Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 1er. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Franck Menonville et Alain Marc applaudissent également.)
Je suis saisie de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 303, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La République, garantissant la liberté de conscience, reconnaît le droit à chacun, individuellement ou collectivement, de manifester par ses pratiques sa conviction religieuse en public. Elle garantit une stricte neutralité des personnes exerçant une mission de service public vis-à-vis de leurs usagers.
Il revient à tout organisme de droit public ou privé, chargé de l’exécution d’un service public, de garantir la mise en œuvre effective des principes de liberté, d’égalité, de fraternité, de dignité, de laïcité et de mixité sociale, dans l’exercice de ses compétences.
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Gardons à l’esprit que la loi de 1905 est une loi de liberté. Dès lors, il ne revient pas à l’État d’organiser les cultes. Le risque que présente ce texte est de transformer la loi en une loi de contrôle, de police et de répression du culte.
Nous souhaitons, avec notre amendement, réaffirmer cette vision d’une laïcité positive qui, comme je l’ai dit précédemment, assure la neutralité des pouvoirs publics à l’égard du culte et un traitement égal aux diverses expressions de celui-ci.
Cet amendement vise à rappeler que la République, qui garantit la liberté de conscience, reconnaît le droit à chacun, individuellement ou collectivement, de manifester sa conviction religieuse en public, tant que l’ordre public est préservé. Il tend en même temps à réaffirmer la garantie de la stricte neutralité des personnes exerçant une mission de service public à l’égard des usagers, quelles que soient leurs convictions religieuses.
Enfin, n’oublions pas que, parfois, le séparatisme ne naît pas d’une volonté d’opposition aux principes de la République. En revanche, les pouvoirs publics, par leur désengagement dans certains territoires, par le manque de financement des services publics et par le manque de considération accordée aux difficultés de nombreux Français, créent d’eux-mêmes ce séparatisme.
Il convient donc de réaffirmer qu’il revient à tout organisme de droit public ou privé chargé de l’exécution d’un service public de garantir la mise en œuvre effective des principes de liberté, d’égalité, de fraternité, de dignité, de laïcité et de mixité sociale dans l’exercice de ses compétences.
Mme la présidente. L’amendement n° 496 rectifié, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 1er de la loi n° 2010-1192 du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sont interdites, dans l’espace public, les tenues couvrant la tête, constituant en elles-mêmes une affirmation sans équivoque et ostentatoire des idéologies séparatistes, contraire au droit des femmes, à leur dignité, à l’égalité entre les hommes et les femmes ou résultant d’une intimidation. »
La parole est à M. Stéphane Ravier.
M. Stéphane Ravier. La femme est l’avenir de l’homme : pourtant, certains chez nous préfèrent voiler l’avenir. Pour des raisons sociales, politiques et religieuses, les femmes se couvrent de gré ou de force la tête et une partie du visage. Elles marquent ainsi un terrible aveu : celui de l’inégalité entre les hommes et les femmes. Cette conception contraire à tous nos principes et même à notre devise républicaine pourrait rester personnelle si elle n’était pas devenue un enjeu politique depuis une quarantaine d’années.
Voiles au lycée, à l’université, au travail, dans la rue, etc. Voile, hidjab, burqa, niqab, burkini : tant de mots et tant de débats qui n’auraient jamais dû se tenir en France. Peut-être que le jour où nous ne débattrons plus du voile nous pourrons réfléchir aux moyens de financer la recherche en vue de la création d’un vaccin contre un virus qui nous pourrit la vie.
C’est ce que je vous propose dans cet amendement : interdire le voile dans l’espace public et mettre fin à tous ces débats. Ainsi, la règle sera claire.
Le voile doit être interdit dans l’espace public parce que, outre son caractère discriminant, il sert aujourd’hui d’étendard aux revendications communautaires et islamistes. Par son essence même, arborer un voile est un acte séparatiste. Selon une étude de l’Institut français d’opinion publique (IFOP) de 2019, un tiers des musulmanes le portent pour revendiquer leur croyance et la supériorité de celle-ci sur notre droit, ce qui constitue déjà une volonté de trouble à l’ordre public.
