M. le président. Veuillez conclure !
M. Joël Giraud, secrétaire d’État. Toutes ces mesures doivent permettre une meilleure cohabitation entre les usagers et une amélioration générale de la sécurité sur nos routes.
mesures réglementaires relatives à l’application de l’article 322-4-1 du code pénal
M. le président. La parole est à M. Jacques Le Nay, auteur de la question n° 2005, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
M. Jacques Le Nay. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention sur l’applicabilité de l’article 322-4-1 du code pénal portant sur l’amende forfaitaire délictuelle, issu de la loi du 7 novembre 2018 relative à l’accueil des gens du voyage et à la lutte contre les installations illicites.
Concrètement, et malgré l’article de loi que je viens de citer, tous les gendarmes ne disposent pas de cette procédure dans leur terminal de procès-verbal électronique, alors qu’une telle possibilité constituerait un moyen de pression non négligeable pour lutter contre ce genre d’installations.
Par ailleurs, lors de son intervention devant les maires de Haute-Savoie réunis en congrès le 6 novembre dernier, le Premier ministre a annoncé que ce département serait inclus dans les territoires expérimentaux de l’amende forfaitaire délictuelle.
Si je connais les difficultés spécifiques à la Haute-Savoie et l’engagement sur ce sujet de notre collègue Loïc Hervé, qui est à l’origine de cette disposition légale, je souhaiterais également vous faire part des inquiétudes des élus locaux du Morbihan ; selon moi, ce département devrait rejoindre l’expérimentation menée.
Les installations illicites des gens du voyage se multiplient et rythment malheureusement l’actualité estivale du Morbihan depuis de trop nombreuses années. Ce phénomène a même conduit près de deux cents élus, agriculteurs et riverains à manifester le 28 juillet dans la commune de Merlevenez.
L’an dernier, le ministre de l’intérieur Gérald Darmanin indiquait dans un courrier que les travaux relatifs à la mise en place de l’amende forfaitaire délictuelle étaient toujours en cours et devaient aboutir à l’automne 2021.
Je l’ai interpellé depuis plusieurs mois à ce sujet, d’abord par l’intermédiaire d’un courrier le 1er juin, puis via une question écrite le 5 août dernier. Ces interventions sont demeurées sans réponse ; c’est pourquoi je vous interroge aujourd’hui dans l’hémicycle.
Entendez-vous accélérer la prise des mesures réglementaires nécessaires à l’application concrète des amendes forfaitaires délictuelles prévues à l’article 322-4-1 du code pénal ? Si l’expérimentation devait être prolongée, envisagez-vous d’inclure dans son périmètre d’autres départements – le Morbihan en particulier ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Monsieur le sénateur Le Nay, comme toute infraction prévue par le code pénal, l’occupation illicite de terrains peut être relevée par les forces de sécurité intérieure, puis poursuivie par l’autorité judiciaire, selon de multiples modalités inscrites dans le code de procédure pénale.
Les ministères de la justice et de l’intérieur ont engagé une démarche de simplification de la procédure pénale afin de permettre aux forces de sécurité intérieure de recentrer leurs actions et leurs missions.
Les travaux conduits lors du Beauvau de la sécurité ont d’ailleurs rappelé qu’il s’agit d’une attente très forte des gendarmes et des policiers. À ce titre, il est apparu essentiel de faciliter les constatations des infractions et leur poursuite par l’autorité judiciaire, pour entraîner un cercle vertueux de respect de la loi.
À cet égard, comme pour les délits routiers et l’usage de stupéfiants, l’amende forfaitaire délictuelle, créée par la loi du 7 novembre 2018, consiste à apporter une réponse immédiate sur le terrain face aux campements illégaux, à laquelle sont confrontés les communes et les propriétaires privés. En l’espèce, l’installation illicite sur le terrain d’autrui est punie d’une amende de 500 euros, dont le montant peut être minoré à 400 euros ou majoré à 1 000 euros. De manière générale, ces amendes contribuent également à désengorger les tribunaux et offrent ainsi une réponse pénale rapide, efficace et dissuasive.
