M. Joël Labbé. Le présent amendement vise à rétablir l’article 4 tel que l’Assemblée nationale l’a adopté, tout en l’améliorant pour en renforcer la portée.
Alors que la commission des affaires économiques du Sénat a réécrit cet article, notre amendement tend à revenir au principe d’un étiquetage de l’origine des ingrédients des produits transformés qui soit transparent pour le consommateur et protecteur pour le producteur.
C’est pourquoi nous proposons de ne pas retenir la mention du lien avéré entre les propriétés des produits et leur origine, qui figure dans le texte issu de l’Assemblée nationale. La démonstration qu’un tel dispositif suppose relève quasiment de l’impossible et entrave toute possibilité de renseigner l’information sur l’origine des ingrédients dans les produits transformés. Même si cette disposition est prévue par la réglementation européenne, il me semble qu’il faut conserver la possibilité d’expérimenter des règles plus protectrices.
Cet amendement vise également à compléter l’article L. 412-4 du code la consommation en prévoyant, pour les aliments transformés, de renseigner l’origine de l’intégralité des ingrédients les composant. Il diffère ainsi de la rédaction retenue par l’Assemblée nationale qui porte sur la seule origine des ingrédients primaires.
Le présent amendement permet de mieux satisfaire les consommateurs en répondant à leur souhait de pouvoir identifier l’origine des produits qu’ils consomment, et d’encourager, par la transparence sur l’origine, la production agricole française.
Si l’articulation de ce dispositif avec le droit européen est complexe, la France se doit d’être pionnière en la matière et d’avancer le plus loin possible sur le sujet en droit national. La stratégie Farm to Fork, « de la ferme à la fourchette », a en effet pour but de renforcer l’information du consommateur, notamment via l’étiquetage de l’origine des produits.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. Le dispositif de l’amendement n° 141 supprime totalement les apports de la commission, notamment l’obligation d’informer le consommateur lorsqu’il existe une différence entre l’origine du produit et celle de l’ingrédient primaire. Je précise également, puisque cet amendement tend à le mettre en œuvre, que l’affichage obligatoire de l’origine de tous les produits est certes en débat, mais n’est pas conforme au droit européen à ce jour.
Par conséquent, la commission vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, monsieur Labbé, faute de quoi elle y sera défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 4, modifié.
(L’article 4 est adopté.)
Article 4 bis
Au I de l’article L. 412-9 du code de la consommation, après le mot : « livrer », sont insérés les mots : « ou dans les établissements sans salle de consommation sur place et proposant seulement des repas à emporter ou à livrer ».
Mme la présidente. L’amendement n° 78, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Au début
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Au début du I de l’article L. 412-9 du code de la consommation, sont insérés les mots : « Sans préjudice des dispositions de l’article L. 412-1, ».
La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre. Madame la présidente, si vous le permettez, je présenterai en même temps les amendements nos 78 et 81.
Mme la présidente. J’appelle donc également en discussion l’amendement n° 81, présenté par le Gouvernement, et ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le I de l’article L. 412-9 du code de la consommation est complété par les mots : « , ainsi que pour les viandes utilisées en tant qu’ingrédient dans des préparations de viandes et des produits à base de viande lorsque l’opérateur a connaissance de cette information en application d’une réglementation nationale ou européenne ».
Veuillez poursuivre, monsieur le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, j’attire votre attention sur les amendements nos 78 et 81, car ils sont incroyablement importants. En effet, ils doivent enfin nous permettre de publier les décrets imposant la mention de l’origine de la viande dans la restauration collective hors domicile.
L’amendement n° 78 vise à en finir avec le marathon légistique nécessaire pour rendre obligatoire la mention de l’origine de toutes les viandes – pas seulement la viande bovine, mais aussi la volaille et toutes les autres viandes – dans la restauration hors domicile. Pour moi, il s’agit d’une mesure essentielle.
On le disait hier en évoquant le rôle du consommateur : quand les parents d’élèves se rendront compte que leurs enfants mangent du poulet brésilien ou ukrainien, les lignes bougeront – j’en ai l’intime conviction.
Si l’amendement n° 78 est adopté, j’ambitionne de pouvoir signer le décret avant la fin de l’année, de sorte qu’il entre en vigueur dès le début de l’année 2022, ce qui laissera le temps à la restauration collective de s’adapter.
