien peu de choses du texte initial.
Certaines de ses dispositions ont toutefois fait l’unanimité, et nous saluons la volonté du rapporteur de les conserver.
Le chapitre II prévoit ainsi d’élargir les compétences des sages-femmes en matière de prescription des arrêts de travail, ou de dépistage et de traitement des infections sexuellement transmissibles. Il en va de même pour les masseurs-kinésithérapeutes, qui verront leur faculté de prescription clarifiée. Nous nous réjouissons que ces revendications anciennes trouvent enfin leur place dans un texte de loi.
Le chapitre IV, consacré à la gouvernance des établissements publics de santé, conserve également certaines dispositions importantes. L’article 5 réhabilite ainsi le rôle et la place du service au sein de l’hôpital. L’article 10 prévoit en outre de lutter contre les abus liés à l’intérim médical, qui grèvent les finances des établissements publics. L’article 14, enfin, inscrit dans la loi la création d’une plateforme numérique d’information et de services à destination des personnes handicapées, plateforme qui a été déployée en mai dernier et qui poursuivra sa montée en puissance.
À l’inverse, certaines dispositions que nous pensions nécessaires ont été supprimées. Nous le regrettons et proposerons d’en rétablir quelques-unes.
C’est le cas notamment de l’article 1er qui visait la remise d’un rapport consacré à la pratique avancée et aux protocoles de coopération. Cet article étant le fruit d’un compromis, nous proposerons de revenir sur sa suppression, tant il nous paraît essentiel d’avancer sur le sujet.
L’article 4 bis tendait, quant à lui, à instaurer un cadre légal pour l’intervention individuelle de praticiens bénévoles dans les établissements publics de santé. Nous proposerons de réintégrer cette disposition en apportant un certain nombre de garanties concernant leur formation et leur encadrement.
Nous proposerons par ailleurs de revenir sur la suppression de l’article 11 consacré à la création d’un projet managérial participatif à l’hôpital, article auquel nous proposons d’ajouter un volet numérique. Cet outil nous semble en effet aller dans le sens d’une meilleure gestion des hôpitaux et, donc, de la simplification de notre système de santé.
Pour finir, nous proposerons d’inscrire dans la loi l’importance de mettre en place, au sein des GHT, un système d’information convergent et interopérable, afin d’accélérer le développement du numérique dans le secteur de la santé.
Mes chers collègues, conscient des avancées figurant dans ce texte autant que des modifications apportées par la commission des affaires sociales, mais également conscient des postures parfois très politiques – il faut le dire – qui continuent d’émailler l’examen de cette proposition de loi, constatant enfin l’usage très généreux qui a été fait de l’article 45 de la Constitution, le groupe RDPI réservera son vote en l’absence d’avancées significatives.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Imbert. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Corinne Imbert. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous entamons l’examen de la proposition de loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification.
Monsieur le ministre, alors que vous nous aviez habitués à présenter des textes qui n’avaient pas toujours les moyens de leurs ambitions, nous avons découvert avec étonnement un texte qui n’avait pas les ambitions de son titre !
Le Ségur de la santé, qui a eu lieu entre mai et juillet derniers, s’annonçait pourtant prometteur. Or cette proposition de loi, présentée comme la traduction législative des mesures issues de cet accord qui ne relèvent pas du domaine budgétaire, est plus que décevante. Nous ne pouvons que le regretter.
La crise sanitaire a de nouveau illustré la lourde tâche qui incombe quotidiennement aux professionnels de santé. Il est devenu urgent de revaloriser ces professions à la hauteur de la responsabilité qui est la leur.
Toutes les voies possibles ont été explorées, afin de recueillir le maximum de points de vue et de témoignages : concertations, groupes de travail, consultations en ligne. Plusieurs thématiques avaient été déterminées à l’avance, afin de déterminer les objectifs et les solutions proposées pour répondre aux malaises des personnels soignants.
À l’image du grand débat national, la méthode utilisée lors de ce Ségur était annonciatrice des limites qui seraient atteintes lors de la traduction législative de ces enjeux primordiaux. En effet, monsieur le ministre, nous sommes plusieurs dans cet hémicycle à vous avoir alerté sur les conséquences prévisibles d’une limitation du Ségur de la santé à certaines professions de santé et, en particulier, sur le fait d’exclure les professions de santé libérales.
À l’image de son cheminement, cette proposition de loi est hospitalo-centrée. Elle ne saisit pas l’essence même des difficultés rencontrées quotidiennement par nos concitoyens en matière d’accès aux soins. Notre système de santé est un tout. On ne peut pas prétendre le simplifier en se limitant à certaines professions. Cela crée au minimum de l’incompréhension et provoque, dans le pire des cas, un profond sentiment d’iniquité et de colère.
Je reviendrai également sur le vecteur législatif utilisé pour traduire les conclusions du Ségur. Est-ce de l’impréparation ? C’est peut-être un euphémisme quand on sait que ce texte a été déposé une première fois, puis retiré faute de cohérence et de solutions, avant d’être à nouveau redéposé, alors que les premières interrogations n’avaient toujours pas trouvé de réponses satisfaisantes.
Je m’interroge également sur la pertinence d’aborder une thématique de cette ampleur par le prisme d’une proposition de loi. Un projet de loi semblait bien plus adapté et, surtout, davantage à la hauteur de l’enjeu que représentent les difficultés rencontrées par les professionnels de santé et l’ensemble de nos concitoyens en matière d’accès aux soins.
La simplification est une attente, c’est vrai. La confiance, elle, se mérite ! En fait, je doute profondément de la méthode choisie par le Gouvernement pour aborder ce dossier auquel nous sommes évidemment très attachés, et à propos duquel les attentes étaient fortes.
Que dire d’un texte qui fait référence à des ordonnances qui, à ce jour, n’ont pas été publiées ? Que dire d’un texte sur lequel, puisqu’il s’agit d’une proposition de loi, l’avis du Conseil d’État n’a pas été sollicité ?
Vous avez déjà répondu à cette dernière question : le Gouvernement a souhaité mieux valoriser l’initiative parlementaire en privilégiant cette méthode de travail. Il est vrai qu’un des travers de ce quinquennat a souvent été de vouloir abaisser le rôle du Parlement. Et pourtant, j’ai du mal à me faire à l’idée que cette proposition de loi marquerait un regain d’intérêt de la part de l’exécutif vis-à-vis du pouvoir législatif.
Monsieur le ministre, les avis exprimés par l’ensemble de mes collègues, sur de nombreuses travées de cette assemblée, sont révélateurs de la profonde déception qui est la nôtre concernant ce texte.
Son champ d’action très limité nous a empêchés d’aborder de nombreuses thématiques qui semblaient pourtant prioritaires et urgentes. Bon nombre de catégories de professionnels de santé ne comprendront pas qu’après une loi Ma santé 2022 en demi-teinte, cette proposition de loi se concentre principalement sur la médecine hospitalière.
Pour autant, le groupe Les Républicains a souhaité travailler sur ce texte et l’enrichir.
Si, au travers de cette ambition d’améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, nous avions perçu une volonté forte de faire en sorte que le parcours des patients soit plus simple, et ce avec une qualité de soins identique sur l’ensemble du territoire, nous aurions pu nous y retrouver.
Hélas, ce texte ne règle pas grand-chose. Les professionnels de santé sont désabusés. Plus qu’une faute politique, c’est une faute morale que commet l’exécutif en proposant un texte si peu ambitieux et si peu convaincant. Le temps long, si cher à notre Haute Assemblée, saura vous le rappeler : vous aviez vu, vous aviez su, mais en définitive, vous auriez dû !
Et puisque la confiance figure dans l’intitulé de ce texte, monsieur le ministre, je profite du temps de parole qui m’est donné pour vous demander si vous entendez publier rapidement le décret d’application de la mesure votée sur l’initiative du Sénat dans la loi Santé de 2019, qui impose aux internes en médecine de troisième année une période de professionnalisation d’au moins six mois en zone sous-dotée.
Lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, j’ai interrogé la ministre chargée de l’autonomie à ce sujet. Elle nous a alors affirmé que le décret paraîtrait rapidement, car la mesure est censée entrer en application le 1er novembre prochain. Qu’en est-il exactement ? La confiance, c’est aussi cela, monsieur le ministre, et je souhaite vous faire confiance ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Émilienne Poumirol. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis de très nombreuses années, l’hôpital public est en souffrance : le manque de moyens et son corollaire, la fermeture de postes et de lits, la reconnaissance salariale insuffisante et la complexité de son organisation entraînent une carence d’attractivité chronique de nos hôpitaux.
Et pourtant, la réponse des personnels à la pandémie a été, et est encore, remarquable et admirable.
Dans ce contexte particulier, alors que le Ségur de la santé et le rapport extrêmement documenté et riche en préconisations du professeur Claris ont fait naître un certain espoir, nous examinons une proposition de loi qui, malgré son titre attractif, ne suscite que déception et frustration.
Comme l’ont déjà souligné mes collègues, la forme interroge. Cette proposition de loi, en ne reprenant que peu des dispositions du Ségur de la santé – cinq sur trente-trois –, ne répond en rien aux attentes du monde médical et hospitalier. Pire encore, elle crée une insécurité juridique et des incompréhensions. Quelle sera la place de cette proposition de loi, alors que les ordonnances promises dans le cadre de la loi Ma santé 2022 d’Agnès Buzyn n’ont toujours pas été publiées ? On est bien loin d’une simplification…
Qui plus est, cette proposition de loi comportait au départ pas moins de quarante-deux articles – ce qui est pour le moins inhabituel –, dont beaucoup ont été supprimés ou entièrement réécrits dès son examen en première lecture à l’Assemblée nationale, preuve de son impréparation !
Sur le fond, cette proposition de loi s’attaque-t-elle véritablement au problème de l’attractivité de nos hôpitaux publics ? Tient-elle compte des remontées de terrain et de la vraie vie des personnels et des usagers ? Absolument pas !
Ce texte balaie, au contraire, un nombre important de sujets sans apporter de réponse de fond ou de vision globale. Il ne fait qu’effleurer les principales préoccupations du monde hospitalier.
Loin de renforcer l’attractivité des carrières hospitalières et de valoriser les personnels soignants, le texte comporte même, sous couvert de simplification, des mesures contreproductives, tels que le bénévolat individuel ou la possibilité pour un directeur de GHT de créer un poste de praticien hospitalier.
La création d’un service d’accès au soin aurait également mérité un travail plus approfondi entre l’hôpital et la médecine de ville, en particulier avec les maisons pluridisciplinaires de santé ou les établissements de soins primaires.
La pandémie a également mis en exergue la question de la démocratie sanitaire : quelle leçon le Gouvernement en tire-t-il ? Aucune dans ce texte assurément. Pendant la première vague, les professionnels hospitaliers ont estimé que si l’hôpital avait su gérer, il le devait à l’hypermobilisation de l’ensemble des personnels, bien sûr – mais à quel prix ? –, mais aussi au fait que la santé avait été érigée au rang de priorité, tandis que le carcan de l’exécution budgétaire avait été remisé au second plan.
Quelle leçon le Gouvernement en tire-t-il ? Aucune, là non plus. Pire, il s’enferre dans la voie de l’hôpital-entreprise avec la création, à l’article 11, d’un projet managérial, que notre groupe a supprimé en commission par voie d’amendement.
Certes, il existe quelques propositions intéressantes. Je pense en particulier aux mesures concernant les sages-femmes ou les kinésithérapeutes, mais l’ensemble inspire un sentiment de déception et de frustration, qui risque de démobiliser l’ensemble du personnel hospitalier.
Pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, l’examen d’un texte aussi désordonné, au champ d’application aussi large, aurait nécessité un peu plus de recul et un travail plus approfondi. Nous aurions aussi dû attendre la parution des ordonnances du Gouvernement et mieux travailler sur le champ d’application restant. Nous le devons à nos soignants et à l’ensemble de nos concitoyens, usagers de notre système de santé qui sont, eux aussi, extrêmement inquiets. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Bonne. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Bernard Bonne. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’objet principal de cette proposition de loi était de poursuivre ce que le plan Ma santé 2022 a engagé à travers la loi du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé.
Il paraissait en effet nécessaire de simplifier les protocoles permettant aux acteurs de santé de coopérer, en déléguant certaines tâches notamment, mais aussi de faciliter le recrutement de praticiens hospitaliers, en particulier dans les GHT, afin de mieux prendre en charge les patients et d’améliorer l’offre de soins.
Et puis la crise sanitaire est intervenue. Elle a souligné le rôle essentiel de nos médecins et soignants. Dans ses conclusions présentées en juillet 2020, le Ségur de la santé a prévu les revalorisations salariales qu’attendaient ces personnels, revalorisations confirmées dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale que nous avons voté en fin d’année.
Si d’autres mesures, qui ne relèvent pas du domaine budgétaire, sont pour partie reprises dans le texte que nous examinons aujourd’hui, il y a tout de même un sujet qui n’est pas abordé, que vous avez d’ailleurs écarté lors de la discussion du texte à l’Assemblée nationale, monsieur le ministre, alors qu’il permettrait sans aucun doute de répondre au moins partiellement aux difficultés de recrutement, l’attractivité demeurant un domaine extrêmement prégnant.
En effet, le Ségur de la santé a très clairement donné la priorité au secteur public hospitalier au détriment des établissements de santé privés d’intérêt collectif (Espic), bien que ces derniers soient par nature des établissements du service public hospitalier accomplissant les mêmes missions et ayant les mêmes devoirs vis-à-vis des usagers que l’hôpital public.
Ainsi, les médecins du secteur privé non lucratif ont été exclus des dispositifs de revalorisation salariale. Le différentiel de rémunération est tel qu’il se traduit par une perte d’attractivité des postes de médecins dans les Espic.
Cela va même plus loin puisque, aujourd’hui encore, alors que dans les établissements publics les praticiens peuvent exercer une activité libérale, avec dépassements d’honoraires et reste à charge pour les patients, les médecins exerçant dans les Espic n’en ont pas le droit.
Aussi, j’ai déposé plusieurs amendements qui tendent à établir une égalité de traitement entre les praticiens du secteur public et ceux du secteur privé non lucratif, afin de permettre à ces derniers de pouvoir choisir entre une activité salariée à temps plein ou une activité salariée assortie de deux demi-journées d’activité libérale, avec une possibilité de dépassements d’honoraires encadrée dans le cadre de l’option pratique tarifaire maîtrisée – chirurgie et obstétrique (Optam-Co), c’est-à-dire sans reste à charge pour les patients.
Il me semble par ailleurs que le fait de traiter de l’attractivité des postes de praticiens au sein des Espic ne nécessite pas, comme le prévoit l’article 14 bis, la remise d’un rapport du Gouvernement au Parlement.
Des mesures simples, telles que celles que nous proposons, peuvent renforcer l’attractivité de l’ensemble de nos hôpitaux, quel que soit leur statut juridique, d’autant que les uns et les autres permettent d’amplifier l’offre de soins sur nos territoires. Nos hôpitaux fonctionnent bien souvent de façon parfaitement complémentaire, les usagers ne faisant aucune différence entre les diverses structures.
Si l’on veut favoriser l’attractivité des hôpitaux publics et des Espic, commençons par harmoniser les conditions de travail. Alors que nous évoquons la nécessité de mettre en place un exercice coordonné des pratiques et la complémentarité des acteurs du soin, une telle harmonisation de l’exercice mixte me paraît indispensable.
Un grand nombre de professionnels de santé déplorent que, une fois de plus, cette proposition de loi ne soit finalement qu’une illusion de simplification et n’améliore en rien le fonctionnement de notre système de santé. Je crains que la confiance ne soit malheureusement pas au rendez-vous. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Florence Lassarade. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Florence Lassarade. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, en cette fin d’après-midi, on nous demande d’examiner brièvement une proposition de loi qui se voudrait la traduction du Ségur de la santé.
Les défis sont de taille et nous appellent à redoubler d’efforts. À l’issue du Ségur, comme l’indiquait le communiqué de presse du ministère de la santé, il s’agissait de « faire tomber les murs entre l’hôpital, la médecine de ville et les établissements médico-sociaux, de lutter avec une énergie nouvelle contre les inégalités de santé, de donner plus de voix aux soignants dans la gouvernance des établissements de santé, de mieux tenir compte des enjeux environnementaux, de mettre le numérique au service de la santé de tous, et tout cela dans l’intérêt supérieur des patients et de leur santé ».
La proposition de loi que nous examinons en procédure accélérée répond-elle à cet objectif de traduire dans notre droit les objectifs du Ségur ? Malheureusement non. Ce texte ne répond pas à son ambition initiale, et les mesures proposées pour l’hôpital public restent largement insuffisantes.
La pandémie a pourtant mis en exergue les dysfonctionnements de l’hôpital et l’exaspération des soignants, qui sont épuisés et se sentent insuffisamment pris en considération. Nos infrastructures sont souvent vétustes, et le nombre de lits reste insuffisant depuis le début de la pandémie.
Les sujets essentiels, comme la formation ou l’organisation de la médecine de ville, sont complètement éludés.
Concernant l’aspect financier, nous sommes tous conscients de la nécessité de revaloriser les salaires des personnels médicaux et paramédicaux. Il est impératif de fixer des salaires décents au regard des responsabilités et de l’engagement des soignants.
En outre, il est urgent de favoriser l’installation des médecins sur l’ensemble du territoire et de résorber les déserts médicaux.
Mais cette traduction du Ségur de la santé ne propose aucune mesure forte. En ma qualité de médecin et de parlementaire, je regrette ce décalage entre les mesures annoncées lors du Ségur de la santé et cette proposition de loi aux mesurettes disparates.
Monsieur le ministre, ce texte aurait pu être l’occasion d’une vraie réforme, mais son contenu et la procédure accélérée ont considérablement amoindri l’ambition de ses auteurs.
De plus, le périmètre de la proposition de loi initiale et les règles en matière de recevabilité des amendements, qui découlent de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, n’ont pas permis au Sénat d’enrichir le texte, afin de répondre aux attentes des professionnels de santé et des patients. Malgré tout, le rapporteur et les commissaires des affaires sociales ont pu le remanier et l’améliorer.
Dix articles sur trente-sept ont été supprimés, notamment l’article 1er qui, dans sa version initiale, prévoyait la création d’une « profession médicale intermédiaire », en d’autres termes un médecin au rabais. Faisant l’unanimité contre elle, cette proposition a été abandonnée dès son examen par l’Assemblée nationale pour être remplacée par une disposition prévoyant la remise d’un rapport au Parlement dans un délai d’un an, qui a été supprimée à son tour.
L’article prévoyant l’intervention de bénévoles à titre individuel dans les établissements publics et privés de santé en dehors du cadre associatif a également été supprimé.
Les compétences des sages-femmes en matière de prescriptions d’arrêt de travail ou d’examens de dépistage et de traitement ont été élargies.
Je me réjouis aussi que la lutte contre le recours abusif à l’intérim médical ait été améliorée.
Les attentes des soignants et des Français sont importantes. Ce texte improvisé et insuffisant, dont nous ne saisissons pas les objectifs, risque de les décevoir une nouvelle fois. Néanmoins, nous allons tâcher d’améliorer cette proposition de loi dans un délai extrêmement court au regard des enjeux. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Véran, ministre. Je répondrai brièvement aux différents points abordés et à quelques-unes des questions directes qui m’ont été posées.
D’abord, le Ségur de la santé ne se résume évidemment pas à cette proposition de loi. L’immense majorité des mesures non salariales figurant dans le Ségur relèvent du domaine réglementaire et non du domaine législatif, ce qui nous permettrait d’aller bien au-delà du périmètre de ce texte.
Il a beaucoup été question des ordonnances GHT ; le sénateur Jomier en a ainsi parlé à plusieurs reprises. Le délai d’habilitation court jusqu’au 25 mars : il n’y a donc plus beaucoup à attendre. D’ailleurs, je le disais dans mon intervention liminaire, ces ordonnances font actuellement l’objet d’une concertation avec les différents acteurs. Vous le verrez, leur contenu est, je pense, équilibré ; elles répondent en grande partie aux préconisations du rapport Claris, dont je rappelle qu’il avait été très bien accueilli.
Je vous propose, si vous le désirez, madame la présidente Deroche, de venir présenter ces ordonnances devant votre commission dès qu’elles auront été publiées.
Madame la sénatrice Imbert, vous m’avez posé une question sur le renforcement de l’attractivité des zones sous-denses pour favoriser l’appropriation des futurs métiers. Vous avez notamment parlé de la maîtrise de stage ambulatoire.
Nous visons deux objectifs, qui sont pour moi indissociables : l’augmentation du nombre de maîtres de stage pour parvenir à une capacité de formation suffisante sur le territoire ainsi que le maintien, voire, si nécessaire, l’amélioration de la qualité de l’encadrement des internes sur le plan tant pédagogique que professionnel.
Dans le cadre d’un groupe de travail spécifique du Ségur de la santé, des travaux sur la diversification des terrains de stage ont été menés. Les services de mon ministère y travaillent aujourd’hui : nous souhaitons que ces stages s’effectuent et se développent dans les territoires dans des conditions garantissant la qualité de la formation. Nous devrions aboutir dans les tout prochains mois.
S’agissant de votre seconde question, madame la sénatrice, je vous donnerai une réponse précise et factuelle : le décret 2020-951 du 30 juillet 2020 relatif aux conditions de l’agrément des maîtres de stage des universités accueillant des étudiants de deuxième et de troisième cycle des études de médecine a été pris en application du III de l’article 2 de la loi du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé. Si vous le souhaitez, mes services pourront compléter ma réponse.
J’ajoute que l’esprit du Ségur, c’est l’esprit de la liberté retrouvée et du retour du sens pour celles et ceux qui exercent leur mission dans une structure de type hospitalier.
L’esprit du Ségur, c’est de permettre à chacune et à chacun de s’organiser, non pas librement – on ne va pas transformer l’hôpital en phalanstère ! –, mais selon des règles moins rigides. C’est finalement rendre non opposable une partie du code de la santé publique, non pas pour mettre en cause la qualité, la sécurité ou la continuité des soins, mais pour réformer l’organisation interne de l’hôpital.
Pardon de le dire, mais j’ai moi aussi porté une blouse blanche pendant un certain temps. La disparition du service et l’organisation en pôles ont certes eu du bon, mais les services ont tout de même été beaucoup regrettés…
Concernant les modalités de gouvernance interne, le discours très dur du président de la République de l’époque, déclarant en 2007 qu’il n’y avait qu’un seul patron à l’hôpital, le directeur, n’a pas non plus été sans conséquences sur l’état d’esprit qui règne depuis plus de dix ans dans nos établissements de santé.
Je ne dis pas pour autant que la réforme était mauvaise. Je dis simplement que les transformations sont nécessaires au bout d’un certain temps, au terme d’un certain cycle, quand on se rend compte que les externalités négatives des décisions qui ont été prises commencent à l’emporter sur leurs aspects positifs.
Redonner une certaine souplesse à l’organisation de l’hôpital ne signifie certainement pas que l’on oppose de nouveau directeurs et médecins. Je n’ai jamais compris ce débat, peut-être parce que j’ai eu la chance de toujours évoluer dans des hôpitaux où le directeur et le président de la CME fonctionnaient en binôme.
Je crois profondément qu’en donnant la possibilité aux uns et aux autres de modifier leur gouvernance interne, on apporte une solution à beaucoup de problèmes.
L’un des maux qui ronge l’hôpital – il n’en a pas été question lors de la discussion générale –, ce sont les conflits interpersonnels. C’est dévastateur !
La qualité de vie à l’hôpital passe aussi par notre capacité à donner à chacun le sentiment d’être entendu, écouté, libre dans l’exercice de son métier et respecté.
Pendant la crise de la covid-19, les directeurs, les soignants, les médecins, les personnels paramédicaux ont tous regardé dans une seule et même direction : soigner, sauver des vies, et s’organiser dans ce but.
Il a fallu prendre des décisions très vite : elles ont été prises ! Il a fallu s’écarter du code des marchés publics lors de l’état d’urgence sanitaire pour pouvoir acheter de quoi bâtir en catastrophe, en quarante-huit heures, des services d’urgence extérieurs à l’hôpital : on a pu le faire ! En revanche, dans la vie quotidienne, ça ne va pas.
Pardonnez-moi de faire de nouveau appel à mon expérience professionnelle personnelle, mais j’ai eu la chance de pouvoir monter un hôpital de jour en neurologie au CHU de Grenoble, et je me souviens très bien d’un cas, parmi d’autres : pour traiter des patients souvent jeunes atteints de scléroses en plaques, appelés à recevoir une perfusion pendant une ou deux heures, j’avais préféré disposer, plutôt que de lits, de fauteuils confortables, compatibles avec l’administration de perfusions.
On pouvait installer trois fauteuils à la place de deux lits, et j’avais identifié des fauteuils qui, bien que confortables, ne coûtaient pas très cher – un peu plus d’un millier d’euros pièce –, de nature à rendre l’espace plus accueillant, plus moderne et propice à une prise en charge vraiment ambulatoire.
Catastrophe : dans le code des marchés publics, vous trouviez un seul type de fauteuil – à 30 000 euros pièce ! C’est cela, aussi, la rigidité à l’hôpital. Franchement, si j’avais pu, je serais même allé plus loin que les mesures qui ont été proposées, notamment en matière de code des marchés publics. Mais, en la matière, il existe une législation européenne très contraignante.
Il ne faut pas avoir peur de donner de l’autonomie aux établissements. Il faut évidemment encadrer les choses par des règles, mais il ne faut pas désigner un patron du doigt en lui disant : « C’est toi qui vas être responsable de tout le monde » ! Ce n’est pas ainsi que les choses doivent se passer.
Le CHU de Grenoble, c’est 10 000 feuilles de paie ; on ne peut pas confier toute la responsabilité à une seule personne, quand bien même celle-ci serait extrêmement dévouée et talentueuse. Il faut donc repenser l’organisation et la gouvernance internes.
À cette exigence, les éléments contenus dans cette proposition de loi répondent en partie, le reste relevant du domaine réglementaire – nous aurons l’occasion d’en débattre.
Je ferai un point sur les Espic, les établissements de santé privés d’intérêt collectif ; le sénateur Bernard Bonne en a parlé.
J’avais entrevu l’idée de déposer des amendements sur ce sujet, mais ils eussent été susceptibles d’être déclarés irrecevables, à l’Assemblée nationale, au titre de l’article 45 de la Constitution, et il me paraissait difficile d’envisager une situation dans laquelle mes propres amendements seraient ainsi rejetés…
Vous comprendrez donc que j’y aie renoncé. Néanmoins, j’examinerai avec beaucoup d’attention ceux que vous avez déposés, monsieur le sénateur, ainsi que ceux de certains de vos collègues ; je pense à M. Xavier Iacovelli ; ils me semblent vraiment intéressants. Nous aurons l’occasion d’en parler : personne, évidemment, ne doit être abandonné ou oublié.
Quant à la médecine de ville, elle répond à une organisation qui, à proprement parler, relève non pas du domaine législatif, mais des négociations conventionnelles entre la Caisse nationale de l’assurance maladie, la CNAM, l’Union nationale des organismes complémentaires d’assurance maladie, l’Unocam, et les syndicats. C’est le cadre du dialogue social qui a été déterminé par la loi de 2004 et que je respecte, évidemment.
Des dispositions sont prises qui concernent la médecine de ville. Certaines sont déjà opérationnelles – je pense notamment aux mesures sur l’investissement du Ségur. D’autres seront décidées dans le cadre de la convention ; les débats et les échanges avaient commencé, mais ils ont été suspendus compte tenu de la proximité des élections professionnelles, ce contexte n’étant pas propice à la conclusion d’accords.
Les discussions reprendront sitôt les élections professionnelles passées, et nous allons évidemment travailler à l’articulation entre la médecine de ville et l’hôpital.
Je me bats depuis des années pour que l’on casse les silos entre la ville et l’hôpital ou entre le médico-social et le médical. On a vu, pendant la crise du covid-19, que l’on était plus efficace quand on cassait les silos, et c’est vraiment l’état d’esprit qui m’anime.
Or je parviens à retrouver mes bébés, si j’ose dire, dans un certain nombre d’articles de cette PPL, à laquelle je crois. Je le répète, il s’agit d’un travail parlementaire, que vous avez la possibilité, en tant que parlementaires, de modifier et d’enrichir. Aussi, débattons !
Mme la présidente. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification
Chapitre Ier
Exercice en pratique avancée et protocoles de coopération
Article 1er
(Supprimé)
Mme la présidente. L’amendement n° 159, présenté par MM. Théophile, Iacovelli, Lévrier, Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport dressant un état des lieux de la mise en place des auxiliaires médicaux en pratique avancée et des protocoles de coopération. Dans le double objectif d’un décloisonnement des professions de santé et d’un meilleur accès à la santé, ce rapport d’évaluation fait des propositions permettant d’accélérer le déploiement de l’exercice en pratique avancée et des protocoles de coopération ainsi que de simplifier et d’améliorer ces deux dispositifs, notamment en termes de formation et de rémunération des auxiliaires médicaux en pratique avancée. Il étudie également la possibilité d’accompagner la délégation de tâches avec un transfert des responsabilités.
Il évalue aussi les besoins et les moyens en matière de réingénierie des formations des auxiliaires médicaux, notamment en vue de réformer les référentiels de ces formations, d’améliorer l’accès à ces formations et de poursuivre leur universitarisation.
La parole est à M. Dominique Théophile.
M. Dominique Théophile. Initialement, l’article 1er visait à établir un cadre législatif pour une nouvelle profession intermédiaire.
Après avoir repris l’une des conclusions du Ségur de manière peut-être prématurée, nos collègues députés ont transformé cet article en une demande de rapport, dont la vocation est de contribuer au déploiement de l’exercice en pratique avancée et des protocoles de coopération.
Il est évident que la situation actuelle ne répond pas aux besoins d’évolution en compétences des professionnels de santé. C’est pourquoi ce rapport nous semble essentiel pour poursuivre la montée en puissance des leviers définis dans le plan Ma santé 2022.
En effet, alors que l’accès aux soins sur le territoire est hétérogène, alors que les protocoles de coopération n’ont eu qu’un essor limité depuis 2009 et que la loi de juillet 2019 a récemment refondu leur cadre juridique, alors qu’un rapport de notre rapporteur soulignait en 2014 le besoin d’une montée en compétences et la nécessité de créer des professions intermédiaires, peu d’analyses existent sur la situation actuelle et sur ses limites éventuelles.
On connaît le sort généralement réservé aux demandes de rapport dans cette assemblée, mais il me semblerait dommage de se priver d’éléments analytiques, alors même que c’est précisément, selon la commission, ce qui faisait défaut dans cette proposition de loi.
En complément de la mission dont le lancement a été souhaité à l’occasion du Ségur, ce rapport permettra une analyse raisonnée et exhaustive de la situation actuelle, qui contribuera à répondre efficacement au besoin de simplification du système de santé.
Pour toutes ces raisons, l’article 1er nous semble avoir toute sa place dans ce texte ; c’est pourquoi nous proposons son rétablissement et comptons, mes chers collègues, sur votre vote favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Si nous avons, en commission, supprimé cet article, il y a plusieurs raisons à cela ; je les ai développées voilà quinze jours, mais je le fais de nouveau volontiers.
D’une part, la portée de cet article est trop limitée au regard des enjeux réels de revalorisation des métiers de santé. Cette demande de rapport n’a pas sa place dans la loi, a fortiori dans un article 1er qui tend à en faire une disposition phare de ce texte.
D’autre part, le bilan ainsi sollicité dans un délai bref, de six mois, risque de manquer de recul, s’agissant de dispositifs n’ayant pas atteint leur pleine portée ou ayant fait l’objet de réformes récentes. Les premiers infirmiers en pratique avancée ont été diplômés en juillet 2019 et ils sont actuellement au nombre de 549.
Quant aux protocoles de coopération, leur cadre juridique a été remis à plat par la loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santé de juillet 2019, et encore modifié par la loi d’accélération et de simplification de l’action publique, ou loi ASAP, de décembre 2020. La présente proposition de loi en prévoyait, à son article 1er, une nouvelle évolution.
Je ne vois pas d’intérêt à réintroduire cet article sans portée normative et dont, de surcroît, la rédaction est à certains égards ambiguë.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. J’entends et respecte, évidemment, les arguments du rapporteur et de la commission.
Je ne vais pas revenir sur le fond de cette notion de profession médicale intermédiaire. Il ne s’agit certainement pas de médecins au rabais – l’enjeu n’est absolument pas là, et c’est même tout le contraire.
L’enjeu est de permettre à la France de disposer de soignants dont le niveau de diplôme se situerait quelque part entre bac+3 et bac+12, comme c’est le cas dans de très nombreux pays, et même dans la quasi-totalité des pays, susceptibles par exemple d’aider à faire des prescriptions.
Cette évolution ne contrevient évidemment pas à la logique des infirmiers en pratique avancée, ou IPA, à laquelle je crois beaucoup : l’idée est d’avancer en matière de pratiques avancées, et de nous demander s’il n’est pas possible de permettre à des soignants de suivre des formations complémentaires ou, via la VAE, la validation des acquis de l’expérience, d’obtenir des compétences supplémentaires.
Je confie au président du Conseil national de l’ordre des médecins et au président du Conseil national de l’ordre des infirmiers une mission préfiguratrice en la matière ; je leur pose la question de savoir s’ils considèrent qu’il y a la place pour de telles évolutions dans notre système de santé, et je souhaite qu’ils y travaillent et y répondent en toute liberté.
Si, à l’issue de cette mission, ils répondent que cette place n’existe pas, nous aurons au moins eu cette réflexion, et je considérerai que la France n’a bel et bien pas la place pour ce type de professions intermédiaires, quand cette place existe aux États-Unis, au Canada, en Suède, dans nombre de pays que l’on prend souvent en exemple en matière d’organisation de la santé.
Si, au contraire, après avoir rencontré les différentes professions et concerté largement, ils répondent qu’il peut être intéressant de creuser et qu’il est possible de faire évoluer notre système, très bien !
Poser une question, ce n’est jamais un drame, au contraire. Je souhaite donc que ce rapport, dont je confie la réalisation aux ordres, puisse être remis publiquement et présenté devant le Parlement, car c’est un point très important.
S’il me semble important que la création d’une profession intermédiaire ne soit pas gravée dans le marbre de la loi – je l’ai dit à l’Assemblée nationale –, je suis néanmoins pour que cette réflexion soit menée, et qu’elle le soit dans un climat de sérénité.
Bien que cette mission ait vocation à vivre sa vie, que ce soit sous la forme d’un rapport remis au Parlement ou sous une autre forme, j’émets donc un avis favorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Monsieur le ministre, je comprends votre logique. Vous pensez qu’il pourrait être intéressant de créer une nouvelle profession dans le système de santé – je dis bien « vous », et non pas la députée qui a écrit cette proposition de loi. Au moins, c’est très clair ! Et vous avez missionné des représentants d’institutions de notre système de soins pour mener une réflexion à ce sujet. Très bien !
Cependant, à quoi sert cet article ? Pardonnez-moi de le faire remarquer, mais vous n’avez pas besoin que nous délibérions et votions pour qu’il nous soit remis un rapport, puisque vous avez créé une mission exploratoire. Ne mettons pas la charrue avant les bœufs ! (MM. Michel Canevet et Claude Kern approuvent.)
Cet article 1er était prématuré et inadapté – vous venez de nous le dire. Dont acte ! Je vous félicite pour cette prise de position. Mais ce rapport n’a strictement aucun intérêt. Vous vouliez faire plaisir à un parlementaire ? Très bien, mais attendons que cette mission soit menée. Nous en examinerons les résultats, et s’il se révèle utile de créer une nouvelle profession, soit.
Je souscris aux arguments de notre rapporteur : deux nouvelles professions sont en cours de détermination dans notre système de santé, celle d’infirmier en pratique avancée et celle d’assistant médical ; dans les deux cas, c’est le cadre conventionnel qui est en train de travailler – vous suivez ces travaux de près – aux conditions d’émergence de ces professions, et c’est très bien comme ça.
Je suivrai donc la position de la commission. (Applaudissements sur des travées des groupes SER et UC.)
M. Olivier Henno. Très bien !
Mme la présidente. En conséquence, l’article 1er demeure supprimé.
Articles additionnels après l’article 1er
Mme la présidente. L’amendement n° 178 rectifié, présenté par Mme Guillotin, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Fialaire, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa du III de l’article L. 1110-4, après la référence : « au sens de l’article L. 1110-12 », sont insérés les mots : « ou à la même équipe coordonnée de soins de ville, au sens de l’article L. 1110-12-1 » ;
2° Après l’article L. 1110-12, il est inséré un article L. 1110-12-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1110-12-1. – Pour l’application du présent titre, l’équipe coordonnée de soins de ville est composée d’au moins trois professionnels de santé, dont un médecin. Elle a pour mission d’apporter une réponse coordonnée de proximité aux besoins de prise en charge des patients, dans les conditions fixées dans l’accord-cadre interprofessionnel prévu par l’article L. 162-1-13 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à Mme Véronique Guillotin.
Mme Véronique Guillotin. Cet amendement vise à permettre la constitution d’équipes coordonnées de soins autour du patient.
L’idée est simplement d’accorder une reconnaissance à ces équipes de soins naturellement formées autour des patients et choisies par eux et de permettre aux professionnels de santé de se coordonner de manière souple et simple, sans avoir à créer de structure associative.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Je souscris à l’objectif consistant à renforcer la coordination entre les acteurs de proximité. En effet, les conclusions de la mission pilotée par Nicole Notat sur le Ségur de la santé ont mis en exergue le besoin de développer des outils simples, notamment numériques, pour faciliter cette coopération.
Il me semble toutefois que la définition de l’équipe de soins des articles L. 1110-4 et L. 1110-12 du code de la santé publique est déjà relativement souple, puisqu’elle vise tout « ensemble de professionnels qui participent directement au profit d’un même patient à la réalisation d’un acte […] ou aux actions nécessaires à la coordination de plusieurs […] actes, et qui […] se sont vu reconnaître la qualité de membre de l’équipe de soins par le patient ». Je ne vois donc pas de plus-value dans la modification proposée.
Par conséquent, la commission demande le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Guillotin, l’amendement n° 178 rectifié est-il maintenu ?
Mme Véronique Guillotin. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 178 rectifié est retiré.
L’amendement n° 71 rectifié, présenté par M. Jomier, Mme Lubin, MM. Kanner et Bourgi, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 4011-1 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au début, est insérée la mention : « I » ;
2° Il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :
« II. – Par dérogation au I, des acteurs issus des associations mentionnées à l’article L. 1114-1 du présent code peuvent prendre part à des activités de dépistage, de prévention et de diagnostic, dans le cadre des démarches de coopération engagées à l’initiative de professionnels de santé. Ces acteurs interviennent dans les limites de leurs connaissances et de leur expérience, dans le cadre de protocoles définis par décret. »
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. L’objet de cet amendement est de mieux formaliser la participation des associations agréées en santé aux actions de dépistage, de prévention et de diagnostic.
Ces associations ont en effet des compétences qui sont validées par des formations dont le cahier des charges – je le rappelle – est réglementé. Elles exercent déjà régulièrement ces compétences aux côtés des professionnels de santé. C’est d’ailleurs pour ces motifs que la Haute Autorité de santé a récemment recommandé d’intégrer les associations agréées en santé à la stratégie de dépistage de la covid-19.
