M. Rémi Féraud. C’est ce que nous proposons au Sénat d’adopter. (M. Emmanuel Capus applaudit.)
Les associations demandent l’extension des bénéficiaires de la convention Aeras aux pathologies chroniques comme le VIH. Cette convention ne concerne en effet aujourd’hui que les personnes atteintes ou guéries de cancer. La simple négociation prévue dans la version du texte issue de l’Assemblée nationale n’est pas satisfaisante. Nous estimons qu’il faut inscrire cette extension aux autres maladies chroniques dans cette proposition de loi.
Enfin, les associations sollicitent l’augmentation, voire la suppression, du plafond du montant pouvant être emprunté par une personne bénéficiaire de la convention Aeras. Celui-ci est actuellement fixé à 200 000 euros. Certes, la moyenne nationale pour les emprunts est légèrement inférieure, mais, dans la région parisienne ou les grandes métropoles, ce montant est trop faible pour permettre l’acquisition d’un logement de taille moyenne.
Sur tous ces points, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain proposera des amendements de modification, en cohérence avec ce que proposent les rapporteurs, dont je veux saluer le travail.
Notre objectif est simple : il vise à rendre la convention Aeras plus inclusive, plus facile d’accès et plus efficace pour toutes les personnes atteintes de pathologies chroniques ou de cancers. Quel dommage que l’engagement de permettre l’accès à l’emprunt pour toutes ces personnes n’ait pas été tenu en cinq ans par la majorité présidentielle !
Nos propositions s’inscriront dans la continuité des amendements que notre groupe a déposés sur le projet de loi de finances pour 2022 et qui ont été adoptés par le Sénat. Le véritable enjeu est de lutter contre une discrimination et de permettre à des millions de Français de mener leurs projets, alors qu’ils en sont souvent empêchés durement et injustement par une dérive à la fois du principe et du fonctionnement de l’assurance emprunteur.
Ce texte est une occasion importante de faire bouger les lignes. Au Sénat, nous essaierons de travailler de la manière la plus consensuelle possible. Ne manquons pas cette occasion : c’est un progrès important et attendu. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, sur des travées du groupe UC et LR, ainsi qu’au banc des commissions. – M. Emmanuel Capus applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Procaccia. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Procaccia. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, même lorsque l’on suit attentivement des dossiers depuis près de dix ans, comme c’est mon cas, il arrive que l’on rate une information. C’est ainsi que, lorsque j’ai pris connaissance de cette proposition de loi, j’ai compris que j’avais manqué un épisode du feuilleton législatif de l’assurance emprunteur !
Pourtant, dans cet hémicycle, je dois être l’une des rares parlementaires à avoir participé activement aux débats des lois Chatel, Lagarde, Hamon et de l’amendement Bourquin. J’ai même travaillé avec ce dernier sur les dispositions votées dans la loi d’accélération et de simplification de l’action publique, dite ASAP. C’est dire si je mesure le chemin parcouru en une décennie sur les modalités de résiliation de cette assurance, qui a toujours été à part.
J’étais donc persuadée que les dispositions de 2020 étaient effectives. Rappelons qu’elles avaient fait l’objet de concertations avec différents intervenants et qu’elles clarifiaient le droit à changer d’assureur après un achat immobilier – une possibilité acquise très progressivement grâce aux nombreux combats menés par les associations de consommateurs et par les parlementaires.
Reconnaissons que le juste milieu entre la protection du consommateur, l’équilibre financier indispensable aux assureurs et l’ouverture du marché aux intervenants alternatifs n’est pas forcément facile à trouver.
Selon moi, les dispositions introduites dans la loi ASAP respectaient ces impératifs. Elles avaient d’ailleurs obtenu l’accord du Gouvernement et de l’Assemblée nationale, fait suffisamment rare pour être souligné.
Dès lors, pourquoi faire autrement, hormis si des motifs électoralistes sous-tendent la proposition de loi débattue aujourd’hui ou si, comme c’est souvent le cas, le Gouvernement choisit de faire voter un texte émanant de sa majorité plutôt que du Sénat ?
Je salue le travail de nos deux rapporteurs qui réussissent, par leurs amendements, à opérer un équilibre harmonieux entre les attentes de tous.
