M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 280 rectifié est présenté par MM. Savoldelli et Bocquet, Mmes Cukierman, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 418 rectifié est présenté par MM. Marie, Kerrouche, J. Bigot et Houllegatte, Mmes Artigalas, S. Robert et M. Filleul, MM. Devinaz et Jacquin, Mmes Préville et Lubin, MM. Jomier, Gillé, Kanner et Bourgi, Mme de La Gontrie, M. Durain, Mme Harribey, MM. Leconte, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I.- Alinéa 17
Rédiger ainsi cet alinéa :
VI. – Tous les cinq ans à compter de la promulgation de la présente loi, le coût d’exercice et de gestion des compétences transférées aux collectivités territoriales et à leurs groupements en application de la présente loi fait l’objet d’une révision par la commission prévue à l’article L. 1211-4-1 du code général des collectivités territoriales , en tenant compte en particulier de l’inflation, du coût actualisé de l’exercice des compétences transférées et du nombre de bénéficiaires direct et indirect de ces dernières.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
…. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du présent article est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l’amendement n° 280 rectifié.
Mme Cécile Cukierman. Je vous présente tout d’abord des excuses, mes chers collègues : cet amendement ayant été modifié à la demande de la commission, le texte figurant dans l’objet ne correspond plus vraiment au dispositif de l’amendement, s’agissant des échéances fixées. Mais l’objectif est bien, in fine, de disposer d’une « clause de revoyure » – tous les cinq ans – pour pouvoir calculer le plus justement possible les compensations financières et ne pas subir un calcul au « coût historique ».
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour présenter l’amendement n° 418 rectifié.
M. Didier Marie. Comme vous le savez, madame la ministre, les collectivités territoriales – les départements, en particulier – sont fort marries d’un certain nombre de transferts et, surtout, de leur compensation. Je pense à certains transferts dans le domaine social, mais la question des routes est aussi un sujet très sensible.
La compensation au « coût historique » implique que l’on fixe les choses à un instant t. Or tout le monde sait que l’inflation, même maîtrisée, n’en est pas moins une réalité, que des revalorisations salariales peuvent intervenir ou d’autres coûts s’envoler.
Pour cette raison, nous souhaitons instaurer une clause de revoyure, permettant, tous les cinq ans, de faire le point sur l’évolution des dépenses relatives aux transferts de compétences.
C’est, nous le pensons, un moyen de rétablir de bonnes relations entre l’État et les collectivités territoriales s’agissant de ces transferts et, surtout, des moyens de les financer.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Nous évoquons ici la question de l’état des lieux permettant d’évaluer le coût d’exercice des compétences transférées, avec, parmi ces quatre amendements, la solution d’une procédure de réévaluation à l’issue d’une période restant à déterminer, solution que nous avons proposé d’optimiser.
Je rappelle que, parmi les cinquante propositions du Sénat, se trouvait cette proposition de réévaluation régulière du coût des compétences transférées. Puisque la collectivité pouvait se voir imposer des dépenses supplémentaires, décidées par l’État ou par la loi, puisqu’elle les subissait, il était normal qu’elle perçoive une compensation.
Mais sans doute la commission, par crainte d’être frappée par l’article 40 de la Constitution, a-t-elle été trop timide. Les deux derniers amendements de nos collègues socialistes et communistes, qui tendent à prévoir une réévaluation du « coût historique » à l’issue d’une période quinquennale, ont effectivement franchi le barrage de cet article 40. Nous nous en réjouissons et émettons, sur ces amendements identiques, un avis favorable.
Pour résumer, la commission demande le retrait de l’amendement n° 279 ou, à défaut, émettra un avis défavorable. Elle émet par ailleurs un avis défavorable sur l’amendement n° 1418, contraire à sa position. Enfin, son avis est favorable sur les amendements nos 280 rectifié et 418 rectifié, qui ont été modifiés conformément à sa demande.
