Et pourtant, le 9 février dernier, le groupe socialiste de l’Assemblée nationale avait proposé le repas à 1 euro pour tous les étudiants. La droite et la majorité présidentielle ont décidé de voter contre cette mesure, prétextant préférer réserver ce dispositif à « ceux qui en ont le plus besoin ».
N’y a-t-il pas une contradiction flagrante et incompréhensible entre cette proposition de loi, qui vise à faciliter l’accès de tous les étudiants à une offre de restauration à tarif modéré et votre rejet du repas à 1 euro pour tous ?
S’il est difficile de voter contre un tel texte, je m’abstiendrai, tout en émettant le souhait qu’un projet de loi plus complet et plus ambitieux voie le jour. Nos étudiants le méritent.
Pour conclure, j’aimerais citer le communard Eugène Varlin : « Tant qu’un homme pourra mourir de faim à la porte d’un palais où tout regorge, il n’y aura rien de stable dans les institutions humaines. » (Applaudissements sur des travées du groupe SER. – Mme Monique de Marco applaudit également.)
Mme le président. La parole est à M. Bernard Fialaire.
M. Bernard Fialaire. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, cette proposition de loi a le mérite de mettre le doigt sur un véritable problème, celui de la précarité étudiante.
Plus qu’une nécessité, agir est un devoir. C’est du reste pourquoi je salue vos récentes annonces à destination des étudiants, madame la ministre.
Si la crise sanitaire a aggravé cette précarité et accentué les inégalités au sein d’une population étudiante très hétérogène, elle a aussi révélé les failles structurelles de la restauration universitaire : un maillage territorial de l’offre qui est insuffisant et exclut les étudiants poursuivant leurs études sur des sites « oubliés », des délais d’attente décourageants, des plages d’ouverture inadaptées et, enfin, un modèle économique intrinsèquement déséquilibré.
Voilà autant de raisons qui légitiment notre débat de ce jour, lequel doit constituer un premier pas vers un système français de restauration étudiante plus égalitaire, plus juste et plus vertueux.
En première lecture, nos débats se sont concentrés sur un problème identifié comme essentiel : l’inégalité d’accès des étudiants au service public de la restauration universitaire selon l’endroit où ils se trouvent sur le territoire de la République.
Cette anomalie rappelle celle que Céline Boulay-Espéronnier et moi-même avions mise en lumière dans notre rapport d’information sur la contribution de vie étudiante et de campus (CVEC). Cette dernière, qui finance les Crous à hauteur de 40 millions d’euros chaque année, ne permet pas à certains étudiants, qui y sont pourtant assujettis, de bénéficier des services et des actions qu’elle finance.
L’Assemblée nationale a modifié les modalités de mise en œuvre du dispositif.
Il n’est plus question de ticket-restaurant, mais d’une aide financière, ainsi que d’un conventionnement. L’objectif est de soutenir l’action des Crous, en confortant et en encourageant la faculté dont ils disposent de conclure des conventions avec des acteurs publics, tels que les collectivités territoriales, des acteurs privés et des acteurs sociaux.
Parallèlement, l’aide financière versée aux étudiants n’ayant pas accès aux structures de restauration universitaire pourra prendre plusieurs formes et s’adapter aux besoins du terrain et aux solutions déjà en vigueur.
Le groupe RDSE comprend le souhait de la commission d’en rester à la rédaction issue des travaux de la chambre basse, et de ne pas prolonger une navette à l’issue incertaine, mais on ne peut occulter le fait que sa réécriture par l’Assemblée nationale a entériné un changement de logique et introduit une complexité inquiétante.
Il ne faudrait pas que ce nouveau dispositif soit source d’inefficacité, qu’il manque de clarté et que sa mise en œuvre soit insuffisamment encadrée, notamment parce que l’aide financière et la politique de conventionnement du réseau des œuvres universitaires et scolaires restent à instruire, à organiser et à administrer par des services supplémentaires.
N’hésitez pas, madame la ministre, à privilégier l’échelon local pour la mise en place de cette nouvelle aide financière, à déléguer cette compétence aux métropoles et aux régions, qui sont déjà chargées d’une partie de l’enseignement supérieur au travers des BTS et des classes préparatoires.
Aujourd’hui, les conventionnements avec les Crous sont encore insuffisants. Avec ce dispositif, nous avons une chance de renouer le lien multigénérationnel entre les étudiants des zones blanches et certains établissements, comme les lycées ou les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad).
