M. Daniel Gueret. Cet amendement, déposé par mon collègue Rémy Pointereau, a été rectifié une nouvelle fois après que celui-ci s’est entretenu avec Mme la ministre. Il n’est donc que le résultat de ce qu’ils sont convenus.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. La commission émet un avis favorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. La parole est à M. Alain Richard, pour explication de vote.
M. Alain Richard. Ayant moi-même suggéré que l’on réserve le vote sur cet amendement de manière que le contenu final soit clarifié et puisse être approuvé en complète transparence, je considère, pour avoir étudié quelques autres articles, qu’il ne serait pas totalement inutile que Mme la ministre nous rappelle de quoi il s’agit.
Mme le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Il s’agit de la compétence obligatoire de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (Gemapi), créée par la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite loi Maptam.
M. Alain Richard. Un détail ! (Sourires.)
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Les collectivités territoriales peuvent s’appuyer sur un établissement public territorial de bassin (EPTB) pour l’exercice des missions en matière de prévention des inondations. Le choix de l’échelle intercommunale pour la mise en œuvre la compétence Gemapi induit de fortes inégalités territoriales, notamment en ce qui concerne la prévention des inondations, laquelle nécessite d’importants moyens financiers.
Ainsi que le souligne le rapport d’évaluation des conséquences de la mise en œuvre de la compétence Gemapi, publié en novembre 2018, le produit de la taxe Gemapi, taxe additionnelle aux taxes foncières, est fonction du nombre de contribuables que comprend l’EPCI et alors que le linéaire de digues à prendre en charge n’est pas lié à la démographie.
En clair, dans la vallée de la Loire, les EPCI souhaitent transférer la compétence Gemapi à l’Établissement public Loire. Naturellement, la partie de la ressource Gemapi qui concerne la lutte contre les inondations doit également lui être transférée.
Tel est l’objet du présent amendement, que j’ai retravaillé avec Rémy Pointereau par solidarité ligérienne.
M. Serge Babary. Merci, madame la ministre !
Mme le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 5 quinquies.
Organisation des travaux
Mme le président. Mes chers collègues, compte tenu du rythme satisfaisant auquel avancent nos travaux, je vous propose, en accord avec la commission et le Gouvernement, de lever la séance de ce jour à dix-sept heures.
Il n’y a pas d’observation ?…
Il en est ainsi décidé.
TITRE III
L’URBANISME ET LE LOGEMENT
Exception d’irrecevabilité
Mme le président. Je suis saisie, par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission des affaires économiques, d’une motion n° 1705.
Cette motion est ainsi rédigée :
Constatant que les amendements nos 44 rectifié bis et 1373 rectifié visent à rétablir une habilitation à légiférer par ordonnances ou à en étendre le champ et qu’ils sont donc contraires au premier alinéa de l’article 38 de la Constitution, le Sénat les déclare irrecevables en application de l’article 44 bis, alinéa 10, de son Règlement.
En application du dernier alinéa de l’article 44 bis, alinéa 10, du règlement, ont seuls droit à la parole l’auteur de la demande d’irrecevabilité, un orateur d’opinion contraire, la commission saisie au fond – chacun disposant de deux minutes et demie –, ainsi que le Gouvernement.
Aucune explication de vote n’est admise.
La parole est à Mme le rapporteur pour avis, pour la motion.
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Les amendements déposés sur le texte de la commission, à l’exception des amendements présentés par le Gouvernement, qui visent à rétablir une habilitation à légiférer par ordonnances ou à en étendre le champ sont contraires au premier alinéa de l’article 38 de la Constitution.
Sont en cause les amendements nos 44 rectifié bis et 1373 rectifié, qui ont pour objet d’étendre le champ d’une habilitation donnée par la loi d’accélération et de simplification de l’action publique, dite loi ASAP, laquelle est en vigueur pour douze mois encore.
