M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Valérie Boyer. Monsieur le garde des sceaux, j’associe mon collègue Laurent Somon à ma question.
Voilà trois mois, alors que le vice-président du Sénat Roger Karoutchi vous interrogeait sur le rapatriement des femmes et des enfants de djihadistes, vous avez répondu : « En réalité, notre doctrine n’a pas changé. » Était-ce ironie ou mépris ?…
Depuis 2009, chaque situation était étudiée au cas par cas pour les enfants, dans une logique purement humanitaire. Quant aux femmes, le principe de la tolérance zéro leur était appliqué.
Or, même si je ne veux pas employer le terme de « rapatriement », car il s’agit de revenants, nous avons appris par la presse que 15 femmes et 32 enfants sont rentrés, sans compter les 31 femmes et les 67 enfants revenus l’année dernière. Assumez-vous ce changement de doctrine, à savoir l’abandon du cas par cas et le choix des retours massifs ?
Comment assurez-vous la prise en charge de ces enfants par les services de l’ASE, l’aide sociale à l’enfance, déjà au bord de l’asphyxie, comme l’enfermement de ces femmes dans nos prisons, déjà saturées, alors qu’elles sont parfois considérées comme des héroïnes ? Comment pouvez-vous garantir la sécurité des Français face à ces personnes qui haïssent toujours la France ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la sénatrice Boyer, il n’y avait ni ironie ni mépris ; votre champ lexical aurait sans doute pu vous permettre d’envisager d’autres points de vue.
Nous n’avons pas changé notre position, qui est extrêmement claire et précise. Ceux qui ont choisi Daech doivent être jugés au plus près des lieux où ils ont commis leurs crimes, mais, et ce n’est pas un petit « mais », il y a des enfants, madame la sénatrice, qui n’ont rien choisi et qui doivent être traités avec humanité et vigilance ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, RDSE, GEST, SER et CRCE.)
Je parle d’humanité, parce que ce sont des enfants, et des enfants français, ne vous en déplaise ! (Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées.) Et je parle de vigilance, parce qu’ils sont susceptibles d’être traumatisés à vie, avec toutes les séquelles que cela peut causer.
Non, nous n’avons pas changé de doctrine ! Nous rapatrions à la demande, chaque fois que cela est possible, des femmes avec des enfants, en ayant à l’esprit la sécurité de nos forces de l’ordre qui se trouvent sur place, car nous ne maîtrisons pas tout.
Les femmes ont toutes fait l’objet d’une judiciarisation. Quant aux enfants, ils sont placés parfois auprès de leurs grands-parents, qui sont des gens parfaitement intégrés, parfaitement honnêtes et, je le redis, parfaitement français, madame la sénatrice.
Ces enfants font l’objet d’un suivi sanitaire, d’un suivi médical et d’un suivi psychologique. Fermeté pour les femmes, humanité et vigilance pour les enfants : nous pourrions tomber d’accord sur ce point. Ce n’est ni de l’ironie ni du mépris ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, RDSE, GEST, SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour la réplique.
Mme Valérie Boyer. Vous n’avez pas le monopole de l’humanité, monsieur le ministre ! Personne, ici, ne peut le nier, nous souhaitons également traiter les enfants avec humanité. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains. – Exclamations sur les travées des groupes SER et CRCE.)
En revanche, la doctrine du cas par cas avait été adoptée par votre prédécesseur, Mme Belloubet, et M. Le Drian. Qu’en est-il aujourd’hui ? Pourquoi avez-vous changé de doctrine, en optant pour des migrations mortifères massives ? (Protestations sur les travées des groupes RDPI, RDSE, GEST, SER et CRCE.)
M. Mickaël Vallet. Ils sont français !
Mme Valérie Boyer. Le président Macron a lui-même estimé ces retours trop dangereux pour la sécurité des Français. Qu’en est-il aujourd’hui des personnes qui restent ? Combien sont-elles ? Vous injectez dans la population française des djihadistes, alors que notre pays est déjà gangrené par le salafisme ! (Nouvelles protestations sur les mêmes travées. – M. le garde des sceaux manifeste son indignation.)
