Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement. Pas de jugement, madame la rapporteure, et, surtout, pas de suspicion : il s’agit simplement de permettre le contrôle, par les juridictions financières et les organismes de contrôle administratifs, des établissements de santé privés, de leurs sociétés satellites ainsi que des sociétés qui exercent sur elles un contrôle direct ou indirect, en imposant que les documents comptables et financiers nécessaires soient transmis à ces instances.
Les auteurs de l’amendement entendent transposer dans le code de la santé publique et compléter pour le champ sanitaire les dispositions qui vont être prises pour les Ehpad à l’article 32 du présent texte.
Mme le président. La parole est à M. Bernard Bonne, pour explication de vote.
M. Bernard Bonne. L’enquête que j’ai menée avec Michelle Meunier nous a conduits à la conclusion qu’il fallait absolument contrôler les Ehpad, notamment les Ehpad privés à but lucratif. De fait, il y a là de l’argent public qui peut être utilisé de façon anormale.
Pour les cliniques, il en va différemment, et il me semble que le Gouvernement essaie de rattraper l’erreur qu’il a faite en ne contrôlant pas suffisamment ces groupes.
Nous sommes face à une demande de contrôle des cliniques privées, qui sont pourtant très différentes des Ehpad. Elles peuvent être contrôlées sur le plan médical, mais pas en ce qui concerne l’hébergement hôtelier, et leur financement est accepté par les personnes qui y entrent – celles qui entrent en Ehpad n’ont pas la possibilité de se défendre de la même façon.
Il fallait pousser les contrôles sur les Ehpad, mais ceux-ci n’ont rien à voir avec les cliniques. Il n’y a donc pas de raison d’accepter cet amendement.
Mme le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je suis très favorable à cet amendement, et j’espère que celui que j’ai déposé à l’article 32, qui va à peu près dans le même sens, recevra un avis favorable du Gouvernement.
Nous sommes dans une période où il faut absolument contrôler les fraudes. Il est indispensable que l’ensemble des établissements soient soumis au maximum de contrôles, car l’argent qui est fraudé ne va pas aux urgences, aux infirmières, au système de santé…
Je soutiens donc énergiquement cet amendement, pleine d’espoir pour celui que j’ai déposé à l’article 32 !
Mme le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.
Mme Nadia Sollogoub. J’ai cosigné cet amendement. Dans votre explication assez technique, madame la rapporteure, vous n’avez pas dit qu’il était satisfait. Il semble donc possible d’aller vers plus de transparence, ce qui ne nuira pas, de toute manière.
Le contexte actuel est un peu compliqué pour tout le monde. Des scandales ont éclaté à propos des Ehpad. La transparence ne nuira jamais. Sans qu’il soit question d’aller vers la suspicion systématique (Mme la présidente de la commission des affaires sociales indique qu’elle s’y opposerait.), il s’agit simplement de demander de la transparence, ce qui est parfaitement légitime.
Mme le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.
Mme Michelle Meunier. J’apprécie l’avis favorable que vous avez émis, madame la ministre, et mon groupe, finalement, votera cet amendement, alors que nous comptions, je le dis en toute transparence, nous abstenir.
Contrairement à mon collègue corapporteur de la commission d’enquête sur le contrôle des Ehpad, je pense que la démarche de transparence doit être la même dans les Ehpad et les cliniques.
Mme le président. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La question n’est pas de savoir si l’on est pour ou contre les contrôles, évidemment. Simplement, cet amendement, tel qu’il est rédigé, n’aurait pas, en cas d’adoption, l’effet que décrit son objet. Pour obtenir cet effet, il faudrait modifier les deux articles du code des juridictions financières que j’ai cités.
Mme le président. La parole est à M. Bernard Fialaire, pour explication de vote.
M. Bernard Fialaire. Mon groupe votera cet amendement : nous avons besoin de transparence, pour remettre de la confiance entre nos concitoyens et le système de santé.