Or aux termes de l’article 38 de la Constitution, il n’appartient pas à un parlementaire d’étendre le champ d’une habilitation à légiférer par ordonnances. Dès lors, ces amendements étant contraires à l’article 38 de la Constitution, ils doivent être déclarés irrecevables.
Mme le président. Aucune explication de vote n’étant admise, je mets aux voix la motion n° 1705, tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.
(La motion est adoptée.)
Mme le président. En conséquence, les amendements nos 44 rectifié bis et 1373 rectifié sont déclarés irrecevables.
Articles additionnels avant l’article 15
Mme le président. L’amendement n° 68 rectifié, présenté par Mmes Dindar et Malet, MM. Longeot, Artano, Dennemont, P. Martin et Le Nay, Mme Sollogoub, MM. Henno, Canévet, Poadja et Levi et Mme Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :
Avant l’article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa du III de l’article L. 301-5-1 du code de la construction et de l’habitation est complété par une phrase ainsi rédigée : « À Paris, Lyon et Marseille, la convention précise qu’une part de la production de logements locatifs sociaux est prioritairement orientée vers les arrondissements disposant de moins de 15 % de logements sociaux. »
La parole est à Mme Viviane Malet.
Mme Viviane Malet. Il est défendu, madame la présidente.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Aujourd’hui, rien n’empêche les villes de Paris, Lyon et Marseille de se fixer elles-mêmes des objectifs par secteur géographique. Il me semble que la loi ne résoudrait en rien les difficultés rencontrées dans certaines zones où le foncier est particulièrement rare et cher. Ce serait en outre une source de complexité supplémentaire.
La commission sollicite donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Même avis. En effet, la loi impose déjà au programme local de l’habitat (PLH) d’opérer une répartition des objectifs de production entre arrondissements.
Mme le président. Madame Malet, l’amendement n° 68 rectifié est-il maintenu ?
Mme Viviane Malet. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 68 rectifié est retiré.
L’amendement n° 227 rectifié bis, présenté par M. Gay, Mmes Lienemann, Assassi, Cukierman, Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Avant l’article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement six mois après la promulgation de la présente loi un rapport sur les conditions de la pérennisation des aides aux maires bâtisseurs prévus dans le cadre du plan de relance et sur les moyens apportés aux organismes HLM pour accomplir leurs missions pour le respect des objectifs de construction légalement définis. Ce rapport devra notamment étudier la possibilité de rehausser le financement des aides à la pierre, de compenser pour les bailleurs la suppression de la taxe d’habitation et enfin celle de supprimer la réduction loyer solidarité.
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Alors que nous abordons la partie de ce projet de loi consacrée au logement, nous souhaitons revenir à ce qui nous semble essentiel : les blocages rencontrés pour la construction.
En effet, les chiffres de la construction sont au rouge depuis de nombreux mois. On accusera sans doute les maires de ne pas porter l’effort nécessaire en période électorale ou on évoquera les conséquences du covid-19… Mais les freins, et donc les leviers, sont plutôt à chercher du côté du désengagement de l’État de l’exercice de ses missions au service du droit au logement pour toutes et tous.
Ainsi, si quelques efforts ont été réalisés dans le cadre du plan de relance en faveur de l’aide aux maires densificateurs ou des friches, l’État se défausse des aides à la pierre : voilà ce qui marque véritablement ce quinquennat !
Le secteur HLM rencontre des difficultés à produire du logement socialement adapté, notamment à la suite de la mise en place du dispositif de réduction de loyer de solidarité (RLS). Aujourd’hui, le secteur HLM est gravement menacé ; nous avons eu l’occasion de dénoncer ce fait à l’occasion du débat organisé sur l’initiative de notre groupe. Cette politique prive les organismes HLM de plus de 1,3 milliard d’euros par an, sur la période 2020-2022. Dans ces conditions, comment pourront-ils produire les 200 000 logements annoncés ?