N’oublions pas que la France, avec 1 400 individus, est le premier pays européen et le deuxième pays au monde à avoir fourni des terroristes à l’État islamiste. Des femmes se sont engagées pour aller combattre en Syrie et en Irak, contre la France.
M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Valérie Boyer. Avons-nous les moyens d’une telle politique ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
danger pour la santé du protoxyde d’azote
M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Valérie Létard. Monsieur le ministre de la santé, personne ne peut aujourd’hui ignorer ce fléau : l’usage détourné du protoxyde d’azote explose en France ! Placé à la troisième place des produits psychoactifs les plus utilisés, notamment chez les jeunes adultes, son caractère addictif est aujourd’hui scientifiquement avéré.
Le nombre de cas évalués par le réseau des centres de pharmacovigilance, qui sont les cas les plus sévères, donnant souvent lieu à une hospitalisation, a été multiplié par dix en trois ans. Et ce n’est que la partie émergée de l’iceberg !
Jour après jour, les autorités sanitaires découvrent de nouvelles complications à la suite de cette consommation massive et inédite. Celles-ci, bien plus graves que celles qui sont liées à d’autres produits qualifiés de stupéfiants, révèlent des symptômes psychiatriques – anxiété, psychose ou autres troubles du comportement – et ont des conséquences lourdes sur la sensibilité et la motricité, avec des séquelles parfois irréversibles, pouvant aller jusqu’à une sclérose combinée de la moelle épinière.
Face à ce fléau, face à cette drogue qui ne porte pas son nom, j’ai fait adopter, avec le soutien de tous nos collègues, au mois de juin 2021, un premier texte d’initiative parlementaire pour prévenir et encadrer cette consommation détournée.
Monsieur le ministre, si je vous interpelle aujourd’hui, c’est parce que les décrets d’application de ce texte visant à limiter la quantité de vente de cartouches de protoxyde et, surtout, à interdire la vente de bonbonnes à des particuliers, devraient être sortis depuis plus de huit mois !
Après que j’ai alerté, dès le mois de septembre dernier, votre ministère sur ces retards, on m’a assuré que la publication aurait lieu à la fin de 2022…
Pourquoi ces décrets ne sont-ils toujours pas pris ? On le sait, les bonbonnes accélèrent fortement la consommation excessive et régulière du protoxyde, dont les conséquences sont tout de même énormes. C’est grave, monsieur le ministre !
D’ailleurs, à quand une véritable campagne d’information et de prévention nationale, que nous attendons tous ?
Face à ce phénomène toujours croissant, et interpellée par les acteurs de terrains – professionnels de santé, magistrats, élus démunis –, j’ai déposé un second texte visant à délictualiser la consommation de protoxyde d’azote et à poursuivre les personnes qui conduisent sous son emprise, cette substance étant très accidentogène.
M. le président. Veuillez poser votre question, ma chère collègue.
Mme Valérie Létard. Monsieur le ministre, quand le Gouvernement compte-t-il se saisir de ce sujet ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains. – Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la prévention.
M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention. Madame la sénatrice Valérie Létard, je vous rejoins, le mésusage du protoxyde d’azote est un problème de santé publique, qui touche principalement les plus jeunes, puisque plus de 5 % des enfants de la classe de troisième au collège déclarent avoir déjà utilisé ce protoxyde d’azote à des fins récréatives.
Conformément au texte que vous avez défendu, il existe deux axes, celui de la prévention et celui de la sanction.
Tout d’abord, il s’agit d’améliorer nos connaissances sur ce produit et sur sa toxicité. Connu depuis longtemps, il est utilisé, en fonction de son pourcentage par rapport à l’oxygène, soit comme un gaz anesthésique, soit comme un gaz antalgique, soit comme un gaz hilarant.
Les nouvelles toxicités, que nous découvrons, concernent en effet le système nerveux central. Mais, ne l’oublions pas, en cas d’asphyxie, la toxicité est immédiate et particulièrement dangereuse.