On a observé une évolution des cliniques privées, qui étaient au début des outils entre les mains des professionnels, et qui passent à présent sous le contrôle de grands groupes financiers cherchant à faire des bénéfices pour distribuer des dividendes. Cette évolution justifie un renforcement des contrôles.
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 697.
Mme le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 25.
L’amendement n° 1140 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 35 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020 est ainsi modifié :
1° Au troisième alinéa du V, l’année « 2023 » est remplacée par l’année « 2024 » ;
2° Au 2° du VI, l’année « 2023 » est remplacée par l’année « 2024 » ;
3° Le septième alinéa du VI est ainsi rédigé :
« Pour les activités mentionnées aux 1° et 2° de l’article L. 162-22, les valeurs mentionnées au quatrième alinéa du présent VI prennent effet, pour l’année 2022, à compter du 1er janvier 2022 et jusqu’au 28 février 2023 et, pour les années 2023, 2024 et 2025, à compter du 1er mars de l’année en cours. Pour les activités mentionnées au 4° de l’article L. 162-22, les valeurs mentionnées au quatrième alinéa du présent VI prennent effet, pour l’année 2024, à compter du 1er janvier 2024 et jusqu’au 28 février 2025 et pour l’année 2025, à compter du 1er mars jusqu’au 31 décembre 2025. »
II. – La deuxième phrase du II de l’article 33 de la loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003 de financement de la sécurité sociale pour 2004 est ainsi rédigée : « Jusqu’au 31 décembre 2023, par dérogation à l’article L. 162-20-1 dudit code, les tarifs applicables en 2022 dans chaque établissement de santé restent en vigueur et servent de base au calcul de la participation du patient, en ce qui concerne les activités mentionnées au 4° de l’article L. 162-22 du même code. »
III. – L’article 78 de la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale pour 2016 est ainsi modifié :
1° Le III est ainsi modifié :
a) Au 2° et au 6° du E l’année : « 2022 » est remplacée par l’année : « 2023 » ;
b) À la fin des a et b du 3° du E l’année : « 2023 » est remplacée par l’année : « 2024 » ;
c) Le premier alinéa du F est ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’article L. 174-18 du code de la sécurité sociale, du 1er mars 2017 au 31 décembre 2023, le montant forfaitaire prévu au b du 2° du E du présent III n’est pas facturé par les établissements mentionnés aux d et e de l’article L. 162-22-6 du même code à la caisse désignée en application de l’article L. 174-2 dudit code. »
d) Le G est abrogé ;
e) Au H l’année : « 2023 » est remplacée par l’année : « 2024 » ;
2° Aux V et VI l’année : « 2022 » est remplacée par l’année : « 2023 ».
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Cet amendement a pour objet de décaler à 2024 l’entrée en vigueur des réformes du financement par l’assurance maladie obligatoire des activités de soins de suite et de réadaptation (SSR) et du ticket modérateur.
Dans le cadre du Ségur de la santé, le Gouvernement a engagé une modification en profondeur du mode de financement des établissements de santé. Il s’agit notamment de remplacer progressivement la tarification à l’activité par des modes de financement plus mixtes, prenant davantage en compte les besoins de santé, la pertinence et la qualité des prises en charge.
Néanmoins, pour les SSR, les établissements de santé et les ARS ont besoin de disposer du temps nécessaire à l’appropriation et à la mise en œuvre des nouvelles modalités de financement. Leur mise en œuvre nécessite en effet un travail de fond important de la part des acteurs du terrain, des ARS et des établissements de santé, qu’il serait difficile de finaliser avant la fin de l’année dans le contexte actuel : gestion de crise sanitaire, mise en œuvre de la réforme de la psychiatrie… Malgré les importants travaux de préparation et de concertation qui ont été conduits, il convient de s’adapter aux impératifs du terrain. Un tel report est justifié par la nécessité d’appropriation technique des nouvelles modalités de financement.