Par ailleurs, un travail interministériel, conduit par l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions, a été réalisé afin de décliner le dispositif des amendes forfaitaires délictuelles pour installation et occupations illicites sur le plan opérationnel. Monsieur le sénateur, vous citiez l’expérimentation lancée depuis la mi-octobre 2021 : celle-ci a été lancée initialement dans six ressorts de tribunaux judiciaires – Créteil, Foix, Lille, Marseille, Reims et Rennes. Depuis le 30 novembre 2021, elle a été étendue à trois ressorts judiciaires supplémentaires de Haute-Savoie – Annecy, Bonneville et Thonon-les-Bains – à la suite des annonces du Premier ministre.
Cette première expérimentation se poursuit actuellement avant que les conclusions de l’étude d’impact, permettant d’envisager ensuite une généralisation à l’ensemble du territoire, ne soient diffusées.
En tout état de cause, même en dehors de cette procédure, l’infraction peut toujours être relevée par les forces de sécurité intérieure selon la procédure classique.
Je peux vous affirmer que le Gouvernement demeure engagé dans la lutte contre les installations illicites et qu’il est mobilisé quant aux conditions d’accueil proposées par les communes ou les EPCI. Les ministres de l’intérieur et du logement ont d’ailleurs adressé une circulaire aux préfets leur demandant de relancer la réalisation des schémas départementaux qui constituent l’une des réponses non pas pénales, mais préventives, à ce problème.
situation des accompagnants d’enfants en situation de handicap
M. le président. La parole est à Mme Martine Filleul, auteure de la question n° 1912, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Mme Martine Filleul. Madame la secrétaire d’État, ma question s’adressait à monsieur le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
À quatre reprises au cours de l’année 2021, les accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) ont manifesté dans toute la France pour dénoncer leur précarité et leurs conditions de travail difficiles. Pour les parents comme pour les enseignants, les AESH constituent un soutien essentiel pour un apprentissage réussi et une scolarité épanouie.
Leur première revendication porte sur la rémunération. Le salaire mensuel moyen d’un AESH n’est que de 750 euros. L’augmentation de cette rémunération, accordée par le Gouvernement l’été dernier, ne suffit pas.
La récente proposition de loi visant à lutter contre la précarité des AESH et des assistants d’éducation (AED) de notre collègue députée Michèle Victory tendait à permettre la « CDIsation » dès le premier recrutement pour les AESH et les AED, et à prendre en compte les heures d’accompagnement dans la rémunération et le versement de l’indemnité dédiée s’ils exercent dans un établissement classé REP (réseau d’éducation prioritaire) ou REP+.
Certes, ce texte a été voté à l’Assemblée nationale, mais il a été vidé de sa substance par les députés de la République En Marche : le recrutement en CDI n’est désormais prévu qu’à partir de trois ans pour les AESH et six ans pour les AED. De ce fait, le problème reste entier.
Madame la secrétaire d’État, pourquoi refuser de donner à ces femmes et à ces hommes un statut digne de leur engagement permettant l’inclusion de milliers d’enfants dans le système éducatif ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Nathalie Elimas, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de l’éducation prioritaire. Madame la sénatrice Martine Filleul, la proposition de loi de Michèle Victory marque une avancée, puisqu’elle permet la « CDIsation » des AESH au bout de trois ans. Bien sûr, ce texte doit poursuivre son parcours législatif.
Le versement de la prime REP n’est pas possible, car les AESH ne dépendent pas du mouvement académique, mais d’une notification de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) ; cela créerait de surcroît une inégalité entre les personnels affectés aux réseaux d’éducation prioritaire et les autres.
Je tiens à rappeler que 400 000 élèves en situation de handicap sont désormais accueillis dans une école pleinement inclusive ; leur nombre a augmenté de 19 % en cinq ans. Pas moins de 125 000 AESH ont été recrutés, lesquels bénéficient désormais d’un statut plus protecteur, et 1 300 unités localisées pour l’inclusion scolaire (ULIS) ont été créées, de même que 250 structures dédiées à l’autisme. Les familles sont aujourd’hui mieux informées et mieux écoutées. Une meilleure organisation territoriale a été mise en place, comme en témoignent les pôles inclusifs d’accompagnement localisés (PIAL).
Permettre à l’école d’être pleinement inclusive constitue une ambition forte du Gouvernement. J’en veux pour preuve les 4 000 nouveaux recrutements d’AESH, qui sont financés pour l’année 2022 ; au total, 27 000 équivalents temps plein (ETP) auront été créés.