Il s’agit de prévoir une révision quinquennale de la compensation financière calculée au coût historique pour l’exercice de compétences transférées par l’État aux collectivités territoriales. C’est une réponse apportée aux interrogations légitimes posées par certains de nos collègues et, encore une fois, la reprise d’une mesure figurant parmi les cinquante propositions du Sénat. Nous l’avions adoptée en son temps, certes sans grand enthousiasme de la part du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je suis naturellement très défavorable à ces amendements et à l’idée de revenir tous les cinq ans sur l’évaluation du coût des transferts. D’ailleurs, je le dis au passage, c’est présupposer que l’évolution ne peut se faire que dans un sens, et pas dans l’autre…
M. Éric Kerrouche. C’est ce qu’enseigne l’expérience !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Or les collectivités territoriales peuvent aussi connaître certaines dynamiques de recettes leur permettant d’assurer l’entretien des routes transférées. Le transfert se faisant sur la base du volontariat, les départements décideront par eux-mêmes de prendre ou ne pas prendre cette compétence, mais l’État y réfléchira aussi… J’ai peur que l’on ne finisse par bloquer le système. Il est impossible de réévaluer a posteriori et en permanence ; ce n’est pas sérieux !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Je ne veux pas allonger le débat, madame la ministre, mais nous avons l’expérience de ces dossiers. On pourrait parler du revenu de solidarité active (RSA), par exemple. En matière de routes, je prendrai le seul exemple que je connais dans mon département : pour la route nationale 102, il a tout de même fallu que le département et la région avancent la part de l’État pour pouvoir démarrer les travaux pour une déviation. Celui que l’on attend toujours au rendez-vous du financement de ce type d’opérations, c’est plus l’État, me semble-t-il, que les collectivités territoriales !
M. le président. Madame Cukierman, l’amendement n° 279 est-il maintenu ?
Mme Cécile Cukierman. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 279 est retiré.
La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Madame la ministre, c’est la deuxième vague de décentralisation des routes nationales. La première a concerné des routes de dimension plus départementale ou régionale que nationale, ayant un moindre trafic que celles dont nous parlons ici et qui sont, elles, des routes importantes. Dans le Grand Est, par exemple, c’est la nationale 4, représentant 12 000 à 20 000 véhicules par jour, dont 40 % de poids lourds, avec des déviations toujours pas réalisées, un état particulièrement dégradé et, en conséquence, des investissements extrêmement lourds à réaliser.
Au niveau du fonctionnement, on ne peut pas s’y retrouver ! L’État n’entretient plus ces routes de façon satisfaisante. On a institué les directions interdépartementales des routes (DIR). Très bien ! Elles font ce qu’elles peuvent avec les moyens qu’on leur donne, et on ne leur donne pas les moyens pour assurer l’entretien. Parcourez ces routes, madame la ministre, vous verrez les herbes sur les bas-côtés et les nids-de-poule. Forcément, on manque de moyens pour l’entretien !
Quand vous expliquez, madame la ministre, qu’il faudra considérer dans les comptes établis avec les collectivités, par exemple s’agissant des investissements, ceux qui ont été réalisés au cours des deux ou trois dernières années, ayons en tête ce qu’a rappelé Mathieu Darnaud, à savoir que la plupart de ces investissements ont déjà été cofinancés par les départements et la région. De quel élément allez-vous tenir compte ? Du montant global des travaux réalisés ou de la part de l’État dans ce financement ?
Selon la réponse, l’affaire est complètement différente et, dans un cas, on se retrouve à payer deux fois. On a déjà payé quand les routes n’étaient pas dans le domaine départemental ou régional ; on repaie quand elles y entrent. Soyons attentifs à tous ces points, mes chers collègues !
Quand j’entends que l’application de l’article 40 de la Constitution tend à limiter le dispositif de compensation, je me dis qu’il reste encore un certain nombre d’obstacles importants à lever en matière de financement des collectivités territoriales. Tout cela n’est pas réglé, d’où, mes chers collègues, mon appel à la vigilance !
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Je tiens à apporter un témoignage un peu à contre-courant de ce que j’entends, en particulier dans la bouche de la ministre.
J’ai eu à vivre le transfert des routes nationales à la région Guadeloupe. On a refusé un état lieux ; on nous en a imposé un qui avait été réalisé par la direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DEAL). Jusqu’à ce jour, c’est-à-dire douze ans après, je pense que rien n’est signé. Pour les ouvrages d’art, la vétusté n’a pas été prise en compte, notamment pour des ponts, autoponts et autres ouvrages d’importance. Pourquoi cette signature n’intervient-elle pas ? La raison en est simple : la responsabilité pénale de l’exécutif serait engagée et, jusqu’ici, l’État n’a rien voulu entendre dans cette affaire. Je ne sais pas comment mon successeur a pu la régler, mais, pour ma part, j’avais refusé de signer le document qui m’était présenté.
