Mme le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Jean-Claude Anglars. Pour terminer, je pose la question : qu’est-ce que la cohésion des territoires en 2023 ? (Mme la présidente de la commission des affaires économiques applaudit.)

Mme le président. La parole est à M. Claude Malhuret.

M. Claude Malhuret. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la cohésion des territoires est un noble dessein, qui repose sur la certitude que l’immense diversité de ce qui fait la France est la force de notre pays. Cette ambition engage l’État à faire confiance à l’échelon local, ses élus et ses acteurs de terrain. Elle l’engage également à leur donner les moyens nécessaires pour agir.

Les crédits de la mission « Cohésion des territoires » du PLF pour 2023 s’élèvent à 17,9 milliards d’euros, dont 329 millions d’euros destinés à la politique des territoires. C’est considérable.

Parmi les différents programmes de la mission, l’ANCT apporte un soutien en ingénierie aux collectivités et les accompagne dans le déploiement de leurs projets de territoire. Depuis sa création, le groupe Les Indépendants souligne la pertinence de cet outil au service des élus locaux, en particulier dans les territoires ruraux.

Le PLF pour 2023 attribue à l’ANCT une dotation équivalente à celle des années précédentes. On parle de 20 millions d’euros au titre du budget ingénierie. Pourtant, l’Agence a atteint la plupart de ses objectifs et son cahier des charges a été progressivement élargi. Il est dommage que ce PLF n’ajuste pas les dotations de l’ANCT à l’ampleur de ses missions. Les prochains mois seront, je l’espère, l’occasion d’engager une réflexion sur le futur de cette agence.

Je salue la poursuite de politiques ambitieuses en faveur des petites villes et des espaces ruraux. Le programme Petites Villes de demain, par exemple, permet à 1 600 communes de bénéficier de moyens supplémentaires. Ce sont les élus eux-mêmes qui définissent leurs priorités et qui pilotent leurs projets. C’est une bonne approche qui permet aux habitants d’être mobilisés, au même titre que les entreprises, les élus, les professionnels et l’ensemble des acteurs du territoire.

Près de 2 200 espaces France Services maillent l’ensemble du territoire national et permettent de maintenir une offre de services publics de proximité. Ces maisons aident réellement les Français jusque dans les territoires les moins faciles d’accès, grâce à des bus itinérants. Le PLF leur consacre 36,3 millions d’euros pour 2023. C’est une bonne nouvelle, car cette politique a du sens.

En revanche, si nous voulons que les politiques en faveur de l’attractivité des territoires ruraux soient couronnées de succès, il faut résorber les zones blanches en matière de numérique et de réseau mobile.

Les conseillers numériques France Services accomplissent un formidable travail au quotidien. C’est un point à souligner, mais cela n’est pas suffisant.

Les élus locaux, dont nous sommes les porte-voix, nous sollicitent régulièrement en ce sens. Chacun doit avoir accès à un réseau 4G et à une connexion internet de qualité, car c’est une condition essentielle au développement de nos territoires. L’État doit être mobilisé pour endiguer les fractures dans l’usage du numérique et dans l’accès aux réseaux.

Nous pourrons d’ailleurs nous interroger sur les dotations dont dispose l’ANCT en la matière, comme le souhaiterait ma collègue Vanina Paoli-Gagin. Trop de territoires restent encore aujourd’hui à l’écart des différents dispositifs.

Concernant la politique en faveur de l’hébergement et de l’accès au logement, notre groupe s’inquiète des tensions sur les prix. Nous appelons également à intensifier les efforts en matière de rénovation thermique du parc immobilier existant. Le contexte inflationniste souligne l’urgence des dispositifs en matière de lutte contre la précarité énergétique. Nous serons attentifs à la mise en œuvre opérationnelle du fonds vert et à sa ventilation.

Au sujet de la politique de la ville, les crédits sont annoncés à hauteur de 600 millions d’euros environ. Je salue la hausse du budget, car les chantiers sont importants.

Nous pouvons toutefois nous inquiéter de la baisse des moyens relatifs à l’éducation dans les quartiers de la politique de la ville. L’État ne doit pas amoindrir son ambition en la matière.

Enfin, la poursuite du programme Action cœur de ville va dans le bon sens, tant il apporte des solutions au défi de la revitalisation et du verdissement des villes moyennes. L’État doit s’appuyer sur les territoires, ruraux comme urbains, qui sont des moteurs en matière de transition écologique. La relation partenariale qui s’incarne notamment par la contractualisation dans les CPER va dans le bon sens.

