Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Respectez votre temps de parole !
M. Christian Cambon. Ma question est très simple : que comptez-vous faire ? Allez-vous décider de rester au Mali contre la volonté de ses dirigeants, au risque de pénaliser nos soldats et de risquer leurs vies ? Souhaitez-vous vous installer au Burkina Faso, qui sort très affaibli d’un coup d’État ? Convient-il d’aller au Niger, alors qu’il ne veut pas accueillir Takuba ? Ou bien au Tchad, qui est distant de 2 600 kilomètres ? Voilà le véritable problème. (Marques d’impatience sur les travées du groupe SER, où l’on signale que le temps de parole de l’orateur est écoulé.)
Monsieur le Premier ministre, dites au Sénat ce que vous comptez faire par respect pour nos concitoyens et pour les 58 soldats qui ont fait pour nous le sacrifice de leur vie ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Françoise Gatel ainsi que MM. Philippe Bonnecarrère et Olivier Cigolotti applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean Castex, Premier ministre. Monsieur le président Cambon, je reprends la parole sur ce sujet après avoir répondu au président Kanner.
Vous avez parlé d’humiliation. Il y a incontestablement une très grave crise politique avec le Mali.
Que vouliez-vous que notre pays fît d’autre ?
La France, dont je réponds devant vous de l’action, a très fermement condamné – elle n’est d’ailleurs pas la seule – tout ce que vous avez précisément décrit et qui doit être imputé à la seule junte militaire malienne. Effectivement, ce régime a, entre autres, décidé de renvoyer notre ambassadeur.
Je vous rappelle que le représentant de la Cédéao au Mali a également été renvoyé, et que le Danemark a été éconduit, comme vous l’avez rappelé, monsieur le président Cambon.
Mais permettez-moi de dire qu’il ne s’agit pas d’une humiliation !
Je le redis, que vouliez-vous que notre pays fît d’autre ?
Auriez-vous voulu que l’on approuve le coup d’État ? Le fait que le régime malien renvoie notre ambassadeur montre que nous avons parfaitement bien fait en condamnant les événements avec la fermeté dont nous avons fait preuve ! (Exclamations sur plusieurs travées.)
Certes, le renvoi de notre ambassadeur est un élément nouveau dans la stratégie globale de notre présence dans cette région du monde. Nous devons faire évoluer notre dispositif opérationnel pour lutter contre le terrorisme, non seulement au Mali, mais aussi dans d’autres pays de la région, comme le Niger.
J’insiste sur ce point : le problème concerne non pas uniquement les relations entre la France et le Mali, mais la lutte contre le terrorisme international. L’Europe est au rendez-vous : les ministres des affaires étrangères des pays de l’Union européenne, réunis le 24 janvier, vont prendre des sanctions contre le Mali. La Cédéao s’est également réunie, comme vous le savez. Dans ce cadre multilatéral, nous travaillons pour déterminer la nature de notre réaction et faire évoluer notre dispositif.
Je reviens à la question qu’a posée le président Kanner. Le Parlement mérite évidemment d’être parfaitement informé de cette situation. Je le dis : sur ce sujet extrêmement important, en plus des travaux des commissions parlementaires, le Gouvernement organisera un débat sur la base de l’article 50-1 de la Constitution. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Colette Mélot ainsi que MM. Pierre Louault et Jean-Michel Arnaud applaudissent également.)
lutte contre l’islam radical
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, notre groupe tient évidemment à s’associer à l’hommage que vous avez rendu à notre collègue Olivier Léonhardt.
Ma question s’adresse à Mme Schiappa, puisque M. le ministre de l’intérieur est absent.
La diffusion d’un documentaire sur les dérives de l’islam radical à Roubaix a déchaîné les haines et les menaces contre la journaliste Ophélie Meunier, désormais placée sous surveillance policière.
Cette situation nous rappelle l’assassinat de Samuel Paty, le cas de la jeune Mila, sans parler des journalistes de Charlie Hebdo, qui sont toujours sous surveillance policière sept ans après les faits.
Dans ce pays, les journalistes, les enseignants et les autres citoyens devraient être libres d’exprimer des opinions sur l’islam sans crainte de représailles. Sinon, nous tombons dans la soumission…
La réponse faite hier à l’Assemblée nationale par Mme la ministre des sports sur la question du respect de la laïcité et du port des signes religieux dans les manifestations sportives n’a rien eu de véritablement rassurant.