Il n’y a qu’une seule loi en France, celle de la République, et qu’une communauté, la communauté nationale. Pour les islamistes, le voile constitue aussi un moyen de pression exercé sur celles qui ne le porteraient pas : elles sont marginalisées, moquées, parfois insultées et frappées parce qu’elles refusent de se soumettre. Par défaut, le voile serait un rempart contre la violence : plus d’une musulmane sur quatre le porte pour se sentir en sécurité. Il s’agit non plus de séparatisme, mais d’une véritable domination exercée par les islamistes. Ceux-ci ne veulent pas vivre en dehors de la République, ils veulent que la charia supplante nos lois, en commençant par l’asservissement des femmes.
Les élus que nous sommes ne peuvent pas cautionner cette situation. Nous devons tendre la main à toutes celles qui ne rêvent que d’une chose : être libérées et s’affranchir du voile. C’est pour libérer toutes les incarcérées dans une geôle de textile – une étoffe peut tout aussi bien priver de liberté que des barreaux – et éradiquer toute marque de conquête islamiste que nous devons, mes chers collègues, agir en votant cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 146 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano et Bilhac, Mmes M. Carrère et Pantel et MM. Requier, Roux, Fialaire, Gold, Guérini et Guiol, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 1er de la loi n° 2010-1192 du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Le port de signes ou tenues par lesquels des mineurs manifestent ostensiblement une appartenance religieuse y est interdit. Il y est également interdit le port par les mineurs de tout habit ou vêtement qui signifierait l’infériorisation de la femme sur l’homme. »
La parole est à M. Christian Bilhac.
M. Christian Bilhac. L’interdiction pour les mineurs de porter dans l’espace public tout signe religieux ostensible aurait pu constituer un signal fort envoyé à notre jeunesse. Celle-ci aurait pu y voir une garantie de la préservation de son insouciance et de sa liberté. Dans quelle mesure une République laïque peut-elle tolérer que des enfants manifestent des signes religieux au su et au vu de tous ? Ce n’est pas aux parents d’imposer des dogmes aux enfants. Aussi, il est essentiel qu’existent des espaces protecteurs, vecteurs d’émancipation, pour ces derniers.
Le présent amendement vise à interdire, dans l’espace public, le port par des mineurs de signes ou de tenues manifestant ostensiblement une appartenance religieuse. Dans cette perspective, il est indispensable d’empêcher tout moyen d’inférioriser l’enfant, notamment la jeune fille, au travers d’un vêtement qu’on lui impose.
Mme la présidente. L’amendement n° 162 rectifié bis, présenté par Mme V. Boyer, M. Boré, Mme Goy-Chavent, MM. Bascher, Meurant, Charon, Longuet et Bouchet, Mme Drexler, MM. Genet et Savary, Mme Boulay-Espéronnier, M. H. Leroy, Mmes Bourrat et Schalck et MM. Segouin et Tabarot, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le port de signes allant à l’encontre de la dignité des femmes dans l’espace public, constitué des voies publiques ainsi que des lieux ouverts au public ou affectés à un service public, est interdit aux mineures.
Le fait pour les titulaires de l’autorité parentale d’imposer ou de ne pas interdire à une mineure le port de signes allant à l’encontre de la dignité des femmes dans l’espace public est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe. Cette contravention peut faire l’objet de la procédure de l’amende forfaitaire prévue à l’article 529 du code de procédure pénale. L’obligation d’accomplir le stage mentionné au 1° de l’article 131-5-1 du code pénal peut être prononcée en même temps ou à la place de la peine d’amende.
Si cette violation est constatée à nouveau dans un délai de quinze jours, l’amende est celle prévue pour les contraventions de la cinquième classe.
Si les violations sont verbalisées à plus de trois reprises dans un délai de trente jours, les faits sont punis de six mois d’emprisonnement et de 3 750 € d’amende.
La parole est à Mme Valérie Boyer.
