Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Madame la sénatrice, j’aurais pu vous donner des chiffres très précis, notamment sur le département des Alpes-Maritimes et les différentes collectivités qui le composent, si j’avais connu la thématique générale de votre intervention.
Vous devez le reconnaître : lorsque l’on veut compenser, notamment des pertes tarifaires, il faut avoir une vision claire de l’équilibre des recettes et des dépenses. Je l’ai déjà dit en répondant à votre collègue qui me posait une question sur les départements : lorsque vous provisionnez 2,7 milliards d’euros en prévoyant un effondrement des DMTO et que la réalité est tout autre – dans un certain nombre de départements, il y a eu au contraire une augmentation des DMTO –, il y a peu de choses à compenser…
Je suis très conscient de l’effort fait par les collectivités locales, qu’il s’agisse de communes ou d’intercommunalités, ne serait-ce que pour l’accompagnement des personnes.
Depuis le 30 avril dernier, nous sommes en mesure de faire un bilan et nous voyons quelle est la réalité de l’effort conjoint que doivent consentir l’État et les collectivités locales. En effet, lorsqu’une crise survient, il y a toujours une proportionnalité entre les différentes collectivités. Je le disais précédemment, la part de la dette prise en charge par l’État est extrêmement importante.
J’entendais l’un d’entre vous dire que l’État n’avait pas été vertueux… S’il l’avait été, beaucoup de gens n’auraient aujourd’hui plus d’emploi !
Le département des Alpes-Maritimes a bénéficié de 14 millions d’euros, dont 9 millions d’euros pour la seule commune de Cannes. Vous le voyez, l’État a donc joué son rôle et continuera à le faire au travers du PLFR qui sera présenté demain, notamment sur les problématiques de régies.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon.
M. Jean-Marie Mizzon. Sans surprise, le coût de la pandémie que notre pays vient d’essuyer est particulièrement lourd pour nos finances locales.
Avant toute chose, il convient de souligner ici la réactivité remarquable de nos collectivités face à une épidémie dont la soudaineté et la violence sont sans égales dans l’histoire. Il nous faut également rendre hommage à leurs élus et à leurs personnels, qui ont pris en charge l’organisation de l’accès aux soins et l’achat de la distribution d’équipements de protection. Ils ont également tenté de pallier les effets de la fracture numérique, assurant coûte que coûte la continuité du service public. Ils ont surtout innové. Ainsi, le Grand Est a créé le fonds Résistance, mobilisant 44 millions d’euros afin de soutenir l’économie locale.
Nos collectivités ont, pour cela, engagé des dépenses exceptionnelles consistant, pour l’essentiel, en la rémunération de personnels remplaçants ou encore dans le versement de primes exceptionnelles, comme celle attribuée aux aides à domicile. Toutes dépenses que les économies réalisées sur certains postes, tels que les frais de déplacement, de restauration, de formation ou encore la non-reconduction de certains contrats, n’ont compensées qu’en partie.
Par conséquent, même si aujourd’hui tout n’est pas noir, il apparaît clairement que l’État doit combler les déficits entraînés par ces différentes opérations que les collectivités territoriales seules ne peuvent supporter. Aussi, pouvez-vous nous indiquer ce que le Gouvernement entend faire pour leur fournir toute l’aide financière dont elles ont besoin, en particulier pour ce qui est de la compensation des pertes de recettes tarifaires, y compris pour les EPCI compétents en matière de mobilité qui exploitent des services de transport en commun ? J’ai bien compris l’ouverture tardive, mais réelle, du Gouvernement sur ce sujet.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Monsieur le sénateur Mizzon, je salue également l’implication des collectivités, notamment des conseils régionaux, non seulement dans l’appui aux entreprises, mais également dans d’autres dispositifs. Ainsi, dans le cadre du plan Avenir montagnes, l’ADF et l’ensemble des régions concernées ont été proactives afin que, pour 1 euro versé par l’État, 1 euro soit investi par les régions.
Vous avez cité le fonds Résistance mis en œuvre par la région Grand Est : c’est un très bon exemple de l’agilité des collectivités lorsqu’il s’agit de réagir aux difficultés. Mais je souhaite aussi rappeler que l’État n’a pas été moins agile et a joué tout son rôle, notamment auprès des entreprises.
