M. le président. L’amendement n° 26 rectifié bis, présenté par Mmes Belrhiti et Dumont, M. Burgoa, Mmes Joseph et Lassarade, M. Frassa, Mme Lopez, MM. Houpert, Klinger, C. Vial, Pellevat et Bansard et Mmes Renaud-Garabedian et Micouleau, est ainsi libellé :
Après l’article 7 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les projets de réacteurs électronucléaires, y compris ceux de petits réacteurs modulaires, recourent de manière préférentielle à des méthodes de refroidissement en eau en circuit fermé.
Le cas échéant, le recours à une méthode de refroidissement en eau en circuit ouvert fait l’objet d’une obligation de motivation spéciale, eu égard aux circonstances d’installation et à l’impact environnemental de ce choix.
La parole est à Mme Catherine Belrhiti.
Mme Catherine Belrhiti. Disposer d’eau en abondance est l’une des conditions du bon fonctionnement des centrales nucléaires, principalement pour évacuer la part d’énergie thermique non transformée en énergie mécanique.
Or ce besoin ne saurait se soustraire aux conditions d’une gestion vertueuse de nos ressources en eau, compte tenu de la raréfaction de cette ressource en raison du changement climatique, des épisodes de sécheresse et des tensions entre usages.
Le rapport sur l’avenir de l’eau produit par la délégation à la prospective du Sénat a souligné l’existence de deux moyens de refroidissement des réacteurs, l’un étant plus vertueux que l’autre.
Lorsque le réacteur est refroidi en circuit ouvert, le prélèvement en eau est très important. En aval du système de refroidissement, l’eau est restituée pratiquement en totalité au milieu, à une température supérieure à la température de l’eau lors de son prélèvement.
Lorsque le réacteur est refroidi en circuit fermé, le prélèvement en eau est beaucoup plus modeste, de l’ordre de trente fois moins que dans le système précédent. Il en découle un usage nettement plus vertueux de nos ressources en eau.
C’est donc cette méthode de refroidissement en circuit fermé qu’il faut favoriser par principe et par défaut.
Le présent amendement vise à introduire cette préférence pour les circuits fermés ainsi qu’une motivation spéciale et circonstanciée du choix éventuel d’un circuit ouvert pour refroidir les réacteurs des nouvelles installations nucléaires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur. La mention d’une préférence pour les méthodes de refroidissement en circuit fermé ne me paraît pas souhaitable. Cela reviendrait à préférer une technologie par rapport à l’autre, au mépris du progrès technique. Par ailleurs, la disposition serait peu normative. Elle ne peut donc être conservée ni sur le fond ni sur la forme.
Pour ces raisons, je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Je partage l’avis de M. le rapporteur.
Je précise que l’enjeu dépend de l’emplacement du projet : en bord de mer, le sujet du circuit ouvert ne se pose pas ; en bord de rivière, la réglementation prévoit déjà cette préférence, puisque, selon l’arrêté actuellement en vigueur, « la réfrigération en circuit ouvert par de l’eau douce provenant du milieu ambiant est interdite, sauf mention explicite dans le décret d’autorisation ».
M. le président. Madame Catherine Belrhiti, l’amendement n° 26 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Catherine Belrhiti. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 26 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 41 rectifié bis, présenté par MM. Somon et Paccaud, Mme Belrhiti, MM. Courtial, Burgoa, Bouchet, J.P. Vogel, Perrin et Rietmann et Mmes M. Mercier, Gosselin, Borchio Fontimp, Estrosi Sassone et Micouleau, est ainsi libellé :
Après l’article 7 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les six mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet un rapport au Parlement, présentant l’opportunité de mutualiser au niveau national les recettes fiscales liées au foncier des nouvelles centrales nucléaires, dans la mesure où ces dernières bénéficieront d’une enveloppe spécifique nationalisée au titre de l’objectif « Zéro artificialisation nette ».
La parole est à M. Laurent Somon.
M. Laurent Somon. Je voudrais mettre ce projet de loi en résonnance avec le rapport de la commission des finances sur l’application de la législation relative à l’objectif « zéro artificialisation nette », ce qui rejoint nos discussions sur l’article 3, mais sur un volet plus fiscal.