Mme Valérie Boyer. Je voudrais évoquer les mineurs. Il y a quelques jours, sur ces travées, nous nous sommes honorés à voter tous ensemble un texte pour les protéger. C’était l’honneur du Sénat d’avoir adopté cette proposition de loi de Mme Billon.
Aujourd’hui, nous devons nous interroger sur la symbolique du voile islamique et faire respecter l’intérêt supérieur de l’enfant, conformément à la convention de l’Organisation des Nations unies relative aux droits de l’enfant que la France a ratifiée il y a trente ans.
Le voile est fait pour dissimuler le corps des femmes au regard sexualisé des hommes. Quelle est alors la signification de voiler une fillette ? Si les défenseurs du voile évoquent le libre choix des femmes à le porter, qu’en est-il lorsqu’il s’agit d’enfants en bas âge ou de jeunes n’ayant pas atteint l’âge du consentement ?
Le voilement des mineurs peut représenter des risques pour l’épanouissement physique, mental, moral et social des enfants. L’essayiste iranienne devenue française Chahdortt Djavann, qui a porté le voile pendant dix ans, a écrit un excellent livre à ce sujet. Elle avait 13 ans quand elle s’est battue en Iran pour ne pas porter le voile ; elle a été emprisonnée pour cela.
Alors quand elle croise aujourd’hui une femme qui le porte, elle dit que cela lui est insoutenable. Voici ce qu’elle écrit : « Le voile est un symbole qui ôte toute capacité à la femme d’être un être pensant. Quand un seul de ses cheveux peut susciter le désir sexuel le plus fruste de l’homme, elle est réduite à un appât sexuel. Ce symbole pornographique autorise toute forme de violence à l’encontre des femmes et les place dans le non-droit. Quand on voile une petite fille, on lui inculque la culpabilité de sa sexualité féminine, on lui dit que ses cheveux et les formes de son corps peuvent à tout moment faire perdre le contrôle de soi aux hommes. Je demande qu’au moins dans les pays démocratiques, le port du voile par des mineures soit sanctionné. Cela relève des droits de l’homme et de la protection des mineurs. »
J’ajoute que cet interdit de liberté, d’égalité et de fraternité, au-delà du fait qu’il symbolise la domination patriarcale, la domination des femmes par les hommes, porte atteinte à la dignité des enfants de la République.
Selon la décision du Conseil constitutionnel du 19 novembre 2004, « les dispositions de l’article 1er de la Constitution aux termes desquelles “la France est une République laïque” […] interdisent à quiconque de se prévaloir de ses croyances religieuses pour s’affranchir des règles communes régissant les relations entre collectivités publiques et particuliers ».
Aussi, j’ai rectifié mon amendement afin que celui-ci tende à interdire le port par des mineures, dans l’espace public, non plus de signes ou de tenues manifestant ostensiblement une appartenance religieuse, mais « de signes allant à l’encontre de la dignité des femmes ».
Mme la présidente. Il faut conclure, vous avez déjà dépassé votre temps de parole, ma chère collègue !
Mme Valérie Boyer. Là, il s’agit d’enfants ; c’est donc encore plus grave.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 677 n’est pas soutenu.
L’amendement n° 160 rectifié, présenté par Mme V. Boyer, MM. Le Rudulier et Boré, Mme Goy-Chavent, MM. Bascher et Meurant, Mme Joseph, MM. Charon, Longuet et Bouchet, Mme Drexler, MM. Genet et Savary, Mme Boulay-Espéronnier, M. H. Leroy, Mme Bourrat et MM. Segouin et Tabarot, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le port de signes ou tenues par lesquels une personne manifeste ostensiblement une appartenance religieuse est interdit dans l’ensemble des établissements accueillant un service public.
La parole est à Mme Valérie Boyer.
Mme Valérie Boyer. Il est défendu, madame la présidente !
Mme la présidente. L’amendement n° 129 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, M. Guiol, Mme Pantel, MM. Requier, Roux, H. Leroy, Cabanel, Corbisez, Fialaire et Gold et Mme Guillotin, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les services publics, le port de signes ou tenues par lesquels les mineurs manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit.
La parole est à M. Bernard Fialaire.