Dans le Grand Est, à l’heure où je vous parle, nous avons déjà versé 1,8 milliard d’euros au titre du fonds de solidarité, mais aussi garanti 8 milliards d’euros de prêts aux entreprises. Ces montants sont très massifs !
L’État a aussi joué son rôle auprès des collectivités : 439 communes et 13 EPCI de votre région ont ainsi reçu 4,3 millions d’euros pour compenser leurs pertes de recettes fiscales et domaniales. Cette aide vient combler la totalité de l’écart entre les recettes fiscales et domaniales entre 2020 et la moyenne de référence de votre département. Par exemple, la métropole de Metz a reçu 1,2 million d’euros.
Concernant les AOM, quatre d’entre elles ont déjà reçu une compensation fiscale pour pallier une baisse très importante du versement mobilité et quatorze ont reçu des avances remboursables à hauteur de 30 millions d’euros. Par ailleurs, les collectivités de votre région vont recevoir, ou ont déjà reçu, une notification de 224 millions d’euros de dotation de relance, qui viennent s’ajouter aux moyens ordinaires, comme la DSIL, c’est-à-dire 50 millions d’euros par an.
Encore une fois, l’histoire ne s’arrête pas là : des aides complémentaires vont arriver pour soutenir les régies en difficulté financière.
Je le répète, s’agissant des SPIC (services publics industriels et commerciaux), des SPA (services publics administratifs) – je comprends les inquiétudes qui ont été exprimées à cet égard, ayant été maire pendant vingt-sept ans – et des AOM (autorités organisatrices de la mobilité), des ouvertures ont été faites. Le rapport que Philippe Duron doit nous remettre d’ici au mois de juin nous permettra ainsi de cadrer les choses le mieux possible.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, pour la réplique.
M. Jean-Marie Mizzon. Monsieur le secrétaire d’État, lorsque vous avez dit, dans votre propos liminaire, que les recettes des collectivités ne se portaient pas si mal que cela, j’ai eu peur que vous ajoutiez que c’était grâce à l’augmentation de la DGF. (Sourires sur les travées du groupe UC.) Vous auriez fait preuve d’un humour vraiment décapant…
Avec les 200 millions d’euros que vous évoquez, on est très loin du compte ! Pour les collectivités et leurs associations nationales, les montants sont bien supérieurs, dépassant les 2 milliards d’euros. Je ne sais pas comment vous arrivez à 200 millions, mais sachez que les associations d’élus, notamment l’AMF, estiment que le montant est plutôt dix fois supérieur.
Enfin, j’insiste sur la mobilité s’agissant des régies. Bénéficier d’une avance ou d’une dotation, ce n’est pas la même chose. J’espère que vous trouverez les voies et moyens, car je crois en votre bonne foi, permettant de compenser ces opérateurs qui le méritent fortement.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte.
M. Jean-Michel Houllegatte. En ce mois de juin qui commence, on ne peut évidemment pas s’empêcher de penser à la prochaine saison touristique qui s’engage. Or, si les perspectives sont plutôt positives en termes de fréquentation, bon nombre de collectivités sont inquiètes, car, le tourisme, c’est une multitude d’acteurs privés, associatifs et publics qui sont en grande difficulté.
Les offices de tourisme sont fortement fragilisés par la crise. D’une part, seuls les offices qui sont subventionnés à moins de 50 % ont pu bénéficier du chômage partiel ; d’autre part, la taxe de séjour, qui a été une recette dynamique entre 2012 et 2019 puisqu’elle est passée de 239 millions à 503 millions d’euros durant cette période, devrait, une fois tous les comptes administratifs consolidés, enregistrer une baisse qui pourrait aller, pour certaines communes, jusqu’à 40 %.
Or la taxe de séjour transite par les budgets des collectivités, et la compensation de sa perte est liée à la situation budgétaire des recettes fiscales et domaniales des derniers exercices de l’ensemble de la collectivité. Il peut s’avérer qu’une collectivité qui a eu de fortes dépenses liées au surcoût de la crise n’ait reçu aucune compensation, car ces recettes se sont globalement maintenues, alors que les recettes fléchées pour être reversées à l’office de tourisme se sont, elles, effondrées.
Monsieur le secrétaire d’État, cette situation ne mérite-t-elle pas une attention particulière ? Pouvez-vous nous confirmer que la compensation aux EPIC de tourisme figure bien dans le PLFR qui sera examiné demain en conseil des ministres.