Par ailleurs, ce dispositif territorialisé ne permet pas de résoudre certains problèmes structurels. Je pense aux délais d’attente décourageant les étudiants, aux plages d’ouverture journalière, hebdomadaire et annuelle inadaptées à leurs besoins.
Nombre d’étudiants, pourtant présents sur des sites disposant de restaurants universitaires, n’ont pas la possibilité de consommer une restauration à tarif modéré.
Si l’uniformisation du repas à 1 euro n’est pas forcément synonyme d’égalité des droits,…
Mme le président. Il faut conclure, mon cher collègue !
M. Bernard Fialaire. … la territorialisation du dispositif ne permet pas de résoudre toutes les iniquités en matière d’accès et de droit à une restauration à tarif modéré.
Le groupe RDSE votera cette proposition de loi. Cependant, ce vote se veut vigilant ! (Applaudissements au banc des commissions.)
M. Pierre-Antoine Levi. Très bien !
Mme le président. La parole est à M. Bruno Belin. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu’au banc des commissions.)
M. Bruno Belin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens d’emblée, au nom du groupe Les Républicains, à apporter mon soutien à la proposition de loi que nous examinons cet après-midi et à remercier le président Laurent Lafon, le rapporteur Jean Hingray et Pierre-Antoine Levi pour le travail accompli.
Madame la ministre, notre éminent collègue Pierre Ouzoulias a commencé son propos en dressant un état des lieux des universités. Il a raison : il convient de tenir compte du contexte, du quotidien et de la réalité.
D’abord, les étudiants entrent à l’université essorés par Parcoursup ! Certains d’entre nous, en tant que parents, l’ont expérimenté et peuvent décrire toutes les difficultés que cela engendre.
Ensuite, malgré votre plan en faveur des universités, et même si nous faisons crédit à vos bonnes intentions, madame la ministre, ils sont confrontés à un cadre d’études à revoir. Je repose la question : quel est l’état actuel des universités en France ?
Je me souviens, tout comme vous, de l’université Paris-Sud telle qu’elle était à une autre époque : admettez qu’il était grand temps de raser la faculté de Châtenay-Malabry !
Si vous voulez que les étudiants aient envie d’étudier, il faut leur donner et le cadre et les moyens nécessaires – parce que les moyens des universités, eux aussi, mériteraient que l’on engage un grand débat.
Mon collègue Yves Bouloux et moi-même pourrions aussi vous parler de la faculté de médecine de Poitiers : si elle a été reconstruite à l’époque, c’est uniquement par la volonté politique du président Monory et grâce aux fonds du conseil général.
Nous devons absolument nous préoccuper de l’avenir des universités, car c’est là que les étudiants étudient.
Après avoir décrit le cadre, évoquons le contexte, celui d’une sortie de crise sanitaire, qui a eu pour principale conséquence l’isolement de tout le monde étudiant, et celui d’une inflation qui pèse à tous les étages de la vie étudiante, pas uniquement au niveau de l’alimentation.
Le résultat est là : une précarité au quotidien, alimentaire évidemment, mais aussi en termes de logement et de déplacements. Une bonne moitié des étudiants – vous connaissez les chiffres comme moi – sont obligés de travailler pour payer leurs études.
À côté de ce contexte et de ce quotidien défavorables, il y a une autre réalité – pardonnez-moi de prendre quelques secondes pour insister sur ce point –, on observe également une disparité et même – le mot est fort – une « discrimination » territoriale.
M. Pierre Ouzoulias. Très bien !
M. Bruno Belin. Vous n’avez pas les mêmes chances et le même accès aux mesures que vous avez présentées, madame la ministre, que vous soyez issu d’un milieu métropolitain, urbain ou rural.
Le dispositif que nous examinons aujourd’hui est utile – il fallait y penser et c’est pourquoi nous lui apportons le soutien le plus total –, mais il serait judicieux de l’élargir à d’autres domaines.
Je pense en particulier aux transports. On parle beaucoup de décarbonation et de mobilités, mais je peux vous assurer qu’un étudiant qui se trouve dans un territoire rural isolé est pénalisé et subit davantage de contraintes que les autres aujourd’hui.
