Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Gremillet, rapporteur. Madame la ministre, nous ne parlons pas de la même chose : je parlais des électrolyseurs à haute température ; vous m’expliquerez comment les faire fonctionner sans énergie nucléaire…

J’en viens au présent amendement. La commission a proposé d’abroger ce plafonnement a priori de 63,2 gigawatts, afin de tirer un trait sur la politique d’attribution du nucléaire. La mesure que vous suggérez, mon cher collègue, n’est absolument pas souhaitable, d’autant que la rédaction que vous proposez permettrait de remplacer de l’énergie nucléaire, décarbonée, par des énergies fossiles, voire émissives. Avis défavorable.

Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Même avis.

Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 14.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme le président. Je mets aux voix l’article 1er A.

(Larticle 1er A est adopté.)

Article 1er A (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes
Article 1er C (nouveau)

Article 1er B (nouveau)

Le code de l’énergie est ainsi modifié :

1° Après le 7° de l’article L. 100-2, il est inséré un 7° bis ainsi rédigé :

« 7° bis Poursuivre un effort de recherche et d’innovation en direction de l’énergie nucléaire et de l’hydrogène bas-carbone, mentionné à l’article L. 811-1, en soutenant notamment les réacteurs européens pressurisés, les petits réacteurs modulaires, les réacteurs de quatrième génération, le projet international de réacteur expérimental de fusion thermonucléaire, dénommé projet ITER, la fermeture du cycle du combustible, le couplage entre la production d’énergie nucléaire et celle d’hydrogène bas-carbone et les projets importants d’intérêt européen commun sur l’hydrogène ; »

2° Le I de l’article L. 100-4 est ainsi modifié :

a) Après le 5°, sont insérés des 5° bis, 5° ter et 5° quater ainsi rédigés :

« 5° bis De maintenir la part du nucléaire dans la production d’électricité à plus de 50 % à l’horizon 2050 ;

« 5° ter De décarboner le mix électrique, à hauteur de 100 %, ainsi que le mix énergétique, à hauteur de 50 %, à l’horizon 2030 ;

« 5° quater De recourir à une part de matières recyclées dans la production d’électricité d’origine nucléaire, à hauteur de 20 % à l’horizon 2030 ; »

b) Après le 10°, il est inséré un 10° bis ainsi rédigé :

« 10° bis D’atteindre des capacités installées de production d’au moins 6,5 gigawatts d’hydrogène décarboné produit par électrolyse à l’horizon 2030 ; »

3° L’article L. 141-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Cette synthèse expose la politique du Gouvernement en direction de l’énergie nucléaire et de l’hydrogène bas-carbone, mentionné à l’article L. 811-1. » ;

4° Le dernier alinéa de l’article L. 141-4 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Cette présentation expose la politique du Gouvernement en direction de l’énergie nucléaire et de l’hydrogène bas-carbone, mentionné à l’article L. 811-1. »

Mme le président. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 43 est présenté par MM. Salmon, Labbé, Dantec, Fernique, Benarroche, Breuiller, Dossus et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.

L’amendement n° 55 est présenté par MM. Montaugé, Devinaz, Houllegatte, Tissot, Michau et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Pla, Redon-Sarrazy et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et M. Filleul, MM. Gillé et Jacquin, Mmes Préville, Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Daniel Salmon, pour présenter l’amendement n° 43.

M. Daniel Salmon. Cet amendement vise à supprimer l’article 1er B, inséré par la commission dans le texte et qui acte la relance du programme nucléaire français sans respecter le processus démocratique, en violation du principe de la participation du public.

Nous en débattons depuis un moment et nous sommes assez d’accord : ce texte a un aspect « décalé » et il présente même des incohérences : on confond accélération et précipitation.

Mme le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l’amendement n° 55.

M. Franck Montaugé. Il est défendu, madame la présidente.

Je tiens toutefois à préciser, madame la ministre, que nous ne souhaitons pas écraser le débat public, bien au contraire.

Par ailleurs, monsieur Longuet, il est évident que la consultation publique ne saurait apporter des solutions, mais il est tout de même très important, pour l’acceptabilité des projets, leur compréhension, et pour regagner de la souveraineté nationale, de prendre en compte les remarques formulées par les Français intéressés. Voilà pourquoi nous avons déposé cet amendement et celui que je défendrai dans un instant, l’amendement n° 58.

Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Gremillet, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces amendements.

Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Le Gouvernement demande le retrait de ces amendements au profit de son amendement n° 108, qui tend à réécrire l’article dans le sens que vous souhaitez, je pense, messieurs Salmon et Montaugé. En effet, nous proposons de conserver le principe d’une discussion sur la PPE ainsi que la nécessité d’une approche équilibrée de notre mix énergétique.

Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 43 et 55.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme le président. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 108, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéas 4 à 12

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Le présent amendement a pour objet de supprimer les dispositions adoptées par la commission rappelant le maintien de la part du nucléaire à 50 % à l’horizon 2050 ainsi que la décarbonation du mix électrique à 100 % et du mix énergétique à 50 % à l’horizon 2030, principes qui relèvent de la programmation pluriannuelle de l’énergie. Il tend en revanche à conserver les alinéas obligeant le Gouvernement à fournir plus d’information au Parlement.

Nous restons donc cohérents, en respectant la volonté de préparer la loi de programmation pluriannuelle de l’énergie et en nous engageant à fournir le maximum d’informations au Parlement, mais en considérant qu’il est prématuré d’insérer tout élément qui relève de la PPE, et préempte donc la discussion sur ce projet de loi, alors que le débat public et les travaux de consultation d’acteurs indispensables ne sont pas terminés.

Mme le président. L’amendement n° 92 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Corbisez, Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :

Alinéa 8

Compléter cet alinéa par les mots :

et à hauteur de 50 % à l’horizon 2050

La parole est à Mme Nathalie Delattre.

Mme Nathalie Delattre. Il incombe au projet de loi de programmation pluriannuelle de l’énergie, qui doit être examiné ultérieurement, de déterminer les objectifs de la politique énergétique.

Le présent projet de loi a été heureusement amendé par la commission des affaires économiques et les objectifs de la politique énergétique en matière de production d’électricité d’origine nucléaire ont été complétés pour tenir compte de la construction de six, voire de quatorze EPR supplémentaires annoncée par le Gouvernement.

L’article 1er B nouveau prévoit en particulier de recourir à une part de 20 % de matières recyclées dans la production d’électricité nucléaire à l’horizon 2030, à des fins de valorisation du cycle du combustible. Une telle voie est souhaitable, car elle peut contribuer à sécuriser notre approvisionnement en uranium et à réduire le volume de déchets, mais il est également indispensable de se fixer des objectifs ambitieux en matière de recyclage de combustible usagé.

Cet amendement tend donc à prévoir la valorisation de 50 % de matières recyclées dans la production d’électricité nucléaire en 2050, afin de renforcer notre indépendance énergétique.

Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Gremillet, rapporteur. Au travers de l’amendement n° 108, le Gouvernement entend supprimer la quasi-totalité des alinéas de l’article 1er B, ce qui n’est pas justifié. En effet, cela reviendrait à supprimer l’ensemble de la stratégie énergétique nationale appliquée par la commission à l’énergie nucléaire et à l’hydrogène bas-carbone, c’est-à-dire de revenir sur le travail qu’elle a fait et, surtout, sur le signal qu’elle veut envoyer à la filière nucléaire.

Quant à l’amendement n° 92 rectifié bis, il vise à porter à 50 % d’ici à 2050 l’utilisation de matières recyclées dans la production d’électricité nucléaire. La commission a préféré fixer un objectif de 20 % d’ici à 2030, pour une raison simple : nos auditions ont mis en évidence de nombreuses incertitudes technologiques sur le monorecyclage et le multirecyclage, qui font encore l’objet de travaux de recherche et développement.

Pour toutes ces raisons, la commission demande le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 92 rectifié bis ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. La commission a fixé, dans sa rédaction, l’objectif d’une part minimale de 20 % de matières radioactives issues du retraitement dans la production d’électricité d’origine nucléaire en 2030. Cette cible n’est, à ce stade, pas atteignable techniquement. Ainsi, non seulement la commission préempte la PPE, mais elle insère en outre dans le texte des objectifs qui ne sont pas réalisables techniquement. Cela me semble poser problème.

De même, fixer un objectif de 100 % d’électricité décarbonée en 2030 revient à priver nos industriels de leurs installations de cogénération, par exemple à priver la Bretagne de son installation de Landivisiau, essentielle pour la sécurité de son approvisionnement.

Le Gouvernement a donc émis un avis défavorable sur l’amendement n° 92 rectifié bis et vous invite, mesdames, messieurs les sénateurs, à voter son amendement n° 108, dont l’adoption permettra de replacer les choses à leur juste niveau, pour se garder de viser des objectifs techniquement inatteignables et éviter tout risque de rupture d’approvisionnement dans certains territoires.

Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 108.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme Nathalie Delattre. Je retire mon amendement !

Mme le président. L’amendement n° 92 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix l’article 1er B.

(Larticle 1er B est adopté.)

