M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable.
Question préalable
M. le président. Je suis saisi, par Mmes Eustache-Brinio et Vérien, au nom de la commission, d’une motion n° 1.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l’article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, confortant le respect des principes de la République (n° 734 rectifié, 2020-2021).
Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 7, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour dix minutes, un orateur d’opinion contraire, pour dix minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas deux minutes et demie, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à Mme la rapporteure, pour la motion.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Après l’échec de la commission mixte paritaire, cette motion a pour objet d’opposer la question préalable au projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, confortant le respect des principes de la République.
En nouvelle lecture, l’Assemblée nationale a supprimé 39 des 56 articles ajoutés par le Sénat. Cette situation illustre le fait que la majorité des députés n’a pas entendu trouver, avec le Sénat, le moyen de progresser sur des sujets essentiels pour nous, tels que la neutralité de l’État, la laïcité et le vivre ensemble, sur lesquels nous avions formulé des propositions concrètes en première lecture.
Parallèlement, des désaccords persistent, notamment sur l’instruction à domicile, malgré les réserves que nous avions exprimées sur la constitutionnalité des dispositions envisagées. Mais l’Assemblée nationale n’a retenu aucun des autres dispositifs que nous avions proposés.
Si 23 des articles du projet de loi ont fait l’objet d’un vote conforme, les apports du Sénat conservés par l’Assemblée nationale sont très peu nombreux ; Mme Vérien et moi-même les avons rappelés. Cela n’est pas suffisant pour aller plus loin.
En dépit de la conservation de ces ajouts et des quelques points d’accord qui ont pu être trouvés sur l’article 18, la volonté du Sénat de poser des distinctions claires permettant le respect par tous des principes de la République, tout en préservant la liberté de culte, n’a pas été entendue.
Alors même que le Sénat avait salué le dépôt et la discussion de ce texte et avait rejoint l’Assemblée nationale sur de nombreux points comme la haine en ligne, les députés n’ont retenu aucun des mécanismes adoptés par notre assemblée en première lecture qui visaient à préserver le rôle des associations d’inspiration religieuse, sans organiser l’exercice d’un culte, et à simplifier les démarches des petites associations établies de longue date.
Par ailleurs, malgré les réserves du Sénat sur la portée, l’efficacité et les effets collatéraux des mesures présentées comme promouvant l’égalité entre les femmes et les hommes, l’Assemblée nationale a rétabli son texte de première lecture. À l’inverse, elle n’a retenu quasiment aucune mesure destinée à renforcer la police des cultes, dans le prolongement de la loi de 1905. Là encore, c’est un véritable point de divergence.
On ne peut que regretter que les assemblées ne parviennent pas à un accord sur un texte visant à conforter le respect des principes de la République et, compte tenu de la position de l’Assemblée nationale, il apparaît manifestement impossible de parvenir à un texte commun.
La présente motion tire les conséquences de cette impossibilité, que nous pouvons tous regretter.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, contre la motion.
M. Jean-Pierre Sueur. Je ne vais pas revenir sur les positions de fond qui nous conduisent à nous opposer à ce texte – Mme Marie-Pierre de La Gontrie les a excellemment exposées.
Je veux simplement dire que, si nous votons contre cette motion, c’est pour une question de principe. Nous sommes nombreux à ne pas accepter que la procédure exceptionnelle soit devenue la règle. En trois ans, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée sur tous les projets de loi, à une exception près. Il ressort pourtant de la lettre et de l’esprit de la Constitution que cette procédure doit être réservée à des circonstances exceptionnelles. Or elle est devenue banale.
Cela signifie que nous renonçons au travail que certains et certaines d’entre nous ont connu dans des temps passés, au titre duquel un texte est discuté dans une assemblée, puis dans l’autre, et revient dans la première avant d’être examiné de nouveau dans la seconde. Il ne s’agit aucunement de perdre son temps : on peaufine le texte, on examine toutes les objections, on s’efforce de faire la meilleure œuvre législative possible.
Tout cela est maintenant terminé : une seule lecture a lieu dans chaque assemblée. Pour ma part, je n’ai jamais souscrit à ce présupposé.
De même, à l’issue d’une commission mixte paritaire qui a échoué, l’esprit et la lettre de la Constitution commandent que le texte soit de nouveau débattu dans les deux assemblées. Le Sénat et l’Assemblée nationale reprennent leur travail et les parlementaires continuent à examiner le texte en discussion, car, même à l’issue d’une commission mixte paritaire, tout apport d’une assemblée peut être intégré par l’autre. J’insiste, c’est la lettre et l’esprit de nos institutions.