L’amendement n° 81 tend à aller un cran plus loin puisque, pour faire simple, il concerne non seulement le blanc de poulet, mais aussi les nuggets. Ce point est également très important à mes yeux.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. La commission émet un avis favorable sur les amendements nos 78 et 81.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 4 bis, modifié.
(L’article 4 bis est adopté.)
Article 5
Le code de la consommation est ainsi modifié :
I (nouveau). – Au 1° de l’article L. 121-22, après le mot : « titre », sont insérés les mots : « soit de l’article L. 122-24 du présent code, ».
II. – La section 3 du chapitre II du titre II du livre 1er est complétée par une sous-section 7 ainsi rédigée :
« Sous-section 7
« Opérations de dégagement relatives aux produits agricoles ou de première transformation
« Art. L. 122-24. – Toute publicité pratiquée en dehors des magasins relative à une opération de dégagement de produits alimentaires ou de catégories de produits alimentaires définis par décret associant plusieurs magasins est autorisée par l’autorité administrative compétente après avis de l’organisation interprofessionnelle concernée.
« L’avis de l’organisation interprofessionnelle est réputé favorable en l’absence de réponse dans un délai fixé par le décret mentionné au premier alinéa.
« La publicité est réputée autorisée en l’absence de réponse de l’administration dans un délai fixé par le même décret.
« Une opération de dégagement est une opération promotionnelle visant à écouler une surproduction de produits alimentaires. »
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 10 rectifié est présenté par MM. Duplomb et J.M. Boyer, Mmes Chauvin et Férat, M. Cuypers, Mmes Noël et Gruny, MM. Sol et Chatillon, Mmes Estrosi Sassone et L. Darcos, MM. Cardoux, Sautarel, Pellevat, Vogel, Houpert et Hugonet, Mme Ventalon, M. Darnaud, Mmes Schalck et Demas, MM. Calvet et Bouchet, Mme Deromedi, M. Savin, Mmes Thomas et Chain-Larché, M. Daubresse, Mmes Belrhiti et Richer, MM. Bascher, Savary et de Nicolaÿ, Mmes Puissat et Goy-Chavent, MM. Bacci et Saury, Mme Micouleau, MM. Bonne, Détraigne, Decool et D. Laurent, Mme Di Folco, MM. Somon, Brisson, Pointereau et Allizard, Mme Lassarade, MM. Belin, Louault, Lefèvre, Anglars, Le Gleut, Charon et Hingray, Mmes Garriaud-Maylam et Imbert, MM. Chasseing, Klinger, Laménie et Genet, Mmes Deroche, Dumont et Bourrat, MM. Grosperrin, Chaize, E. Blanc, Rietmann et Guerriau, Mme Bonfanti-Dossat et MM. Burgoa, Sido, Babary, Chauvet, H. Leroy, Menonville et Piednoir.
L’amendement n° 42 est présenté par MM. Montaugé et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot, Antiste, Cozic, Devinaz, Durain, Fichet, Gillé, Jacquin et Kerrouche, Mmes Lubin, Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 6
Après les mots :
définis par décret
insérer les mots :
, à l’exception des fruits et légumes frais,
La parole est à M. Laurent Duplomb, pour présenter l’amendement n° 10 rectifié.
M. Laurent Duplomb. Le dispositif de cet amendement est relativement simple : il tend à créer une dérogation, pour les fruits et les légumes frais, au mécanisme d’encadrement des publicités lors des opérations de dégagement prévu par le présent article. Je précise que l’on parle d’opérations de dégagement quand on écoule hors magasin des fruits et légumes en quantité trop importante.
Mme la présidente. La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l’amendement n° 42.
M. Franck Montaugé. Ce sont les mêmes arguments que pour l’amendement précédent. Il est donc défendu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. Les fruits et légumes disposent déjà d’un régime spécial pour ce qui concerne les publicités faites en dehors des magasins. Les soumettre au dispositif de l’article 5 n’aurait pas forcément grand intérêt.