Notre volonté reste de faire aboutir ces réformes. L’objectif est de redonner des marges de manœuvre au secteur SSR en termes d’évolution des modalités de prise en charge et de développement d’activités.
Nous poursuivrons donc les travaux nécessaires pour assurer la mise en œuvre pleine et entière de ce nouveau modèle de financement en 2024.
Telles sont les raisons pour lesquelles cet amendement vise à décaler l’application du nouveau modèle de financement des SSR et de la réforme du ticket modérateur au 1er janvier 2024. Je le redis, il ne traduit en rien un renoncement ou une remise en cause des objectifs et principes ayant guidé l’élaboration de ces deux réformes.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement nous ayant été communiqué hier soir tard, la commission n’a pas pu se prononcer. Je m’exprimerai donc à titre personnel.
Madame la ministre, cet amendement a le même objet qu’un amendement au PLFSS pour 2022… (M. Alain Milon le confirme.) Je parle non seulement du fond, mais aussi de l’exposé des motifs, identique quasiment au mot près. Cet amendement, qui visait à reporter d’un an l’entrée en vigueur de la réforme du financement des SSR, avait été déposé le 8 novembre 2021. Cette année, vous demandez de nouveau un report d’un an, avec un amendement déposé le 9 novembre 2022 et que nous discutons ce jeudi 10 novembre…
Je ne vais pas une nouvelle fois revenir sur les problèmes de méthode, madame la ministre, mais reconnaissez que nous demander, moins de huit semaines avant la date d’entrée en vigueur théorique, un nouveau report, et ce deux années de suite quasiment au jour près, peut légitimement nous interpeller. Comment, après plusieurs années de préparation, le Gouvernement se trouvait-il encore dans l’incertitude en octobre, au point de ne pas inscrire cela dans le texte initial ou à l’Assemblée nationale ?
Nous regrettions l’absence de mesures relatives au financement de l’hôpital dans le texte ; nous voilà servis !
Je rappelle, mes chers collègues, qu’on parle de la réforme du financement des SSR depuis le début des années 2000.
Cet amendement vise à modifier la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, qui a instauré la tarification à l’activité (T2A). La réforme dont nous parlons a été actée dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, il y a donc sept ans. Elle devait entrer en vigueur au 1er janvier 2021, après un délai de cinq ans permettant sa préparation.
Je ne sais pas où sont les blocages ni à quel moment les problèmes techniques évoqués seront enfin résolus. Je ne vais pas tourner autour du pot : devons-nous nous attendre, le 8 novembre 2023, à un report à 2025 ? Comptez-vous mener à bien un jour cette réforme du financement ? À force de reports, on peut commencer à douter de la volonté du Gouvernement d’aboutir. L’incertitude n’est bonne pour personne.
Vous avez reporté l’an dernier la réforme en supprimant l’année de neutralisation des effets précédant les trois années de transition. Il aurait mieux valu maintenir cette année de neutralisation, qui aurait eu lieu en 2022, pour une transition dès 2023. Pourquoi ne pas rétablir cette année de neutralisation en 2023 plutôt que de demander un report entier ?
Si les établissements privés, très inquiets des effets sur les revenus de leurs établissements, appelaient de leurs vœux ce report, ce n’est pas le cas des établissements publics : les hôpitaux souhaitaient bien lancer cette réforme au 1er janvier, quitte à travailler, madame la ministre, sur des dispositifs transitoires de sécurisation des ressources. Vous n’avez pas retenu cette option, qui aurait pu être une voie médiane.
À titre personnel, j’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Cet amendement est significatif, madame la présidente. Je souscris à la quasi-totalité des propos de notre rapporteure, à l’exception de leur conclusion. Si cette réforme devait être appliquée telle quelle au 1er janvier, cela poserait beaucoup de problèmes. La sagesse veut donc qu’on la reporte.