Cet amendement d’appel a pour objet une demande de rapport au Gouvernement – dont je sais le sort qui lui sera réservé – sur l’opportunité de mutualiser au niveau national les recettes fiscales, en tout cas une partie d’entre elles, liées à ces nouvelles centrales nucléaires.
Le projet de loi, tel qu’il a été amendé en commission, prévoit désormais la mutualisation nationale des surfaces foncières des centrales nucléaires, ce qui permet aux collectivités d’implantation des futurs réacteurs de ne pas être pénalisées au titre de leurs obligations ZAN.
Par souci d’équilibre, compte tenu des efforts de chacun des territoires, de chacune des régions, il paraîtrait logique que soient aussi mutualisées, pour partie, les recettes fiscales nouvelles – cotisation foncière des entreprises (CFE), imposition forfaitaire des entreprises de réseaux (Ifer)… – liées aux futurs réacteurs, et ce en vue d’une redistribution.
S’il est parfaitement compréhensible que les centrales nucléaires constituent des projets d’intérêt national et que leur foncier mérite d’être mutualisé au titre de l’objectif ZAN, aussi est-il intuitif qu’une partie des recettes bénéficie à l’ensemble des collectivités territoriales et non aux seules collectivités d’implantation.
Je rappelle, à cet égard, qu’il est bien précisé, dans le rapport de la commission des finances précédemment cité, que la fiscalité locale est au cœur de la mise en œuvre du ZAN et donc de la consommation foncière des projets d’intérêts, en particulier nationaux.
Je rebondis également sur les propos précédemment tenus par mon collègue et confrère Ronan Dantec : oui, il est absolument nécessaire de redonner une définition de ce qui ressort de l’intérêt national, qu’il s’agisse d’infrastructures nucléaires, d’énergies renouvelables, ou même de transport d’électricité. Il faut voir comment on comptabilise tout cela et comment on répartit les recettes, d’où la nécessité d’éclaircir rapidement cette nomenclature.
En réponse à Mme Céline Brulin, je voudrais tout de même rappeler qu’il existe de grandes différences sur les aspects annexes des aménagements : une collectivité comme Paluel touche une fiscalité équivalant à 5 000 euros par habitant, contre 737 euros pour des collectivités de même strate.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur. La remise d’un rapport sur la mutualisation nationale des recettes tirées des projets de réacteurs n’est pas opportune.
Il est logique et souhaitable que les collectivités ou groupements d’implantation soient les premiers bénéficiaires de ces recettes fiscales. Par ailleurs, l’enveloppe nationalisée au titre de l’objectif zéro artificialisation nette, évoquée dans l’objet de l’amendement, n’existe pas encore. La modification est donc quelque peu prématurée, voire inadaptée dans le contexte actuel.
La commission demande le retrait de cet amendement n° 41 rectifié bis ; à défaut, elle y sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Pour notre part, nous voterons cet amendement.
Une question a été posée au moment de l’examen du projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables et il me semble que nous ne sommes pas allés au bout de notre réflexion. Cette question est celle du partage de la valeur. Celle-ci doit-elle être individualisée ou, au contraire, rester solidaire et collective ? À quel moment déclenche-t-on le mécanisme ? Jusqu’où, à quelles zones l’étend-on ? Comment définit-on le territoire ? Limite-t-on celui-ci à la seule ville d’accueil ? Englobe-t-on les villes périphériques, celles qui vont être impactées ? Selon quelles limites ?
Tout cela constitue un vrai débat. Pour notre part, nous continuons de penser qu’il faut une redistribution au sein d’un territoire – faut-il le définir pour autant ? –, mais nous voulons aussi que l’on maintienne une péréquation tarifaire pour les usagers.
Cela fait donc beaucoup de points à aborder et si, comme les auteurs de l’amendement eux-mêmes le soulignent, le Sénat n’est pas toujours enclin à adopter des demandes de rapport, il y a là, pour le coup, une question soulevant un vrai débat de fond. Il ne semble pas que nous puissions aller au bout de l’échange uniquement dans le cadre d’un débat d’hémicycle. C’est pourquoi nous soutiendrons cette demande de rapport.