La rédaction de cet amendement s’appuie en particulier sur l’expérience de la lutte contre le VIH et sur le rapport dressé par la Cour des comptes, qui avait mené, à la demande du Sénat, une enquête sur les évolutions majeures de la politique de prévention et de prise en charge depuis 2010.
La Cour recommandait une montée en charge, s’agissant notamment de mieux associer les associations agréées qui ont une activité dans le domaine de la qualité de la santé et de la prise en charge des malades.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement vise à étendre les protocoles de coopération entre professionnels de santé à des associations d’usagers du système de santé pour des activités de dépistage, de prévention et de diagnostic.
L’idée est intéressante à l’heure du patient expert, ou pour reconnaître l’implication de ces associations.
Toutefois, parce qu’il y a un « toutefois », il me semble que la mesure proposée conduit à assimiler ces acteurs à des professionnels de santé en en faisant des acteurs à part entière de protocoles de coopération. Il me paraît préférable de trouver un autre moyen, plus adéquat, de les associer à la politique de santé, plutôt dans le champ de la prévention, d’ailleurs, que dans celui du diagnostic qui est ici également visé.
La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de cinq amendements identiques.
L’amendement n° 1 rectifié quater est présenté par MM. Mouiller, Kern et Favreau, Mmes Malet, Micouleau et F. Gerbaud, M. Cardoux, Mmes Gruny et Lassarade, M. Burgoa, Mme Bonfanti-Dossat, M. Sol, Mme Létard, M. Panunzi, Mme Estrosi Sassone, MM. Regnard et D. Laurent, Mmes Belrhiti et L. Darcos, MM. Pellevat, Bascher, Bouloux, Karoutchi et Bonhomme, Mmes Lavarde et Deromedi, MM. Lefèvre, Vogel et Somon, Mme Lopez, MM. Cigolotti, E. Blanc, Cuypers et Longeot, Mme de Cidrac, M. Belin, Mme Raimond-Pavero, MM. Sautarel, Brisson et Henno, Mmes Chauvin et Schalck, MM. Cambon, Duffourg, Piednoir, Chatillon et Richard, Mme Guidez, MM. Détraigne et B. Fournier, Mme Demas, M. de Nicolaÿ, Mmes de La Provôté, Imbert et Borchio Fontimp, M. Charon, Mmes M. Mercier, Muller-Bronn et Billon, MM. Savin et Chaize, Mme Di Folco, M. Segouin, Mmes Herzog et Joseph, MM. Bonne, Bas et Chauvet, Mme N. Delattre, MM. Mandelli et Cadec, Mme Berthet, M. Anglars, Mme Puissat, MM. Frassa et P. Martin, Mme Garriaud-Maylam, MM. Laménie, Rapin, Nougein et Klinger, Mme Gatel, MM. Delcros, Houpert, Genet, J.-M. Boyer, Duplomb et Rojouan et Mme Noël.
L’amendement n° 59 rectifié ter est présenté par MM. A. Marc, Capus, Chasseing, Decool, Guerriau, Lagourgue et Médevielle, Mme Mélot, MM. Menonville, Wattebled et Malhuret, Mme Paoli-Gagin et M. Verzelen.
L’amendement n° 79 est présenté par Mmes Poumirol et Lubin, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 135 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 177 rectifié est présenté par Mme Guillotin, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Fialaire, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa du II de l’article L. 4301-1 du code de la santé publique est complété par les mots : « , ainsi que les détenteurs du diplôme d’État d’infirmier anesthésiste, du certificat d’aptitude aux fonctions d’infirmier spécialisé en anesthésie réanimation ou du certificat d’aptitude aux fonctions d’aide anesthésiste ».
La parole est à M. Philippe Mouiller, pour présenter l’amendement n° 1 rectifié quater.
M. Philippe Mouiller. Cet amendement a pour objet de favoriser le déploiement de l’exercice en pratique avancée de certains auxiliaires médicaux, en intégrant la profession réglementée des infirmiers anesthésistes dans le dispositif législatif existant.
Cette profession ancienne, dont l’apport essentiel au système de santé est très largement démontré, durant la pandémie actuelle comme à chaque crise sanitaire ou événement exceptionnel d’ampleur, a d’ores et déjà le niveau de qualification requis, puisque le diplôme d’État d’infirmier anesthésiste est adossé au grade de master 2 depuis 2014.
Compte tenu de sa grande autonomie de pratique sous supervision médicale, cette profession indispensable à la réalisation des quelque 11 millions d’anesthésies pratiquées chaque année est très impliquée dans les secours préhospitaliers ; son exercice professionnel au quotidien correspond depuis toujours à celui d’une profession de santé intermédiaire en pratique avancée, comme en attestent de nombreuses institutions et organisations nationales et internationales.
Cet amendement vise à rattraper un oubli et à reconnaître ces professionnels de santé et leur pratique historique, essentiels en temps de crise comme au quotidien, tout en produisant un gain d’efficience pour notre système de santé.
Une telle initiative est très largement soutenue par de nombreux médecins et syndicats de médecins anesthésistes réanimateurs.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l’amendement n° 59 rectifié ter.
M. Daniel Chasseing. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour présenter l’amendement n° 79.
Mme Émilienne Poumirol. J’ajoute à ce que vient de dire M. Mouiller que les infirmiers anesthésistes sont titulaires d’un diplôme de formation universitaire de grade master 2. En outre, en ce qui concerne l’assimilation de ces infirmiers anesthésistes à des professionnels autorisés à exercer en pratique avancée, les syndicats de médecins anesthésistes réanimateurs ont manifesté leur accord.
Il est donc extrêmement important, a fortiori en ce moment, de concrétiser cette demande.
Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 135.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Toute la filière des infirmiers et infirmières anesthésistes diplômés d’État, les IADE, compte sur l’engagement du Sénat pour que cet amendement soit voté et pour que soit réaffirmée la place effective qu’ils occupent au sein de notre système de santé.
L’activité professionnelle des IADE constitue depuis de nombreuses années un exercice paramédical avancé. Les infirmiers et infirmières anesthésistes bénéficient d’une formation et sont reconnus par leurs pairs, au niveau international, comme des professionnels en pratique avancée.
La pandémie de covid-19 a démontré, s’il le fallait encore, l’utilité de leur polyvalence et la pertinence de leur modèle.
Cet amendement a été déposé par différents groupes politiques, ce qui prouve que le sujet est transpartisan. Je vous invite donc à le voter, mes chers collègues !
Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 177 rectifié.
Mme Véronique Guillotin. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. On compte plus de 11 000 infirmiers anesthésistes qui ont suivi une formation en deux ans conduisant au diplôme d’État d’infirmier anesthésiste de grade master.
Cette qualification leur reconnaît une expertise technique dans un champ de compétences pluridisciplinaire qui regroupe l’anesthésie, la réanimation, les soins d’urgence et la prise en charge de la douleur aiguë et chronique.
L’évolution défendue par les auteurs de ces amendements, qui souhaitent voir reconnaître à cette spécialisation le statut d’un exercice en pratique avancée, est soutenue par la profession, notamment par la société savante des infirmiers anesthésistes.
Cette demande traduit également des inquiétudes, qui sont liées à l’absence de valorisation de cette spécialisation ainsi qu’au projet de création d’un statut d’infirmier en pratique avancée dans le domaine des urgences, empiétant sur leur champ de compétences.
Ces inquiétudes quant à une fragilisation de la profession d’IADE sont partagées par la société savante des anesthésistes réanimateurs, qui souligne le rôle essentiel des infirmiers anesthésistes et considère que, de fait, ils exercent déjà en pratique avancée, en autonomie déléguée aux côtés des médecins.
Il serait intéressant, monsieur le ministre, de connaître les intentions du Gouvernement quant au statut d’infirmier anesthésiste et à sa valorisation.
Dans l’attente de cette précision, l’adoption de cet amendement permettrait de clarifier la place des infirmiers anesthésistes et d’asseoir une reconnaissance attendue par la profession.
La commission a donc émis un avis favorable sur ces amendements identiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Il sera, hélas, défavorable !
On conçoit les infirmiers en pratique avancée non pas par spécialité, mais par grand domaine, alors que les infirmiers spécialisés, eux, sont organisés par spécialité médicale, comme les infirmiers de bloc opératoire diplômés d’État, les Ibode, les IADE, etc.
Qu’il soit nécessaire de créer des passerelles pour permettre à des infirmiers anesthésistes qui le souhaiteraient de devenir plus vite IPA, notamment pour exercer dans le domaine des urgences, avec des formations plus courtes, je le concède volontiers : on peut y travailler sans aucun problème.
Néanmoins, leur reconnaître immédiatement le statut d’IPA pose problème. En effet, l’expertise d’un IPA est par définition celle d’un praticien médical, ce qui implique, de la part du professionnel, une appréciation globale du patient et une démarche diagnostique et thérapeutique autonome.
Un IADE, bien qu’il soit extrêmement compétent dans son champ d’action, exerce, lui, dans un domaine technique sous le contrôle exclusif d’un médecin anesthésiste, et certainement pas en autonomie.
Les IPA ont vocation à se voir confier des missions vraiment transversales – consultations, interventions dans des structures très variées –, qui ne sont pas directement liées à une spécialité médicale, ce qui n’est pas le cas des IADE. Ceux-ci, je le répète, sont spécialisés dans le domaine des soins anesthésiques.
Pour faciliter les passerelles et permettre l’accès au statut, il n’y aurait pas aucun problème. Mais reconnaître aux IADE le statut d’IPA serait contraire à l’esprit de la loi qui a été votée par les parlementaires en la matière.
J’émets donc un avis défavorable sur ces amendements identiques.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1 rectifié quater, 59 rectifié ter, 79, 135 et 177 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 1er.
L’amendement n° 15 rectifié bis, présenté par MM. Savin et Piednoir, Mme Imbert, M. Hugonet, Mme Guillotin, MM. Brisson, Rapin, Belin, E. Blanc et Regnard, Mme L. Darcos, M. Longeot, Mme Belrhiti, MM. Henno et D. Laurent, Mmes Dumas, Chauvin et Puissat, MM. J.M. Boyer et Charon, Mme Billon, MM. Longuet, Saury, Bouchet, Burgoa, Chatillon et B. Fournier, Mme de Cidrac, MM. Duffourg, Wattebled, Kern, Le Gleut et P. Martin, Mme Deromedi, MM. Allizard et Paccaud, Mmes Berthet et F. Gerbaud, MM. Bonne, Fialaire et Vanlerenberghe, Mme Canayer, M. Genet, Mme Mélot, MM. Klinger, Sautarel, Houpert, Dallier, Vogel, Sol et Decool, Mmes Gruny et Schalck, M. Pellevat, Mme Gatel et MM. Chasseing et Segouin, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article L. 1172-1, après le mot : « traitant », sont insérés les mots : « ou un médecin spécialiste » ;
2° Au second alinéa de l’article L. 1528-1, les mots : « n° 2016-41 du 26 janvier 2016 » sont remplacés par les mots : « n° du visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification ».
La parole est à Mme Frédérique Puissat.
Mme Frédérique Puissat. Cet amendement de notre collègue et ami Michel Savin – il a d’ailleurs beaucoup d’amis, car nombre d’entre nous ont cosigné ce texte – vise à donner une place au médecin spécialiste dans la prescription de l’activité physique adaptée, étant entendu qu’aujourd’hui c’est le médecin traitant qui a le monopole de la prescription d’une activité physique adaptée dans le cadre d’un parcours de soins pour le traitement d’une affection de longue durée.
On sait que, en la matière, les choses sont parfois complexes pour les patients et coûteuses ; l’idée ici est de donner au médecin spécialiste le même rang qu’au médecin traitant.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission a considéré qu’il était préférable de préserver le rôle du médecin traitant dans la coordination du parcours de soins.
Elle a donc émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 15 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 14 rectifié, présenté par MM. Savin et Piednoir, Mmes Imbert et Guillotin, MM. Hugonet, Brisson, Rapin, Belin, E. Blanc et Regnard, Mme L. Darcos, M. Longeot, Mme Belrhiti, MM. Henno et D. Laurent, Mmes Dumas, Chauvin et Puissat, MM. J.M. Boyer et Charon, Mme Billon, MM. Longuet, Saury, Bouchet, Burgoa, Chatillon et B. Fournier, Mme de Cidrac, MM. Duffourg, Wattebled, Kern, Le Gleut et P. Martin, Mme Deromedi, MM. Allizard et Paccaud, Mmes Berthet et F. Gerbaud, MM. Bonne, Fialaire et Vanlerenberghe, Mme Canayer, M. Genet, Mme Mélot et MM. Klinger, Sautarel, Houpert et Dallier, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport dressant un état des lieux des professionnels pouvant assurer la prise en charge et le suivi des patients ayant une prescription d’activité physique adaptée prévue à l’article L. 1172-1 du code de la santé publique.
Dans un objectif de développement de ces prescriptions et du suivi des malades, ce rapport met en avant les formations existantes ainsi que les débouchés de ces dernières. Il évalue également l’opportunité de la mise en œuvre d’une profession intermédiaire ou la création d’une nouvelle profession de santé, en envisageant dans ce cadre un rapprochement entre les filières universitaires sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS) et les filières santé.
La parole est à Mme Frédérique Puissat.
Mme Frédérique Puissat. Voilà un nouvel amendement de M. Savin – comme il s’agit de sport, nous sommes joueurs et tentons de demander au Gouvernement un rapport (Sourires.), dressant un état des lieux des professionnels qui peuvent assurer la prise en charge et le suivi des patients dans le cadre d’une prescription d’activité physique adaptée.
Je précise que la commission des affaires sociales a organisé, conjointement avec la commission de la culture, des tables rondes sur le thème « sport et santé » et que nous avons pu, à cette occasion, noter combien il était difficile de savoir quels étaient les spécialistes intervenant au titre de ces activités physiques adaptées, mais également de connaître les formations nécessaires pour créer d’autres filières.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Le sujet du sport-santé est important. Les commissions de la culture et des affaires sociales y ont d’ailleurs consacré une table ronde en janvier dernier ; notre collègue vient d’y faire allusion.
Une meilleure qualification des professionnels intervenant dans la prise en charge et le suivi des patients dans le cadre d’une prescription d’activité physique adaptée serait opportune, mais je doute que cela passe par la création d’une nouvelle profession de santé.
Quoi qu’il en soit, une demande de rapport ne me paraît pas constituer une réponse opérationnelle, et la commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 14 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 1er bis A
(Supprimé)
Article 1er bis
Après l’article L. 4011-4 du code de la santé publique, sont insérés des articles L. 4011-4-1 à L. 4011-4-8 ainsi rédigés :
« Art. L. 4011-4-1. – Des professionnels de santé exerçant en secteur ambulatoire ou au sein d’un service ou établissement médico-social et travaillant en équipe peuvent, à leur initiative, élaborer un protocole autre qu’un protocole national proposant une organisation innovante. Ce protocole est instruit, autorisé, suivi et évalué dans le cadre de la procédure des expérimentations à dimension régionale mentionnées au III de l’article L. 162-31-1 du code de la sécurité sociale. Le protocole n’est valable que pour l’équipe promotrice, dont les professionnels de santé sont tenus de se faire enregistrer sans frais auprès de l’agence régionale de santé. »
« Art. L. 4011-4-2 à L. 4011-4-8. – (Supprimés)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Longeot, sur l’article.
M. Jean-François Longeot. L’article 1er bis traduit une nouvelle refonte des protocoles de coopération, la troisième en moins de deux ans.
Le développement des protocoles de coopération est un levier majeur pour libérer du temps médical dans tous les territoires et, ainsi, adapter l’offre de soins à la demande.
Il ne faudrait cependant pas perdre de vue la nécessité d’une réflexion globale sur les compétences des professionnels là où il s’agit, toujours dans la même perspective, de libérer du temps médical pour répondre à la demande de soins de nos concitoyens dans tous les territoires.
C’est pourquoi je salue le travail sur cet article de la commission des affaires sociales, qui a rétabli les dispositions de la loi Santé de 2019 qui n’ont jamais été appliquées à ce jour.
Il est important que cette possibilité soit offerte à tous les professionnels de santé travaillant en équipe, et non aux seules équipes hospitalières.
Toutefois, je ne puis m’empêcher d’observer que, en dépit de notre activisme législatif collectif, les constats demeurent inchangés : les inégalités territoriales dans l’accès aux soins s’accroissent et constituent une potentielle bombe à retardement. Il est donc dommage que cette proposition de loi ne permette pas de déployer des mesures plus ambitieuses.
La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, que j’ai l’honneur de présider, a formulé à plusieurs reprises des propositions afin de résorber les inégalités d’accès aux soins. Je souhaite que nous puissions collectivement avancer sur ce chemin et continuer à travailler sur d’autres dossiers essentiels, comme la régulation de l’offre de soins, la gouvernance des agences régionales de santé ou la télémédecine.
L’examen du projet de loi 4D, c’est-à-dire différenciation, décentralisation, déconcentration et décomplexification, permettrait de renforcer la dimension territoriale de la politique de santé. En attendant, nous devrons nous contenter de ce texte.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Canevet, sur l’article.
M. Michel Canevet. Le Ségur de la santé a permis d’apporter un certain nombre de réponses à des attentes qui s’étaient exprimées sur le terrain de manière extrêmement forte. Je pense en particulier à la question de la formation de 6 000 infirmières et de 10 000 aides-soignants supplémentaires, à condition que l’on trouve suffisamment de candidats.
Il faudra certainement poursuivre cet effort à l’avenir. On note en effet aujourd’hui, monsieur le ministre, que près de 10 % de ces postes sont vacants dans le secteur sanitaire.
Cela signifie que l’effort ici engagé devra être poursuivi, afin qu’il soit répondu aux problèmes qui se posent en matière de personnels ; une telle réponse est indispensable si l’on veut assurer une bonne couverture et une bonne prise en charge de l’ensemble de nos concitoyens.
Ce texte vise à améliorer le système de santé ; il aurait gagné, monsieur le ministre, à améliorer la complémentarité entre le secteur public et le secteur privé : il s’agit de ne pas se cantonner aux sujets relatifs au secteur public, mais de bien intégrer dans nos réflexions le fait que le secteur privé participe, dans notre pays, au service public de l’hospitalisation et de la prise en charge médicale. Il est donc indispensable qu’un certain nombre d’améliorations soient aussi apportées dans le secteur privé.
Il est question par ailleurs, dans ce texte, de simplification ; j’ai encore en mémoire, à titre d’exemple, une demande d’installation de pharmacies dans le Finistère renvoyant à un schéma qui devait être élaboré par l’ARS. Or les ARS ne pouvaient élaborer de tels schémas, puisqu’elles étaient à l’époque, en 2019, dans l’attente d’un décret qui n’a probablement toujours pas été publié depuis lors…
C’est dire que le système avec lequel nous fonctionnons présente des lourdeurs extrêmement fortes, qui empêchent, sur le terrain, d’apporter des réponses simples aux problèmes auxquels nous sommes confrontés, tout simplement parce qu’il est nécessaire de suivre des orientations et des méthodologies émanant du Gouvernement ou des services centraux.
Cette situation nuit à la qualité de la réponse apportée aux besoins de nos territoires ; je tenais à le dire ici, à l’occasion de cette discussion sur la simplification. (Applaudissements sur des travées du groupe UC.)
Mme la présidente. L’amendement n° 3 rectifié bis, présenté par MM. Bonne, Bascher, Bazin, E. Blanc, Bouloux, Brisson, Burgoa et Chaize, Mme Chauvin, M. Cuypers, Mme L. Darcos, M. Détraigne, Mmes Di Folco, Estrosi Sassone, Garriaud-Maylam, F. Gerbaud, Gruny et Guidez, MM. Henno et Laménie, Mme Lassarade, MM. Moga, Paccaud, Rapin, Savary, Segouin et Gremillet et Mme Schalck, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Bonne.
M. Bernard Bonne. Le dispositif prévu à l’article 1er bis permet à des professionnels de santé exerçant au sein d’établissements médico-sociaux publics ou privés d’élaborer des protocoles locaux de coopération interprofessionnelle. Il autorise par conséquent des non-médecins à réaliser des actes médicaux qui relèveraient, hors de ce cadre, de l’exercice illégal de la médecine.
Cet exercice dérogatoire, qui ne prévoit aucune relecture par une instance extérieure, pourrait remettre en cause la qualité des soins et la sécurité des patients et faire prendre aux professionnels de santé qui s’engageraient dans de tels protocoles une responsabilité considérable.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission a modifié cet article, car la rédaction figurant à l’origine dans la proposition de loi ne levait pas toutes les interrogations des professionnels de santé.
Il serait toutefois dommage de priver totalement les équipes ambulatoires ou médico-sociales de la possibilité d’organiser des délégations d’actes, alors que la loi d’accélération et de simplification de l’action publique, dite « loi ASAP », a récemment conduit à recentrer les protocoles locaux de coopération sur les seules équipes hospitalières.
La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Bonne, l’amendement n° 3 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Bernard Bonne. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 3 rectifié bis est retiré.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 11 rectifié ter est présenté par MM. Mouiller et Henno, Mmes Lavarde, L. Darcos et Di Folco, M. Cambon, Mme Deromedi, M. Pellevat, Mme Belrhiti, MM. Cuypers, Louault, Perrin, Rietmann et Sol, Mmes Chauvin, Dumas, Malet et Puissat, MM. Daubresse, Savary et Burgoa, Mme Lassarade, MM. Charon, Bazin, Lefèvre, Saury, Somon et Bouchet, Mme Micouleau, M. Belin, Mmes Joseph et F. Gerbaud, MM. Mandelli, Rapin, Piednoir et Paccaud, Mme Gruny, MM. Meurant, Allizard, Kern et Brisson, Mme Estrosi Sassone, MM. Moga, Laménie et P. Martin, Mme Raimond-Pavero, MM. Frassa, E. Blanc, Panunzi et Cadec, Mme Billon, MM. Genet et D. Laurent, Mme Richer, MM. Nougein, Cardoux, B. Fournier, Chauvet et Favreau, Mme Bonfanti-Dossat et MM. Longeot et Gremillet.
L’amendement n° 91 est présenté par Mme Meunier, M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 2, première phrase
1° Après le mot :
équipe
insérer les mots :
de soins mentionnée au 3° de l’article L. 1110-12
2° Après la première occurrence du mot :
protocole
insérer les mots :
de coopération
La parole est à M. Philippe Mouiller, pour présenter l’amendement n° 11 rectifié ter.
M. Philippe Mouiller. Il s’agit d’un amendement de précision : il convient d’indiquer qu’il est bien question de la coopération au sein des équipes de soins.
Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour présenter l’amendement n° 91.
Mme Michelle Meunier. Mon amendement vise à apporter des précisions sur les deux points que vient d’évoquer mon collègue : le protocole de coopération et les équipes qui sont mentionnées. Celles-ci deviendraient des équipes de soins définies dans le code de la santé publique.
J’ajoute que ces amendements ont été travaillés avec le collectif Handicaps, qui représente plus de quarante-huit associations nationales œuvrant dans le domaine des droits des personnes en situation de handicap et de leurs familles.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L’avis est favorable, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Sur le fond, je suis favorable à ces amendements. Nous avons néanmoins une lecture manifestement quelque peu différente de la notion d’équipe et de celle de protocole, telle qu’elle figure dans le I de l’article L. 4011-4-1 du code de la santé publique, qui reprend mot à mot l’article L. 4011-1 relatif aux protocoles de coopération.
Il est question des professionnels de santé travaillant en équipe : il n’y a aucune ambiguïté sur le fait qu’il s’agit bien de protocoles de coopération.
Nous avons le même objectif, et je pense que la rédaction que nous proposons est conforme au droit actuel.
Je demande donc le retrait de ces deux amendements identiques, qui sont satisfaits.
Mme la présidente. Monsieur Mouiller, l’amendement n° 11 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Philippe Mouiller. Je fais confiance à M. le ministre. Compte tenu de son argumentaire, je retire l’amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 11 rectifié ter est retiré.
Madame Meunier, l’amendement n° 91 est-il maintenu ?
Mme Michelle Meunier. Comme mon collègue, je fais confiance à M. le ministre. Je retire donc l’amendement, même si nous resterons vigilants.
Mme la présidente. L’amendement n° 91 est retiré.
L’amendement n° 45 rectifié, présenté par MM. J.M. Arnaud et Belin, Mme Billon, MM. Brisson, Canevet, Delahaye, Delcros et Détraigne, Mme Doineau, M. Duffourg, Mme Férat, MM. Laménie et Le Nay, Mme Loisier, MM. Longeot, P. Martin et Moga et Mmes Perrot et Saint-Pé, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
, afin notamment de renforcer le maillage territorial de l’offre de soins
La parole est à M. Jean-Michel Arnaud.
M. Jean-Michel Arnaud. La prise en charge du patient demeure le mètre étalon dans le calibrage des protocoles de coopération. Néanmoins, la dimension géographique et, au fond, la proximité de l’offre de soins sont déterminantes pour une prise en charge de qualité.
Dans les départements ruraux, qui sont souvent des déserts médicaux, le temps de trajet entre le domicile et l’établissement de santé le plus proche influe directement sur le bien-être des citoyens et l’attractivité des territoires.
Pour autant, l’offre de soins s’amenuise dans les territoires ruraux, plus particulièrement dans les territoires de montagne. À titre d’exemple, je citerai, dans les Hautes-Alpes, la fermeture du service des urgences de l’hôpital d’Embrun, le manque d’effectifs chronique dans les hôpitaux de Gap et de Briançon et la diminution importante de la population médicale.
C’est pourquoi le maillage territorial de l’offre de soins doit être le dénominateur commun de tous les protocoles de coopération. Ces derniers doivent être le moyen non pas de mutualiser des services ou de fermer des unités, comme c’est le cas dans mon département, mais bien d’adapter l’offre de soins à un territoire donné.
C’est la raison pour laquelle je propose un amendement visant à compléter la première phrase de l’alinéa 2 de l’article 1er bis, afin que la dimension territoriale soit également prise en compte dans la définition des protocoles de coopération.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement vise à affirmer un objectif territorial de l’offre de soins dans les protocoles de coopération.
Or il peut en effet s’agir d’un objectif de ces protocoles, mais pas du seul objectif. Il faut tout d’abord améliorer la prise en charge des patients. Il ne me semble pas utile de commencer à énumérer les objectifs de ces protocoles, car nous risquons d’en oublier en route.
Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Arnaud, l’amendement n° 45 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Michel Arnaud. Oui, je le maintiens, madame la présidente.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 18 rectifié quater est présenté par Mmes Imbert et Belrhiti, MM. Laménie et D. Laurent, Mme Estrosi Sassone, M. Sautarel, Mmes Chauvin et Boulay-Espéronnier, MM. Burgoa, Lefèvre, Bouloux, Sol, Perrin et Rietmann, Mmes Lavarde, Deromedi et Gruny, MM. Bascher et Mouiller, Mmes Procaccia et Joseph, M. Pellevat, Mme Puissat, MM. Bonhomme et Savin, Mmes Lopez et Micouleau, MM. Bonne et Belin, Mme Dumont, M. Brisson, Mme Demas, M. Pointereau, Mme L. Darcos, MM. Regnard et Piednoir, Mme F. Gerbaud et MM. Favreau, Saury, Klinger, Vogel et Duplomb.
L’amendement n° 72 rectifié est présenté par M. Jomier, Mme Lubin, MM. Kanner et Bourgi, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 3
Rétablir les articles L. 4011-4-4 à L. 4011-4-7 dans la rédaction suivante :
« Art. L. 4011-4-4. – Des professionnels de santé exerçant dans le cadre des expérimentations mentionnées à l’article L. 162-31-1 du code de la sécurité sociale, peuvent, à leur initiative, élaborer et mettre en œuvre des protocoles locaux de coopération avec l’accord du Conseil stratégique de l’innovation en santé.
« Ces protocoles satisfont aux exigences essentielles de qualité et de sécurité mentionnées à l’article L. 4011-2 du présent code.
« Art. L. 4011-4-5. – Des professionnels de santé exerçant au sein des centres mentionnés à l’article L. 6323-1, peuvent, à leur initiative, élaborer et mettre en œuvre des protocoles locaux de coopération sur décision du directeur du centre.
« Ces protocoles satisfont aux exigences essentielles de qualité et de sécurité mentionnées à l’article L. 4011-2.
« Art. L. 4011-4-6. – Des professionnels de santé exerçant au sein des centres mentionnés à l’article L. 3121-2, peuvent, à leur initiative, élaborer et mettre en œuvre des protocoles locaux de coopération sur décision du directeur du centre.
« Ces protocoles satisfont aux exigences essentielles de qualité et de sécurité mentionnées à l’article L. 4011-2.
« Art. L. 4011-4-7. – Les associations mentionnées à l’article L. 1114-1, lorsqu’elles emploient des professionnels de santé, peuvent, à l’initiative de ces derniers, élaborer et mettre en œuvre des protocoles locaux de coopération avec l’accord des autorités administratives citées au même article.
« Ces protocoles satisfont aux exigences essentielles de qualité et de sécurité mentionnées à l’article L. 4011-2. »
La parole est à Mme Corinne Imbert, pour présenter l’amendement n° 18 rectifié quater.
Mme Corinne Imbert. Les protocoles de coopération permettent d’innover dans le parcours de soins et de répondre au mieux aux attentes des populations.
De telles possibilités, élargies aux équipes de soins primaires, aux communautés professionnelles territoriales de santé, les CPTS, et aux établissements sociaux et médico-sociaux, les ESMS, par cette proposition de loi, doivent être ouvertes à d’autres structures accueillant des publics rencontrant des besoins spécifiques.
Certains centres de santé, y compris ceux qui sont créés dans le cadre des expérimentations mentionnées à l’article L. 162-31-1 du code de la santé publique, font déjà le pari d’une approche adaptée aux populations qui les fréquentent. Les centres gratuits d’information, de dépistage et de diagnostic, les Cegidd, qui concentrent des publics particulièrement exposés aux risques de contamination par les infections sexuellement transmissibles, doivent aussi pouvoir moduler leurs modalités d’accueil et d’accompagnement.
Enfin, de nombreuses associations accueillent des professionnels de santé dans le cadre de leurs activités ; de fait, elles devraient être concernées par ces dispositifs et par les avantages qu’ils offrent.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour présenter l’amendement n° 72 rectifié.
M. Bernard Jomier. Après le vote de l’amendement de notre collègue Jean-Michel Arnaud, je voudrais revenir sur les protocoles de coopération.
En effet, une confusion est faite sur ces protocoles, confusion qui s’explique de la façon suivante : en 2019, nous avons voté, lors de l’examen du projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé, l’expérimentation des protocoles locaux de coopération. Un décret est paru peu après, à la fin de 2019 ou au début de 2020, pour en préciser les conditions. Puis est arrivée la loi ASAP qui restreignait les protocoles aux équipes hospitalières. Et aujourd’hui cette proposition de loi ouvre l’exercice coordonné, donc en ville, au secteur médico-social.
La situation est d’autant plus complexe que l’ordonnance découlant de la loi « Santé » n’a toujours pas été publiée : or elle va probablement préciser de nouveau les conditions d’application de ces protocoles.
C’est à juste titre que M. le rapporteur nous répond que nos amendements ne sont peut-être pas nécessaires, car il n’est pas nécessaire d’entrer dans le détail. Mais si nous faisons ces propositions, c’est bien parce que le flou règne. Voilà pourquoi nous avons déposé le même amendement que Corinne Imbert. La réflexion sur le sujet vient d’Aides, de cette mouvance associative d’acteurs de santé.
Nous tentons de préciser les choses, et il serait bon que l’on y voie clair. En effet, la loi ASAP et la loi Santé émanent de la même majorité parlementaire : c’est le même gouvernement qui a fait voter deux dispositifs qui paraissent légèrement différents – c’est un euphémisme !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Ces deux amendements identiques visent à prendre en compte le rôle des centres de santé, des associations d’usagers ou de structures telles que les Cegidd, en leur permettant d’adapter les modalités de prise en charge dans le cadre de protocoles de coopération.
La rédaction de l’article 1er bis, issue des travaux de la commission des affaires sociales, est à nos yeux assez large, contrairement à celle qui a été adoptée par l’Assemblée nationale, pour permettre à toute équipe de soins, même en dehors de CPTS structurées ou de maisons de santé, de se saisir de cette occasion.
Il me semble donc que cela satisfait les intentions des auteurs des amendements. Il n’est donc pas utile de décliner toute la liste des structures au sein desquelles un protocole local de coopération peut être mis en place.
Par conséquent, la commission demande le retrait de ces amendements identiques, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Je suis très sensible à l’intention d’étendre plus largement l’opportunité de mettre en œuvre des protocoles locaux.
Néanmoins, cette possibilité existe déjà.
Elle a été ouverte par les dispositions de la loi du 22 décembre 2018, relatives aux équipes conduisant des expérimentations dans le cadre du code de la sécurité sociale, et figure à l’article L. 162-31-1 dudit code, auquel vous vous référez, madame la sénatrice.
Elle est également ouverte de façon générique aux centres de santé, en vertu de l’article L. 4011-4-1 adopté par l’Assemblée nationale. Cet article mentionne explicitement les centres de santé, au titre de l’article L. 1411-11-1 du code de la santé publique relatif aux équipes de soins primaires.
Par ailleurs, il existe également un protocole national de coopération qui est en cours d’instruction devant la Haute Autorité de santé. Il permettra par exemple aux Cegidd d’adapter leurs modalités d’accueil et d’accompagnement, comme vous le souhaitez.
Enfin, il me paraît prématuré d’étendre cette possibilité aux associations agréées en dehors des cadres d’organisation susvisés par les textes de loi.
C’est la raison pour laquelle je suis défavorable aux amendements dans leur rédaction. En revanche, vous l’aurez compris, je suis tout à fait en phase avec l’objectif.
Je sollicite donc le retrait des deux amendements identiques.
Mme la présidente. Madame Imbert, l’amendement n° 18 rectifié quater est-il maintenu ?
Mme Corinne Imbert. Je fais confiance à M. le rapporteur et à M. le ministre, qui ont évoqué les possibilités déjà ouvertes, et je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 18 rectifié quater est retiré.
Monsieur Jomier, l’amendement n° 72 rectifié est-il maintenu ?
M. Bernard Jomier. Non, je le retire également, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 72 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 1er bis, modifié.
(L’article 1er bis est adopté.)
Article 1er ter A (nouveau)
Au dernier alinéa du I de l’article L. 4011-3 du code de la santé publique, les mots : « et de la santé, » sont remplacés par les mots : « , de la santé et du handicap ». – (Adopté.)
Article 1er ter
(Non modifié)
À la seconde phrase du dernier alinéa du I de l’article L. 4011-3 du code de la santé publique, les mots : « et les ordres des professions concernées » sont remplacés par les mots : « , les ordres des professions concernées ainsi que l’Union nationale des professionnels de santé ».
Mme la présidente. L’amendement n° 73, présenté par M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Nous nous félicitons de l’article 1er ter A, qui a été inséré dans la proposition de loi par la commission grâce à l’un de nos amendements.
Cet article permet d’intégrer dans la composition du Comité national des coopérations interprofessionnelles un représentant du secrétariat d’État chargé du handicap. En effet, de plus en plus de protocoles nationaux sont communs aux professionnels de santé et aux professionnels du médico-social. Il est donc important le secrétariat d’État chargé du handicap soit intégré à la conception des protocoles.
Le Comité national des coopérations interprofessionnelles est chargé de proposer la liste des protocoles nationaux de coopération à élaborer et à déployer sur l’ensemble du territoire et d’apporter un appui aux professionnels de santé dans l’élaboration de ces protocoles.
Il est essentiel, puisqu’il contribue, entre autres, à élargir l’offre de soins dispensés et à améliorer les parcours de soins en déléguant à des personnels paramédicaux certaines activités jusqu’alors exercées uniquement par des médecins.
Ce comité, rappelons-le, est composé de représentants de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie, de la Haute Autorité de santé, des ministres chargés de la sécurité sociale et de la santé, ainsi que des agences régionales de santé. Les conseils nationaux professionnels et les ordres des professions concernées sont associés aux travaux de ce comité.
Le présent article prévoit d’intégrer à ce comité l’Union nationale des professions de santé, l’UNPS, qui regroupe vingt-deux organisations syndicales et professionnelles de santé en exercice libéral.
L’UNPS n’est pas issue des élections professionnelles, comme le sont les unions régionales des professionnels de santé libéraux. Il s’agit d’une association suprasyndicale, dont les représentants sont désignés par les syndicats appartenant à l’UNPS. Il faut noter que plusieurs syndicats de professionnels de santé n’acceptent pas de confier à l’UNPS la mission de parler en leur nom.
C’est pour cette raison que nous proposons un amendement de suppression de cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. En plus des ordres et des conseils nationaux professionnels déjà associés aux travaux du Comité national des coopérations interprofessionnelles, je ne vois pas d’obstacle à ce qu’une organisation comme l’UNPS, représentant, au niveau institutionnel, les acteurs libéraux, soit associée aux réflexions sur les protocoles de coopération.
Les douze professions de santé représentées au sein de l’UNPS ne sont pas représentées par un ordre ou un conseil national professionnel.
La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Jomier, l’amendement n° 73 est-il maintenu ?
M. Bernard Jomier. Oui, je le maintiens, madame la présidente.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 1er ter.
(L’article 1er ter est adopté.)
Chapitre II
L’évolution des professions de sage-femme et de certains auxiliaires médicaux
Mme la présidente. L’amendement n° 26 rectifié, présenté par MM. Chasseing, Malhuret, Guerriau, Médevielle, Menonville et Wattebled, Mme Mélot, MM. Lagourgue, A. Marc, Capus, Verzelen, Pellevat, Canevet et Laménie, Mme Garriaud-Maylam, M. Lefèvre, Mme F. Gerbaud et MM. Moga, Genet, Lafon, Meurant, Longeot et Sautarel, est ainsi libellé :
Dans l’intitulé de cette division, après le mot :
sage-femme
insérer les mots :
, de pharmacien
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Cet amendement vise à inclure la profession de pharmacien dans le périmètre du chapitre II.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. En conséquence, l’intitulé du chapitre II est ainsi rédigé.
Articles additionnels avant l’article 2
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 37 rectifié est présenté par MM. Chasseing, Malhuret, Guerriau, Médevielle, Menonville et Wattebled, Mme Mélot, MM. Lagourgue, A. Marc, Capus, Verzelen, Pellevat, Canevet, Laménie et Nougein, Mme Garriaud-Maylam, M. Lefèvre, Mme F. Gerbaud et MM. Moga, Genet, Meurant, Longeot et Sautarel.
L’amendement n° 180 rectifié bis est présenté par Mme Guillotin, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Fialaire, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel, MM. Requier et Roux et Mme Doineau.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Avant l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 3511-3 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les pharmaciens d’officine, en application de l’article L. 4211-1. »
La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l’amendement n° 37 rectifié.
M. Daniel Chasseing. Cet amendement vise à étendre aux pharmaciens l’autorisation de prescrire des substituts nicotiniques, déjà ouverte aux médecins, dentistes, sages-femmes, infirmières et kinésithérapeutes, afin de renforcer la lutte contre le tabagisme et d’améliorer les taux de morbidité et de mortalité des personnes accoutumées au tabac.
Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 180 rectifié bis.
Mme Véronique Guillotin. Je trouve regrettable que les pharmaciens ne puissent pas prescrire les substituts nicotiniques. On va certainement nous rétorquer qu’ils ne peuvent être à la fois les vendeurs et les prescripteurs, mais, quand on va acheter une boîte de Doliprane à la pharmacie, c’est la même chose ! Je ne comprends donc vraiment pas cette limitation.
Dans la lutte contre le tabac, la mesure que nous proposons me paraît importante.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Lors de la discussion de la loi Santé de 2016, qui avait élargi le droit de prescription de substituts nicotiniques à différents professionnels de santé, nous n’avions pas jugé opportun d’y inclure les pharmaciens pour une raison précise : ceux-ci ne prescrivent pas de médicaments, ils les délivrent seulement.
L’avis de la commission est resté le même : défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 37 rectifié et 180 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 32 rectifié, présenté par MM. Chasseing, Malhuret, Guerriau, Médevielle, Menonville et Wattebled, Mme Mélot, MM. Lagourgue, A. Marc, Capus, Verzelen, Pellevat, Canevet, Laménie et Nougein, Mme Garriaud-Maylam, M. Lefèvre, Mme F. Gerbaud, MM. Moga, Genet, Meurant, Fialaire, Longeot et Sautarel et Mme N. Delattre, est ainsi libellé :
Avant l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 5125-1-1 A du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Après le onzième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« 11° Peuvent prescrire un traitement monodose pour une cystite et pratiquer préalablement un examen cytobactériologique des urines. Les résultats sont communiqués au médecin traitant et inscrit dans le dossier médical partagé ;
« 12° Peuvent contrôler la tension artérielle. » ;
2° Au dernier alinéa, après la référence : « 10° », sont insérés les mots : « , du 11° et du 12° ».
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Cet amendement vise également les pharmaciens. Je voudrais rappeler que ceux-ci connaissent bien les familles qui viennent dans leurs officines, tout comme les médicaments qu’ils délivrent. Ils ont accès aux dossiers médicaux partagés, les DMP.
Cet amendement tend à développer les compétences des pharmaciens en les autorisant à contrôler la tension artérielle, et à prescrire un médicament pour une cystite.
Quand son médecin est absent, un patient peut en effet être obligé de faire des kilomètres pour se rendre aux urgences, parce qu’une infirmière ne peut pas lui distribuer un médicament, alors même que, avec le DMP, elle connaît les allergies de cette personne.
L’amendement tend également à autoriser les pharmaciens à pratiquer un examen des urines ; ils devront informer par la suite le médecin traitant des résultats et les inscrire dans le dossier médical du patient.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Ces nouvelles prérogatives me paraissent déjà incluses dans la mission générale de conseil des pharmaciens et dans les avancées actées par la loi Santé de juillet 2019 : celle-ci a autorisé les pharmaciens, dans le cadre de protocoles inscrits dans un exercice coordonné, à délivrer pour certaines pathologies des médicaments dont la liste est fixée par arrêté, pris après avis de la Haute Autorité de santé.
Les cystites pouvaient notamment être visées d’après les débats parlementaires.
Cet amendement me semble satisfait. J’en demande donc le retrait ; à défaut, l’avis serait défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Chasseing, l’amendement n° 32 rectifié est-il maintenu ?
M. Daniel Chasseing. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 32 rectifié est retiré.
L’amendement n° 36 rectifié bis, présenté par MM. Chasseing, Malhuret, Guerriau, Médevielle, Menonville et Wattebled, Mme Mélot, MM. Lagourgue, A. Marc, Capus, Verzelen, Pellevat, Canevet et Laménie, Mme Garriaud-Maylam, M. Lefèvre, Mme F. Gerbaud, MM. Moga, Genet, Meurant, Fialaire, Longeot et Sautarel et Mme N. Delattre, est ainsi libellé :
Avant l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 5126-3 du code de la santé publique est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Un pharmacien d’officine peut fournir et organiser la distribution des médicaments dans les établissements médico-sociaux. »
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, les Ehpad, il n’y a pas de pharmacie à usage intérieur. Les pharmaciens sont extrêmement dévoués : ils viennent mettre les médicaments dans les piluliers, souvent gratuitement, parce que l’établissement s’approvisionne chez eux.
On constate un manque de personnel, avec notamment des difficultés à trouver des infirmières. Le pharmacien joue donc un rôle extrêmement important.
Le présent amendement vise à donner aux établissements et aux territoires la capacité d’adapter les règles du code de la santé publique. Il s’agit de permettre aux pharmaciens de contrôler la distribution des médicaments dans les établissements médico-sociaux.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission ne voit pas d’opposition à cet amendement.
Toutefois, depuis 2017, l’article L. 5126-10 du code de la santé publique prévoit déjà la possibilité pour les Ehpad de conventionner avec un pharmacien d’officine référent pour l’établissement qui concourt à la bonne gestion et au bon usage des médicaments destinés aux résidents.
L’amendement étant satisfait, j’en demande le retrait.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Chasseing, l’amendement n° 36 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Daniel Chasseing. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 36 rectifié bis est retiré.
Article 2
(Non modifié)
À l’article L. 321-1 du code de la sécurité sociale, les mots : « et pour une durée fixée par décret » sont supprimés. – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 2
Mme la présidente. L’amendement n° 27 rectifié bis, présenté par MM. Chasseing, Malhuret, Guerriau, Médevielle, Menonville et Wattebled, Mme Mélot, MM. Lagourgue, A. Marc, Capus, Verzelen, Pellevat et Canevet, Mme Guidez, MM. Laménie et Nougein, Mme Garriaud-Maylam, M. Lefèvre, Mme F. Gerbaud, MM. Moga, Genet, Lafon, Meurant, Fialaire, Longeot et Sautarel, Mme Létard et M. Henno, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 5° de l’article L. 5125-1-1 A du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Peuvent effectuer une visite pharmaceutique auprès du patient, à domicile ou en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, à la demande du médecin traitant ou du médecin coordonnateur ; ».
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Cet amendement vise à prévoir, à la demande du médecin traitant, que le pharmacien puisse se déplacer à domicile ou en Ehpad, afin d’évaluer la situation de prise de médicaments d’un patient dans un objectif de simplification des traitements ou de réduction de l’iatrogénie.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Ces dispositions devraient plutôt émaner de discussions conventionnelles entre les pharmaciens d’officine et la CNAM.
La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Chasseing, l’amendement n° 27 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Daniel Chasseing. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 27 rectifié bis est retiré.
Article 2 bis
À l’article L. 162-4-4 du code de la sécurité sociale, après le mot : « prescripteur », sont insérés les mots : « ou la sage-femme prescriptrice ».
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 190, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Après l’article L. 162-8 du code de la sécurité sociale, sont insérés des articles L. 162-8-… à L. 162-8-… ainsi rédigés :
« Art. L. 162-8-…. – Les sages-femmes participent aux soins primaires pour la santé des femmes, de par leur action de prévention, de dépistage, et de diagnostic de la pathologie. Les sages-femmes participent à la mise en place et à la gestion du dossier médical partagé prévu à l’article L. 1111-14 du code de la santé publique. Les consultations médicales sont données au cabinet de la sage-femme, sauf lorsque l’assuré ne peut se déplacer en raison de son état ou lorsqu’il s’agit d’une activité de télésanté telle que définie à l’article L. 6316-1 du même code.
« Art. L. 162-8-…. – Dans l’intérêt des assurés sociaux et de la santé publique, le respect de la liberté d’exercice et de l’indépendance professionnelle et morale des sages-femmes est assuré conformément aux principes déontologiques fondamentaux que sont le libre choix de la sage-femme par la patiente, la liberté de prescription de la sage-femme, le secret professionnel, le paiement direct des honoraires par la patiente.
« Art. L. 162-8-…. – Les sages-femmes sont tenues, dans tous leurs actes et prescriptions, d’observer, dans le cadre de la législation et de la réglementation en vigueur, la plus stricte économie compatible avec la qualité, la sécurité et l’efficacité des soins. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Avec cet amendement, nous proposons de reconnaître la place des sages-femmes dans les équipes de soins primaires. En effet, les actions de dépistage, de prévention et de diagnostic des pathologies effectuées par les sages-femmes les positionnent comme praticienne de premier recours en soins primaires pour la santé des femmes.
Ces professionnels sont donc au cœur du dispositif permettant à la patiente d’être au centre du parcours de santé.
Cette place dans le système de santé français nécessite selon nous d’être clairement identifiée dans la loi. Un parcours de santé se définit comme la trajectoire globale des patients et usagers dans leur territoire, avec une attention particulière portée à la personne et à ses choix.
Le parcours de santé des femmes est, quant à lui, l’organisation de la prise en charge globale et continue de celles-ci au plus proche de leur lieu de vie ou de travail. La lisibilité, l’accessibilité et la fluidité du parcours de santé s’appuient sur la qualité de l’information des conditions d’accueil et d’accompagnement de la femme tout au long de sa vie.
Tous ces arguments plaident en faveur de la reconnaissance des sages-femmes dans les équipes de soins primaires. Cette mesure rejoint – une fois n’est pas coutume ! – la philosophie du plan Ma santé 2022, en élargissant les compétences des sages-femmes.
Pour moi, comme pour l’ensemble des membres de mon groupe, cet amendement tend à s’inscrire dans la continuité des articles précédents visant à améliorer l’attractivité de cette profession, en travaillant sur la valorisation et la reconnaissance du métier.
Mes chers collègues, cela fait plusieurs mois que les sages-femmes se mobilisent pour que leur profession, qui est, je vous le rappelle, médicale, et non paramédicale, soit enfin pleinement reconnue. L’adoption de cet amendement peut y contribuer.
Mme la présidente. L’amendement n° 48 rectifié ter, présenté par M. Longeot, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le premier alinéa de l’article L. 4151-1 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Les sages-femmes contribuent auprès de la femme et de l’enfant aux soins de premier recours définis à l’article L. 1411-11. »
La parole est à M. Jean-François Longeot.
M. Jean-François Longeot. Les soins dits « de premier recours », tels que les actions de dépistage, de prévention et de diagnostic, de dispensation et d’administration des médicaments contribuent à pallier le manque de médecins et à assurer un meilleur accès aux soins des Français sur l’ensemble du territoire.
Ces soins sont la plupart du temps administrés par les sages-femmes, praticiennes de premier recours pour la santé des femmes. Cependant, leurs compétences restent peu connues des patientes et d’autres professionnels de santé.
Le présent amendement vise donc à reconnaître officiellement la contribution des sages-femmes à ces soins de premiers recours, contribution qui nécessite d’être clairement identifiée dans la loi.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La rédaction de l’article L. 1411-1 du code de la santé publique sur les soins de premiers recours n’exclut pas les sages-femmes. La participation à ces soins découle par ailleurs de leurs missions, qui sont définies par les articles L. 4151-1 et suivants du code de la santé publique. Réaffirmer ce principe, comme le fait l’amendement n° 48 rectifié ter, aurait donc peu de portée.
S’agissant de l’amendement n° 190, il ne me paraît pas nécessaire, en outre, de dupliquer dans le code de la sécurité sociale des dispositions qui relèvent déjà du code de déontologie de la profession, comme le libre choix de son praticien ou l’indépendance professionnelle.
Comme ces deux amendements sont satisfaits, j’en demande le retrait ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Je compléterai l’avis du rapporteur, que je partage. Comme ce dernier l’a indiqué, les amendements sont déjà en pratique satisfaits, car les missions incombant aux sages-femmes recoupent en réalité celles des équipes de soins primaires.
Je veux aussi faire remarquer que, dans le Ségur, nous avons porté une attention très particulière aux sages-femmes. J’ai reçu à plusieurs reprises des représentants de la profession maïeuticienne, pour faire évoluer le métier et le cadre de compétences.
Cette tendance est déjà actée dans d’autres textes de loi, comme vous le savez : je pense à l’expérimentation de l’IVG instrumentale, qui – je le pense – sera ensuite rapidement généralisée, par les sages-femmes, mais aussi au suivi des femmes qui ne sont pas forcément enceintes, à la prescription d’un certain nombre d’examens ou d’actes aux personnes qui accompagnent les parturientes… Ces exemples montrent bien que la profession évolue. Je suis totalement convaincu de la place éminente des sages-femmes dans le système de santé.
Il faut également citer le bloc de revalorisation pour les sages-femmes qui exercent en établissement. J’ai demandé qu’une attention particulière leur soit portée dans le travail sur les grilles salariales.
Enfin, d’autres enjeux existent, notamment dans le domaine des ressources humaines : il faut lutter contre les contrats courts que subissent, trop souvent, les sages-femmes dans certains établissements. Nous faisons donc évoluer le cadre de métier des sages-femmes.
Ces amendements ne feraient que complexifier le dispositif, alors que la promotion du cœur, ou du socle, de la profession qui les sous-tend est déjà mise en œuvre dans la pratique.
Je demande donc le retrait de ces amendements.
Mme la présidente. Madame Cohen, l’amendement n° 190 est-il maintenu ?
Mme Laurence Cohen. J’ai entendu les explications de M. le rapporteur et de M. le ministre. Puisque notre amendement semble satisfait, nous n’allons pas le maintenir.
Monsieur le ministre, je veux toutefois attirer votre attention sur un point. Vous avez semblé avoir vraiment à cœur de reconnaître l’importance de la profession de sage-femme, et je partage tout à fait vos propos. J’ai été sollicitée par des sages-femmes sur le fait que l’Insee les considère comme des paramédicaux, ce qui entraîne pour la profession un moindre salaire.
Les sages-femmes vous demandent de les recevoir pour évoquer cet aspect. Il serait important que vous puissiez les écouter, car chacun se repasse le problème, alors que cette question est très importante pour elles.
Nous retirons donc notre amendement ; j’en ai profité pour lancer un appel au ministre, comme vous avez pu le constater, mes chers collègues ! (Sourires.)
Mme la présidente. L’amendement n° 190 est retiré.
Monsieur Longeot, l’amendement n° 48 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Jean-François Longeot. Non, je le retire après les explications de M. le rapporteur et de M. le ministre. J’espère que les sages-femmes seront entendues et que les mesures évoquées seront bien appliquées.
M. Olivier Véran, ministre. Je profite de la concorde qui règne dans l’hémicycle pour répondre à Mme Cohen.
J’ai reçu les représentants des sages-femmes, notamment la présidente de l’Ordre. J’ai également saisi Bercy de la question de la classification de l’Insee : je ne sais pas quelle réponse me sera faite – elle sera évoquée en interministériel –, mais sachez que je suis bien conscient du problème que vous avez soulevé.
Mme Laurence Cohen. Merci, monsieur le ministre !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 2 bis.
(L’article 2 bis est adopté.)
Article 2 quater
L’article L. 4151-4 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Elles peuvent prescrire le dépistage d’infections sexuellement transmissibles à leurs patientes ainsi qu’à leurs partenaires, en transmettant au médecin traitant de ces derniers les informations relatives à ces examens. »
Mme la présidente. L’amendement n° 4 rectifié bis, présenté par MM. Bonne, Bascher, Bazin, E. Blanc, Bouloux, Brisson et Burgoa, Mme Chauvin, M. Cuypers, Mmes Darcos, Di Folco, Estrosi Sassone, F. Gerbaud et Guidez, MM. Henno, Laménie et Moga, Mme Muller-Bronn, MM. Rapin, Savary, Segouin, Paccaud et Gremillet et Mme Schalck, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Bonne.
M. Bernard Bonne. Mon amendement tend à la suppression de l’article 2 quater.
Les articles L. 4151-1 à L. 4151-10 du code de la santé publique définissent les compétences des sages-femmes et prévoient que ces dernières sont tenues d’adresser la femme à un médecin en cas de situation pathologique, ce qui est le cas en cas de suspicion d’infection par une infection sexuellement transmissible, ou IST.
Pour la sécurité des patientes, la prescription d’un traitement curatif doit relever du médecin, seul professionnel à disposer de la compétence pour prescrire un traitement curatif et à en assumer les conséquences.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L’article 2 quater a été réécrit en commission : nous en avons circonscrit le champ au domaine de la prévention – les examens de dépistage des IST pour la femme et son partenaire –, en excluant le volet curatif, à savoir le traitement des IST chez les partenaires.
Cette rédaction a paru équilibrée à la commission des affaires sociales. Elle lui a semblé répondre aux observations soulevées par les auteurs de cet amendement.
Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Bonne, comment réagissez-vous à la demande de retrait de l’amendement n° 4 rectifié bis ?
M. Bernard Bonne. Très mal, madame la présidente ! (Sourires.)
Si j’ai bien compris, la commission a modifié l’article en refusant le traitement au partenaire, mais en l’autorisant pour la patiente. Je fais confiance à la commission et à son rapporteur – c’est la période ! –, mais je voudrais tout de même être sûr que la réflexion aboutisse aussi bien pour l’amendement précédent que j’ai déjà retiré que pour celui-là.
Je retire donc mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 4 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 49 rectifié bis, présenté par M. Longeot, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 4151-4 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Art. L. 4151-4. – Les sages-femmes peuvent prescrire tous les actes, produits et prestations strictement nécessaires à l’exercice de leur profession.
« Un décret en Conseil d’État, pris après avis du Conseil national de l’ordre des sages-femmes, détermine les conditions d’application du présent article. »
La parole est à M. Jean-François Longeot.
M. Jean-François Longeot. Les sages-femmes peuvent aujourd’hui prescrire des actes, produits et prestations mentionnés sur des listes fixées par voie réglementaire.
Or, ces listes pouvant rapidement devenir obsolètes, la patiente peut être contrainte d’effectuer une double consultation : d’abord chez sa sage-femme, puis chez son médecin.
Par conséquent, le présent amendement vise à supprimer ces restrictions et à ouvrir plus largement le droit de prescription des sages-femmes, tout en l’inscrivant strictement dans le champ de compétences de ces professionnels de santé, afin de simplifier, partout sur le territoire, l’accès aux soins.
Cette disposition alignerait ainsi le régime applicable aux sages-femmes sur celui d’autres professions médicales, comme les chirurgiens-dentistes, qui disposent, dans leur champ de compétences, d’une pleine faculté de prescription.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L’article L. 4151-4 du code de la santé publique prévoit déjà que les sages-femmes peuvent prescrire des dispositifs médicaux et des médicaments, selon une liste fixée par arrêté, ainsi que « les examens strictement nécessaires à l’exercice de leur profession ».
L’intention de l’auteur de cet amendement est d’ouvrir plus largement ce droit de prescription, afin notamment d’éviter un décalage entre les textes réglementaires et les produits de santé utiles à l’exercice de la profession ; néanmoins, les conditions d’application restent renvoyées au pouvoir réglementaire.
Le cadre actuel, tel qu’il est ajusté à l’article 2 quinquies A du texte, paraît donc tout aussi satisfaisant à la commission des affaires sociales. En outre, ces dispositions entreraient en contradiction avec les autres mesures du code de la santé publique encadrant les missions des sages-femmes.
Par conséquent, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Je précise, en complément de ce que vient de dire M. le rapporteur, que l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM, et les sociétés savantes ont été saisies récemment, afin de réviser la liste des médicaments que les sages-femmes peuvent prescrire.
Le Gouvernement émet donc également un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Monsieur Longeot, l’amendement n° 49 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jean-François Longeot. Il s’agit d’un véritable problème d’aménagement du territoire et d’accès aux soins. Cette mesure, d’ailleurs appliquée à d’autres professions médicales, me semble importante.
Je maintiens donc mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Au fond, la question est de savoir si l’on aligne le droit appliqué aux sages-femmes sur celui d’autres professions médicales, comme les chirurgiens-dentistes, ou si l’on avance pas à pas, en colmatant les brèches, en modifiant petit à petit les dispositions permettant aux sages-femmes d’exercer pleinement leur profession médicale, en matière de santé sexuelle et reproductive.
Les dispositions de l’amendement de notre collègue Jean-François Longeot vont plutôt dans le sens de la plénitude d’exercice de cette profession, qui se verrait ainsi reconnaître un droit de prescription, dans un champ limité à la santé sexuelle et reproductive.
Nous voterons donc cet amendement.
Mme la présidente. En conséquence, l’article 2 quater est ainsi rédigé, et les amendements nos 131, 28 rectifié ter, 53 rectifié et 92, ainsi que les amendements identiques nos 33 rectifié bis et 183 rectifié, n’ont plus d’objet.
Article additionnel après l’article 2 quater
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 44 rectifié, présenté par MM. J.M. Arnaud et Belin, Mme Billon, MM. Brisson, Canevet et Delahaye, Mme de La Provôté, MM. Delcros et Détraigne, Mme Doineau, M. Duffourg, Mmes Férat, Gatel, Guidez et Havet, MM. Lafon, Laménie et Le Nay, Mme Loisier, MM. Longeot, P. Martin et Moga et Mmes Perrot et Saint-Pé, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article L. 4151-1 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La sage-femme peut être désignée comme référent parcours par les futurs parents afin de coordonner pendant et après la grossesse la préparation à la naissance et à la parentalité en lien avec les différents professionnels de santé. »
La parole est à M. Jean-Michel Arnaud.
M. Jean-Michel Arnaud. Il s’agit, là encore, des sages-femmes. L’approche préventive des complications de la grossesse et des risques psychosociaux repose sur la création d’une relation de confiance entre futurs parents et professionnels de santé.
Or ceux-ci sont souvent nombreux et ils sont surtout multiples, au cours du suivi, ce qui suscite parfois de la confusion et une perte de confiance. Il est donc nécessaire de coordonner les interventions sans les multiplier, afin d’assurer la cohérence et la gradation des propositions, adaptées aux besoins et à la temporalité des parents.
Un référent de parcours doit être identifié dès le début de la grossesse, soit, lors de l’inscription, au sein de la maternité, soit, en ville, au moment de la découverte de la grossesse. Cette identification doit s’accompagner de la possibilité, pour les parents, de s’adresser à la sage-femme ou au maïeuticien qu’ils ont choisi comme référent, afin de poursuivre et de personnaliser l’accompagnement.
Le rapport remis, le 8 septembre dernier, au secrétaire d’État Adrien Taquet recommandait d’ailleurs d’aller en ce sens, afin de faciliter le suivi des futurs parents dans les territoires en manque de spécialistes.
L’exercice libéral de la profession de sage-femme s’est accru très sensiblement au cours des dix dernières années ; il constitue un maillage particulièrement puissant, notamment dans les territoires ruraux et dans les villes petites et moyennes.
C’est pourquoi je propose d’insérer, après l’article 2 quater du texte, un article additionnel permettant aux maïeuticiens d’être désignés comme référents de parcours par les futurs parents, afin de coordonner, pendant et après la grossesse, la préparation à la naissance et à la parentalité, en lien avec les différents professionnels de santé.
Mme la présidente. L’amendement n° 31 rectifié ter, présenté par MM. Chasseing, Malhuret, Guerriau, Médevielle, Menonville et Wattebled, Mme Mélot, MM. Lagourgue, A. Marc, Capus, Verzelen, Pellevat, Canevet, Laménie et Nougein, Mmes Garriaud-Maylam et Saint-Pé, M. Lefèvre, Mme F. Gerbaud, MM. Moga, Genet, Meurant, Fialaire, Longeot et Sautarel, Mmes N. Delattre et Létard et M. Henno, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 162-8-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 162-8-… ainsi rédigé :
« Art. L. 162-8-…. – Afin de favoriser la coordination des soins en lien avec le médecin, toute assurée ou ayant droit enceinte peut déclarer à son organisme gestionnaire de régime de base de l’assurance maladie le nom de sa sage-femme référente. »
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Cet amendement vise à permettre à chaque femme enceinte de déclarer une sage-femme référente, qui tiendra à jour le dossier médical.
Il s’agit d’une évolution souhaitable du modèle périnatal français, visant à mieux répondre aux besoins et aux attentes des femmes et des professionnels.
Mme la présidente. L’amendement n° 101, présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, MM. Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 162-8-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 162-8-… ainsi rédigé :
« Art. L. 162-8-…. – Afin de favoriser la coordination des soins en lien avec le médecin, pendant et après la grossesse, toute assurée ou ayant droit enceinte peut déclarer à son organisme gestionnaire de régime de base de l’assurance maladie le nom de sa sage-femme référente.
« Les modalités d’application du présent article sont définies par voie réglementaire. »
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. La simplification dont nous parlons aujourd’hui trouve ici un objet pertinent.
Le modèle périnatal français a évolué au cours des dernières années et il doit continuer de le faire. Cette évolution passe par le renforcement du lien, d’ailleurs insuffisamment abordé dans cette proposition de loi, entre médecine de ville et hôpital. Pour ce faire, il faut renforcer la coordination du parcours des femmes enceintes.
En effet, tant le rapport intitulé Les 1 000 premiers jours, remis au Gouvernement le 8 octobre 2020, que la Haute Autorité de santé recommandent de mettre en place un suivi global de la grossesse, dans lequel les intervenants seraient limités et agiraient de manière coordonnée.
Ce suivi est indispensable au bon déroulement de la grossesse et de l’accouchement. Je le rappelle, il est possible, pour une femme, de choisir d’être suivie, en prénatal, par une sage-femme. Or ce suivi est au cœur du travail de ces professionnels de santé.
Cet amendement vise donc à offrir la possibilité à chaque femme enceinte de déclarer à l’assurance maladie une sage-femme référente et de nouer, par ce biais, une relation forte de confiance avec celle-ci. Il ne s’agit en aucun cas de remplacer le médecin traitant ; le statut de sage-femme référente intervient au moment de la grossesse, dont il faut articuler la prise en charge et préparer les suites.
Il n’y a pas non plus de risque de perte d’information pour le médecin ; il y en a, en tout cas, moins qu’avec des intervenants multiples, car la sage-femme référente tiendra à jour un dossier obstétrical complet, transmis au médecin traitant.
Cela permettra, entre autres, d’aider à la construction du projet de naissance dans un climat de confiance, de faire le lien avec la maternité, d’éviter des passages aux urgences et de rendre effectif le volet anténatal du programme d’accompagnement du retour à domicile, le Prado, en organisant en amont les sorties de maternité, précoces ou non, des femmes et des nouveau-nés.
Cette mesure a été élaborée en lien avec le Conseil national de l’ordre des sages-femmes.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La notion de sage-femme référente rejoint une recommandation de la profession, consistant à reconnaître le rôle des sages-femmes de coordination dans la prise en charge de la femme au cours de la grossesse.
Toutefois, les implications concrètes de cette notion ne sont pas précisées dans ces amendements, non plus que sa plus-value.
La commission demande donc le retrait des amendements nos 44 rectifié et 31 rectifié ter au profit de l’amendement n° 101, visant à renvoyer à un décret pour la déclinaison de cette notion. Et pour ce dernier amendement, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Ces amendements tendent à permettre à toute assurée enceinte de déclarer à son organisme d’assurance maladie le nom d’une sage-femme référente, afin de favoriser la coordination des soins, en lien avec son médecin.
La mise en place d’un professionnel de santé référent de périnatalité correspond effectivement à une proposition du rapport de la Commission des 1 000 premiers jours, remis par Boris Cyrulnik. Elle répond à un réel besoin de coordination et de suivi tout au long du parcours de natalité.
Ce que nous avons prévu pour atteindre cet objectif, sur lequel, je le répète, nous sommes d’accord, c’est tout d’abord de conduire une expérimentation dans quelques territoires, en 2021, sur le fondement de l’article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, afin de trouver la meilleure formule et le meilleur moyen pour organiser et structurer le dispositif, qui serait ensuite généralisé sur tout le territoire si d’aventure il était jugé utile et satisfaisant.
Cette expérimentation va être lancée sous peu, je m’y engage.
Le Gouvernement demande donc le retrait de ces trois amendements.
Mme la présidente. Monsieur Arnaud, l’amendement n° 44 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Michel Arnaud. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 44 rectifié est retiré.
Monsieur Chasseing, l’amendement n° 31 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Daniel Chasseing. Non, je le retire également, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 31 rectifié ter est retiré.
Madame Poncet Monge, l’amendement n° 101 est-il maintenu ?
Mme Raymonde Poncet Monge. Oui, je le maintiens, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je partage le point de vue de M. le ministre et celui du rapporteur. Il faut effectivement soumettre cette question à une expérimentation, parce que nous n’aurons bientôt plus que des référents : le médecin référent, l’infirmier référent, la sage-femme référente, le kinésithérapeute référent…
Cela me rappelle les aides multiples, quand chacun soutient un projet, mais que tout le monde veut coordonner. On ne fait que des guichets uniques et, finalement, tout le monde devient « guichet unique »…
J’appelle donc votre attention sur ce point, mes chers collègues : une expérimentation permettra de juger sur pièces, d’autant qu’une grossesse et son suivi représentent une période charnière dans une vie. Il faut laisser le rôle de référent à un professionnel unique, qu’il soit médecin, infirmier ou autre, afin qu’il n’y ait qu’un référent qui coordonne. Sinon, s’il n’y a que des coordonnateurs, on aboutit à une absence de coordination…
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour explication de vote.
M. Jean-Michel Arnaud. J’entends bien les arguments de M. le ministre, à la position duquel je me rallie bien volontiers ; j’apprécierais d’ailleurs que soit portée à notre connaissance la liste des départements qui ont été ou qui seront choisis pour l’expérimentation.
Il se trouve que, dans nombre de territoires, il n’y a pas de médecin coordonnateur, tout simplement parce qu’il n’y a pas de médecin du tout ! Il n’y a pas non plus d’infirmier coordinateur parce qu’il n’y a pas d’infirmier libéral ! Et il n’y a pas davantage de gynécologues !
Je pense particulièrement au département de l’Ardèche, dans lequel il y a, me semble-t-il, zéro gynécologue pour 100 000 habitants, tandis que, dans le département dont je suis élu, les Hautes-Alpes, ce ratio atteint 3,5 % ou 4 %.
Or nous avons là une profession qui est au contact de la population, dans tous les territoires. Ainsi, dans une commune de 2 500 habitants que je connais bien, pour en avoir été le maire pendant vingt ans, il y a une sage-femme libérale, qui est en mesure, dans tous les champs de la vie d’une femme, de la famille et du dialogue conjugal, d’être un bon professionnel de santé. Ces professionnels peuvent apporter une solution aux problèmes des femmes.
Je me rallie bien volontiers à l’amendement n° 101 de notre collègue, Mme Poncet Monge, et j’attends avec beaucoup d’impatience les retours de l’expérimentation proposée par M. le ministre.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 2 quater.
Article 2 quinquies A
L’article L. 4151-4 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° La première phrase est ainsi modifiée :
a) Après le mot : « médicaux », sont insérés les mots : « et médicaments » ;
b) Le mot : « et » est remplacé par les mots : « ainsi que » ;
2° Au second alinéa, les mots : « les médicaments d’une classe thérapeutique figurant sur une liste fixée par arrêté du ministre chargé de la santé pris après avis de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé et prescrire » sont supprimés.
Mme la présidente. L’amendement n° 206, présenté par M. Milon, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – L’article L. 4421-14 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au début de la première phrase, les mots : « Les articles L. 4151-1 et L. 4151-4 sont applicables dans le territoire des îles Wallis-et-Futuna dans leur » sont remplacés par les mots : « L’article L. 4151-1 est applicable dans le territoire des îles Wallis-et-Futuna dans sa » ;
2° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « L’article L. 4151-4 y est applicable dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. L’adoption de l’amendement n° 49 rectifié ter de M. Longeot, à l’article 2 quater, rend l’article 2 quinquies A sans objet.
Je vous invite donc, mes chers collègues, à ne pas voter cet article. Et, bien évidemment, je retire le présent amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 206 est retiré.
Je mets aux voix l’article 2 quinquies A.
(L’article 2 quinquies A n’est pas adopté.)
Article 2 quinquies B
(Supprimé)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 199 rectifié bis, présenté par Mme Doineau, MM. Moga, Kern, J.-M. Arnaud et Longeot, Mme Loisier, M. Détraigne, Mmes Vérien, Billon, Saint-Pé et Perrot, MM. Mizzon, Hingray, Levi, Le Nay, Laugier, S. Demilly et Canevet, Mme Gatel, M. Louault, Mme Dindar, MM. Lafon et Cadic, Mme de La Provôté, MM. Cigolotti, Duffourg et Delcros, Mmes Létard et Jacquemet et MM. Vanlerenberghe et P. Martin, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L’article L. 162-5-3 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Lorsque le patient est adressé par une sage-femme à un autre médecin à l’occasion de soins qu’il est amené à lui dispenser. Un compte rendu des soins ayant été réalisés par une sage-femme est adressé au médecin traitant et peut être reporté dans le dossier médical partagé. »
La parole est à Mme Élisabeth Doineau.
Mme Élisabeth Doineau. Le présent amendement, que j’avais annoncé en discussion générale, vise à rétablir l’article 2 quinquies B, qui permet aux sages-femmes d’adresser leurs patientes à un médecin spécialiste, sans que ce soit pénalisant pour celles-ci du point de vue du remboursement des frais de soins par l’assurance maladie.
Afin de garantir un suivi, dans la logique du parcours de soins coordonnés, un compte rendu des soins réalisés par la sage-femme sera adressé au médecin traitant et pourra être reporté dans le dossier médical partagé ; cela s’inscrit dans la logique de tous les amendements, défendus précédemment, en faveur de la responsabilité des sages-femmes, en raison de la confiance que nous leur accordons.
Mme la présidente. L’amendement n° 100, présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, MM. Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L’article L. 162-5-3 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« … Lorsque le patient est adressé par une sage-femme à un autre médecin à l’occasion des soins qu’il est amené à lui dispenser. »
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise également à rétablir une mesure adoptée par nos collègues de l’Assemblée nationale, à savoir la possibilité pour une sage-femme d’orienter une patiente vers un spécialiste.
La profession de sage-femme est une profession médicale, et une femme peut choisir, pendant sa grossesse, d’être suivie par une sage-femme ou par un médecin généraliste ; il faut toujours revenir à cela pour bien comprendre ces amendements.
Dans le cadre du suivi obstétrical ou gynécologique, la sage-femme doit pouvoir adresser sa patiente vers un médecin spécialiste.
Or, actuellement, si ce spécialiste n’est pas en accès direct, la patiente doit préalablement consulter son médecin traitant, malgré l’expertise de la sage-femme et la pertinence de son orientation en lien avec la grossesse, puis elle peut consulter le spécialiste. Cette double démarche risque de différer des soins, voire de faire renoncer certaines femmes à consulter, notamment dans les zones sous-dotées en médecins généralistes.
Si la patiente tarde ou ne peut pas prendre un rendez-vous chez son médecin, elle risque de subir une perte de chance ou un surcoût financier.
Cette mesure a été supprimée au motif que les spécialistes vers lesquels la sage-femme pourrait orienter une patiente dans le cadre du suivi de la grossesse seraient en accès direct. C’est effectivement le cas du gynécologue, mais non du dermatologue ni du cardiologue, vers lesquels il peut être pertinent d’orienter une patiente à la suite de l’examen cardiorespiratoire de grossesse ; ce n’est donc pas hors sujet !
L’amendement tend donc à rétablir l’article 2 quinquies B, tel qu’il a été adopté par l’Assemblée nationale, afin de permettre aux sages-femmes d’adresser directement leurs patientes à un médecin spécialiste, dans le cadre du suivi.
Cette mesure a également été élaborée en lien avec la profession ; elle évite des consultations non nécessaires ni pertinentes, inutilement coûteuses pour l’assurance maladie. Elle permet de simplifier le parcours de soins des femmes et de reconnaître le rôle et la compétence des sages-femmes, ce qui semble constituer un véritable enjeu culturel.
Mme la présidente. L’amendement n° 132, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L’article L. 162-5-3 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Lorsque le patient est adressé par une sage-femme à un autre médecin à l’occasion des soins qu’il est amené à dispenser. »
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Les dispositions de cet amendement procèdent de la même philosophie que précédemment.
La commission des affaires sociales du Sénat a supprimé l’article 2 quinquies B, qui autorisait les sages-femmes à adresser leurs patientes à un médecin spécialiste sans passer par le truchement du médecin généraliste.
Cette disposition avait l’avantage de simplifier le parcours de soins des patientes, puisqu’il leur évitait de devoir prendre un rendez-vous préalable avec leur médecin traitant. Cette dérogation au parcours de soins coordonnés présentait également l’avantage de réduire le risque de renoncement aux soins, face aux difficultés financières et aux délais d’attente qui sont parfois bien longs, d’autant que nous souffrons, nous le savons bien, d’une pénurie de médecins généralistes dans certains territoires.
Dans le contexte sanitaire actuel, il y aurait du sens à autoriser les sages-femmes à adresser directement leurs patientes à un spécialiste, afin d’éviter de surcharger les généralistes.
Je précise, à l’attention de ceux qui craindraient la remise en cause du parcours de soins, que cette orientation directe serait limitée, puisqu’un certain nombre de spécialistes sont déjà accessibles directement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L’article qui a été supprimé par la commission des affaires sociales du Sénat remettait en cause le rôle pivot du médecin traitant.
J’entends bien ce que dit Mme Apourceau-Poly – une sage-femme devrait pouvoir adresser directement sa patiente à un médecin spécialiste –, mais, si l’on en décide ainsi, l’année prochaine, les infirmières nous réclameront la même chose, puis, l’année d’après, les rhumatologues nous demanderont pourquoi ils ne pourraient pas adresser directement leur patient ayant une dermatose à un dermatologue ou à un neurologue…
Bref, nous nous retrouverons dans la même situation qu’il y a dix ou quinze ans : les patients iront voir trente-six médecins différents et obtiendront autant d’ordonnances ; et le médecin généraliste, le médecin pivot, se retrouvera dans une situation que j’ai personnellement connue, lorsque l’un de mes patients était allé voir, au cours de la même journée, son cardiologue et son rhumatologue et avait fait, deux jours plus tard, une hépatite toxique…
Je le regrette, mais je ne suis pas d’accord. Laissons au médecin généraliste le rôle de médecin pivot ; point final. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
La commission a donc émis un avis défavorable sur ces trois amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Je partage l’avis de M. le rapporteur.
Les choses ont un sens. Encore une fois, on étend considérablement le périmètre du champ d’action des sages-femmes. Il y a, sur les 160 amendements sur ce texte, au moins une vingtaine ou une trentaine d’entre eux qui sont consacrés à cette profession. Ce n’est pas anodin.
La profession a évolué d’une manière extrêmement forte depuis trois ou quatre ans et elle ne cesse d’évoluer, au travers tant de ce texte que d’autres, passés ou à venir.
J’ai entendu précédemment un débat sur la profession médicale intermédiaire, au cours duquel on indiquait qu’il ne fallait pas tout confondre, qu’il y avait des médecins et d’autres acteurs de soins, mais vous êtes justement en train de dessiner, amendement par amendement, les contours d’une profession qui commence à avoir la couleur, l’odeur et le goût du médecin. Faisons donc attention !
Je ne dis pas que les sages-femmes n’ont pas la volonté de bien faire et l’éthique chevillée au corps, mais veillons à ne pas tout confondre. M. le rapporteur Milon a raison : lorsqu’il y a un problème de santé qui ne relève pas du champ d’intervention d’une sage-femme, il faut que la patiente en réfère à son médecin traitant.