Mais voilà que, face au choix du Gouvernement de recourir exclusivement à la procédure accélérée, nous répondons qu’il n’est plus la peine de débattre, lorsque les commissions mixtes paritaires échouent. Cela présuppose, mes chers collègues, que nous nous habituons à une situation bloquée. Nous avons beau dire tout ce que nous voulons, l’Assemblée nationale, de toute façon, n’en tiendra aucun compte – et inversement. Voilà le jeu de rôle auquel nous nous prêtons. Je le redis, tel n’est pas l’esprit des institutions !
Cela peut être satisfaisant, lorsque l’ordre du jour est très chargé, mais c’est une autre question. Cela peut aussi être une facilité.
En tout cas, je tiens à dire, au nom du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, que nous n’acceptons pas un tel fonctionnement. Réfléchissez-y, mes chers collègues : c’est une certaine idée du Parlement qui s’en va avec ces questions préalables. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE. – M. André Guiol applaudit également.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.
M. André Reichardt. Je voterai, comme mes collègues du groupe Les Républicains, cette motion tendant à opposer la question préalable. Les raisons en sont simples, elles ont été parfaitement explicitées par Jacqueline Eustache–Brinio, au nom de la commission des lois.
Nos collègues Dominique Vérien et Muriel Jourda ont fait référence à l’Alsace-Moselle. Je veux dire ici solennellement que, au travers de ce texte, nous abandonnons une nouvelle fois ce territoire sur deux items particulièrement importants, que le Sénat avait bien voulu prendre en compte.
Mes chers collègues, nous avions simplement souhaité une mesure de justice et d’équité, à savoir que les établissements publics du culte d’Alsace-Moselle soient autorisés à faire la même chose que les associations cultuelles de l’intérieur, pour reprendre l’expression que nous utilisons. Nous souhaitions que nos établissements publics du culte puissent profiter des immeubles qu’ils pourraient recevoir en donation via des legs. À ce jour, ces établissements ne peuvent pas bénéficier d’un legs et ce ne sera pas plus le cas demain. Naturellement, ils ne pourront pas profiter des avantages locatifs y afférents.
Le Sénat avait voté une disposition prévoyant une telle possibilité, mais l’Assemblée nationale l’a retoquée. Pourquoi ?
En outre, nous avions demandé qu’en Alsace-Moselle il soit possible de continuer à tenir des réunions publiques dans les dépendances des établissements cultuels – cela se pratique depuis des années. Là encore, l’Assemblée nationale ne l’a pas accepté ! Ce sont pourtant des centaines de réunions qui sont organisées de la sorte – je l’ai moi-même fait à de très nombreuses reprises.
En procédant ainsi, l’Assemblée nationale continue de couper les jarrets au droit local ; ce sont deux atteintes inadmissibles qui lui ont été portées. Je le dis solennellement : c’est assez !
M. le président. Je mets aux voix la motion n° 1, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est favorable et que celui du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 159 :
Nombre de votants | 330 |
Nombre de suffrages exprimés | 320 |
Pour l’adoption | 205 |
Contre | 115 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, le projet de loi confortant le respect des principes de la République est rejeté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quinze.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante, est reprise à vingt et une heures quinze, sous la présidence de Mme Nathalie Delattre.)
PRÉSIDENCE DE Mme Nathalie Delattre
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
8
Différenciation, décentralisation, déconcentration et simplification
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, modifié par lettre rectificative, relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (projet n° 588 rectifié, texte de la commission n° 724, rapport n° 723, avis nos 719, 720 et 721).
La procédure accélérée a été engagée sur ce texte.
Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre VII du titre VII, à l’examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 73.
TITRE VII (suite)
MESURES DE SIMPLIFICATION DE L’ACTION PUBLIQUE
Chapitre VII (suite)
Transparence et agilité des entreprises publiques locales
Articles additionnels après l’article 73
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 118 rectifié est présenté par MM. Lefèvre, D. Laurent et Burgoa, Mme Belrhiti, M. Bouchet, Mmes Garriaud-Maylam et Lassarade, MM. Vogel et Charon, Mmes Deromedi et Goy-Chavent, M. Milon, Mme Deroche, MM. Bascher, Genet, Mandelli, Piednoir, B. Fournier, Cambon et Brisson, Mme Gruny, M. Chatillon, Mmes Joseph et Jacques et MM. Sautarel, Rapin et Grosperrin.