L’information est notre fer de lance. Nous remontons des informations à l’échelon national, région par région, ce qui nous a permis, en particulier dans votre territoire, madame la sénatrice, de mener une campagne d’information tout à fait ciblée auprès des jeunes âgés de 15 ans à 25 ans, en utilisant les réseaux sociaux. Nous allons continuer dans cette voie.
Pour ce qui concerne le texte que vous avez fait déposer l’année dernière, plusieurs dispositions sont d’ores et déjà appliquées, qu’il s’agisse de l’interdiction de vente aux mineurs ou bien de vente dans les débits de boissons. Est également prohibée la vente des crackers, qui sont les dispositifs permettant le mésusage du protoxyde d’azote.
Par ailleurs, les personnes majeures qui pousseraient des jeunes à utiliser cette substance commettent désormais un délit.
En ce qui concerne le texte dont vous êtes à l’origine, il a été notifié au mois de février dernier à la Commission européenne. Cette dernière et le ministère ont eu plusieurs échanges. Un décret et un arrêté sont en cours de publication ; j’espère qu’ils paraîtront avant la fin du mois de février. Le décret concerne les informations sur les boîtes et sur les produits et l’arrêté la limitation de vente à dix capsules maximum par personne.
Nous sommes mobilisés face à ce problème de santé publique et nous accélérons avec la Commission européenne pour pouvoir publier ces textes au plus vite. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
décision de la cour de justice de l’union européenne relative aux néonicotinoïdes
M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Pierre Cuypers. J’associe Kristina Pluchet à ma question.
Jeudi 19 janvier, jour funeste pour l’agriculture française, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a décidé de rendre illégales les dérogations prévues pour la filière betteravière sur l’utilisation des néonicotinoïdes. (Exclamations sur les travées des groupes SER et GEST.)
Le 30 octobre 2020, monsieur le ministre, votre prédécesseur affirmait avec justesse que la situation était particulièrement grave et que tout devait être mis en œuvre pour protéger cette filière. De même, le Président de la République clamait haut et fort qu’« il ne [devait] pas y avoir d’interdits sans solution ».
Vous-même, monsieur le ministre, m’avez affirmé le 12 janvier dernier être certain de la reconduction des dérogations prévues pour 2023…
De plus, en 2016, la France a interdit l’usage de tous les néonicotinoïdes en aspersion ou en enrobage de semence, contrairement à l’Allemagne et aux autres pays, qui l’autorisent. La France s’est mise dans l’impasse !
En 2020, la catastrophe de la jaunisse de la betterave a entraîné 200 millions d’euros de pertes. Malgré les engagements pris, l’indemnisation n’a été que de 10 % à 30 % du préjudice.
Notre souveraineté alimentaire et énergétique est donc menacée. Quelle réponse concrète le Gouvernement entend-il apporter à cette situation et à cette crise latente ?
Monsieur le ministre, il vous reste moins de dix jours pour trouver les solutions qui s’imposent, car les agriculteurs doivent prévoir leurs semis ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Cuypers, vous connaissez très bien ce sujet et je vous remercie d’éclairer le débat au travers de votre question.
Vous avez raison, la récente décision de la Cour de justice de l’Union européenne s’impose à nous tous. Elle vient contrecarrer – reconnaissons-le – un plan prévu sur trois ans pour sortir des néonicotinoïdes, à la fois en autorisant une dérogation sur les semences enrobées et en permettant de déployer des solutions de substitution. Le programme en était à sa troisième année.
Comme vous le soulignez à juste titre, nous n’avons que très peu de temps pour agir et pour rassurer les planteurs, ainsi que l’ensemble de la filière. Je pense, notamment, aux industries qui triturent la betterave, en particulier dans votre département, mais aussi dans bien d’autres.
Premièrement, il s’agit de garantir aux agriculteurs que les pertes dues à la jaunisse seront couvertes. Nous sommes en train d’y travailler, afin d’être au rendez-vous dans les prochains jours. Il importe que les producteurs puissent planter en étant assurés d’amortir leurs récoltes. (Marques de scepticisme sur les travées du groupe Les Républicains.)