J’en veux pour preuve la clarification importante de la date de résiliation qui a été introduite dans la loi ASAP.
Qu’apporterait la résiliation à tout moment proposée par les auteurs de la proposition de loi ? Selon moi, la remise en cause de la mutualisation existe vraiment, n’en déplaise à ceux qui, pour accroître leur part de marché, la nient. D’ailleurs, le Gouvernement s’y opposait voilà un an ! Rien n’a changé en un an, sinon la proximité d’une élection.
Le CCSF et les rapporteurs précisent bien que le nombre de contrats externes s’est accru de 46 % en deux ans. C’est considérable ! Cela prouve que la concurrence existe. Comment expliquer que les emprunteurs ne résilient pas leurs contrats à tour de bras ? Sans doute certains ne le souhaitent-ils pas, mais cette situation s’explique surtout par l’apparition des assureurs alternatifs, qui a conduit les banques à baisser leur taux et à proposer elles-mêmes des assurances alternatives.
L’objectif économique de la mise en concurrence est non de promouvoir telle ou telle catégorie de prestataires, mais de supprimer les situations de rente et de favoriser la fixation de prix justes au profit du consommateur.
Je crains que la version de ce texte issu des travaux de l’Assemblée nationale ne conduise à des démarchages féroces et à leur corollaire, à savoir des décisions prises sous pression. Selon moi, souscrire une assurance emprunteur est une opération bien plus complexe que contracter une assurance automobile ou habitation et, surtout, bien plus lourde de conséquences.
M. Jean-François Husson. Très juste !
Mme Catherine Procaccia. Il est clair que les jeunes actifs en bonne santé seront les premiers à en profiter – tant mieux pour eux ! –, mais ils ne sont pas le seul public concerné.
M. Jean-François Husson. Bien sûr !
Mme Catherine Procaccia. La proposition de nos rapporteurs visant à supprimer le questionnaire médical est la véritable révolution de ce texte. J’avoue d’abord avoir été choquée par cette idée, mais, après la lecture attentive des arguments des commissions, je m’y suis ralliée. Cette suppression facilitera l’assurabilité de nombreuses personnes, parfois atteintes de maladies bénignes qui donnaient lieu à des surcoûts difficilement justifiables. Elle est beaucoup plus ambitieuse que la possibilité de supprimer son contrat à tout moment.
Parmi les exclus, j’aimerais que l’on évoque les plus âgés. Avez-vous déjà emprunté à 55 ans, 60 ans ou 65 ans ? Même si vous êtes actif et même si vous disposez d’un apport important, les banques refusent au motif que vous n’êtes plus assurable, bien que vous souhaitiez emprunter durant cinq ans et que les tables de mortalité vous créditent de vingt ans, voire davantage.
L’âge de 45 ans me paraît bas, d’autant que, selon le code du travail, l’employeur ne peut pas vous contraindre à partir à la retraite avant 70 ans. Tel est l’objet d’un amendement que j’ai déposé à l’article 7 bis. Ma proposition est peut-être prématurée, mais la réflexion sera poursuivie – un jour, nous serons tous concernés ! (Sourires.)
J’invite les personnes plaidant la résiliation des contrats à tout moment à essayer de l’appliquer d’abord à Canal Plus. Je mène ce combat depuis des années : il est impossible de résilier son abonnement – or celui-ci coûte aussi très cher ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Pierre Louault applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Marc Laménie. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens à souligner la qualité du travail des deux commissions sur ce texte important. Elles ont organisé de nombreuses auditions durant les mois de décembre et de janvier.
L’assurance emprunteur représente un marché d’environ 10 milliards d’euros par an. D’autres avant moi l’ont rappelé : elle constitue un enjeu important lors de la souscription d’un prêt immobilier permettant l’accession à la propriété. Les enjeux sont complexes d’un point de vue tant juridique qu’économique et financier. Monsieur le ministre, vous avez mis en évidence que 20 millions à 25 millions de contrats de ce type étaient actifs.