Madame la ministre, ma question est simple : que comptez-vous faire – enfin – pour que la peur change de camp ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté. Madame la sénatrice, je veux d’abord réaffirmer le soutien du Gouvernement à Mme Ophélie Meunier, menacée parce qu’elle a présenté un reportage télévisé ne montrant ni plus ni moins que la réalité de l’action des islamistes en France, ainsi que les réponses des services de l’État.
À elle comme à tous les journalistes, je veux dire que nous sommes totalement mobilisés pour leur liberté. Pour cette raison, M. le ministre de l’intérieur a décidé de placer Mme Ophélie Meunier, ainsi que certaines personnes qui ont témoigné dans ce documentaire, sous protection policière.
Sur le plan de l’action, vous savez à quel point le Gouvernement est résolu à mieux lutter contre l’islamisme. Nous sommes venus devant vous défendre un projet de loi, qui a été enrichi par nos débats, et que vous avez voté. Ce texte, devenu la loi confortant le respect des principes de la République, est aujourd’hui appliqué.
Ma collègue Sarah El Haïry et moi-même avons ainsi présenté à Beauvais le contrat d’engagement républicain, selon lequel pas un euro d’argent public ne doit aller aux ennemis de la République. Nous l’avons voté, il est dans la loi et permet désormais de mieux lutter contre les associations qui sont les faux-nez de l’islamisme.
Par ailleurs, nous avons renforcé nos moyens de lutte contre le terrorisme. Je salue d’ailleurs l’action de nos services, qui ont permis de déjouer 37 attentats islamistes depuis le début de 2017.
Nous avons doublé le budget de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI).
Nous avons ouvert près de 2 000 emplois supplémentaires en rapport avec ces sujets.
Nous avons expulsé plus de 700 étrangers radicalisés, qui étaient inscrits au fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT).
Nous avons mené plus de 24 000 opérations de contrôle sur des établissements soupçonnés de radicalisation. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Voix sur les travées du groupe Les Républicains. C’est du vent !
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. Dans chaque département se trouvent maintenant les cellules locales de lutte contre l’islamisme et le repli communautaire (CLIR), qui permettent de mener ces actions.
Madame la sénatrice, je partage pleinement votre constat. Le Gouvernement est entièrement mobilisé pour agir concrètement contre la menace islamiste, qui pèse face à notre pays.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour la réplique.
Mme Nathalie Goulet. Madame la ministre, je ne trouve pas que le bilan du Gouvernement soit aussi positif.
Vous traitez les effets, mais n’attaquez jamais les causes. Je vous rappelle que des associations, en particulier à Roubaix, ont perçu des subventions publiques alors qu’elles sont proches des Frères musulmans.
Il y a quelques semaines, j’avais posé au Gouvernement une question au sujet des subventions accordées par l’Union européenne à des organisations islamistes, qui réagissait également à cette scandaleuse campagne du Conseil de l’Europe en faveur du hijab, menée avec des fonds européens.
Aujourd’hui, la France préside l’Union européenne. Allez-vous interdire les Frères musulmans, et les mettre sur la liste des organisations terroristes ? Allez-vous passer au crible les financements des associations, contrôler les rescrits fiscaux de celles qui perçoivent des subventions publiques et des dons ?
Les dispositions dont vous avez parlé ne sont absolument pas efficaces, alors que ces dérives doivent être sérieusement dénoncées. Je le dis encore une fois : des démarches doivent être menées à l’échelon européen. Je compte sur la présidence française du Conseil de l’Union européenne pour mettre un terme à ces dérives, notamment en matière de financements. Et surtout, madame la ministre, faisons interdire les Frères musulmans : inscrivons ce groupe sur la liste des organisations terroristes. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)
situation dans les ehpad (i)
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Mme Céline Brulin. Monsieur le président, notre groupe s’associe à l’hommage que vous avez rendu à notre collègue Olivier Léonhardt.
Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, après de nouvelles révélations concernant les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) privés, vous avez annoncé un renforcement des contrôles et un travail sur la certification des établissements.