Deuxièmement, il s’agit d’accélérer la recherche, grâce au plan national mis en œuvre, en vue de trouver des solutions de rechange. Je rappelle que l’État et les acteurs de la filière ont investi plus de 20 millions d’euros pour soutenir les travaux de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae). C’est un point sur lequel je travaille avec Sylvie Retailleau.
Par ailleurs, d’autres itinéraires techniques sont envisagés, via l’utilisation de molécules encore autorisées. J’ai notamment demandé que l’on expertise très rapidement des solutions foliaires.
Troisièmement, conformément aux engagements pris par mon prédécesseur, par le Président de la République et par moi-même, il n’y aura pas d’interdiction sans solution. Cette interdiction date de 2016. Le principe de précaution prévu par la Charte de l’environnement est bien plus ancien encore. Il faut donc que l’on assume toutes ces décisions. C’est difficile pour chacun, y compris pour moi en tant que ministre de l’agriculture, mais c’est surtout difficile pour les betteraviers.
Mon rôle est de donner à ces derniers de la visibilité au travers du plan de soutien à la filière betterave-sucre, pour faire face à la crise de la jaunisse. Il convient également d’y associer les transformateurs, afin qu’ils bénéficient des betteraves nécessaires pour faire tourner leurs outils de production.
Nous allons y veiller dans les jours qui viennent. Nous sommes déjà l’œuvre. (M. François Patriat applaudit. – Marques de scepticisme sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour la réplique.
M. Pierre Cuypers. Monsieur le ministre, je m’attendais à votre réponse, mais il nous faut des solutions et des certitudes.
Au-delà de l’incompréhension et de l’impuissance française, c’est la colère, c’est le désarroi, c’est le feu dans nos territoires, c’est le saccage annoncé d’une filière, c’est la mise en péril de l’industrie du sucre, de l’alcool, du bioéthanol, du gel hydroalcoolique et de l’alimentation animale !
C’est le risque d’importations massives de sucre ou d’éthanol, notamment du Brésil, qui sont issus de cultures usant de produits interdits en France.
M. Michel Savin. Tout à fait !
M. Pierre Cuypers. C’est obérer notre souveraineté alimentaire et énergétique. La France devient le seul pays au monde où l’on trouve tous ces interdits ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Daniel Chasseing applaudit également.)
risque d’expulsion d’une iranienne par la préfecture de la savoie
M. le président. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Hussein Bourgi. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.
Monsieur le ministre, cela fait quatre mois que l’Iran connaît un mouvement citoyen inédit, afin de dénoncer le régime théocratique, ainsi que ses violations des droits fondamentaux et des libertés publiques. Comme vous le savez, ce mouvement est né au lendemain de la mort de Mahsa Amini, accusée de ne pas avoir porté correctement son voile.
Depuis lors, ce sont surtout des femmes, mais aussi des hommes qui sont à la pointe de cette mobilisation. En retour, la répression du régime est implacable : des milliers d’arrestations, 500 morts, des simulacres de procès et des exécutions sommaires.
Persécutés par le régime, des opposants fuient l’Iran et certains d’entre eux trouvent refuge en France. C’est le cas de Farideh, une Iranienne de 38 ans interpellée la semaine dernière par la police aux frontières à l’aéroport de Chambéry, alors qu’elle souhaitait se rendre au Royaume-Uni pour rejoindre son mari réfugié là-bas. Elle fut ensuite transférée au centre de rétention administrative de Toulouse et enfermée pendant quarante-huit heures, avant d’être libérée.
Pendant ce temps, la préfecture décidait d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF) et contactait les services consulaires iraniens en France, afin d’envisager une reconduite à la frontière (M. le ministre de l’intérieur fait un signe de dénégation.), comme c’est le cas et l’usage chaque fois qu’une obligation de quitter le territoire est prononcée.