De la même façon, dans un tout autre domaine, pouvez-vous m’assurer que les communes qui possèdent un casino, souvent très modeste mais dont les revenus de la taxe sur les jeux sont d’une importance vitale pour le budget communal, ont bien fait l’objet, cette fois-ci, d’une compensation intégrale ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Monsieur le sénateur Houllegatte, vous avez parfaitement raison de souligner que les communes touristiques font partie des communes les plus affectées par la crise sanitaire. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de compenser, et d’intégrer dans les mécanismes de compensation, les recettes perçues par ces communes. Je pense d’abord à la taxe de séjour, mais aussi au produit des jeux dans les communes qui accueillent des casinos.
Je précise que la taxe de séjour est compensée sur une base qui est celle de 2019 en raison des modalités d’évolution de perception de cette taxe. Je me rappelle fort bien avoir porté cet amendement lorsque j’étais rapporteur général à l’Assemblée nationale : la compensation devait se faire sur la base d’une moyenne qui ne représentait pas la réalité du dynamisme de la taxe.
En effet, nous avions élargi la base d’un certain nombre de contribuables supplémentaires qui ne payaient pas toujours la taxe de séjour, notamment dans les régions très touristiques. Par ailleurs, il fallait prendre en compte la problématique de la montée en puissance de nombreuses intercommunalités sur ce sujet. L’amendement que j’évoque nous permet aujourd’hui d’avoir une base beaucoup plus intéressante que celle qui avait été initialement prévue : la moyenne de 2017 à 2019.
Maintenant, si on regarde les résultats, on constate que 77 millions d’euros de dotations sur les 200 millions sont allés à des communes classées station de tourisme. Plus de la moitié des communes accueillant un casino ont bénéficié de la dotation pour un montant de 62 millions d’euros. Dans votre région, je peux citer Deauville, Bagnoles-de-l’Orne, mais également Ouistreham ou Trouville. Je signale, pour être tout à fait complet, que la commune de Cherbourg-en-Cotentin n’est pas éligible : en effet, ses produits fiscaux de 2020 dépassent de 1 million d’euros les mêmes produits entre 2017 et 2019 – la ville n’est pas dans une situation de perte de recettes.
En ce qui concerne les offices de tourisme, ceux-ci perçoivent en règle générale une partie de la taxe de séjour qui est reversée par la commune. Dans ce cas, la compensation se fait au niveau de la commune, et il n’y a pas de problème.
Quand l’office de tourisme – votre question porte sur ce point – perçoit directement la taxe, ce qui est un cas assez rare mais qui existe, une compensation n’est pas prévue à ce stade. Mais le mécanisme de compensation des SPIC que nous avons prévu dans le PLFR, lequel sera discuté dans quelques jours, apportera une réponse aux offices de tourisme dont l’épargne brute se serait dégradée fortement. La réintégration des pertes se fera par ce biais.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour la réplique.
M. Jean-Michel Houllegatte. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de votre réponse. On voit que le filet de sécurité est à larges mailles… Comme le dit Mme Gourault, il faut faire du cousu main. Ce qu’on vous demande simplement, c’est de sortir le filet à crevettes pour régler les cas particuliers : vous vous rendez compte, au travers des exemples qui nous sont présentés aujourd’hui, qu’il y a de nombreuses situations à régler.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Fournier. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Bernard Fournier. Il est très difficile d’avoir une analyse globale du coût économique de la crise de la covid-19 pour les collectivités, tant les situations de nos communes sont hétérogènes. Dans le temps qui m’est imparti, je voudrais m’attarder sur la situation des communes rurales.
En effet, ces dernières ont été particulièrement touchées lorsqu’elles disposent d’une école ou de structures d’accueil et de loisirs. L’impact des protocoles sanitaires sur les dépenses de fonctionnement « ressources humaines » a été très important pour certaines d’entre elles.
Nous pouvons aussi évoquer le cas des communes rurales touristiques, qui n’ont pu que constater la baisse substantielle de leurs recettes de produits d’exploitation.
Les communes qui louaient des équipements n’ont pas été épargnées non plus.
Même si nous ne pouvons que saluer l’ensemble des mesures de soutien de l’État aux collectivités, ces mesures restent encore insuffisantes pour le moment. Une des manières les plus efficaces pour les aider à sortir le plus rapidement de la crise sanitaire réside dans l’aide que l’État pourrait apporter à leurs projets d’investissements. Ces investissements permettraient d’irriguer les entreprises de nos territoires et participeraient à la relance de l’économie française.