Les rapporteurs ont évoqué l’ouverture à la concurrence comme la hausse des tarifs de plus de 33 % pour les personnes âgées de plus de 55 ans. Ils ont insisté sur l’importance de prendre en compte le volet humain et la solidarité. S’ils souhaitent conserver le droit de résiliation actuel, ils préconisent, d’une part, de renforcer fortement les obligations d’information qui incombent aux prêteurs et aux assureurs, d’autre part, de simplifier la procédure de résiliation au profit de tous les assurés.
La notion d’équité est importante. C’est pourquoi a été supprimé en commission le questionnaire médical pour les prêts immobiliers de moins de 200 000 euros, qui arrivent à leur terme avant le soixante-cinquième anniversaire de l’emprunteur.
Messieurs les rapporteurs, vous avez indiqué que ce texte, composé de douze articles, offrait l’occasion d’évoluer fermement sur ce sujet et de remettre l’humain au cœur du dispositif.
M. Vincent Segouin. Exactement !
M. Marc Laménie. Vous avez précisé que la convention Aeras devait gagner en efficacité. Comme vous l’ont indiqué les associations que vous avez rencontrées, ce dispositif original et nécessaire atteint aujourd’hui ses limites.
Nous devons promouvoir une forte solidarité entre les assurés et soutenir les plus fragiles. Le volet humain est très important : en effet, l’accès à la propriété conditionne fortement le niveau de vie, notamment pour les retraités.
Nous devons tenir compte du travail de fond accompli par nos deux commissions. Au vu de la complexité de ce dossier et de l’importance de respecter la dimension humaine de la question, ce que de nombreux collègues ont souligné, le groupe Les Républicains soutiendra ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi pour un accès plus juste, plus simple et plus transparent au marché de l’assurance emprunteur
TITRE IER
INFORMATION DE L’EMPRUNTEUR EN MATIÈRE DE DROIT DE RÉSILIATION DE L’ASSURANCE EMPRUNTEUR
Mme la présidente. Je rappelle que les amendements nos 14, 25 rectifié et 32 sont réservés après l’article 6.
Article 1er
I. – Après le premier alinéa de l’article L. 113-12-2 du code des assurances, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La date d’échéance à prendre en compte pour l’exercice du droit de résiliation mentionné à l’article L. 113-12 est, au choix de l’assuré, la date d’anniversaire de la signature de l’offre de prêt par celui-ci ou toute autre date d’échéance prévue au contrat. »
II. – Le troisième alinéa de l’article L. 221-10 du code de la mutualité est complété par une phrase ainsi rédigée : « La date d’échéance à prendre en compte pour l’exercice du droit de résiliation mentionné au premier alinéa du présent article est, au choix du membre participant, la date d’anniversaire de la signature de l’offre de prêt par celui-ci ou toute autre date d’échéance prévue au contrat. »
Mme la présidente. La parole est à M. François Bonhomme, sur l’article.
M. François Bonhomme. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je partage les objectifs de l’article 1er, qui renforce significativement le droit au changement d’assurance emprunteur.
Dans sa rédaction initiale, cet article contribuait à la création d’un droit de résiliation infra-annuelle sans frais pour l’assuré. Il permettait aux emprunteurs de procéder à la résiliation et à la substitution de leur contrat d’assurance à tout moment au cours de la durée de leur prêt.
Sur ce sujet, je me réjouis des travaux menés par le rapporteur Daniel Gremillet et les membres de la commission des affaires économiques : via l’adoption de deux amendements, ils ont rétabli la procédure actuelle, autorisant ainsi la démarche de résiliation et de substitution dans les deux mois qui précèdent la date d’échéance du contrat.
Considérant que les gains à attendre d’une résiliation à tout moment seraient minimes, mais qu’une telle évolution serait très probablement préjudiciable au public âgé et fragile, l’article 1er prévoit désormais la disparition de la procédure dite Bourquin et étend la procédure dite Hamon, selon laquelle la résiliation pouvait avoir lieu à tout moment durant la première année du contrat.
Les dispositions prévues reprennent le principe de la proposition de loi tendant à renforcer l’effectivité du droit au changement d’assurance emprunteur, adoptée à l’unanimité par le Sénat. Elles clarifient le droit actuel, en précisant ce que recouvre concrètement la notion de date d’échéance afin d’améliorer l’information de l’emprunteur.
Mme la présidente. Je suis saisie de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les quatre premiers sont identiques.