J’ajoute que le statut des AESH a été repensé : d’une part, grâce à la transformation des contrats aidés en contrats à durée déterminée – et, potentiellement, en contrat à durée indéterminée au bout de trois ans, si la proposition de loi de Mme Victory est définitivement adoptée – et, d’autre part, une nouvelle étape a été franchie le 1er octobre dernier concernant leur rémunération, avec notamment un début de grille indiciaire désormais fixé à l’indice 341.
M. le président. La parole est à Mme Martine Filleul, pour la réplique.
Mme Martine Filleul. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie pour ces précisions, mais le compte n’y est pas. Pourquoi attendre pour inscrire la proposition de loi de Mme Victory à l’ordre du jour du Sénat ?
fermetures de classes en milieu rural
M. le président. La parole est à M. Serge Babary, auteur de la question n° 2100, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Serge Babary. Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur les mesures de fermeture de classes qui menacent plusieurs écoles de communes rurales du département d’Indre-et-Loire pour la prochaine rentrée scolaire.
La nouvelle carte scolaire est en cours d’élaboration. Dès lors qu’elles n’entraînent ni la création ni la suppression d’une école, l’ouverture et la fermeture d’une classe relèvent du directeur académique des services de l’éducation nationale (Dasen).
Durant ces dernières semaines, j’ai été alerté, ainsi que mes collègues sénateurs, par plusieurs communes rurales de mon département, qui s’inquiètent du projet de carte scolaire qui leur a été soumis.
Depuis, j’ai eu l’occasion de rencontrer M. le directeur académique, qui m’a fait part des chiffres du département et des orientations fixées par le ministère pour la rentrée prochaine : allégement des charges des directeurs d’école ; plafonnement à 24 élèves des classes de grande section, de CP et de CE1 – hors éducation prioritaire – ; et, enfin, dédoublement des classes de CP et CE1 en REP et REP+.
Les orientations du ministère sont louables et nécessaires. En revanche, l’équation comptable est pour sa part complexe.
Bien que le département doive perdre 1 059 élèves lors de la prochaine rentrée, le respect de ces trois orientations mobiliserait 33 postes. Or la dotation pour l’Indre-et-Loire ne comporte qu’un seul et unique poste supplémentaire. Cela conduirait mathématiquement à la fermeture d’une trentaine de classes.
Cette situation apparaît en contradiction avec les conclusions du troisième comité interministériel aux ruralités, qui visait, entre autres, à garantir de nouveaux horizons pour les jeunes des territoires ruraux.
Madame la secrétaire d’État, compte tenu du contexte sanitaire et social actuel et des dynamiques démographiques constatées dans notre département, vous comprendrez les inquiétudes légitimes des élus locaux et des parents d’élèves.
C’est pourquoi je vous serais reconnaissant de m’éclairer sur les intentions du Gouvernement pour la prochaine rentrée scolaire, en particulier dans le département d’Indre-et-Loire.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Nathalie Elimas, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de l’éducation prioritaire. Monsieur le sénateur, comme vous l’avez rappelé, malgré une baisse démographique, de nombreux et constants efforts ont été consentis dans le premier degré, avec 14 380 postes créés, notamment pour dédoubler les classes de CP, de CE1 et, en ce moment, celles de grande section de maternelle.
J’en viens plus particulièrement à votre département où le nombre d’élèves par classe est en moyenne de 22,6 à la rentrée 2021, en amélioration par rapport à la rentrée 2019 où il s’établissait à 23,6.
Non seulement nous avons dédoublé les classes de CP et de CE1 en REP, mais nous avons également fixé à 24 le plafond des effectifs pour l’ensemble des classes hors de ces réseaux. Je le répète, le nombre moyen d’élèves dans les classes de votre département est de 22,6 à la rentrée 2021.
Depuis la rentrée 2019, conformément à l’engagement du Président de la République, aucune fermeture d’école en milieu rural ne peut intervenir sans l’accord du maire.