Cela étant, cet article prévoit qu’un décret définira le périmètre des produits concernés. Il est donc plus que vraisemblable que les fruits et légumes n’y figureront pas. Mais peut-être, monsieur le ministre, pourriez-vous nous éclairer sur ce point…
La commission s’en remettra à la sagesse du Sénat sur les amendements identiques nos 10 rectifié et 42.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, ministre. Le Gouvernement s’en remet également à la sagesse de la Haute Assemblée sur ces deux amendements identiques.
Il me paraît effectivement assez évident que le champ d’application de l’article 5 ne concerne pas les fruits et légumes périssables, comme vous l’avez très bien explicité, messieurs les sénateurs.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 10 rectifié et 42.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 5, modifié.
(L’article 5 est adopté.)
Article additionnel après l’article 5
Mme la présidente. L’amendement n° 106, présenté par Mme Schillinger, M. Buis, Mme Evrard, M. Marchand et Mme Havet, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de vingt-quatre mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’application et les effets de la présente loi. Cette évaluation est élaborée au terme d’une consultation publique associant notamment les consommateurs et leurs représentants.
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. La proposition de loi dont nous discutons s’inscrit dans le sillage de la loi Égalim du 30 octobre 2018.
Elle apporte, nous avons pu en débattre longuement, les ajustements qui se sont révélés nécessaires après trois ans de mise en œuvre des mesures sur le terrain.
Afin de continuer à s’inscrire dans cette logique d’amélioration continue, l’amendement du groupe RDPI vise à ce qu’un rapport du Gouvernement soit transmis au Parlement dans les deux ans qui suivront la promulgation du texte, ce qui permettra d’en suivre très concrètement les effets.
En outre, nous proposons que cette évaluation soit réalisée au terme d’une consultation publique associant notamment les consommateurs et leurs représentants. En effet, la question de la rémunération de nos agriculteurs est une préoccupation partagée par tous, au-delà des acteurs de la chaîne agroalimentaire : tous les consommateurs doivent être impliqués dans cette démarche plus juste et plus responsable.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. Cet amendement est, nous semble-t-il, un peu hybride. Soit la consultation vise à recueillir les souhaits des parties et, dans ce cas, il ne s’agit pas d’un rapport d’évaluation ; soit le rapport vise à évaluer les effets de la loi, et il s’agit alors effectivement d’un rapport d’évaluation de dispositions techniques, mesurables, objectives, et non d’une consultation.
En conséquence, la commission demande le retrait de l’amendement ; à défaut, elle y sera défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, ministre. Pour ma part, je suis favorable à cet amendement que je trouve vraiment pertinent.
Depuis le tout début de l’examen de cette proposition de loi, tout le monde parle du rôle du consommateur, qui est le donneur d’ordre in fine. Par ailleurs, on voit bien qu’il existe de plus en plus d’initiatives – chacun en a au moins une en tête – associant les consommateurs à la décision.
Je considère que l’élaboration d’un rapport d’évaluation de la loi – tout comme vous avez coutume de nous en imposer pour un certain nombre de textes –, qui associerait les consommateurs, s’inscrit dans cette logique et renforce le travail accompli depuis le début de l’examen de ce texte.
Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.
M. Laurent Duplomb. Je suis un peu effaré par vos propos, monsieur le ministre, et ce pour une simple et bonne raison : on attend toujours le rapport d’évaluation de la loi Égalim 1 ! Si les sénateurs ne s’y étaient pas attelés, nous ne disposerions d’aucun élément de mesure de cette loi, d’aucun thermomètre permettant d’apprécier des dispositions comme le seuil de revente à perte ou n’importe laquelle des dispositions dont on a parlé dans cet hémicycle ou ailleurs.
Après vous avoir entendu dire qu’un rapport d’évaluation de la loi Égalim 2 est nécessaire, j’ai presque envie de vous répondre : « Chiche » ! Simplement, monsieur le ministre, je préférerais que vous commenciez par nous remettre le rapport d’évaluation de la loi Égalim 1. Autrement dit : évaluons la réalité du ruissellement du SRP et cherchons à savoir où sont passés les 2 milliards d’euros perdus par les consommateurs.
Au fil du temps, on finit presque par oublier que le consommateur a payé de sa poche : a-t-il en partie récupéré son argent, via des promotions sur les détergents par exemple ? Le producteur qui, jusqu’à présent, n’a toujours pas vu la couleur du ruissellement que j’évoquais à l’instant, va-t-il enfin en profiter ? Bref, il me paraît vraiment nécessaire que vous rendiez enfin ce rapport.