Peut-être serons-nous in fine en désaccord avec notre collègue Laurent Somon sur les modalités de calcul, mais ce sujet mérite amplement d’être fouillé, approfondi et débattu.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 41 rectifié bis.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l’amendement.) – (Applaudissements sur des travées du groupe GEST.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 7 bis.
Article 8
Les conditions d’application du présent titre sont précisées par décret en Conseil d’État. – (Adopté.)
TITRE II
MESURES RELATIVES AU FONCTIONNEMENT DES INSTALLATIONS NUCLÉAIRES DE BASE EXISTANTES
Avant l’article 9
M. le président. L’amendement n° 65, présenté par MM. Devinaz, Houllegatte, Montaugé, Tissot, Michau, Kanner et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et M. Filleul, MM. Gillé et Jacquin, Mmes Préville, Blatrix Contat et Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Pla et Redon-Sarrazy, Mme Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Avant l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dès la promulgation de la présente loi, le Gouvernement engage, en s’appuyant sur les moyens des services internes du ministère de la transition énergétique, un audit recensant les besoins prévisionnels en emplois de l’Autorité de sûreté nucléaire pour faire face à la relance du nucléaire dans un contexte marqué par des aléas et événements incertains.
La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz.
M. Gilbert-Luc Devinaz. Le contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection est assuré par l’Autorité de sûreté nucléaire, qui bénéficie d’un appui technique de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Or, depuis plusieurs années, l’ASN a vu sa charge de travail augmenter très fortement.
Aux dossiers d’instruction classique se sont ajoutées de nouvelles demandes d’instruction autour des problématiques de prolongation des centrales nucléaires, démantèlement, saturation des piscines de stockage ou phénomènes de corrosion.
L’ASN et l’IRSN auront-ils suffisamment de moyens pour lancer de nouvelles études face à de nouveaux phénomènes imprévisibles, de nouvelles agressions naturelles, sans oublier les risques de cyberattaques ou les risques géopolitiques ?
Pour toutes ces raisons, nous souhaitons qu’un audit recensant les besoins prévisionnels de l’ASN et de l’IRSN soit engagé, pour faire face à l’éventuelle relance du nucléaire dans un contexte marqué par l’incertitude. Cet audit s’appuiera sur les moyens techniques et humains du ministère de la transition énergétique, raison pour laquelle il n’est pas utile de gager l’amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur. Le recensement des besoins humains de l’ASN me paraît fondé. Il est conforme à la position de notre commission, qui a entendu simplifier et sécuriser au maximum : pour ce faire, il faut des moyens humains.
J’ajoute que la consolidation des moyens financiers ou humains de l’ASN figurait dans les préconisations de la mission d’information sénatoriale transpartisane.
La commission s’en remet donc à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Le Gouvernement s’en remet également à la sagesse de la Haute Assemblée. La sûreté nucléaire est une priorité absolue pour nous.
M. Fabien Gay. Ah bon ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Nous veillons à ce que les moyens de l’ASN et de l’IRSN soient à la hauteur des enjeux.
Les deux structures ont été dotées de moyens renforcés dans le cadre des lois récentes. L’ASN, en particulier, s’est vue attribuer cinq emplois supplémentaires en 2022, après une hausse de seize emplois depuis 2018 et de cinquante-six emplois depuis 2014 ; elle gagnera encore six équivalents temps plein en 2023.
Cette adaptation à la charge donne satisfaction. Toutefois, la production d’un tel rapport ne me semble pas contribuer négativement à l’objectif du présent projet de loi – je dirai même au contraire, dans la mesure où l’ASN fera face à des activités croissantes à l’avenir.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l’article 9.