C’est important pour le parcours de soins ; vous avez des débats sans fin et importants sur le dossier médical partagé, le DMP, sur la circulation de l’information, sur la coordination des soins ; je suis tout à fait d’accord avec ce que disait M. le sénateur Savary précédemment : tout le monde veut être coordonnateur, chacun accepte la coordination des soins du moment qu’il est coordonnateur ; par conséquent, on se quitte bons amis, mais sans avoir coordonné grand-chose…
Je le répète, on structure, on enrichit, on diversifie les missions et les parcours de chacun. Je suis un grand promoteur de l’évolution des métiers et vous ne me verrez jamais défendre une position conservatrice, mais le parcours de soins a été, dans notre système de santé, un acquis, qui a permis d’améliorer la santé des Français, parce que l’on a créé une structure centrale permettant d’organiser le système et d’orienter vers les différents médecins spécialistes.
Le Gouvernement a donc émis un avis défavorable sur ces trois amendements.
Mme la présidente. Avant de passer aux explications de vote, je vous indique, mes chers collègues, que je suis saisie, sur chacun des trois amendements, d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. J’ai toujours défendu et je défends encore l’exercice, par la profession de sage-femme, de la plénitude de ses missions, mais uniquement en matière de santé sexuelle et reproductive.
Toutefois, désorganiser à ce point le parcours de soins, c’est porter atteinte à une construction historiquement destinée à mettre de l’ordre dans le système de santé.
Le désordre causé par un système dans lequel on entrerait par n’importe quel point créerait plus d’inégalités sociales et d’inégalités de santé – il ne faut jamais l’oublier. (M. le ministre approuve.)
La simplification ne consiste pas à dire que tout le monde peut aller où il veut, quand il le veut. Le système de soins, c’est comme une maison à deux étages : on entre par le rez-de-chaussée, on monte au premier étage, puis au second ; on n’entre pas par la fenêtre du second pour sortir par celle du premier…
Il y a une cohérence dans ce parcours, et ces propositions ne sont pas cohérentes. Les auteurs des amendements affirment que cela concerne des spécialités qui ne sont pas en accès direct ; certes, puisque les spécialités en accès direct sont, par définition, accessibles directement ! Il n’y a donc pas besoin de passer par le médecin traitant, ni par la sage-femme.
Prenons l’exemple d’une femme qui aurait des brûlures d’estomac et qui en parlerait à sa sage-femme, laquelle l’enverrait chez un gastroentérologue pour y subir une fibroscopie. Mais non ! C’est précisément ce que l’on a voulu éviter par la construction du parcours de soins.
Pour 95 % des personnes qui ont mal à l’estomac, le médecin traitant règle le problème par une prescription simple et par des conseils. On évite donc ainsi de multiplier les actes techniques, car la désorganisation du parcours de soins susciterait une multiplication des actes techniques.
Par conséquent, on sortirait, avec ces mesures, de la santé sexuelle et reproductive et, sous couvert d’une simplification – ce n’est d’ailleurs pas bien difficile d’aller consulter son médecin traitant si l’on a un problème –, on désorganiserait le parcours de soins.
Enfin, il n’est pas du tout précisé dans les amendements que ce dispositif est limité à la période de grossesse, ce qui pourrait, alors, se discuter. La mesure proposée est générale, puisqu’elle s’appliquerait aussi lors des actions de contraception ou des consultations de prévention, c’est-à-dire en dehors de la grossesse ; la sage-femme pourrait donc, à tout moment, orienter ses patientes en dehors du parcours de soins.
Pour ma part, je ne souscris pas à cette désorganisation.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, votre argumentation ne tient pas du tout !
Vous dites que, demain, les infirmières demanderont la même chose. J’ai beau avoir le plus grand respect pour les infirmières – j’admire le travail énorme qu’elles accomplissent, notamment en ce moment, dans les hôpitaux –, il n’en reste pas moins qu’il s’agit d’une profession paramédicale. On ne parle pas du même sujet !
Les sages-femmes appartiennent au personnel médical. La plupart d’entre elles ont dû passer le cap de la première année commune aux études de santé, la Paces, pour entrer en maïeutique, même si ce n’est plus le cas aujourd’hui, puisque cette année n’existe plus. Une sage-femme a donc bac+5.
Je regrette que vous souleviez cet argument, car, non, nous ne proposerons pas la même chose, demain, pour les infirmières.
M. Alain Milon, rapporteur. Bien sûr que si !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous le proposons seulement pour les sages-femmes ; ce n’est pas le même corps de métier ni la même fonction.
Par ailleurs, comment fait-on dans certains territoires, comme le mien, par exemple ? Je suis du bassin minier du Pas-de-Calais. Des tas de gens n’ont plus de médecin traitant, il n’y a même plus de généralistes. Moi-même, je n’ai plus de médecin traitant, car celui que j’avais est parti en retraite – il en avait bien le droit –, et il n’y a plus de praticien au cœur du bassin minier.
Que dit-on donc à toutes les femmes qui ont un problème ou qui n’en ont pas, mais qui ont besoin d’un suivi par un spécialiste ? On leur dit d’attendre la Saint-Glinglin, comme on dit chez moi, ou de se débrouiller pour trouver un généraliste ? Cela ne tient pas debout !
En outre, vous le savez aussi bien que moi, dans nos territoires et dans les territoires ruraux, il n’y a plus, je le répète, de généralistes, ou alors on peut les compter sur les doigts de la main. Par conséquent, pour obtenir un rendez-vous, quand on en obtient un, il faut parfois attendre cinq ou six jours.
Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. Je voterai contre ces amendements, pour plusieurs raisons.
La question n’est pas de savoir s’il s’agit d’une profession à bac+5 ou à bac+2 ou à bac+9. Simplement, il y a un parcours de soins ; le médecin généraliste, qui a moins d’années d’études après le bac que le médecin spécialiste, est au cœur du dispositif.
J’ai esquissé cette idée dans mon intervention en discussion générale : on peut étendre les compétences des uns et des autres, des auxiliaires de santé ou de professions comme celle des sages-femmes, mais il faut que l’on garde une ligne directrice, à savoir le parcours de soins, dont le pivot doit rester le médecin généraliste, le médecin traitant.
Promouvoir la place de la sage-femme dans les endroits où il n’y a pas de médecins ne me semble pas pertinent ; on ne doit pas avoir des traitements différents selon les territoires. C’est un autre problème ; il faut résoudre l’accès aux soins de manière différente.
Pour toutes ces raisons, je voterai contre ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. Mon explication de vote sera assez proche de celle de Mme Guillotin ; c’est fréquent, d’ailleurs… (Sourires.)
Ma religion sur cette question n’était pas faite. D’ailleurs, j’ai voté précédemment pour l’amendement de notre collègue Longeot. Cela dit, je dois le reconnaître, je suis assez sensible à la question du médecin coordinateur.
On a dit des choses fortes et justes sur la profession de sage-femme et, naturellement, j’y adhère et je ne les reformulerai pas.
Toutefois, dans l’organisation de la santé, le rôle du médecin coordinateur est un acquis ; il ne faudrait donc pas détricoter cette organisation, au détour d’un amendement reposant sur des préoccupations par ailleurs bien légitimes. La question des déserts médicaux est réelle, mais faut-il pour autant détricoter cette organisation des soins et l’acquis du médecin coordinateur ? Je ne le pense pas.
Je voterai donc contre ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Il y a également un problème de responsabilité, sur lequel j’attire votre attention, mes chers collègues.
Ce n’est pas parce que l’on a mal à l’estomac que l’on a un problème d’estomac. Nous avons tous vu des infarctus ayant commencé par un problème d’estomac ! De même, quand on a mal au dos, on ne va pas forcément consulter un rhumatologue ; cela peut être une colique hépatique, une collecte néphrétique ou d’autres choses, bien plus graves. On peut donc mettre la vie de son patient en danger en orientant mal ce dernier. (M. Bernard Jomier approuve.)
Soyons donc attentifs. On ne rendrait pas service aux sages-femmes avec cette mesure, en raison du problème énorme de responsabilité qu’elle pose. Soyons raisonnables et prenons les choses dans le bon sens.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. J’irai dans le même sens que Mme Guillotin ou M. Savary.
Il est vrai que, tout à l’heure, j’ai présenté un amendement tendant à ce que la sage-femme puisse prescrire des médicaments, mais, dans mon esprit, c’était en accord avec le médecin traitant.
Il s’agit ici d’autre chose. Il faut un examen clinique du malade. Or, quelles que soient ses compétences, la sage-femme n’a pas l’habitude d’examiner des patients en dehors de la grossesse ou de pathologies qui sont liées à cette dernière.
Pour cette raison, je voterai également contre ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Je veux tout d’abord souligner que je trouve notre débat extrêmement intéressant.
Nous sommes sensibles à la notion de parcours de soins. L’argument consistant à dire qu’il ne faut pas désorganiser le parcours de soins, avancé par plusieurs de nos collègues, est essentiel.
J’attire tout de même votre attention, mes chers collègues, sur le problème de la démographie médicale en France aujourd’hui. Cette démographie est très particulière.
M. Yves Bouloux. C’est sûr !
Mme Laurence Cohen. Il faut donc adapter les comportements pour permettre le suivi des patientes et des patients.
Peut-être faudrait-il modifier l’amendement. Quoi qu’il en soit, une femme ne consulte pas une sage-femme si elle n’est pas enceinte !
M. Alain Milon, rapporteur. Si !
Mme Laurence Cohen. Je reconnais que ce que je dis n’est pas tout à fait juste… Au reste, nous en avons débattu.
Admettons tout de même que les situations suivies par les sages-femmes sont restreintes, puisque celles-ci s’occupent des femmes enceintes ou souffrant d’un certain nombre de pathologies.
Il ne me semble pas qu’accorder aux sages-femmes la possibilité d’adresser un patient à un spécialiste serait la porte ouverte à une désorganisation du parcours de soins.
La situation est assez exceptionnelle. Ce genre de solutions peut aider dans un certain nombre de territoires.
Mme la présidente. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour explication de vote.
Mme Élisabeth Doineau. Ce débat est intéressant. La question est la suivante : où met-on le curseur en matière de délégations de tâches ?
J’entends bien les arguments avancés par M. le ministre et j’y adhère. Je suis favorable à la coordination et à la pluridisciplinarité. Cependant, aujourd’hui, ce monde idéal n’existe pas partout sur nos territoires. Or on peut quelquefois trouver une sage-femme dans un territoire qui souffre d’un déficit de professionnels de santé.
Contrairement à mes collègues auteurs des deux autres amendements, j’ai ajouté que le médecin traitant devait être prévenu de la décision prise par la sage-femme. C’est une sécurité, et c’est surtout une question de responsabilité, pour faire écho à ce qu’a dit notre collègue René-Paul Savary. Il vaut mieux consulter une sage-femme que ne voir personne quand il n’y a pas de médecin traitant !
Adresser les éléments de contexte et de diagnostic au médecin traitant est une garantie qui me semble suffisante.
Mme la présidente. Mes chers collègues, les explications de vote ont été productives, puisqu’elles ont amené au retrait des demandes de scrutin public. (Sourires.)
Je mets aux voix l’amendement n° 199 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, l’article 2 quinquies B demeure supprimé.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Roger Karoutchi.)
PRÉSIDENCE DE M. Roger Karoutchi
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
7
Décès d’un ancien sénateur
M. le président. J’ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue William Chervy, qui fut sénateur de la Creuse de 1981 à 1998.
8
Amélioration du système de santé par la confiance et la simplification
Suite de la discussion en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons la discussion de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre II, à l’article 2 quinquies.
Chapitre II (suite)
L’évolution des professions de sage-femme et de certains auxiliaires médicaux
Article 2 quinquies
À la première phrase du neuvième alinéa de l’article L. 4321-1 du code de la santé publique, les mots : « , dans des conditions définies par décret » sont supprimés.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 104 est présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, MM. Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian.
L’amendement n° 192 rectifié bis est présenté par Mme Doineau, MM. Kern, J.-M. Arnaud et Longeot, Mme Loisier, MM. Lafon et Détraigne, Mmes Vérien, Billon, Saint-Pé et Perrot, MM. Mizzon, Hingray, Levi, Le Nay, Laugier, S. Demilly et Canevet, Mmes Gatel, Dindar et Guillotin, M. Cadic, Mme de La Provôté, MM. Cigolotti et Duffourg, Mme Jacquemet et MM. Vanlerenberghe et P. Martin.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 4321-1 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° La première phrase de l’avant-dernier alinéa est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : « Le masseur-kinésithérapeute peut pratiquer son art sur prescription médicale. Dans ce cas, il est habilité à renouveler et adapter, sauf indication contraire du médecin, les prescriptions médicales d’actes de masso-kinésithérapie datant de moins d’un an. » ;
2° Le dernier alinéa est ainsi modifié :
a) La première phrase est supprimée ;
b) La seconde phrase est ainsi rédigée : « Un compte rendu des soins ayant été réalisés par le masseur-kinésithérapeute est adressé au médecin traitant et peut être reporté dans le dossier médical partagé. »
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 104.
Mme Raymonde Poncet Monge. La proposition de loi que nous examinons vise à améliorer notre système de santé par la confiance et la simplification.
Nous proposons, dans le cadre de cet objectif, une avancée concrète, ouvrant un progrès et une simplification dans l’accès aux soins des usagers, qui consiste à s’appuyer sur les compétences des 100 000 professionnels de santé que sont les masseurs-kinésithérapeutes.
Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires propose, avec cet amendement, de permettre aux patients d’accéder directement aux traitements de kinésithérapie. En effet, les masseurs-kinésithérapeutes bénéficient d’une large autonomie dans le diagnostic et dans les soins apportés aux patients, mais leur pratique est toujours soumise à prescription médicale.
Cette restriction est parfois non pertinente. Elle souffre ailleurs d’exceptions dès à présent dans les cas d’urgence et dans le cadre de protocoles de coopération, pour la torsion de la cheville et la douleur lombaire par exemple.
Ces exceptions sont justifiées, mais peu lisibles pour le patient. L’accès direct simplifierait et raccourcirait le parcours de soins du patient. Il permettrait aussi de pallier le risque de renoncement aux soins ou de surcoût pour le patient dans les territoires où il est difficile d’avoir accès à un médecin généraliste, bien que ce ne soit pas l’argument premier.
Cette mesure ne représenterait pas de surcoût pour la sécurité sociale. Elle permettrait même des économies, même si, là non plus, ce n’est pas le but premier.
Les soins concernés répondront aux référentiels émis par l’assurance maladie, après avis de la Haute Autorité de santé, comme c’est déjà le cas pour les dix séances prévues en cas d’entorse de la cheville.
Par ailleurs, le lien avec le médecin ne serait pas rompu, puisque la prescription médicale resterait possible et le risque de perte d’informations serait évité en conditionnant le remboursement au versement du bilan et du compte rendu au dossier médical partagé et à la transmission au médecin traitant.
La mesure que nous proposons a été travaillée avec le Conseil national de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes et les syndicats représentatifs de la profession.
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour présenter l’amendement n° 192 rectifié bis.
Mme Élisabeth Doineau. Cet amendement vise à permettre aux patients des masseurs-kinésithérapeutes qui vivent dans des territoires sous-dotés d’accéder aux soins de masso-kinésithérapie malgré l’absence de médecins, donc de prescripteurs.
Cette absence peut conduire à un défaut de prise en charge et, in fine, à des conséquences préjudiciables pour la santé des patients, en particulier des plus fragiles d’entre eux.
Je ne développerai pas l’argumentation plus avant, ma collègue l’ayant très bien fait. Quoi qu’il en soit, je vous remercie de considérer avec un œil attentif cette proposition, qui œuvrerait en faveur de l’accès aux soins et répondrait à la demande d’une profession qui est tout à fait consciente de ses responsabilités.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur de la commission des affaires sociales. Le dispositif de l’amendement présenté par Mme Doineau ne précise à aucun moment qu’il concerne les seuls territoires sous-dotés… Il vaut pour l’ensemble des territoires.
Ces amendements tendent à consacrer la possibilité d’un accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes, suivant une demande de la profession.
L’article 2 quinquies, tel qu’il a été rédigé par la commission, vise déjà à rendre effective la faculté ouverte à ces professionnels d’adapter, dans le cadre d’un renouvellement, les prescriptions médicales initiales d’actes de masso-kinésithérapie datant de moins d’un an.
La commission a toutefois estimé, dans un objectif de pertinence des soins, qu’il était utile que le médecin traitant reste un pivot de la prise en charge des patients et permette de réguler l’accès aux soins de masso-kinésithérapie en dehors des situations d’urgence, dans lesquelles un masseur-kinésithérapeute peut déjà apporter les premiers actes de soins.
La commission sollicite donc le retrait de ces amendements. À défaut, elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie. Le Gouvernement est lui aussi défavorable à ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 104 et 192 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 2 quinquies.
(L’article 2 quinquies est adopté.)
Articles additionnels après l’article 2 quinquies
M. le président. L’amendement n° 75, présenté par M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 3° de l’article L. 3121-2-2 du code de la santé publique, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« …° Les infirmières et infirmiers ;
« …° Les médecins généralistes de premier recours. »
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Dans le sillon des préconisations de la Cour des comptes, cet amendement a pour objet d’élargir la compétence des infirmiers, ainsi que des médecins généralistes, à la délivrance des autotests VIH, afin d’en multiplier les points d’accès.
Comme la Cour l’a rappelé, malgré les récents progrès, la politique de dépistage connaît encore en France un trop grand retard. Si 170 000 personnes vivent avec le VIH dans notre pays et 6 500 découvrent leur séropositivité chaque année, on estime à 30 000 le nombre de personnes qui sont porteuses sans le savoir. C’est beaucoup trop. Pis, environ un tiers des découvertes sont trop tardives aujourd’hui.
Afin d’enrayer cette dynamique, la France avait permis la vente des autotests en pharmacie. Plus de 90 000 autotests ont ainsi été vendus en 2017, mais ce chiffre est encore insuffisant. Il faut l’augmenter significativement pour améliorer le dépistage.
C’est pourquoi il convient de multiplier les possibilités d’obtenir des autotests. En particulier, il nous semble pertinent d’ouvrir cette possibilité aux infirmiers et médecins, les consultations avec ces professionnels de santé offrant souvent au patient l’occasion de se confier.
Dans ce contexte, permettre à ces derniers de délivrer des autotests nous semble plus qu’opportun. C’est même nécessaire, afin de rendre la prise en charge plus précoce et efficace.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Le code de la santé publique autorise la délivrance des autotests VIH en dehors des pharmacies, par des centres de dépistage, d’accompagnement ou de prévention en addictologie, ainsi que par les organismes de prévention sanitaire habilités.
La délivrance par des infirmiers et médecins pourrait encore faciliter l’accès à ces dispositifs médicaux.
Dans un récent rapport, établi sur la base des travaux réalisés par la Cour des comptes à la demande de notre commission, notre collègue Corinne Imbert a formulé plusieurs propositions en ce sens, notamment pour généraliser le dépistage gratuit sans prescription dans les laboratoires de biologie médicale ou autoriser la réalisation de tests rapides d’orientation diagnostique, les TROD, VIH gratuits dans les pharmacies d’officine volontaires.
La commission a souhaité connaître l’avis du Gouvernement sur les suites que ce dernier entend donner à ces recommandations.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Il convient d’ajouter, aux autotests vendus en France, ceux qui sont distribués gratuitement par les associations habilitées. Leur nombre – 85 000 par an – montre que ces dispositifs de diagnostic in vitro sont bien intégrés dans le panel des outils de prévention.
Plus globalement, la question de l’accès au dépistage sera traitée dans le cadre de la prochaine feuille de route de la stratégie nationale de santé sexuelle, dont les travaux vont commencer très prochainement.
Pour ces raisons, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est donc l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Favorable.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Je suis favorable à cet amendement. Comme l’indique son auteur, 30 000 personnes ne savent pas qu’elles sont séropositives. Cette situation est très dangereuse.
Il serait très utile que nous disposions également d’autotests pour le covid.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 2 quinquies.
L’amendement n° 77 rectifié, présenté par M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 3121-2-2 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 3121-2-… ainsi rédigé :
« Art. L. 3121-2-…. – I. – Lorsqu’une situation d’urgence justifie la prise d’un traitement indiqué dans la prévention de l’infection au virus de l’immunodéficience humaine, les premières prises de ce traitement peuvent être prescrites par un médecin de ville ou peuvent être délivrées sans ordonnance par un pharmacien, après information du patient sur le protocole à suivre pour la poursuite efficace du traitement.
« Par dérogation à l’article L. 1111-5, la personne mineure, qui s’oppose à la consultation du ou des titulaires de l’autorité parentale préalablement à la mise en œuvre du traitement prévu au premier alinéa du présent I, est dispensée de se faire accompagner d’une personne majeure.
« II. – Sous réserve de la réalisation préalable des examens nécessaires, la prescription d’un traitement indiqué dans la prévention de l’infection au virus de l’immunodéficience humaine peut intervenir à l’occasion d’une téléconsultation assurée par plus d’un médecin, sans nécessité pour le patient d’avoir été préalablement orienté par son médecin traitant ni d’avoir déjà consulté en présentiel le médecin téléconsultant.
« III. – Les modalités d’application des I et II du présent article sont précisées par décret, pris après avis de la Haute Autorité de santé et de l’Agence nationale de la sécurité du médicament et des produits de santé. »
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Le traitement post-exposition, ou TPE, au VIH et la prophylaxie pré-exposition, la PrEP, devaient permettre de poser un nouveau jalon dans la lutte contre le VIH, tout en améliorant grandement la vie de nombreuses personnes.
Pourtant, alors que son autorisation de mise sur le marché, ou AMM, ne date que de 2016, et que l’on aurait donc pu penser que la phase de montée en puissance était encore en cours, on a noté une baisse de 27 345 prescriptions de PrEP entre 2019 et 2020. C’est beaucoup trop.
Cette situation n’est pas imputable aux personnes concernées. La crise de la covid a rendu manifestes à la fois l’insuffisance et la méconnaissance des possibilités d’accès à ces traitements.
S’agissant tout d’abord de l’insuffisance, l’AMM européenne de 2016 prévoyait que la PrEP soit prescrite par des médecins expérimentés, ce qui s’est traduit par une restriction de la primoprescription aux spécialistes du VIH ainsi qu’aux centres gratuits d’information, de dépistage et de diagnostic, les Cegidd.
Si cette restriction pouvait se comprendre, elle ne semble plus justifiée, car les contre-indications et effets secondaires sont désormais bien mieux connus.
Le ministre de la santé a d’ailleurs, pour cette raison, rédigé un projet de décret visant à ouvrir la primoprescription de la PrEP aux médecins de ville. Patatras ! Dans un avis négatif, le Conseil d’État a dénoncé une incompatibilité avec l’AMM européenne, qui mentionnait des « médecins expérimentés ». Le Portugal a pourtant trouvé une parade rédactionnelle dont nous pourrions nous inspirer.
J’espère que cette question sera résolue rapidement, mais, pour l’heure, je me permets de rappeler, exemples à l’appui, que la prescription et la délivrance hors AMM restent techniquement possibles.
Quant à la méconnaissance des possibilités d’accès à ces traitements, elle renvoie directement au reproche que j’ai formulé concernant le manque de stabilité et de cohérence de la politique de la France en matière d’exercice coordonné.
La meilleure connaissance, en particulier des Cegidd, permettrait de remédier au moins partiellement à ce problème.
Enfin, l’objet de cet amendement est de promouvoir une politique visant à multiplier les possibilités d’accès à la PrEP, ainsi qu’aux TPE. Nous sommes conscients des contraintes techniques et juridiques, notamment de droit européen, qui pèsent sur celles-ci, mais il n’est pas acceptable que la politique de lutte contre le VIH en soit compromise.
Il est donc nécessaire d’autoriser rapidement cette prescription.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement tend à rejoindre les recommandations du rapport rédigé par Corinne Imbert au nom de la commission des affaires sociales et celles du rapport de la Cour des comptes, également établi à la demande de notre commission.
Nous émettons donc un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. La délivrance d’un TPE nécessite la mobilisation de la connaissance médicale et associe la prescription d’un bilan biologique préalable.
Rien ne serait pire que de laisser une personne découvrir seule sa séropositivité.
Il faut une coordination. Il me paraît donc nécessaire d’avancer avec les différentes parties prenantes, les personnes concernées et les professionnels de santé, pour réaliser ensemble l’ambition que nous avons d’une santé sexuelle et d’une vie affective épanouie et sûre pour chacune et chacun d’entre nous.
Pour ces raisons et pour éviter les pertes de chances pour la construction de cette stratégie que nous allons mener bientôt, j’émets, à ce stade, un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Madame la ministre, j’entends ce que vous dites, mais je ne comprends pas très bien : si votre collègue ministre des solidarités et de la santé a préparé un texte réglementaire pour autoriser la prescription de la PrEP par les médecins de ville, c’est bien qu’il partage cet objectif !
Personne ne souhaitait permettre que les prescriptions se multiplient sans que l’on ait un retour d’expérience et suffisamment de recul. L’AMM existe depuis 2016. Ce sont des obstacles réglementaires qui ont empêché la mesure de s’appliquer. Inscrivons-la dans la loi, et la question sera réglée !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 2 quinquies.
L’amendement n° 78, présenté par M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 4311-1 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un patient en perte d’autonomie ou en affection longue durée peut désigner, au sein d’une équipe de soins et en dehors du cadre des coopérations prévues à l’article L. 4011-1, une infirmière ou un infirmier référent afin d’assurer la coordination clinique de proximité en lien étroit avec le médecin traitant et le pharmacien référent. L’infirmière ou l’infirmier référent, le médecin traitant et le pharmacien correspondant sont signataires d’un projet de santé au sens des articles L. 1411-11-1, L. 1434-12, L. 6323-1-10 ou L. 6323-3. »
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Cet amendement a pour objet la profession d’infirmier ; ses dispositions font écho au débat que nous avons eu tout à l’heure sur les référents.
La profession d’infirmier sera amenée à jouer un rôle central dans la transformation de l’organisation de notre système de soins, mais aussi au regard de l’enjeu de santé publique considérable que représente la révolution démographique en cours.
Dans le cadre du premier recours, de la collaboration avec le médecin traitant pour la prise en charge des patients âgés et chroniques et de leur rôle en santé publique, les infirmiers doivent voir leur mission évoluer.
Alors que le programme Santé 21 de l’OMS pour l’Europe consacre le principe d’infirmier de famille ou d’infirmière référente, l’infirmier apparaît toujours, en France, comme le chaînon manquant du panorama de l’organisation des soins, alors qu’il pourrait constituer un triptyque fructueux avec le médecin traitant, d’une part, et le pharmacien référent, d’autre part, ce dernier ayant été consacré, je le rappelle, dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019.
Cet amendement vise à rattraper le retard que nous avons pris par rapport à bon nombre de nos voisins européens, en permettant qu’un patient en perte d’autonomie ou en affection de longue durée, en ALD, puisse désigner une infirmière ou un infirmier référent, afin d’assurer la coordination clinique de proximité. Il s’agit d’un mouvement tout aussi nécessaire que le développement des pratiques avancées.
Madame la ministre, nous espérons que vous réserverez à cet amendement un meilleur accueil que votre prédécesseure.
En effet, alors que le même amendement avait adopté par notre assemblée lors de l’examen du projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé, en 2019, la ministre des solidarités et de la santé de l’époque avait sollicité son retrait, au motif assez incompréhensible que la désignation remettrait en cause la coordination déjà assurée par les communautés professionnelles territoriales de santé, les CPTS, et détournerait les patients de l’équipe de soins.
Une infirmière ou un infirmier référent a toute sa place dans une CPTS, précisément pour coordonner le parcours de soins avec les autres professionnels ! Cette mesure permettrait par ailleurs de libérer du temps médical pour le médecin traitant.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Comme l’a dit M. Jomier, la commission des affaires sociales avait déjà adopté un amendement similaire lors de l’examen du projet de loi Ma santé 2022.
Comme pour la sage-femme référente, cette mesure semble répondre à un objectif louable de coordination des soins autour du patient, mais, ainsi que je l’ai dit en commission, je vois mal quelle en serait la plus-value concrète.
En attendant que l’on me l’explique, je m’en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Depuis 2020, les infirmiers en pratique avancée interviennent en libéral afin de prendre en charge de manière globale les patients dont le suivi leur a été confié par un médecin. Ils réalisent le bilan, le suivi, les actions de coordination, l’éducation thérapeutique, etc.
Le rôle de coordination de l’infirmier et son importance dans la prise en charge des patients sont reconnus dans les faits.
Loin d’apporter une plus-value, pour reprendre le terme de M. le rapporteur, la création d’un nouveau statut et d’un nouveau dispositif ajouterait une complexité inutile.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Monsieur le rapporteur, vous aurez compris que l’objectif n’est pas que chacun ait un infirmier ou une infirmière référente ! Cela n’aurait pas grand intérêt en termes de temporalité et cela serait source de complexité.
L’amendement vise les patients en ALD ou en perte d’autonomie, qui ont besoin de soins infirmiers récurrents. Pour ces derniers doit réellement s’animer le triptyque, selon moi fondamental pour les soins de premier recours, du médecin traitant, du pharmacien et de l’infirmier référent.
La question de la sage-femme référente était autre, puisque cette professionnelle de santé intervient à une période très déterminée de la vie. Au reste, ce dispositif ne répondait évidemment pas aux mêmes nécessités de santé publique.
M. le président. Je suis saisi de six amendements identiques.
L’amendement n° 47 rectifié quinquies est présenté par MM. Mouiller et Favreau, Mme Di Folco, MM. Cuypers et Le Rudulier, Mmes Belrhiti, Schalck et Micouleau, M. Belin, Mme Joseph, M. Lefèvre, Mme Deromedi, M. Kern, Mme Gruny, MM. Vogel, Pellevat, Bonne et Boré, Mme F. Gerbaud, MM. Laménie, Mandelli et B. Fournier, Mme Demas, M. Bonhomme, Mmes Pluchet et Imbert, MM. Piednoir, Paccaud et Mizzon, Mme L. Darcos, M. Regnard, Mmes Estrosi Sassone et Canayer, MM. Panunzi et Cadec, Mmes Lopez et Puissat, M. Brisson, Mme Primas, MM. Longeot et Cambon, Mme Garriaud-Maylam, M. de Nicolaÿ, Mme Deseyne, MM. Dallier, Pointereau, Somon, Perrin, Rietmann, Burgoa, Tabarot, Rapin et D. Laurent, Mme Doineau, M. Frassa, Mme Borchio Fontimp, MM. Bazin, Charon et Moga, Mme de Cidrac, MM. Sautarel, Gremillet, Genet et Savin, Mme Dumont et MM. Chevrollier et Rojouan.
L’amendement n° 50 rectifié quater est présenté par M. Canevet, Mme Dindar, M. Levi, Mmes Jacquemet, Vermeillet et de La Provôté, M. J.M. Arnaud, Mme Férat, MM. Folliot, Lafon et Détraigne, Mmes Billon et Vérien, MM. Delahaye et Le Nay, Mme Saint-Pé, M. P. Martin, Mme Gatel et MM. Cigolotti et Delcros.
L’amendement n° 56 rectifié quater est présenté par MM. Henno, Chauvet et Duffourg, Mmes Létard et N. Goulet et MM. Laugier et S. Demilly.
L’amendement n° 90 rectifié ter est présenté par Mmes Le Houerou et Meunier, MM. P. Joly et Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 184 rectifié bis est présenté par Mme Guillotin, MM. Artano et Bilhac, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
L’amendement n° 200 rectifié bis est présenté par Mme Guidez, MM. de Legge et Guerriau, Mme Havet, M. Decool, Mme Mélot, MM. Lagourgue et Maurey, Mmes Boulay-Espéronnier et Benbassa et M. Anglars.
Ces six amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L.4331-1 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ils peuvent prescrire ou, sauf indication contraire du médecin, renouveler les prescriptions médicales des dispositifs médicaux et aides techniques dont la liste est fixée par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale pris après avis de l’Académie nationale de médecine, dans des conditions définies par décret. »
La parole est à M. Philippe Mouiller, pour présenter l’amendement n° 47 rectifié quinquies.
M. Philippe Mouiller. Cet amendement vise à inscrire dans le code de la santé publique le droit à la prescription de dispositifs médicaux, notamment d’aides techniques, pour les ergothérapeutes.
Cette délégation de prescription a été récemment proposée par le docteur Philippe Denormandie dans un rapport intitulé Des aides techniques pour l’autonomie des personnes en situation de handicap ou âgées : une réforme structurelle indispensable.
Pour travailler depuis de nombreuses années sur l’accès aux soins des personnes handicapées et sur l’évolution de la prise en charge des aides techniques, je puis témoigner qu’il est souvent très difficile pour les personnes handicapées d’obtenir des prescriptions dans des délais raisonnables.
Cet amendement a donc pour objet d’améliorer et de fluidifier le parcours de santé des personnes âgées et handicapées et, ainsi, de faire en sorte que les délais soient raccourcis et les services plus accessibles.
M. le président. La parole est à Mme Annick Jacquemet, pour présenter l’amendement n° 50 rectifié quater.
Mme Annick Jacquemet. Je veux simplement préciser que la liste des actes serait définie par arrêté du ministre chargé de la santé.
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour présenter l’amendement n° 56 rectifié quater.
M. Olivier Henno. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 90 rectifié ter.
Mme Annie Le Houerou. Les ergothérapeutes sont vraiment très bien placés pour accompagner les personnes en situation et pour trouver l’adaptation qui leur convient. Il serait donc opportun qu’ils puissent prescrire ces aides techniques.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 184 rectifié bis.
Mme Véronique Guillotin. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour présenter l’amendement n° 200 rectifié bis.
Mme Jocelyne Guidez. Il est également défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Ces amendements ont été présentés en commission. Nous avions demandé qu’ils soient modifiés pour se référer à un décret qui permette de déterminer les modalités.
Ces amendements ont depuis lors été modifiés en ce sens par leurs auteurs, raison pour laquelle j’émets un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Croyez-moi, mesdames, messieurs les sénateurs, je travaille beaucoup sur la question des aides techniques, notamment sur l’extension de la liste des aides techniques que nous pourrions faire prendre en charge par la sécurité sociale.
À la suite des recommandations du rapport Denormandie-Chevalier, le ministre a lancé, en décembre 2020, un appel à manifestation d’intérêt pour l’élaboration de ce protocole de coopération sur la prescription aux ergothérapeutes. La délégation par les médecins de la prescription d’aides techniques aux ergothérapeutes sera promue dans ce cadre.
À ce stade, je suis tenue d’émettre un avis défavorable, mais c’est une mesure tout à fait intéressante.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 47 rectifié quinquies, 50 rectifié quater, 56 rectifié quater, 90 rectifié ter, 184 rectifié bis et 200 rectifié bis.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 2 quinquies.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 105 est présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, MM. Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian.
L’amendement n° 193 rectifié ter est présenté par Mme Doineau, MM. Kern, J.-M. Arnaud et Longeot, Mme Loisier, M. Détraigne, Mmes Vérien, Billon, Saint-Pé et Perrot, MM. Mizzon, Hingray, Levi, Le Nay, Laugier, S. Demilly et Canevet, Mmes Gatel, Dindar et Guillotin, MM. Lafon et Cadic, Mme de La Provôté, MM. Cigolotti et Duffourg, Mme Jacquemet et MM. Vanlerenberghe et P. Martin.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 4341-1 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Le cinquième alinéa est ainsi rédigé :
« L’orthophoniste peut pratiquer son art sur prescription médicale. Dans ce cas, il est habilité à renouveler et adapter, sauf indication contraire du médecin, les prescriptions médicales d’actes d’orthophonie datant de moins d’un an. » ;
2° Le sixième alinéa est ainsi modifié :
a) La première phrase est supprimée ;
b) La seconde phrase est ainsi rédigée : « Un compte rendu du bilan ayant été réalisé par l’orthophoniste est adressé au médecin traitant et peut être reporté dans le dossier médical partagé. »
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 105.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à permettre aux patients d’accéder directement au diagnostic et aux soins en orthophonie.
Il s’agit là aussi de s’appuyer sur les compétences de ces professionnels de santé et de simplifier les parcours de soins afférents.
En effet, l’accès direct à l’orthophonie simplifierait et raccourcirait les parcours de soin du patient. Il apporterait également une réponse au risque de défaut de prise en charge pour les patients vivant dans des territoires où il est difficile d’avoir accès à un médecin généraliste, même si ce n’est pas l’argument premier : il s’agit avant tout de s’appuyer sur les compétences de la profession d’orthophoniste.
Depuis 2002, les médecins prescrivent, ce qui est intéressant, des bilans orthophoniques et une rééducation « si nécessaire ». Ce sont donc bien les orthophonistes qui déterminent, en autonomie, la mise en œuvre d’un traitement, le nombre de séances nécessaires à l’issue du bilan et du diagnostic orthophonique qu’ils ont posé ou encore l’arrêt ou la poursuite des soins.
Par ailleurs, le lien avec le médecin ne serait pas rompu, puisque la prescription médicale resterait possible et le risque de perte d’informations serait évité en conditionnant le remboursement au versement du bilan et du compte rendu des soins au dossier médical partagé et à leur transmission au médecin traitant.
Nous avons travaillé sur cette mesure avec la Fédération nationale des orthophonistes. Il me semble important de consacrer l’autonomie de ces professionnels dans le parcours de soins.
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour présenter l’amendement n° 193 rectifié ter.
Mme Élisabeth Doineau. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission ne voit pas d’opposition de principe à cette évolution.
Toutefois, comme elle l’a souligné pour l’accès direct à la masso-kinésithérapie, le médecin traitant doit aussi conserver un rôle pivot dans l’organisation du parcours de soins.
Sous cette condition, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Je ne partage pas le point de vue qui a été exprimé en ce qui concerne l’accès direct aux soins en orthophonie.
Au regard de la diversité des pathologies – troubles du langage chez l’enfant ou chez l’adulte –, il me semble important que le diagnostic et les traitements orthophoniques n’interviennent qu’après un diagnostic médical avéré, sauf situation d’urgence.
Même si nous travaillons autour de l’attractivité du métier en lui-même, la prescription médicale doit être maintenue.
J’émets donc un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Il me semble important, madame la ministre, de bien mesurer le champ de cet amendement. Le médecin, comme l’a souligné notre rapporteur, garde certaines prérogatives.
Toutefois, pour avoir exercé cette profession pendant très longtemps, et même si les choses se sont améliorées après 2002, ce sont bien souvent les orthophonistes qui demandent aux médecins d’établir un diagnostic. C’est tout juste si l’on ne leur tient pas la main, parce qu’ils n’y connaissent rien… (Sourires.)
M. René-Paul Savary. C’est vrai !
Mme Laurence Cohen. Je sais qu’il y a beaucoup de médecins dans l’hémicycle et je ne veux vexer personne. Il ne s’agit pas du tout d’un jugement de valeur, mais tout simplement de mon vécu.
Il me semble important de laisser une certaine latitude à l’orthophoniste en ce qui concerne le renouvellement d’un traitement.