Ma remarque vaut également pour le titre II de la loi Égalim 1. Cette dernière ne comportait pas que le titre Ier encadrant les relations commerciales : il faudra bien un jour que l’on parvienne à chiffrer le coût de la suppression des remises, rabais et ristournes, le coût de l’encadrement et de la séparation obligatoire entre conseil et vente pour les agriculteurs, celui de toutes les mesures mises en place dans les abattoirs, en plus du coût de toutes les mesures que l’on aura adoptées dans le cadre de l’examen de la loi Égalim 2, qui ont déjà contraint les agriculteurs et les filières à évoluer.
Au bout de quatre ans, ces éléments d’appréciation devraient être connus. Or ce n’est pas le cas. Monsieur le ministre, je suis favorable à un rapport d’évaluation de la loi Égalim 2, mais, s’il vous plaît, commencez par nous transmettre le rapport d’évaluation de la loi Égalim 1 !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre. Monsieur le sénateur, j’ai omis de le dire hier : sur la première partie de la loi Égalim 1, notamment sur le SRP, nous avons demandé à des économistes de nous remettre un premier rapport d’évaluation, ce qu’ils ont fait au mois de juin de l’année dernière.
Ce rapport n’a pas permis d’apprécier les effets du fameux ruissellement, si bien que nous avons demandé à ces économistes d’approfondir leurs travaux. Nous aurons ce rapport sur le prix « cour de ferme » au mois d’octobre. Je m’engage évidemment à vous le transmettre dès que nous l’aurons.
Mme la présidente. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.
M. Franck Montaugé. Les membres de mon groupe et moi-même sommes de fervents promoteurs de l’évaluation des politiques publiques. L’amendement de notre collègue me semble donc bienvenu.
J’irai même un peu plus loin, bien que ce soit un peu en marge de notre débat : j’ai déposé il y a quelque temps une proposition de loi constitutionnelle prévoyant que toute loi votée doit définir les objectifs sur le fondement desquels seront évalués les effets de la loi. Nous sommes là en plein dans le sujet, et il faut aller dans ce sens.
Procéder à des évaluations ex ante, in itinere, ex post – pour reprendre les termes latins – doit devenir une pratique parlementaire, évidemment en collaboration avec le Gouvernement.
C’est une nécessité au regard de la qualité de notre travail, mais aussi des attentes des citoyens, qui ont besoin de ces informations pour s’y retrouver. On le sait tous, les citoyens s’éloignent de nous ; voilà un moyen, parmi d’autres, de les intéresser à ce que nous faisons, et ce d’autant qu’ils sont, in fine, les destinataires des politiques publiques sur lesquelles nous travaillons.
Au nom de mon groupe, je soutiens donc cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. Mon propos sera plus bref que prévu, puisque Laurent Duplomb en a déjà évoqué une large partie.
Sans nous être concertés, nous nous rejoignons effectivement sur un élément essentiel : comme lui, je suis surpris ! Un travail de fond a été fait ; il y a eu ici, au Sénat, un vote à l’unanimité ; des propositions ont été avancées. Je vous l’accorde, monsieur le ministre, vous n’étiez pas ministre de l’agriculture à l’époque. Mais enfin, concrètement, nous avions décelé dès le début quelques problèmes et anomalies risquant de mettre certaines entreprises en situation de fragilité, nous avons élaboré une proposition de loi, votée à l’unanimité, et que nous a-t-on dit ? Nous sommes en période expérimentale. Laissons l’expérimentation aller à son terme. Et l’on en arrive aujourd’hui à débattre d’une loi Égalim 2 !
Le vrai problème, monsieur le ministre, c’est celui que j’ai évoqué – je m’avance ici probablement sur mon explication de vote ultérieure – : il y a la colonne recettes et la colonne dépenses !
Je ne peux absolument pas voter un amendement de cette nature, car nous ne parlons ici que de recettes. Les dépenses, on ne les évoque pas ! Si c’est une analyse correcte et lucide des effets que l’on veut vraiment faire, alors – et je vous le dis, monsieur le ministre, j’espère de tout cœur m’être trompé dans une partie de mes propos d’hier, car cela voudra dire que l’on aura réussi – je pense pour ma part que les décisions que nous en sommes en train de prendre représenteront des coûts exorbitants et fragiliseront un nombre considérable d’entreprises.
