Mme le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour présenter le sous-amendement n° 818.
M. Olivier Jacquin. Cet amendement vise à supprimer l’article 6 approuvant, pour les quatre années à venir, de 2023 à 2026, les effets sur les recettes et les dépenses de la sécurité sociale de la réforme des retraites.
Les bases de ce travail ne sont pas sincères. Vous omettez des surcoûts : par exemple, 1,3 milliard d’euros en allocations de chômage – je pourrais citer d’autres exemples.
Par ailleurs, vous refusez l’ensemble de nos propositions. Pourtant, nous en avons fait beaucoup. Par exemple, supprimer des exonérations inefficaces ? C’est non ! Surcotisation sur les hauts salaires ? C’est encore non ! Des prélèvements temporaires sur les superprofits ? La majorité et le Gouvernement ont encore dit non.
Monsieur le ministre, vous dites écouter les Français. Or ils sont dans la rue, ils se sont levés tôt comme tous les jours et ils ne veulent pas de cette réforme. Supprimez cet article et retirez ce projet de loi !
Mme le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour présenter l’amendement n° 871.
M. Jérôme Durain. Mes chers collègues, je vais vous présenter un amendement de suppression de cet article.
M. Vincent Segouin. Quelle surprise !
M. Jérôme Durain. En effet, je juge cette réforme injuste et cet article bien dangereux.
Au fond, monsieur Bas, ce n’est pas la couleur politique de cette réforme qui importe, c’est ce qu’elle produit dans la vie des gens.
Si je vous présente cet amendement de suppression, c’est parce qu’on me l’a demandé. J’ai en effet reçu des interpellations, des courriers, des e-mails.
J’ai notamment reçu une lettre de Marie-Claude (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.), 56 ans, qui habite à Remigny. Comme beaucoup de nos concitoyens, elle a perdu goût à la politique. Elle m’a fait part de ses angoisses quotidiennes, de sa colère, de son mécontentement envers le pouvoir politique et la classe politique, mais aussi de ses craintes et de ses peurs.
Marie-Claude se lève tous les jours à quatre heures, et je ne suis pas certain qu’elle ait lu Le Droit à la paresse. Elle rentre chez elle à dix-neuf heures depuis l’âge de 24 ans. Elle travaille à la Société Générale, où elle en a encore pour au moins dix ans. Elle en a marre – ce sont ses mots – de voir que certains s’enrichissent pendant que d’autres se serrent la ceinture à la fin du mois.
Marie-Claude écrit cette lettre sans avoir l’espoir d’être entendue, ni même lue. Marie-Claude est fatiguée, épuisée. Son corps ne tient plus et elle espère quitter son travail plus tôt et avoir une retraite et une fin de vie décentes. Marie-Claude m’a demandé de me battre contre ce projet de loi.
J’ai aussi reçu une lettre d’Isabelle qui habite à Laizé. Elle me demande, elle aussi, de bien vouloir m’opposer à un texte de loi visant à reporter l’âge de la retraite pour les générations de femmes comme la sienne qui ont commencé à travailler tôt et qui ont eu des enfants travaillant et cotisant aujourd’hui, permettant ainsi que nos retraites par répartition se pérennisent.
Aussi, je ne sais pas si Marie-Claude et Isabelle votent à gauche ou à droite ; je ne sais même pas si elles votent. En tout cas, c’est pour elles que je vous demande de supprimer cet article. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour présenter l’amendement n° 906.
M. Victorin Lurel. Monsieur le ministre, nous demandons la suppression de cet article, parce que nous ne croyons pas du tout à la crédibilité et à la sincérité de vos prévisions. Même si la commission a intégré une compensation intégrale pour l’augmentation d’un point de la CNRACL, nous n’y croyons pas.
