M. Laurent Burgoa. Tout à fait !
M. Patrick Chauvet, rapporteur pour avis. Nous regrettons aussi une évaluation parcellaire. Il est proposé de modifier la facture d’énergie des Français, sans étude d’impact exhaustive…
Nous dénonçons également une concertation limitée, comme nous l’ont dit les élus locaux et les professionnels.
Enfin, certaines mesures sont sous-calibrées. Alors que la France a souscrit au plan européen visant à porter les énergies renouvelables à 45 % d’ici à 2030, rien ne garantit que cet objectif soit atteint.
Pour répondre à la crise énergétique, nous sommes convaincus qu’il est indispensable d’accélérer l’essor des projets d’énergies renouvelables, parallèlement à la relance de la filière nucléaire et à l’effort de sobriété énergétique, pour renforcer notre transition et notre souveraineté énergétiques.
Dans ce contexte, notre commission a travaillé selon trois axes. Le premier axe est la garantie de la neutralité technologique entre les différentes sources d’énergie décarbonée, en supprimant les angles morts du texte. Sur l’hydroélectricité, la commission a facilité les augmentations de puissance, consolidée les concessions échues, ajusté les débits minimaux et simplifié les comités de suivi. Sur l’hydrogène, elle a intégré les conclusions de sa mission d’information sur le sujet. Sur le biogaz, elle a créé des contrats d’achat de long terme, conforté les contrats d’expérimentation, simplifié les autorisations d’urbanisme, facilité les raccordements et instauré des opérations d’autoconsommation. Sur l’agrivoltaïsme, elle a repris in extenso la proposition de loi en faveur de son développement, adoptée par le Sénat, par 251 voix pour et 3 voix contre, le 20 octobre dernier.
Autre point, la commission a renforcé le critère du bilan carbone conditionnant les soutiens publics aux projets d’énergies renouvelables, pour prendre en compte les métaux stratégiques et englober l’hydrogène.
Le deuxième axe est l’accélération de la production des énergies renouvelables par l’organisation de l’État, la simplification des normes, le financement des projets et la résolution des litiges.
Sur l’article 6, nous avons encadré l’habilitation à légiférer par ordonnances pour que celles-ci n’induisent pas une érosion des compétences des collectivités, une hausse des coûts de raccordement ou une déstabilisation des rabais pour les producteurs d’énergies renouvelables et les consommateurs électro-intensifs. De plus, nous avons inscrit deux dispositions « en dur » : la suppression d’une contribution locale et l’attribution d’une compétence à la Commission de régulation de l’énergie (CRE).
Sur l’article 18, nous avons ainsi récrit le dispositif de partage territorial de la valeur, pour prévoir que le reversement soit public et collectif et non privé et individuel.
M. Jean-Michel Houllegatte. Très bien !
M. Patrick Chauvet, rapporteur pour avis. Le contraire aurait été complexe à mettre en œuvre et attentatoire au principe de péréquation tarifaire, qui garantit un prix égal de l’électricité. Ce sont donc les communes et leurs groupements qui bénéficieront de ce versement, à charge pour eux de le redistribuer. Ils devront rendre compte de son montant et de son allocation.
De plus, nous avons créé une contribution dès la notation des appels d’offres.
Enfin, nous avons prévu que les communes et leurs groupements puissent entrer facilement au capital des sociétés d’énergies renouvelables.
Le dernier axe est l’association des collectivités, en respectant leurs compétences et leurs finances, et en décentralisant les procédures.
Sur l’article 3, nous avons supprimé la possibilité pour l’État de modifier unilatéralement les documents d’urbanisme. Nous avons, au contraire, fourni de nouveaux outils aux élus locaux : modification simplifiée des Scot, amélioration de la planification locale et articulation avec l’objectif de « zéro artificialisation nette » (ZAN).
Sur l’article 16 visant à permettre d’implanter des ouvrages de raccordement en zone littorale, nous avons prévu l’avis des communes ou de leurs groupements, la priorité donnée à l’enfouissement et l’articulation avec l’objectif ZAN.
Au total, nous avons infléchi et enrichi le texte, en gardant toujours à l’esprit deux impératifs : la simplification des normes, cruciale pour les producteurs d’énergies renouvelables, et la territorialisation des projets, nécessaire à leur insertion locale et donc à leur acceptation sociale. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Laurence Garnier, rapporteure pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission de la culture a été saisie pour avis sur le projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables. Permettez-moi de saluer à mon tour le travail des administrateurs de la commission.