Article 9
L’article L. 593-19 du code de l’environnement est ainsi rédigé :
« Art. L. 593-19. – L’exploitant adresse à l’Autorité de sûreté nucléaire et au ministre chargé de la sûreté nucléaire un rapport comportant les conclusions de l’examen prévu à l’article L. 593-18 et, le cas échéant, les dispositions qu’il envisage de prendre pour remédier aux anomalies constatées ou pour améliorer la protection des intérêts mentionnés à l’article L. 593-1.
« Pour les réexamens au-delà de la trente-cinquième année de fonctionnement d’un réacteur électronucléaire, le rapport mentionné au même premier alinéa du présent article, dont les conclusions et les dispositions qu’il comporte mentionnées au même alinéa, font l’objet d’une enquête publique, réalisée en application du chapitre III du titre II du livre Ier et de l’article L. 593-9.
« L’Autorité de sûreté nucléaire analyse le rapport mentionné au premier alinéa du présent article. À l’issue de cette analyse, elle peut imposer à l’exploitant de nouvelles prescriptions mentionnées à l’article L. 593-10. Pour les réexamens mentionnés au deuxième alinéa du présent article, l’Autorité de sûreté nucléaire tient compte des conclusions de l’enquête publique dans son analyse du rapport de l’exploitant et dans les prescriptions qu’elle prend. Pour ces mêmes réexamens, cinq ans après la remise du rapport de réexamen, l’exploitant remet à l’Autorité de sûreté nucléaire un rapport intermédiaire rendant compte de la mise en œuvre des prescriptions mentionnées à l’article L. 593-10, au vu duquel l’Autorité de sûreté nucléaire peut compléter ces prescriptions.
« Elle communique son analyse du rapport et les prescriptions qu’elle prend au ministre chargé de la sûreté nucléaire.
« Les dispositions envisagées par l’exploitant font l’objet, en fonction du degré d’importance, d’une autorisation en cas de modifications substantielles, dans les conditions prévues au II de l’article L. 593-14, ou d’une déclaration ou d’une autorisation en cas de modifications notables, dans les conditions prévues à l’article L. 593-15. Une décision de l’Autorité de sûreté nucléaire, homologuée par le ministre chargé de la sûreté, précise la liste des modifications notables qui ne remettent pas en cause de manière significative le rapport de sûreté ou l’étude d’impact de l’installation nucléaire de base, mentionnée à l’article L. 593-2, pouvant être soumises à déclaration à cette autorité, en application du présent article. Pour protéger les intérêts mentionnés à l’article L. 593-1, l’Autorité de sûreté nucléaire peut assortir toute modification soumise à déclaration, en application du présent alinéa, de prescriptions complémentaires, mentionnées à l’article L. 593-10. »
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, sur l’article.
M. Marc Laménie. Mon intervention s’inscrira dans la continuité des divers amendements présentés et débattus sur ce sujet particulièrement important.
Je commencerai en saluant le travail de la commission des affaires économiques, de son rapporteur, de sa présidente, mais aussi de nos collègues de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.
Cet article 9 s’inscrit dans le titre II du projet de loi traitant des mesures relatives au fonctionnement des installations nucléaires de base existantes, avec une référence au code de l’environnement. Il s’inscrit, lui aussi, dans une continuité, puisque la discussion de l’amendement précédent nous a permis d’aborder le rôle important et l’action indépendante de l’ASN et de l’IRSN.
Il me semble que c’est là un point fort pour la sûreté. Nous avons évoqué plus tôt dans le débat les commissions locales d’information. L’ASN intervient en tout temps, pourrais-je dire, et pour le moindre incident, même minime, sur une centrale nucléaire. Il y a réellement une volonté de transparence et de bonne communication.
Dans le même ordre d’idée, on pourrait aussi évoquer le lien avec l’exploitant – pour la centrale que je connais, celle de Chooz sur la vallée de la Meuse, il s’agit du groupe EDF –, les compétences techniques de l’ensemble des salariés, le rôle des services de l’État, des collectivités territoriales, des associations et, de manière générale, de tous les partenaires liés à la sécurité.
Transparence et concertation, voilà qui est réellement fondamental ! Je voterai cet article 9.