M. Bernard Fialaire. Le présent amendement vise à interdire, dans les services publics, le port des signes ou de tenues par lesquels les mineurs manifestent ostensiblement une appartenance religieuse.
Il est indispensable d’affirmer avec force que le port du voile par les mineures ne saurait être toléré dans les services publics, notamment parce que la question du libre arbitre et du consentement de celles-ci se pose avec une acuité particulière.
Mme la présidente. Monsieur le ministre, mes chers collègues, il est minuit. Je vous propose de prolonger la séance jusqu’à zéro heure trente, afin de poursuivre plus avant l’examen de ce texte.
Il n’y a pas d’observation ?…
Il en est ainsi décidé.
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Reprenons rapidement l’objet de chacun de ces amendements, qui visent tous à interdire le port de signes religieux ostentatoires dans les locaux accueillant un service public ou, plus généralement, dans l’espace public.
L’amendement n° 303 de Mme Benbassa vise à affirmer que la République garantit le droit de manifester sa conviction religieuse. L’amendement n° 496 rectifié de M. Ravier tend à interdire tout signe religieux ostentatoire dans tout l’espace public. L’amendement n° 146 rectifié bis de Mme Delattre a pour objet de prévoir une telle interdiction dans l’espace public, mais seulement pour les mineurs. L’amendement n° 162 rectifié bis de Mme Boyer vise à interdire le port, par les mineures, de signes allant à l’encontre de la dignité des femmes dans l’espace public. Les amendements nos 160 rectifié et 129 rectifié bis visent à interdire les signes religieux ostentatoires dans les établissements accueillant un service public, respectivement pour toute personne ou pour les mineurs uniquement.
Ces questions alimentent un débat de société de fond ; je rejoins beaucoup des propos tenus en défense de ces amendements. Cela pose évidemment la question de l’équilibre complexe entre les libertés individuelles et la préservation de l’ordre public, au travers des exigences maximales de vie en société.
Néanmoins, ces amendements soulèvent souvent des problèmes de qualification juridique. Nous sommes parvenus, pour l’instant, à un point d’équilibre en ce qui concerne l’espace public, au travers de la loi du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public. Cela peut, certes, paraître insuffisant et, sans doute, il y a des dispositions à réécrire et des ajustements ponctuels à faire – on l’a fait précédemment avec, par exemple, l’amendement n° 286 rectifié bis de Max Brisson –, mais ces amendements posent une véritable difficulté au regard de la Constitution.
En outre, le voilement des petites filles et des mineures constitue un vrai sujet ; personne ne peut s’exonérer de cette discussion et, d’ailleurs, ma collègue rapporteure et moi-même en avons discuté lors de nos auditions. Or la plupart des universitaires et des associations qui étudient cette question pensent qu’il faudrait un texte spécifique sur le sujet (Mouvements divers sur les travées du groupe Les Républicains.) – laissez-moi finir –, portant sur la protection de l’enfance.
En tout cas, nous ne pouvons pas ignorer ce sujet, qui est réel et qui nous heurte tous. Je suis élue de banlieue et, comme un certain nombre d’élus du Sénat, je constate la dérive du voilement des petites filles. Toutefois, je le dis très sincèrement, ce n’est pas au travers de ce genre d’amendements que l’on réglera ce problème. Il est important d’en parler, de le signaler, mais il nous faut trouver les fondements juridiques appropriés, ce qui n’est malheureusement pas le cas aujourd’hui ; ce sujet reviendra.
Bref, les qualifications juridiques retenues dans ces amendements ne sont malheureusement pas pertinentes, même si l’on peut le regretter. Par conséquent, la commission demande le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour explication de vote.
Mme Valérie Boyer. Je vous remercie de votre réponse, madame la rapporteure, mais, selon moi, le voilement des mineures représente une forme de maltraitance.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. C’est bien ce que je dis !
Mme Valérie Boyer. Il n’y a pas, d’un côté, les enfants pudiques et, de l’autre, les impudiques.
Les dérives sectaires constitutives d’abus de la liberté d’opinion et de religion, mais aussi de l’ignorance et de la faiblesse d’autrui ou de la mise en péril des mineurs, sont déjà parfaitement appréhendées par le droit pénal.