Dans notre rapport, nous avons d’abord souhaité affirmer notre conviction que la transition énergétique ne pourra se faire qu’en cherchant toujours à conjuguer, et jamais à opposer, développement des énergies renouvelables (EnR) et préservation du patrimoine et du cadre de vie des Français.
Notre commission se réjouit des modifications apportées par la commission du développement durable afin d’accorder aux conseils municipaux la possibilité d’accepter ou de refuser un projet d’EnR. Les maires et les élus locaux sont, en effet, les meilleurs garants du cadre de vie des habitants. L’article 1er C, issu de l’initiative conjointe du rapporteur Didier Mandelli et de la commission de la culture, nous paraît donc essentiel.
Nous regrettons, en revanche, l’introduction dans le texte de dispositions qui fragilisent la protection du patrimoine.
L’article 11 quinquies autorise ainsi des dérogations à l’avis conforme de l’architecte des Bâtiments de France (ABF) pour l’installation de panneaux photovoltaïques aux abords des monuments historiques. Nous avons conscience que les décisions des ABF peuvent parfois susciter l’incompréhension des élus locaux.
M. Bruno Belin. Ah oui !
Mme Laurence Garnier, rapporteure pour avis. Cette disposition nous est toutefois apparue comme dangereuse pour le cadre de vie et pour l’attractivité touristique de nos territoires, alors même qu’elle n’apporte pas de gains significatifs en termes de production d’énergie renouvelable. Je rappelle que l’avis conforme de l’ABF ne concerne aujourd’hui que 6 % du territoire national et que, dans ces espaces, le taux de refus des projets dépasse à peine les 10 %.
Une telle mesure risque donc d’abîmer nos paysages pour un bénéfice énergétique purement symbolique, c’est pourquoi je vous appelle à voter l’amendement de suppression que j’ai déposé.
La commission vous propose également des amendements visant à adapter notre législation aux évolutions technologiques des EnR.
Concernant l’éolien terrestre, vous le savez, la taille des mâts a considérablement augmenté ces dernières années, et ceux-ci sont désormais plus visibles sur de plus larges périmètres. L’installation de nouveaux parcs et le renouvellement des parcs plus anciens dégradent donc de plus en plus nos paysages.
Pour prendre en compte ces évolutions, notre commission présente un amendement visant à étendre l’avis conforme de l’ABF aux projets de parcs éoliens terrestres entrant dans le champ de visibilité d’un monument historique ou d’un site patrimonial remarquable, dans un rayon de dix kilomètres. Il ne s’agit pas d’une interdiction, mais bien d’un contrôle renforcé, afin de protéger notre patrimoine et nos paysages.
Dans d’autres cas, les avancées technologiques constituent, au contraire, une opportunité pour sauvegarder nos paysages. J’ai en particulier à l’esprit les éoliennes flottantes, qui permettront de positionner les parcs offshore à plus grande distance des terres.
L’implantation récente du premier parc éolien en mer, au large du Croisic, a suscité beaucoup d’incompréhension de la part des élus locaux. Soucieuse de préserver nos littoraux de l’impact visuel et de l’effet d’encerclement, que j’ai pu moi-même constater dans mon département de la Loire-Atlantique, notre commission vous invitera donc à interdire la mise en place de tels dispositifs à moins de 40 kilomètres des côtes, à compter des prochains appels d’offres.
M. François Patriat. Sous la mer, c’est encore mieux !
Mme Laurence Garnier, rapporteure pour avis. Personne ici ne conteste la nécessité du développement des EnR pour faire face aux enjeux d’écologie et de souveraineté énergétique. Veillons toutefois à ce que leur déploiement ne constitue pas un nouveau motif de division sociale et territoriale.
Alors que les éoliennes terrestres se multiplient souvent en milieu rural, et particulièrement en milieu rural pauvre, une étude datant de 2019 a montré que les manifestants pour le climat étaient majoritairement jeunes, urbains, et issus de classes sociales privilégiées.