L’amendement n° 1312 rectifié est présenté par M. Marseille, Mme Vermeillet, MM. Henno et Louault, Mme Dindar, M. Bonnecarrère, Mme Loisier, MM. Mizzon, Canévet, Kern, Cigolotti, Chauvet et P. Martin, Mme Létard, MM. S. Demilly, Le Nay, Cazabonne et Levi, Mmes Herzog et Vérien, M. Moga, Mme Morin-Desailly, MM. L. Hervé et Longeot, Mmes Billon et Jacquemet et MM. Hingray, Duffourg et Lafon.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 73
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 1525-3 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 1525-… ainsi rédigé :
« Art. L. 1525-… – Pour l’application de l’article 1er de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, le mandataire social au sein d’une société d’économie mixte locale, cessant définitivement ou temporairement ses fonctions peut saisir à titre préalable le président de la société afin d’apprécier la compatibilité de toute activité lucrative, salariée ou non, dans une entreprise privée ou un organisme de droit privé ou de toute activité libérale avec les fonctions exercées au cours des trois années précédant le début de la nouvelle activité.
« En cas de doute sérieux, sur la compatibilité de l’activité envisagée avec les fonctions exercées par cette personne au cours des trois années précédant le début de la nouvelle activité, le président saisit pour avis, préalablement à sa décision, le conseil d’administration ou le conseil de surveillance de la société.
« Lorsque l’avis du conseil d’administration ou le conseil de surveillance ne permet pas de lever ce doute sérieux, le conseil d’administration ou le conseil de surveillance saisit la Haute Autorité sur la transparence de la vie publique.
« Pour l’application du présent article, est assimilé à une entreprise privée tout organisme ou toute entreprise exerçant son activité dans un secteur concurrentiel conformément aux règles du droit privé. »
La parole est à Mme Pascale Gruny, pour présenter l’amendement n° 118 rectifié.
Mme Pascale Gruny. Cet amendement, déposé par notre collègue Antoine Lefèvre, tend à fluidifier et à sécuriser la reconversion professionnelle, dans le secteur privé, des dirigeants de certaines entreprises publiques locales, notamment les sociétés d’économie mixte locales. Avec cette disposition, le départ de ces dirigeants vers une entreprise du secteur privé serait soumis à un avis favorable du président de ladite société, afin d’éviter tout risque de conflit d’intérêts.
Si le président de cette société a de sérieux doutes quant à la compatibilité de la nouvelle activité avec les anciennes fonctions du candidat, il pourra saisir pour avis, préalablement à sa décision, le conseil d’administration ou le conseil de surveillance de cette société. La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) constituerait le dernier échelon de ce contrôle.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour présenter l’amendement n° 1312 rectifié.
M. Jean-François Longeot. Cet amendement a été brillamment défendu par Mme Gruny, madame la présidente !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. L’objet de ces amendements porte sur le contrôle déontologique de ce que l’on appelle le « pantouflage » des mandataires sociaux d’une société d’économie mixte (SEM).
L’idée défendue est intéressante, mais je crains que le dispositif ne fonctionne pas, car le président du conseil d’administration ou de surveillance d’une société commerciale n’a aucun titre pour rendre une décision sur l’avenir professionnel d’un mandataire social de SEM.
En outre, il n’est pas prévu de dispositions précisant comment cette décision serait sanctionnée.
La commission demande donc le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Même avis !
Mme Pascale Gruny. Je le retire !
Mme la présidente. L’amendement n° 118 rectifié est retiré.
Monsieur Longeot, l’amendement n° 1312 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-François Longeot. Non, je le retire également, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 1312 rectifié est retiré.