Article 1er B (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes
Article 1er D (nouveau)

Article 1er C (nouveau)

Le 4° du I de l’article L. 100-1 A du code de l’énergie est ainsi modifié :

1° Le mot : « diversification » est remplacé par le mot : « décarbonation » ;

2° Sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées : « Pour l’électricité d’origine nucléaire, l’objectif de décarbonation porte sur la construction de réacteurs pressurisés européens et de petits réacteurs modulaires à l’horizon 2050. Sont précisés les modes de financement, les moyens en termes de métiers et de compétences, l’effort de recherche et d’innovation en direction de la fermeture du cycle du combustible, les moyens en termes de sûreté et de sécurité nucléaires ainsi que, le cas échéant, le dimensionnement des installations de retraitement-recyclage et de stockage des déchets requis ; ».

Mme le président. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 31 est présenté par MM. Salmon, Labbé, Dantec, Fernique, Benarroche, Breuiller, Dossus et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.

L’amendement n° 58 est présenté par MM. Montaugé, Devinaz, Houllegatte, Tissot, Michau et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Pla, Redon-Sarrazy et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et M. Filleul, MM. Gillé et Jacquin, Mmes Préville, Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 109 est présenté par le Gouvernement.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Daniel Salmon, pour présenter l’amendement n° 31.

M. Daniel Salmon. Cet amendement vise à supprimer l’article 1er C, qui acte la relance du programme nucléaire français sans respecter, là encore, le processus démocratique ; je n’y reviens pas.

Cet article remplace l’objectif de « diversification » par un objectif de « décarbonation », qui a une signification complètement différente, le rapporteur le sait bien, et qui n’est pas approprié.

Il inscrit également dans la loi un objectif général de construction d’EPR 2 et de SMR d’ici à 2050 et dispose que les conditions de développement de ces réacteurs – financement, traitement des déchets – seront précisées dans la future loi quinquennale sur l’énergie.

Encore une fois, ce maximalisme en matière de relance du nucléaire, très engageant pour nos choix énergétiques stratégiques, met les parties prenantes et l’ensemble de nos concitoyens devant le fait accompli.

Parce que nous souhaitons le respect du débat démocratique et du calendrier parlementaire, nous proposons de supprimer ces dispositions totalement hors cadre.

Mme le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l’amendement n° 58.

M. Franck Montaugé. Il s’agit toujours de respecter la démocratie et de garantir, in fine, une plus grande rationalité de la décision.

Mme le président. La parole est à Mme la ministre, pour présenter l’amendement n° 109.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. L’article 1er C remplace l’objectif de diversification du mix électrique fixé dans le code de l’énergie par un objectif de décarbonation, en s’appuyant sur la construction de nouveaux réacteurs de type EPR et de petits réacteurs modulaires à l’horizon de 2050.

Bien que nous partagions cette ambition, ce texte n’est pas le bon véhicule, je le répète, pour définir la programmation pluriannuelle de l’énergie. Cela reviendrait à fouler aux pieds tous les débats publics qui sont en train de se tenir, à considérer que la consultation publique, qu’un certain nombre d’entre vous appellent de leurs vœux avec force, n’a aucune portée pratique.

C’est pourquoi le Gouvernement a déposé cet amendement de suppression.

Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Gremillet, rapporteur. En supprimant l’article 1er C, nous supprimerions non seulement les dispositions prévues pour la construction de nouveaux réacteurs, mais encore les dispositions portant sur l’effort budgétaire afférent à la sûreté, à la sécurité, à la recherche, à l’innovation ou encore au recyclage et au stockage des déchets. En outre, nous affaiblirions considérablement le pouvoir du Parlement sur la prochaine PPE.

La commission demande le retrait de ces amendements identiques ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 31, 58 et 109.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme le président. L’amendement n° 70 rectifié, présenté par M. Gay, Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Après le mot :

construction

insérer les mots :

sous maîtrise publique

La parole est à M. Fabien Gay.

M. Fabien Gay. Madame la ministre, je ne veux pas lancer une vaine polémique, mais quand nous vous expliquons que vous prenez le débat dans le mauvais sens en n’attendant pas la fin du débat public, vous nous répondez que ce n’est pas grave et que l’on inclura les conclusions du débat public dans la future PPE, avant de nous reprocher de vouloir amender le texte en affirmant qu’exercer notre droit d’amendement foulerait aux pieds le débat public, comme vous venez de l’indiquer à M. le rapporteur !