Cependant, les élus des petites communes sont souvent découragés par la complexité et la quantité des dispositifs qui sont proposés lors des différents appels à projets dans le cadre des dotations d’investissement. Ils ne disposent pas de l’ingénierie nécessaire pour monter les dossiers.
Après un an de mandat et alors que la France se déconfine progressivement, il est primordial que l’État soit aux côtés des élus des territoires ruraux pour participer à la relance de notre économie. Aussi, je souhaiterais que vous nous précisiez, monsieur le secrétaire d’État, les financements que le Gouvernement a mis en place pour soutenir la relance de l’investissement des communes rurales et simplifier leurs démarches. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Monsieur le sénateur Fournier, vous m’interrogez plus spécifiquement sur le soutien de l’État à l’investissement des collectivités les plus rurales. Je voudrais insister sur trois points.
D’abord, il y a l’accroissement du soutien à l’investissement local dans le cadre du plan de relance, avec la majoration de 950 millions d’euros de la DSIL qui a été votée l’été dernier et qui est destinée à financer des projets s’inscrivant dans la transition écologique, la résilience sanitaire et la préservation du patrimoine.
Avec Jacqueline Gourault, nous avons veillé dans les circulaires d’application à ce que les choses soient très claires pour les préfets de région quant à la possibilité de cumuler DETR et DSIL, ce qui permet à des communes rurales d’en bénéficier. J’inaugure un certain nombre de lieux situés dans des communes très rurales qui en ont bénéficié.
Une enveloppe a été votée en loi de finances pour 2021 pour financer les travaux de rénovation énergétique des bâtiments des collectivités, dont 650 millions d’euros sont destinés au bloc communal et gérés de manière analogue à la DSIL.
Jacqueline Gourault et moi-même avons demandé aux préfets d’être vigilants à l’équilibre territorial des subventions, en laissant davantage de temps aux communes rurales qui en auraient besoin pour déposer leurs dossiers. Nous comprenons bien les problèmes d’ingénierie que rencontrent les communes rurales et les aidons à constituer, si besoin, ces dossiers : c’est le rôle des sous-préfets territoriaux.
Dans votre département de la Loire, 41 projets communaux ont d’ores et déjà été financés en 2020 avec cette tranche de DSIL. Or 25 projets sur ces 41 sont portés par des communes rurales.
Ensuite, nous mobilisons des moyens exceptionnels en ingénierie. C’est le sujet que vous évoquez et qui me semble extrêmement important. Je vous rappelle, parce qu’il faut toujours insister sur ce point, que les marchés d’ingénierie de l’ANCT, qui représentent 20 millions d’euros en 2021, sont gratuits pour l’ensemble des communes de moins de 3 500 habitants et les EPCI de moins de 15 000 habitants. Vous pouvez donc émarger gratuitement à ces marchés d’ingénierie.
Par ailleurs, nous avons bâti un système avec les programmes nationaux. Dans certains départements, le programme Petites Villes de demain comprend de très petites communes : nous descendons jusqu’au seuil de 200 habitants pour des bourgs-centres en difficulté. Cette ingénierie doit être partagée avec les autres communes au sein de l’intercommunalité de façon à ce que l’ensemble du territoire soit couvert.
D’autres programmes nationaux sont également importants.
Enfin, vous mentionnez les écoles et les structures d’accueil. Sur ce point, je vous confirme ce que j’ai répondu à M. Chasseing : nous allons regarder de près cette question dans le cadre des compensations de recettes tarifaires.
Mme la présidente. La parole est à M. Hussein Bourgi.
M. Hussein Bourgi. La crise sanitaire a eu un impact direct sur les finances des collectivités locales en raison des dépenses exceptionnelles et des pertes de recettes occasionnées par la covid-19 et par les confinements successifs. Elle a aussi eu un impact indirect sur les collectivités territoriales. Je veux évoquer les difficultés que rencontrent de nombreuses associations sportives, culturelles ou de loisirs.
Nos clubs sportifs ont perdu une part importante de leurs licenciés et nos écoles de musique et de danse une part significative de leurs adhérents. Certaines organisations qui, chaque été et tout au long de l’année, organisent des manifestations culturelles, en particulier des festivals, sont aujourd’hui en sursis. Bref, nos associations ont vu leur trésorerie fortement dégradée. Plus de 30 000 d’entre elles ne survivront pas à la crise ; des dizaines de milliers d’autres sont en très grande difficulté, singulièrement depuis le deuxième confinement.