Mais la rapporteure Corinne Imbert a raison de rappeler que ce sujet n’a pas émergé il y a quinze jours ! Cette réforme est complexe, et je ne suis pas sûr qu’elle soit bonne. D’une manière générale, on peut se dire d’une réforme qui est reportée à de si nombreuses reprises qu’il vaut peut-être mieux l’abandonner et remettre tout à plat…
En tout cas, ne l’appliquons pas au 1er janvier ! Je voterai donc l’amendement du Gouvernement.
Mme le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Pour ma part, je souscris à la totalité des propos de la rapporteure Corinne Imbert.
Vous parlez d’impératifs de terrain, mais seul un acteur, la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP), demande ce report. Pourquoi ? Parce que la réforme porte sur la réduction de la part du financement à l’activité, pour un financement plus mixte, demandé depuis des années, qui tienne compte des besoins de santé, ce qui est la base pour la pertinence et la qualité des prises en charge.
Que s’est-il passé, notamment pour la psychiatrie ? Avant la réforme, avec la T2A et le forfait global, 80 % des lits ouverts l’étaient dans les cliniques psychiatriques privées.
J’étais un peu dubitative, au départ, sur la réforme. Mais la reporter pendant des années, c’est maintenir cette distorsion de concurrence, avec, d’un côté, une enveloppe fermée et, de l’autre, une T2A. De toute façon, un an ne suffira pas à la FHP pour être d’accord avec cette évolution.
Quand vous parlez de donner du temps aux acteurs, c’est à celui-là que vous pensez. Dans un an, il ne sera pas davantage convaincu… S’il est le seul interlocuteur que vous écoutez sur les impératifs de terrain, nous nous acheminons vers un report perpétuel.
Mme le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Je rejoins le raisonnement de Mme la rapporteure. Cela fait déjà plusieurs années – au moins depuis 2004 – que les SSR et la psychiatrie demandent une réforme du financement de leurs établissements. La psychiatrie des SSR est toujours dans le budget global, et demande, au moins partiellement, la T2A. Je suivrai donc l’avis émis par Mme la rapporteure, puisque cet amendement a été déposé trop tard pour que la commission des affaires sociales puisse se prononcer.
Si je me suis abstenu sur un amendement précédent, c’était pour manifester que j’entendais à la fois les arguments du Gouvernement sur les cliniques privées et ceux de Mme la rapporteure sur la nécessité de rédiger autrement cet article additionnel.
Mais un amendement nous avait été proposé par nos collègues communistes, visant à mieux contrôler le système de santé privé qui est en train de se mettre en place sur le territoire national. Cette préoccupation vient d’ailleurs d’être relayée par notre collègue médecin dans la région lyonnaise.
Nous devons faire preuve de la plus grande vigilance face à la manière dont, actuellement, de grands groupes à capitaux privés, et finançant des systèmes de retraite privés, sont en train de prendre la main sur la santé en France. C’est extrêmement dangereux pour la sécurité sociale, pour les établissements publics et même pour les libéraux.
Je n’ai pas voté cet amendement parce que je pense que la rapporteure avait raison, mais j’ai voté hier l’amendement qui était présenté par nos collègues communistes, car il faut donner l’alerte : ce qui est en train de se passer est extrêmement dangereux.
Mme le président. La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour explication de vote.
Mme Jocelyne Guidez. Je ne voterai pas cet amendement. Il est regrettable que cette réforme soit ainsi reportée chaque année. C’est comme pour la cinquième branche, qu’on reporte sans cesse. Après l’espoir, le désespoir : cela commence à bien faire !
Mme le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. Je partage les inquiétudes d’Alain Milon. Les cliniques privées d’hier sont engagées dans un mouvement de regroupement, face auquel nous devons être très vigilants.
Madame la ministre, qu’est-ce qui motive le dépôt de votre amendement ? Une difficulté de mise en œuvre ? Un doute sur la volonté politique ? L’évolution annoncée se fera-t-elle un jour ?