Nous ne croyons pas à vos prévisions de PIB en valeur réelle. Nous ne croyons pas à votre prévision d’inflation. Nous ne croyons pas à la revalorisation de la masse salariale du secteur privé. Nous ne croyons pas à cette période de prévisions de recettes et d’objectifs de dépenses, sur pratiquement cinq ans, ce qui correspond à peu près à la période couverte par la loi de programmation des finances publiques.
Vous ne bougez rien, si ce n’est à la marge. Il est assez curieux de voir une réforme dotée d’un périmètre contraint, avec une entrée en vigueur au 1er septembre uniquement pour éviter la censure du Conseil constitutionnel – et non sur l’exercice en cours. Ce ne sont là que des astuces.
Si je devais voir la chose du petit canton de l’univers que sont les outre-mer, vous auriez tout à reprendre ! Je pense, par exemple, aux critères de pénibilité : quand 14 % à 15 % des Français de l’Hexagone partent sur la base de ces critères, ils ne sont que 1 % en Guadeloupe, 1 % en Martinique et 2 % à La Réunion – je ne parle même pas des autres territoires. Il y aurait tout à revoir.
C’est donc un exercice d’insincérité que vous nous soumettez ici. Il conviendrait, hélas, si vous étiez plus lucide, de censurer cet exercice de mythification.
Mme le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour présenter l’amendement n° 934.
Mme Viviane Artigalas. Cet amendement vise à supprimer l’article 6, relatif aux effets des recettes et des dépenses de la réforme des retraites sur le régime de la sécurité sociale.
Pourquoi proposons-nous cette suppression ?
Sur la question des recettes, nous vous avons montré qu’il y avait bien d’autres solutions que celle qui consiste à reculer l’âge de la retraite de deux ans.
Ce report aura bien moins d’effets que d’autres solutions que nous vous avons proposées. Et sur les dépenses, les quelques améliorations que vous nous proposez pour compenser la brutalité de ce projet de loi ne sont pas à la hauteur des enjeux, particulièrement pour les femmes les plus précaires et les seniors.
En outre, nous vous l’avons déjà dit, aborder une réforme du système de retraites uniquement sous un aspect financier n’est pas acceptable. C’est de la qualité de vie au travail qu’il est question, et de l’arrivée à la retraite en meilleure santé possible.
C’est cela qu’attendent nos concitoyens qui sont dans la rue aujourd’hui pour refuser ce report de l’âge de la retraite à 64 ans, particulièrement les 20 000 manifestants à Tarbes, dans mon département des Hautes-Pyrénées.
Quand on connaît les difficultés actuelles de nombreux Français à boucler leurs fins de mois, qu’ils acceptent de perdre de leur salaire pour faire grève montre à quel point ils ne veulent pas de cette réforme !
Mme le président. La parole est à M. Lucien Stanzione, pour présenter l’amendement n° 1024.
M. Lucien Stanzione. Cet amendement a pour objet de supprimer l’article 6, qui approuve, pour la période à venir, les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses de sécurité sociale.
Pour la branche des retraites, les économies escomptées de la réforme s’élèvent à 10,3 milliards d’euros à l’horizon de 2027 et à 17,7 milliards d’euros à l’horizon de 2030. Ces chiffres sont une énième contre-vérité !
Que constate-t-on ? Hausse des dépenses d’assurance chômage, augmentation des arrêts maladie, hausse des prestations de solidarité, et j’en passe… Voilà ce que ces chiffres passent sous silence : des surcoûts budgétaires négatifs induits par votre réforme injuste et injustifiée, des surcoûts qui viendront minorer les gains attendus par le Gouvernement.
Le vrai montant des économies à l’horizon de dix ans est de 2,8 milliards d’euros, d’après l’OFCE. Une économie dérisoire au vu du prix payé par les Français, ces salariés qui se lèvent tous les matins, monsieur le ministre, pour aller au travail, et que nous sommes censés défendre et représenter ici !
Ils ne veulent pas de deux ans de plus de ce régime. D’ailleurs, savez-vous de quoi il s’agit ? Nous pouvons nous poser la question.