L’engagement de ne fermer aucune classe en milieu rural sans l’accord du maire s’est appliqué de manière exceptionnelle à la rentrée scolaire 2020 au regard, vous le savez bien, du contexte sanitaire. En revanche, l’engagement de ne fermer aucune école rurale sans l’accord du maire continue et continuera de s’appliquer.
Le travail de préparation de la carte scolaire donne lieu à de nombreux échanges avec les élus locaux et se fonde sur une appréciation fine et objective de la situation de chaque école. La concertation avec les maires se tient dans un esprit de dialogue constructif, afin de tenir compte des spécificités de chaque territoire et de chaque école.
Monsieur le sénateur, la vigilance et l’attention portée aux territoires restent d’actualité ; elles ne se relâchent pas, que ce soit au niveau national ou au niveau local.
M. le président. La parole est à M. Serge Babary, pour la réplique.
M. Serge Babary. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État.
Le comité technique spécial départemental qui doit étudier le projet de carte scolaire se réunit aujourd’hui même. J’espère que vos propos seront entendus dans mon département.
viticulture et technique d’aspersion
M. le président. La parole est à M. Pierre Louault, auteur de la question n° 2073, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Pierre Louault. Ma question s’adressait à M. le ministre de l’agriculture et à Mme la ministre de la transition écologique.
L’année dernière, le gel a fait énormément de dégâts dans les vignobles et les plantations fruitières.
Il existe aujourd’hui une technique par aspersion, la plus efficace, permettant de déposer une pellicule d’eau, qui se transforme en glace protectrice et évite le gel des fleurs et des plantes. Malheureusement, pour recourir à cette méthode, il faut faire des prélèvements en eau, certes très ponctuels, mais plutôt importants.
Or la réglementation relative aux prélèvements dans les cours d’eau qui, lors des mois de mars et d’avril, ont un débit très abondant et sont parfois même en crue, est la même que celle qui s’applique aux prélèvements d’eau pour l’irrigation, qui, eux, ont naturellement lieu aux mois de juillet et d’août, et qui sont donc très contrôlés, ce qui est normal.
Les viticulteurs sont actuellement confrontés à des refus systématiques d’autorisation de pompage pour protéger leurs vignobles du gel, alors que cela ne se justifie nullement.
Je souhaiterais donc savoir si une réglementation plus libérale, pour une période très limitée – quelques jours par an et quelques heures par jour –, pourrait être mise en œuvre pour aboutir à des prélèvements en eau mieux adaptés à la nécessaire protection des vignobles contre le gel.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Nathalie Elimas, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de l’éducation prioritaire. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser M. le ministre de l’agriculture, qui ne peut pas être présent ici ce matin. Je vous répondrai en son nom.
Les conséquences du gel, notamment sur la viticulture, sont un sujet qui, comme vous le savez, nous tient évidemment particulièrement à cœur.
L’épisode de gel dramatique du printemps dernier a en effet laissé des traces profondes et nous a démontré, si besoin était, que l’inaction en matière climatique n’est plus une option.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a choisi l’action, non seulement au moyen d’un plan d’aide massif et inédit pour répondre dans l’urgence aux conséquences économiques du gel sur les exploitations agricoles, mais également en apportant une réponse structurante et à long terme via le projet de loi portant réforme des outils de gestion des risques climatiques en agriculture, encore en cours d’examen.
Le recours à la méthode d’irrigation par aspersion que vous évoquez pose la question des prélèvements en eau en période de hautes eaux.
Cette question, si elle est d’une sensibilité particulière pour la viticulture, notamment au regard de l’angle sous lequel vous la posez, est en fait plus large et concerne l’ensemble des productions. Il s’agit même de l’un des principaux sujets discutés dans le cadre de la thématique 3 du Varenne agricole de l’eau et de l’adaptation au changement climatique que le Premier ministre a clos le 1er février, au terme de neuf mois d’intenses travaux.
Sur ce point précis, le Premier ministre a pris le décret du 23 juin 2021 relatif à la gestion quantitative de la ressource en eau, de sorte que les préfets puissent définir les volumes préférables en période de hautes eaux. Cette décision est une réponse concrète et forte, je crois, à l’une des principales demandes de la profession agricole.