Mme le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. J’insiste, comme mon collègue Alain Milon, sur la dérive marchande de notre système de santé, qui s’aggrave. Nous connaissions la marchandisation des cliniques privées : en région toulousaine, presque toutes les cliniques privées ont été rachetées par Ramsay Santé ; seules deux résistent encore !
Désormais, Ramsay Santé s’attaque aussi aux soins primaires. Pour ses dirigeants, l’existence de déserts médicaux est une aubaine, puisqu’ils se proposent d’y installer des cabinets, où des médecins salariés seront payés en fonction du nombre de consultations : plus ils en feront, mieux ce sera pour eux !
Si nous voulons préserver notre modèle de santé, nous devons faire preuve d’une extrême vigilance face à cette marchandisation. J’avais interrogé en février Olivier Véran, alors ministre de la santé, lorsqu’il était question du rachat des soins primaires détenus par la Croix-Rouge. Il m’avait répondu qu’on ne pouvait pas empêcher des transactions privées. Je crois, au contraire, qu’il faut une volonté politique forte au niveau de l’État pour que la marchandisation qui est en cours ne puisse pas envahir tout notre système de santé.
Nous avons un beau système de protection : il faut le conserver !
Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Merci, monsieur Milon, d’avoir expliqué le sens de votre abstention lors du vote de l’amendement précédent. Vous avez raison d’appeler à la vigilance collective sur les risques que vous avez évoqués.
En ce qui concerne l’amendement du Gouvernement, je souhaite souligner que nous ne travaillons pas qu’avec une seule fédération, madame Poncet Monge.
L’ancienne parlementaire que je suis regrette le dépôt tardif de cet amendement. C’est que nous avons essayé jusqu’au dernier moment de travailler pour mettre en œuvre la réforme au 1er janvier 2023. Mais les remontées faites par les ARS nous montrent qu’il y aurait un réel danger à appliquer la réforme à marche forcée. Cela pourrait provoquer une inégalité d’accès, ce que nous ne souhaitons pas.
Je le redis avec force, nous entendons aboutir sur cette réforme des SSR, légitime et nécessaire. Mais nous veillerons à ce qu’elle s’applique de façon égale sur tout le territoire. Pour l’instant, tous les acteurs ne sont pas prêts.
Si vous ne votez pas cet amendement, cette réforme sera appliquée de façon désordonnée, ce que nous ne souhaitons pas pour une réforme aussi importante et aussi attendue par tous les acteurs.
Mme le président. L’amendement n° 1063 rectifié, présenté par M. Jomier, Mmes Poumirol et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Lubin, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Meunier et Rossignol, MM. Chantrel et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Mérillou, Redon-Sarrazy et Stanzione, Mmes Artigalas et Briquet, MM. Cozic et Marie, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, MM. Sueur et Tissot, Mme Carlotti, MM. Devinaz, Gillé, Kerrouche, Temal et J. Bigot, Mme Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au II de l’article 50 de la loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2022, les mots : « les ratios d’analyse financière et les marges financières nécessaires à l’investissement » sont remplacés par les mots : « le nombre de lits hospitaliers, de personnel et de moyens nécessaires à la prise en charge des patients en cohérence avec les besoins en santé de la population ».
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Cet amendement vise à poser le débat de la méthode de construction des lois de financement de la sécurité sociale. Nous proposons de substituer à la logique de la politique de l’offre et des ratios d’analyse financière une logique de besoins en santé.
J’étais heureux d’entendre hier le ministre de la santé et de la prévention exprimer à deux reprises cette idée en ces termes exacts. Nous devons passer d’une logique d’offre à une logique de besoins en santé. Cela ne peut se faire du jour au lendemain, mais je regrette que, dans ce PLFSS, il n’y ait aucun marqueur écrit de cette volonté exprimée oralement par le ministre.