Nous souhaitons donc, par cet amendement d’appel, énoncer clairement les responsabilités de chacun. Certes, les collectivités doivent respecter la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU – vous savez que nous en sommes les plus farouches défenseurs. Pour autant, l’État doit aussi jouer son rôle, apporter les subsides nécessaires, arrêter de ponctionner le secteur HLM et cesser de faire des économies de bouts de chandelle sur les bénéficiaires des aides personnalisées au logement (APL).
Enfin, les conséquences de la suppression de la taxe d’habitation et de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) doivent être compensées à leur juste niveau.
Il serait trop facile de faire porter la responsabilité du déficit de construction aux seules collectivités. Nous demandons donc en priorité l’abandon de la RLS et l’augmentation à hauteur de 1 milliard d’euros des aides à la pierre dans la prochaine loi de finances.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Je souscris largement aux propos de Fabien Gay. Depuis 2017, nous sommes nombreux sur la quasi-totalité de ces travées à dénoncer les ponctions faites par le Gouvernement sur les finances des bailleurs sociaux, les privant ainsi de toute capacité d’autofinancement pour continuer à construire plus et mieux.
Conscient de la baisse de la construction de logements à un tel niveau, le Premier ministre a institué une commission nationale pour la relance durable de la construction de logements. Quatre sénateurs y siègent : Pascal Martin, Marie-Noëlle Lienemann, Frédéric Marchand et moi-même. Il est attendu qu’elle remette un rapport d’ici l’automne prochain.
Pour l’heure, la commission sollicite le retrait de cet amendement qui n’a pas sa place dans ce texte ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Monsieur Gay, le Gouvernement n’accuse personne. (M. Fabien Gay et Mme Éliane Assassi s’exclament.)
En effet, une commission nationale, présidée par François Rebsamen, a été mise en place ; tout le monde y participe, y compris les organismes d’HLM. Voilà ce que je tenais à préciser pour vous témoigner de la préoccupation du Gouvernement vis-à-vis de la baisse de la construction.
Le Gouvernement émet un avis défavorable.
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 227 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 15
I. – L’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° Le second alinéa du III est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :
« La liste de ces communes est arrêtée sur proposition des établissements publics de coopération intercommunale auxquels elles appartiennent, après avis du représentant de l’État dans le département et dans la région et de la commission nationale mentionnée à l’article L. 302-9-1-1. Par dérogation, en cas d’absence de suite donnée à la demande d’une commune par l’établissement public de coopération intercommunale d’appartenance, cette commune peut saisir le représentant de l’État dans le département. Cette liste ne peut porter que sur les communes entrant dans l’une de ces catégories :
« 1° Les communes qui ne sont pas situées dans une agglomération de plus de 30 000 habitants et dont l’isolement ou les difficultés d’accès aux bassins de vie et d’emplois environnants les rendent faiblement attractives, dont les critères d’appréciation sont précisés par décret en Conseil d’État ;
« 2° Les communes situées dans une agglomération ou un établissement public de coopération intercommunale mentionnés au I du présent article dans lesquels le nombre de demandes de logements sociaux par rapport au nombre d’emménagements annuels, hors mutations internes dans le parc locatif social, se situe en-deçà d’un seuil fixé par le décret mentionné au 1° du présent III ;
1° bis (nouveau) Après le III de l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation, il est ajouté un III bis ainsi rédigé :
« III bis. – Les dispositions de la présente section ne sont pas applicables aux communes dont plus de la moitié du territoire urbanisé est soumis à une inconstructibilité résultant d’une zone A, B ou C d’un plan d’exposition au bruit approuvé en application de l’article L. 112-6 du code de l’urbanisme ou d’une servitude de protection instituée en application des articles L. 515-8 à L. 515-11 du code de l’environnement, ou à une inconstructibilité de bâtiment à usage d’habitation résultant de l’application du règlement d’un plan de prévention des risques technologiques ou d’un plan de prévention des risques naturels définis, respectivement, aux articles L. 515-15 et L. 562-1 du code de l’environnement, ou d’un plan de prévention des risques miniers défini à l’article L. 174-5 du code minier, ou des dispositions de l’article L. 121-22-4 du code de l’urbanisme applicables aux zones définies au 1° de l’article L. 121-22-2 du même code ou des dispositions de l’article L. 1321-2 du code de la santé publique.