M. le président. La parole est à M. Pierre Louault, pour la réplique.
M. Pierre Louault. Votre réponse est satisfaisante, madame la secrétaire d’État.
Je regrette simplement l’état d’esprit des directions départementales des territoires (DDT) au sein desquelles ceux qui doivent exécuter cette décision ne semblent pas encore connaître la réglementation. Je demanderai au ministre de l’agriculture de leur rappeler ces nouvelles règles.
assistants spécialisés en lutte contre la radicalisation et prévention des actes terroristes
M. le président. La parole est à M. Daniel Gueret, auteur de la question n° 2110, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Daniel Gueret. Madame la secrétaire d’État, ma question s’adressait à M. le ministre de la justice. Elle a trait à la situation des assistants spécialisés en lutte contre la radicalisation et prévention des actes terroristes.
En France, la radicalisation n’est pas une infraction. Pour autant, au regard des enjeux en termes de sécurité sur le territoire, l’État a mis en place des moyens humains en vue d’une surveillance de la radicalité, processus conduisant à la radicalisation, voire à des actes inqualifiables.
Depuis 2015, quelque 37 assistants spécialisés en lutte contre la radicalisation et prévention des actes terroristes, dépendant du ministère de la justice, sur le fondement d’un statut défini par le ministère de l’intérieur, rendent des expertises auprès des procureurs de la République et dispensent des formations de sensibilisation. Ils constituent un maillon essentiel du réseau de renseignement.
Je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur une faille dans les objectifs de sécurité intérieure qui ont été fixés. Ces assistants spécialisés sont recrutés pour une durée de six ans au maximum. Les conséquences directes de cette absence de CDIsation sont l’absence de continuité dans la mission qui leur est confiée et qui est pourtant exécutée avec compétence, une déperdition d’informations et l’obligation d’une formation sur le temps long pour bien connaître le tissu territorial, un nombre de dossiers significatif de situations individuelles en cours de processus ou « dormantes ».
Dans une société où il est essentiel de combattre la radicalisation pour affirmer nos valeurs républicaines et garantir la sécurité de tous nos concitoyens, j’insiste auprès du Gouvernement sur la nécessité d’une pérennisation des postes d’assistants spécialisés en lutte contre la radicalisation et prévention des actes terroristes.
Il serait nécessaire de clarifier leur statut dans le cadre d’une fonction interministérielle permettant l’émergence d’un pôle de compétence à la hauteur des annonces gouvernementales en matière de sécurité intérieure et des attentes de nos concitoyens.
Madame la secrétaire d’État, quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre en faveur de ces acteurs de la chaîne de sécurité, afin de pérenniser leur action de terrain ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Nathalie Elimas, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de l’éducation prioritaire. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence du garde des sceaux, au nom duquel je vais bien sûr répondre à votre question.
La loi du 24 décembre 2020 relative au Parquet européen a permis de conférer un statut légal à l’assistant spécialisé en lutte contre la radicalisation, désormais dénommé assistant spécialisé pour la prévention des actes de terrorisme (Aspat), et dont le rôle est défini à l’article 706-25-15 du code de procédure pénale.
Le législateur a entendu faire de ses assistants spécialisés un maillon essentiel dans la lutte contre la radicalisation. Ils viennent ainsi utilement appuyer les procureurs de la République et les procureurs généraux dans l’exercice de leurs missions.
Peuvent exercer les fonctions d’Aspat les fonctionnaires de catégorie A ou B, ainsi que les personnes qui disposent d’une formation universitaire spécifique, remplissent les conditions d’accès à la fonction publique et justifient d’une expérience professionnelle minimale de quatre années.
La durée de la nomination de ces assistants, prévue par le code de procédure pénale, est fixée à trois ans renouvelables.
En application d’une dépêche du directeur des services judiciaires du 14 juin dernier, les juridictions ont la possibilité de conclure un contrat de travail à durée indéterminée avec l’agent contractuel recruté en qualité d’Aspat qui arriverait au terme de cette durée maximale de six ans, sous la réserve expresse de s’assurer qu’aucun fonctionnaire n’est susceptible d’être recruté sur l’emploi concerné.
S’agissant des fonctionnaires en position de détachement, celui-ci ne peut excéder cinq années en application d’un décret de septembre 1985. Cette position peut toutefois être renouvelée par périodes n’excédant pas cinq années.