Quels seront les objectifs de ces contrôles ? Seront-ils menés par les agences régionales de santé (ARS), qui, je le rappelle, fonctionnent en « dialogue de gestion » avec les Ehpad, attendent des « améliorations de la performance », ou prônent « l’efficience dans la dépense publique », alors que nos aînés ont besoin de soins, d’accompagnement et d’humanité ?
Envisagez-vous de refuser leur agrément à des établissements dont le modèle économique est axé sur la rentabilité, au profit d’Ehpad publics ou associatifs à but non lucratif ?
Entendez-vous avancer, comme le réclament les salariés depuis des années, vers un taux d’encadrement d’un personnel pour un résident ?
Au-delà des scandales révélés par Victor Castanet dans Les Fossoyeurs, nos Ehpad connaissent un problème structurel de sous-effectifs, au point que les agents, qui font pourtant de leur mieux au quotidien, évoquent une maltraitance institutionnelle. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur des travées du groupe SER. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question. Je veux redire à quel point je suis bouleversé par ce qui a pu être écrit et dit : cela traduit la réalité de la situation dans certains établissements chargés d’accompagner et de soigner des personnes âgées fragiles en perte d’autonomie, qui leur ont été confiées par leurs familles parce qu’il leur était trop difficile de rester à domicile.
Je suis bouleversé pour les soignants, pour les blouses blanches, mais aussi pour les directeurs d’établissement, qui se mobilisent au quotidien.
Madame la sénatrice, j’ai fait ce métier pendant trois ans : j’ai été aide-soignant en Ehpad ; je connais l’engagement constant, jour et nuit, des équipes au lit des personnes âgées, parfois dans des salles collectives, qui animent et rendent le quotidien moins insupportable alors que la vie décline progressivement.
Je suis bouleversé pour les familles, qui ont fait un choix ne pouvant souvent plus être repoussé, celui de confier un proche ou un parent à des équipes professionnelles, afin de permettre aux leurs de passer les derniers moments de leur vie dans les meilleures conditions possible.
Je ne parlerai pas des statuts publics ou privés, car il y a une constante entre eux. Fort de mon expérience – j’ai travaillé dans des Ehpad tant publics que privés –, je vous rejoins pour dire qu’il n’y a pas suffisamment de professionnels pour bien prendre en charge les résidents. La nuit, nous étions deux pour quatre-vingt-dix lits. Que l’établissement soit public ou privé, les choses ne changent pas ! (Mme Sophie Primas et M. Pascal Savoldelli protestent.)
Il ne faut pas confondre deux problèmes.
Le premier concerne l’organisation des Ehpad, sujet auquel nous travaillons. Nous avons fait de la dépendance le cinquième risque de la sécurité sociale ; nous avons consacré 2,5 milliards d’euros supplémentaires par an à la branche autonomie ; nous avons créé 10 000 postes de soignants dans les Ehpad, et 40 000 autres postes sont en cours de création ; nous développons le numérique ; nous reconstruisons 3 000 établissements médico-sociaux et hospitaliers dans notre pays. Au travers des investissements réalisés dans le cadre du Ségur de la santé, nous avons pris le taureau par les cornes bien avant que ce sujet devienne polémique.
Le second problème confine à de la maltraitance institutionnelle, si ces faits devaient être avérés. Il concerne un ou plusieurs Ehpad, qui appartiennent à un ou plusieurs groupes. C’est l’objet des enquêtes que nous menons, ce travail ayant été confié à Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l’autonomie, qui le mène avec beaucoup de courage. (MM. François Patriat et Didier Rambaud applaudissent.)
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour la réplique.
Mme Céline Brulin. Monsieur le ministre, je ne vous rejoins que sur un seul point : il est difficile de travailler dans les Ehpad aujourd’hui, quelle que soit la catégorie professionnelle à laquelle on appartient.