Si l’on souhaite que les enjeux écologiques ne soient pas portés par quelques-uns, mais au contraire partagés par tous les Français, nous devons tracer cette ligne de crête et trouver le bon équilibre entre EnR et cadre de vie.
M. Jean-Marc Boyer. Très bien !
Mme Laurence Garnier, rapporteure pour avis. Reprenons le discours de Malraux défendant sa loi en 1962 et souvenons-nous du passage dans lequel il imagine les quais de Seine livrés sans règles aux promoteurs : « Si nous laissions détruire ces vieux quais de la Seine semblables à des lithographies romantiques, il semblerait que nous chassions de Paris le génie de Daumier et l’ombre de Baudelaire. » (Exclamations sur les travées du groupe GEST.)
Mme Françoise Gatel. Très bien !
Mme Laurence Garnier, rapporteure pour avis. N’oublions pas que nos prédécesseurs ont su préserver le patrimoine français qui a fait de notre pays la première destination touristique mondiale. Notre responsabilité est donc bien de conjuguer le développement des énergies renouvelables avec les enjeux économiques, touristiques, territoriaux et sociaux, afin que la France soit au rendez-vous de toutes ces ambitions. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – Mme Nathalie Delattre applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. Jean-Pierre Corbisez. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, au nom des membres de la commission de l’aménagement du territoire, je remercie Didier Mandelli pour son travail, mais aussi pour avoir ouvert l’ensemble de ses auditions à tous les collègues qui souhaitaient y assister.
Il y a exactement trois semaines, nous débattions de la politique énergétique de l’État, dont le présent projet de loi constitue l’une des déclinaisons opérationnelles.
Si j’osais une métaphore culinaire, je dirais que, dans le menu que nous a proposé le chef de l’État lors de son discours de Belfort, le projet de loi initial, tel qui nous a été soumis, est apparu comme une recette bien allégée et manquant cruellement d’ingrédients.
Le sujet aurait mérité une approche globale et je suis convaincu qu’un temps de maturation plus long aurait donné naissance à un texte plus cohérent, prenant en compte l’ensemble des énergies renouvelables : l’hydrogène, l’hydroélectricité, chère à Daniel Gremillet, le gaz vert, l’énergie marémotrice ou encore l’agrivoltaïsme.
S’agissant de ce dernier point, notre groupe peine à comprendre pourquoi l’amendement de notre collègue Nathalie Delattre visant à intégrer les fermes pédagogiques au dispositif a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution. L’installation de panneaux photovoltaïques sur les bâtiments d’établissements scolaires agricoles aurait permis de produire de l’énergie, tout en ayant des vertus pédagogiques pour de futurs jeunes agriculteurs. Brandir cet article pour refuser un tel investissement me semble abusif.
M. Jean-Marc Boyer. Très bien !
M. Jean-Pierre Corbisez. Le travail de nos deux commissions a fort heureusement conduit à enrichir le texte et je me félicite, en particulier, des avancées concernant l’hydrogène renouvelable ou bas-carbone. Nous aurons encore à en débattre et je sais que nombre de nos collègues ont déposé des amendements sur ce sujet.
Nous devons également approcher globalement la question énergétique elle-même. Alléger les contraintes administratives pour accélérer les projets est une chose, mais il nous faut aussi créer les conditions pour réussir la transition. Cela concerne l’adaptation des réseaux, qui doivent devenir intelligents ; l’organisation du stockage de l’énergie produite – un défi ! – ; la structuration d’une véritable filière industrielle ; la nécessaire recherche, en parallèle, d’une réduction de nos consommations par l’optimisation des outils de pilotage et de nos comportements ; la décarbonation de notre économie, laquelle repose encore à plus de 60 % sur les énergies fossiles.
Nous ne pouvons éviter d’avoir une discussion sur ces sujets urgents ; à défaut, nous raterions le tournant de la troisième révolution industrielle en cours, chère au prospectiviste Jeremy Rifkin.
S’agissant du contenu du texte, il me semble que nous devons être extrêmement prudents sur les motifs mis en avant, en particulier en ce qui concerne la lenteur des procédures. C’est un procès récurrent intenté à nos administrations, mais la principale cause de cette situation ne serait-elle pas le manque de moyens humains et financiers ?