L’avenir de ce pays – c’est valable depuis plusieurs siècles et cela le restera longtemps – dépend évidemment du traitement que l’on réservera à nos étudiants ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi qu’au banc des commissions. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)
Mme le président. La parole est à Mme Colette Mélot. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi qu’au banc des commissions.)
Mme Colette Mélot. Madame le président, madame la ministre, mes chers collègues, lors de la crise sanitaire liée au covid-19, nous avons tous été frappés par les images de ces longues files d’étudiants venus chercher un colis alimentaire.
Aujourd’hui, les difficultés persistent en raison de l’inflation généralisée et de la hausse du coût de l’alimentation : je veux donc souligner l’impérieuse nécessité de soutenir les étudiants de l’enseignement supérieur.
Nombreux sont ceux qui ne peuvent plus s’offrir le même panier quotidien qu’auparavant. L’alimentation est devenue la principale variable d’ajustement pour boucler les fins de mois. Dans ce contexte, toute aide destinée à leur permettre de poursuivre sereinement leurs études est la bienvenue.
La hausse des bourses, annoncée la semaine dernière, est également une excellente nouvelle.
Anthelme Brillat-Savarin écrivait dans sa célèbre Physiologie du goût que « la destinée des nations dépend de la manière dont elles se nourrissent ». De la même manière, la réussite universitaire de nos étudiants dépend de la manière dont ils s’alimentent. Quoi de plus essentiel que de permettre à notre jeunesse de manger à sa faim ?
Voilà tout l’objet du texte que nous examinons aujourd’hui : garantir à tous les étudiants l’accès à une offre de restauration abordable.
En première lecture au Sénat, nous avions proposé la création d’une aide territorialisée, destinée aux étudiants qui résident à distance de restaurants universitaires – je pense en particulier aux zones rurales et de montagne. Ces jeunes sont défavorisés, puisqu’ils ne bénéficient pas des tarifs avantageux et des repas équilibrés fournis par les fameux restos U.
Depuis son dépôt au Sénat par Pierre-Antoine Levi, le texte a bien évolué – et c’est peu de le dire. Je profite de l’occasion qui m’est donnée pour saluer le travail de notre collègue, ainsi que celui du rapporteur, Jean Hingray.
Le projet de création d’un ticket-restaurant étudiant a été abandonné. Je ne peux que regretter la complexification du dispositif à laquelle a abouti l’examen du texte à l’Assemblée nationale.
Pour autant, la philosophie de la proposition de loi reste la bonne ; cette nouvelle rédaction va dans le bon sens, ce qui explique qu’elle ait été adoptée sans modifications en commission.
De son côté, le Gouvernement s’engagera à remettre chaque année au Parlement un bilan de la mise en œuvre du dispositif. C’est une bonne chose, et nous serons particulièrement attentifs à ces retours d’expérience.
En conclusion, le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera ce texte et se félicite du déploiement de dispositifs destinés à pallier les difficultés financières des étudiants. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions.)
Mme le président. La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui vise un objectif louable, celui de répondre à la précarité étudiante et de favoriser l’accès à une offre de restauration à tarif modéré.
Depuis le mois de mars 2021, au moment où notre collègue Pierre-Antoine Levi a rédigé ce texte, la situation n’a malheureusement pas évolué. Permettez-moi de remercier notre collègue, ainsi que les membres du groupe Union Centriste d’avoir demandé l’inscription de la présente proposition de loi à leur ordre du jour réservé, même si je regrette la première version du dispositif, qui avait le mérite d’être plus précis.
Aujourd’hui encore, 48 % des étudiants sont contraints de travailler pour financer leurs études. L’inflation les oblige à recourir aux banques alimentaires pour se nourrir – un quart de leurs bénéficiaires ont moins de 25 ans.
Sur le campus de l’université Bordeaux Montaigne, 91 % des étudiants vivent avec un budget inférieur au seuil de pauvreté, qui s’élève à 940 euros par mois.
Face à cette situation, madame la ministre, la réponse du Gouvernement ne nous semble pas à la hauteur. La revalorisation de 4 % du montant des bourses à la rentrée 2022, soit 10,5 points en dessous de la hausse des prix des produits alimentaires, s’est révélée insuffisante.
Très rapidement, le Gouvernement a dû se rendre à l’évidence, en prévoyant d’abord une aide exceptionnelle de 10 millions d’euros au mois de novembre dernier pour les colis alimentaires, puis en élargissant l’accès aux repas à 1 euro aux étudiants non boursiers les plus précaires qui en feraient la demande.