L’amendement n° 1 rectifié ter est présenté par MM. Capus, Chasseing, Lagourgue, Malhuret, A. Marc et Médevielle, Mmes Mélot et Paoli-Gagin et MM. Verzelen et Wattebled.
L’amendement n° 17 est présenté par le Gouvernement.
L’amendement n° 24 rectifié bis est présenté par M. Cabanel, Mme Pantel, MM. Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold, Guiol, Requier et Roux et Mme Guillotin.
L’amendement n° 31 est présenté par Mme Evrard, M. Buis, Mme Schillinger et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Le premier alinéa de l’article L. 113-12-2 du code des assurances est ainsi modifié :
1° Au début de la première phrase, les mots : « Sans préjudice de » sont remplacés par les mots : « Par dérogation à » et après les mots : « l’article L. 113-12 », sont insérés les mots : « à l’exception du quatrième alinéa » ;
2° À la même première phrase, les mots : « dans un délai de douze mois » sont remplacés par les mots : « à tout moment » ;
3° À la deuxième phrase, les mots : « par lettre recommandée ou par envoi recommandé électronique » sont remplacés par les mots : « dans les conditions prévues à l’article L. 113-14 du code des assurances » ;
4° À la fin de la deuxième phrase, les mots : « au plus tard quinze jours avant le terme de la période de douze mois susmentionnée » sont supprimés ;
5° À la troisième phrase, la référence : « ou à l’article L. 113-12 du présent code » est supprimée.
II. – Le troisième alinéa de l’article L. 221-10 du code de la mutualité est ainsi modifié :
1° Au début de la première phrase, les mots : « Sans préjudice du » sont remplacés par les mots : « Par dérogation au » ;
2° À la même première phrase, les mots : « dans un délai de douze mois » sont remplacés par les mots : « à tout moment » ;
3° À la fin de la deuxième phrase, les mots : « au plus tard quinze jours avant le terme de la période de douze mois susmentionnée » sont supprimés ;
4° La troisième phrase est ainsi modifiée :
a) Les mots : « par lettre recommandée ou par envoi recommandé électronique » sont remplacés par les mots : « dans les conditions prévues à l’article L. 113-14 du code des assurances » ;
b) Les mots : « ou au premier alinéa du présent article » sont supprimés.
La parole est à M. Emmanuel Capus, pour présenter l’amendement n° 1 rectifié ter.
M. Emmanuel Capus. Mes chers collègues, on ne va pas se mentir : en supprimant la disposition phare de cette proposition de loi, à savoir le droit à résiliation infra-annuelle pour les contrats d’assurance emprunteur, la commission des affaires économiques et la commission des finances ôtent au texte tout son intérêt.
Cet amendement tend donc à rétablir la rédaction initiale de l’article 1er qui, je le rappelle, a été voté à la quasi-unanimité, en tout cas par tous les groupes de l’Assemblée nationale. Voilà qui montre bien qu’il s’agit là non pas d’une question politique, mais, comme cela a été souligné tout à l’heure, d’une mesure de bon sens.
Voulons-nous ou non créer un nouveau droit pour le consommateur ? On ne retire rien à personne ! On ne demande pas l’aumône !
Le raisonnement est simple : tandis que la banque est dans une position de force, l’emprunteur est le faible. Il est déjà heureux d’avoir un prêt, parce qu’il s’agit d’un événement important, pour ne pas dire crucial, dans sa vie. Après tout, il n’en obtiendra pas un tous les jours et c’est peut-être le crédit de sa vie.
Ce que nous souhaitons, c’est rétablir un semblant d’égalité entre l’emprunteur et la banque, qui a, elle, tous les pouvoirs, notamment le pouvoir d’octroyer ou non un emprunt. Nous ne demandons pas plus.
D’autres amendements, également intéressants, visent à améliorer la rédaction de l’article, mais le plus simple reste de rétablir la faculté pour l’emprunteur de résilier son assurance à tout moment, de sorte qu’il n’ait pas à se préoccuper de savoir s’il respecte le délai prévu durant la première année du contrat ou l’échéance de la date anniversaire.
La simplicité et le bon sens, mes chers collègues, c’est la résiliation à tout moment. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué, pour présenter l’amendement n° 17.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, ministre délégué. Cet amendement identique vise à rétablir l’article 1er dans la rédaction résultant des travaux de l’Assemblée nationale.