Le groupe Les Indépendants accueille favorablement ces crédits « Cohésion des territoires », tout en appelant à poursuivre les dispositifs de soutien en faveur de l’échelon local. Les élus connaissent leur territoire, ses enjeux, ses habitants. Ils sont en mesure de concrétiser l’alliance de l’écologie et du développement économique local.

Mme le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Olivier Klein, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureux de vous présenter la mission « Cohésion des territoires » du projet de loi de finances pour 2023.

Je souhaite commencer en vous parlant de la politique du logement.

Il ne faut bien évidemment pas sous-estimer les difficultés du secteur, du côté de la demande – solvabilité des ménages, accès au crédit, etc. – comme du côté de l’offre, puisqu’il existe d’importants freins à la construction.

Face à cela, nous nous donnons les moyens de nos ambitions.

Ma priorité, que traduit ce budget, réside dans le parcours résidentiel, qui s’adresse d’abord à ceux qui n’ont pas de logement. Le mal-logement et le sans-abrisme sont des fléaux contre lesquels nous luttons tous les jours, avec des résultats.

La politique d’hébergement et d’accès au logement des personnes sans abri ou mal logées, financée par le programme 177, vise à favoriser l’accès au logement, tout en apportant une réponse aux situations d’urgence. Le parc d’hébergement financé par l’État a atteint un niveau inédit, avec plus de 203 000 places ouvertes en 2021 dans un contexte de crise sanitaire.

En 2023, grâce à un amendement adopté à l’Assemblée nationale et issu d’échanges fructueux avec les associations, les préfectures et les parlementaires, les capacités d’accueil seront maintenues à un niveau élevé, environ 197 000 places. Pour cela, le projet de loi de finances dote le programme 177 de 2,8 milliards d’euros, un niveau jamais atteint. Ainsi, dans ce domaine, l’État agit et il est très réactif.

Au-delà de l’hébergement d’urgence, la priorité est d’offrir une solution de logement pérenne à chacun. Avec le plan Logement d’abord, lancé par le Président de la République voilà cinq ans, 400 000 personnes ont pu accéder à un logement, quittant la rue pour trouver un toit. Nous poursuivons nos efforts avec un nouveau plan Logement d’abord : 44 millions d’euros supplémentaires y seront consacrés dès 2023.

Défendre le parcours résidentiel, c’est également permettre à chacun, selon sa situation, d’accéder à un logement décent et de s’y maintenir durablement.

Le programme 109, « Aide à l’accès au logement », finance les aides accordées aux personnes en difficulté. En 2023, ce programme est doté de 13,4 milliards d’euros.

En aidant les ménages aux ressources modestes et en les accompagnant dans leurs démarches, ce programme participe à la mise en œuvre du droit au logement prévu par la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, dite Dalo.

Toujours dans le cadre du parcours résidentiel, ma mission consiste aussi à construire plus et mieux.

À cette fin, le programme 135 porte la stratégie gouvernementale en matière de politique du logement et d’aménagement. Cette stratégie repose sur les piliers suivants : construire mieux et moins cher, en accélérant le rythme de construction, notamment en zone tendue, grâce à une simplification de l’acte de construire ; accélérer la rénovation des logements et améliorer leur niveau de performance énergétique.

Grâce à la politique de promotion de la sobriété énergétique des logements, au calendrier d’éradication des passoires thermiques et au dispositif MaPrimeRénov’, nous avons fait sauter un premier verrou, en installant la culture écologique, la culture de l’écogeste, dans les foyers. C’est un premier acquis précieux – nombre d’entre vous l’ont souligné.

Néanmoins, soyons lucides, la rénovation thermique n’a pour l’instant atteint, si j’ose dire, que son âge adolescent. Ce quinquennat doit nous permettre de passer à l’âge adulte : passer du monogeste à la rénovation performante, de l’individuel au collectif, de la structuration d’une filière naissante à la consolidation d’une filière puissante.

Et nous nous en donnons les moyens. En effet, le PLF pour 2023 consacre 2,45 milliards d’euros au dispositif socle MaPrimeRénov’, financé par le programme 174, qui sera discuté cet après-midi, et il renforce, via le programme 135, les moyens de l’Anah, en faveur notamment de la rénovation énergétique, pour consolider la dynamique inédite du plan de relance.

L’accélération de notre action se traduira par un meilleur accompagnement des ménages, au travers du service public France Rénov’, et par la poursuite du soutien aux copropriétés de tous types, puisque l’aide MaPrimeRénov’ Copropriétés sera prolongée afin d’accentuer l’effort de rénovation des logements collectifs. Nous accompagnerons toutes les copropriétés.