Nous le vivons tous au quotidien dans nos territoires : l’État s’est désengagé depuis longtemps, les effectifs des directions départementales ont fondu comme neige au soleil et nos services déconcentrés sont bien souvent en panne sèche. Madame la ministre, vous nous avez heureusement rassurés sur ce point.
Dans le même temps, le texte doit restaurer le rôle légitime des collectivités, qui sont, au côté des habitants, les premières à être concernées par les impacts des nouvelles installations. Comme l’a relevé très justement Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales, interrogée au sujet du ZAN, elles sont les mieux placées pour évaluer leurs besoins et leurs contraintes. Pour chaque dispositif, ce sont les principes d’adaptation, de planification, de programmation et de territorialisation qui doivent donc s’imposer.
Sur ce sujet également, notre commission a d’ores et déjà amélioré le texte, mais il nous faut aller plus loin. Aussi, je salue les dispositions qui visent à créer un partage territorial de la valeur des énergies renouvelables ou à exiger des sociétés de projet qu’elles proposent des parts aux résidents et aux collectivités.
Cependant, la très grande majorité de mon groupe s’opposera au droit de veto des collectivités sur les projets d’installation d’éolien terrestre, de biogaz ou de photovoltaïque, ainsi qu’à la distance minimale de 40 kilomètres des côtes en matière d’éolien en mer.
De manière générale, parce que les enjeux pour les générations futures sont colossaux, nous devons faire preuve de responsabilité et de lucidité s’agissant de la simplification des procédures et trouver le juste équilibre entre la préservation de notre environnement et la nécessité d’accélérer notre transition énergétique, sans céder à l’arbitraire non plus qu’aux pressions. Je suis donc convaincu que les principes de proportionnalité et de réalisme doivent nous guider.
Je prendrai un seul exemple : l’amendement relatif à la suppression de l’avis conforme des architectes des Bâtiments de France pour l’installation de panneaux solaires sur les toits des habitations à proximité de sites classés. Il s’agit, à mon sens, d’une avancée bienvenue : défendons notre patrimoine, mais restons raisonnables !
Vous l’aurez compris, notre groupe adoptera une attitude constructive sur ce texte, tout en étant attentif aux impératifs de notre démocratie participative et aux enjeux de la préservation de nos richesses naturelles. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme Marta de Cidrac. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Marta de Cidrac. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis plusieurs mois, nos concitoyens regardent avec inquiétude leur facture d’énergie. Ils se posent des questions, car, autour de nous, en Europe, les compteurs s’affolent. Le prix de l’électricité est en hausse de 80 % au Royaume-Uni, de 55 % en Belgique, de 45 % aux Pays-Bas. Une seule solution s’impose : produire plus.
Une électricité abondante, disponible, et bon marché, c’est cela que les Français attendent. À défaut d’offrir cette réponse, ce texte a le mérite d’en apporter une. Les vertus environnementales du renouvelable ne sont plus à démontrer et aident la France à tenir ses engagements internationaux en matière d’émissions de gaz à effet de serre.
Je salue la volonté du Gouvernement d’amplifier notre production d’énergie bas-carbone. Il était temps ! Je forme le vœu que ce chemin augure d’autres déclics. Je nourris malgré tout un regret : cette politique énergétique est subie et non choisie ; elle se construit au coup par coup : un jour on fragilise le nucléaire, le lendemain on promeut les EnR, demain on réhabilitera le nucléaire, un autre jour on louera l’hydrogène… Tout cela est brouillon et manque de cap comme de vision.
Nous aurions certainement gagné à l’organisation d’un grand débat sur la stratégie et l’avenir énergétique de la France.
Cette volonté d’amplifier et de diversifier notre production bas-carbone ne surgit pas de nulle part. Comme c’est le cas ailleurs dans le monde, nous sommes rattrapés par un dérèglement climatique incontestable et par un contexte international dégradé, qui vient bousculer des approvisionnements et des échanges commerciaux que nous pensions pérennes.
Pour autant, la situation internationale ne doit pas nous faire oublier la réalité nationale, laquelle a contribué, depuis dix ans, à affaiblir notre production d’énergie bas-carbone et à fragiliser l’autonomie énergétique de notre pays. Accélérer les EnR demain, oui, mais pour faire oublier que, hier, on a fermé Fessenheim ; que l’on a renoncé au projet Astrid ; que l’on a vendu puis racheté Alstom Power ; que l’on a repoussé le grand carénage ; que l’on a échoué à pérenniser les EPR (European Pressurized Reactors) ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.) Qu’avons-nous fait de notre indépendance énergétique, qui garantissait à la France une énergie abondante, disponible et bon marché ?
