M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question. J’y ai déjà répondu hier à l’Assemblée nationale, mais ce n’est pas un reproche : vous me donnez l’occasion d’apporter des précisions supplémentaires.
La France fera en sorte de continuer à exporter ses céréales après le 25 avril 2023, car elle souhaite conserver sa capacité d’exportation.
Premièrement, c’est l’un des éléments de la puissance de notre pays que d’être capable de livrer des céréales à l’extérieur de nos frontières. Cela participe de notre politique étrangère.
Deuxièmement, il y va de la sécurité alimentaire mondiale, au moment où la guerre menée par M. Poutine en Ukraine a déstabilisé les marchés mondiaux, avec des fluctuations de prix et même des difficultés d’accès aux céréales. Nous devons avoir des marchés fluides, et tous les pays qui en ont besoin doivent avoir accès aux céréales.
Troisièmement, le droit européen permet, si une molécule est prohibée au niveau national, de déroger à cette interdiction dès lors que ce produit est encore autorisé à l’échelon européen, sous réserve que le pays importateur le demande.
Nous travaillons donc avec l’Anses, pour faire en sorte que nous puissions légalement continuer à exporter après le 25 avril.
La souveraineté alimentaire des pays tiers nous importe, en effet, d’autant que l’on voit bien combien l’arme alimentaire est utilisée par certains États, notamment la Russie. Nous n’emprunterons pas cette voie et, comme d’autres pays européens, comme les Allemands, les Bulgares ou les Roumains, nous allons nous mettre en situation de continuer à exporter des céréales.
Ce n’est pas seulement l’intérêt de la France. C’est celui de la sécurité alimentaire mondiale. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Chantal Deseyne, pour la réplique.
Mme Chantal Deseyne. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, qui lève quelques inquiétudes pour la filière, et de votre engagement à sortir de cette situation ubuesque.
Cependant, les acteurs du secteur ont besoin d’une assise juridique solide et pérenne. Nous souhaitons donc de votre part un engagement écrit. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée et dotations aux collectivités
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Jean-Marie Mizzon. J’associe à ma question mon collègue Stéphane Demilly, sénateur de la Somme.
De nombreuses communes se trouvent confrontées à une situation bien compliquée du fait de l’automatisation du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA).
M. Loïc Hervé. Ah !
M. Jean-Marie Mizzon. Cette modification, présentée comme technique à l’origine, aboutit en effet à les priver de la récupération de la TVA sur des travaux lourds dits « d’agencement et d’aménagement de terrains », ce qui exclut nombre de chantiers, comme des terrains de football, des aires de jeu ou encore des pistes cyclables.
Surtout, cette réglementation comporte des éléments de complexité supplémentaires, avec, au sein d’un même projet, des dépenses qui restent éligibles et d’autres qui ne le sont plus, alors qu’un projet est un tout.
Aussi, ma première question est simple : envisagez-vous de revenir sur cette réglementation très mal vécue par les collectivités locales ou, à tout le moins, d’intégrer la part de TVA dans l’assiette subventionnable ?
Ma seconde question est plus simple encore et porte sur un sujet connexe : trouvez-vous normal que les communes apprennent seulement à la fin du mois de mars, voire au début du mois d’avril, le montant de dotation générale de fonctionnement (DGF) qui leur est alloué par l’État ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Christian Bilhac applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Mizzon, vous avez raison, l’automatisation du FCTVA conduit à une redéfinition de l’assiette des dépenses ouvrant droit à compensation.
Dans la collecte des données comptables nécessaires au calcul automatique des attributions, certaines dépenses ont été exclues de l’assiette.
Parmi elles figurent des dépenses engagées par les collectivités, telles que celles que vous avez citées. D’autres dépenses qui n’étaient pas éligibles le sont désormais. C’est le cas, par exemple, des investissements réalisés par des collectivités pour des biens immobiliers qu’elles mettent à la disposition de tiers.