Cela nous interpelle : la France, à l’instar des autres pays occidentaux, par la voix du Président de la République et de plusieurs ministres ici présents, n’a-t-elle pas condamné la répression en œuvre en Iran et apporté son soutien aux manifestants ?
Monsieur le ministre de l’intérieur, pouvez-vous nous préciser la doctrine de la France à l’égard des opposants au régime iranien présents dans notre pays, qu’ils soient en situation régulière ou irrégulière ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST. – Mme Catherine Morin-Desailly, MM. Gérard Longuet et Michel Savin applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer. Monsieur le sénateur, la citoyenne iranienne que vous évoquez a été interpellée quatre fois sur le sol national.
Lors de sa première interpellation, quand les services de la police ont constaté qu’elle n’était pas présente régulièrement sur le territoire national et qu’elle se disait iranienne, il a fallu évidemment vérifier son identité.
C’est à cette fin que nous consultons généralement les services consulaires de tous les pays, y compris évidemment ceux de l’Iran, avec qui nous avons encore des relations diplomatiques, l’objectif étant d’éviter que certaines personnes ne se fassent passer pour d’autres.
Une fois assurés que cette femme était bien iranienne, nous l’avons libérée du centre de rétention, ainsi que vous l’avez souligné. Cette décision a été prise par l’État et ne relève pas d’un jugement administratif, vous avez oublié de le rappeler. Par ailleurs, nous l’avons encouragée à prendre rendez-vous pour demander l’asile ou un titre de séjour dans notre pays, afin de régulariser sa situation. Elle ne l’a jamais fait.
Après ce premier contrôle, trois autres contrôles ont été réalisés par la police aux frontières. La République ne peut pas accepter quelqu’un qui se trouve irrégulièrement sur le territoire national. Cette personne ne veut pas rester en France, elle ne veut pas demander l’asile en France, elle ne veut pas de titre de séjour en France. Nous l’aurions accueillie, évidemment, mais, comme vous l’avez dit, elle souhaite rejoindre sa famille au Royaume-Uni.
Il ne s’agit donc pas pour la France de renvoyer vers l’Iran des ressortissants. Nous n’en renvoyons plus vers ce pays, d’ailleurs. Nous identifions les personnes, mais, si elles ne veulent pas rester sur notre sol, nous n’allons pas non plus leur donner des papiers de force !
Nous avons donc contacté le Royaume-Uni pour qu’elle puisse se rapprocher de sa famille. Nous n’avons pas encore reçu de réponse de la part du gouvernement britannique.
Quoi qu’il en soit, je puis vous assurer que nous n’expulserons personne vers l’Iran, surtout pas la femme que vous évoquez. Nous réinvitons celle-ci – si vous êtes en contact avec elle, je vous incite à appuyer notre demande auprès d’elle – à déposer un dossier de demande d’asile en France. Nous l’étudierons alors avec rapidité et humanité. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour la réplique.
M. Hussein Bourgi. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Comme vous le savez, le mari de cette femme se trouve au Royaume-Uni ; c’est là-bas qu’elle compte faire les démarches que vous évoquez.
L’histoire de notre pays est grande et belle. Elle nous donne chaque jour des motifs légitimes d’en tirer une fierté particulière. Parfois, elle connaît des zones d’ombre, par exemple lorsque nous n’avons pas su ou pas voulu apporter la protection nécessaire à ceux qui travaillaient pour l’armée française en Afghanistan : les fixeurs, les guides et les traducteurs.
Je vous demande – je m’adresse à vous en tant que ministre, mais je parle surtout à votre conscience – de veiller à ce que les cinquante Iraniens qui sont aujourd’hui sous le coup d’une OQTF ne soient pas renvoyés dans leur pays, car vous savez très bien le sort qui pourrait leur être réservé ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Éliane Assassi et M. Pierre Laurent applaudissent également.)
fermetures de classes
M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Olivier Paccaud. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Monsieur le ministre, dans le calendrier révolutionnaire nous sommes en pluviôse, c’est le mois de la pluie. De fait, les annonces de fermetures de classes pleuvent partout dans le pays (Sourires.) et, surtout, dans les zones rurales !