Le 23 mars dernier, après la forte mobilisation des jeunes contre la réforme des retraites, vous avez débloqué une nouvelle enveloppe de 10 millions d’euros au titre de l’aide alimentaire. Ce n’est pas grand-chose, quand on sait que 250 millions d’euros au minimum seraient nécessaires pour financer cette proposition de loi !
De la même manière, l’annonce d’une enveloppe de 500 millions d’euros supplémentaires dévolus aux bourses pour la rentrée 2023 n’offre aucune garantie aux étudiants de sortir à long terme des considérations financières qui les éloignent de leurs études.
Il n’est pas acceptable que la précarité étudiante s’aggrave dans des territoires dépourvus de restaurants et de cafétérias universitaires à proximité des lieux d’études.
Je souhaiterais insister plus particulièrement sur la situation des étudiants ultramarins. Une récente note de l’Union nationale des étudiants de France (Unef) a montré que, pour eux, le coût de la vie est supérieur de 26 % à celui de la métropole.
Il est également incompréhensible que, en outre-mer, les étudiants se voient appliquer des frais additionnels de 70 centimes au titre de l’emballage et du transport. Cela double pratiquement leur reste à charge dans le cadre du dispositif à 1 euro. Comment justifier cette rupture d’égalité institutionnalisée ?
En première lecture, nous avions souligné les limites du ticket-restaurant étudiant : réduction des temps de sociabilité, coût trop élevé d’un carnet de tickets pour les étudiants les plus précaires.
Nous ne pouvons cependant pas nous réjouir de la réécriture intégrale du texte par l’Assemblée nationale. L’instauration d’une aide financière non chiffrée, adossée à un réseau d’organismes conventionnés, est extrêmement vague.
Nos amendements de précision, qui visaient simplement à prévoir un reste à charge identique sur tout le territoire, en resto U comme en organisme conventionné, et à garantir une offre dans la même commune que le lieu d’étude, ont été rejetés en raison de l’irrecevabilité financière découlant de l’article 40 de la Constitution. Cela révèle la faible ambition budgétaire derrière les belles intentions affichées !
Il n’est pas trop tard, madame la ministre, monsieur le rapporteur, pour vous approprier nos propositions et répondre enfin réellement aux difficultés des étudiants. Je me tiens à votre disposition au cours de cette séance.
Sans cela, nous considérerons qu’il s’agit d’un rendez-vous manqué avec la jeunesse.
Mme le président. Il faut conclure.
Mme Monique de Marco. Nous nous abstiendrons avec bienveillance sur ce texte, pour saluer la bonne volonté de son auteur. (Mme Esther Benbassa applaudit.)
Mme le président. La parole est à M. François Bonhomme. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. François Bonhomme. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, alors que notre pays sortait enfin de la crise sanitaire et que les petits boulots faisaient leur retour, nous espérions que la situation des étudiants allait quelque peu s’améliorer.
Malheureusement, l’inflation est venue détériorer la situation des jeunes. En effet, nombre d’étudiants rencontrent de grandes difficultés pour régler à la fois leur loyer et leurs dépenses alimentaires.
C’est le cas notamment des quelque 700 000 boursiers qui, pour l’année universitaire 2021-2022, touchaient, rappelons-le, une aide allant de 103 euros à 573 euros par mois, pour l’échelon le plus élevé, et ce sur dix mois – et je ne parle même pas de la situation des jeunes issus de la classe moyenne, qui se situent juste au-dessus du seuil ouvrant droit à une bourse.
Bien souvent, ces jeunes doivent renoncer à acheter de la nourriture et, parfois même, à se soigner. L’Observatoire national de la vie étudiante le confirme : en 2021, 38 % des étudiants déclaraient s’être restreints sur leurs dépenses alimentaires, et parfois même avoir supprimé certains repas.
L’aide qu’ils sollicitent auprès d’associations, afin d’obtenir des paniers alimentaires gratuits, ne suffit pas toujours. Même si le Gouvernement leur a octroyé une rallonge budgétaire ponctuelle de 10 millions d’euros, ces associations ne parviennent plus à répondre à la hausse continue de la demande.