L’amendement n° 1566 rectifié ter, présenté par MM. Savin, Retailleau, Piednoir, Brisson, Karoutchi et Laugier, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, Burgoa et Regnard, Mmes Muller-Bronn et Puissat, M. Courtial, Mmes Lassarade, L. Darcos et Joseph, M. Guerriau, Mmes Malet et Loisier, MM. Tabarot et A. Marc, Mmes Dumas et Gosselin, M. Gremillet, Mme Belrhiti, M. Belin, Mme Chain-Larché, MM. Cuypers et Kern, Mmes Imbert et Deromedi, MM. Cigolotti, Genet, Chauvet, B. Fournier, Bouchet, H. Leroy, Charon et Bonhomme, Mme Billon, MM. Duffourg, Moga, Mandelli, Longeot et Segouin, Mme Berthet, M. Mouiller, Mme Lavarde, MM. Chasseing, Sol, Wattebled et Folliot, Mmes Raimond-Pavero et Deroche et MM. Houpert et Rapin, est ainsi libellé :
Après l’article 73
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article L. 311-1 du code du sport, il est inséré un article L. 311-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 311-1-1. – Le gardien de l’espace naturel dans lequel s’exerce un sport de nature n’est pas responsable des dommages causés à un pratiquant sur le fondement du premier alinéa de l’article 1242 du code civil lorsque ceux-ci résultent de la réalisation d’un risque inhérent à la pratique sportive considérée. »
II. – L’article L. 365-1 du code de l’environnement est ainsi modifié :
a) Au début, sont ajoutés les mots : « Sans préjudice de l’article L. 311-1-1 du code du sport, » ;
b) Après la référence : « L. 361-1 », sont insérés les mots : « du présent code ».
La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Nous le constatons depuis de nombreuses années, et le phénomène s’est accentué en cette période de pandémie, le besoin de nature et d’activité sportive en extérieur, qui engendre un bien-être physique et moral, est devenu indispensable pour nos concitoyens.
Or les pratiques sportives en milieu naturel, comme l’escalade en falaise, mais également le canyoning, le parapente, le vélo tout-terrain (VTT), la randonnée ou d’autres activités, connaissent de graves difficultés pour des raisons juridiques.
En ce qui concerne le seul cas de l’escalade, près de 2 000 sites naturels sont aujourd’hui menacés et, il faut le rappeler, un grand nombre de ces sites représentent un intérêt touristique majeur pour nos territoires. En effet, depuis un arrêt de la cour d’appel de Toulouse datant de janvier 2019, confirmé ensuite par la Cour de cassation, la jurisprudence considère que le propriétaire ou le gestionnaire d’un site d’escalade est responsable en cas d’accident.
La Fédération française de la montagne et de l’escalade (FFME) avait conclu avec des propriétaires publics – de nombreuses collectivités sont propriétaires de ces sites – ou privés des conventions de gestion, au travers desquelles elle se substituait à eux du point de vue de la responsabilité. Cependant, la Fédération, se trouvant dans l’impossibilité d’assurer financièrement l’augmentation importante de la prime d’assurance exigée, a dénoncé l’ensemble de ces conventions de gestion.
Au cours des derniers mois, de nombreux sites ont donc été fermés, du fait des risques de recours. Les collectivités, qui sont très majoritairement propriétaires de ces sites, sont dans l’attente d’une simplification et d’une législation plus sécurisante pour elles.
Tel est l’objet de cet amendement, qui tend à reprendre la proposition de loi que M. Retailleau et moi-même avions déposée et fait adopter par le Sénat en janvier 2018. Malheureusement, cette proposition de loi visant à adapter le droit de la responsabilité des propriétaires ou des gestionnaires de sites naturels ouverts au public n’a jamais été inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale.
Au travers de cet amendement, il est proposé de limiter expressément la responsabilité du gardien d’un espace naturel au travers de l’acceptation par le pratiquant d’un risque inhérent à l’activité sportive concernée. Ce dispositif permet d’alléger la responsabilité des propriétaires et des gestionnaires des sites naturels, tout en responsabilisant les usagers.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. L’objet de cet amendement a été particulièrement bien expliqué par notre collègue Savin. Il porte sur la responsabilité civile applicable aux propriétaires de sites naturels ouverts au public.
Vous avez raison, mon cher collègue, il faut aujourd’hui légiférer. Cette disposition a été adoptée par le Sénat à plusieurs reprises ; aussi, par cohérence, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Monsieur Savin, votre amendement porte sur la responsabilité des propriétaires et des gestionnaires des sites naturels ouverts au public.
Au travers de cette disposition, la responsabilité du gestionnaire de site naturel ne pourrait pas être engagée en cas de dommages causés aux pratiquants, si « ceux-ci résultent de la réalisation d’un risque inhérent à la pratique sportive considérée ».
Bien que le Gouvernement soit favorable à l’atténuation du régime actuel de responsabilité, afin de favoriser le développement de la pratique, il ne saurait soutenir une exonération aussi large, aussi totale, de la responsabilité dans le cadre de la pratique d’un sport de nature.
Il aurait été préférable que la responsabilité soit limitée aux risques « normalement prévisibles ». L’appréciation de la normalité et de la prévisibilité du risque permet en effet de tenir compte du comportement de ceux qui pratiquent, mais également de l’aménagement et de la signalétique du site et des installations.