Toutefois, ces arbitrages ont été réalisés en leur temps en accord avec les associations d’élus locaux et le Comité des finances locales (CFL). (Protestations sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. Loïc Hervé. Cela m’étonnerait fort !
M. Olivier Paccaud. C’est faux !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Si, mesdames, messieurs les sénateurs, le CFL a bien été associé. (Mêmes mouvements.)
M. Marc-Philippe Daubresse. Mais non !
M. Loïc Hervé. On le saurait !
M. Jérôme Bascher. Associé, mais pas écouté !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Les incidences financières de l’automatisation de la gestion du FCTVA doivent être considérées de manière globale. L’automatisation de la gestion du FCTVA constitue une mesure favorable aux collectivités, puisqu’elle permet la disparition du non-recours, qui concernait jusqu’à présent les plus petites d’entre elles.
Pour autant, une évaluation sera conduite à la mi-2023. (Ah ! sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
Mme Françoise Gatel. Très bien !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. La question des dépenses d’aménagement de terrain sera examinée de très près, monsieur le sénateur, dans la suite des débats que nous avons menés sur le projet de loi de finances pour 2023.
Quant aux délais de mise en ligne des résultats de la répartition de la dotation globale de fonctionnement, ils sont très souvent respectés.
Cette année, la mise en ligne a été réalisée le 31 mars, ce qui a laissé quinze jours aux collectivités pour l’inscrire dans leur budget. Oui, c’est très court, mais, pour l’avoir vécue, je veux dire que cette mise en ligne au 31 mars a nécessité un travail très important des agents de la direction générale des collectivités locales (DGCL), que je tiens à remercier.
M. Marc-Philippe Daubresse. Je ne les remercie pas, moi…
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Ce délai permet de s’assurer de la fiabilité des calculs réalisés.
Mme Sophie Primas. C’est très compliqué !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Il s’agit en effet de répartir selon des règles, reposant sur un grand nombre de critères, près de 27 milliards d’euros.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Je m’engage cependant à demander à la DGCL, pour l’année 2024, de raccourcir le délai de la répartition et de prévoir sa publication une semaine plus tôt, soit le 23 mars. Je vous en tiendrai informés.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, pour la réplique.
M. Jean-Marie Mizzon. Madame la ministre, votre réponse m’a fait penser à ce que disait André Maurois : « Le difficile, dans une discussion, ce n’est pas de défendre son opinion, c’est de la connaître ». (Sourires. – Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
C’est un peu le problème de ce gouvernement : on ne peut pas vouloir construire 5 000 équipements sportifs un jour et, le lendemain, sortir de la dépense éligible les dépenses qui les financent. (Applaudissements sur les mêmes travées.)
On ne peut pas avoir des mots très forts pour défendre les vertus de la simplification et ériger des barrières supplémentaires en obligeant les porteurs de projets à décortiquer ceux-ci pour récupérer un peu de TVA.
D’où tenez-vous, madame la ministre, que les réalités doivent se plier aux règles administratives et comptables ?
M. Jean-Marie Mizzon. Mettez les choses dans l’ordre et, vous verrez, tout ira mieux ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
subventions de la ligue des droits de l’homme
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. François Bonhomme. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
Monsieur le ministre, à la suite des violences qui se sont produites à Sainte-Soline, vous avez déclaré la semaine dernière, devant la commission des lois du Sénat, être prêt à examiner la subvention annuelle versée par l’État à la Ligue des droits de l’homme.
Aussitôt, nous avons assisté à une véritable levée de boucliers. Au nom d’un passé glorieux, cette association bénéficie de toutes les largesses de l’État, quoi qu’elle fasse, et s’exonère de toute explication sur la façon dont elle utilise ces moyens.
Il est étonnant que cette association sollicite de l’argent public et prospère sur cette base tout en s’opposant systématiquement à l’État et en le combattant, particulièrement dans sa difficile mission de maintien de l’ordre public, qui répond à un droit fondamental s’il en est.
Il y a, dans cette instrumentalisation systématique du droit, une dérive qui interroge.