Parce que nous ne pouvons tolérer l’insincérité de ces chiffres exposés, je vous propose de supprimer cet article et, par la même occasion, de retirer cette réforme, rejetée par des millions de Français, qui nous le disent aujourd’hui.
Mme le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour présenter l’amendement n° 1093.
M. Jean-Claude Tissot. Le présent amendement vise à supprimer cet article 6, qui approuve, pour les quatre années à venir – de 2023 à 2026 –, les effets sur les recettes et les dépenses de la sécurité sociale de la réforme des retraites.
Vous l’avez compris, avec mes collègues du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, je considère tout simplement que les prévisions présentées sont insincères, tout simplement parce que la trajectoire définie ne prend pas en compte plusieurs surcoûts négatifs pour le budget de la sécurité sociale, que ce soit la hausse des dépenses d’assurance chômage – évaluées à 1,3 milliard d’euros –, l’augmentation prévisible des arrêts maladie sur les seniors – au minimum 1 milliard d’euros – et les logiques hausses des prestations de solidarité, estimées à 800 millions d’euros.
Quand on voit les concessions faites à la droite sur certains dispositifs et leur impact sur les prévisions budgétaires, on peut réellement se demander quelle est l’utilité de cette réforme et s’interroger sur ses externalités non prises en compte dans les prévisions budgétaires de l’article 6.
L’une me paraît particulièrement importante, qui ne doit, bien sûr, pas être uniquement prise en compte sous l’angle financier : je veux parler de la hausse du nombre d’accidents du travail, lequel risque fortement de s’aggraver avec le report de l’âge de départ à la retraite.
En novembre dernier, une étude de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) a recensé 783 600 accidents du travail en 2019, soit plus de 2 500 par jour ouvrable.
En rapportant le nombre de décès à celui des travailleurs, nous obtenions un ratio de 3,5 accidents mortels pour 100 000 salariés, ce qui représente – je sais que vous aimez comparer les chiffres, monsieur le ministre – le double de la moyenne européenne – 1,7 % –, et un taux bien plus élevé que de nombreux autres pays européens – 0,8 % en Allemagne, par exemple.
Cette même étude a révélé que les accidents étaient moins fréquents – c’est vrai pour les salariés âgés –, mais qu’ils étaient souvent bien plus graves : 780 salariés en sont morts en 2019.
Par ailleurs, sur la période 2001-2019, on a malheureusement assisté à une hausse de 110 % des accidents de travail pour les femmes, particulièrement dans les secteurs d’activité de service.
Ne pas tenir compte du risque de hausse des accidents du travail ni de l’augmentation de leur gravité dans les prévisions budgétaires de la sécurité sociale prouve, à lui seul, l’insincérité de cet article.
Mes chers collègues, nous vous proposons donc, en toute logique, de le supprimer.
Mme le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour présenter l’amendement n° 1160 rectifié bis.
Mme Monique Lubin. Pour la branche des retraites, les économies espérées de la réforme – de 10,3 milliards d’euros à l’horizon de 2027 et de 17,7 milliards à l’horizon de 2030 – passent sous silence une multitude d’impacts budgétaires négatifs.
Si l’on fait la somme des dépenses induites – chômage, maladie, etc. – et des effets macroéconomiques, l’économie tombe à 2,8 milliards à l’horizon de dix ans, d’après l’OFCE. À quoi va donc servir cette réforme ?
Comme l’a rappelé M. le rapporteur hier, la précédente réforme amène, de toute façon, ceux qui ont commencé à travailler à 22 ans à travailler jusqu’à 65 ans. À quoi va donc encore servir cette réforme, si ce n’est, comme nous le démontrons depuis le début, à toucher ceux qui n’étaient pas encore impactés par la dernière réforme ?
Enfin, mes chers collègues, nous recevons tous ici des courriels de citoyens concernés. Dès lors, je trouve les réactions de certains d’entre vous aux témoignages que nous évoquons quelque peu curieuses, et même, pour tout vous dire, fort peu respectueuses. J’espère qu’ils vous regardent !