M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 45, présenté par MM. Salmon, Labbé, Dantec, Fernique, Benarroche, Breuiller, Dossus et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 3 et 4
Remplacer ces alinéas par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Le rapport mentionné au premier alinéa, les conclusions et les dispositions qu’il comporte mentionnées au même alinéa font l’objet d’une enquête publique, réalisée en application du chapitre III du titre II du livre Ier et de l’article L. 593-9.
« L’Autorité de sûreté nucléaire analyse le rapport mentionné au premier alinéa. À l’issue de cette analyse, elle peut imposer à l’exploitant de nouvelles prescriptions techniques mentionnées à l’article L. 593-10.
« L’Autorité de sûreté nucléaire tient compte des conclusions de l’enquête publique dans son analyse du rapport de l’exploitant et dans les prescriptions qu’elle prend.
« L’exploitant répond à cette analyse par des dispositions qui justifient de l’intégration des prescriptions de l’Autorité de sûreté nucléaire ainsi que du respect du calendrier des travaux. Ces dispositions prises par l’exploitant sont rendues publiques.
« Pour les réexamens au-delà de la trente-cinquième année de fonctionnement d’un réacteur électronucléaire, cinq ans après la remise du rapport de réexamen, l’exploitant remet à l’Autorité de sûreté nucléaire un rapport intermédiaire sur l’état des équipements et rendant compte de la mise en œuvre des prescriptions mentionnées à l’article L. 593-10, au vu duquel l’Autorité de sûreté nucléaire peut compléter ses prescriptions.
II. – Alinéa 6
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les dispositions proposées par l’exploitant lors des réexamens au-delà de la trente-cinquième année de fonctionnement d’un réacteur électronucléaire sont soumises à la procédure d’autorisation par l’Autorité de sûreté nucléaire mentionnée à l’article L. 593-15, sans préjudice de l’autorisation mentionnée au II de l’article L. 593-14 en cas de modification substantielle. Les prescriptions de l’Autorité de sûreté nucléaire comprennent des dispositions relatives au suivi régulier du maintien dans le temps des équipements importants pour la protection des intérêts mentionnés à l’article L. 593-1.
« L’absence de respect des dispositions de l’exploitant et des prescriptions de l’Autorité de sûreté nucléaire ou du calendrier donne automatiquement lieu à une saisine de la commission des sanctions de l’Autorité de sûreté nucléaire, indépendamment d’éventuelles poursuites pénales. »
La parole est à M. Daniel Salmon.
M. Daniel Salmon. Cet article peut être compris comme facilitant la prolongation de la durée de vie technique des réacteurs, ce que l’on peut entendre.
Cependant, derrière le paravent de l’accélération, il fait porter, hélas ! une pression sur la disponibilité des réacteurs au titre de la sécurité d’approvisionnement, au détriment de la sûreté.
Les compétences de l’ASN et son pouvoir décisionnaire en sont encore amoindris, s’agissant des installations nucléaires dont la durée de vie technique dépasserait ainsi les quarante ans. C’est pourtant spécifiquement après cette période que la vigilance en matière de sûreté doit être accrue.
Le projet de loi allège encore le rôle de l’ASN, à laquelle l’exploitant se contentera de déclarer les modifications opérées sur les centrales. Nous ne pouvons que nous y opposer.
La décision de faire fonctionner la majorité des réacteurs au-delà de leur quatrième, voire de leur cinquième, visite décennale est lourde de conséquences pour la sûreté et la sécurité des installations et impose de renforcer la rigueur et les moyens mis en œuvre pour assurer un niveau de sûreté suffisant.
C’est pourquoi nous proposons une réécriture de l’article 9 garantissant une meilleure transparence ainsi qu’une communication complète sur l’état d’avancement des travaux et sanctionnant les retards.
En outre, nous entendons élargir l’exigence d’une enquête publique, donc d’une évaluation environnementale, à tous les réexamens concernant la sûreté, de manière à ce que chacun, public et élus, dispose d’une information complète sur l’ensemble des répercussions.