Je veux dire quelques mots également de l’adaptation des logements au grand âge et de la promesse de campagne du Président de la République relative au lancement de MaPrimeAdapt’, une aide unique, simple et attractive. Il s’agit évidemment de l’une de mes priorités et le budget que je défends doit permettre à l’Anah de presque doubler le nombre de logements adaptés l’année prochaine, afin d’amorcer la dynamique, laquelle se concrétisera par le lancement de la nouvelle aide en 2024.

En matière de logement social, ce projet de loi de finances préserve le modèle de financement du secteur, qui fait face à des objectifs ambitieux : la prolongation des avantages fiscaux associés à la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) et la stabilité de la RLS. La contribution, que vous avez supprimée, d’Action Logement au Fnap constitue, selon moi, un élément essentiel de cet équilibre.

Les discussions se poursuivront pour renouveler la convention quinquennale et garantir collectivement le bon financement du secteur, en parallèle des travaux pour conclure un pacte de confiance avec l’ensemble des acteurs du logement social.

Mon ministère n’est pas uniquement celui du logement, c’est aussi celui de la ville, des quartiers populaires.

La politique de la ville intervient dans 1 514 quartiers prioritaires, dans lesquels vivent plus de 5,5 millions de nos concitoyens. Elle fédère l’ensemble des acteurs qui y concourent : l’État, les collectivités, les associations et, bien sûr, les habitants. Je tiens à cet égard à saluer l’excellent rapport d’information des sénatrices Valérie Létard, Dominique Estrosi Sassone et Viviane Artigalas, qui constituera un outil très précieux pour notre réflexion sur les nouveaux contrats de ville.

Les crédits de la politique de la ville, regroupés au sein du programme 147, et ceux de l’Anru constituent un effet de levier indispensable pour réduire les écarts de développement entre ces quartiers et les autres territoires et pour améliorer les conditions de vie des habitants.

En 2023, la politique de la ville fera l’objet de nouveaux efforts. Ces crédits permettront de pérenniser notre action dans les quartiers, avec l’opération Quartiers d’été, mais également avec d’autres dispositifs comme Vacances apprenantes.

Ce budget permettra aussi de renforcer la présence humaine dans les quartiers, avec les adultes-relais, de prolonger le dispositif des cités éducatives, comme l’a souligné Mme la sénatrice Havet, et de poursuivre le financement du nouveau programme national de renouvellement urbain.

Tout cela représente 37,2 milliards d’euros de contribution totale des ministères concernés.

Nous voulons aller plus loin, en travaillant à la réalisation de l’ambition Quartiers 2030, annoncée par le Président de la République et dont les nouveaux contrats de ville seront l’outil et le chemin. En donnant la parole aux habitants, en reconnaissant leur place dans la République, nous construirons des quartiers où les habitants auront envie de rester, mais dont ils pourront partir, s’ils le souhaitent.

Enfin, cette mission est également le réceptacle des crédits en matière d’impulsion et de coordination de la politique d’aménagement du territoire.

Le programme 112, doté de 262 millions d’euros pour l’année 2023, a pour ambition d’accompagner tous les territoires dans les grandes transitions, de leur donner les moyens d’aménager durablement notre pays et de lutter efficacement contre les fractures territoriales.

Ces crédits, en hausse de 6 % par rapport à l’année 2022, concourent à la réalisation de trois objectifs principaux.

Premier objectif : renforcer les moyens de l’ANCT afin de fournir un meilleur appui aux collectivités.

Deuxième objectif : accompagner les grandes transformations territoriales au travers du déploiement de programmes spécifiques d’appui. Ces programmes, vous les connaissez : il s’agit de France Services, Petites Villes de demain, Territoires d’industrie, Nouveaux lieux, nouveaux liens, Action cœur de ville, l’agenda rural ou encore le plan France Très Haut Débit.

Le troisième objectif consiste à inscrire l’action de l’État dans la durée, grâce aux contrats de plan État-région et aux contrats de relance et de transition écologique. Ces nouveaux contrats territoriaux représentent une avancée dans la mesure où ils sont pluriannuels, globaux et fondés sur une approche différenciée des régions.

Mesdames, messieurs les sénateurs, ces programmes sont essentiels pour nos concitoyens, partout sur le territoire. Pour ces raisons, je vous invite à voter ces crédits.

Mme le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Cohésion des territoires », figurant à l’état B.