2° Après le mot : « figurent », la fin du onzième alinéa du IV est ainsi rédigée : « dans la liste transmise par l’administration fiscale principalement issue de la déclaration des propriétaires prévue à l’article 1418 du code général des impôts, déduction faite des logements concédés par nécessité absolue de service en application de l’article L. 4145-2 du code de la défense. »
II. – Le 2° du I entre en vigueur le 1er janvier 2023.
Mme le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, sur l’article.
Mme Viviane Artigalas. L’examen du titre III va nous donner l’occasion d’un débat sur la question du logement, lequel reste une préoccupation essentielle des Français.
Aujourd’hui, il y a un constat partagé : voilà vingt ans que la loi SRU permet non seulement de produire plus de logements, mais aussi de favoriser une répartition plus équilibrée des logements sociaux sur le territoire. Ce n’est pas la première fois que l’on ajuste la loi pour l’améliorer, l’adapter aux contraintes locales et, surtout, aux besoins et à l’attente des Français.
Le texte du Gouvernement, dans la continuité de la loi relative à l’égalité et à la citoyenneté de 2017, a été élaboré après consultation de la commission nationale SRU. Il apporte quelques ajustements souhaitables – c’est un préalable pour redonner du souffle à la loi SRU.
Ces propositions constituent notre ligne rouge, d’autant que l’enjeu de solidarité nationale n’est pas à la carte. Mon groupe et moi-même appelons à la vigilance : à force de petits coups, nous risquons, réforme après réforme, de perdre progressivement en efficacité.
Nous sommes particulièrement inquiets des moyens à engager pour relancer concrètement la construction de logements sociaux, laquelle est en baisse constante depuis 2017. En quatre ans, la politique du Gouvernement aura déstabilisé et fragilisé tout un secteur via des ponctions de plusieurs milliards d’euros et des réorganisations à marche forcée et sans cohérence, qui éloignent les prises de décision de la réalité des territoires et des attentes des Français.
Nous regrettons que ce texte ne comporte aucune avancée concrète en faveur d’un meilleur pilotage territorial des politiques de l’habitat, qui font pourtant partie des politiques publiques dont la gouvernance doit être repensée. En outre, nous déplorons qu’aucune disposition n’ait été proposée pour agir sur la cherté du foncier, qui reste aujourd’hui le problème numéro un de la construction de logements abordables.
La dynamique pour réaliser 150 000 logements sociaux par an et libérer des terrains a été brisée dès 2017. Cela a entraîné toutes les conséquences que l’on connaît aujourd’hui, au détriment des familles qui n’arrivent pas, avec leurs ressources, à se loger dignement.
Aussi ferons-nous des propositions visant à adapter les politiques d’habitat à la diversité des territoires, à en renforcer le pilotage territorial et à donner des outils aux élus pour encadrer le prix du foncier, notamment dans les zones les plus tendues.
Mme le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, sur l’article.
Mme Éliane Assassi. Nous abordons les dispositions relatives à l’application de la loi SRU. L’article 15 prévoit de revoir les motifs d’exemption des communes. Nous ne sommes pas, par principe, défavorables à un tel dispositif. Mais, avec les évolutions de la carte communale, trop de communes sont tombées sous le coup de ce dispositif sans raison. Sur les 2 091 communes soumises à l’article 55 de la loi SRU, 224 en sont d’ores et déjà exemptées, soit plus de 10 %, dont 50 d’entre elles au motif de l’éloignement des transports.
Pour notre part, nous sommes toujours extrêmement vigilants à tout ce qui pourrait conduire à affaiblir la portée de la loi SRU ; elle reste une loi utile pour l’accès au logement de nos concitoyens dans des conditions abordables.