Aujourd’hui, nous comptons sur le charbon pour compenser nos réacteurs arrêtés, et nos concitoyens se tournent vers le gaz pour espérer se chauffer. Alors, évidemment, faisons en sorte que, demain, nous puissions pleinement nous appuyer sur le secteur du renouvelable dans le mix énergétique français.
Cependant, madame la ministre, combien de kilomètres carrés de champs photovoltaïques, combien de kilomètres de côtes garnies d’éoliennes en mer seront nécessaires pour répondre aux besoins de la France ? Et quelles précautions devrons-nous prendre en matière d’environnement et de souveraineté énergétique ? Telle doit être la contribution de ce projet de loi aux grands enjeux énergétiques. C’est son ambition et je l’approuve.
Pourtant, ce texte élude certains sujets essentiels.
Accélérer la production des EnR implique leur déploiement massif partout dans les territoires. Dès lors, il est salutaire, voire crucial, de s’interroger sur leur impact environnemental et économique. Soyons lucides : les mettre en œuvre sans discernement et sans quelques précautions reviendrait à financer une industrie venue d’ailleurs. C’est un constat regrettable, mais que chacun connaît : les géants industriels de ces filières sont aujourd’hui principalement chinois, pour le photovoltaïque, danois et allemands, pour l’éolien et l’éolien en mer.
Je souhaite que les entreprises françaises se saisissent des opportunités environnementales et économiques que le texte laisse entrevoir. Veillons, madame la ministre, à encourager et à soutenir les initiatives françaises dans les différents plans d’investissements d’avenir comme dans le plan France 2030. Ne réitérons pas les erreurs du passé : nous n’avons pas su créer une filière industrielle française d’équipements compétitifs et vertueux sur tout leur cycle de vie.
Le traitement des déchets et le recyclage sont également un enjeu impératif des installations démantelées. Accélérer aujourd’hui les implantations, c’est devoir, demain, en subir le coût environnemental, avec tout ce que cela comporte en termes de traitement et de valorisation des déchets. Pour le photovoltaïque, une filière à responsabilité élargie des producteurs (REP) s’est structurée ; ce n’est pas le cas, à ce jour, en ce qui concerne l’éolien.
L’échéance est pourtant déjà là : d’ici à 2025, les premières générations d’éoliennes devront être démantelées. Selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), la masse d’une éolienne est recyclable à 90 %. Toutefois l’essentiel de cette masse se trouve dans les fondations, pour lesquelles des filières existent. Ce n’est pas le cas pour tous les composants, par exemple pour les pales. Or, si nous accélérons le déploiement des éoliennes, il est impératif d’anticiper le traitement de tous les déchets issus de leur démantèlement. Construisons une vision d’avenir à trente ans, sur l’ensemble du cycle de vie des dispositifs implantés.
Dans un souci d’économie circulaire, je me réjouis de l’adoption en commission de mon amendement visant à créer une filière REP, ou tout système équivalent de prévention et de gestion des déchets, pour l’éolien.
Avant de conclure, je souhaite à mon tour remercier notre rapporteur, Didier Mandelli, pour son écoute tout au long de l’examen du texte et pour tout le travail effectué au sein de notre commission. Ce texte, enrichi de l’apport de tous les commissaires, va libérer les énergies dans un secteur qui ne demande qu’à se développer.
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Marta de Cidrac. Toutefois, pour que le déploiement des EnR soit ambitieux et accepté dans nos territoires, madame la ministre, il faudra tenir compte de l’ensemble des enjeux importants qu’il aborde. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Merci à tous de respecter les temps de parole !
La parole est à M. Pierre Médevielle. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – M. Pierre Louault applaudit également.)
M. Pierre Médevielle. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la guerre en Ukraine et ses conséquences géopolitiques et économiques ont bouleversé les circuits d’approvisionnement des produits énergétiques fossiles, rappelant la dépendance de notre économie et de nos modes de vie aux énergies importées. Cette situation constitue un nouveau paradigme dont il nous faut prendre acte.