Comment l’État peut-il soutenir et subventionner des associations faisant profession de jeter l’opprobre sur les forces de l’ordre, particulièrement lorsque celles-ci font face à des groupes violents et armés qui cherchent à tuer nos policiers et nos gendarmes ?
Depuis votre déclaration, monsieur le ministre, avez-vous pu examiner la subvention de l’État versée à cette association ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la citoyenneté.
Mme Sonia Backès, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté. Monsieur le sénateur Bonhomme, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence de Gérald Darmanin, qui accompagne le Président de la République aux Pays-Bas.
Permettez-moi de rappeler le contexte de la prise de parole du ministre, que vous avez interrogé, dans le cadre d’une audition en commission, sur la possibilité de supprimer les subventions versées à cette association.
La Ligue des droits de l’homme est une association ancienne et respectable, dont le nom a été associé, c’est vrai, à des combats qui font honneur à la République.
Pour autant, certaines de ses prises de position récentes interrogent, et ce n’est pas lui faire injure que de le reconnaître. Je citerai par exemple son absence au procès des attentats de Charlie Hebdo en 2020, ou encore sa décision, difficile à comprendre, de défendre le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) au moment où le Gouvernement a pris la décision de le dissoudre du fait de ses menées séparatistes.
M. Marc-Philippe Daubresse. Eh oui !
Mme Sonia Backès, secrétaire d’État. On peut aussi regretter que la Ligue des droits de l’homme colporte des rumeurs, dont il est désormais certain qu’elles étaient infondées, visant à faire croire que les gendarmes auraient empêché les secours d’intervenir à Sainte-Soline.
M. Roger Karoutchi. C’est délirant…
Mme Sonia Backès, secrétaire d’État. Le ministre de l’intérieur et des outre-mer a simplement voulu rappeler que la Ligue des droits de l’homme bénéficie d’un soutien important de la part des pouvoirs publics.
Vous l’avez dit, nous parlons d’argent public, c’est-à-dire des impôts de nos concitoyens. En l’occurrence, il s’agit de 276 000 euros de l’État et de 233 000 euros des collectivités territoriales.
Il est donc légitime que l’État s’assure que les actions conduites par une association bénéficiant de financements publics sont en phase avec l’objectif qu’elle déclare, ainsi qu’avec nos valeurs républicaines.
C’est ce que le ministre de l’intérieur et des outre-mer vous a indiqué en réponse à votre question en commission, et c’est ce que Mme la Première ministre vous a confirmé à l’instant. (MM. François Patriat et Thani Mohamed Soilihi applaudissent.)
M. David Assouline. Et Marlène Schiappa, combien a-t-elle donné à ses amis ?
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour la réplique.
M. François Bonhomme. M. Darmanin est en vadrouille et Mme Schiappa, secrétaire d’État chargée notamment de la vie associative, s’exprime partout, sauf au Sénat… (Sourires.)
Certes, la Première ministre s’est prononcée tout à l’heure, mais je regrette sa réponse, car, comme l’a dit à l’instant Mme Backès, la Ligue des droits de l’homme sélectionne soigneusement ses indignations : elle a défendu les militants du CCIF après l’assassinat de Samuel Paty, elle a défendu les thèses de l’extrême gauche, dont le mot d’ordre est « La police tue ! », et elle met toute son énergie à multiplier les recours juridictionnels contre nombre de décisions de l’État, y compris en matière de flux migratoires. (Protestations sur les travées du groupe GEST.)
M. Thomas Dossus. Elle est libre et indépendante !
M. François Bonhomme. À Sainte-Soline, elle a déposé un recours contre une décision visant à lutter contre le transport d’armes et elle a diffusé de fausses informations laissant entendre que le Samu aurait été délibérément empêché de porter secours…
Tout cela mériterait vraiment que l’on y regarde de plus près. Ce que je reproche au Gouvernement, c’est sa faiblesse.
Mme Raymonde Poncet Monge. Faiblesse ?