Le groupe CRCE vient de retirer un amendement sur la problématique de l’état des lieux. On ne parvient pas toujours à s’entendre sur cette question et à trouver un accord pour pouvoir signer la convention. En conséquence, je ne suis pas opposé – c’est l’amendement déposé par le groupe socialiste – à ce qu’il y ait une révision à date du coût effectif de ces transferts.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 280 rectifié et 418 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 43, modifié.
(L’article 43 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 43
M. le président. L’amendement n° 282, présenté par MM. Savoldelli et Bocquet, Mmes Cukierman, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 43
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le II de l’article L. 1615-6 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« II. – Pour les bénéficiaires du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée mentionnés à l’article L. 1615-2, les dépenses éligibles en application du même article L. 1615-2 à prendre en considération pour la détermination des attributions du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée au titre d’une année déterminée sont celles afférentes à l’année en cours. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Nous reprenons, dans cet amendement, un des articles de notre proposition de loi visant à soutenir les collectivités territoriales suite à la crise du covid-19, qui prend d’autant plus de sens aujourd’hui, au regard des conséquences de cette crise sur la commande publique.
Garantir la contemporanéité de l’attribution du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), c’est-à-dire donner aux collectivités cet argent l’année même de la dépense, encouragera les élus locaux à investir.
M. Michel Canévet. Six milliards !
M. Philippe Folliot. Et l’article 40 ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. On sait combien la récupération du FCTVA est importante. De nombreux efforts ont été réalisés, de la part du Gouvernement, d’ailleurs, pour une récupération plus prompte. Une partie est déjà concernée par une récupération en année n. On peut également rencontrer quelques difficultés en cas de programmes pluriannuels et de séquencement des travaux. Enfin, je pense très sincèrement que la dématérialisation doit permettre aux collectivités de fournir plus facilement les documents et d’accélérer le rythme de récupération.
Pour ces raisons, l’amendement m’apparaît globalement satisfait, même si l’on peut encourager le Gouvernement à aller encore plus vite et plus loin. Je formule donc une demande de retrait ou un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.
M. Didier Marie. Bien évidemment, nous allons soutenir cet amendement, qui – et c’est une excellente idée – s’inscrit dans une logique contracyclique.
À cet égard, je voudrais rappeler qu’une mesure de même nature avait été mise en place, dans les années 2008 et 2009, par M. Nicolas Sarkozy, ce qui démontre que cette mesure n’a aucun caractère idéologique. Il s’agit d’une proposition très pragmatique, qui va dans le sens des évolutions techniques récentes, notamment sur l’automatisation du FCTVA, et permet de conforter les capacités d’investissement des collectivités. Dans la période que nous vivons, c’est une excellente initiative !
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour explication de vote.
M. Bernard Delcros. Peut-on connaître le coût de cette mesure ? Celle-ci avait été évoquée dans le cadre du projet de loi de finances et, si je ne me trompe pas, elle représenterait un coût de l’ordre de 5 à 6 milliards d’euros. Je m’étonne donc que cet amendement ait franchi le cap de l’article 40 de la Constitution, alors qu’un certain nombre d’autres amendements qui engageaient des dépenses bien moindres ont été déclarés irrecevables à ce titre.
M. Philippe Folliot. Absolument !
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Je sais qu’il est tard, mais je suis en état de sidération… Il faudra effectivement que nous ayons un débat sur l’article 40 de la Constitution, mon cher collègue Bernard Delcros. Vous posez la question de savoir pourquoi et comment cet amendement serait passé sous les fourches caudines de l’article 40, mais tellement d’autres amendements y sont passés… Là, on pourrait vraiment s’en étonner et en discuter pendant plusieurs heures !
Je vous le dis très sincèrement, rien n’est écrit dans notre règlement intérieur, mais je trouve l’intervention que vous venez de faire particulièrement inélégante.
Premièrement, je demande à voir quelle charge supplémentaire entraîne le remboursement du FCTVA en année n, n+1 ou n+2 – ce n’est ni une dépense ni une charge supplémentaire en tant que telle.
Deuxièmement, nous avons mieux à faire dans cet hémicycle. J’entends des arguments de fond, y compris en défaveur de notre amendement. Discutons-en, plutôt que de savoir si les amendements des uns et des autres ont été suffisamment bien examinés par la commission des finances et si la censure au sein de cet hémicycle a fonctionné de manière satisfaisante.
Oui, cet amendement a été examiné comme tous les autres et aucun de nos groupes n’a eu quelque privilège que ce soit. Cet amendement est présenté en séance : vous êtes d’accord avec notre proposition, vous le votez ; vous n’êtes pas d’accord, vous ne le votez pas et vous donnez vos arguments. C’est tout même plus intéressant pour nos collectivités territoriales, je crois, que de savoir s’il fallait que l’article 40 de la Constitution s’applique ou pas.