Mme le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour présenter l’amendement n° 1184.
Mme Sylvie Robert. À l’instar de mon collègue Mickaël Vallet, je saisis l’occasion pour adresser à M. le ministre le salut des 40 000 manifestants présents à Rennes aujourd’hui. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
Cet amendement vise à supprimer l’article 6. De fait, comment pourrions-nous approuver les conséquences de cette réforme sur les recettes et les dépenses de la sécurité sociale, alors que nous ne sommes d’accord ni sur le constat, ni sur ses finalités, ni sur ses orientations, ni sur ses soubassements ? C’est impossible. (Brouhaha.)
Excusez-moi, madame la présidente, mais je suis dérangée par le bruit qui règne dans l’hémicycle…
Mme le président. Mes chers collègues, veuillez écouter les orateurs.
Mme Sylvie Robert. Je vous remercie beaucoup, madame la présidente.
Nous continuerons de marteler que cette réforme purement paramétrique et dictée par des considérations financières court-termistes, mais modifiant structurellement les conditions d’accès à la retraite, n’est ni nécessaire ni juste. C’est une solution simpliste, qui punit en premier lieu les plus vulnérables ; nous l’avons dit et répété.
Rappelons également que l’hypothèse de gains de productivité à long terme adoptée par le Gouvernement est fixée à 1 %. Elle est pessimiste par rapport aux projections qu’il adoptait précédemment, mais aussi par rapport à celles de la Commission européenne – 1,3 %. Or, avec une hausse de 1,3 %, l’équilibre est quasiment atteint en 2070.
Autre effet, peu abordé, sur les comptes sociaux : le coût de la réforme. En effet, loin de procéder uniquement à des économies, elle entraîne un coût social qui n’est pas négligeable, principalement pour deux motifs.
Premièrement, la Drees a estimé, en janvier 2022, qu’un report de deux ans de l’âge de départ à la retraite entraînait un surcoût, pour l’ensemble des prestations, hors assurance chômage, de l’ordre de 3,6 milliards d’euros.
Deuxièmement, l’Unédic a constaté un effet haussier de la réforme de 2010 sur le chômage et en déduit d’importantes dépenses supplémentaires, chiffrées à 1,3 million d’euros. Autrement dit, la réforme entraîne 5 milliards d’euros de dépenses sociales, soit près d’un tiers des économies prévues.
Cela démontre que la logique paramétrique qui est la vôtre n’est ni efficace ni pragmatique, car elle n’est pas adaptée aux problèmes posés.
Des recettes, pourtant, nous en avons ! Vous en avez eu la preuve toute la journée d’hier et la nuit dernière. Mais pour les mettre en œuvre, vous devez accepter de sortir de votre idéologie.
Mme le président. Votre temps de parole est écoulé, ma chère collègue.
Je demande à chacun de bien respecter son temps de parole.
La parole est à M. Serge Mérillou, pour présenter l’amendement n° 1215.
M. Serge Mérillou. Cet amendement, vous vous en doutez, a pour objet de supprimer l’article 6, approuvant, pour les quatre années à venir, les effets sur les recettes et les dépenses de la sécurité sociale de la réforme des retraites.
Pour la branche des retraites – cela a été dit, mais je crois que cela vaut la peine d’être répété, pour que cela soit entendu –, les économies espérées de la réforme sont, selon vos chiffres, de 10,3 milliards d’euros à l’horizon de 2027 et de 17,7 milliards d’euros à l’horizon de 2030.
Cependant, ces chiffres sont discutables, car ils ne prennent pas en compte les impacts budgétaires négatifs de votre réforme. On en a cité quelques-uns, comme la hausse des dépenses de chômage ou la hausse des coûts liés aux accidents du travail. Au demeurant, ce ne sont pas que des coûts en euros : ce sont aussi des coûts humains pour des travailleurs qui, passé 62 ans, sont fatigués – je pense à ceux qui exercent les métiers les plus pénibles.