Mon souhait, dans le cadre du travail que je proposerai de poursuivre au sein de la commission des affaires économiques, madame la présidente, serait donc d’ajouter un sujet d’analyse : le coût des mesures que nous adoptons depuis hier. Combien tout cela coûte-t-il ? Il faudra aussi le mettre en avant.
Dernier point à prendre en compte – et je sais qu’au fond de vous, monsieur le ministre, vous partagez cette conviction – : placer une partie des producteurs en situation de fragilité, c’est mettre une partie des consommateurs en situation de dépendance, avec des produits qui proviendront d’autres pays que le nôtre.
Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Je n’ai rien contre ma collègue de la majorité présidentielle, mais nous annoncer, à six mois d’une élection présidentielle, que nous allons faire une évaluation de la loi, alors que depuis quatre ans et demi, tous groupes confondus, nous ne cessons de poser des questions… Je suis parfois un peu naïf, mais là, tout de même, je me dis que ça sent un peu la « manip » !
Néanmoins, la question est posée et, pardonnez-moi de le dire, elle dépasse le simple périmètre d’Égalim 2. La question, c’est : comment, en tant que sénateurs, travaillons-nous au quotidien avec le Gouvernement ?
Mme la présidente Sophie Primas a mis des choses en place – je voudrais bien qu’elle nous en dise quelques mots. Elle a instauré des groupes de travail, de suivi pour procéder à des évaluations : sur la loi Égalim 1, sur les questions d’énergie et de climat, sur tant d’autres sujets encore. Mais chaque fois, et cela ne vaut pas que pour la loi Égalim 1, le problème tient dans les allers-retours entre le Parlement et le Gouvernement. Y compris lorsque nous créons des groupes transpartisans, nous avons du mal à évaluer les lois votées parce que les ministères nous renvoient dans nos buts si nous allons les voir pour suggérer des corrections.
M. Fabien Gay. Je ne parle pas de vous, monsieur le ministre, mais vous faites partie aussi d’un gouvernement…
Cela vaut pour les vingt-quatre derniers mois. « Ne vous inquiétez pas, m’a-t-on dit un jour, vu la crise sanitaire, on va travailler main dans la main. » Je le dis comme ça, sans avoir rien contre lui non plus – je sais bien qu’il est très occupé –, mais, en vingt-quatre mois, le ministre de l’économie est venu une fois, une heure devant notre commission. Pensez-vous sincèrement, monsieur le ministre, que nous pouvons arriver à travailler de cette manière, que nous pouvons dialoguer sincèrement avec un ministre de l’économie qui se déplace une fois une heure en deux ans ?
À nouveau, ce n’est pas lui que je cible ; nous évoquons ici un problème extrêmement profond de nos institutions.
Par conséquent, je n’ai pas de difficulté à soutenir le suivi proposé pour la loi Égalim 2 – nous allons voter l’amendement –, mais de nombreuses questions se posent tout de même et il y a à ouvrir un véritable chantier démocratique sur notre manière de fonctionner ensemble. Sans cela, on n’y arrivera pas !
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Je partage avec Franck Montaugé l’idée qu’il est essentiel d’évaluer les politiques publiques. Dans cet hémicycle, comme dans l’autre, d’ailleurs, on légifère de plus en plus et de plus en plus rapidement. D’où cette absolue nécessité d’évaluer les politiques publiques, et de les amender à mesure que l’on décèle des effets de bord négatifs.
Par conséquent, monsieur Gay, nous poursuivrons bien entendu le travail d’évaluation des politiques publiques réalisé en commission.
Nous le poursuivrons, je le dis à l’attention de Daniel Gremillet, en particulier sur les lois Égalim 1 et 2, leurs effets visibles ou invisibles.
Et, monsieur le ministre, nous continuerons à vous proposer, soit dans le cadre de propositions de loi, soit par des mesures intégrées dans les différents véhicules législatifs, des modifications permettant de revenir sur des points non satisfaisants ou, au contraire, apporter des évolutions souhaitables.