Vu les amendements qui ont été déposés, il s’agit, au travers de ces problématiques, de faire feu de tout bois pour dégager un maximum de collectivités de leurs obligations en matière de mixité sociale. Je préfère être claire tout de suite : nous voterons contre tous les amendements qui visent à affaiblir, sans raison, la portée de la loi SRU.
Nous souhaitons qu’un bilan puisse être réalisé à l’issue de ces débats, et après l’application de ce texte, sur les conséquences concrètes de l’élargissement des critères d’appréciation de la pertinence de l’exemption au titre de la mauvaise connexion au bassin de vie et d’emploi, en ne se référant plus à la notion de mauvaise desserte par les transports collectifs. Nous craignons en effet de forts contentieux administratifs à venir.
Mme le président. La parole est à M. Alain Richard, sur l’article.
M. Alain Richard. J’aurais préféré intervenir en présence de la ministre chargée du logement, mais le Gouvernement est un… Je suis sûr qu’elle aura tout de même à cœur de prendre connaissance de toutes les réflexions préalables à cette série d’articles.
Je suis l’un des membres du Gouvernement qui a fait voter la loi SRU ; je peux considérer avec satisfaction que celle-ci a apporté un équilibre et une dynamique dans la réalisation de logements sociaux, en assurant une certaine solidarité territoriale.
Si cette loi est de nouveau modifiée, c’est parce que ses effets d’automatisme, dus à l’application de barèmes numériques, provoquent encore des contradictions urbaines, notamment lorsque se trouve constatée une densité déjà forte, qui se traduit par des coûts fonciers et des difficultés de libération d’emprises.
Par conséquent, l’effort exigé de communes qui se trouvent dans des situations très différentes pour appliquer un même barème est une réelle faiblesse de la loi – après vingt ans d’application, j’insiste sur ce point.
Le Gouvernement a réfléchi à ce sujet ; j’aurais été laudateur vis-à-vis de la ministre Emmanuelle Wargon. Cependant, ce nouvel article arrive assez tard dans le travail législatif. En quelque sorte – et c’est le point sur lequel il va falloir travailler –, il prévoit une substitution des barèmes et des pourcentages fixés par un système de contrats individualisés. Les autres articles restent en vigueur, y compris ceux qui fixent des obligations en chiffres absolus.
Nous avons donc du mal à voir quelle sera la flexibilité réelle et la capacité d’adaptation au terrain de ce nouveau système de contrats. Il me semble qu’il y a matière à maintenir un certain nombre de précautions.
Mme Assassi vient de dire que son groupe s’opposerait aux exemptions ou aux allégements consentis sans raison. Or il existe des allégements qui sont justifiés ; nous serons amenés à en proposer deux ou trois, de manière à rendre le système mieux adapté au terrain.
Mme le président. La parole est à Mme Valérie Létard, sur l’article.
Mme Valérie Létard. Voilà que nous abordons le titre III. Je veux dire combien cette partie du texte en discussion est importante ; elle pourrait, à elle seule, constituer une loi tant elle est essentielle.
Je remercie Dominique Estrosi Sassone pour l’énorme travail qu’elle a réalisé à la suite du projet de loi Climat et résilience, qui comportait lui aussi un volet logement et urbanisme important. J’ai pris plaisir à collaborer avec elle, tant pour la préparation de nos travaux sur la proposition de loi visant à réduire le coût du foncier et à augmenter l’offre de logements accessibles aux Français, déposée par notre collègue député Jean-Luc Lagleize, qui a alimenté le travail sur le volet relatif aux organismes de foncier solidaire, que sur l’article 55 de la loi SRU.
Au-delà de ce que mes collègues ont affirmé, j’insiste sur la nécessité, pour accompagner nos politiques SRU, de donner de véritables moyens à nos organismes de logement, de manière à atteindre les objectifs. Qu’il s’agisse du foncier ou du financement des organismes de logement, il est question, au cœur de ce dispositif, des moyens destinés à mettre en œuvre l’article 55 de la loi SRU et à atteindre des objectifs ambitieux de production de logements.