Dans ce contexte, le Gouvernement a présenté ce projet de loi ayant vocation à répondre rapidement et efficacement aux défis énergétiques que nous aurons à relever dans les années à venir. Il s’agit d’un signal politique fort.
Je tiens d’abord à relever que le Gouvernement a prêté une oreille très attentive dans la phase de préparation de ce texte et à saluer le travail effectué au sein de chaque commission, qui a permis, notamment, l’adoption de plusieurs amendements déposés par des sénateurs de notre groupe sur des points essentiels.
Vous le savez, le groupe Les Indépendants soutient une écologie libérale, pragmatique et pertinente. Nous devons absolument aller vers une simplification en matière de déploiement de dispositifs générateurs d’énergie renouvelable.
Ici, simplifier implique de réduire le temps de développement des EnR pour accélérer leur mise en œuvre sur notre territoire, mais également de libérer des énergies et des technologies nouvelles pour gagner en souveraineté, grâce à la production d’énergies renouvelables bas-carbone. Celles-ci constituent, à mon sens, une pierre angulaire de notre mix énergétique qui, à terme, doit nous permettre d’assurer notre alimentation en électricité, tout en préservant notre environnement.
Par ailleurs, si ce projet de loi couvre un large spectre de solutions énergétiques, il a dû être complété afin d’y inclure l’hydrogène, la géothermie ou l’agrivoltaïsme.
Ce dernier secteur me semble essentiel. Au sein de son ordre du jour réservé du 20 octobre 2022, notre groupe a présenté et fait adopter une proposition de loi visant à encadrer son développement, dont les mesures ont pu être insérées dans ce texte dès l’examen en commission. Je remercie les auteurs des différents amendements déposés à cette fin.
L’agrivoltaïsme m’importe tout particulièrement, car ses avantages sont multiples : il permet à nos agriculteurs de bénéficier d’un revenu complémentaire, tout en garantissant la primauté de l’activité agricole ; il constitue également une nouvelle source de production énergétique, sans aggraver l’artificialisation des sols, un point qui a souvent été abordé durant nos débats.
Je viens d’évoquer des avancées notables, pour autant, le travail doit se poursuivre. Je suis convaincu que nous devons penser nos transitions dans une architecture plus large, c’est pourquoi les autres textes annoncés dès le début de l’année prochaine me semblent indispensables afin d’atteindre nos objectifs en matière d’indépendance énergétique.
J’ai en particulier à l’esprit la programmation pluriannuelle de l’énergie ou encore le projet de loi sur le nucléaire, une énergie qui restera essentielle dans notre mix énergétique décarboné.
Rappelons également l’importance du stockage des EnR, une question absente jusqu’ici. Pour ces énergies dites intermittentes, celui-ci présente un potentiel substantiel, notamment grâce à la technique du power to gas, qui vise à transformer les EnR en hydrogène.
Une dernière problématique me tient à cœur : la place des collectivités locales et des élus locaux dans le développement des EnR. Je suis convaincu de leur rôle en la matière, mais il me semble qu’il faut trouver un équilibre juste entre le droit de veto qui leur serait octroyé et l’impératif de développement de ces énergies. La question peut paraître clivante, mais nos besoins énergétiques immédiats sont une réalité et ne peuvent souffrir d’un droit de blocage dont l’exercice serait souvent arbitraire.
De même, je ne suis pas persuadé que l’on rendrait service aux maires en leur concédant le pouvoir d’autorisation en matière d’énergie renouvelable. Ils risquent de se retrouver dans tous les cas seuls et sous une trop forte pression. On peut se référer à ce titre au communiqué national de l’Association des maires ruraux de France (AMRF).
À travers ce texte, nous devons privilégier le sens de l’intérêt collectif et mettre de côté les intérêts politiques partisans.
En matière d’énergies renouvelables, le meilleur reste à venir. Ainsi, le projet toulousain d’Airbus Defence and Space, Solar Beam, une centrale photovoltaïque spatiale, permettra d’alimenter les avions par faisceaux. Notre indépendance énergétique reposera également sur notre audace, sur notre ambition et sur les progrès technologiques futurs.
Notre groupe votera en faveur de ce projet de loi, pour soutenir l’effort commun vers une transition durable et vers davantage de souveraineté énergétique. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – M. Pierre Louault applaudit également.)