De même, l’annonce d’une augmentation de 3,5 % des APL, celle d’une hausse de 35 000 du nombre de boursiers, ainsi que d’une revalorisation programmée des bourses de 37 euros à la rentrée prochaine ne suffisent pas.
C’est pourquoi un nouveau dispositif d’aide plus efficace et permanent, qui permettrait aux étudiants de se nourrir correctement et dans des conditions financières acceptables, est nécessaire.
Je veux saluer ici le travail de notre collègue Pierre-Antoine Levi, qui a permis au Sénat, puis à l’Assemblée nationale, de se saisir de l’importante question de la précarité alimentaire étudiante.
Il est parti du constat que l’actuel service public de la restauration universitaire était inégalement accessible sur notre territoire. En effet, selon l’endroit où ils font leurs études, tous les étudiants n’ont pas accès de la même manière à un restaurant universitaire.
C’est le cas notamment dans beaucoup de villes de taille intermédiaire ou en zone rurale, ce que l’on appelle la France « périphérique ». Les étudiants ne sont pas tous dans des universités : il y a aussi tous ceux qui étudient là où il n’existe pas d’offre de restauration adaptée.
Il s’agit de permettre aux étudiants de ces zones blanches de bénéficier d’un tarif préférentiel pour leur repas, comme ce serait le cas dans un restaurant dépendant d’un Crous.
La présente proposition de loi corrige cette inégalité et vise à rétablir dans les faits le principe selon lequel tous les étudiants ont droit à une offre de restauration de proximité à un tarif social. C’est la raison pour laquelle le Sénat avait fort opportunément adopté ce texte, qui constituait une véritable avancée.
En deuxième lecture, le débat porte essentiellement sur les modalités de mise en œuvre de ce nouveau dispositif. Pierre-Antoine Levi proposait la création d’un ticket-restaurant étudiant pour tous ceux qui, suivant un enseignement supérieur dans une zone blanche, en avaient besoin.
Ce chèque permettait à chacun de régler, totalement ou partiellement, le prix d’un repas consommé ou acheté auprès d’organismes, y compris les restaurants ayant passé une convention avec des acteurs territoriaux de la vie étudiante, en particulier le réseau des œuvres universitaires et scolaires dont le rôle demeurait prépondérant.
Pour sa part, l’Assemblée nationale a fait le choix, en première lecture, de remplacer le ticket-restaurant par une aide alimentaire dont les critères d’attribution demeurent les mêmes que ceux que le Sénat a votés.
Le dispositif adopté par les députés permet aussi d’avoir recours à des bons alimentaires qui seraient utilisables, notamment dans les lieux conventionnés.
Enfin, il a été prévu qu’un rapport d’évaluation sur l’accès des étudiants à une offre de restauration à un tarif modéré et de qualité soit remis chaque année. Il s’agit d’une bonne disposition qu’il convient de soutenir.
J’ajoute que le ticket-restaurant étudiant paraissait novateur et plutôt simple d’utilisation.
Pour sa part, l’Assemblée nationale a modifié cette disposition au profit d’une aide. Même si elle a conservé le principe d’universalité, dans l’esprit de la première rédaction de la proposition de loi de notre collègue Levi, nous pouvons émettre quelques réserves.
Entre ces deux options, la commission de la culture a donc tranché en adoptant conforme la rédaction issue des travaux de l’Assemblée, le dispositif initial ayant été positivement enrichi. Je me range donc à cet avis, à l’occasion de cet examen, car il existe, malgré les divergences, un consensus sur l’urgence de la situation ainsi que sur la nécessité d’obtenir au plus vite un dispositif opérant pour l’ensemble des étudiants.
Il y a bel et bien urgence à répondre à l’attente très forte de ces derniers. Nous espérons, madame la ministre, que le Gouvernement garantira le financement nécessaire à la réalisation du projet, parce que la Nation doit faire un effort d’investissement pour soutenir sa jeunesse étudiante.
Pour toutes ces raisons, je voterai en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)
Mme le président. La parole est à Mme Monique de Marco, pour un rappel au règlement.
Mme Monique de Marco. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 44 ter qui vous autorise, madame la ministre, monsieur le rapporteur, à proposer des amendements en séance même. Je vous appelle à faire application de ce droit afin d’apporter des précisions à ce texte et de le rendre ainsi réellement applicable dans l’intérêt des étudiants.
Deux amendements que j’avais déposés ont été déclarés irrecevables. Je conteste cette appréciation.