La réforme aura aussi des effets sur le RSA, qui est à la charge des départements et qui n’est pas comptabilisé.
Si l’on fait la somme des dépenses induites que je viens d’indiquer et des effets macroéconomiques – contraction des salaires, baisse de l’activité, etc. –, l’économie tombe à 2,8 milliards d’euros à l’horizon de dix ans d’après l’OFCE.
Parce que nous considérons les chiffres exposés dans cet article comme insincères, nous proposons de le supprimer. Tant que nous y sommes, supprimons également la réforme. Nous gagnerons du temps ! (Sourires sur les travées du groupe SER.)
Mme le président. L’amendement n° 1252 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° 1324.
Mme Angèle Préville. Cet amendement vise à supprimer l’article 6, qui illustre encore une fois l’objectif réel de cette réforme : mettre en ordre les finances publiques sur le dos des salariés.
Pour la branche des retraites, les économies que vous espérez seraient de 10,3 milliards d’euros à l’horizon de 2027 et de 17,7 milliards d’euros à l’horizon de 2030. Ces prévisions passent sous silence une multitude d’impacts budgétaires négatifs.
Il y a d’autres pistes pour financer notre système de retraite : supprimer les exonérations de cotisations employeurs sur les salaires supérieurs à 2,5 Smic, ralentir le remboursement de la dette sociale, revenir sur la baisse de la CVAE et une multitude de propositions que nous vous avons formulées hier.
Ces propositions étaient non pas tant un exercice de créativité, monsieur le ministre, que des pistes sérieuses, crédibles, justes. D’ailleurs, nombre d’économistes les ont validées.
Cette obsession de la seule mesure d’âge montre, de nouveau, que votre réforme n’est que gestionnaire et, au-delà, profondément idéologique. Les Français rejettent majoritairement votre réforme, contre laquelle ils manifestent en ce moment en masse, monsieur le ministre.
Des collectifs pour une retraite digne se montent de manière tout à fait inédite, comme dans mon département du Lot, où se sont regroupés des artisans, des artistes, des commerçants, des paysans et des professions libérales. Ensemble, ils manifestent aujourd’hui.
Actuellement, sur 15,5 millions de retraités salariés et non salariés, 5,7 millions, soit 36 %, vivent en dessous du seuil de pauvreté. Le problème restera entier après votre réforme.
Les Français revendiquent un minimum garanti décent – j’y insiste – après une vie de travail. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
Mme le président. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour présenter l’amendement n° 1381.
M. Hussein Bourgi. Monsieur le ministre, nous ne pouvons pas approuver la trajectoire pour les quatre prochaines années que le Gouvernement nous présente, et cela pour deux raisons.
Premièrement, le rapport que vous présentez manque de sincérité. Depuis le début du débat, nous vous demandons inlassablement, de manière répétitive, d’avoir accès à l’avis du Conseil d’État. Vous ne nous le communiquez pas.
Votre rapport manque de crédibilité, parce qu’il fait fi des aléas conjoncturels qui pourraient survenir dans les prochaines années. Il fait aussi fi des aléas structurels qui peuvent aussi intervenir et des coûts cachés de votre réforme. Dès lors, l’objectif de 18 milliards d’euros que vous annoncez s’apparente davantage à un mirage ou à un mythe.
Deuxièmement, ce sujet est trop sérieux pour l’aborder avec autant de légèreté. Tout à l’heure, monsieur le ministre, vous avez cru bon de vous moquer des grévistes et des manifestants. Vous avez eu pour eux des propos cinglants, en cherchant à les opposer aux Français qui se lèvent tôt le matin pour travailler.
Savez-vous d’où viennent, dans mon département de l’Hérault, les manifestants les plus nombreux ? Ce sont les éboueurs de la société Nicollin, à Montpellier. Ce sont les chauffeurs de car qui se réveillent le matin pour faire le ramassage scolaire. Ce sont les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (Atsem) qui travaillent dans les écoles.