Allons plus loin aujourd’hui, en ayant le courage de dire non au voilement des mineures. Mon amendement n’est pas correctement rédigé ? Il ne vise pas le bon texte ? Eh bien, rectifions-le, sous-amendons-le, madame la rapporteure ! Nous sommes là pour faire la loi tout en étant, bien entendu, soucieux des exigences constitutionnelles et conventionnelles.
Des textes majeurs ont été adoptés grâce au vote de ces travées : je pense à la reconnaissance du génocide arménien, au retrait, anticonstitutionnel un jour et constitutionnel le lendemain, de l’autorité parentale à un conjoint violent ou encore à la présomption de contrainte lors de relations sexuelles avec un mineur de 15 ans, que nous avons adoptée voilà quelques jours.
En ce qui concerne le véhicule législatif, cette occasion ne doit pas être un rendez-vous manqué. Du reste, même si un texte sur les violences faites aux mineurs nous est soumis, on nous opposera un avis défavorable en convoquant l’article 45 de la Constitution ou en affirmant que ce n’est pas le bon moment…
Max Brisson l’indiquait précédemment, le Sénat a l’occasion, ce soir – pas demain, pas dans un mois, ce soir –, de protéger les mineurs, ici et maintenant, si j’ose dire. Nous voulons lutter contre le totalitarisme islamique ; il faut combattre ce qui en est le symbole. Ce totalitarisme islamique a besoin, comme tous les totalitarismes, de symboles et il se sert des mineurs pour l’imposer.
Nous examinons ce soir un texte portant sur les principes de la République ; cela me semble être le bon texte pour adopter une disposition visant à protéger les mineurs, c’est le bon moment. Il est de notre responsabilité, mes chers collègues, d’affirmer ce soir, haut et fort, que le Sénat ne peut accepter qu’une mineure soit voilée en France. Nous devons le dire aux Français, à ces jeunes filles et même à toutes ces femmes qui, à travers le monde, risquent avec courage leur vie en refusant de porter un voile, afin de sentir le vent dans leurs cheveux.
C’est le moment de le faire, mes chers collègues ! Nous n’allons pas encore attendre je ne sais quel texte. Vous dites que vous êtes élue de banlieue, madame la rapporteure. Pour ma part, je suis élue de Marseille ; partout en France, on voit des petites filles voilées ! C’est de la maltraitance, c’est une indignité que l’on impose à ces enfants. Par conséquent, pourquoi reculer encore aujourd’hui et attendre un autre texte ?
Mme la présidente. Il faut conclure, chère collègue.
Mme Valérie Boyer. On ne peut pas ne pas lutter contre la maltraitance des enfants dans un texte portant sur les principes de la République !
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je souhaite qu’on légifère pour interdire le voilement des mineures, mais je partage l’avis de notre rapporteure : nous devons trouver le support législatif permettant à ces dispositions d’être conformes à la Constitution, afin que cette mesure ne soit pas retoquée, ce qui aurait l’effet d’annonce contraire à notre volonté.
On ne trouvera pas un moyen de le faire à temps, puisqu’il n’y aura pas de deuxième lecture sur ce texte,…
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. En effet !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. … donc il ne faut surtout pas se tromper de méthode pour parvenir à nos fins.
Une disposition législative devient en effet urgente ; elle ne doit pas être bâclée, fragilisée, mais il faut y réfléchir rapidement.
Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.
M. Bruno Retailleau. Je soutiens les amendements déposés par Mme Delattre, qui préside la séance de ce soir, et par Mme Valérie Boyer.
Je comprends ce que Marie-Noëlle Lienemann vient de dire, mais je crains que le texte que l’on nous promet sur la protection de l’enfance ne puisse s’insérer dans notre calendrier avant longtemps. Je crains également que, même si ce texte pouvait être inscrit dans notre agenda législatif, on ne nous oppose l’article 45 de la Constitution. Or, si ces amendements n’ont pas fait l’objet, aujourd’hui, d’une déclaration d’irrecevabilité au titre de l’article 45, c’est qu’ils ont un lien avec le texte.