Franchement, il y a une petite incohérence : soit on nous soumet un texte, on peut en débattre et on ouvre toutes les questions – d’ailleurs, M. le rapporteur est un modéré, je peux vous le dire, parce que, si cela n’avait tenu qu’à nous, vous auriez eu droit à l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique, au tarif réglementé, au statut des industries électriques et gazières, etc. –, soit il s’agit d’un texte que nous n’avons pas le droit d’amender, sur lequel on vote pour ou contre, et basta ! Mais, selon moi, si le Gouvernement propose un texte, et c’est lui qui a la maîtrise du calendrier, qu’il nous permette au moins d’en débattre !

J’en viens à l’amendement. D’après plusieurs rapports, la construction de SMR pourrait conduire à ouvrir la production électrique au secteur privé et à la concurrence. Pour notre part, nous sommes cohérents : nous tenons à ce que le nucléaire reste sous maîtrise publique. Comme nous avons ce débat et qu’il y a un droit d’amendement, nous pensons que, avant même d’examiner la PPE, il faut inscrire dans le marbre que le déploiement de ces réacteurs, s’il demeure dans la PPE, se fera exclusivement sous maîtrise publique.

Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Gremillet, rapporteur. Cet amendement est satisfait : c’est bien EDF qui sera à l’initiative des EPR 2 et des SMR. La commission en demande donc le retrait ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Avis défavorable.

Mme le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.

M. Franck Montaugé. Monsieur le rapporteur, vous affirmez que l’amendement est satisfait, mais ce n’est pas si clair. Cet amendement soulève la question de l’organisation d’EDF au cours des mois à venir, dont nous souhaiterions discuter au Parlement. Je remercie donc nos collègues du groupe communiste républicain citoyen et écologiste de soulever ce sujet, que j’ai moi-même évoqué lors de la discussion générale, car l’une des grandes questions posées à l’industrie française qui utilise aujourd’hui de l’énergie carbonée est celle de la décarbonation, donc de l’électrification des processus.

Vous n’avez pas répondu, madame la ministre, à la question que je vous ai posée en discussion générale : quelle est la doctrine du Gouvernement en matière de développement et de multiplication des SMR ?

À un moment donné, on a entendu dire que les SMR avaient vocation à être exportés, dans un avenir plus ou moins lointain. Désormais, on entend dire qu’ils pourraient être installés sur le territoire national. Pour ma part, je ne peux pas m’empêcher de penser que certaines industries fortement consommatrices d’électricité auront intérêt à développer, au sein de leurs installations, des SMR.

Il est donc absolument fondamental de définir la doctrine en la matière, non seulement en matière de sécurité, mais aussi de marchés et de tarifs, ce qui nous renvoie directement à la question du market design européen. À cet égard, nous souhaiterions que vous nous communiquiez des informations par rapport aux propositions que le gouvernement français porte au sein des instances européennes dans le cadre de la réforme structurelle du marché européen, qui dysfonctionne complètement, comme nous le constatons tous. À ce jour, nous ne savons rien.

Mme le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Je profite de cette discussion sur les SMR pour prendre la parole.

Penchons-nous sur l’histoire du nucléaire français. Nous sommes passés de centrales de 50 mégawatts telles que celle de Brennilis en Bretagne aux centrales de 170 mégawatts, toujours dans la filière graphite-gaz, puis aux centrales de 300 mégawatts, 900 mégawatts, 1 300 mégawatts, 1 450 mégawatts, puis 1 650 mégawatts avec l’EPR de Flamanville.

On fait de plus en plus gros pour faire des économies d’échelle, parce qu’on veut montrer que le nucléaire fournit une énergie peu chère. Aujourd’hui, c’est la volte-face ! On a trouvé un nouveau joujou, le SMR. Nous allons construire de petits réacteurs, qui seront beaucoup mieux !

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. On n’est pas des enfants !

M. Daniel Salmon. Ces petits SMR existent dans les sous-marins, les brise-glace, dans des endroits isolés, comme en Sibérie. Ils coûtent très cher ! Nous allons produire des mégawattheures à 250 euros ! On nous dit que ces SMR, petits et modulaires, pourront être fabriqués en usine. Super ! Nous pourrons les disséminer dans le monde entier, dans un monde que l’on sait parfaitement sécurisé ! Un petit SMR par-ci, un autre par-là… Je souhaite beaucoup de plaisir aux générations futures pour contrôler tous ces SMR !

Il paraît qu’ArcelorMittal a besoin d’un SMR. Très bien ! Je reviendrai tout à l’heure sur ces questions de sécurité.

M. Jean-Claude Tissot. Merci pour la leçon !

Mme le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. S’agissant des SMR, mais aussi des EPR, ce sont l’industrialisation et la reproduction qui feront baisser les prix. Nous aurons ce débat, du moins je l’espère, dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’énergie.