S’agissant précisément de l’amendement n° 106, je comprends ce qui l’a inspiré. Il repose en fait sur l’idée selon laquelle, au bout de la chaîne alimentaire, se trouve un consommateur, qui est un « consommacteur ». Si celui-ci – je partage entièrement cette position – n’est pas intégré à la relation concernée par l’article 1er et l’article 2, alors il se peut que nos travaux d’hier et d’aujourd’hui ne servent pas à grand-chose. En définitive, celui qui peut nous épargner de réglementer et de « surréglementer », c’est le consommateur qui, bien informé, fera le choix de produits rémunérant justement les agriculteurs, les transformateurs et même, mes chers collègues, les distributeurs.
Cette idée d’inciter les consommateurs à participer à nos évaluations de politique publique m’apparaît donc tout à fait intéressante. Même si, bien évidemment, suivant Mme la rapporteure et la commission, je ne voterai pas l’amendement, je vais la garder en tête et la faire fructifier au sein de la commission, comme le règlement du Sénat nous autorise à le faire.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 106.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 6
I. – L’article 1er et le 3° de l’article 2 sont applicables aux accords-cadres et contrats conclus à compter d’une date fixée par décret, pour chaque filière, et au plus tard le 1er janvier 2023.
Les accords-cadres et contrats en cours à la date d’entrée en vigueur de l’article 1er doivent être mis en conformité avec l’article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction résultant de la présente loi, lors de leur prochain renouvellement, et au plus tard un an après l’entrée en vigueur de l’article 1er. Les organisations de producteurs, les associations d’organisations de producteurs ou les producteurs concernés proposent aux acheteurs un avenant à cet effet ou leur demandent par écrit de leur proposer cet avenant.
Toutefois, les contrats établis sur la base d’un contrat-type défini dans le cadre d’un accord interprofessionnel étendu peuvent être renouvelés ou prolongés avant la mise en conformité de ce contrat-type. Ils doivent en toute hypothèse être mis en conformité au plus tard un an après l’entrée en vigueur du même article 1er.
II. – L’article 2 entre en vigueur le 1er janvier 2022.
III. – L’article 3 n’est pas applicable aux médiations en cours à la date de publication de la présente loi.
IV. – L’article 4 entre en vigueur le 1er juillet 2022.
V. – L’article 5 entre en vigueur le 1er janvier 2022.
Mme la présidente. Je suis saisie de huit amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les sept premiers sont identiques.
L’amendement n° 2 est présenté par Mme Noël, MM. Bascher et Cambon, Mme Deromedi, MM. Burgoa, Calvet, D. Laurent, Charon et Cuypers, Mme Garriaud-Maylam et MM. J.B. Blanc, Laménie et Rojouan.
L’amendement n° 9 rectifié bis est présenté par MM. Sautarel, Rapin et Chevrollier, Mme Dumont, M. Anglars, Mme Ventalon, MM. C. Vial et Lefèvre, Mmes Belrhiti et Muller-Bronn, MM. Tabarot, Bouchet, Belin et Genet, Mme Gosselin et M. Bonhomme.
L’amendement n° 19 rectifié ter est présenté par MM. Milon et Brisson, Mme Imbert, M. Chatillon et Mme Puissat.
L’amendement n° 43 est présenté par MM. Montaugé et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot, Antiste, Cozic, Devinaz, Durain, Fichet, Gillé, Jacquin et Kerrouche, Mmes Lubin, Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 96 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Cabanel, Requier, Corbisez, Artano, Bilhac, Roux, Guiol, Guérini et Gold et Mmes M. Carrère, Pantel et Guillotin.
L’amendement n° 129 rectifié bis est présenté par MM. Somon et Saury.
L’amendement n° 133 est présenté par MM. Canévet, Longeot et Delcros, Mme Gatel, MM. Détraigne et Bonnecarrère, Mme Guidez, MM. J.M. Arnaud, Kern, Le Nay, Levi, Chauvet, P. Martin, Moga et Louault, Mme N. Goulet, M. Henno, Mme Jacquemet, M. Poadja et Mme Saint-Pé.
Ces sept amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 1
Remplacer les mots :
d’une date fixée par décret, pour chaque filière, et au plus tard le 1er janvier 2023
par les mots :
de la promulgation de la loi
La parole est à M. Laurent Burgoa, pour présenter l’amendement n° 2.