En effet, le texte retenu à l’issue des travaux de l’Assemblée nationale ne contient aucun engagement précis sur le montant de l’aide financière allouée aux étudiants vivant hors d’une zone de restauration universitaire. Or il faut une égalité stricte entre les intéressés, quel que soit leur positionnement géographique. Ils doivent tous pouvoir accéder au prix subventionné d’un euro ou de 3,30 euros, selon leurs moyens. Si leur reste à charge auprès d’un organisme conventionné est supérieur au prix d’un sandwich en boulangerie, alors la proposition de loi me semble inutile. Qu’en pensez-vous ?
Dans le texte de l’Assemblée nationale, il est également écrit que l’organisme conventionné devra se trouver à proximité du lieu d’études…
Mme le président. Ma chère collègue, votre propos ne relève pas d’un rappel au règlement. Vous pourrez revenir sur le sujet lors de la défense de vos amendements.
Mme Monique de Marco. Mais ils ont été déclarés irrecevables !
Mme le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, ma chère collègue.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
Je rappelle que, en application de l’article 48, alinéa 5, du règlement, à partir de la deuxième lecture au Sénat des projets ou propositions de loi, la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux assemblées du Parlement n’ont pas encore adopté un texte identique.
En conséquence sont irrecevables les amendements ou articles additionnels qui remettraient en cause les articles adoptés conformes, de même que toute modification ou adjonction sans relation directe avec une disposition restant en discussion.
Je vous avertis d’ores et déjà que le vote sur l’ensemble du texte se fera par scrutin public.
proposition de loi visant à favoriser l’accès de tous les étudiants à une offre de restauration à tarif modéré
Article 1er
(Non modifié)
Après l’article L. 822-1 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 822-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 822-1-1. – Dans chaque territoire, les étudiants peuvent bénéficier d’une offre de restauration à tarif modéré à proximité de leur lieu d’études.
« Cette offre est proposée dans les lieux de restauration gérés par le réseau des œuvres universitaires et scolaires mentionné à l’article L. 822-1 ou par des organismes, de droit public ou de droit privé, conventionnés, dans le territoire considéré, par ce même réseau.
« Une aide financière est proposée aux étudiants n’ayant pas accès à une structure de restauration universitaire, pour leur permettre d’acquitter en tout ou en partie le prix d’un repas consommé ou acheté auprès d’un organisme ayant conventionné, sur le territoire considéré, avec les établissements d’enseignement supérieur, les collectivités territoriales ou le réseau des œuvres universitaires et scolaires.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article. »
Mme le président. L’amendement n° 4 rectifié, présenté par Mme de Marco, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Dans le réseau des œuvres universitaires et scolaires comme au sein des organismes conventionnés, les horaires d’accès à l’offre de restauration à tarif modéré sont établis en fonction des besoins des étudiants, après la consultation des associations les représentant.
La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. Cet amendement n’a pas été déclaré irrecevable… Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, excusez-moi d’être pointilleuse, mais je crois que la situation des étudiants dans le pays l’exige.
L’objet de cet amendement de précision est de rapprocher le texte de l’intention exprimée dans l’exposé des motifs à la suite de ce constat : « Les restaurants universitaires et leurs horaires d’ouverture semblent de moins en moins répondre aux attentes des étudiants d’aujourd’hui et de moins en moins adaptés à leurs emplois du temps. »
Nous proposons donc de compléter l’article 1er en prévoyant que les horaires de restauration dans les réseaux des Crous et des organismes conventionnés soient soumis à la consultation des syndicats étudiants afin d’adapter les créneaux à leurs besoins.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Hingray, rapporteur. Madame de Marco, vous nous invitez à déposer des amendements. Or Pierre-Antoine Levi et moi-même avons indiqué que nous ne le ferions pas afin de voter conforme le texte.
Vous appelez, par votre amendement, à trouver un consensus avec les syndicats étudiants en faisant intervenir ces derniers dans les choix d’horaires d’ouverture des Crous. Ce texte doit permettre de déterminer ces créneaux directement au niveau local par un conventionnement, sans passer par une loi.
Adopter un amendement ne permettrait pas de voter conforme la proposition de loi. Aussi, la commission exprime un avis défavorable, mais bienveillant.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sylvie Retailleau, ministre. Même avis.
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4 rectifié.