Monsieur le rapporteur, vous me dites que l’amendement n° 70 rectifié est satisfait, dans la mesure où EDF sera en charge de la question. Sauf que nous ne connaissons pas le véritable projet du Gouvernement concernant EDF ! Si vous avez des informations, monsieur le rapporteur, n’hésitez pas à nous en faire part ! Pour le moment, le Parlement est privé d’un débat sur l’avenir d’EDF. Vous avez choisi, par le biais d’un amendement déposé, en plein été, sur le projet de budget rectificatif, de mettre 8 milliards d’euros sur la table. Voulez-vous un Hercule 2.0 ? Voulez-vous filialiser ? Voulez-vous que le nucléaire soit 100 % public ou bien voulez-vous ouvrir le capital des ENR ? Voulez-vous vendre des actifs comme Dalkia et Enedis ?

Si EDF est 100 % publique et constitue un grand service public, ou bien si les filiales de l’entreprise sont ouvertes aux capitaux privés, la situation sera bien différente !

Je ne vois donc pas comment, monsieur le rapporteur, mon amendement pourrait être satisfait, puisque les sénateurs et sénatrices du groupe CRCE, mais aussi, me semble-t-il, l’ensemble du Parlement, ne disposent pas de ces informations.

Vous ne pouvez pas me répondre : « N’ayez crainte, ça sera EDF ! » Certes, mais quel est l’avenir d’EDF ? Peut-être cette évolution sera-t-elle prévue dans le cadre de la PPE.

Pour notre part, nous estimons que cet amendement n’est pas satisfait. Dès lors, il convient de graver dans le marbre que les SMR devront être développés sous maîtrise publique.

Mme le président. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour explication de vote.

M. Jean-Michel Houllegatte. Au départ, les SMR ne figuraient pas dans le projet de loi initial ; ils ont été ajoutés par la commission. En revanche, dans l’exposé des motifs du projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, était évoquée – et je ne la conteste pas – la nécessité de nous doter, dans le cadre du mix énergétique, de SMR, pour répondre à des besoins d’entreprises électro-intensives. La vallée du Rhône et le Nord étaient notamment cités.

S’agissant des SMR, il est important de clarifier les choses. Selon moi, l’amendement déposé par notre collègue Fabien Gay est tout à fait opportun. En effet, doit-on considérer, d’une certaine façon, que le SMR puisse échapper au contrôle de la puissance publique ? Chaque entreprise électro-intensive ou chaque groupement régional d’entreprises électro-intensives doit-il pouvoir mutualiser l’achat d’un tel réacteur, pour être en autonomie énergétique ? Après tout, pourquoi pas ! Toutefois se pose la question du contrôle de ces SMR et du risque de dissémination.

Selon moi, les SMR comme le nucléaire très diffus – l’IRSN a d’ailleurs produit beaucoup de rapports sur ces questions – doivent rester sous l’égide de la puissance publique.

Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 70 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme le président. Je mets aux voix l’article 1er C.

(Larticle 1er C est adopté.)

Article 1er C (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes
Article 1er

Article 1er D (nouveau)

D’ici le dépôt du projet de loi prévu en application du I de l’article L. 100-1 A du code de l’énergie, le Gouvernement remet au Parlement un rapport visant à évaluer l’impact de la construction de quatorze réacteurs pressurisés européens, mentionnés par le Président de la République dans le discours tenu à Belfort, le 10 février 2022, et de neuf supplémentaires, étudiés par Réseau de transport d’électricité, dans son étude Futurs énergétiques à l’horizon 2050, sur :

1° La situation du groupe EDF, du marché de l’électricité et des finances publiques ;

2° Les besoins en termes de métiers et de compétences ;

3° La sûreté et la sécurité nucléaires ;

4° Le cycle du combustible.

Mme le président. L’amendement n° 107, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Avant la discussion de la prochaine loi mentionnée au I de l’article L. 100-1 A du code de l’énergie, le Gouvernement remet au Parlement un rapport relatif aux modalités de mise en œuvre d’un programme de construction de nouveaux réacteurs nucléaires en France présentant, sur la base des informations disponibles :

- les éventuelles options s’agissant de son dimensionnement, de son calendrier et des sites susceptibles d’accueillir de nouveaux réacteurs ;

- les enjeux de préparation afférents pour la filière nucléaire, notamment en matière de compétences ;

- les modalités envisagées pour la gestion des matières et des déchets radioactifs associés ;

- l’avancement des instructions techniques et administratives associées en matière de sûreté et de sécurité nucléaires.

La parole est à Mme la ministre.