Afin de développer une analyse fine et approfondie de l’état de la lutte contre la radicalisation et le terrorisme sur le ressort concerné, et de fournir ainsi une assistance effective aux magistrats compétents en la matière, il convient de préserver au maximum l’engagement à long terme des agents recrutés sur ces postes.
réforme des mandataires judiciaires à la protection des majeurs exerçant à titre individuel
M. le président. La parole est à Mme Catherine Belrhiti, auteure de la question n° 2064, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Catherine Belrhiti. Madame la secrétaire d’État, je souhaiterais évoquer la question de la future réforme des mandataires judiciaires à la protection des majeurs exerçant à titre individuel.
Ces professionnels chargés de la gestion administrative, juridique et financière des personnes qualifiées de vulnérables par le code civil disposent d’un mandat confié personnellement par le juge des contentieux de la protection.
Le volume de leur activité représente 20 % des mesures judiciaires, pour environ 80 000 personnes protégées.
Ces mandataires constituent une aide précieuse pour le système judiciaire, de plus en plus nécessaire compte tenu de l’augmentation du nombre de mesures de protection judiciaire.
Face au constat d’une absence de statut juridique d’exercice, un groupe de réflexion interministériel a été créé le 9 novembre 2020 avec pour objectif de réformer le statut de ces mandataires.
Or ceux-ci sont inquiets de la méthode employée pour réformer leur statut depuis le retrait du groupe de réflexion de Mme Anne Caron-Déglise, avocate générale près la Cour de cassation.
Mme Caron-Déglise regrettait que la méthode de travail n’ait pas évolué, que la programmation très tardive des réunions ait empêché une large participation et que des arbitrages aient été annoncés alors même que des auditions essentielles n’avaient pas encore eu lieu.
Bien que les mandataires aient connu diverses réformes ayant mis à mal leur profession et, par conséquent, les personnes vulnérables dont ils ont la charge, ils demandent aujourd’hui que la réforme prenne véritablement en compte leurs intérêts.
En particulier, ils proposent l’instauration d’un statut d’exercice libéral, une valorisation de leurs compétences qui permette notamment une indexation de leur rémunération, la création d’un code de déontologie et d’une instance ordinale.
Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous nous éclairer sur l’avancement de ces travaux ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Nathalie Elimas, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de l’éducation prioritaire. Madame la sénatrice, vous interrogez le Gouvernement sur les réflexions en cours concernant le statut des mandataires judiciaires à la protection des majeurs.
Comme vous, nous mesurons l’enjeu majeur que représente la protection des majeurs vulnérables. Tout comme vous, nous avons conscience de la nécessité de mieux prendre en compte l’importance de ces professionnels qui participent à leur protection au quotidien.
Après la publication en septembre 2018 du rapport de la mission interministérielle sur l’évolution de la protection juridique des personnes, présidée par Mme Anne Caron-Déglise, que vous avez évoquée, le Gouvernement a engagé plusieurs actions.
D’abord, la direction générale de la cohésion sociale et la direction des affaires civiles et du sceau ont élaboré un guide destiné à fournir des repères méthodologiques pour mener une réflexion éthique sur les pratiques professionnelles des mandataires.
Avec cet outil, nous avons pour ambition d’accroître la compétence comme les réflexes éthiques individuels et collectifs. Celui-ci tient évidemment compte des nombreux travaux déjà conduits par les mandataires eux-mêmes.
Par ailleurs, durant près de dix-huit mois, un groupe de travail s’est réuni pour réfléchir à la déontologie et au statut des mandataires. Il a formulé plusieurs propositions relatives à la définition des missions des mandataires, l’obligation de signalement des situations de maltraitance, les préposés d’établissements, la formation, la création d’une commission nationale de la protection juridique des majeurs, le financement et le contrôle des mesures, l’évaluation et la coordination des acteurs de la protection.
Les modalités de mise en œuvre de ces différentes propositions sont aujourd’hui à l’étude.
Enfin, la réflexion va se poursuivre sur le financement des mesures et les préposés d’établissements dans le cadre des États généraux de la justice, dont un atelier est en effet spécifiquement consacré à la justice de protection.
Je ne doute pas que de nouvelles mesures, ou en tout cas de nouvelles propositions, seront formulées à l’issue de ce travail.