Les mesures gouvernementales, que nous avons saluées, ont prioritairement concerné les associations ayant des salariés, par exemple avec le chômage partiel. Mais les associations constituées exclusivement de bénévoles sont restées dans un angle mort : peu ou pas d’aides leur sont destinées. Celles-ci se tournent aujourd’hui vers les communes, les intercommunalités, les départements, les régions, pour leur demander des subventions exceptionnelles afin de renflouer leur budget et honorer leurs charges courantes. C’est un cruel dilemme auquel sont confrontés les élus locaux. En aidant ces associations, ils alourdissent la facture déjà lourde et longue de la crise sanitaire pour les collectivités.
Monsieur le secrétaire d’État, de quelle manière le Gouvernement peut-il aider les collectivités territoriales, particulièrement les communes rurales, à sauver les associations qui créent du lien social et contribuent à l’attractivité de nos territoires ? Quelles mesures spécifiques dédiées à ces associations le Gouvernement compte-t-il mettre en œuvre ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Monsieur le sénateur Bourgi, votre question comporte deux points.
D’abord, vous avez évoqué la situation des collectivités locales et leur capacité à financer des associations. Je viens de répondre à un certain nombre de questions, notamment à la problématique des pertes de recettes tarifaires, une problématique centrale qui a même conduit certaines collectivités à attendre pour élaborer leur budget de savoir à quelle sauce elles allaient être mangées…
Pour autant, les services qui sont gérés en SPIC ou en SPA vont bénéficier de la « cagnotte » de compensation de 200 millions d’euros prévue dans le PLFR. Il appartiendra au Parlement, s’il le souhaite, de faire bouger les lignes sur ce sujet. En tout état de cause, le travail mené depuis des semaines avec Olivier Dussopt et Jacqueline Gourault permet aujourd’hui de prendre en compte la problématique extrêmement importante que vous évoquez. Je le disais précédemment, ce sont les plus petites collectivités qui, en général, ont des services gérés non pas en DSP mais directement. Cela concerne aussi les SPA « support », qui permettaient aux collectivités locales de soutenir des associations de proximité, notamment celles constituées de bénévoles que vous avez évoquées.
Ensuite, les associations peuvent bénéficier des aides accordées aux entreprises sous certaines conditions.
Les associations qui exercent une activité économique peuvent parfaitement bénéficier du fonds de solidarité. Le prêt garanti par l’État est – il ne faut pas l’oublier – également accessible aux associations. Vous l’avez dit, les associations employeuses ont pu bénéficier de l’activité partielle, ce qui était pour elles extrêmement important. Mais je rappellerai que des mesures spécifiques ont aussi été prises en faveur des associations. Un amendement du Sénat sur le deuxième PLFR a ouvert la possibilité aux collectivités de maintenir la subvention attribuée à une association en cas d’annulation d’événements ou de manifestations pour lesquels des crédits avaient été attribués, ce qui a conduit à faire, pour la première fois, une dérogation au service fait.
Je crois que l’ensemble de ces dispositions, qui s’ajoutent à celle que nous venons de prendre sur la problématique des régies des collectivités, permettra de voir l’avenir avec beaucoup plus d’optimisme.
Mme la présidente. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour la réplique.
M. Hussein Bourgi. Monsieur le secrétaire d’État, je pensais plutôt à un autre type de réponse, notamment à un chèque qui pourrait inciter à adhérer à des associations ou à renouveler des licences.
Aujourd’hui, de nombreuses associations nous disent qu’elles appréhendent l’avenir avec beaucoup d’inquiétude : des enfants qui ont perdu l’habitude d’aller à un club de sport, une école de musique ou de danse vont retrouver très difficilement le chemin de ces structures. C’est pour l’avenir que je vous demandais des propositions structurelles, avec – je le redis – un chèque qui pourrait servir d’amorce pour le paiement d’une adhésion ou d’un abonnement.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gueret. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Daniel Gueret. Monsieur le secrétaire d’État, face à la crise sanitaire, les collectivités se sont affichées très clairement. Très souvent, trop souvent, les élus ont servi de tampon entre les préfets et nos concitoyens inquiets face à cette pandémie et aux non-dits de l’État. Oui, les élus que nous représentons ici au Sénat ont répondu à votre appel !