Malgré un budget de 59 milliards d’euros, en hausse de 6,5 %, on ne peut que déplorer les coupes claires de votre ministère et la suppression de 2 000 postes.
Certes, la démographie scolaire connaît une baisse continue. Certes, ce budget considérable permettra de procéder à la revalorisation indispensable de la rémunération des enseignants. Mais, alors que tous les classements internationaux et toutes les évaluations nationales alertent sur la fragilisation du niveau global des élèves, alors que vous vantez les vertus des effectifs réduits et des classes dédoublées, où est la cohérence pédagogique et où est la justice territoriale ?
Quel sens cela a-t-il de fermer une classe de 22 élèves parce qu’elle ne compterait pas assez d’enfants, alors que, à quelques kilomètres, voire parfois à quelques hectomètres, on se réjouit d’avoir 12 élèves dans une classe dédoublée pour plus d’efficacité ?
Je le rappelle, 70 % des élèves qui relèvent de l’éducation prioritaire se trouvent en zone rurale ou dans des quartiers qui ne sont pas concernés par cette politique. Monsieur le ministre, ma question est simple : la ruralité est-elle devenue la variable d’ajustement de vos politiques éducatives ? (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
M. Pap Ndiaye, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le sénateur Paccaud, comme vous l’avez souligné, la démographie scolaire connaît une baisse importante depuis plusieurs années. Cette diminution va s’accentuer au rythme de 90 000 à 100 000 élèves de moins chaque année. Nous prévoyons donc une baisse d’environ 500 000 élèves d’ici à la fin du quinquennat.
Dans votre département de l’Oise, par exemple, ce sont 1 367 élèves que l’on va compter en moins à la prochaine rentrée.
Dans ce contexte de baisse démographique, le taux d’encadrement, c’est-à-dire le ratio entre les professeurs et les élèves, s’améliore depuis plusieurs années et va continuer à progresser. Dans l’Oise, il y a en moyenne 21,5 élèves par classe. Cette moyenne va se bonifier légèrement l’année prochaine.
Mme Michelle Meunier. Ils ont de la chance !
M. Pap Ndiaye, ministre. Nous avons créé ces dernières années 102 postes de professeurs dans l’Oise, pour une diminution de 6 631 élèves.
Dans le budget pour 2023, nous avons décidé, comme vous l’avez rappelé, de donner la priorité à la revalorisation du salaire des professeurs. En effet, à quoi sert-il de créer des postes si nous ne pouvons pas les pourvoir ? La question est d’abord de doter les postes que nous créons, monsieur le sénateur, plutôt que de chercher à les multiplier sans que cela ait un effet sur le terrain.
Quant aux fermetures que vous évoquez, nous ne les décidons pas de manière arithmétique. Bien au contraire, dans chaque département, les directeurs académiques des services de l’éducation nationale (Dasen) préparent la rentrée scolaire pour 2023 avec les élus locaux.
Ils travaillent notamment avec eux à l’identification des situations sensibles – je suis moi-même particulièrement attaché à la situation des zones et des écoles rurales –, de manière à pouvoir procéder à des ajustements en juin prochain, puis à la fin du mois d’août. À ce stade, rien n’est définitivement arrêté, et je serai heureux d’en reparler avec vous.
M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour la réplique.
M. Olivier Paccaud. Monsieur le ministre, je vous remercie d’avoir évoqué, à la toute fin de votre propos, la ruralité, qui demeure la grande oubliée des politiques publiques ces dernières années, ce qui ne va pas sans poser de nombreux problèmes.
En 1947, Jean-François Gravier publiait Paris et le désert français. Depuis 2017, Emmanuel Macron décline « les Métropoles et le désert français ». (M. le ministre le conteste.) La France, c’est 101 départements, 35 000 communes et 68 millions d’habitants. La République, c’est aussi et surtout l’égalité des droits et des chances, partout et pour tous ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
réglementation européenne, produits dangereux pour la santé et traçabilité des aliments
M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)