Vous avez raison, madame la ministre, le langage dans tous ses états constitue un champ très vaste, qui va de la petite enfance aux personnes âgées, des accidents vasculaires cérébraux aux accidents de la route ou aux troubles cognitifs, par exemple. Mais la compétence des orthophonistes est également très large, et ceux-ci sont tout à fait à même de savoir s’il faut renouveler un traitement et de connaître le nombre de séances supplémentaires nécessaires.
En outre, expérience vécue ne fait certes pas force de loi, mais l’accès direct devrait permettre, comme l’a souligné Mme Poncet Monge, de faire des économies, car les orthophonistes connaissent leur métier et savent qu’il n’est pas toujours nécessaire d’aller au-delà d’un certain nombre de séances.
Cet amendement me semble donc intéressant.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Je partage l’avis de Mme Cohen : généralement, les médecins ne sont pas formés au dépistage de ce genre de problèmes, et ce sont bien souvent les parents ou les enseignants qui s’en chargent.
La porte d’entrée pour établir un diagnostic précis relève davantage de l’orthophoniste, quitte à ce que le médecin, qui demeure le pivot du parcours de soins, prenne ensuite le relais.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Je souscris moi aussi aux propos de Mme Cohen et de notre rapporteur.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 105 et 193 rectifié ter.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 2 quinquies.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 20 rectifié ter est présenté par Mmes Imbert et Belrhiti, MM. Laménie et D. Laurent, Mme Estrosi Sassone, M. Sautarel, Mmes Chauvin et Boulay-Espéronnier, MM. Burgoa, Lefèvre, Bouloux, Sol, Perrin et Rietmann, Mmes Lavarde, Deromedi et Gruny, M. Bascher, Mme Thomas, M. Mouiller, Mmes Procaccia et Joseph, M. Pellevat, Mme Puissat, MM. Bonhomme et Savin, Mme Lopez, M. B. Fournier, Mme Micouleau, MM. Bonne, Belin et Genet, Mme Dumont, M. Brisson, Mme Demas, M. Pointereau, Mme L. Darcos, M. Regnard, Mme Lassarade, M. Piednoir, Mme F. Gerbaud et MM. Favreau, Saury, Klinger, Vogel et Duplomb.
L’amendement n° 179 rectifié bis est présenté par Mme Guillotin, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Fialaire, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel, MM. Requier et Roux et Mme Doineau.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l’article L. 5126-1 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° De pouvoir effectuer certaines vaccinations dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé de la santé pris après avis de la Haute Autorité de santé. »
La parole est à Mme Corinne Imbert, pour présenter l’amendement n° 20 rectifié ter.
Mme Corinne Imbert. Aujourd’hui, l’ensemble des pharmaciens d’officines peut vacciner contre la grippe. Cette mesure a été mise en œuvre avec succès.
Afin d’augmenter la couverture vaccinale, les pharmaciens des pharmacies à usage intérieur, les PUI, pourraient, eux aussi, bénéficier de cette possibilité de vacciner les patients et résidents présents dans des établissements de soins et médico-sociaux.
Ce dispositif faciliterait grandement la couverture vaccinale des professionnels de santé en exercice dans les établissements de soins.
Une telle évolution serait d’autant plus intéressante dans la perspective d’une vaccination de masse contre la covid-19.
M. le président. La parole est à M. Bernard Fialaire, pour présenter l’amendement n° 179 rectifié bis.
M. Bernard Fialaire. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission est favorable à ces deux amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Avis défavorable, monsieur le président. (Exclamations ironiques.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.
M. Philippe Mouiller. J’aimerais connaître les raisons pour lesquelles le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements identiques.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Il n’y a pas de problème, monsieur le sénateur !
De nombreux professionnels de santé prennent déjà en charge les patients hospitalisés et peuvent vacciner les personnes admises en long séjour ou en établissements d’hébergement pour personnes âgées. Étendre cette faculté aux pharmaciens exerçant en PUI d’un établissement de santé ou d’un établissement médico-social ne répond donc pas à un réel besoin en matière d’offre.
Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à ces amendements identiques.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Dans la vraie vie, les médecins sont surmenés et peinent à vacciner dans les Ehpad.
Il serait d’autant plus intéressant de laisser les pharmaciens pratiquer la vaccination qu’ils interviennent déjà dans la médication des pensionnaires des Ehpad des territoires ruraux.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Si les pharmaciens d’officine le font, les pharmaciens exerçant en PUI, qui ont le même diplôme, doivent aussi pouvoir le faire. C’est une redoutable évidence !
De même, les pharmaciens sont plus à même d’assurer la bonne conservation des vaccins. Dès lors, pourquoi ne pas les laisser vacciner ?
Des mutants du covid vont apparaître régulièrement. Il faudra procéder à des campagnes annuelles de vaccination contre la grippe, contre le covid, contre d’autres virus… Nous avons tout intérêt à mobiliser le plus de personnes possible.
M. le président. Je vous remercie, monsieur Savary, de nous rassurer sur le covid ! (Sourires.)
Je mets aux voix les amendements identiques nos 20 rectifié ter et 179 rectifié bis.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 2 quinquies.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 19 rectifié ter est présenté par Mmes Imbert et Belrhiti, MM. Laménie et D. Laurent, Mme Estrosi Sassone, M. Sautarel, Mmes Chauvin et Boulay-Espéronnier, MM. Burgoa, Lefèvre, Bouloux, Sol, Perrin et Rietmann, Mmes Lavarde, Deromedi et Gruny, M. Bascher, Mme Thomas, M. Mouiller, Mmes Procaccia et Joseph, M. Pellevat, Mme Puissat, MM. Bonhomme et Savin, Mme Lopez, M. B. Fournier, Mme Micouleau, MM. Bonne, Belin et Genet, Mme Dumont, M. Brisson, Mme Demas, M. Pointereau, Mme L. Darcos, M. Regnard, Mme Lassarade, M. Piednoir, Mme F. Gerbaud et MM. Favreau, Saury, Klinger, Vogel et Duplomb.
L’amendement n° 182 rectifié bis est présenté par Mme Guillotin, MM. Artano et Bilhac, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Pantel, MM. Requier et Roux et Mme Doineau.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 6211-23 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après la première occurrence du mot : « médicale », sont insérés les mots : « , des actes de vaccination » ;
2° Au deuxième alinéa, après le mot : « examens », sont insérés les mots : « , de ces actes ».
La parole est à Mme Corinne Imbert, pour présenter l’amendement n° 19 rectifié ter.
Mme Corinne Imbert. Les 4 720 laboratoires d’analyses de biologie médicale représentent aussi un point d’accès à la vaccination pour les Français et pourraient ainsi contribuer à augmenter la couverture vaccinale. Les biologistes qui y exercent sont déjà formés à piquer les patients. Ils ont un savoir-faire.
Encore une fois, une telle évolution serait intéressante dans la perspective d’une vaccination de masse contre la covid-19.
M. le président. La parole est à M. Bernard Fialaire, pour présenter l’amendement n° 182 rectifié bis.
M. Bernard Fialaire. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Les biologistes, qui savent faire des intraveineuses, sauront faire des intramusculaires.
La commission émet donc un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Depuis octobre 2019, la vaccination en ville est assurée par plusieurs professionnels de santé : infirmiers, pharmaciens d’officine, médecins généralistes, sages-femmes… Il ne nous paraît pas nécessaire d’élargir la vaccination à d’autres acteurs.
J’émets donc un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 19 rectifié ter et 182 rectifié bis.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 2 quinquies.
Chapitre III
Recrutement des praticiens hospitaliers et mesures diverses concernant l’emploi en établissement public de santé
Article 3
Le 1° de l’article L. 6152-1 du code de la santé publique est complété par une phrase ainsi rédigée : « Sous réserve de ce statut, leur recrutement pourvoit dans les meilleurs délais aux vacances de poste dans un pôle d’activité déclarées par le directeur général du centre national de gestion. »
M. le président. L’amendement n° 81 rectifié, présenté par Mme Poumirol, M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement vise à supprimer l’article 3 de la présente proposition de loi, qui concerne la procédure de recrutement des praticiens hospitaliers, laquelle fait l’objet de l’ordonnance de l’article 35 de la loi du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, dont nous attendons toujours la publication.
La refonte complète du statut de praticien hospitalier devait se traduire dans cette ordonnance. Ajouter une nouvelle disposition à un dispositif encore inappliqué ne nous semble pas opportun. En effet, nous ne pouvons pas nous prononcer sur des mesures qui n’ont pas encore pu produire leurs effets.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Même s’il me paraît difficile de soutenir cet amendement, dont les dispositions vont à l’encontre du texte de la commission, je ne puis que me montrer sensible aux arguments qui le sous-tendent et qui évoquent toute la difficulté du Parlement à se prononcer sur une législation en morceaux, discutée tantôt dans une proposition de loi, tantôt dans des ordonnances en cours de rédaction.
Je signalerai néanmoins que l’habilitation décidée dans la loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santé ne couvre que le champ des praticiens contractuels et non celui des praticiens statutaires.
L’article 3, après sa réécriture par notre commission, est parfaitement conforme à l’article 38 de la Constitution.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. La rédaction de cet article, issue des travaux de la commission, ne correspond plus à la philosophie initiale du texte.
Le Gouvernement est donc favorable à cet amendement de suppression.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. J’aimerais comprendre la position du Gouvernement : son avis favorable signifie-t-il qu’il ne réintroduira pas un nouvel article 3 dans la suite de la navette, ce dont nous serions extrêmement satisfaits, ou compte-t-il réintroduire la version initiale de l’article ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 3.
(L’article 3 est adopté.)
Article additionnel après l’article 3
M. le président. L’amendement n° 119 rectifié, présenté par MM. Kern et Mizzon, Mme Billon, MM. Canevet, P. Martin, Le Nay et Longeot et Mme de La Provôté, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 5° de l’article L. 6132-3 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« 5° La coordination de la politique territoriale de gestion des ressources humaines médicales, odontologiques, pharmaceutiques et maïeutiques, définie en cohérence avec la stratégie médicale du groupement élaborée et avec le concours de la commission médicale de groupement. »
La parole est à M. Claude Kern.
M. Claude Kern. Cet amendement vise à recentrer le groupement hospitalier de territoire, le GHT, sur son rôle stratégique et à simplifier la gestion des ressources humaines médicales.
Il tend également à clarifier le rôle de l’établissement support et des établissements parties, pour accompagner efficacement de nouvelles organisations territoriales et le soutien à la construction progressive des filières de soins, telles qu’elles sont définies dans le projet médical partagé.
Les dispositions de cet amendement imposent au groupement non seulement de définir une politique territoriale de gestion des ressources humaines médicales, afin de définir les modalités les plus à même de répondre à ces enjeux, mais aussi d’établir des règles de fonctionnement qui puissent s’appliquer à chacun.
L’implication de la commission médicale de groupement est essentielle pour garantir sa cohérence avec la stratégie médicale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Même si je comprends l’intention des auteurs de cet amendement, la disposition proposée ne me semble pas apporter de modification fondamentale par rapport au droit existant.
Je profite de l’examen de cet amendement pour rappeler la position de la commission des affaires sociales à l’égard des groupements hospitaliers de territoires, exprimée à l’occasion de la réception de l’étude spécifique qu’a menée la Cour des comptes à sa demande : il ne s’agit pas de défiance, mais de prudence.
L’idée d’une rationalisation de l’offre territoriale de santé nous semble indispensable à la réussite du parcours de soins, ainsi qu’à la meilleure allocation des deniers publics. Mais, contrairement à la Cour ou au Gouvernement, nous ne sommes pas favorables, à ce stade, à des dispositions qui atténuent la volonté des établissements parties au profit des établissements supports.
La dérive léonine des GHT vient d’une lacune dommageable de la loi Touraine, qui n’avait pas cru bon de les doter de la personnalité morale. En l’absence de cette dernière, que j’avais demandée en tant que rapporteur du texte à l’époque, les groupements ne peuvent que fournir le prétexte à la captation de l’activité par les structures de taille importante, au détriment des établissements de proximité. Nous aurons l’occasion de réaffirmer notre position chaque fois que les GHT seront évoqués dans ce débat.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Kern, l’amendement n° 119 rectifié est-il maintenu ?
M. Claude Kern. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 119 rectifié est retiré.
Article 4
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au 2° de l’article L. 1434-2, après le mot : « médico-sociaux », sont insérés les mots : « , elle-même issue du projet territorial de santé mentionné à l’article L. 1434-10 » ;
2° Le III de l’article L. 1434-10 est ainsi modifié :
a) La première phrase du deuxième alinéa est ainsi modifiée :
– après le mot : « donne », il est inséré le mot : « obligatoirement » ;
– après le mot : « médico-sociaux », sont insérés les mots : « au sein desquels figurent obligatoirement les groupements hospitaliers de territoire mentionnés à l’article L. 6132-1 » ;
b) Au troisième alinéa, après le mot : « tient », il est inséré le mot : « obligatoirement » ;
3° Le II de l’article L. 6132-2 est ainsi modifié :
a) Après la première phrase du 1°, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Il s’appuie sur le projet territorial de santé mentionné à l’article L. 1434-10 et, le cas échéant, sur le projet territorial de santé mentale mentionné à l’article L. 3221-2. » ;
b) Le b du 5° est complété par une phrase ainsi rédigée : « En sont membres avec voix consultative le directeur et un représentant de la conférence médicale des établissements mentionnés au VIII de l’article L. 6132-1 ainsi que les représentants légaux des communautés mentionnées à l’article L. 1434-12 dont les territoires d’action sont inclus dans la convention mentionnée au I de l’article L. 6132-1. »
M. le président. L’amendement n° 107, présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, MM. Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. L’article 4, animé par la volonté de centraliser au sein de l’établissement support du GHT les décisions de créations de postes de praticiens hospitaliers des autres établissements parties, a été fortement contesté par les professionnels de santé et par certaines fédérations.
Tout comme l’article 7, qui prévoyait l’intégration forcée par des directions communes, cet article devrait être supprimé.
De façon plus générale, toute modification des prérogatives ou obligations des GHT nous apparaît prématurée au regard du faible recul et de la forte hétérogénéité des groupements, dont certains sont faiblement efficients ou présentent des dysfonctionnements, alors que d’autres fonctionnent correctement.
La volonté qui sous-tend cette proposition consiste à accélérer et à renforcer la centralisation des pouvoirs des groupements qui se poursuit pourtant à marche sur le terrain, contre la volonté des acteurs de proximité et leur analyse des besoins de santé de territoires moins gigantesques.
Force est aussi de reconnaître qu’aucun dispositif ne saurait être vertueux sur fond d’insuffisance chronique de financements.
La perte d’autonomie des petits établissements de santé, qui ne tiraient guère de bénéfice du groupement, notamment en termes de mutualisation du personnel en cas de pénurie, s’est souvent accompagnée de fermetures préjudiciables aux territoires. Le niveau de déconnexion du terrain était prévisible quand un seul GHT couvre l’ensemble d’un territoire vaste comme l’ancienne région d’Auvergne…
Bien qu’il ait été réécrit en commission, cet article prévoit une implication toujours plus forte des groupements, alors que la crise sanitaire a mis au jour certains dysfonctionnements du quotidien qui doivent être prioritairement questionnés.
À l’inverse, il faut analyser les facteurs de résilience des acteurs de proximité, auxquels autonomie et liberté d’organisation ont été rendues, marquant un coup d’arrêt dans l’éloignement des centres de décisions, qui est responsable de la dilution de la responsabilité.
Pour ces raisons, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires propose de supprimer purement et simplement cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission ne peut être favorable à la suppression d’un article qu’elle a entièrement réécrit.
Je ne partage pas la vision de Mme Poncet Monge, qui voit dans l’élaboration obligatoire d’un projet territorial de santé et l’implication du GHT une injonction supplémentaire faite aux établissements de santé.
Au contraire, le nouvel article 4 propose de sortir d’une conception exclusivement descendante des schémas de santé – de l’ARS vers les établissements –, en permettant justement que les diagnostics territoriaux, qui sont aujourd’hui inégalement réalisés, contraignent l’ARS dans son pilotage.
Pour ces raisons, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. La réécriture de l’article 4 ne convient pas au Gouvernement. Imposer la mise en place systématique d’un projet territorial de santé serait contreproductif. C’est aux professionnels eux-mêmes d’exprimer leurs besoins.
Le Gouvernement est donc favorable à et amendement de suppression.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Je voterai contre cet amendement. Les GHT, lorsqu’ils sont mis en place avec l’accord des élus, des commissions médicales d’établissement et des hôpitaux, peuvent être bénéfiques.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Il s’agit d’un article complexe. Le rapporteur s’est attelé à un travail difficile de précision des missions des GHT qui nous semble préférable à leur suppression.
Plusieurs éléments sont intéressants dans la rédaction de la commission, comme le lien entre les projets territoriaux de santé et les ARS, la coordination territoriale des soins psychiatriques ou l’ouverture des comités stratégiques des GHT.
D’autres éléments nous conviennent moins dans l’article, tel qu’il est rédigé. Pour autant, il nous semble plus fructueux de préciser les missions des GHT que de supprimer ces derniers, qui existent déjà. Baisser les bras reviendrait à donner toute latitude à l’Assemblée nationale, comme semble le souhaiter la ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – Mme Émilienne Poumirol applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Je suis quelque peu surprise de la technique employée par le Gouvernement. Si la rédaction issue des travaux de la commission ne lui convient pas, pourquoi ne dépose-t-il pas – ou les sénateurs qui le soutiennent – un amendement tendant à rétablir la rédaction initiale ?
Donner un avis favorable à un amendement de suppression dès lors que la rédaction de la commission ne lui convient pas revient à piper le débat, si j’ose dire. La méthode est assez curieuse… (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – Mme Émilienne Poumirol applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Il ne s’agit pas de remettre en cause les GHT. Ils existent, c’est une réalité.
Toutefois, comme l’a souligné le professeur Olivier Claris, il convient de les évaluer. Après quatre ans d’existence, beaucoup présentent des dysfonctionnements contreproductifs.
Le soutien de Mme la ministre à mon amendement est quelque peu pervers ; je m’en passerais bien… (Sourires et applaudissements sur des travées des groupes SER et UC.)
M. le président. Quand on dépose un amendement, ma chère collègue, on ne choisit pas ses soutiens… (Nouveaux sourires.)
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. On a les soutiens que l’on mérite !
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je suis sidéré non seulement que l’on nous présente un texte dont l’article 1er est une demande de rapport, mais aussi que le Gouvernement soit favorable à la suppression d’articles dont la rédaction ne lui convient pas, pour les réintroduire ensuite, dans une autre rédaction. J’espère qu’il n’aura pas recours trop souvent à cette méthode innovante !
Par définition, madame la ministre, le projet territorial de santé, c’est ce qui permet de réunir les gens. Sans PTS, les acteurs du système de santé ne collaborent pas ; autant qu’ils restent chez eux, alors !
M. le président. L’amendement n° 161, présenté par MM. Théophile, Iacovelli, Lévrier, Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L’article L. 1112-5 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après le mot : « intervention », sont insérés les mots : « des bénévoles individuels et » ;
2° Au second alinéa, après le mot : « privés », sont insérés les mots : « et les personnes bénévoles qui y interviennent à titre individuel » ;
3° Sont ajoutés cinq alinéas ainsi rédigés :
« Les bénévoles à titre individuel exerçant dans les établissements de santé doivent :
« a) Suivre ou avoir suivi une formation à l’accompagnement dans le secteur médico-social proposée par des associations ou au sein de l’établissement de santé ;
« b) Ne pas interférer avec la pratique des soins médicaux et paramédicaux ;
« c) Obtenir l’accord de la personne malade ou de ses proches si et seulement si l’intervention définie dans la convention avec l’établissement de santé implique un contact avec la personne malade ;
« d) Intervenir uniquement avec l’accord de l’équipe de l’établissement et être encadré par un référent de l’établissement. »
La parole est à M. Dominique Théophile.
M. Dominique Théophile. Les dispositions de cet amendement correspondent à une réelle nécessité.
Lors de la crise sanitaire, plus de 16 000 volontaires non soignants ont proposé leur aide auprès de l’AP-HP. Cet élan de solidarité est honorable, et nous devons le soutenir. Les dispositions de cet amendement ne vont en aucun cas à l’encontre des centaines d’associations présentes dans les établissements de santé.
Le bénévolat n’est que peu encadré par la loi. En effet, l’article L. 6323-1-5 du code de la santé publique dispose simplement que les centres de santé peuvent bénéficier de la participation de bénévoles à leurs activités. L’action bénévole n’est pas réglementée non plus dans les Ehpad, où la création d’une convention de partenariat ou d’une charte définit les modalités de l’intervention des bénévoles.
Au sein des établissements de santé, les associations organisent l’intervention des bénévoles. Les nombreux volontaires non soignants, s’ils ne sont pas inscrits dans des associations, sont donc en dehors du cadre légal. Ainsi, le rejet du bénévolat individuel semble aller à l’encontre de la situation actuelle dans les centres de santé et dans les Ehpad.
Afin de prendre en considération l’agilité souhaitée par les bénévoles individuels, sans pour autant empêcher dans sa totalité leur intervention dans les établissements de santé, notre amendement vise à rétablir l’article 4 bis, avec des ajouts inspirés de l’encadrement existant dans l’article L. 1110-11 du code de la santé publique.
Lors de l’examen du texte en commission, la suppression de cet article a été motivée par le besoin de formation des bénévoles. Nous pensons que les dispositions de notre amendement y répondent. Nous souhaitons que le bénévolat individuel puisse être réalisé dans les établissements de santé, en complémentarité avec les associations, et dans le respect des missions de chacun.
Ainsi, en ajoutant une obligation de formation par les associations et les établissements de santé eux-mêmes, en s’assurant de la non-interférence avec la pratique des soins médicaux ou paramédicaux et de l’encadrement par un référent, nous pensons que le bénévolat individuel pourra être un soutien important pour les associations et les établissements de santé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. J’entends bien les propos de notre collègue Théophile. Le bénévolat est un soutien important pour les associations et les établissements.
L’article 4 bis concernait seulement le bénévolat individuel, lequel cause nombre de problèmes, notamment en termes de responsabilité de l’établissement. C’est pourquoi nous l’avons supprimé au profit du bénévolat associatif, car nous souhaitions que le bénévole puisse être formé par les associations avant d’aller aider les patients et les médecins.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Le Gouvernement souhaite le rétablissement de cet article. (Marques d’ironie sur les travées du groupe Les Républicains.)
En effet, il est favorable au bénévolat à titre individuel, qui est une pratique courante des établissements de santé et qui a été particulièrement utile, je vous le rappelle, pendant la première vague de la covid ; depuis lors, cette pratique se poursuit.
Toutefois, dans la mesure où sa consécration dans la loi avait suscité des réactions vives de certains acteurs associatifs, nous avons prévu un encadrement de l’intervention des bénévoles dans les établissements de santé, ainsi qu’une formation.
La logique voulant que nous rétablissions cet article, j’émets un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Notre groupe soutient totalement la position adoptée par M. le rapporteur.
On le voit bien, le bénévolat individuel fait surgir un grand nombre de problèmes d’encadrement et de formation. Certes, Mme la ministre a énoncé un certain nombre d’exigences. Mais il ne s’agit plus de bénévolat ! C’est une ubérisation du bénévolat.
M. Claude Kern. Eh oui !
Mme Laurence Cohen. Ce mot vous déplaît peut-être, madame la ministre, mais nous considérons les choses ainsi, car les dispositions prévues ouvrent la porte à des évolutions importantes.
Nous rejoignons donc, sur cet amendement, l’avis de la commission, qui nous paraît particulièrement sage.
M. Alain Milon, rapporteur. Comme toujours ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. Je suis défavorable à la réintroduction de cet article.
J’ai été médecin coordonnatrice en Ehpad. Très franchement, les bénévoles isolés sont plus dangereux que ceux qui interviennent dans le cadre d’une association que l’on peut encadrer. (Applaudissements sur des travées des groupes UC et Les Républicains.) Il y a là un problème de responsabilité.
Nous avons un tissu associatif encadré et des associations qui possèdent une structure, avec un président et des normes. Pour ma part, j’en resterai à cette forme de bénévolat. (Mêmes mouvements.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.
M. Philippe Mouiller. Madame la ministre, à l’occasion de l’examen de cette proposition de loi, j’ai rencontré les associations de mon département.
Je puis vous l’assurer, elles considèrent cet article comme un mauvais signal. Il y a là un problème de reconnaissance. Elles considèrent en effet qu’elles sont mises de côté, alors qu’elles s’engagent depuis des années sur des problèmes de formation et d’accompagnement, en s’investissant et en y consacrant du temps.
Or, dans cet article, elles voient une perte de reconnaissance. Sur le terrain, je puis vous l’assurer, le signal envoyé est extrêmement mauvais.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Moi aussi, je suis allée sur le terrain ! Que croyez-vous ?
M. le président. En conséquence, l’article 4 bis demeure supprimé.
Article 4 ter
(Non modifié)
L’article L. 6146-2 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa, après la référence : « L. 6154-1, », sont insérés les mots : « et des médecins, sages-femmes et odontologistes exerçant à titre bénévole » ;
2° La seconde phrase du deuxième alinéa est ainsi rédigée : « Ces contrats, à l’exception de ceux conclus avec les médecins, sages-femmes et odontologistes exerçant à titre bénévole, sont approuvés par le directeur général de l’agence régionale de santé. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 87 est présenté par Mmes Le Houerou et Poumirol, M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Meunier et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 133 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 87.
Mme Annie Le Houerou. Par cet amendement, nous nous opposons à l’institutionnalisation du recours à l’intervention individuelle de praticiens bénévoles dans les établissements des santés.
Si nous saluons bien sûr l’élan solidaire fort qui a permis à des soignants de venir prêter main-forte dans les établissements de santé en cette période de crise, nous nous opposons à l’institutionnalisation d’un statut de « médecins, sages-femmes et odontologistes exerçant à titre bénévole ».
Pérenniser ce statut revient à considérer le bénévolat comme un supplétif aux carences en ressources humaines constatées depuis de longues années. Ce n’est pas autre chose que du salariat déguisé.
De plus, la proposition de loi ne prévoit pas les conditions de leur intégration au sein des équipes médicales et du projet médical d’établissement.
Elle ne précise pas non plus les conditions d’engagements ni les modalités d’encadrement de ces bénévoles. Le recours à ces derniers ne doit pas être une façon de pallier les insuffisances des moyens des établissements de santé.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 133.
Mme Laurence Cohen. Nous demandons également la suppression de l’article 4 ter, par cohérence, tout d’abord, avec le vote de notre commission, qui a supprimé l’article 4 bis.
M. Alain Milon, rapporteur. Non, ce n’est pas pareil !
Mme Laurence Cohen. Nous avions salué l’initiative de la commission, qui visait à permettre l’intervention des bénévoles dans les établissements de santé. Nous ne comprenons pas pourquoi le même raisonnement n’a pas été appliqué pour l’intervention de praticiens bénévoles.
À nos yeux, la logique devrait être la même. On le voit bien, il s’agit finalement de gérer la pénurie de personnel, toutes catégories confondues.
Quel est le sens profond d’une mesure permettant à des praticiens bénévoles d’intervenir dans des établissements où les effectifs sont insuffisants ? Depuis des années et des années, les soignants et le personnel administratif et technique alertent sur le besoin de recrutement pour faire tourner les services. Et on leur propose maintenant des personnels bénévoles ! N’est-on pas en train de se moquer d’eux ?
Pourquoi ce qui est dénoncé dans le rapport pour l’article 4 bis, à savoir la possibilité de dérives, ne le serait-il pas pour cet article ? Ces bénévoles ne pourraient-ils pallier la pénurie de médecins ?
Certes, en matière de limitation des dépenses publiques, l’argument est imparable ! Je le rappelle, les hôpitaux ont besoin de 100 000 emplois, les Ehpad, de 200 000 emplois, et le secteur de l’aide à domicile, de 100 000 emplois également. Ces emplois, destinés à un personnel formé, doivent être bien rémunérés, afin de relancer l’attractivité de ces secteurs. Nous sommes là loin du bénévolat.
Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de l’article 4 ter.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L’article 4 ter vise à permettre la sécurisation de l’intervention de praticiens bénévoles dans les établissements de santé, y compris pour des missions relevant du service public hospitalier, et non pas seulement dans le cadre des activités dévolues aux associations de bénévoles.
Une telle pratique, qui est marginale, nous le savons, ne constitue en rien une réponse adéquate ou même, comme vous le supposez, un simple palliatif au problème de la démographie médicale à l’hôpital.
Il serait d’ailleurs souhaitable que ces interventions soient ciblées sur des missions complémentaires et ne s’effectuent pas en lieu et place du travail habituel des praticiens. Sous cette réserve, je ne vois pas d’opposition à donner un cadre juridique à ces interventions.
La commission est donc défavorable à ces deux amendements identiques de suppression de l’article 4 ter.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 87 et 133.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 80, présenté par M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
…° Le même deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les contrats conclus avec les médecins, sages-femmes et odontologistes exerçant à titre bénévole ne se substituent pas aux postes de titulaires laissés vacants. »
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Comme vient de le dire ma collègue Annie Le Houerou, cet article soulève des questions importantes.
Certes, l’intervention de praticiens bénévoles pourrait se justifier pour des tâches très circonscrites. Toutefois tel n’est pas ce qui est prévu. Selon le rapport de la commission, ces praticiens bénévoles pourraient intervenir à l’hôpital, afin de « participer à l’exercice des missions générales de ces établissements et de celles attachées au service public hospitalier. » Il est tout de même difficile de faire plus large !
Un deuxième problème est lié aux raisons qui sous-tendent cette mesure. À cet égard, permettez-moi de citer les auteurs de l’amendement adopté à l’Assemblée nationale sur cet article : il s’agit de contribuer au « renforcement des ressources médicales des établissements publics de santé dans l’intérêt du service public hospitalier et dans le contexte actuel de la démographie médicale ».
Non, cette mesure ne rend pas service à l’hôpital public !
Mme Laurence Cohen. C’est clair !
M. Bernard Jomier. Nous avions longuement discuté, à l’occasion de l’examen du projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé de 2019, des mesures à même de lutter contre, d’une part, la désertification médicale, et, d’autre part, la désertion de l’hôpital public.
Nous venons de nouveau d’évoquer, au travers de l’article 3, les facteurs expliquant les difficultés de recrutement. Or les députés nous disent que, puisqu’il est difficile de recruter à l’hôpital, il suffit de laisser faire le travail par des bénévoles.
Non, ces questions ne sont pas simples ; elles méritent des réponses qui ne soient pas simplistes. Celles qui nous sont apportées ne résoudront rien. En outre, elles sont incompréhensibles pour les personnels hospitaliers, voire indécentes à leur égard.
C’est pourquoi, à défaut d’une suppression de cet article, cet amendement vise à instaurer un garde-fou basique, pourtant essentiel : il s’agit d’empêcher que les contrats conclus avec les praticiens exerçant à titre bénévole ne se substituent aux postes d’agents titulaires laissés vacants.
Notre position est claire : le bénévolat ne peut et ne doit se substituer au recrutement de personnels de santé.
Par conséquent, je ne doute pas que le Gouvernement sera favorable à cet amendement, dans la mesure où il n’est pas dans son intention, nous dit-il, de substituer des bénévoles à des professionnels de santé des hôpitaux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Il convient de distinguer deux types de situations : celle des bénévoles non professionnels qui viennent au côté des soignants assurer des missions de soutien et d’animation et celle des professionnels de santé qui viennent assurer des missions de soins en complémentarité des équipes en place.
Dans les deux cas, ces interventions sont encadrées par des conventions avec l’établissement concerné. Contrairement à ce que vous affirmez, il s’agit non pas de pallier une pénurie de moyens, mais de répondre à une volonté d’engagement citoyen, qui honore ces bénévoles individuels.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Si je vous ai bien entendue, madame la ministre, la volonté du Gouvernement n’est pas de substituer des bénévoles à des professionnels.
Dans ce cas, vous devriez approuver l’amendement de repli déposé par nos collègues, qui vise simplement à préciser les missions de chacun. Or il est tout à fait positif pour la loi de préciser les choses, comme vous venez vous-même de le dire en expliquant votre point de vue.
M. le président. Je mets aux voix l’article 4 ter, modifié.
(L’article 4 ter est adopté.)
Article additionnel après l’article 4 ter
M. le président. L’amendement n° 58 rectifié, présenté par MM. Vanlerenberghe, Moga et Canevet, Mmes Vermeillet, Doineau et Dindar, MM. J.M. Arnaud et P. Martin, Mme Saint-Pé, M. Cigolotti, Mme Billon et MM. Lafon, Henno et Capo-Canellas, est ainsi libellé :
Après l’article 4 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 6152-5-1 du code de la santé publique s’applique à compter du lendemain de la publication du décret en Conseil d’État mentionné au dernier alinéa du même article L. 6152-5-1 et au plus tard le 1er juillet 2021.
La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. Cet amendement vise à assurer l’entrée en vigueur des dispositions légales relatives à la clause de non-concurrence des praticiens hospitaliers, définies à l’article L. 6152-5-1 du code de la santé publique et adoptées dans le cadre de la loi du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé.
En effet, l’application de cette loi devient urgente pour éviter le départ massif de professionnels des hôpitaux publics, en particulier pour les établissements situés dans ou à proximité immédiate d’une zone de revitalisation rurale, une ZRR, comme le centre hospitalier Émile-Roux du Puy-en-Velay.
Les forts avantages fiscaux de la ZRR créent alors une réelle distorsion de concurrence, au détriment des établissements publics de santé, dont les praticiens sont parfois activement démarchés par des cabinets de conseil.
Cet amendement tend à accorder un ultime délai au Gouvernement pour prendre enfin les mesures d’application de ces dispositions, pendant le premier semestre de 2021.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Je suis sensible à l’appel porté par les auteurs de cet amendement. En effet, il est particulièrement regrettable, madame la ministre, que ne parviennent pas à se coordonner des initiatives nationales ou régionales, que nous soutenons pleinement, visant à renforcer l’attractivité des hôpitaux publics.
Ces initiatives locales, en favorisant les conditions fiscales d’installation des praticiens libéraux, créent une distorsion de concurrence à leur égard. Je ne doute pas que le Gouvernement ne soit en train de plancher sur cette question.
C’est la raison pour laquelle la commission sollicite formellement l’avis du Gouvernement sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. L’ordonnance qui habilite le Gouvernement à légiférer pour réviser le statut de praticien hospitalier s’achèvera à la fin du mois de mars 2021, et l’ensemble des mesures a vocation à paraître à l’été 2021
Pour cette raison, même si nous partageons la nécessité d’avancer en la matière, je suis défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est donc l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Favorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 4 ter.
Article 4 quater
(Supprimé)
Article additionnel après l’article 4 quater
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 6 rectifié ter, présenté par M. Bonne, Mme Doineau, MM. Bascher, Bazin et Bouloux, Mme Briquet, MM. Brisson, Burgoa, Chaize et Charon, Mme Chauvin, M. Cuypers, Mmes L. Darcos, Deromedi et Di Folco, M. E. Blanc, Mmes Estrosi Sassone, F. Gerbaud, Gruny, Guidez et Garriaud-Maylam, MM. Henno, Husson et Laménie, Mmes Lassarade et Micouleau, MM. Moga et Mouiller, Mme Muller-Bronn, MM. Paccaud, Rapin, Savary, Segouin, Vanlerenberghe et Gremillet et Mme Schalck, est ainsi libellé :
Après l’article 4 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le troisième alinéa de l’article L. 6161-9 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation aux dispositions du 4° du I de l’article L. 6112-2, les professionnels médicaux libéraux ayant conclu un contrat avec les établissements mentionnés au 3° de l’article L. 6112-3 qui, à la date de promulgation de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, pratiquent des honoraires ne correspondant pas aux tarifs prévus au 1° du I de l’article L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale, sont autorisés à facturer des dépassements de ces tarifs. Ces professionnels médicaux libéraux fixent et modulent le montant de leurs honoraires à des niveaux permettant l’accès aux soins des assurés sociaux et de leurs ayants droit. »
II. – Le II de l’article 57 de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé est abrogé.
La parole est à M. Laurent Burgoa.
M. Laurent Burgoa. Cette proposition de notre collègue Bernard Bonne part du constat d’une inégalité de traitement figurant dans la loi entre l’activité libérale exercée par un praticien hospitalier d’un établissement public de santé et l’activité libérale exercée par un praticien salarié d’un établissement de santé privé d’intérêt collectif, un Espic.
L’exercice de l’activité libérale est plus aisé pour le praticien lorsque celui-ci exerce en hôpital public.
Cet amendement vise à corriger cet écueil, en recentrant l’activité hospitalière de ces praticiens sur le strict service public hospitalier et en permettant aux praticiens salariés d’un Espic de pratiquer des dépassements d’honoraires, dans la limite des dispositifs de maîtrise prévus par la convention médicale.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 46 est présenté par M. Iacovelli.
L’amendement n° 185 rectifié ter est présenté par Mme Guillotin, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme N. Delattre et MM. Fialaire, Gold, Guérini, Requier et Roux.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 4 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa du I de l’article L. 6112-2, les mots : « exercent en leur sein » sont remplacés par les mots : « y exercent dans le cadre de ce service » ;
2° Au sixième alinéa de l’article L. 6112-3, après le mot : « activité » sont insérés les mots : « de service public » ;
3° Après la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 6161-9, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Sans préjudice du 4° du I de l’article L. 6112-2, ces professionnels libéraux peuvent facturer directement à leurs patients un complément d’honoraires, calculé sur la base des dispositifs conventionnels de maîtrise des dépassements d’honoraires prévus au 6° de l’article L. 162-5 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour présenter l’amendement n° 46.
M. Xavier Iacovelli. À la différence des praticiens du secteur public hospitalier, les praticiens des Espic ne peuvent avoir d’activité libérale.
Il existe donc une inégalité de traitement dans la loi entre l’activité libérale exercée par un praticien hospitalier d’un établissement public de santé et l’activité libérale exercée par un praticien dans un établissement de santé privé d’intérêt collectif.
Je vous le rappelle, les Espic jouent un rôle essentiel au côté des hôpitaux publics et des cliniques privées.
Le présent amendement vise donc à faire évoluer cette situation paradoxale, pour permettre aux praticiens des Espic d’exercer une activité libérale avec dépassement d’honoraires, en marge de leurs activités de service public hospitalier, dans le cadre de leur exercice en Espic, avec, pour contrepartie, un reste à charge financier nul pour les patients.
Une égalité de traitement doit être rétablie. Je le rappelle, les Espic représentent 8 % de l’offre de soins et sont le plus souvent créés par des fondations reconnues d’utilité publique. Ils sont souvent à la pointe de la technologie et de l’innovation.
C’est notamment le cas dans mon département, à l’hôpital Foch de Suresnes, où, pour la première fois en France, vendredi dernier, une petite fille est née grâce à une greffe d’utérus.
Je pense aussi à la première greffe française de poumon sur un malade covidé. Il s’agit donc d’immenses avancées médicales et de grands espoirs pour tous les patients concernés, que je salue ici.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 185 rectifié ter.
Mme Véronique Guillotin. Je suis complètement d’accord avec les arguments présentés par mon collègue Xavier Iacovelli.