Dans mon département, l’Eure-et-Loir, un travail absolument admirable d’organisation et de gestion, en parfaite coordination avec le préfet, a été réalisé dans les centres de vaccination, pérennes ou éphémères, à Chartres, Dreux, Nogent-le-Rotrou, Châteaudun, Maintenon, Épernon, Senonches, La Loupe, Brou, Toury… Ce sont toutes des communes et des intercommunalités qui, pour mémoire, ne sont ni des professionnels de santé ni des experts en tout genre qui passent beaucoup de leur temps sur les plateaux de télévision.
Les maires et les présidents, urbains comme ruraux, mettent à disposition leurs personnels, organisent des transports en zone rurale, assurent une veille auprès des plus fragiles, recensent les exclus auxquels le système internet est totalement étranger ou inaccessible, administrent leur centre de vaccination avec des personnels des Ehpad, des ADMR, des libéraux, des pompiers, des soignants… Tout cela en répondant aux exigences de l’État sur la montée en puissance du nombre de vaccinations.
Depuis des mois, ces collectivités assurent une mission de santé publique. Mais à quel prix ?
Chartres Métropole a déjà payé plus de 280 000 euros. Un bras de fer s’engage sur la signature d’une convention de refacturation, puisque l’ARS remet maintenant en cause le remboursement de la location et le gardiennage du site. Quant à la ville de Dreux, elle a déjà versé plus de 267 000 euros, sans compter les personnels communaux mis à disposition sur leur temps de travail habituel.
Ma question porte sur les mesures financières concrètes qui seront prises par le Gouvernement pour aider les maires et les présidents d’intercommunalité à faire face à une dépense exceptionnelle financée sur leur propre budget pour une compétence qui, au départ, est la vôtre. Vous avez, pour partie, apporté des réponses, mais donnez-nous la garantie d’une application rapide sur le terrain avec le moins de verticalité possible des décisions prises par vos administrations.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Monsieur le sénateur Gueret, les collectivités locales, en particulier les communes et les intercommunalités, ont, comme vous l’avez rappelé, spontanément soutenu l’État dans la mise en œuvre de la politique de vaccination, dont le déploiement est un succès et nous permet d’entrevoir la sortie de crise.
Nous savons que la contribution matérielle des collectivités a bien évidemment un coût. Cette question a fait l’objet d’échanges réguliers en février et en mars derniers avec les représentants des associations d’élus. À la suite de ces échanges, un groupe de travail dédié a été mis en place par le ministère des solidarités et de la santé avec les associations d’élus qui a abouti à l’adoption d’une doctrine de financement des centres de vaccination portée par Olivier Véran.
Une partie des coûts de fonctionnement des centres est intégralement financée par l’assurance maladie ou par les établissements de santé : c’est le cas des professionnels de santé qui sont mobilisés en dehors de l’exercice normal de leur activité pour leur employeur et des vaccins eux-mêmes.
S’agissant des coûts supportés par les collectivités, le Fonds d’intervention régional (FIR) des ARS est mobilisé dans le cadre d’une convention pour prendre en charge les dépenses engagées par les collectivités, au-delà de ce qu’aurait produit une activité normale du site. Ces dépenses peuvent notamment inclure la mobilisation des agents en plus de leur temps de travail habituel, par exemple les heures supplémentaires, les week-ends, les nuits, les astreintes ; le recrutement de personnel supplémentaire spécifique pour les centres de vaccination, hors personnel soignant, qui, lui, est pris en charge par l’assurance maladie ; et, lorsqu’ils constituent une charge inhabituelle, les frais de fonctionnement liés à l’accueil, la logistique et la coordination. Le forfait de 50 000 euros pour six mois évoqué en février dernier était non pas un plafond, mais un fonds d’amorçage – qu’il n’y ait pas de confusion sur ce point.
Nous restons fidèles à notre idée de départ de compensation des surcoûts en prenant en compte les coûts liés à l’ouverture des centres les week-ends. Les discussions que mèneront les municipalités et les intercommunalités se poursuivront à l’échelle des ARS, dans le cadre de ces conventionnements.
Par ailleurs, la possibilité de solliciter l’appui du FIR a été ouverte à tous les types de centres, qu’ils soient ou non labellisés. C’est vraiment, je le crois, la preuve de l’engagement de l’État aux côtés des collectivités locales, qui font preuve d’une volonté remarquable en la matière.