M. Didier Marie. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Tout le monde, d’après moi, a présenté des amendements frappés au titre l’article 40 de la Constitution, y compris la commission des lois. Donc, moi, je n’accuse personne de quoi que ce soit. Cet article 40 a suscité de nombreuses interventions ; il ne m’appartient pas de faire des commentaires, et je n’en ferai pas.
Mais, mettons-nous bien d’accord, nous n’examinons pas une loi de finances. Cet amendement traduit une volonté de chercher des solutions pour accélérer la récupération du FCTVA. En ce domaine, un calendrier a, je crois, été voté et des voies d’accélération existent à travers la dématérialisation. Enfin, mes chers collègues, nous savons, pour avoir été maires, que certains programmes sont pluriannuels, avec une partie du chantier s’étalant sur deux ans et une facture payée à l’issue des travaux. Dans ce cas, il est impossible de caler le FCTVA sur l’avancement des travaux.
Je nous invite donc, mes chers collègues, à reprendre ce débat lors de l’examen du projet de loi de finances, car c’est un débat de fond, sur lequel la commission des finances doit donner son avis.
Chacun, ici, est doué de raison et de conviction, et je ne cherche à influencer personne. Néanmoins, la commission, après avoir travaillé sur le sujet, a émis un avis défavorable pour la raison de fond que je viens de mentionner – il s’agit d’un sujet financier que l’on ne peut pas traiter comme cela –, mais aussi parce qu’il n’est pas certain que ce soit faisable, y compris pour les collectivités. En effet, cette solution exigerait une ingénierie qui n’existe pas.
Donc, cette proposition est sans doute intéressante, mais il faut l’examiner dans le cadre du projet de loi de finances, d’où l’avis défavorable.
M. Éric Kerrouche. Il y a un très bon livre, qui s’intitule L’Amour du censeur… Il ne faudrait pas que nous tombions nous-mêmes dans une espèce de syndrome de Stockholm, que nous nous étonnions que tel ou tel amendement échappe aux articles 40 et 45 de la Constitution. Ce serait un comble !
En l’espèce, l’amendement est recevable. On en pense ce que l’on en veut, on peut être pour ou contre, mais il est recevable ! Nous n’avons pas dès lors à nous interroger et à nous livrer à un contrôle a posteriori d’un amendement qui a été déposé par d’autres collègues. Ce serait un comble, j’insiste !
Comme l’a dit Didier Marie, c’est une très bonne initiative, indépendamment de ce qu’en pense Mme la rapporteure. Nous voterons pour cet amendement ; son adoption sera une très bonne chose pour les collectivités concernées.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Madame la rapporteure, c’est tout à fait faisable. Il s’agit seulement d’un programme informatique qu’il faut régler de façon à prendre en compte les dépenses d’investissement. Cela permet que la TVA soit remboursée beaucoup plus tôt – quand on peut la rembourser tardivement, on peut la rembourser précocement !
Vous avez raison, monsieur Marie, de rappeler le plan de relance lancé après la crise financière. Il était très important à l’échelle des collectivités ; il les avait « boostées » et leur avait donné une volonté plus importante d’investir en période difficile.
Cela étant, je partage votre point de vue, madame la rapporteure : ce débat doit avoir lieu lors de l’examen d’un projet de loi de finances. Je ne voterai pas en faveur de cet amendement, mais soyons vigilants – qu’on s’y retrouve lors du budget !
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Pour ma part, je tenais à vous remercier, madame la rapporteure. Je pense que vous avez raison : ce débat relève d’une loi de finances.
Nous allons toutefois maintenir cet amendement, car il y a urgence pour les collectivités, mais aussi parce que ce que nous proposons est faisable. En fin de compte, c’est un amendement d’appel. Chacun aura la liberté de voter ou non en sa faveur… Quoi qu’il en soit, nous le redéposerons lors de l’examen du projet de loi de finances, d’autant que votre avis est plutôt positif dans l’esprit.
S’il n’est pas adopté aujourd’hui, j’espère que, lors de la discussion du projet de loi de finances, nous arriverons à travailler ensemble et à nous mettre d’accord. Je pense qu’il vaut mieux avoir des débats de ce type plutôt que de s’émouvoir, les uns et les autres, de la pertinence de tel ou tel amendement ou de chercher à savoir si les censeurs ont bien joué leur rôle.