Cohésion des territoires
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article 41 ter (nouveau)

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Cohésion des territoires

17 982 817 099

17 894 038 694

Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables

2 795 658 231

2 820 411 675

Aide à l’accès au logement

13 371 300 000

13 371 300 000

Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat

803 075 870

780 775 870

Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire

329 421 467

262 448 144

Politique de la ville

597 541 138

597 541 138

 Dont titre 2

18 871 649

18 871 649

Interventions territoriales de l’État

85 820 393

61 561 867

Mme le président. L’amendement n° II-1218, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables

30 168 307

30 168 307

Aide à l’accès au logement

Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat

Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire

Politique de la ville

dont titre 2

Interventions territoriales de l’État

TOTAL

30 168 307

30 168 307

SOLDE

30 168 307

30 168 307

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Olivier Klein, ministre délégué. Le présent amendement tend à abonder les crédits d’un peu plus de 30 millions d’euros en faveur des personnes travaillant dans la branche de l’action sanitaire et sociale.

Cet abondement, annoncé par la Première ministre et le ministre des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées, est le pendant de la hausse de 3,5 % du point d’indice de la fonction publique. Il convient d’en faire également profiter les métiers de cette branche.

Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur spécial. De nombreuses personnes, au sein des centres d’hébergement et de réinsertion sociale, des centres d’hébergement d’urgence et d’autres structures ou associations, participent à la mise en œuvre de cette politique publique.

Il paraît approprié de leur exprimer notre reconnaissance, en finançant cette revalorisation. La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.

Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-1218.

(Lamendement est adopté.)

Mme le président. L’amendement n° II-1058, présenté par M. Jacquin, Mme Artigalas, M. Bouad, Mme Blatrix Contat, MM. Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot, P. Joly, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Aide exceptionnelle en faveur des ménages résidant dans un immeuble équipé d’un chauffage collectif

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables

600 000 000

600 000 000

Aide à l’accès au logement

Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat

Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire

Politique de la ville

dont titre 2

Interventions territoriales de l’État

Aide exceptionnelle en faveur des ménages résidant dans un immeuble équipé d’un chauffage collectif

600 000 000

600 000 000

TOTAL

600 000 000

600 000 000

600 000 000

600 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Denis Bouad.

M. Denis Bouad. Je le retire, madame la présidente !

Mme le président. L’amendement n° II-1058 est retiré.

L’amendement n° II-1063, présenté par Mme Artigalas, M. Cardon, Mme Blatrix Contat, MM. Bouad, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables

500 000 000

500 000 000

Aide à l’accès au logement

Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat

500 000 000

500 000 000

Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire

Politique de la ville

dont titre 2

Interventions territoriales de l’État

TOTAL

500 000 000

500 000 000

500 000 000

500 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Viviane Artigalas.

Mme Viviane Artigalas. Après la crise sanitaire, les ménages modestes sont de nouveau fragilisés par la flambée des prix de l’énergie.

Cette situation met en lumière la nécessité d’accélérer la rénovation énergétique des logements, en priorisant les ménages précaires au travers d’un dispositif de zéro reste à charge.

Il faut favoriser des travaux plus ambitieux pour que l’on perçoive enfin les signes concrets de la transition énergétique, qui est encore trop inefficace et inégalitaire : 5,6 millions de foyers, soit près de 18 % de la population, sont concernés par la précarité et l’exclusion énergétiques en France.

Par ailleurs, il y a urgence, car les logements les plus énergivores vont disparaître progressivement du marché locatif. Pour les logements classés en catégorie G, cette interdiction entre en vigueur le 1er janvier 2023.

Les chantiers financés par l’Anah concernent à 85 % des opérations « monogeste », ne permettant ni de réduire la précarité énergétique ni d’être efficace dans la lutte contre le réchauffement climatique. Trop peu de personnes s’engagent dans un parcours de rénovation globale. Cela s’explique simplement : près de la moitié des ménages résidant dans une passoire thermique ont des faibles revenus et 62 % ont plus de 60 ans.

L’aide MaPrimeRénov’ Sérénité, destinée aux ménages ayant des ressources très modestes, est financée par le budget de l’Anah et vise à soutenir les rénovations conduisant à un gain énergétique minimal de 35 %.

Cet amendement tend à renforcer cette aide pour réorienter massivement l’action de l’Anah vers les logements classés F ou G via un mécanisme d’aide complémentaire permettant une rénovation globale tout en garantissant l’absence de reste à charge.

Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur spécial. Il est toujours souhaitable de favoriser les rénovations globales, mais la directrice générale de l’Anah, que j’ai auditionnée, n’a pas formulé de demande de crédits supplémentaires. Elle a plutôt souligné la véritable difficulté, et je partage son constat, que constitue l’absence d’un écosystème d’entreprises générales capables de réaliser des rénovations globales pour le parc privé. D’où la difficulté, pour des particuliers, de faire réaliser de tels travaux en tant que maîtres d’ouvrage.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Klein, ministre délégué. Vous avez raison, madame la sénatrice, la rénovation thermique de l’habitat individuel ou collectif doit être une priorité ; nous sommes d’accord.

Le dispositif MaPrimeRénov’ Sérénité, destiné aux ménages les plus modestes, bénéficie déjà d’un budget de plus de 500 millions d’euros et il progresse de 130 millions d’euros en 2023. Dans le cadre des aides préalables, plus de 80 % des ménages aidés par MaPrimeRénov’ sont modestes.

J’ajoute, comme l’a souligné M. le rapporteur spécial, qu’à ce stade la filière n’est pas prête.

Je puis vous assurer de ma mobilisation, ainsi que de celle de mes services et de l’Anah pour accompagner les demandes des ménages les plus en difficulté, qu’ils soient en copropriété ou en habitat individuel.

Toutefois, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement et, à défaut, émettra un avis défavorable, d’autant que cette proposition d’augmentation est gagée sur le programme 177.

Mme le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Notre groupe votera l’amendement de Mme Artigalas et du groupe SER.

Bien sûr, il est impossible d’instaurer, d’un coup, pour éradiquer toutes les passoires thermiques, une possibilité de rénovation avec zéro reste à charge.

Néanmoins, la question d’une rénovation globale des logements des ménages modestes est centrale. C’est pourquoi il conviendrait, au moins à titre expérimental et sur un nombre limité d’opérations, d’éprouver ce dispositif de zéro reste à charge grâce à un complément versé par l’Anah.

Si cette méthode fonctionne, cela prouvera que l’on ne peut pas atteindre les objectifs de la loi du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat, dite Énergie-climat, sans mener un travail approfondi sur le reste à charge des familles modestes. Par conséquent, balayer d’un revers de la main cette proposition nous paraît être une erreur.

Oui, il y a un problème du côté de la filière, mais pendant combien de temps devrons-nous patienter si nous attendons que ce problème soit résolu, alors que la loi fixe des délais rapprochés ? C’est un peu le serpent qui se mord la queue : s’il n’y a pas d’obligation de faire des travaux, il n’y a pas assez de travaux pour développer la filière et, si la filière n’est pas assez robuste, on ne peut pas faire de travaux…

Le groupe CRCE soutient donc cet amendement.

Mme le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour explication de vote.

Mme Viviane Artigalas. Je vais retirer mon amendement, parce qu’il ne me paraît pas opportun, en effet, de prélever des crédits sur le programme 177, mais je voulais appeler votre attention sur ce sujet, monsieur le ministre.

Mme Marie-Noëlle Lienemann a raison, des logements vont sortir du marché locatif très prochainement et de nombreuses personnes sont dans la précarité énergétique. Il faut travailler à cette notion de zéro reste à charge et à la structuration de la filière. C’est un sujet à étudier de près et très vite.

Je retire mon amendement, madame la présidente.

Mme le président. L’amendement n° II-1063 est retiré.

L’amendement n° II-1082, présenté par Mmes Lienemann et Varaillas, MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables

Aide à l’accès au logement

500 000 000

500 000 000

Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat

500 000 000

500 000 000

Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire

Politique de la ville

dont titre 2

Interventions territoriales de l’État

TOTAL

500 000 000

500 000 000

500 000 000

500 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il est défendu !

Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur spécial. Demande de retrait.

Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Klein, ministre délégué. Demande le retrait et, à défaut, avis défavorable.

Mme le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Cet amendement est la traduction concrète de ce que j’ai expliqué en discussion générale à propos de la faiblesse du forfait charges.

Les dépenses de chauffage et les charges vont malheureusement continuer de peser lourdement sur les ménages et, s’il n’y a pas, dès cette année, une amélioration de ce forfait au-delà des 2 euros qui sont prévus, le décalage entre le montant des APL et les loyers assumés par les ménages ira croissant.

C’est pourquoi nous proposons un abondement de 500 millions d’euros en faveur de cette action. Je le rappelle, on a économisé tous les ans 1,5 milliard d’euros grâce à la mise en œuvre de la contemporanéité des APL, qui a pénalisé les plus pauvres. On pourrait au moins redistribuer cette somme…