Monsieur le ministre, ce sont eux qui constituent le gros des bataillons ! Il vous suffit de lire Le Midi Libre ou de regarder la télévision pour trouver les témoignages de ces hommes et de ces femmes qui se réveillent tôt le matin, qui travaillent tôt, qui triment et qui souffrent ! Ce sont ceux-là que vous stigmatisez.
Si la personne qui se réveille tôt pour nettoyer votre bureau chaque matin n’ose pas vous dire ce qu’elle pense de votre réforme, les millions de Français qui défilent dans la rue, eux, vous le disent ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe GEST.)
Mme le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour présenter l’amendement n° 1444.
M. Éric Kerrouche. Selon une légende historique, lors de la visite de Catherine II de Russie en Crimée en 1787, des façades en carton-pâte ont été construites, afin de masquer la pauvreté des villages par le ministre Potemkine. Votre réforme, monsieur le ministre, est une réforme Potemkine, avec une belle façade et rien derrière.
Il n’y a rien derrière, parce que vous oubliez sans cesse les coûts cachés. Cela vous a été répété maintes fois. La Drees a estimé, en janvier 2022, qu’un report de deux ans de l’âge de départ à la retraite entraînerait un surcoût de l’ensemble des prestations de 3,6 milliards d’euros, soit un quart des économies escomptées.
Derrière ces chiffres, monsieur le ministre, votre réforme fait des perdants : les femmes les plus précaires et les carrières hachées. Il y a ces gens que vous comptez écraser en douceur. Il y a aussi votre fermeture totale devant les solutions qui vous ont été proposées. Il y a, enfin, votre volonté systématique et maniaque de baisser les recettes publiques et de mettre à genoux notre État social.
Nous connaissons la philosophie du Gouvernement. Cette philosophie, c’est celle de Bertolt Brecht : « Puisque le peuple vote contre le Gouvernement, il faut dissoudre le peuple. » Croyez-moi, monsieur le ministre, beaucoup ont essayé ; aucun n’a réussi ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe GEST.)
Mme le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour présenter l’amendement n° 1550.
Mme Marie-Pierre Monier. Cet amendement vise à supprimer l’article 6, qui approuve, pour la période 2023-2026, les effets de la réforme des retraites sur les recettes et les dépenses de la sécurité sociale.
Il apparaît que ces prévisions ne prennent pas en compte les coûts supplémentaires occasionnés par cette réforme. Ainsi, une étude du Conservatoire national des arts et métiers souligne que la fréquence des arrêts maladie augmenterait de 1,7 point après la réforme, en raison de la dégradation de l’état de santé lié à l’âge et de l’allongement de la vie active.
En ce qui concerne les prestations de solidarité et les indemnités liées au chômage, la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques estime qu’un décalage de deux ans de l’âge minimal de la retraite se traduira par un surcroît de 30 000 allocataires du RSA et de 30 000 allocataires de l’allocation de solidarité spécifique que perçoivent certains chômeurs de longue durée non indemnisés par l’assurance chômage.
La Dares estime, quant à elle, à 84 000 le surcroît de personnes au chômage indemnisées en cas de décalage de la retraite de deux ans.
Cela fait donc déjà 144 000 personnes supplémentaires qui seraient maintenues en précarité du fait du décalage de la retraite ! Il faudrait y ajouter les personnes ne pouvant bénéficier d’aucune prestation sociale.
Certes, ces prévisions mériteraient d’être actualisées et affinées pour prendre en compte la réforme de l’assurance chômage. Quoi qu’il en soit, elles auraient mérité d’être prises en compte, sous une forme ou une autre, dans l’étude d’impact de la réforme, qui reste silencieuse sur le sujet.
Ces différents éléments nous autorisent à mettre en doute le niveau des recettes et des dépenses de la sécurité sociale prévu par le présent article et, plus globalement, la solidité de ce projet de réforme, qui dénote, par bien des points, un manque certain de préparation.