Je tiens beaucoup à cet amendement, et ce pour deux raisons.
Tout d’abord, il tend à renforcer l’attractivité des métiers, en permettant aux médecins qui travaillent en Espic ou en établissement public d’accéder à une égalité de traitement absolument nécessaire.
Ensuite, les Espic, qui sont parfois seuls sur certains territoires, rendent un service de santé publique. Il n’existe donc aucune raison de les traiter de manière différente. Aujourd’hui la demande de ces professionnels de santé est pressante.
Pour toutes ces raisons, je vous demande, mes chers collègues, d’adopter ces amendements identiques, qui redonneront une égalité de traitement à tous les médecins, que ceux-ci travaillent dans le public ou dans les établissements à but non lucratif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Nous sommes devant une situation un peu complexe, que je vais essayer de vous expliquer.
Tout d’abord, les amendements de Mme Guillotin, de M. Bonne et de M. Iacovelli, examinés la semaine dernière par la commission, ne convenaient pas à celle-ci. J’avais donc demandé à leurs auteurs de les réécrire, ce qu’ils ont fait, avant d’obtenir hier matin un avis favorable de la commission.
Entre-temps, des travaux se sont mis en place entre la commission et le Gouvernement, qui a demandé aux auteurs de ces trois amendements de compléter leurs textes. M. Bonne a accepté de le faire, tandis que Mme Guillotin et M. Iacovelli ont refusé, maintenant leur amendement inchangé.
En conséquence, bien que la commission ait émis un avis favorable sur ces trois amendements, je me contenterai, à titre personnel, d’être favorable au seul amendement de M. Bonne, qui a été complété, en accord avec le Gouvernement et moi-même.
Je demande donc à Mme Guillotin et à M. Iacovelli de bien vouloir retirer leur amendement. À défaut, je serais contraint, à titre personnel, d’émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Iacovelli, l’amendement n° 46 est-il maintenu ?
M. Xavier Iacovelli. Je ne retirerai pas cet amendement, monsieur le président.
Je regrette de ne pas avoir reçu un peu plus d’explications justifiant le rejet de notre amendement. Je note que la commission a tout de même émis un avis favorable sur cet amendement et que M. le rapporteur émet, à titre personnel, un avis défavorable.
Je regrette également l’avis défavorable de Mme la ministre. En effet, l’amendement modifié de M. Bonne ne concerne qu’une partie de ces personnels soignants, à savoir ceux qui ont été embauchés avant 2019. Ces dispositions concernent donc le passé, à titre rétroactif, et non pas l’avenir, ce qui me pose un problème.
En outre, 10 % des électeurs, ce n’est pas suffisant ! Pour notre part, nous pensons à l’avenir, et non pas au passé.
Mme Véronique Guillotin. Absolument !
M. le président. Madame Guillotin, l’amendement n° 185 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Véronique Guillotin. Je ne retirerai pas non plus mon amendement, l’amendement modifié de M. Bonne ne visant pas la totalité des praticiens qui exercent en Espic.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 4 quater, et les amendements identiques nos 46 et 185 rectifié ter n’ont plus d’objet.
Chapitre IV
Simplification de la gouvernance dans les établissements publics de santé
Article 5
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° (nouveau) Au 4° du II de l’article L. 6132-2, les mots : « , le cas échéant, » sont supprimés ;
2° (nouveau) L’article L. 6146-1 est ainsi modifié :
a) Le huitième alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Ce contrat prévoit les modalités d’une délégation de signature accordée au chef de pôle pour la gestion des ressources humaines du pôle ainsi que l’engagement de dépenses de fonctionnement et d’investissement, dans des limites fixées par arrêté ministériel. Les termes de ce contrat sont discutés en étroite collaboration avec le cadre supérieur de santé. » ;
b) Le début de la deuxième phrase du onzième alinéa est ainsi rédigé : « Sans préjudice du premier alinéa de l’article L. 6146-1-1, il organise… (le reste sans changement). » ;
c) Le douzième alinéa est ainsi rédigé :
« Sans préjudice du septième alinéa de l’article L. 6146-1-1, le chef de pôle, en étroite collaboration avec le cadre supérieur de santé, favorise la concertation interne entre les services, départements, unités et structures qui composent le pôle. » ;
3° Après le même article L. 6146-1, il est inséré un article L. 6146-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 6146-1-1. – Les services mentionnés à l’article L. 6146-1 constituent l’échelon de référence en matière d’organisation, de pertinence, de qualité et de sécurité des soins, d’encadrement de proximité des équipes médicales et paramédicales, d’encadrement des internes et des étudiants en santé ainsi qu’en matière de qualité de vie au travail.
« Ils sont dirigés par un chef de service, responsable de structure interne, en étroite collaboration avec le cadre de santé.
« Dans les centres hospitaliers et les centres hospitaliers universitaires, les chefs de service sont nommés par décision conjointe du directeur d’établissement et du président de la commission médicale d’établissement et après avis du chef de pôle. En cas de désaccord, la décision revient au directeur d’établissement.
« Lorsque le chef de service est un praticien des armées, la décision de nomination est prise conjointement par le directeur de l’établissement et le ministre de la défense.
« La durée du mandat des chefs de service est fixée par décret. Leur mandat peut être renouvelé dans les mêmes conditions.
« Le chef de service et le cadre de santé sont associés au projet d’établissement, au projet de gouvernance et de management participatif, aux projets d’évolution de l’organisation interne de l’établissement et au projet médical partagé mentionné au 1° du II de l’article L. 6132-2. Dans le cadre de l’article L. 6146-1, le chef de service est notamment associé par le chef de pôle à la mise en œuvre de la politique de l’établissement afin d’atteindre les objectifs fixés au pôle. Le chef de pôle peut déléguer sa signature au chef de service pour la mise en œuvre du contrat de pôle mentionné au même article L. 6146-1.
« Le chef de service organise la concertation interne et favorise le dialogue avec l’encadrement et les personnels médicaux et paramédicaux du service.
« Les modalités d’application du présent article sont définies par décret. » ;
4° (nouveau) La dernière phrase du troisième alinéa de l’article L. 6146-6 est complétée par les mots : « , après avis du cadre de santé ».
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, sur l’article.
Mme Michelle Meunier. Nous ouvrons le chapitre consacré à la gouvernance des établissements publics de santé, dans cette proposition de loi qui se veut être la traduction sur le plan de l’organisation des soins des conclusions du Ségur de la santé.
Dans l’esprit des soignants comme dans celui de bon nombre de nos concitoyens, attachés au bon fonctionnement du système de santé, le Ségur s’est soldé par une revalorisation.
Pourtant, chez nombre d’agents du secteur social et médico-social, le sentiment d’être des oubliés du Ségur perdure. Ce ne sont pas seulement des oubliés, ce sont aussi des déçus. Ils sont déçus par une disparité de traitement qui ne connaît pas de justification et entraîne une profonde désorganisation du médico-social.
Sur le terrain, les conséquences sont désastreuses et source d’incompréhension pour ces soignants non médicaux, qui portent aussi blouse blanche et qui interviennent non pas en établissement hospitalier, mais dans des centres de soins, des foyers d’accueil médicalisés, des maisons d’accueil spécialisées ou encore dans des services de soins infirmiers à domicile.
Selon qu’elles exercent – en effet, ce sont principalement des femmes – leur métier dans ces structures plutôt qu’à l’hôpital, elles ne bénéficient pas de la revalorisation salariale. C’est le cas notamment de l’établissement de Saint-Brévin-les-Pins, dans mon département de la Loire-Atlantique, dont les agents brûleront symboliquement leur diplôme demain devant la sous-préfecture de Saint-Nazaire. Le geste est fort.
Pour toutes celles et tous ceux qui agissent au quotidien pour un accès aux soins de qualité auprès des personnes âgées et/ou en situation de handicap, on enfonce un peu plus le clou de la dévalorisation de leur métier, dont la pénibilité est avérée.
Pour les associations qui les emploient, parfois déjà fragilisées par les surcoûts de la crise, il y aura, à plus ou moins long terme, des répercussions sur le recrutement, mais aussi sur la fidélisation des professionnels, pour ces acteurs socioéconomiques qui luttent contre l’isolement, contribuent à la prévention de la perte d’autonomie et garantissent l’accès aux soins.
Ces femmes et de ces hommes étaient des oubliés. Ce texte a fait d’eux des déçus. Je voulais ici m’associer à leur déception et à leur colère. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. L’amendement n° 124, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Après l’article L. 6146-1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 6146-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 6146-1-1. – Les services mentionnés à l’article L. 6146-1 constituent l’échelon de référence en matière d’organisation, de pertinence, de qualité et de sécurité des soins, d’encadrement de proximité des équipes médicales et paramédicales, d’encadrement des internes et des étudiants en santé ainsi qu’en matière de qualité de vie au travail.
« Ils sont dirigés par un chef de service, responsable de structure interne, en étroite collaboration avec le cadre de santé.
« Dans les centres hospitaliers et les centres hospitaliers universitaires, les chefs de service sont nommés par décision conjointe du directeur d’établissement et du président de la commission médicale d’établissement après avis du chef de pôle et concertation des personnels affectés dans le service selon des modalités fixées par le règlement intérieur de l’établissement.
« Lorsque le chef de service est un praticien des armées, la décision de nomination est prise conjointement par le directeur et le ministre de la défense.
« La durée du mandat des chefs de service est fixée par décret. Leur mandat peut être renouvelé dans les mêmes conditions.
« Le chef de service et le cadre de santé sont associés au projet d’établissement, au projet de gouvernance et de management participatif et aux projets d’évolution de l’organisation interne de l’établissement. Dans le cadre de l’article L. 6146-1, le chef de service est notamment associé par le chef de pôle à la mise en œuvre de la politique de l’établissement afin d’atteindre les objectifs fixés au pôle. Le chef de pôle peut déléguer sa signature au chef de service pour la mise en œuvre du contrat de pôle prévu au même article L. 6146-1.
« Le chef de service participe à la concertation interne prévue audit article L. 6146-1 et favorise le dialogue avec l’encadrement et les personnels médicaux et paramédicaux du service.
« Les modalités d’application du présent article sont définies par décret. »
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Le Gouvernement souhaite rétablir l’article 5 dans la version adoptée par l’Assemblée nationale.
En effet, cette rédaction tend à réhabiliter le service dans l’organisation hospitalière, à le revitaliser et à restaurer la fonction de chef de service, conformément à la mesure 18 du Ségur de la santé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Le Gouvernement inaugure par cet amendement une série de propositions relatives à la gouvernance hospitalière, qui visent tout simplement à ne pas tenir compte des travaux de notre commission.
Les amendements de rétablissement, s’ils relèvent d’une position parfaitement acceptable en soi, peuvent révéler la précipitation, voire la paresse, de leurs auteurs, lorsque l’argumentaire n’a manifestement pas tenu compte des ajouts opérés par la commission.
En l’occurrence, les modifications apportées à l’article 5 avaient justement pour objet de renforcer le rôle du chef de service, en précisant son positionnement par rapport au chef de pôle, ce que la rédaction initiale négligeait de faire.
Par ailleurs, elles matérialisent une recommandation forte du rapport Claris, en approfondissant la délégation de tâches vers les chefs de pôle, qui disposeront ainsi d’une enveloppe leur permettant d’engager des décisions financières dans un montant fixé par arrêté.
La commission est donc défavorable à cet amendement du Gouvernement.
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 154, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 3 à 7
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
2° Les articles L. 6146-1, L. 6146-2 et L. 6146-7 sont abrogés ;
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Dès 2014, le bilan et l’évaluation du fonctionnement des pôles dans les établissements de santé pointaient pour les personnels, y compris médicaux, l’insuffisance d’informations sur les orientations stratégiques de l’hôpital, sur l’actualité de ces projets ou encore sur les éléments d’actualité du pôle.
Ce rapport mettait de plus en avant les difficultés pour les instances représentatives du personnel, qui n’étaient que peu informées du dialogue existant au sein des pôles, notamment en ce qui concerne les actions directement menées par le chef de ce pôle.
Les rencontres et les échanges avec les personnels hospitaliers ont confirmé l’ensemble de ces critiques et de ces dysfonctionnements des pôles médicaux. Le rapport et les recommandations de Mme Nicole Notat, à l’issue du Ségur de la santé, soulignaient également que la structuration des hôpitaux en pôles s’est souvent faite par raison, voire par contrainte.
La multiplication des strates d’organisation a entraîné une déconnexion des prises de décisions avec le terrain.
Par conséquent, nous proposons de tirer l’ensemble des conclusions qui s’imposent et de supprimer les pôles d’activité, afin de renforcer par ailleurs la commission médicale d’établissement, seule instance élue et démocratique de l’hôpital.
M. le président. L’amendement n° 170, présenté par M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 3 à 7
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
2° L’article L. 6146-1 est abrogé ;
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Au terme d’un sondage organisé par la mission du professeur Claris, il apparaît que 65 % des personnels hospitaliers estiment que les services n’ont pas trouvé de voix d’expression au sein des pôles.
Aussi, comme j’ai pu le dire au début de la séance, au cours de la discussion générale, l’intention des auteurs de l’article 5 est louable, puisque ce dernier réaffirme le rôle des services et du chef de service, suivant ainsi une recommandation du rapport Claris.
Le service de soins doit être le niveau de référence pour les équipes soignantes comme pour les patients au sein de la gouvernance de l’établissement.
Cependant, des voix s’élèvent parmi les personnels hospitaliers pour que cette réforme ne s’arrête pas au milieu du gué. Leurs craintes sont légitimes, car revaloriser, sur le papier, du rôle des services, sans modifier le rôle et le champ d’intervention des pôles d’activité, risquerait d’entraîner une forte désillusion.
La consécration du pôle d’activité comme maillon matriciel de l’hôpital public, engagée au début des années 2000 et achevée en 2007, a découlé de l’exigence de l’époque de retenir un échelon intermédiaire entre le service et la direction, afin de permettre une certaine déconcentration de la gestion, tout en garantissant la liberté d’organisation de l’hôpital.
On en connaît bien les écueils : verticalité de la prise de décision, approche trop managériale et gestionnaire, loin du vécu des personnels soignants, qui peinent à faire entendre leur voix.
Toutefois, le rapport Claris est clair à ce sujet : la solution réside justement dans le travail sur la maille décisionnelle, évacuant tout débat quant à la maille organisationnelle. Le rapport de la commission précise d’ailleurs que, « de l’avis général des directions d’établissement, la pertinence du pôle d’activité comme maille organisationnelle n’a jamais été discutée […]. » De la part des directions d’établissement, ce n’est pas extrêmement surprenant…
Cependant, il nous semble regrettable de mener ce débat aussi rapidement. Si la solution n’est sans doute pas de procéder à la suppression des pôles – vous l’aurez compris, mes chers collègues, je présente un amendement d’appel –, il nous semble nécessaire d’avoir un véritable débat quant à cette maille organisationnelle.
Les personnels hospitaliers ont ressenti pendant la crise de la covid que la verticalité qu’il connaissait pouvait s’estomper au profit d’un travail collectif et d’un dialogue plus horizontal. Avoir ce débat, c’est aussi les entendre.
M. le président. L’amendement n° 175 rectifié, présenté par Mme Guillotin, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Fialaire, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Après le huitième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le chef de service peut être assisté par un chef de service adjoint. Le chef de service adjoint est nommé par décision conjointe du directeur d’établissement et du président de la commission médicale d’établissement sur proposition du chef de service. La durée de son mandat prend fin avec celui du chef de service. » ;
La parole est à Mme Véronique Guillotin.
Mme Véronique Guillotin. Cet amendement tend à concrétiser l’une des recommandations de la mission Claris pour renforcer la gouvernance des structures médicales, notamment de soins, en permettant, dans le but d’assurer la permanence de la gouvernance du service, la désignation d’un chef de service adjoint, sur proposition du chef de service, compte tenu des nombreuses tâches auxquelles ce dernier doit faire face.
La désignation d’un adjoint permet à la fois d’assurer la continuité du service et la présence régulière de la chefferie médicale au sein de ce service.
Cette présentation vaut également défense de l’amendement n° 176 rectifié, que nous allons aborder dans quelques instants et qui vise, selon une logique identique, les chefs de pôle.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 115 rectifié est présenté par MM. Kern et Mizzon, Mme Billon et MM. Canevet, P. Martin, Le Nay et Longeot.
L’amendement n° 176 rectifié est présenté par Mme Guillotin, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Fialaire, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 5
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Après le onzième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le chef de pôle peut être assisté par un chef de pôle adjoint. Le chef de pôle adjoint est nommé par décision conjointe du directeur d’établissement et du président de la commission médicale d’établissement sur proposition du chef de pôle. La durée de son mandat prend fin avec celui du chef de pôle. » ;
La parole est à M. Claude Kern, pour présenter l’amendement n° 115 rectifié.
M. Claude Kern. Monsieur le président, je dois dire que je ne comprends pas bien l’ordre du dérouleur, puisque cet amendement n° 115 rectifié, faisant miroir à l’amendement n° 114 rectifié qui suit, aurait dû être présenté après ce dernier, d’autant que son objet est prochain de celui de l’amendement n° 175 rectifié, que vient de présenter, excellemment, Mme Guillotin.
Toujours est-il que je considère qu’il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Monsieur Kern, votre amendement n° 114 rectifié tend à insérer deux alinéas après l’alinéa 15, alors que l’amendement de Mme Guillotin tend à insérer ces deux alinéas après l’alinéa 5. Voilà pourquoi nous examinons dans cet ordre les amendements.
M. Claude Kern. Au temps pour moi !
M. le président. L’amendement n° 176 rectifié est déjà défendu.
L’amendement n° 114 rectifié, présenté par MM. Kern et Mizzon, Mme Billon et MM. Canevet, P. Martin, Le Nay et Longeot, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 15
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« Le chef de service peut être assisté par un chef de service adjoint.
« Le chef de service adjoint est nommé par décision conjointe du directeur d’établissement et du président de la commission médicale d’établissement sur proposition du chef de service. La durée de son mandat prend fin avec celui du chef de service.
La parole est à M. Claude Kern.
M. Claude Kern. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Les amendements identiques nos 154 et 170 ne peuvent être, comme l’a dit Bernard Jomier, que des amendements d’appel. Leur adoption aurait de telles conséquences que la commission sollicite leur retrait, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
Si nous nous accordons pour rendre au service toute la place qui doit être la sienne du point de vue du fonctionnement médical de l’établissement – le nouvel article 5 de la proposition de loi y contribue fortement –, nous ne sommes pas défavorables au pôle d’activité comme échelon organisationnel.
Je rappelle d’ailleurs aux auteurs de ces amendements, Mme Cohen et M. Jomier, que le rapport commandé par Marisol Touraine en 2013 aux conférences nationales des CME, les commissions médicales d’établissement, avait unanimement reconnu l’utilité des pôles à cet égard. Le rapport Claris a depuis lors confirmé ce constat.
La commission demande également le retrait de l’amendement n° 175 rectifié de Mme Guillotin ; à défaut, l’avis serait défavorable. En effet, cette disposition ne me semble pas particulièrement opportune, en ce qu’elle alourdirait les structures de direction du service et exposerait potentiellement ce dernier à un conflit de hiérarchie entre chef de service et chef de service adjoint.
Les délégations n’ont pas besoin d’être inscrites dans la loi et doivent, pour être efficaces, conserver une certaine souplesse.
L’intention des auteurs des amendements identiques nos 115 rectifié et 176 rectifié est compréhensible, mais le message ainsi adressé est contraire à celui que nous entendons envoyer au travers de l’article 5.
Alors que nous tentons de revaloriser le chef de service, doubler sa hiérarchie fonctionnelle par la création, dans la loi, d’un poste d’adjoint au chef de pôle, qui, par ailleurs, peut parfaitement exister dans les faits sans que le droit ait besoin de le prévoir, pourrait être vécu comme un renforcement de sa tutelle.
La commission demande donc le retrait de ces deux amendements, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
Enfin, nous émettons également un avis défavorable sur l’amendement n° 114 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. L’article 8 de la proposition de loi offrira aux acteurs de terrain toute liberté d’organisation. Les pôles et les services sont complémentaires et, comme le disait M. le rapporteur, on trouve déjà, dans certains établissements, quand c’est nécessaire, un chef de service adjoint. Il n’est donc pas utile d’inscrire ces fonctions dans la loi.
Par conséquent, l’avis du Gouvernement sur ces six amendements est identique à celui de la commission : j’en demande le retrait, faute de quoi j’émettrais un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Par cet amendement n° 154, nous voulons montrer que nous sommes à l’écoute des personnels hospitaliers que nous avons auditionnés, lesquels nous ont tous dit que l’organisation par pôle était facteur d’une bureaucratie excessive et allait à l’encontre de ce que le Gouvernement entend défendre, à savoir la réhabilitation des chefs de service.
C’est pourquoi nous avons proposé la suppression de ces pôles d’activité désincarnés, de manière précisément à renforcer le rôle des chefs de service.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Notre amendement n° 170 était un amendement d’appel ; par conséquent, nous le retirerons.
Je voudrais néanmoins appeler l’attention de Mme la ministre sur le caractère imprécis du texte. Pour prendre ce seul exemple, l’article 5 dispose que le service est « l’échelon de référence en matière […] de qualité et de sécurité des soins », cependant que la responsabilité de la politique de qualité et de sécurité des soins incombe à la commission médicale d’établissement. Or, en fonction des filières de soins, il n’est pas évident que le service doive être l’échelon de référence ; le pôle peut l’être également. Mais l’article 5 tranche la question.
Dans le même temps, comme vous l’avez rappelé, madame la ministre, l’article 8 offre aux acteurs de terrain toute liberté d’organisation. C’est d’accord, mais pour quel résultat ?
Nous souscrivons à la demande des acteurs du monde hospitalier, demande reprise dans plusieurs rapports, de revaloriser le rôle du service dans le système hospitalier en lui confiant plus de responsabilités.
Toutefois, cela ne signifie aucunement qu’il faille rester dans le flou. Ce n’est pas par hasard que j’ai pris l’exemple de la politique de qualité et de sécurité des soins d’un établissement. Celle-ci doit-elle reposer sur le principe de libre organisation prévu à l’article 8, ou, au contraire, répondre aux exigences posées à l’article 5 ? Le flou n’est pas possible.
Je retire donc l’amendement n° 170, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 170 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 154.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 115 rectifié et 176 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de quatorze amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 191, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Remplacer cet alinéa par treize alinéas ainsi rédigés :
« Dans les centres hospitaliers et universitaires, les chefs de service sont élus au scrutin secret au suffrage direct par les membres de la commission médicale d’établissement et du directeur de composante ou d’unité de formation et de recherche médicale, pharmaceutique et odontologique.
« Le renouvellement des mandats intervient tous les quatre ans.
« Les chefs de service siègent valablement jusqu’à la désignation de leurs successeurs.
« En cas de vacance d’un siège, un nouveau membre est désigné pour la durée du mandat restant à courir selon des modalités fixées par décret, sauf si la vacance intervient moins de six mois avant le terme du mandat.
« Les chefs de service forment un binôme titulaire et remplaçant composé d’une femme et d’un homme.
« Le scrutin est majoritaire uninominal à deux tours.
« Ainsi, nul n’est élu au premier tour s’il n’a réuni cumulativement :
« 1° La majorité absolue des suffrages exprimés ;
« 2° Un nombre de suffrages égal au quart des électeurs inscrits.
« Au second tour, la majorité relative suffit et le candidat élu sera celui ayant obtenu le plus grand nombre de suffrages. En cas d’égalité de suffrages, le plus âgé remporte les élections.
« Dans ce cadre, les seuls candidats ayant obtenu au premier tour un nombre de voix supérieur à 10 % des électeurs inscrits peuvent se présenter à ce second tour.
« De nombreux cas d’inéligibilité et d’incompatibilité sont prévus afin d’écarter du scrutin les candidats se trouvant dans une situation de conflits d’intérêts au sens de l’article 25 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.
« Nul ne peut être élu à plus d’un centre hospitalier et universitaire.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Madame la ministre, vous proposez de renforcer le pouvoir des chefs de service à l’hôpital pour établir les professionnels de santé au sein de la gouvernance des établissements. C’est une mesure tout à fait positive, mais qui nous sommes largement insuffisante si elle ne s’accompagne pas d’un renforcement de la démocratie sanitaire.
Nous proposons donc d’accorder aux chefs de service une légitimité démocratique qu’ils n’ont pas aujourd’hui. Pour ce faire, nous proposons de substituer à leur nomination leur élection par les membres de la commission médicale d’établissement.
Aux termes du présent texte, les chefs de service sont nommés par le directeur de l’établissement hospitalier, le président de la commission médicale d’établissement et le directeur de composante ou d’unité de formation et de recherche médicale, pharmaceutique et odontologique.
Pour nous, cette nomination s’apparente davantage à une cooptation, ce que nous n’approuvons pas.
Par notre amendement, nous souhaitons donc éviter l’entre soi des professionnels de santé et renforcer les pouvoirs de la commission médicale d’établissement, instance représentative de la communauté médicale, pharmaceutique et odontologique.
De plus, nous proposons que, dans les centres hospitaliers universitaires, les chefs de service soient élus pour quatre ans, avec un binôme titulaire-remplaçant composé à parité d’une femme et d’un homme.
Enfin, nous entendons encadrer ce scrutin en proposant que nul ne puisse être élu à plus d’un centre hospitalier et universitaire et en visant les cas d’inéligibilité et d’incompatibilité, afin d’écarter toute situation de conflits d’intérêts.
Comme vous avez dû le percevoir, mes chers collègues, l’objet de notre amendement est donc de renforcer la démocratie sanitaire, qui est indispensable, selon nous, pour rétablir une forme de confiance dans notre système de santé et renforcer l’attractivité de l’hôpital.
M. le président. L’amendement n° 155 rectifié ter, présenté par M. Longeot, Mme Jacquemet, M. Kern, Mmes Doineau et Billon, MM. Duffourg, Chauvet et Cigolotti, Mme Vérien, MM. S. Demilly, Le Nay, Levi, P. Martin et Louault, Mme Dindar, M. Canevet, Mme de La Provôté et M. Delahaye, est ainsi libellé :
Alinéa 11
1° Première phrase
Supprimer les mots :
et les centres hospitaliers universitaires
2° Après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Dans les centres hospitaliers et universitaires, les chefs de service sont nommés par décision conjointe du directeur d’établissement, du président de la commission médicale d’établissement et du directeur de composante ou d’unité de formation et de recherche médicale, pharmaceutique et odontologique, et après avis du chef de pôle.
La parole est à M. Jean-François Longeot.
M. Jean-François Longeot. L’article 5 est particulièrement important : il rétablit le service comme structure interne des pôles d’activité des centres hospitaliers et universitaires, ainsi que l’appellation « chef de service ».
En revanche, il est réducteur en ce qu’il exclut le directeur de l’UFR de santé concernée lorsqu’il s’agit de nommer lesdits chefs de service en médecine, en odontologie et en pharmacie dans les centres hospitaliers et universitaires.
Par le présent amendement, nous proposons d’insérer un nouvel alinéa disposant que, dans les centres hospitaliers et universitaires, les chefs de service sont nommés par décision conjointe du directeur d’établissement, du président de la commission médicale d’établissement et du directeur de composante ou d’unité de formation et de recherche médicale, pharmaceutique et odontologique.
En effet, je suis intimement convaincu que les interactions entre les centres hospitaliers et universitaires doivent être renforcées.
M. le président. Les quatre amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 22 rectifié bis est présenté par Mmes N. Delattre et Pantel, MM. Requier, Roux, Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme M. Carrère et MM. Artano, Bilhac et Louault.
L’amendement n° 64 rectifié est présenté par M. Piednoir, Mme L. Darcos, MM. Pellevat, Bascher, Regnard, Brisson, Perrin, Rietmann, Somon et Paccaud, Mme F. Gerbaud, M. Longuet, Mme Deromedi, MM. D. Laurent, Burgoa, Savin et Chasseing, Mmes Bonfanti-Dossat et Garriaud-Maylam, MM. Tabarot, Houpert, Meurant et Laménie, Mme Raimond-Pavero, M. Duplomb, Mme Schalck et MM. Dallier, Segouin, Pointereau et Favreau.
L’amendement n° 93 est présenté par M. Jomier, Mmes Meunier et Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 162 est présenté par MM. Théophile, Patriat, Iacovelli, Lévrier, Kulimoetoke, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 11, première phrase
Supprimer les mots :
et les centres hospitaliers universitaires
II. – Après l’alinéa 11
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les centres hospitaliers et universitaires, les chefs de service sont nommés par décision conjointe du directeur d’établissement, du président de la commission médicale d’établissement et du directeur de composante ou d’unité de formation et de recherche médicale, pharmaceutique et odontologique, et après avis du chef de pôle.
La parole est à M. Bernard Fialaire, pour présenter l’amendement n° 22 rectifié bis.
M. Bernard Fialaire. Cet amendement tend à s’inscrire dans le prolongement de celui qui vient d’être défendu.
L’article 5 rétablit le service comme structure interne des pôles d’activité des centres hospitaliers et universitaires, alors que, jusqu’alors, la structuration interne de prise en charge du malade au sein des pôles était laissée à la discrétion des établissements hospitaliers, dont certains avaient supprimé le terme « service », en utilisant l’appellation « unité interne », plus réductrice.
L’article 5 rétablit également, et fort justement, l’appellation « chef de service », plus valorisante et plus reconnue dans le monde hospitalier, y compris à l’international, qui avait elle aussi plus ou moins disparu dans certains centres hospitaliers.
En revanche, en l’état, cet article est réducteur, puisqu’il exclut le directeur de l’UFR de santé concernée lorsqu’il s’agit de nommer lesdits chefs de service en médecine, en odontologie, en pharmacie dans les centres hospitalo-universitaires.
Il est aussi peu cohérent avec le même article L. 6146-1 du code de la santé publique, dont il est la déclinaison. En effet, dans plusieurs alinéas, cet article associe systématiquement le directeur de l’unité de formation et de recherche médicale, que ce soit pour définir le projet médical d’établissement, établir conjointement avec le président de la CME les listes proposées au directeur général pour la nomination des chefs de pôle hospitalo-universitaires ou encore signer le contrat de pôle avec le chef de celui-ci.
Aussi, par cet amendement, nous proposons d’insérer un nouvel alinéa disposant que, dans les centres hospitaliers et universitaires, les chefs de service sont nommés par décision conjointe du directeur d’établissement, du président de la commission médicale d’établissement et du directeur de composante ou d’unité de formation et de recherche médicale, pharmaceutique et odontologique.
Tel est le sens des ordonnances Debré, dont l’objectif était de renforcer les interactions entre centres hospitaliers et universités, qui définissent les missions des centres hospitaliers et universitaires.
La désignation d’un chef de service universitaire aura un impact en matière de formation et de recherche. Cette désignation faite conjointement par le directeur de l’établissement, le président de la CME et le directeur de composante ou doyen est par ailleurs indispensable au bon fonctionnement des CHU.
M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, pour présenter l’amendement n° 64 rectifié.
M. Laurent Burgoa. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour présenter l’amendement n° 93.
M. Bernard Jomier. Il est également défendu.
M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 162.
M. Dominique Théophile. Il est lui aussi défendu, monsieur le président.
M. le président. Les quatre amendements suivants sont également identiques.
L’amendement n° 23 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
L’amendement n° 94 est présenté par M. Jomier, Mmes Meunier et Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 157 rectifié bis est présenté par M. Longeot, Mme Jacquemet, M. Kern, Mme Billon, MM. Duffourg, Chauvet, Cigolotti, S. Demilly et Le Nay, Mme Guidez, MM. Levi, P. Martin et Louault, Mme Dindar, M. Canevet, Mme de La Provôté et M. Delahaye.
L’amendement n° 163 est présenté par MM. Théophile, Patriat, Iacovelli, Lévrier, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 11, première phrase
Après la seconde occurrence du mot :
hospitaliers
insérer le mot :
et
La parole est à M. Bernard Fialaire, pour présenter l’amendement n° 23 rectifié.
M. Bernard Fialaire. Bien qu’il soit rédactionnel, cet amendement est important. Il vise à préciser que les centres hospitaliers sont avant tout des centres hospitaliers universitaires.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour présenter l’amendement n° 94.
M. Bernard Jomier. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour présenter l’amendement n° 157 rectifié bis.
M. Jean-François Longeot. Il est également défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 163.
M. Dominique Théophile. Il est lui aussi défendu.
M. le président. L’amendement n° 171, présenté par M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 11, première phrase
Supprimer les mots :
et après avis du chef de pôle
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Le chef de service est un interlocuteur privilégié, au centre de l’organisation de travail. Il apporte une réelle plus-value sur le terrain des soins, compte tenu de sa connaissance des équipes et des besoins du service.
Désigner un chef de service, c’est désigner un professionnel de terrain, au plus proche des équipes de soins. Il paraît inapproprié que les chefs de pôle, instances administratives et organisationnelles, puissent interférer dans la nomination des chefs de service.
Le service étant l’unité la plus à même de répondre avec pertinence aux prises de décision et à la mise en œuvre de la politique médicale, son chef doit être nommé par les personnes concernées, pour davantage de confiance et de coordination.
M. le président. L’amendement n° 169, présenté par M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 11, première phrase
Remplacer les mots :
du chef de pôle
par les mots :
de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. La commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques, la CSIRMT, est composée de représentants élus des différentes catégories de personnels qui participent à la mise en œuvre de ces soins.
Cette commission est un lieu de réflexion, de partage et une force de proposition de l’ensemble des professionnels paramédicaux de l’hôpital. Elle témoigne de leur implication dans le développement de la qualité de la prise en charge des patients à l’hôpital.
Pour que la décision relative à la nomination des chefs de service soit réellement partagée, il nous paraît essentiel d’y associer son avis.
M. le président. L’amendement n° 134, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 11, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
et concertation des personnels affectés dans le service
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Dans la continuité des amendements déposés par nos collègues et en cohérence avec notre projet de refonte de la gouvernance hospitalière, visant à rétablir une véritable démocratie sanitaire, nous proposons que, en amont des nominations des chefs de service, une concertation avec les personnels du service concerné soit organisée.
La proposition de loi renforce l’autorité des chefs de service dans la gouvernance des établissements publics de santé. Il s’agit d’un progrès par rapport à la gouvernance de gestionnaires éloignés de nos services.
Ce système existait auparavant, et nous avions pu observer les défauts d’un tel mode de fonctionnement, avec les dérives personnelles de certains médecins et une mise en concurrence des services entre eux. C’est la raison pour laquelle nous sommes favorables au renforcement de la place des représentants du personnel dans les instances.
Par cet amendement, nous proposons d’inclure une concertation avec les personnels en amont de la nomination des chefs de service, au même titre que l’avis du chef de pôle.
Il ne s’agit pas d’une remise en cause du pouvoir de nomination, qui demeure une décision conjointe du directeur d’établissement et du président de la commission médicale d’établissement. Nous voulons simplement offrir une place plus importante aux personnels et à leurs représentants.
M. le président. L’amendement n° 109, présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, MM. Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Alinéa 11, seconde phrase
Remplacer les mots :
revient au directeur d’établissement
par les mots :
est renvoyée à une commission paritaire au niveau de l’agence régionale de santé composée de médecins et de directeurs
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le président, à titre liminaire, je dois dire que je m’étonne que cet amendement ait été placé à cet endroit du dérouleur…
L’article 5 répond à une attente des personnels hospitaliers, en réaffirmant la place de référence des services et du binôme du chef de service et du cadre de santé. Nous nous en félicitons, tout comme nous nous félicitons que l’article prévoie que les chefs de service seront nommés par décision conjointe du directeur d’établissement et du président de la commission médicale d’établissement.
Cette codécision constitue une première avancée, avec la concertation prévue avec les personnels affectés dans le service. Mais sa portée sur le partage de la décision est réduite par l’amendement adopté en commission, qui a pour objet que, en cas de désaccord, la décision revient à l’une des parties, en l’occurrence le directeur ou la directrice d’établissement.
Les représentants des personnels médicaux que nous avons auditionnés demandaient, vous vous en doutez bien, mes chers collègues, que tout désaccord soit tranché par le président de la commission médicale d’établissement. In fine, s’il fallait choisir, je suis d’accord avec l’amendement de la commission : la décision appartiendrait au chef d’établissement, responsable sur le plan juridique.
Pour lever cette difficulté, et afin de rester fidèles à cette logique de codécision, nous proposons par cet amendement que, en cas de désaccord entre ces deux parties, la décision revienne à une commission paritaire composée de médecins et de directeurs et constituée au niveau de l’agence régionale de santé.
Ainsi, plutôt qu’un codécisionnaire prime l’autre – situation de rapport de force préjudiciable, qu’il convient vraiment d’éviter, car cela signifie qu’une partie déciderait contre une autre –, le groupe écologiste propose que, en cas de désaccord sur la nomination du chef de service entre le directeur d’établissement et le président de la commission médicale d’établissement, l’arbitrage revienne à un tiers, en l’occurrence l’ARS.
M. le président. Madame Poncet Monge, votre amendement a été placé à cet endroit du dérouleur de notre séance parce qu’il a pour objet la seconde phrase de l’alinéa 11 de l’article 5, tandis que les autres amendements visent la première phrase du même alinéa.
Mme Raymonde Poncet Monge. D’accord !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L’amendement n° 191 vise à introduire le principe d’une élection du chef de service d’un CHU.
Même s’il est a priori séduisant, ce principe ne me paraît pas applicable dans la mesure où le chef de service est d’abord une autorité fonctionnelle chargée d’appliquer la ligne de gouvernance de l’hôpital à l’échelle du service. Une élection n’a donc pas paru opportune à la commission.
La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
L’amendement n° 115 rectifié ter vise à préciser la procédure de nomination des chefs de service au sein d’un CHU.
La commission est favorable à l’intention des auteurs de cet amendement – tel ne sera pas le cas pour les amendements suivants –, qui respecte le texte de la commission, en prévoyant bien que la décision en dernier recours appartient au directeur d’établissement, en cas de désaccord entre les autorités de nomination.
J’ajoute que cette précision est d’autant plus utile que ces autorités seraient désormais au nombre de trois pour les chefs de service au sein de CHU, ce qui requiert l’intervention finale d’un arbitre.
La commission émet donc un avis favorable.
En revanche, son avis est défavorable sur les amendements identiques nos 22 rectifié bis, 64 rectifié, 93 et 162, puisque leurs dispositions sont contraires à celles de l’amendement n° 155 rectifié ter, sur lequel nous avons émis un avis favorable.
Les amendements identiques nos 23 rectifié, 94, 157 rectifié bis et 163 visent à modifier la dénomination des CHU en « centres hospitaliers et universitaires ».
L’intention de leurs auteurs semble louable, mais ce changement créerait, à mon sens, une double confusion : d’une part, la partie réglementaire du code de santé publique – et la principale partie de sa partie législative – faisant mention de « centres hospitaliers universitaires », il ne me paraît pas souhaitable que deux dénominations coexistent pour désigner la même entité ; d’autre part, l’introduction de ce « et » semble atténuer le partenariat nécessaire qu’abrite le CHU entre pratique hospitalière et recherche médicale, ce qui me semble inopportun.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces amendements identiques.