L’objet de cet amendement est d’entamer ce processus de conversion.
J’appelle le Gouvernement à envisager de façon sérieuse qu’en amont de la délibération sur le PLFSS – en juin ou en juillet, soit environ deux ou trois mois avant – le Parlement soit saisi d’un document décrivant les objectifs nationaux de santé du pays, et qu’il en débatte. Ce n’est qu’à la suite de ce débat et de l’adoption de ce document que commencerait l’élaboration du PLFSS.
Si nous ne posons pas une méthode d’élaboration différente, le ministre continuera à dire, par oral, qu’il veut partir des besoins de santé, et à nous présenter un texte qui ne porte qu’une logique d’analyse financière.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La vocation du plan de 13 milliards d’euros est de soutenir l’investissement et de rétablir les capacités d’autofinancement, l’un des critères étant celui des ratios d’analyse financière afin de cibler aussi les hôpitaux particulièrement endettés. Que les contrats soient assis sur les besoins de santé du territoire est une évidence.
L’objet du contrat, d’ailleurs précisé à la première phrase de l’article 50 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, est de couvrir la compensation des charges nécessaires à la continuité, la qualité et la sécurité du service public hospitalier et à la transformation de celui-ci.
Si l’intention de Bernard Jomier d’insister sur la prise en compte des besoins de santé est louable, la rédaction actuelle semble la satisfaire.
Il ne paraît donc pas opportun d’allonger la rédaction de l’article 50 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021.
Avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Monsieur le sénateur, vous souhaitez supprimer, à l’article 50 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, la référence aux ratios d’analyse financière et aux marges financières nécessaires à l’investissement, et la remplacer par une référence à un nombre de lits hospitaliers, de personnels et de moyens nécessaires à la prise en charge de patients en cohérence avec les besoins de santé de la population.
L’objectif de ces mesures est bien de redonner aux établissements de santé les moyens d’investir, y compris en matière d’investissements courants, afin d’améliorer les conditions de prise en charge des patients et de travail des personnels hospitaliers.
Pour rappel, la nouvelle stratégie d’investissement en santé se fonde désormais sur le projet médical et soignant, dont la validation est un préalable indispensable à tout projet d’investissement immobilier.
Un décret du 30 juin 2021 a d’ailleurs précisé les paramètres servant à déterminer le montant des dotations. Il s’agit, premièrement, des besoins de financement nécessaires afin de garantir la qualité et la sécurité des soins, en priorité par le renouvellement des investissements courants ; deuxièmement, des besoins de financement nécessaires pour les opérations d’investissements structurants concourant à la transformation du service public hospitalier ; troisièmement, enfin, des besoins de financement permettant de restaurer les capacités de financement des investissements nécessaires pour garantir la continuité des soins.
Il est donc question non pas d’imposer des ratios aux établissements de santé qui en bénéficieront, mais de prévoir les projets les plus adaptés aux besoins de santé des territoires, tout en veillant à la soutenabilité financière de ces projets accompagnés par l’État.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.
Mme Nadia Sollogoub. Je rebondis sur le sujet des besoins en santé des territoires.
Alors que nous essayons, régulièrement, de différencier les territoires sous-dotés et les autres, il nous manque un outil cartographique précis.
Sur recommandation de l’Académie nationale de médecine, j’avais d’ailleurs déposé un amendement visant à établir une cartographie des besoins en santé des territoires.
Cet amendement avait été jugé irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution et j’ai bien du mal à le comprendre : quand on demande un rapport, l’amendement est recevable ; quand on demande une carte, il ne l’est pas…
J’imagine pourtant que les agences régionales de santé et les ordres ont tous les chiffres qui permettraient d’établir une cartographie.
Chaque année, je reçois un atlas démographique de la profession vétérinaire. C’est très utile. Pourquoi n’en existerait-il pas pour les autres professions ? Si de tels atlas existent quelque part, j’aimerais qu’on me les fournisse…