Ainsi, en l’état, cet amendement, en raison de son caractère beaucoup trop large, ne peut faire l’objet d’un avis favorable du Gouvernement.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Savin, pour explication de vote.
M. Michel Savin. Je remercie Mme la rapporteure de s’en remettre à la sagesse de notre assemblée. En effet, de nombreux sites naturels, sur l’ensemble du territoire français, sont concernés par cette disposition.
Madame la ministre, j’entends bien votre argumentation : d’un côté, le Gouvernement est favorable à cette disposition sur le principe, mais, de l’autre, il n’est pas favorable à sa rédaction, parce qu’elle serait trop large.
Néanmoins, je vous le rappelle, cela fait deux ans que ce texte a été transmis à l’Assemblée nationale, deux ans que la majorité de l’Assemblée nationale ou le Gouvernement a la possibilité de l’inscrire à l’ordre du jour. Cela aurait pu permettre au Gouvernement de l’améliorer, de le corriger, de l’amender, en tant que de besoin, mais rien n’a été fait !
Aujourd’hui, les collectivités – les maires ou les présidents de département – sont confrontées à de graves difficultés juridiques et à des risques de contentieux qui peuvent coûter très cher. C’est la raison pour laquelle la FFME a mis fin à toutes les conventions qui la liaient aux collectivités : elle était dans l’incapacité de s’assurer.
Je maintiens donc cet amendement pour qu’il puisse être adopté ; libre au Gouvernement ensuite, madame la ministre, d’en corriger, si nécessaire, le dispositif au cours de la navette, mais il faut que l’on avance, parce que les élus attendent une réponse.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 73.
Article 73 bis (nouveau)
I. – Après l’article L.1524-5 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 1524-5-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1524-5-1. – Sauf stipulation contraire de leurs statuts, les sociétés d’économie mixte locales sont représentées à l’assemblée des associés ou actionnaires de leurs filiales, au sens de l’article L. 233-1 du code de commerce, par l’un des représentants des collectivités territoriales ou de leurs groupements au sein de leur conseil d’administration ou de surveillance, désigné par celui-ci.
« Les membres du conseil d’administration ou de surveillance d’une société anonyme, filiale d’une société d’économie mixte locale au sens du même article L. 233-1, sont désignés, sauf stipulation contraire des statuts de cette filiale :
« 1° À proportion de la part détenue par la société d’économie mixte locale dans le capital de sa filiale, multipliée par la part détenue par les collectivités territoriales et leurs groupements actionnaires dans le capital de la société d’économie mixte locale, le total étant arrondi à l’entier inférieur, par le conseil d’administration ou de surveillance de ladite société d’économie mixte locale et parmi les représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements qui y disposent d’un siège ;
« 2° Pour le reste, selon les modalités prévues à la section II du chapitre V du titre II du livre II du code de commerce.
« Les quatrième à dixième alinéas de l’article L. 1524-1 du présent code sont applicables aux représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements désignés pour siéger au conseil d’administration ou de surveillance d’une société anonyme, filiale d’une société d’économie mixte locale, en application du 1° du présent article.
« Les élus locaux mentionnés au premier alinéa et au 1° du présent article ne sont pas considérés comme étant intéressés à l’affaire, au sens de l’article L. 2131-11 du présent code, de l’article 432-12 du code pénal ou du I de l’article 2 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, lorsque la collectivité territoriale ou le groupement qu’ils représentent délibère sur ses relations avec la filiale concernée.
« Toutefois, ils ne peuvent participer aux commissions d’appel d’offres ou aux commissions d’attribution de délégations de service public de la collectivité territoriale ou du groupement lorsque la filiale est candidate à l’attribution d’un marché public ou d’une délégation de service public dans les conditions prévues aux articles L. 1411-1 à L. 1411-19 du présent code, non plus qu’aux délibérations mentionnées au dixième alinéa de l’article L. 1524-1.
« Pour l’application du II de l’article L. 2123-20, du premier alinéa des articles L. 3123-18 et L. 4135-18, du sixième alinéa de l’article L. 5211-12 et du premier alinéa des articles L. 7125-21 et L. 7227-22, il est tenu compte des rémunérations perçues par les élus locaux mentionnés au 1° en tant qu’ils exercent les fonctions de membre ou de président du conseil d’administration ou de surveillance ou de président assurant les fonctions de directeur général de la filiale. »
II. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2023.