Mais nous apprenons que le futur ex-PDG d’Orpea a engrangé 600 000 euros en vendant des actions « au bon moment ». Voilà ce que ce groupe vante sur son site : « Le secteur Ehpad est réglementé par l’ARS et l’État et permet d’avoir une excellente lisibilité de ce secteur dans les années à venir. Ces dernières années ce placement s’est entièrement démocratisé […]. L’investissement en Ehpad vous permettra de diversifier votre portefeuille en investissant dans un actif immobilier sécurisé, avec un rendement attractif et des conditions de gestion optimisées par le gestionnaire. »
Au pays de la sécurité sociale, il est temps de construire un service public de la dépendance plutôt que d’embarquer les PDG de ces groupes financiers gestionnaires d’Ehpad en voyage présidentiel, comme cela a très récemment été le cas en Chine ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST, ainsi que sur des travées du groupe UC. – MM. Bernard Fialaire et Bernard Bonne applaudissent également.)
varenne agricole de l’eau
M. le président. La parole est à Mme Marie Evrard, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme Marie Evrard. Monsieur le président, notre groupe s’associe à l’hommage que vous avez rendu à notre collègue Olivier Léonhardt.
Ma question s’adresse à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Nous ne pouvons pas le nier, le changement climatique va affecter de plus en plus nos vies et notre avenir.
Les événements climatiques imprévus se révèlent de plus en plus violents et réguliers, avec des pluies diluviennes lors des épisodes cévenols, des sécheresses qui s’éternisent et des canicules qui s’intensifient. Que dire également de l’épisode de gel du printemps dernier, qui a ravagé 30 % de nos vignes, notamment dans l’Yonne !
C’est pour anticiper et se préparer à cet avenir que le Président de la République a demandé la tenue du Varenne agricole de l’eau et de l’adaptation au changement climatique.
Monsieur le ministre, l’accès à l’eau est un enjeu vital de toute société. Vous le dites régulièrement : il n’y a pas d’agriculture sans eau, et pas de France forte sans agriculture forte.
Il nous fallait sortir des postures dans lesquelles les conflits d’usages nous avaient enlisés, au moyen de la concertation et de l’échange transpartisan, avec l’ensemble des acteurs concernés.
C’est cette méthode que vous avez employée, avec Bérangère Abba, lors des travaux du Varenne agricole de l’eau et de l’adaptation au changement climatique, auxquels, me semble-t-il, 1 400 personnes ont participé ces six derniers mois.
Les conclusions de ces travaux ont été rendues hier matin en présence du Premier ministre, qui a tenu à les clore, en un acte politique fort et volontariste que nous devons saluer.
Monsieur le ministre, à l’heure où le Sénat examine un des volets de votre plan d’action avec votre projet de loi Assurance climatique (portant réforme des outils de gestion des risques climatiques en agriculture), quel consensus se dégage de ces propositions ? Quel est le calendrier que vous envisagez ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Madame la sénatrice Marie Evrard, vous évoquez la question ô combien cruciale de l’eau dans le domaine agricole, au sujet de laquelle je salue l’action et l’implication du Sénat, quels que soient les bords politiques auxquels vous appartenez.
Comme vous, madame la sénatrice, je considère que cette question de l’eau emporte la question de notre souveraineté agroalimentaire, car une agriculture sans eau n’est pas possible et ne sera jamais possible.
Face à ce constat, j’ai effectivement organisé, avec Bérangère Abba, sous l’égide du Premier ministre, ce moment politique du Varenne agricole de l’eau et de l’adaptation au changement climatique.
Il s’agissait d’un vrai moment politique, car cet événement a suscité un énorme engouement de la part de nombre de ses participants.
Ses travaux se sont organisés autour de trois groupes thématiques élaborant des solutions très concrètes, concernant d’abord la protection de nos cultures – nous aurons l’occasion de discuter dès la semaine prochaine du projet de loi sur l’assurance récolte –, ensuite l’adaptation de nos cultures, et enfin la gestion et le stockage de l’eau.
Sur ces trois sujets importants, le Premier ministre a fait plusieurs annonces concrètes hier. Un investissement de 215 millions d’euros sera consacré à l’adaptation de nos cultures et aux mesures de stockage de l’eau. Les textes réglementaires seront revus, afin de faciliter les approches de ces questions. Un soutien sera apporté aux projets territoriaux, car la question de l’eau se joue évidemment à l’échelon territorial.
Comme vous le voyez, le Gouvernement fait preuve d’une véritable détermination pour avancer avec méthode, dans la concertation, sur ce sujet.