Cet amendement vise à rétablir le régime d’autorisation de l’ASN au-delà de la trente-cinquième année, dont la suppression paraît injustifiée, ainsi que l’obligation qui pesait sur l’exploitant de produire un rapport quinquennal de sûreté après la trente-cinquième année de fonctionnement, qui devra porter également sur l’état des équipements importants. En cas de non-respect des prescriptions et des échéances, la commission des sanctions devra être saisie.
M. le président. L’amendement n° 117, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Supprimer les mots :
, réalisée en application du chapitre III du titre II du livre Ier et de l’article L. 593-9
La parole est à Mme la ministre.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Les dispositions ajoutées par la commission des affaires économiques ont clarifié l’objet de l’enquête publique qui a lieu à l’occasion des réexamens des réacteurs nucléaires, après trente-cinq ans.
Toutefois, le texte de la commission renvoie au régime général des enquêtes publiques, alors que l’enquête publique dont il est ici question en diffère en plusieurs points. Ces adaptations ont été réalisées au niveau réglementaire par les articles R. 593-62-2 à R. 593-62-8 du code de l’environnement.
La référence à l’article L. 593-9, concernant l’enquête publique sur la demande d’autorisation de création d’installation, n’est pas non plus appropriée. Le rapport de sûreté n’a, par exemple, pas vocation à faire partie du dossier d’enquête publique de réexamen.
Cet amendement n° 117 vise à supprimer toutes ces précisions afin de lever toute ambiguïté sur le format de l’enquête publique applicable, sans emporter de changement de fond.
Pour autant, dans un esprit de compromis, je suis disposée à le retirer au profit de la proposition du rapporteur contenue dans l’amendement n° 130, lequel tend à apporter une ouverture sur les adaptations réglementaires pour prendre en compte les spécificités de cette enquête publique de prolongation, qui ne saurait être assimilée à l’enquête publique initiale de création d’installation. Il importe de bien faire la distinction entre ces deux processus.
En revanche, l’article conservera ainsi des fragilités juridiques qu’il faudra corriger dans le cadre de la navette parlementaire. Le but de ce texte est bien la sécurisation des projets et leur simplification en vue de l’accélération des procédures administratives relatives, en l’espèce, à la prolongation des réacteurs.
M. le président. L’amendement n° 130, présenté par M. Gremillet, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
, sous réserve des adaptations réglementaires nécessaires
La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Gremillet, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision rédactionnelle.
M. le président. L’amendement n° 67, présenté par MM. Devinaz, Houllegatte, Montaugé, Tissot, Michau, Kanner et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et M. Filleul, MM. Gillé et Jacquin, Mmes Préville, Blatrix Contat et Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Pla et Redon-Sarrazy, Mme Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 4, deuxième phrase
Remplacer les mots :
de nouvelles prescriptions techniques proportionnées à l’article L. 593-10
par les mots :
au titre de l’article L. 593-10, de nouvelles prescriptions techniques proportionnées
La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz.
M. Gilbert-Luc Devinaz. La loi délègue à l’ASN le pouvoir d’émettre des prescriptions complémentaires conditionnant la poursuite de l’exploitation, ou de proposer au Gouvernement une mesure de mise à l’arrêt définitif d’installations inexploitées pendant plus de deux ans.
Le principe de cette délégation technique et administrative est légitime, mais le Parlement pourrait mieux préserver son rôle de contrôle en qualifiant davantage cette délégation à une autorité administrative indépendante.
L’adoption de prescriptions additionnelles de sûreté nucléaire pour autoriser la poursuite d’exploitation des réacteurs après quarante ans ne peut se concevoir à travers les seuls filtres de la technique réglementaire, des connaissances scientifiques et des technologies effectivement disponibles. Il faut également prendre en compte les attentes et les contraintes de la société au sens large, qui a besoin de sûreté, mais aussi d’accès à l’énergie électrique.
En ce sens, les auteurs de l’amendement proposent de préciser que les prescriptions techniques de l’ASN doivent être « proportionnées ».
L’ajout de ce qualificatif permettrait à l’ASN de disposer d’un fondement solide pour ses propositions, et aux autorités nationales compétentes – Gouvernement, Parlement, Cour des comptes… – de mieux apprécier le bien-fondé desdites propositions.