L’amendement n° 171 vise à substituer l’avis de la commission des soins infirmiers à celui du chef de pôle pour la nomination du chef de service. Ce faisant, il tend à retirer l’avis préalable du chef de pôle, ce qui ne paraît pas souhaitable dans la mesure où ce dernier continuera de détenir une autorité fonctionnelle sur le chef de service.
La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
L’amendement n° 169 visant, lui aussi, à opérer la même substitution, l’avis sera également défavorable.
L’amendement n° 134 vise à introduire le principe d’une concertation avec les personnels d’un service avant la nomination du chef de service. Même s’il est a priori séduisant, un tel principe ne me paraît pas applicable, dans la mesure où, je le répète, le chef de service est d’abord une autorité fonctionnelle chargée d’appliquer la ligne de gouvernance de l’hôpital à l’échelle du service.
Bien qu’il soit fondamental que les liens avec son équipe soient de bonne qualité, il ne me semble pas raisonnable que la loi doive s’en préoccuper en amont de sa nomination, par une concertation dont les résultats ne lieront pas les autorités de nomination. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Enfin, mon avis est également défavorable sur l’amendement n° 109.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. L’avis du Gouvernement est identique à celui de la commission, avec les mêmes arguments, sur lesquels je ne reviendrai donc pas.
Je ne ferai qu’une exception, j’en suis désolée, monsieur le rapporteur : mon avis est défavorable sur l’amendement n° 155 rectifié ter, car cette nomination conjointe du chef de service, telle qu’est est proposée ici, ne correspond pas aux orientations du rapport Claris, qui tend vers une commission-nomination par le directeur de l’établissement et par le président de la CME.
M. le président. En conséquence, les amendements identiques nos 22 rectifié bis, 64 rectifié, 93 et 162, ainsi que les amendements identiques nos 23 rectifié, 94, 157 rectifié bis et 163, n’ont plus d’objet.
Je mets aux voix l’amendement n° 171.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 204, présenté par M. Milon, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 14, première phrase
Supprimer les mots :
au projet de gouvernance et de management participatif,
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de cohérence, consécutif à la suppression de l’article 11 par la commission.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Sans vouloir vous être désagréable, monsieur le rapporteur, je vais émettre un avis défavorable.
En effet, un amendement a été déposé tendant à rétablir l’article 11 et, partant, le projet de management et de gouvernance participatif.
Compte tenu de mon attachement aux conclusions du rapport Claris, qui prévoit explicitement ce projet, mais également par souci de cohérence, dans la perspective d’un éventuel rétablissement de l’article 11, je suis donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 188 rectifié est présenté par Mme Guillotin, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Fialaire, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
L’amendement n° 198 rectifié bis est présenté par Mme Doineau, MM. Moga, Kern, J.-M. Arnaud et Longeot, Mme Loisier, M. Détraigne, Mmes Vérien, Billon, Saint-Pé et Perrot, MM. Mizzon, Hingray, Levi et Le Nay, Mme Férat, MM. Laugier, S. Demilly et Canevet, Mme Gatel, M. Louault, Mme Dindar, MM. Lafon et Cadic, Mme de La Provôté, MM. Cigolotti, Duffourg et Delcros, Mmes Létard et Jacquemet et MM. Vanlerenberghe et P. Martin.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 15
Remplacer les mots :
et les personnels médicaux et paramédicaux
par les mots :
, les personnels médicaux et paramédicaux et les étudiants en santé
La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 188 rectifié.
Mme Véronique Guillotin. Le présent amendement vise à intégrer les étudiants en santé à la concertation interne au sein des services. En effet, il est important de prendre en compte leurs avis, tandis que leurs propositions peuvent aller dans le sens d’une plus grande attractivité de leur établissement.
Bien les accueillir, bien les intégrer, c’est en fait se donner une chance qu’ils restent dans l’établissement et sur un territoire. À l’inverse, ne pas les intégrer à la concertation, ce serait adresser un très mauvais signal aux jeunes internes, qui contribuent activement à l’activité médicale des services et des hôpitaux.
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour présenter l’amendement n° 198 rectifié bis.
Mme Élisabeth Doineau. Ces étudiants sont les soignants de demain, et nous devons donc leur faire confiance.
Par rapport à des équipes qui sont parfois en place depuis très longtemps, leur recul leur permet d’avoir une vision différente des choses, ce qui est un plus.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. On ne peut qu’adhérer à l’idée soutenue par les auteurs de ces deux amendements identiques, mais la commission s’est interrogée sur l’opportunité d’isoler dans la loi la catégorie des étudiants en santé, qui font partie de toute façon du personnel médical et paramédical.
Nous souhaitons donc entendre l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Je fais miennes les interrogations de M. le rapporteur.
Ces amendements identiques visent à associer les étudiants en santé à la concertation menée au sein des services. Or cette préoccupation me paraît satisfaite : l’alinéa 9 de l’article 5 vise bien, au sein du service, l’encadrement des internes et des étudiants en santé.
Au demeurant, les étudiants étant de passage dans un service pendant un semestre, il paraît on ne peut plus délicat de leur demander de se prononcer sur la nomination d’un chef de service.
Le Gouvernement demande donc le retrait de ces amendements identiques, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est donc l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Même avis.
M. le président. Madame Guillotin, l’amendement n° 188 rectifié est-il maintenu ?
Mme Véronique Guillotin. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. Madame Doineau, l’amendement n° 198 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Élisabeth Doineau. Je le maintiens également, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 188 rectifié et 198 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 52 rectifié, présenté par M. Henno, Mmes N. Goulet, Vermeillet, Billon et Saint-Pé, MM. Détraigne, Levi, Le Nay, Lafon, Laugier et S. Demilly, Mmes Gatel et Dindar, MM. Kern, Maurey, Chauvet et Le Gleut et Mme Jacquemet, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 15
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le chef de service et le cadre de santé sont conjointement responsables d’établir un ratio minimal d’encadrement des patients par le personnel soignant.
La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. Au cours de nos débats, nous avons déjà évoqué la pénurie des soignants et leur surcharge de travail.
Afin d’améliorer la qualité des soins, cet amendement tend à imposer des seuils de soignants par nombre de patients dans chaque service d’un établissement de santé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement tend à ériger au rang législatif l’une des missions qui incombent naturellement aux chefs de service et aux cadres de santé dans la gestion quotidienne des équipes.
De telles dispositions ne me paraissent pas opportunes, du fait de leur faiblesse normative, mais aussi en raison de l’ambiguïté qu’elles feraient peser sur la répartition des rôles entre le chef de service et les cadres de santé. Seul le premier est chargé de la direction du service et, à mon sens, les situations de double responsabilité sont une source de confusion.
Je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Henno. Je retire mon amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 52 rectifié est retiré.
L’amendement n° 205, présenté par M. Milon, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer un alinéa faisant référence à un article abrogé du code de la santé publique.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 5, modifié.
(L’article 5 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 5
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 62 rectifié est présenté par MM. Vanlerenberghe, Moga et Canevet, Mmes Vermeillet, Doineau et Dindar, MM. J.M. Arnaud et P. Martin, Mme Saint-Pé, M. Cigolotti, Mme Billon et MM. Lafon, Henno et Capo-Canellas.
L’amendement n° 116 rectifié bis est présenté par MM. Kern et Mizzon, Mme Férat, MM. Le Nay et Longeot et Mme de La Provôté.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le troisième alinéa de l’article L. 6143-7 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Sur proposition du chef de service et après avis du chef de pôle, le directeur et le président de la commission médicale d’établissement proposent conjointement au directeur général du Centre national de gestion la nomination et/ou la mise en recherche d’affectation des personnels médicaux, odontologiques et pharmaceutiques mentionnés au 1° de l’article L. 6152-1 dans les conditions fixées par voie réglementaire. »
La parole est à M. Jean-Pierre Moga, pour présenter l’amendement n° 62 rectifié.
M. Jean-Pierre Moga. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Claude Kern, pour présenter l’amendement n° 116 rectifié bis.
M. Claude Kern. Cet amendement tend à concrétiser l’un des engagements pris par le Gouvernement dans le cadre du plan Investir pour l’hôpital. Il s’agit de garantir des décisions conjointes entre le directeur et le président de la commission médicale d’établissement, la CME, dans les domaines de compétence partagée.
Prenant appui sur les recommandations de la mission Claris, notre amendement vise ainsi à conforter ce binôme comme clé de voûte de la gouvernance hospitalière.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Ces dispositions posent plusieurs difficultés.
La première a trait au nouveau rôle qui serait confié au directeur général du Centre national de gestion, le CNG. Ce responsable ne nomme pas les praticiens hospitaliers, mais se contente d’établir les profils des postes laissés vacants.
La seconde est plus substantielle. Une telle réforme accroîtrait la complexité du processus de recrutement à l’encontre de l’article 3, tel qu’il a été adopté par la commission, puis par la Haute Assemblée. En effet, suivant la lettre de ces amendements, une nomination ou une recherche de personnel supposerait quatre strates successives d’intervention : le chef de service, le chef de pôle, le directeur d’établissement, conjointement au président de la CME, et le directeur de la CNG.
Je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Claude Kern. Je retire mon amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 116 rectifié bis est retiré.
Monsieur Moga, l’amendement n° 62 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Moga. Non, je le retire également, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 62 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 61 rectifié est présenté par MM. Vanlerenberghe, Moga et Canevet, Mmes Vermeillet, Doineau et Dindar, MM. J.M. Arnaud et P. Martin, Mme Saint-Pé, M. Cigolotti, Mme Billon et MM. Lafon, Henno et Capo-Canellas.
L’amendement n° 113 rectifié bis est présenté par MM. Kern et Mizzon, Mme Férat et MM. Le Nay et Longeot.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 6144-1 du code de la santé publique, après le mot : « qualité », sont insérés les mots : « , de la pertinence ».
La parole est à M. Jean-Pierre Moga, pour présenter l’amendement n° 61 rectifié.
M. Jean-Pierre Moga. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Claude Kern, pour présenter l’amendement n° 113 rectifié bis.
M. Claude Kern. Ces dispositions, comme les précédentes, s’inscrivent dans la droite ligne du rapport Claris : il s’agit s’impliquer la CME dans le programme d’amélioration de la pertinence des soins pour impulser une nouvelle dynamique en la matière.
L’ensemble des équipes médicales doit pouvoir se pencher sur ces sujets aux enjeux qualitatifs et médico-économiques majeurs.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Il ne s’agit pas d’un simple complément rédactionnel : ces amendements tendent à matérialiser l’enjeu primordial que doit constituer, à l’avenir, l’attention portée à la pertinence des soins hospitaliers, dans une logique de lutte contre la fraude à l’assurance maladie.
En conséquence, la commission émet un avis favorable sur ces amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 61 rectifié et 113 rectifié bis.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 5.
L’amendement n° 108, présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, MM. Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 6146-1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 6146-1-… ainsi rédigé :
« Art. L. 6146-1-…. – À titre expérimental pour une durée de trois ans suivant la promulgation de la loi n° du visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, dans les centres hospitaliers généraux, sur décision du chef d’établissement, après avis conforme de la commission médicale d’établissement et de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-technique, il est procédé à l’élection des chefs de service par l’ensemble des praticiens hospitaliers affectés dans le service depuis un an au moins. Le chef de service est élu pour une durée de quatre ans.
« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article. Ledit décret précise également les modalités de l’information délivrée aux personnels votants.
« Au plus tard trois mois avant son terme, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de cette expérimentation. Ce rapport évalue en particulier la contribution de ce dispositif à l’amélioration de la démocratie dans le système de santé. »
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Le choix d’un ou d’une chef de service est un moment important pour une équipe, surtout lorsque le législateur réaffirme la place des services hospitaliers – il signe presque leur retour ! –, en levant toute ambiguïté quant à son rôle comme échelon de référence dans beaucoup de domaines. Les acteurs professionnels du terrain attendaient vivement ce rappel et cette clarification.
Dans cet esprit, notre amendement tend à répondre à une aspiration émergente des praticiens hospitaliers, notamment des plus jeunes d’entre eux : les chefs de service seraient plus légitimes et garantiraient une meilleure cohésion d’équipe s’ils n’étaient pas nommés d’en haut, mais élus par leurs pairs.
Nous ne méconnaissons pas la révolution presque culturelle que suppose une telle réforme : le seul ajout d’une concertation a mis vent debout les défenseurs du statu quo !
Pourtant, les craintes formulées mériteraient d’être confrontées aux évaluations d’expérimentations réelles. Au reste, la pratique actuelle, à savoir la nomination des chefs de service, n’est pas exempte de tensions, voire de conflits.
Nous proposons que l’expérimentation soit simplement une possibilité ouverte aux centres hospitaliers généraux, et non aux centres hospitaliers universitaires, les CHU, par une démarche totalement volontaire. L’initiative en reviendrait au chef d’établissement, s’appuyant sur les avis conformes de la commission médicale d’établissement et de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques.
Cette expérimentation aux contours très bien définis serait prévue pour une durée de trois ans et ferait l’objet d’une évaluation. Elle nous permettrait de découvrir d’autres chemins de démocratie sanitaire, pistes qui méritent d’être explorées.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement vise à expérimenter l’élection des chefs de service.
L’idée est intéressante, mais son application semble particulièrement difficile dans la mesure où le chef de service demeure une autorité avant tout fonctionnelle. Sa légitimité procède d’abord de la structure dans laquelle il exerce. La procédure actuelle, à savoir la décision conjointe du directeur d’établissement et du président de la CME, est à cet égard tout à fait justifiée, d’autant qu’un recours est possible en cas de blocage.
En outre, il serait incongru de réserver l’élection du chef de service aux praticiens hospitaliers. D’une part, ce choix inclurait l’ensemble des praticiens contractuels, qui n’ont pas vocation à exercer au sein du service pendant l’intégralité du mandat quadriennal. D’autre part, il exclurait les autres personnels paramédicaux, sur lesquels l’autorité du chef de service a aussi vocation à s’exercer.
Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrais un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Madame la sénatrice, vous proposez d’expérimenter un processus participatif de désignation des chefs de service. Le ministre des solidarités et de la santé, qui, par le passé, a pris part à une telle élection au CHU de Grenoble, juge ce dispositif intéressant.
De plus, il s’agirait d’une expérimentation ; il faudra simplement que les modalités organisationnelles de l’élection, évoquées par M. le rapporteur, soient encadrées par le décret d’application prévu par cet amendement.
Dans ces conditions, je suis favorable à votre amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 108.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 5 bis
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° L’article L. 6143-2-2 est ainsi modifié :
a) Au début, sont ajoutés cinq alinéas ainsi rédigés :
« Le projet médical et le projet de soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques définissent, chacun pour les compétences qui leur sont attribuées par le présent code, les objectifs stratégiques d’évolution de l’organisation des filières de soins, du fonctionnement médical et des moyens médico-techniques permettant de répondre aux besoins de santé de la population. Ils prennent en compte l’évolution des stratégies de prise en charge, notamment thérapeutiques.
« Ils définissent également les objectifs d’amélioration de la qualité et de la sécurité de la prise en charge et des parcours des patients.
« Dans les centres hospitaliers universitaires, ils comprennent l’articulation avec les objectifs stratégiques en matière de recherche en santé et de formation, en lien avec les directeurs des unités de formation et de recherche médicale, pharmaceutique et odontologique.
« Ils définissent, sans préjudice et en cohérence avec le plan médical partagé mentionné au 1° du II de l’article L. 6132-2, l’articulation des parcours et des filières de soins avec les autres établissements de santé, les professionnels de santé libéraux, notamment ceux exerçant au sein des dispositifs d’exercice coordonné mentionnés aux articles L. 1411-11-1 ou L. 1434-12, et dans les établissements sociaux et médico-sociaux.
« Le projet médical et le projet de soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques sont élaborés, en étroite association avec le directeur d’établissement, respectivement par les membres de la commission médicale d’établissement et les membres de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques, chacune des commissions recueillant, pour le projet dont elle est chargée, l’avis de l’autre. Les projets sont ensuite soumis au directoire par le directeur d’établissement et, respectivement, le président de la commission concernée. Après délibération, le directoire peut demander au directeur d’établissement et au président de la commission concernée de renvoyer le projet à ladite commission afin de le compléter et de l’amender sous un délai d’un mois. La commission concernée adopte un projet final, que le directeur d’établissement et le président de ladite commission soumettent pour approbation au directoire. » ;
b) Le début de la deuxième phrase est ainsi rédigé : « Ils comprennent les… (le reste sans changement). » ;
2° (nouveau) Le premier alinéa de l’article L. 6143-7-3 est ainsi modifié :
a) La deuxième phrase est supprimée ;
b) Au début de la troisième phrase, sont ajoutés les mots : « En étroite collaboration avec le président de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques, » ;
3° (nouveau) La première phrase de l’article L. 6143-7-4 est ainsi modifiée :
a) Après les mots : « projet médical », sont insérés les mots : « et le projet de soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques » ;
b) Après le mot : « prépare », sont insérés les mots : « sur cette base » ;
c) Les mots : « , notamment sur la base du projet de soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques » sont supprimés.
M. le président. L’amendement n° 120, présenté par M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 4
1° Après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Ces besoins sont régulièrement évalués afin d’y adapter l’offre de soins.
2° Seconde phrase
Remplacer le mot :
Ils
par les mots :
Le projet médical et le projet de soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. L’enjeu de l’adaptation du système de santé, notamment de l’offre de santé hospitalière, aux besoins de santé spécifiques de la population, a été conforté par tous les grands projets de loi depuis la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, ou loi HPST.
Qu’il s’agisse du plan stratégique régional de santé, du plan régional de santé ou du diagnostic territorial partagé donnant lieu aux projets territoriaux de santé, en vertu du dernier texte en date, à savoir la loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santé de 2019, la volonté du législateur est bien de tenir compte de l’évolution des données démographiques, sanitaires et sociales de la population, pour y adapter l’offre de soins.
Or, dans les faits, cet objectif ne semble revêtir qu’une réalité formelle. Les communautés médicales et de soignants, en particulier à l’hôpital, ressentent ce décalage dans leur pratique quotidienne. Elles souhaitent que les besoins de santé soient davantage évalués et objectivés à l’échelle de l’établissement de santé : ce serait la première étape d’une adaptation de l’organisation et des moyens, suivant l’ordre logique des choses.
Cet amendement vise donc à préciser dans la définition du projet médical de l’établissement que l’on évalue régulièrement les besoins de santé, pour y adapter réellement l’offre de soins.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission émet un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Monsieur Jomier, nous considérons cet amendement comme satisfait : la révision des besoins de santé est d’ores et déjà bien identifiée et prise en compte, en particulier par les projets régionaux de santé, qui nous paraissent beaucoup plus appropriés.
Dans ce cadre, les besoins de santé de la population font l’objet d’un diagnostic et d’une révision réguliers, à échéance maximale de cinq ans. Ce faisant, l’on adapte les politiques régionales et locales d’offre de soins pour répondre aux besoins de la population.
Nous vous demandons, partant, de bien vouloir retirer votre amendement – ce que vous ne ferez pas, bien sûr ! (Sourires.)
M. le président. Monsieur Jomier, l’amendement n° 120 est-il maintenu ?
M. Bernard Jomier. Oui, je le maintiens, monsieur le président ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. L’amendement n° 97, présenté par M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par les mots :
, notamment ceux en situation de handicap
La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. L’article 5 bis encadre et définit le contenu du projet médical d’établissement. Pour l’heure, la loi n’en fait pour ainsi dire mention nulle part. C’est pourquoi nous devons saisir cette occasion pour y inclure les questions relatives au handicap.
Une étude menée par Handifaction, qui synthétise 4 384 réponses recueillies entre le 1er octobre et le 31 décembre 2020, montre que presque 42 % des personnes en situation de handicap n’ont pas pu recevoir leurs soins.
Pour ce qui concerne la prise en charge des personnes en situation de handicap, notre système souffre de lacunes, à savoir le manque de formation des professionnels aux différents types de handicaps et le manque de moyens. La prise en charge du public vulnérable est dès lors difficile, voire chaotique.
Les différents services doivent pouvoir s’adapter aux particularités de chacun : difficultés dans l’explication des symptômes, mauvaise compréhension des signaux de mal-être, intolérance à la lumière, au bruit, etc.
Bien que la loi impose la prise en compte des besoins spécifiques des personnes en situation de handicap à chaque étape du parcours de soins, il nous semble important de préciser de nouveau par écrit, dans chaque projet d’établissement, les dispositifs à installer ou à travailler pour que les personnes en situation de handicap puissent être soignées correctement.
On ne rappellera jamais assez l’importance de la prise en compte des plus vulnérables, notamment dans les instances décisionnelles.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Il est favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Selon nous, cet amendement est satisfait. Aussi, j’émets un avis défavorable.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements identiques.
L’amendement n° 25 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
L’amendement n° 66 rectifié est présenté par M. Piednoir, Mme L. Darcos, MM. Pellevat, Bascher, Regnard, Brisson, Perrin, Rietmann, Somon et Paccaud, Mme F. Gerbaud, M. Longuet, Mme Deromedi, MM. D. Laurent, Burgoa, Savin et Genet, Mmes Bonfanti-Dossat et Garriaud-Maylam, MM. Tabarot, Houpert, B. Fournier, Meurant et Laménie, Mme Raimond-Pavero, M. Duplomb, Mme Schalck, MM. Dallier et Segouin, Mme Lherbier et M. Favreau.
L’amendement n° 96 est présenté par M. Jomier, Mmes Meunier et Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 158 rectifié bis est présenté par M. Longeot, Mme Jacquemet, M. Kern, Mme Billon, MM. Duffourg, Chauvet, Cigolotti, S. Demilly et Le Nay, Mme Guidez, MM. Levi, P. Martin et Louault, Mme Dindar, M. Canevet, Mme de La Provôté et M. Delahaye.
L’amendement n° 164 est présenté par MM. Théophile, Patriat, Iacovelli, Lévrier, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 6
Après le mot :
hospitaliers
insérer le mot :
et
La parole est à M. Bernard Fialaire, pour présenter l’amendement n° 25 rectifié.
M. Bernard Fialaire. Notre collègue Nathalie Delattre étant une femme opiniâtre, elle propose de nouveau d’ajouter la conjonction de coordination « et » entre « centres hospitaliers » et « universitaires » ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour présenter l’amendement n° 66 rectifié.
M. Max Brisson. À l’opiniâtreté de Mme Delattre, M. Piednoir ajoute la nécessité de mettre en conformité le code de la santé publique et le code de l’éducation ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour présenter l’amendement n° 96.
M. Bernard Jomier. J’ai bien entendu les explications que M. le rapporteur a données sur ce sujet.
Néanmoins, cet amendement vise à souligner la relation forte, les nombreuses interactions entre centres hospitaliers régionaux et universités. Les CHU doivent devenir des centres d’excellence en matière de recherche, de formation, de soins et d’innovation en santé.
L’appellation « centres hospitaliers et universitaires » serait ainsi conforme à l’article L. 6142-3 du code de la santé publique et aux articles L. 952-21 et L. 713-5 du code de l’éducation, qui organisent précisément les CHU.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour présenter l’amendement n° 158 rectifié bis.
M. Jean-François Longeot. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 164.
M. Dominique Théophile. Il est également défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Je ne reprendrai pas les explications que j’ai déjà développées : la commission émet un avis défavorable sur ces cinq amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 25 rectifié, 66 rectifié, 96, 158 rectifié bis et 164.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements identiques.
L’amendement n° 24 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
L’amendement n° 65 rectifié est présenté par M. Piednoir, Mme L. Darcos, MM. Pellevat, Bascher, Regnard, Brisson, Perrin, Rietmann, Somon, Paccaud et Bonhomme, Mme F. Gerbaud, M. Longuet, Mme Deromedi, MM. D. Laurent, Burgoa, Savin, Chasseing et Genet, Mmes Bonfanti-Dossat et Garriaud-Maylam, MM. Tabarot, Houpert, Meurant et Laménie, Mme Raimond-Pavero, M. Duplomb, Mme Schalck et MM. Dallier, Segouin, Pointereau et Favreau.
L’amendement n° 95 est présenté par M. Jomier, Mmes Meunier et Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 156 rectifié bis est présenté par M. Longeot, Mme Jacquemet, M. Kern, Mme Billon, MM. Duffourg, Chauvet, Cigolotti, S. Demilly et Delahaye, Mme de La Provôté, MM. Le Nay, Levi, P. Martin et Louault, Mme Dindar et M. Canevet.
L’amendement n° 165 est présenté par MM. Théophile, Patriat, Iacovelli, Lévrier, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 6
Après la seconde occurrence du mot :
avec
insérer les mots :
les présidents d’université et
La parole est à M. Bernard Fialaire, pour présenter l’amendement n° 24 rectifié.
M. Bernard Fialaire. Le projet médical définit les objectifs stratégiques d’évolution de l’organisation des filières de soins, du fonctionnement médical et des moyens médico-techniques permettant de répondre aux besoins de santé de la population.
Le projet médical des CHU comprend l’articulation avec les objectifs stratégiques en matière de recherche en santé et de formation, qui ne sauraient entrer en contradiction avec le contrat de l’université.
Pour renforcer les interactions entre centres hospitaliers et universités, qui sont au cœur des missions des CHU, nous proposons d’associer également le président de l’université avec laquelle le centre hospitalier a passé la convention prévue à l’article L. 6142-3 du code de la santé publique, pour préparer les objectifs stratégiques en matière de recherche en santé et de formation du projet médical.
Pour la définition des différents objectifs, la place de l’ensemble des disciplines de recherche et l’interdisciplinarité s’en trouveront renforcées. Enfin, cette disposition garantira une plus grande cohérence lors de l’évaluation des établissements.
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour présenter l’amendement n° 65 rectifié.
M. Max Brisson. M. Fialaire a parfaitement défendu ces dispositions : j’insiste sur le fait qu’elles sont gage de cohérence lors de l’évaluation des établissements, notamment par le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur, le Hcéres.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour présenter l’amendement n° 95.
M. Bernard Jomier. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour présenter l’amendement n° 156 rectifié bis.
M. Jean-François Longeot. Il est également défendu.
M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 165.
M. Dominique Théophile. Défendu !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L’intention que traduisent ces amendements est intéressante.
Néanmoins, la commission estime qu’elle est, en droit, largement satisfaite par la délégation de signature que les présidents d’université accordent aux directeurs des unités de formation et de recherche, les UFR, de médecine.
La commission demande donc le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Max Brisson. Je retire mon amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 65 rectifié est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 24 rectifié, 95, 156 rectifié bis et 165.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 141, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le volet formation comporte les objectifs généraux de formation des étudiantes et étudiants en santé de l’établissement les accueillant et recense les projets de formation de l’ensemble des services du centre hospitalier universitaire.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Les étudiantes et les étudiants en santé demandent une meilleure prise en compte de la qualité de la formation qu’ils reçoivent et des compétences acquises à l’hôpital.
Ils acceptent d’y travailler dans des conditions souvent épuisantes, dans la mesure où ils y trouvent une qualité de formation d’ailleurs unanimement reconnue. Mais, au fur et à mesure des réductions d’effectifs, la part de formation encadrée s’est réduite comme peau de chagrin.
La qualité de la formation dépend donc en grande partie des moyens humains et financiers dont disposent les hôpitaux. On ne peut que le déplorer : parfois, les étudiants en médecine comblent les déficits en personnel de l’hôpital. En résulte une hétérogénéité de la formation selon les différents terrains de stages hospitaliers.
C’est la raison pour laquelle nous reprenons, avec cet amendement, une proposition des organisations étudiantes : préciser, dans le volet de formation de l’établissement, les objectifs généraux de formation de l’établissement d’accueil et un recensement des projets de formation de l’ensemble des services des CHU.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Cette rédaction, qui se contente d’expliciter l’existant, est à mon sens dépourvue de portée normative. Aussi, elle serait davantage de nature à alourdir le texte qu’à en préciser le contenu.
Je sollicite donc le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Cohen, l’amendement n° 141 est-il maintenu ?
Mme Laurence Cohen. Étant donné l’engouement que cet amendement suscite, je vais le retirer… (Sourires.) Toutefois, malgré l’heure tardive, je tiens à attirer l’attention de Mme la ministre sur cette question.
Il s’agit d’un véritable problème, au sujet duquel les étudiantes et les étudiants en médecine nous ont alertés. Ils ont besoin d’une formation encadrée ; ils ont également besoin de reconnaissance, d’autant qu’ils sont réellement au bord de l’épuisement.
On le voit dans nos territoires : bon nombre de services tiennent grâce aux étudiants en médecine, dont il faut saluer le volontarisme. On constate également le désarroi des seniors, qui sont chargés de les encadrer et qui, aujourd’hui, n’ont plus le temps de les accompagner comme ils le souhaiteraient.
Le problème perdure et devient de plus en plus grave. Il faut y répondre. Le débat reste ouvert, mais, si l’amendement n° 141 est inopérant, nous le retirons, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 141 est retiré.
L’amendement n° 117 rectifié, présenté par MM. Kern et Mizzon, Mme Billon, MM. Canevet, P. Martin, Le Nay et Longeot et Mme de La Provôté, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La commission médicale d’établissement élabore et propose au directoire le projet médical, qui est intégré au projet d’établissement. Le président de la commission médicale d’établissement coordonne son élaboration et sa mise en œuvre avec le directeur, selon une procédure médico-administrative partagée. Après concertation en directoire, le directeur et le président de la commission médicale d’établissement peuvent demander à la commission médicale d’établissement de compléter ou d’amender la proposition de projet médical dans une nouvelle proposition. Le projet final est voté par la commission médicale d’établissement pour être proposé au directoire.
La parole est à M. Claude Kern.
M. Claude Kern. Cet amendement vise à affirmer la place centrale de la CME pour préparer et définir le projet médical.
Il s’agit plus précisément de conforter le président de cette instance dans ses prérogatives actuelles, tant comme coordonnateur de la politique médicale de l’établissement que comme responsable, avec le directeur, de l’élaboration du projet médical.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Mon cher collègue, sauf erreur de ma part, votre amendement a été déposé sur le texte dont la commission a été saisie, non sur celui qu’elle a élaboré. Or, si elles étaient votées, ces dispositions entreraient en contradiction complète avec l’article 5 bis, tel que le Sénat l’a adopté.
Je vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Kern, l’amendement n° 117 rectifié est-il maintenu ?
M. Claude Kern. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 117 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 5 bis, modifié.
(L’article 5 bis est adopté.)
Article 6
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au c du 5° du II de l’article L. 6132-2, après les mots : « d’établissement », sont insérés les mots : « et les commissions des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques » ;
2° L’article L. 6144-1 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi modifié :
– le mot : « contribue » est remplacé par les mots : « et la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques contribuent » ;
– les mots : « et de son projet médical » sont remplacés par les mots : « et, dans les conditions mentionnées à l’article L. 6143-2-2, de leurs projets médical et de soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques » ;
– les mots : « elle propose » sont remplacés par les mots : « elles proposent » ;
b) Au début du deuxième alinéa, les mots : « Elle est consultée » sont remplacés par les mots : « Elles sont consultées » ;
3° L’article L. 6144-2 est ainsi modifié :
a) Après la première phrase du premier alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée : « La commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques est composée de représentants des cadres de santé, des personnels infirmiers, de rééducation et médico-techniques et des aides-soignants. » ;
b) La seconde phrase du même premier alinéa est ainsi rédigée : « Chacune élit son président. » ;
c) Au début du second alinéa, le mot : « Sa » est remplacée par le mot : « Leur » et le mot : « ses » est remplacé par le mot : « leurs » ;
4° L’article L. 6146-9 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est complété par les mots : « , qui travaille en étroite collaboration avec le président de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques » ;
b) Le second alinéa est supprimé ;
5° (nouveau) Après l’article L. 6146-11, il est inséré un article L. 6146-12 ainsi rédigé :
« Art. L. 6146-12. – Par dérogation aux articles L. 6144-1, L. 6144-2 et L. 6146-9, le directeur de l’établissement peut décider, sur proposition conjointe des présidents de la commission médicale d’établissement et de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques, après consultation du conseil de surveillance, la création d’une commission médico-soignante d’établissement se substituant à ces deux commissions.
« Cette décision doit recueillir préalablement l’avis conforme de la commission médicale d’établissement et de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques.
« La commission médico-soignante ainsi créée se substitue à la commission médicale d’établissement et à la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques en ce qui concerne les compétences qui leur sont respectivement attribuées par le présent code.
« La commission médico-soignante élit son président parmi les représentants des personnels médicaux, odontologiques, maïeutiques et pharmaceutiques ainsi que son vice-président parmi les représentants des cadres de santé, des personnels infirmiers, de rééducation et médico-techniques et des aides-soignants.
« Le président et le vice-président de la commission médico-soignante assurent respectivement les compétences attribuées par le présent code au président de la commission médicale d’établissement et au président de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques.
« La composition et les règles de fonctionnement de la commission médico-soignante sont fixées par le règlement intérieur de l’établissement. L’ensemble des professions médicales et paramédicales sont équitablement représentées au sein de la commission médico-soignante d’établissement.
« La commission médico-soignante d’établissement est dissoute, après information du conseil de surveillance, sur décision du directeur de l’établissement s’il constate des manquements ou dysfonctionnements dans la mise en œuvre du dispositif ou, le cas échéant, sur saisine de la majorité des membres de la commission représentant des personnels médicaux, odontologiques, maïeutiques et pharmaceutiques ou de la majorité des membres de la commission représentant des cadres de santé, des personnels infirmiers, de rééducation et médico-techniques et des aides-soignants. Dans le cas d’une saisine, la décision du directeur est liée. »
M. le président. L’amendement n° 69 rectifié, présenté par MM. Vanlerenberghe, Moga et Canevet, Mme Vermeillet, M. Delahaye, Mmes Doineau et Dindar, MM. J.M. Arnaud et P. Martin, Mme Saint-Pé, MM. Cigolotti, Lafon, Henno et Capo-Canellas et Mme Billon, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Élisabeth Doineau.
Mme Élisabeth Doineau. Telle que la définit l’article 6, la commission médico-soignante d’établissement serait très difficile à mettre en œuvre.
Aussi, mon collègue Jean-Marie Vanlerenberghe suggère la suppression de cet article. Selon lui, la proposition émise par la conférence et l’association des directeurs de soins et reprise par la mission Claris, à savoir une sous-commission mixte de la CME réunissant des praticiens, soignants, usagers et représentants de ville, fragilise ce dispositif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Ma chère collègue, au cours des auditions, auxquelles vous avez pris part, nous avons recueilli une majorité d’opinions sceptiques quant à la création d’une commission médico-soignante.
C’est la raison pour laquelle nous nous sommes appliqués à apporter, à l’article 6, les modifications requises pour que sa création et son maintien restent soumis à la volonté conjointe des deux commissions formant cet ensemble.
La suppression de cet article poserait un problème plus important encore. Tel qu’il est issu des travaux de la commission, il établit – enfin ! –, à la demande des personnels paramédicaux, le principe d’une élection du président de la commission des soins infirmiers ; bien entendu, il ne me paraît pas souhaitable de revenir sur cette avancée.
Aussi, je sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrais un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Doineau. Je retire cet amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 69 rectifié est retiré.
L’amendement n° 125, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le chapitre VI du titre IV du livre Ier de la sixième partie du code de la santé publique est complété par un article L. 6146-12 ainsi rédigé :
« Art. L. 6146-12. – Par dérogation aux articles L. 6144-1, L. 6144-2 et L. 6146-9, le directeur peut décider, sur proposition conjointe des présidents de la commission médicale d’établissement et de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques, après consultation du conseil de surveillance, la création d’une commission médico-soignante d’établissement se substituant à ces deux commissions.
« Cette décision doit recueillir préalablement l’avis conforme de la commission médicale d’établissement et de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques.
« La commission médico-soignante ainsi créée se substitue à la commission médicale d’établissement et à la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques en ce qui concerne les compétences qui leur sont respectivement attribuées par le présent code.
« La commission médico-soignante élit son président parmi les représentants des personnels médicaux, odontologiques, maïeutiques et pharmaceutiques. Le coordonnateur général des soins infirmiers en est le vice-président.
« Le président et le vice-président de la commission médico-soignante assurent respectivement les compétences attribuées par le présent code au président de la commission médicale d’établissement et au président de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques.
« La composition et les règles de fonctionnement de la commission médico-soignante sont fixées par le règlement intérieur de l’établissement. L’ensemble des professions médicales et paramédicales est équitablement représenté au sein de la commission médico-soignante d’établissement.
« La commission médico-soignante d’établissement est dissoute, après information du conseil de surveillance, sur décision du directeur de l’établissement s’il constate des manquements ou dysfonctionnements dans la mise en œuvre du dispositif ou, le cas échéant, sur saisine de la majorité des membres de la commission représentant des personnels médicaux, odontologiques, maïeutiques et pharmaceutiques ou de la majorité des membres de la commission représentant des personnels infirmiers, de rééducation et médico-techniques. »
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Cet amendement vise à rétablir la rédaction de l’article 6 antérieurement aux modifications apportées par la commission des affaires sociales du Sénat, qui permet d’autoriser, sous la forme d’un droit d’option, le regroupement de la commission médicale d’établissement et de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques, pour les seuls établissements qui le souhaitent.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Comme je l’indiquais lors de l’examen de l’article 5, le Gouvernement souhaite rétablir la plupart des articles relatifs à la gouvernance hospitalière dans leur version issue des travaux de l’Assemblée nationale.
Or une telle réécriture serait particulièrement fâcheuse pour cet article : je viens de l’indiquer, c’est celui où la commission a décidé d’introduire le principe de l’élection du président de la commission des soins infirmiers. Il s’agit d’une revendication forte des acteurs que nous avons auditionnés. J’ajoute que cette demande est pleinement en phase avec les recommandations et du Ségur et du rapport Claris.
J’émets donc un avis défavorable, à moins que le Gouvernement ne retire son amendement ! (Sourires.)
M. le président. L’amendement n° 88, présenté par Mme Le Houerou, M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. La dynamique de mutualisation à l’œuvre au sein des groupements hospitaliers de territoire, les GHT, est beaucoup trop récente pour que l’on puisse décider son extension.
Dans son récent rapport relatif au bilan d’étape de la mise en œuvre des GHT, l’inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, estime que les gains de la mutualisation des ressources des GHT sont difficiles à évaluer.
Or ce sont précisément ces bénéfices qui ont justifié sa mise en œuvre, dans le cadre de la loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santé.
Si le GHT a bien pour intérêt de mutualiser les ressources, quelles qu’elles soient, pour créer une dynamique de territoire autour d’un projet médical partagé, il n’a pas pour autant de personnalité morale et n’a pas à décider de l’affectation de telle ou telle ressource. Sa vocation est que les établissements d’un même territoire n’agissent pas en concurrence, mais en complémentarité.
Or, en matière de mutualisation, dès qu’une porte est ouverte, l’agence régionale de santé, l’ARS, et donc l’établissement support en profitent pour prendre la compétence pleine et entière.
À mon sens, de tels procédés traduisent une confusion entre mutualisation et transfert de compétence. Les hôpitaux qui ne sont pas support perdent ainsi tout pouvoir et le conseil de surveillance n’a plus aucun regard sur les mutualisations.