Eu égard aux amendements que nous avons défendus conjointement avec la commission, je ne peux que soutenir le travail qu’elle a effectué. Celui-ci s’appuie sur une consultation de plus de 400 maires et montre que tout le monde, aujourd’hui, est convaincu que l’article 55 est essentiel.
Mais cet article est difficilement applicable : 70 % des maires qui entendent l’appliquer en viennent à saisir les juridictions administratives, faute de parvenir à atteindre concrètement ces objectifs.
Le Gouvernement a raison de mettre la question à l’ordre du jour. J’approuve les orientations retenues : prolongation de la loi sans date butoir, mise en place d’un rattrapage différencié et contractualisé grâce à un contrat de mixité signé entre le maire et le préfet, réforme des exemptions.
Nous nous sommes tous efforcés, ici, de compléter ce dispositif et ces mécanismes pour parvenir à une véritable différenciation, en renforçant le couple maire-préfet d’une façon telle que les contractualisations prennent en compte la réalité de chaque territoire.
Évitons de déjuger le préfet, comme c’est souvent le cas aujourd’hui, et travaillons plutôt à renforcer son rôle ! Madame la ministre, si l’on passe des mois à travailler avec un préfet, ce n’est pas pour qu’une commission nationale finisse par remettre en question ce qu’il a mis en œuvre – l’État peut tout de même faire confiance à ses préfets !
Mme le président. Il faut conclure !
Mme Valérie Létard. Bon nombre de sujets ont été rappelés, comme celui de l’exemption, et d’autres encore que nous avons défendus en commission. (Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques, applaudit.)
Mme le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avant que nous n’entamions l’examen des amendements déposés sur l’article 15, et à la suite des différents orateurs, je tiens à rappeler que ma collègue Emmanuelle Wargon, ministre déléguée chargée du logement, a travaillé pendant plusieurs mois à un projet de loi spécifique. Du fait de l’évolution du calendrier parlementaire, nous avons accueilli ces dispositions dans le présent texte et j’en suis tout à fait ravie.
Madame Assassi, notre préoccupation commune était bien sûr de faire en sorte que le système ne s’arrête pas. Comme vous le savez, la loi SRU ne court que jusqu’en 2025. (Mme Éliane Assassi opine.) Reconnaissez que ce projet de loi permet de poursuivre la construction du logement social dans notre pays,…
Mme Éliane Assassi. Ce n’est pas vous que je mets en cause !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. … même s’il accorde un petit délai supplémentaire aux communes devant atteindre une part de 20 % ou de 25 % de logements sociaux. À mon sens, ces précisions sont fondamentales.
En outre, j’insiste sur le fait que nous avons mené un travail très constructif avec la commission des affaires économiques, notamment avec Dominique Estrosi Sassone et Valérie Létard. Ainsi, nous avons pu dégager un certain nombre d’objectifs communs. L’équilibre obtenu permet de poursuivre, voire d’accentuer l’effort de construction de logements sociaux dans notre pays tout en respectant davantage les territoires, grâce au principe de différenciation.
On le sait très bien, certains territoires ont besoin de construire des logements sociaux ; certaines villes atteignent déjà 40 % de logements sociaux ; d’autres ont encore des efforts à accomplir.
Bien sûr, nous ne sommes pas d’accord sur tout, au point-virgule près.
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis. Certes !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Mais, à mon sens, nous avons atteint un résultat équilibré, grâce à un bon travail de préparation.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Merci, madame la ministre !
Mme le président. L’amendement n° 1495 rectifié ter, présenté par Mme Taillé-Polian et MM. Fernique, Gontard et Parigi, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au I et au deuxième alinéa du II, le taux : « 25 % » est remplacé par le taux : « 30 % » ;
La parole est à M. Jacques Fernique.