Mme le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour présenter l’amendement n° 1630.
Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement est aussi un amendement de suppression de l’article 6, qui prévoit, en particulier, une augmentation des cotisations à la CNRACL pour les collectivités locales afin d’atteindre l’équilibre.
Cette augmentation est dénoncée par l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) : après le contrat de Cahors et après le pacte de confiance de cette année, voilà un autre coup porté aux collectivités locales, alors que celles-ci doivent faire face à l’inflation importante et même à une augmentation galopante du coût de l’énergie.
De façon parfaitement inéquitable, dans le privé, cette augmentation sera compensée par une diminution des cotisations de la branche AT-MP, qui, certes, est en excédent – elle a déjà, cette année, reversé 1,2 milliard d’euros à la branche générale dans le PLFSS.
D’où vient cet excédent de la branche AT-MP ? Il s’agit simplement d’une sous-déclaration des accidents du travail. Il vaudrait mieux utiliser cet excédent pour faire davantage de prévention ! Encore faudrait-il, d’ailleurs, qu’il y ait suffisamment de médecins du travail…
Depuis hier, vous n’avez retenu aucune de nos propositions d’augmentation de recettes. La seule recette nouvelle que vous avez imaginée consiste à mettre à contribution les collectivités locales, déjà saignées à blanc. C’est profondément injuste.
Je veux moi aussi rappeler que, par ailleurs, cette réforme, comme celle de 2010, va entraîner des dépenses nouvelles. Le recul de deux ans provoquera chômage, affections de longue durée (ALD), invalidité et mise au RSA. Mais bien sûr, le RSA, ce sont les départements qui le paient, donc cela ne vous trouble guère !
Il y aura 90 000 chômeurs de plus selon la Dares, 300 000 personnes selon l’OFCE. Le résultat net, c’est que le gain de votre réforme ne sera que de 2,8 milliards d’euros.
Dès lors, supprimez cet article et, dans la foulée, supprimez la réforme !
Mme le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour présenter l’amendement n° 1660.
Mme Michelle Meunier. L’amendement que je présente vise à supprimer l’article 6 de ce projet de loi, qui approuve le rapport annexe sur les dépenses et les recettes de la sécurité sociale pour quatre exercices.
Pourquoi voulez-vous que nous votions cet article 6 ? Les perspectives que vous dessinez pour la sécurité sociale sont inacceptables – je vous le dis, monsieur le ministre, et je le dis aussi à mes collègues qui siègent à droite de cet hémicycle. Elles sont inacceptables, car elles se fondent globalement sur un fort déséquilibre de notre contrat social.
Vous proposez, par le report de l’âge du départ à la retraite, de travailler plus pour vivre moins. C’est bien cela que les Nantaises et les Nantais ont rejeté en masse, ce matin. Ils étaient plus de 75 000 dans la rue ! (Bravo ! sur les travées du groupe SER.) Elles et ils ne tolèrent pas que vous leur preniez les deux meilleures années de la vie qui reste.
Je pense à Chantal, Marine et Coline (Marques d’ironie sur les travées du groupe Les Républicains.), âgées de 61 ans à 8 ans, trois générations, de grand-mère en petite fille, qui défilaient ce matin pour défendre le droit à une vie meilleure.
Chantal est Atsem. Chers collègues, vous représentez-vous ce que signifient une ou deux années de plus à travailler auprès des tout-petits, à se pencher et à se baisser pour être à leur hauteur ?
Martine, elle, est assistante de service social. On répète à qui veut l’entendre qu’il s’agit d’un métier difficile, qui manque d’attractivité. Comment motiver ces agents publics à envisager des carrières éprouvantes, au plus près de la dure réalité sociale, à un âge de la vie où la fatigue se fait sentir ? (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)
Entendez, écoutez cette clameur ! Permettons à Chantal de se reposer et à Coline de passer plus de temps avec sa grand-mère.