La mutualisation est bonne en théorie ; en pratique, elle pose quelques problèmes. En particulier, j’y insiste, elle ôte tout pouvoir et toute marge de manœuvre aux établissements de premier rang. C’est une manière de centraliser les décisions et la gestion relatives aux établissements support.
Or il convient de préserver leur autonomie et de conforter leur capacité à répondre aux besoins des territoires en matière de soins.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Conformément à ce que j’ai déjà indiqué, la commission des affaires sociales conserve une position de vigilance vis-à-vis des GHT, sans pour autant y être foncièrement défavorable.
Cet amendement, qui vise à supprimer l’association de la commission des soins infirmiers à la discussion du projet médical partagé du GHT, laquelle favorise pourtant une meilleure association des parties, me semble aller à l’encontre de ce que nous appelons tous de nos vœux : des GHT plus attentifs à la volonté de leurs parties.
Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 85, présenté par M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy et Briquet, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 16 à 23
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. L’ouverture de la possibilité pour le directeur de fusionner la commission médicale d’établissement (CME) et la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques est, à nos yeux, un non-sens.
En ce qui concerne, d’abord, la ligne politique, l’objectif est d’aller vers une structure moins verticale et plus horizontale pour la prise de décision à l’hôpital. Pour ce faire, il nous semble préférable de préserver la commission des soins infirmiers et la parole des soignants non-médecins et de valoriser leur place dans la prise de décision.
La structure décisionnelle de l’hôpital se dirigerait ainsi vers un trio, au sein duquel un dialogue fructueux s’établirait – c’est souvent déjà le cas d’ailleurs – entre la commission des soins infirmiers, la CME et la direction administrative.
Cet article va dans le sens inverse, en permettant la création d’une commission unique qui entraînerait une dévalorisation de la commission des soins infirmiers dans la mesure où, selon le projet du Gouvernement, elle sera automatiquement présidée par un médecin et vice-présidée par le coordinateur général des soins, lequel, à l’inverse du président de la CME, n’est pas élu par les membres de la commission, mais désigné par le directeur. Cela véhicule un message d’irresponsabilité vis-à-vis des soignants non-médecins qui n’est pas très valorisant.
Du point de vue de la réalisation, ensuite, l’idée de fusionner les deux commissions peut sembler louable pour lutter contre les silos ; en l’espèce, elle est inutile. Le président de la conférence nationale des CME des centres hospitaliers pointe avec justesse plusieurs failles pratiques : que dire de l’effectivité d’une commission, dont le président serait élu par les membres de la CME et le vice-président désigné de facto par le directeur d’établissement ? Que dire de l’effectivité d’une commission, dont le président et le vice-président n’entretiendraient pas de lien hiérarchique et conserveraient leurs compétences respectives d’anciens présidents des commissions concernées ?
En ce qui concerne les personnels, enfin, l’idée fait quasiment l’unanimité contre elle, qu’il s’agisse de la conférence nationale des présidents de CME des centres hospitaliers ou des professions soignantes non-médecins.
Cette commission souffre donc d’un double défaut conceptuel et sa naissance n’est clairement pas souhaitable. Je reprends, en conclusion, les mots du président de la conférence nationale des CME des centres hospitaliers : « Tout cela, en vérité, n’a pas de sens ! »
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission des affaires sociales n’est pas défavorable à la possibilité de recourir à la commission médico-soignante, à la condition de maintenir notre rédaction qui renforce le droit des commissions constituantes d’en sortir, dès lors que la majorité de l’une d’entre elles le souhaite.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Nous sommes ici au cœur de la gouvernance des hôpitaux ! L’émergence du projet de soins infirmiers et de la commission des soins infirmiers marque la reconnaissance de l’autonomie de ce projet dans les établissements de santé. Je suis donc très surpris de cette marche arrière.
La rédaction proposée par la commission est, certes, plus favorable que celle du Gouvernement, mais elle aboutit au même résultat : la disparition de leur commission ne relèvera pas nécessairement d’une volonté des soignants non-médecins.
Cette mesure consacre la primauté absolue de la CME sur l’ensemble des politiques de soins et marque, à mon sens, un recul au regard de la reconnaissance, engagée ces dernières années, de la profession infirmière, à laquelle on adresse ainsi un message très négatif.
M. le président. Madame la ministre déléguée, mes chers collègues, il est minuit. Je vous propose de prolonger notre séance jusqu’à minuit et demi afin d’aller plus avant dans l’examen de ce texte.
Il n’y a pas d’opposition ?…
Il en est ainsi décidé.
Article 6 bis
L’article L. 6143-7 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° (nouveau) Au 2°, après le mot : « établissement », sont insérés les mots : « et le président de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques, et après avoir recueilli l’avis de ces deux commissions, » ;
2° Au 4°, après le mot : « établissement », sont insérés les mots : « et de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques ».
M. le président. L’amendement n° 118 rectifié bis, présenté par MM. Kern et Mizzon, Mme Billon, MM. Canevet et P. Martin, Mme Férat, MM. Le Nay et Longeot et Mme de La Provôté, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 2
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
1° Le 2° est ainsi rédigé :
« 2° Décide, conjointement avec le président de la commission médicale d’établissement du projet médical et de la structuration des activités médicales, des nominations de responsables médicaux, de la priorisation des choix d’investissement, de la politique et du programme d’amélioration continue de la qualité, de la sécurité et de la pertinence des soins, ainsi que des conditions d’accueil et de prise en charge des usagers ; »
II. – Compléter cet article par deux alinéas et un paragraphe ainsi rédigés :
…° Le 7° est ainsi rédigé :
« 7° Conjointement avec le président de la commission médicale d’établissement, arrête l’organisation interne des activités cliniques et médico-techniques de l’établissement et signe les contrats de pôle d’activité en application de l’article L. 6146-1 ; ».
…. – Après le premier alinéa de l’article L. 6143-7-3 du code de la santé publique, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Le président de la commission médicale d’établissement cosigne avec le directeur les décisions conjointes relevant du 2° et du 7° de l’article L. 6143-7.
« Il appose un visa attestant de l’engagement de la communauté médicale, pharmaceutiques et odontologique sur les volets médicaux des documents engageant juridiquement l’établissement. »
La parole est à M. Claude Kern.
M. Claude Kern. Il est retiré, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 118 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l’article 6 bis.
(L’article 6 bis est adopté.)
Article 7
(Suppression maintenue)
M. le président. L’amendement n° 146, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L’article L. 6112-3-1 du code de la santé publique est ainsi rétabli :
« Art. L. 6112-3-1. – Sauf mise en place d’une offre de santé au moins équivalente, pratiquant le tiers payant et les tarifs opposables, garantie à la population concernée, aucun établissement public de santé ne peut être fermé ou se voir retirer son autorisation, ni donner lieu à une décision en application de l’article L. 6141–7–1 susceptible de réduire l’offre de santé sur le territoire concerné, sans l’avis favorable du conseil de surveillance de l’établissement et du conseil territorial de santé.
« La commission médicale d’établissement et le comité technique d’établissement sont également consultés. Leur avis est joint à ceux prononcés par le conseil de surveillance de l’établissement et le conseil territorial de santé et adressé au directeur général de l’agence régionale de santé qui en tire toutes conséquences utiles.
« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux établissements publics de santé qui présentent un risque grave et imminent pour la santé et la sécurité des personnels, de ses usagers ou des personnes présentes à d’autres titres dans l’établissement. »
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Le 18 novembre dernier, le ministre des solidarités et de la santé déclarait : « Je sors totalement du dogme de la réduction du nombre de lits, lorsqu’il y a transformation de projets hospitaliers. C’est terminé ! »
Sur le terrain, pourtant, les projets de restructuration hospitalière sont toujours à l’ordre du jour, prévoyant la fermeture de centaines de lits et la suppression de nombreux emplois hospitaliers. J’ai à l’esprit l’exemple de l’hôpital Bichat, où ma collègue Laurence Cohen s’est rendue pour soutenir les personnels et les usagers qui refusent sa fusion avec l’hôpital Beaujon et, au passage, la suppression de quatre cents lits.
S’agissant de la création de mastodontes hospitaliers, l’expérience de la pandémie devrait nous conduire à nous interroger davantage, me semble-t-il, sur la pertinence de faire se croiser encore plus de malades au même endroit. Surtout, la fermeture d’hôpitaux, de services et de lits est en complète contradiction avec les besoins.
Cet exemple parisien est loin d’être un cas isolé. Dans le département du Val-de-Marne, un projet de fusion de la Fondation Vallée et de l’hôpital Paul-Guiraud a été présenté aux représentants du personnel. Des projets de restructuration existent aussi en Seine-Saint-Denis, dans l’Essonne ou dans le Pas-de-Calais, où le nouvel hôpital de Lens va être construit avec cent cinquante à deux cents lits en moins, alors que cet établissement a déjà perdu plusieurs centaines de lits ces dernières années. Une restructuration est également prévue à Marseille.
Finalement, sur l’ensemble du territoire, ce sont trois mille quatre cents lits hospitaliers qui ont été fermés en 2019 et quatre mille en 2018. Ces chiffres sont éloquents ! S’y ajoute la fermeture de 40 % des maternités, comme celle de Dinan, dans les Côtes-d’Armor, qui ne réalise plus d’accouchements depuis le 15 novembre.
Nous sommes face à une dynamique globale de disparition du service public de santé et le Gouvernement ne fait rien pour la contrecarrer. Pire, il aggrave la situation, en renforçant l’autonomie des hôpitaux et la logique managériale.
Nous souhaitons concrétiser l’annonce du Gouvernement du 10 décembre dernier sur la suspension de tous les plans de réorganisation. Sur le terrain, l’inquiétude remonte chez les soignants, les responsables d’hôpitaux et les élus locaux, qui estiment que rien n’a changé. Nous demandons donc l’instauration d’un moratoire sur l’ensemble des projets de fermeture de services, de lits et d’établissements pour lancer un débat national sur l’importance des services de santé et l’enjeu de maintenir des places pour les patientes et les patients.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La méthode défendue par les auteurs de cet amendement, consistant à figer l’offre de soins et à ne consentir d’évolutions que dans le sens d’une couverture plus grande, me paraît quelque peu excessive.
Il ne faut pas oublier que l’offre de soins, comme tout maillage, se doit de répondre aux évolutions démographiques, économiques et sociales des territoires qu’elle couvre. À ce titre, inscrire un moratoire dans la loi ne me semble pas adapté.
La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Je veux bien entendre que notre proposition apparaisse comme figeant l’offre de soins, mais les évolutions que nous connaissons sur le terrain ne répondent absolument pas aux besoins en termes de santé.
Les exemples avancés par Cathy Apourceau-Poly – chacun d’entre nous, me semble-t-il, pourrait en présenter d’autres – démontrent que notre capacité hospitalière est insuffisante, comme son maillage territorial, et qu’il n’y a pas de complémentarité entre l’offre hospitalière et la médecine de ville.
Ce sont là des réalités ; pourtant, la même politique continue à être mise en œuvre. C’est cela que nous dénonçons, sans être entendus par le Gouvernement ni, manifestement, par la majorité de droite du Sénat. Cette politique, je suis désolée de devoir le répéter, consiste à fermer des établissements : par exemple, quand on construit l’hôpital Grand Paris Nord, on ferme en fait deux hôpitaux, Bichat et Beaujon, et on supprime au passage trois cents lits.
Mes chers collègues, pensez-vous franchement qu’il y a trop de lits d’hôpital en France ? Est-ce vraiment cela que la pandémie a démontré ? Non !
Je veux bien que nous soyons taxés de figer les choses, mais la politique qui est menée ne convient pas et nous conduit dans le mur. Il ne suffit pas de prononcer de temps en temps quelques mots d’effroi, si l’on continue à voter des textes qui affaiblissent notre système de santé.
L’objectif de cet amendement est d’ouvrir le débat. Écoutez les acteurs de terrain et mettez un terme à ces fermetures, elles sont mortifères !
M. le président. L’amendement n° 39 rectifié bis, présenté par MM. Chasseing, Guerriau, Médevielle, Menonville et Wattebled, Mme Mélot, MM. Lagourgue, A. Marc, Pellevat, Canevet et Laménie, Mme Garriaud-Maylam, M. Lefèvre, Mme F. Gerbaud, MM. Moga, Genet, Meurant, Fialaire, Longeot et Sautarel, Mme Létard et M. Henno, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après l’article L. 6132-1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 6132-1-… ainsi rédigé :
« Art. L. 6132-1-…. – Lorsqu’un poste de directeur d’établissement partie du groupement hospitalier du territoire devient vacant, l’intérim est confié au directeur de l’établissement support, sauf opposition motivée du directeur général de l’agence régionale de santé compétente, notamment en raison de l’importance de la taille du groupement.
« À l’issue d’une période qui ne peut excéder un an, le directeur général de l’agence régionale de santé peut confier la direction de l’établissement partie à l’établissement support, après avis du comité stratégique mentionné à l’article L. 6132-2, du comité territorial des élus locaux mentionné à l’article L. 6132-5 et du conseil de surveillance de l’établissement partie. »
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Cet amendement vise à rétablir l’article 7 dans la rédaction adoptée par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, prévoyant la poursuite de l’intégration des GHT par le prisme des directions communes.
Les postes de direction vacants d’établissements parties au GHT seront, dans un premier temps, confiés à l’établissement support pour une durée d’un an, à l’issue de laquelle le directeur de l’ARS pourra décider de poursuivre ou non la direction commune, après avis du comité territorial des élus du département, du comité stratégique du GHT et du conseil de surveillance de l’établissement.
Sous réserve que les élus et les responsables des centres hospitaliers régionaux (CHR) soient d’accord, les GHT départementaux peuvent tout à fait apporter une vision stratégique pour la prise en charge de la santé sur le territoire. Il s’agit donc de permettre, à partir de l’établissement support, de poursuivre l’activité dans certains établissements isolés, sans avoir recours à l’intérim.
À mon sens, un GHT départemental avec un projet territorial de santé solidaire est idéal, lorsque les conditions sont réunies. Il ne s’agit pas du tout de supprimer des lits, mais, au contraire, d’en conserver et de maintenir l’activité hospitalière par l’intermédiaire d’un établissement support, sous réserve qu’il existe une dynamique et une entente en ce sens.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission demande le retrait de cet amendement qui vise à rétablir une disposition qui a fait l’unanimité contre elle à l’Assemblée nationale : le caractère systématique d’une direction commune de l’établissement support d’un GHT et d’un établissement qui en fait partie en cas de vacance de poste dans ce dernier.
Les débats ont clairement montré que l’opinion publique n’était pas encore prête à une pareille mesure et la commission n’est elle-même pas encore tout à fait convaincue de l’innocuité du modèle des GHT sur l’offre territoriale de proximité.
Si cet amendement n’était pas retiré, l’avis serait donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, l’article 7 demeure supprimé.
Articles additionnels après l’article 7
M. le président. L’amendement n° 89 rectifié, présenté par MM. P. Joly et Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Bonnefoy, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 6132-1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 6132-1-… ainsi rédigé :
« Art. L. 6132-1-…. – Lorsque les organes et instances du groupement sont réunis pour délibérer par vote sur décision, il est établi le principe de l’attribution d’une voix par membre ayant voix délibérative. Ce principe concerne le comité stratégique, le comité territorial des élus locaux, le comité des usagers ou la commission des usagers du groupement et la conférence territoriale de dialogue social. »
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. Cet amendement concerne le fonctionnement interne des groupements hospitaliers de territoire. Deux documents sont obligatoires : la convention constitutive et le règlement intérieur qui vient la compléter.
Toutefois, pour permette de concilier la nécessaire autonomie des établissements et le développement de synergies territoriales et afin que chacun puisse être acteur du projet de territoire, il est proposé qu’un principe unique s’applique aux règles de vote au sein des organes et instances du groupement, qui ne pourrait être modifié par l’écriture d’un règlement intérieur : l’attribution d’une voix par membre ayant voix délibérative plutôt qu’une pondération des voix en fonction de l’activité de chaque établissement.
C’est souvent la formule de la pondération des voix qui est privilégiée ; nous proposons pour notre part que chaque membre dispose d’une voix.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L’idée de cet amendement est intéressante et n’est pas concurrente avec l’habilitation donnée au Gouvernement par le Parlement, puisqu’elle ne touche pas à la gouvernance médicale des GHT.
La commission s’en remet donc à la sagesse du Sénat, même si elle sera attentive à l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Nous estimons que cette liberté est essentielle et qu’il est inopportun de rigidifier le dispositif, s’agissant des modalités de vote, au risque de créer des réticences et de ne pas faciliter son acceptation par l’ensemble des partenaires.
Pour cette raison, l’avis est défavorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 7.
L’amendement n° 166, présenté par MM. Théophile, Iacovelli, Lévrier, Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase du premier alinéa et au deuxième alinéa du 1° du I de l’article L. 6132-3 du code de la santé publique, après les mots : « système d’information hospitalier convergent », sont insérés les mots : « et interopérable ».
La parole est à M. Dominique Théophile.
M. Dominique Théophile. Le numérique a eu une place centrale lors du Ségur de la santé ; 2 milliards d’euros d’investissements seront ainsi consacrés dans les prochaines années à assurer l’interopérabilité, la réversibilité, la convergence et la sécurité des systèmes d’information en santé.
Pour autant, le manque d’efficacité actuelle dans l’échange d’informations entre professionnels de santé, parfois au sein d’un même établissement, nécessite d’inscrire explicitement dans la loi la recherche d’interopérabilité. Cet amendement prévoit donc que l’établissement support des GHT s’assure que le système d’information hospitalier soit non seulement convergent, mais également interopérable.
S’il était voté, cet amendement permettrait à chaque GHT d’être acteur de cette interopérabilité – elle est cruciale pour améliorer notre système et simplifier les échanges entre professionnels de santé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 7.
L’amendement n° 43 rectifié, présenté par MM. Kern, Lafon et Longeot, Mme Billon, MM. Henno et Bonneau, Mme Férat, M. Moga, Mme Schalck, M. Le Nay, Mme Vérien, MM. Chauvet, Duffourg, P. Martin et Cigolotti, Mmes Loisier et Herzog, M. Levi, Mme Jacquemet, M. J.M. Arnaud et Mmes Gatel et Morin-Desailly, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 6132-5 du code de la santé publique est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Les demandes des établissements souhaitant modifier le nombre d’établissements parties à un groupement existant, ou créer, à l’initiative d’au moins deux établissements parties, un nouveau groupement hospitalier de territoire en modifiant le périmètre initialement fixé dans le cadre du I du présent article, sont transmises au directeur général de l’agence régionale de santé accompagnées des principales orientations d’un futur projet médical partagé intégrant une convention d’association telle que mentionnée au III de l’article L. 6132-1.
« Après concertation des directoires, avis des commissions médicales et des conseils de surveillance des établissements souhaitant constituer un nouveau groupement, cette demande est transmise au directeur général de l’agence régionale de santé qui rend une décision motivée autorisant sa création. Dans l’hypothèse où le directeur général de l’agence régionale de santé estime devoir y donner une suite défavorable, au regard du schéma régional de santé tel que prévu à l’article L. 1434-3, la décision est motivée.
« La convention constitutive du groupement dont sont issus les établissements intégrant un nouveau groupement hospitalier de territoire est modifiée par voie d’avenant, par les établissements encore parties, selon les mêmes règles que celles ayant présidé à son adoption, pour tenir compte de la nouvelle composition du groupement. »
La parole est à M. Claude Kern.
M. Claude Kern. Malheureusement, après plus de quatre années et à l’aune de la crise sanitaire majeure qui a frappé notre système de santé, de réelles difficultés subsistent ou sont apparues dans plusieurs établissements et groupements hospitaliers de territoire.
Ces difficultés, relevées tant par l’inspection générale des affaires sociales dans son rapport portant bilan d’étape des GHT de décembre 2019 que par la Cour des comptes dans son rapport annuel d’octobre 2020, sont liées à des problématiques de dimensionnement, de pertinence territoriale, de management ou de cohérence avec les filières de soins.
La disposition nouvelle prévue dans cet amendement vise à valoriser la dynamique née des accords du Ségur de la santé et à rendre tangible la confiance placée dans les acteurs de santé du territoire. En outre, elle répond pleinement à l’objectif de simplification des organisations.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Contrairement à ce qui est indiqué dans son objet, cet amendement aggraverait la complexité qui entoure la mise en place des GHT, en permettant aux établissements parties de superposer les adhésions.
Si l’amendement n’était pas retiré, l’avis de la commission serait donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Kern, l’amendement n° 43 rectifié est-il maintenu ?
M. Claude Kern. Je ne vois pas comment cet amendement pourrait être satisfait ! Je prends l’exemple du GHT de mon territoire : le rapport indique que son périmètre actuel n’est pas adapté et que la création d’un second GHT permettrait de disposer d’une gradation de l’offre de soins beaucoup plus pertinente, d’une dynamique et d’une maturité collectives, ainsi que d’une plus grande cohérence territoriale.
Je ne vois pas en quoi cet amendement serait satisfait, je le répète, puisque, aujourd’hui, on ne répond pas aux besoins de soins sur le territoire. C’est pourquoi je le maintiens.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 43 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 7 bis
La sixième partie du code de la santé publique est ainsi modifiée :
1° A (nouveau) À l’intitulé du livre III et du titre Ier du même livre III, après le mot : « urgente, », sont insérés les mots : « service d’accès aux soins, » ;
1° L’article L. 6311-2 est ainsi modifié :
a) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ces unités participent au service d’accès aux soins mentionné à l’article L. 6311-3. » ;
b) (Supprimé)
c) Au troisième alinéa, les mots : « peut être » sont remplacés par le mot : « est » ;
2° Après le chapitre Ier du titre Ier, il est inséré un chapitre Ier bis ainsi rédigé :
« CHAPITRE IER BIS
« Service d’accès aux soins
« Art. L. 6311-3. – Le service d’accès aux soins a pour objet d’évaluer le besoin en santé de toute personne qui le sollicite, de délivrer à celle-ci les conseils adaptés et de faire assurer les soins appropriés à son état et adaptés à ses besoins spécifiques.
« Il assure une régulation médicale commune pour l’accès aux soins, qui associe le service d’aide médicale urgente mentionné à l’article L. 6311-2 et une régulation de médecine ambulatoire en établissant des horaires de permanence des soins adaptés aux besoins de santé de la population.
« Il est organisé et géré par les professionnels de santé du territoire exerçant en secteur ambulatoire et en établissement de santé.
« Il est accessible gratuitement sur l’ensemble du territoire.
« Dans le respect du secret médical, les centres de réception et de régulation des appels sont interconnectés avec les dispositifs des services de police et des services d’incendie et de secours.
« Les modalités de mise en œuvre du présent article sont fixées par voie réglementaire. »
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, sur l’article.
Mme Émilienne Poumirol. Je souhaite revenir sur la création des services d’accès aux soins (SAS).
Dans sa rédaction initiale, l’article 7 bis prévoyait la création d’un service d’accès aux soins avec un nouveau numéro dit unique, le 113. Fort heureusement, l’Assemblée nationale a supprimé toute la partie concernant ce numéro, lequel n’avait rien d’unique, puisqu’il s’ajoutait au 15, l’actuel numéro du SAMU, au 112, le numéro européen d’urgence, sans parler du 17, du 18, du 39 66, du 115, etc.
Le Président de la République avait promis dès 2017 la mise en place partout du 112, parfaitement connu de tous les Européens. En France, plus de la moitié des appels qui arrivent aujourd’hui au SAMU ou au service départemental d’incendie et de secours (SDIS) passe par le 112.
Un numéro santé n’aurait aucun sens, comme l’a montré lors du premier confinement l’embolisation des centres de réception et de régulation des appels (CRRA) des SAMU. Cette embolisation, qui introduit un risque de retard du décroché pour les urgences vitales, a été la conséquence du conseil donné par le Gouvernement de composer le 15 pour toute question relative au covid – au passage, le Gouvernement a allègrement oublié le rôle des médecins généralistes…
Il ne s’agit donc pas seulement de distinguer santé et secours, mais aussi ce qui est urgent ou ressenti comme tel, qui correspond au 112, et ce qui relève des soins non programmés, à savoir les conseils, les rendez-vous et ce qu’on appelle souvent la « bobologie », qui correspond au 116 117.
Les services des urgences sont aujourd’hui débordés par des patients dont l’état de santé ne justifie en rien leur accueil à l’hôpital : on estime que ces patients représentent 30 % au moins pour les urgences adultes et 40 % pour les urgences pédiatriques ; ces chiffres montent à 60 % ou 70 %, si l’on prend en compte les patients qui ne subissent pas plus d’un examen lors de leur passage aux urgences, par exemple une radio ou une prise de sang. Il faut donc absolument réguler l’amont des urgences.
Le SAS peut constituer une bonne réponse à ce problème, à la condition qu’une coopération réelle et efficace existe entre l’hôpital et la ville, ce qui a toujours été compliqué, jusqu’à présent, à mettre en place.
Le SAS est vécu comme une reconnaissance du rôle majeur des SAMU en ce qui concerne les urgences, rôle que nul ne conteste. Cette reconnaissance s’accompagne de moyens supplémentaires que les directeurs de SAMU ont accueillis avec plaisir au vu des difficultés récurrentes qu’ils rencontrent dans le cadre du budget général des hôpitaux.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Émilienne Poumirol. Une réponse adaptée doit être apportée ; elle passe par une plateforme commune sur les territoires – la commission l’a clairement indiqué – et une coopération effective avec les maisons pluridisciplinaires de santé, les centres de santé et les hôpitaux de proximité, lesquels pourraient être les opérateurs des SAS.
M. le président. L’amendement n° 110, présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, MM. Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. En cohérence avec ce qui vient d’être dit, allons jusqu’au bout et supprimons cet article 7 bis !
La proposition de loi a souvent été l’occasion de faire passer en catimini des mesures disparates, mal préparées et non concertées.
L’article 7 bis en est l’exemple : introduit par un amendement en commission à l’Assemblée nationale, il entendait créer un numéro national unique santé dévolu aux services d’accès aux soins, incluant le numéro d’aide médicale d’urgence.
Nous partageons la nécessité de mieux coordonner la gestion des urgences, comme celle de la permanence des soins, mais cet article n’unifie pas les urgences – cela nous semble pourtant constituer un préalable –, tout en incluant la permanence des soins, ce qui inquiète légitimement beaucoup d’acteurs, des médecins généralistes aux sapeurs-pompiers.
Nous ne sommes convaincus ni de la méthode utilisée ni du bien-fondé de cet article.
Sur la méthode, les changements devraient être opérés de manière concertée : on ne met pas en œuvre une telle réorganisation sans réaliser une étude d’impact ni attendre le résultat des expérimentations en cours et en ignorant les alertes des acteurs.
Sur le fond, mettre en place un numéro unique santé incluant le seul service d’aide médicale d’urgence n’apporte pas de réponse aux problèmes de coordination des urgences, qui sont connus de longue date.
Nous aurions ainsi, d’un côté, un numéro unique santé pour les problèmes de santé urgents comme pour ceux qui ne relèveraient pas d’une urgence proprement dite et, d’un autre côté, d’autres numéros de recours d’urgence. Où est donc la simplification ?
Comme le notait la Fédération nationale des sapeurs-pompiers, créer un numéro santé 113, c’est renoncer à faire du 112, numéro d’urgence européen, le numéro unique pour tous les appels de secours d’urgence relevant des SAMU, de la police, de la gendarmerie et des sapeurs-pompiers, alors même que le Président de la République se disait, en octobre dernier, favorable à l’expérimentation régionale d’un numéro unique d’urgence.
Il faut maintenant être cohérent et prendre le temps de proposer de véritables réponses à long terme. C’est pourquoi le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires propose de supprimer cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La Commission partage certaines inquiétudes exprimées. Les praticiens libéraux se sont eux aussi montrés vigilants quant aux conditions de mise en place de ce service d’accès aux soins qui est en cours d’expérimentation dans des sites pilotes.
Toutefois, la rédaction finalement adoptée par l’Assemblée nationale ne fait plus référence à un numéro unique pour laisser de la souplesse en fonction des organisations territoriales préexistantes.
Dans ces conditions, la commission n’a pas vu d’obstacle à l’inscription des SAS dans la loi sans attendre la fin des expérimentations.
Son avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Ne perdons pas de vue que les territoires sont divers.
Là où il y a un CHR, un médecin généraliste de garde peut recevoir les patients qui ont un petit bobo, pour éviter l’embolie des urgences.
Dans un territoire dépourvu d’hôpital, l’accès aux soins non programmés doit reposer, selon moi, sur les maisons de santé pluridisciplinaires dans le cadre d’une communauté professionnelle territoriale de santé, structure mise en place par les professionnels en liaison avec l’ARS. Les maisons de santé seraient de garde à tour de rôle pour prendre en charge dans la journée les patients ayant besoin d’un soin non programmé – ainsi, ils ne termineraient pas aux urgences pour un bobo.
Quel que soit le numéro mis en place, c’est ainsi que l’on devrait organiser la prise en charge de ces soins au niveau du territoire.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. La question n’est pas de savoir si l’on est pour ou contre les SAS.
Lancé par Agnès Buzyn dans le cadre du plan de refondation des urgences, ce dispositif est en cours d’expérimentation. En Haute-Garonne, en Ille-et-Vilaine ou en Moselle, les résultats ne sont pas les mêmes – c’est d’ailleurs logique pour une expérimentation. Dans certains territoires, la situation est compliquée et la crise de la covid n’a évidemment rien arrangé.
En tout cas, il est prématuré d’inscrire dans la loi un dispositif, dont l’expérimentation est loin d’être suffisamment avancée. Quant à écrire dans la loi qu’il existe des SAS, cela me paraît quelque peu déclaratif…
Dans ces conditions, nous voterons l’amendement de Mme Poncet Monge, sans qu’il s’agisse de marquer une défiance à l’égard de l’expérimentation en cours ni d’en nier l’intérêt. Liée aussi bien à la permanence des soins ambulatoires qu’au fonctionnement de l’hôpital et à l’aval, la question des urgences est complexe – les rapports n’ont pas manqué ces dernières années pour le souligner. Le SAS peut être une réponse intéressante, mais il est urgent d’attendre que son expérimentation se conclue.
En tout cas, il est heureux que l’instauration du 113 ne figure finalement pas dans le texte, car la mesure est extrêmement polémique – pour notre part, nous y sommes absolument opposés.
Par ailleurs, je sais bien que les enjeux de financement ont été écartés de la proposition de loi, mais celui des SAS, qui est pour l’instant assuré par le fonds d’intervention régional, reste une question en suspens.
M. le président. L’amendement n° 136, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Après le mot : « doit », la fin de la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 6315-1 du code de la santé publique est ainsi rédigée : « s’assurer de la continuité des soins y compris la nuit, les week-ends et les jours fériés dans le territoire. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. La difficulté d’accès aux soins est l’un des problèmes majeurs que rencontre notre système de santé.
Un numerus clausus trop bas pendant des années, ce que nous dénoncions, a conduit à la pénurie actuelle de médecins, généralistes ou spécialistes, qui entraîne des délais d’attente inacceptables partout sur le territoire, des déserts médicaux dans bien des endroits et, au bout de la chaîne, un engorgement des urgences. La saturation des urgences est amplifiée par le vieillissement de la population et l’augmentation des maladies chroniques.
Mais nous ne pouvons pas nier non plus que l’engorgement des services d’urgences hospitalières peut s’expliquer, en partie, par le manque d’implication des médecins libéraux dans la permanence des soins. Le décret de 2003 dit Mattei en est partiellement responsable : depuis lors, les gardes de nuit, des week-ends et des jours fériés ne sont plus obligatoires, mais basées sur le volontariat.
Chacun d’entre nous se souvient sans doute de la grève des médecins libéraux qui a précédé ce décret, en 2002. Nous entendons néanmoins refaire des gardes une obligation déontologique, non pas comme une punition infligée aux médecins, mais plutôt comme une nécessité de service public donnant lieu à une compensation en temps de repos et en rémunération.
Dans mon département, le Val-de-Marne, douze services d’accueil médical initial (SAMI) assurent les urgences médicales le soir, le week-end et les jours fériés. Ce système fonctionne grâce à l’implication du conseil départemental de l’ordre et d’une équipe de médecins volontaires, mais aussi grâce à l’engagement de collectivités territoriales, qui participent à certains frais – locaux, vigiles, électricité. Seulement, aujourd’hui, ces médecins volontaires ont vieilli et ne trouvent pas de relève.
L’article 7 bis, avec les clarifications apportées par notre commission sur l’initiative du rapporteur, constitue un début de réponse. Reste que, au vu de la démographie médicale, il nous paraît plus qu’urgent de supprimer le décret Mattei, encore moins adapté aujourd’hui qu’en 2003, compte tenu de la détérioration de notre système de santé.
En outre, ne croyez-vous pas qu’une généralisation du dispositif en 2022 est tardive ? Les urgentistes sont à bout !
J’insiste : pour notre groupe, il convient de travailler en profondeur sur la complémentarité médecine de ville-hôpital, et non de jouer la mise en concurrence public-privé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Les professionnels libéraux s’organisent dans le cadre de la permanence des soins pour prendre en charge les soins non programmés. Nous connaissons – et subissons – les limites de ce système, mais je doute que le rétablissement des gardes contribue à l’attractivité des territoires sous-dotés en praticiens libéraux. J’émets donc, à contrecœur, un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Mme Cohen soulève une fort bonne question et il ne suffit pas, pour y répondre, de dire qu’on a mal au cœur, ce qui est notre cas à tous !
Je partage l’argumentation du rapporteur. Nous qui plaidons beaucoup pour la réduction du temps de travail et de meilleurs équilibres de vie, nous ne pouvons pas prévoir, en astérisque : sauf pour les médecins libéraux, qui peuvent bien travailler toute la journée, et aussi la nuit…
Pour autant, on ne résoudra pas ce problème, bien réel, en exonérant complètement les praticiens libéraux de leurs responsabilités. Du reste, nombre d’entre eux les assument, en participant à la permanence des soins ambulatoires ou en s’engageant volontairement dans des initiatives, que ce soient des SAMI ou des maisons médicales de garde ; dans ce cadre, ils jouent un rôle majeur et assument des responsabilités importantes.
Le Gouvernement doit aussi entendre la nécessité de mieux valoriser la permanence des soins ambulatoires – je sais que la commission a émis un avis favorable sur un amendement qui porte sur cette question. La participation à cette mission doit être davantage reconnue pour éviter que tout ne retombe sur l’hôpital.
Répondre avec son bon cœur, c’est très bien ; répondre avec des mesures concrètes, c’est encore mieux.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Il est évident qu’il faut organiser un système de gardes. Dans les territoires, du reste, elles se font souvent au cabinet et les médecins se déplacent très peu. De nombreux praticiens renâclent à en faire, mais il faut qu’ils prennent leurs responsabilités.
Pendant longtemps, les médecins l’ont fait, sans que cela pose problème. La mentalité a complètement changé et il faut essayer de mobiliser davantage les médecins.
M. le président. L’amendement n° 5 rectifié bis, présenté par MM. Bonne, Bascher, E. Blanc, Bouloux, Brisson, Bazin, Burgoa et Chaize, Mme Chauvin, M. Cuypers, Mmes L. Darcos et Di Folco, M. B. Fournier, Mmes Deromedi, Garriaud-Maylam, F. Gerbaud, Gruny et Guidez, MM. Henno et Husson, Mme Lassarade, M. Laménie, Mme Micouleau, M. Moga, Mme Muller-Bronn, MM. Paccaud, Rapin, Savary, Segouin et Gremillet et Mme Schalck, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Rétablir le b dans la rédaction suivante :
b) Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il doit être organisé avec les professionnels de santé du territoire exerçant en secteur ambulatoire et en établissement de santé participant à l’organisation et au fonctionnement du le service d’accès aux soins mentionné à l’article L. 6311-3. » ;
La parole est à Mme Florence Lassarade.
Mme Florence Lassarade. Cet amendement rédactionnel a été déposé par Bernard Bonne pour clarifier l’articulation entre le SAMU et le SAS. L’expression « il doit être porté avec » n’a aucune signification juridique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 126, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Remplacer les mots :
en établissant des
par les mots :
coordonnée avec les
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Le Gouvernement partage la préoccupation de la commission des affaires sociales qui a adopté un amendement destiné à organiser la permanence des soins ambulatoires pour répondre de manière qualitative aux besoins actuels de la population.
Toutefois, l’expression « en établissant des horaires de permanence des soins » introduit une forte ambiguïté sur le rôle dévolu aux SAS dans l’organisation de la permanence des soins ambulatoires.
Par conséquent, le Gouvernement vous propose de lui préférer la formulation : « coordonnée avec les horaires de permanence des soins ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Favorable.
M. le président. Mes chers collègues, nous avons examiné 126 amendements au cours de cette séance ; il en reste 35.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
9
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 18 février 2021 :
À dix heures trente :
Une convention internationale examinée selon la procédure d’examen simplifié :
Projet de loi autorisant la ratification de l’accord portant extinction des traités bilatéraux d’investissement entre États membres de l’Union européenne (procédure accélérée ; texte de la commission n° 360, 2020-2021) ;
Suite de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification (texte de la commission n° 357 rectifié, 2020-2021).
À quatorze heures trente et, éventuellement, le soir :
Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, améliorant l’efficacité de la justice de proximité et de la réponse pénale (texte de la commission n° 353, 2020-2021) ;
Projet de loi organique, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l’élection du Président de la République (texte de la commission n° 355, 2020-2021) ;
Suite de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification (texte de la commission n° 357 rectifié, 2020-2021).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le jeudi 18 février 2021, à zéro heure quarante.)
nomination de membres de deux missions d’information
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai d’une heure prévu par l’article 8 du règlement, les listes des candidatures préalablement publiées sont ratifiées.
Mission d’information sur les conditions de la vie étudiante en France
M. David Assouline, Mmes Catherine Belrhiti, Céline Boulay-Espéronnier, MM. Hussein Bourgi, Alain Cazabonne, Édouard Courtial, Mme Laure Darcos, M. Bernard Fialaire, Mmes Laurence Garnier, Béatrice Gosselin, M. Xavier Iacovelli, Mmes Victoire Jasmin, Sonia de La Provôté, M. Laurent Lafon, Mmes Vivette Lopez, Monique de Marco, Marie Mercier, Laurence Muller-Bronn, M. Pierre Ouzoulias, Mmes Vanina Paoli-Gagin, Évelyne Perrot, MM. Stéphane Piednoir et Christian Redon-Sarrazy.
Mission d’information intitulée « La méthanisation dans le mix énergétique : enjeux et impacts »
MM. Jean-Claude Anglars, Jérémy Bacchi, Bernard Buis, Patrick Chauvet, Jean-Pierre Corbisez, Thierry Cozic, Pierre Cuypers, Stéphane Demilly, Laurent Duplomb, Hervé Gillé, Daniel Gremillet, Jean-François Husson, Christian Klinger, Gérard Lahellec, Mmes Christine Lavarde, Vanina Paoli-Gagin, M. Cyril Pellevat, Mme Angèle Préville, MM. Jean-Paul Prince, Olivier Rietmann, Mme Denise Saint-Pé, MM. Daniel Salmon et Jean-Claude Tissot.
Pour la Directrice des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
ÉTIENNE BOULENGER