Monsieur le rapporteur, vous avez expliqué que les tarifs avaient déjà bien baissé, de l’ordre de 40 % ; j’ai les mêmes chiffres que vous, monsieur le rapporteur. Dans ces conditions, pourquoi s’arrêter en si bon chemin, alors que l’on sait que ce type de disposition, qui offre à l’emprunteur un droit à résiliation infra-annuelle de son contrat, conduit les établissements bancaires à faire des efforts ?
Cet effort est parfaitement soutenable, car nous parlons là d’un marché extrêmement rentable.
M. Jean-François Husson. Cela ne nous avait pas échappé !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, ministre délégué. Prenons le ratio de sinistres à primes. Sur le marché de l’assurance emprunteur, pour 100 euros de primes encaissées, 34 euros sont versés pour couvrir un sinistre. En comparaison, dans le secteur des assurances pris dans sa globalité, le ratio moyen est de l’ordre de 75 euros versés pour 100 euros encaissés.
Vous comprenez bien que ce delta correspond à la marge réalisée, donc à de potentiels frais de gestion. Il y a là une forme de rente qui, à notre sens, doit pouvoir être restituée au consommateur au travers de la mise en œuvre de la résiliation infra-annuelle.
Par ailleurs, nous pensons que l’adoption de cet amendement ne se traduira pas par une démutualisation des risques, tout simplement parce qu’il n’existe pas de mutualisation intergénérationnelle. Aujourd’hui, l’enjeu est surtout de mettre fin au caractère dysfonctionnel du marché.
Enfin, avec cet amendement, nous entendons aligner les caractéristiques du contrat d’assurance emprunteur sur celles de la plupart des autres contrats d’assurance.
Mme la présidente. La parole est à M. Henri Cabanel, pour présenter l’amendement n° 24 rectifié bis.
M. Henri Cabanel. Je partage les arguments avancés par M. Capus et M. le ministre. En revanche, je ne comprends pas très bien ceux du rapporteur, aux termes desquels la mise en place d’un droit de résiliation infra-annuelle présente un risque pour le souscripteur d’un contrat, dans la mesure où cela pourrait entraîner une hausse du tarif de son assurance, selon qu’il a tel ou tel profil.
Je vois tout à fait l’intérêt pour un emprunteur de renégocier à tout moment son contrat d’assurance. Aujourd’hui, par exemple, les contrats d’assurance habitation et automobile sont renégociables à tout moment.
Mme Catherine Procaccia. Sauf la première année !
M. Henri Cabanel. Ce droit à résiliation et cette faculté de faire établir des devis auprès de la concurrence – quand on le peut – donnent à l’emprunteur un véritable pouvoir de négociation vis-à-vis de son assureur, qui, de ce fait, baisse ses tarifs. À l’inverse, sans initiative de l’emprunteur, l’assureur maintient les tarifs prévus initialement au contrat.
Il me semble que le rétablissement de l’article 1er tel qu’il a été voté par l’Assemblée nationale contribuera à une baisse des tarifs, même si, comme vous l’avez souligné, monsieur le rapporteur, les perspectives annoncées paraissent un peu optimistes.
Après tout, un euro est un euro et, même si le gain n’est à la fin que de 1 000 euros ou 2 000 euros, c’est toujours cela de pris.
M. Emmanuel Capus. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme Nadège Havet, pour présenter l’amendement n° 31.
Mme Nadège Havet. J’observe que les amendements déposés à l’article 1er le sont par des sénateurs issus de cinq groupes politiques différents, qui ne s’entendent pas toujours sur tout, mais qui, sur ce sujet, s’unissent pour donner plus de liberté et de pouvoir d’achat au consommateur, donc s’opposer à tout ce qui peut ressembler à la sauvegarde d’une rente.
On peut toujours ajouter de l’information à l’information, mais, si le consommateur fait face à des interlocuteurs qui sont plus ou moins de mauvaise foi et qui délivrent des réponses au compte-gouttes, c’est bien lui qui, au bout du compte, sera lésé.
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 12 est présenté par MM. Salmon, Labbé, Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et Taillé-Polian.