Monsieur le président, permettez-moi de conclure mes propos en citant un ancien sénateur, qui a également été ministre de l’agriculture, Edgard Pisani. En une très belle phrase, il disait que le drame en politique, c’est de sombrer dans le détail et d’oublier l’essentiel. Revenons à l’essentiel, traitons la question de l’eau dans le domaine agricole ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et UC.)
M. le président. Merci, monsieur le ministre, de cette référence.
accès gratuit aux soins pour les personnes non vaccinées
M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements prolongés sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Deroche. Monsieur le président, permettez que je rende hommage, au nom de la commission des affaires sociales, à notre collègue Olivier Léonhardt.
Ma question s’adresse à M. le ministre des solidarités et de la santé. Elle concerne les propos tenus la semaine passée par le directeur de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), Martin Hirsch, qui a indiqué s’interroger sur la fin de la gratuité des soins pour les non-vaccinés admis en hospitalisation et en service de réanimation.
Quelle est la position du Gouvernement sur une telle proposition ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC. – Mme Laurence Cohen et M. Éric Bocquet applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Madame la présidente Catherine Deroche, je vous remercie de votre question.
Vous connaissez ma position, et c’est celle du Gouvernement. Ou plutôt, c’est dans l’autre sens : vous connaissez la position du Gouvernement, et c’est la mienne ! (Rires.) Ne me mettez pas en difficulté vis-à-vis du Premier ministre, ce n’est pas le moment ! (Mêmes mouvements.)
Madame la sénatrice, nous en avons déjà débattu dans cet hémicycle. Je vous réponds en tant que médecin, citoyen et ministre des solidarités et de la santé : il n’est évidemment pas question, ne serait-ce qu’une seconde, d’envisager de différencier la nature du remboursement des soins des personnes malades, selon qu’elles sont vaccinées ou non vaccinées.
On ne fait pas cela avec les gens atteints de cancer, selon qu’ils fument ou ne fument pas ; on ne fait pas cela avec les gens qui sont greffés du foie, selon qu’ils ont continué à boire ou non malgré les conseils de leur médecin ; et on soigne les traumatisés de la route selon qu’ils ont ou non porté la ceinture de sécurité !
Notre conviction, notre combat – madame la présidente Deroche, je vous remercie de le mener à nos côtés, car votre apport est précieux –, c’est de convaincre celles et ceux qui ne sont pas encore vaccinés.
Ils sont de moins en moins nombreux, ce dont nous pouvons nous féliciter, car ceux qui sont vaccinés sont protégés. Mais il reste encore des Français à convaincre, et il reste encore à convaincre certains de recevoir leur troisième dose de rappel.
Je rappelle que, le 15 février prochain, les règles du passe vaccinal vont évoluer. Nous ne voulons certainement pas que des millions de nos concitoyens se retrouvent contraints de se faire vacciner parce qu’ils auraient oublié l’échéance.
J’ai profité des secondes qui me restaient pour sortir un peu du cadre de la réponse, tant la réponse à la question est évidente. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour la réplique.
Mme Catherine Deroche. En effet, monsieur le ministre, prendre une telle décision ouvrirait la boîte de Pandore, vous en avez détaillé certaines conséquences possibles. On ne peut pas créer un cadre éthique propre à la pandémie, comme le président du Comité consultatif national d’éthique, Jean-François Delfraissy, nous l’a rappelé hier.
Néanmoins, j’ai été surprise de voir le directeur de l’AP-HP entrer dans un débat aussi politique. Il laisse croire que la surcharge des hôpitaux est le fait des non-vaccinés.
La commission d’enquête sur la situation de l’hôpital et le système de santé en France, dont je suis rapporteure, auditionne des personnalités depuis des semaines. Nous voyons bien que la situation de l’hôpital n’est pas uniquement liée à la pandémie et aux non-vaccinés. J’ai dont trouvé que les propos de Martin Hirsch, en plus d’être quelque peu saugrenus, n’étaient pas corrects.
Même s’ils sont épuisés du travail fait dans les services de réanimation, certains médecins se sont élevés contre ces propos, rappelant leur serment d’Hippocrate.
Si j’ai posé cette question, c’est que j’ai également entendu le porte-parole du Gouvernement expliquer que, s’il y a des droits, nous allons vers une société où il y a davantage de devoirs.