Depuis le début de l’examen de ce projet de loi, comme depuis le début de la session, sur beaucoup de textes, les articles 40 et 45 de la Constitution sont parfois utilisés pour tordre le débat politique, voire pour l’éviter. Cela frappe tous les groupes, mais, parfois, seuls notre groupe et les autres groupes minoritaires et d’opposition sont concernés.
Pour le coup, c’est un vrai débat ; je pense qu’il y a urgence pour nos collectivités. En tout cas, je suis heureux d’avoir eu avec vous ce moment d’échange. Encore une fois, nous maintenons cet amendement. S’il est adopté, tant mieux ! Sinon, nous le défendrons de nouveau lors de l’examen du prochain projet de loi de finances.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. J’entends ce que vous dites, monsieur Gay. Mais ne nous méprenons pas ! En ce qui me concerne, je ne suis pas la commission des finances. Mon rôle me conduit à affirmer que ce débat trouvera davantage sa place lors de l’examen du projet de loi de finances, mais ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit.
M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.
M. Michel Canévet. Notre collègue Bernard Delcros a seulement voulu dire qu’un certain nombre d’amendements avaient été déclarés irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution. Or l’amendement qui concerne les 6 milliards d’euros ne l’a pas été – disons-le clairement.
En effet, c’est un débat qui relève d’une loi de finances. Il y a là un vrai sujet pour les collectivités ; nous l’avons déjà abordé lors des précédents budgets. J’espère que nous pourrons nous retrouver lors de l’examen du prochain projet de loi de finances afin d’avancer.
M. le président. Madame la ministre, mes chers collègues, il est minuit. Je vous propose de prolonger notre séance jusqu’à minuit et demi afin de poursuivre l’examen de ce texte.
Il n’y a pas d’observation ?…
Il en est ainsi décidé.
L’amendement n° 284 rectifié, présenté par MM. Savoldelli et Bocquet, Mmes Cukierman, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 43
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 5211-28-2 du code général des collectivités territoriales est abrogé.
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Cet amendement vise à abroger l’article L. 5211-28-2 du code général des collectivités territoriales dans le but de revenir sur l’unification de la dotation globale de fonctionnement (DGF) des communes à l’échelle intercommunale, introduite en 2014 par la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite loi Maptam.
La disposition visée permet de mettre en commun les ressources liées à la DGF destinées aux communes à l’échelle intercommunale. La loi de finances pour 2020 a certes complété cet article par un dispositif moins contraignant, mais celui-ci conserve le même esprit : il permet d’allouer la DGF selon des critères locaux fixés par les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).
Or chacun sait ici que ces derniers ne sont pas des collectivités territoriales. On le dit souvent entre nos murs : la commune reste l’échelon de base de la République. Dès lors, laisser la DGF aux mains des intercommunalités, c’est signer le recul des libertés locales, de l’autonomie des communes, voire du principe de libre administration.
Cela fait réagir de nombreux élus, en particulier les maires ruraux, d’autant que cela intervient dans un contexte où, même sous couvert de stabilité, les communes, pour plus de la moitié d’entre elles, voient leur DGF diminuer. Dans ce contexte de crise sanitaire, qui appelle des investissements nécessaires, il nous semble utile d’abroger ce dispositif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Notre collègue souhaite supprimer le mécanisme permettant la perception de la DGF des communes par les EPCI à fiscalité propre. Ce mécanisme est une faculté qui est offerte aux communes et aux EPCI qui le souhaitent. Notre logique consiste plutôt à conserver des libertés, pas à les supprimer.
Je rappelle que la loi encadre d’une manière très stricte le dispositif de DGF intercommunale : sa mise en place nécessite des délibérations concordantes du conseil communautaire et de chacun des conseils municipaux des communes membres. Le cas échéant, il est en outre prévu que l’EPCI institue une dotation de reversement pour les communes membres, c’est-à-dire une dotation de solidarité.
Laissons les collectivités et leurs groupements gérer la DGF comme elles l’entendent. Votre volonté de revenir sur cette possibilité est contraire à l’esprit dans lequel la commission a travaillé. En conséquence, celle-ci sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Mme la rapporteure a très bien expliqué les choses. Je veux tout de même rappeler l’historique. Ce mécanisme a été créé pour la première fois en 2010 par la loi de réforme des collectivités territoriales, dite loi RCT, puis il a été ensuite légèrement modifié en 2014. Si nous y sommes revenus en 2020, c’est seulement pour le rendre plus attractif.