L’amendement n° 20 est présenté par M. Gay, Mme Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Le premier alinéa de l’article L. 113-12-2 du code des assurances est ainsi modifié :
1° Au début de la première phrase, les mots : « Sans préjudice de » sont remplacés par les mots : « Par dérogation à » ;
2° À la même première phrase, les mots : « dans un délai de douze mois » sont remplacés par les mots : « à tout moment » ;
3° À la fin de la deuxième phrase, les mots : « au plus tard quinze jours avant le terme de la période de douze mois susmentionnée » sont supprimés ;
4° À la troisième phrase, la référence : « ou à l’article L. 113-12 du présent code » est supprimée.
II. – Le troisième alinéa de l’article L. 221-10 du code de la mutualité est ainsi modifié :
1° Au début de la première phrase, les mots : « Sans préjudice du » sont remplacés par les mots : « Par dérogation au » ;
2° À la même première phrase, les mots : « dans un délai de douze mois » sont remplacés par les mots : « à tout moment » ;
3° À la fin de la deuxième phrase, les mots : « au plus tard quinze jours avant le terme de la période de douze mois susmentionnée » sont supprimés ;
4° À la troisième phrase, les mots : « ou au premier alinéa du présent article » sont supprimés.
La parole est à M. Daniel Salmon, pour présenter l’amendement n° 12.
M. Daniel Salmon. Comme nous l’avons dit, une véritable mise en concurrence donnerait davantage de pouvoir au consommateur et rééquilibrerait le rapport de force.
Aujourd’hui, selon les études, seuls les plus aisés, les plus agiles, les plus urbains, ont réellement la faculté de changer d’assurance emprunteur. Ils réussissent plus facilement à l’imposer à leurs banques, celles-là mêmes qui ont récemment annoncé des profits record pour l’année 2021.
À l’heure où le pouvoir d’achat est la priorité numéro un des Français, il n’y a pas de petit gain.
Le ministre l’a rappelé : l’ouverture à la concurrence du marché de l’assurance emprunteur a permis de faire baisser les prix de 40 %, ce qui montre bien qu’il existait des marges importantes – et je ne doute pas qu’il en reste encore.
Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l’amendement n° 20.
M. Fabien Gay. Nous proposons nous aussi de rétablir l’article 1er tel qu’il a été adopté par l’Assemblée nationale.
Monsieur le rapporteur, je souhaite vous poser une question.
Un emprunteur peut à tout moment rembourser, renégocier, voire faire racheter par un autre établissement bancaire son crédit – attention, je ne parle pas de l’assurance ! Cela nous est à tous arrivé, mes chers collègues.
En revanche, quand il s’agit de son contrat d’assurance, certes, il pourrait le résilier à tout moment durant la première année, mais, passé ce délai, il lui faudrait attendre la date anniversaire du contrat. Vous ne trouvez pas cela étrange ? Pourquoi une telle distorsion ?
Par ailleurs, je n’ai toujours pas compris ce que les modifications introduites par la commission changeraient concrètement, y compris pour les banques. Après tout, on pourrait tout à fait débattre de l’instabilité que pourrait créer un droit à résiliation infra-annuelle des contrats.
M. le rapporteur a avancé un argument, que j’entends d’ailleurs : depuis que le droit à la résiliation a été élargi, le marché – dont 88 % des parts sont pourtant détenus par les banques et 12 % seulement par les autres acteurs – est devenu plus concurrentiel, au point que certains emprunteurs ont pu renégocier le tarif de leur assurance, tout en restant dans leur banque. C’est tout à fait exact : tout client peut aller voir son banquier, lui annoncer qu’il va partir et obtenir finalement de sa part un nouveau tarif l’incitant à ne pas changer d’établissement.
Pour autant, je le répète, cette situation mérite que l’on s’y arrête.
On parle par ailleurs de résiliation à tout moment, mais, en règle générale, un client ne se rend pas dix fois par an à sa banque ! Cette disposition vaut donc surtout pour le moment où il renégocie son crédit : à cette occasion, qui peut avoir lieu à tout moment de l’année, il devrait pouvoir renégocier aussi son assurance.
Cela me paraît d’une simplicité, disons, biblique. C’est pourquoi j’invite M. le rapporteur à répondre à nos arguments.