Je ne le pense pas : il y a des droits et il y a des devoirs. Nous ne souhaitons pas cette dérive allant vers davantage de devoirs et une réduction des droits. Tout cela doit être médité dans la période actuelle. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC. – Mme Raymonde Poncet Monge et M. Thomas Dossus applaudissent également.)
situation dans les ehpad (ii)
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Monique Lubin. Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, depuis la sortie du livre Les Fossoyeurs, chaque jour apporte son lot de témoignages à peine croyables et totalement insoutenables.
Vous avez annoncé des inspections de l’IGAS et de l’IGF (inspections générales des affaires sociales et des finances). Dont acte.
En 2020, la presse épinglait déjà des Ehpad appartenant à un groupe financier bien connu sur le marché du vieillissement. Entre ces deux épisodes, deux années se sont écoulées.
Dans ce laps de temps, quels contrôles avez-vous mandatés dans ce type de structures ? Quelles décisions avez-vous prises ? Faut-il que l’horreur soit à ce point documentée pour que vous réagissiez enfin ?
Par ailleurs, ce dossier met en lumière les agissements de ces groupes financiers et les moyens employés. Rendements compris entre 5 % et 9 %, rémunérations extravagantes de leurs dirigeants, fortunes colossales amassées : avec quelles méthodes ?
Moins de personnels que dans les Ehpad publics : je m’inscris en faux contre les propos que vous avez tenus tout à l’heure, car, si dans le public il y a 70,6 agents pour 100 résidents, le taux d’encadrement n’est même pas de 55 % dans le privé ; rationnements des soins apportés aux résidents, induisant la captation d’une partie de l’argent public versé par l’assurance maladie et les départements ; rétrocessions versées par des fournisseurs ; rémunérations d’apporteurs d’affaires afin d’obtenir des agréments ; primes versées aux gestionnaires en fonction des résultats financiers de la structure, c’est-à-dire des économies réalisées.
Tout cela a un but : rémunérer des actionnaires, qui par ailleurs peuvent déduire jusqu’à 300 000 euros de leurs impôts sur neuf ans, grâce à une niche fiscale généreusement octroyée en 2009 !
Monsieur le ministre, maintenant que tout est connu de tous, allons-nous continuer à verser de l’argent public à ce type d’investisseurs et à leur donner des agréments ? Aurez-vous le courage d’annoncer que, dorénavant, le grand âge ne pourra plus être confié qu’au secteur privé non lucratif ou au secteur public ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE. – Mme Monique de Marco applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice, comme je l’ai dit tout à l’heure, les faits exposés sont extrêmement graves et bouleversants.
J’ai signé ce midi la saisine de l’inspection générale des affaires sociales, qui va diligenter une enquête massive globale sur l’ensemble du groupe incriminé. Je ne suis pas sûr qu’il ne faille pas d’ailleurs étendre le champ de l’inspection au-delà de ce groupe ; nous verrons. Nous menons également cette enquête avec l’ensemble des agences de santé dans les territoires et dans les départements.
De la même manière, comme vous le savez, une enquête de l’inspection générale des finances est diligentée, tenant compte tant du comportement allégué du dirigeant du groupe Orpea que des mécanismes fiscaux ou financiers qui seraient à l’œuvre. Évidemment, nous voulons mettre ces faits en plein jour, surtout s’ils devaient être condamnables, moralement ou par la loi.
Madame la sénatrice, vous pouvez donc compter sur notre engagement total.
Le débat peut éternellement être refait sur la différence entre les établissements publics et privés, Ehpad ou hôpitaux, entre les médecins salariés et les médecins libéraux. Mais les soignants, quel que soit leur secteur, travaillent avec conviction, leur vocation chevillée au corps, et s’engagent au service des malades et des personnes âgées en perte d’autonomie.
Je vous garantis que les soignants du secteur privé sont très fiers d’aller travailler le matin. En revanche, il leur faut des moyens pour travailler dans de bonnes conditions.
Ils partagent avec les salariés du public une revendication juste et légitime, que le Gouvernement et la majorité entendent depuis maintenant plusieurs années, d’où la mise en place de la cinquième branche de l’assurance maladie. (MM. Vincent Éblé et Pascal Savoldelli protestent.) L’ensemble de ces salariés demande des moyens et davantage de personnel pour mieux soigner et mieux prendre en charge.