Je voterai donc ces amendements.
Mme Valérie Boyer. Merci, mon cher collègue !
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 1er, et les amendements nos 162 rectifié bis, 160 rectifié et 129 rectifié bis n’ont plus d’objet.
L’amendement n° 537 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Tout organisme de droit public ou de droit privé chargé de l’exécution d’un service public met en œuvre de manière effective, dans l’exercice de ses compétences, les principes de mixité sociale, d’égalité et de non-discrimination.
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Nous débattons, depuis cet après-midi, d’un projet de loi dont l’objectif est de faire grandir la République et d’en conforter les principes.
Sans nier les problèmes auxquels sont aujourd’hui confrontés les services publics, il est important que l’on étudie de près l’accès à ces derniers. Cet amendement, certes largement symbolique, s’inscrit dans la volonté de faire sortir la République de nos débats.
Le droit actuel prévoit l’égalité d’accès au service public ; pour autant, pouvons-nous nous satisfaire de cette égalité seulement formelle, qui, visiblement, ne tient pas face à la vérité du terrain ? D’ailleurs, le précédent défenseur des droits avait alerté, avant son départ, de l’augmentation des réclamations relatives à l’inégalité d’accès aux services publics.
Si cette institution, pourtant garante de l’égalité républicaine, n’arrive pas à assurer un cadre minimal d’accès aux services publics pour nos concitoyens, nous ne voyons pas comment ces derniers pourraient s’intégrer dans un projet républicain ni comment on pourrait imposer au secteur privé le respect de l’égalité. En cinq ans, les demandes adressées au Défenseur des droits ont bondi de plus de 40 % ; on y retrouve, pêle-mêle, des constats de non-accès au service à cause d’une dématérialisation à marche forcée, des fractures fortes entre territoires, dont les services publics disparaissent petit à petit, mais aussi des difficultés de plus en plus grandes à assumer financièrement le recours à certains services publics. Il y a donc un vrai sujet.
Puisque l’on se compare souvent à l’Allemagne, rappelons-nous ce que disait Bismarck, qui avait un objectif social, mais aussi sécuritaire. Le responsable allemand qu’il était avait compris que le recul des politiques publiques engendre une crise de confiance vis-à-vis de l’État, puis la défiance et, pour finir, le rejet de celui-ci. Ce n’est d’ailleurs pas étonnant que les troubles sociaux se déclenchent généralement dans les territoires abandonnés par les services publics.
C’est pourquoi nous souhaitons rappeler, au travers de cet amendement, ces différents principes, afin que l’objectif de consolidation de la République soit effectif et ne se limite pas à l’annonce des grands principes.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Nous entendons les arguments et les inquiétudes de notre collègue, mais tout ce qui est prévu dans cet amendement figure déjà à l’article 1er du texte. Cet amendement étant satisfait, la commission a émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 537 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 1er bis A
I. – Au début du chapitre IV du titre III du livre IV du code de la sécurité intérieure, il est ajouté un article L. 434-1 A ainsi rédigé :
« Art. L. 434-1 A. – Préalablement à sa prise de fonctions, tout agent de la police ou de la gendarmerie nationales déclare solennellement adhérer loyalement et servir avec dignité la République, ses principes de liberté, d’égalité et de fraternité et sa Constitution par une prestation de serment. »
I bis (nouveau). – Au début du chapitre V du titre I du livre V du code de la sécurité intérieure, il est ajouté un article L. 515-1 A ainsi rédigé :
« Art. L. 515-1 A. – Préalablement à sa prise de fonctions, tout agent de police municipale déclare solennellement adhérer loyalement et servir avec dignité la République, ses principes de liberté, d’égalité et de fraternité et sa Constitution. »
II. – Après le premier alinéa de l’article 11 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Préalablement à sa prise de fonctions, tout agent de l’administration pénitentiaire déclare solennellement adhérer loyalement et servir avec dignité la République, ses principes de liberté, d’égalité et de fraternité et sa Constitution par une prestation de serment. »