M. le président. Il faut conclure !
M. François Bonhomme. Vous avez dit, madame la secrétaire d’État, que le Gouvernement s’interdisait toute mesure restrictive. Mais sa mission, c’est de contrôler l’argent public ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC. – Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
réforme des retraites
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Annie Le Houerou. Madame la Première ministre, vous avez fait adopter la réforme des retraites en tordant l’esprit de notre Constitution. (Oh ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Pour une réforme à tout prix, vous avez utilisé un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, c’est-à-dire l’article 47-1 de la Constitution, puis l’article 44.3 pour éviter un 49.3 par lequel, malgré tout, vous avez fini ! (Marques de lassitude sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Cette méthode fait fi de l’expression démocratique et de ce qu’ont exprimé les électeurs dans les urnes pour éviter le pire. Ils espéraient que le Président de la République saurait en tenir compte. Or, en retour, après onze journées de très forte mobilisation dans une grande responsabilité intersyndicale, il reste sourd.
Comme lui, votre gouvernement prend une attitude arrogante. Votre autosatisfaction montre combien vous êtes déconnectée des réalités que vivent nos concitoyens.
Vous méprisez l’intersyndicale, qui est unie contre cette réforme.
Vous méprisez l’opposition parlementaire, notamment au Sénat, en utilisant tous les artifices, afin de brider le débat.
Vous méprisez les millions de Françaises et de Français qui manifestent leur opposition depuis des mois dans la rue, et cela malgré l’inflation qui grève le budget de leur famille.
Face à la colère qui s’exprime, vous restez insensible aux revendications légitimes. Ainsi, vous affaiblissez nos institutions, notre démocratie et notre modèle social. Cette réforme laissera des séquelles profondes dans notre pays.
Ces dernières semaines, vous avez usé de tous les stratagèmes, jusqu’aux magazines people, pour faire diversion et tenter de tourner la page de cette séquence. Mais les Français ne sont pas dupes : ils n’oublieront pas. Votre réforme est inutile et injuste, c’est une régression sociale. Madame la Première ministre, vous êtes dans l’impasse.
Comment entendez-vous gouverner après avoir méprisé à ce point les corps intermédiaires ? Comment entendez-vous apaiser les tensions et renouer le dialogue social ? Je ne vois qu’une issue : le retrait de la réforme des retraites. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.
M. Olivier Véran, ministre délégué auprès de la Première ministre, chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice Annie Le Houerou, il m’est arrivé de me trouver dans des situations plus confortables pour répondre à une question d’un sénateur ou d’une sénatrice, puisque nous siégions tous deux comme députés au sein du groupe socialiste de l’Assemblée nationale en 2014 (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.), et il me déplairait de vous être désagréable.
En effet, lorsqu’il a fallu réformer les retraites en 2014, j’étais là, comme vous, pour voter la réforme. (Protestations sur les travées du groupe SER.)
Je voudrais reprendre les mots que vous utilisiez alors dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale, où il se trouve que nous étions intervenus l’un après l’autre : « Nous avons besoin d’une réforme responsable qui tient compte de la réalité que constitue l’allongement de l’espérance de vie. » (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)
Depuis dix ans, madame la sénatrice, l’espérance de vie s’est encore allongée et l’équilibre du système des retraites – un principe que vous souteniez à l’époque comme une valeur de gauche ! – est aujourd’hui en danger.
De la même manière que, il y a dix ans, nous avons vous et moi voté l’allongement de la durée de cotisation à 43 années, aujourd’hui, nous assumons nos responsabilités (Brouhaha sur les travées des groupes SER, GEST et CRCE.), en prenant les décisions qui conviennent pour que les générations futures puissent, elles aussi, disposer d’un système de retraite par répartition équilibré.
Mme Laurence Rossignol. Vous pouvez continuer, cela ne marche pas !
M. Olivier Véran, ministre délégué. On peut se jeter à la figure tous les mots fleuris qui existent, on peut mettre en avant toutes les arguties juridiques ou légistiques, le fait est, madame la sénatrice, que vous ne faisiez pas partie des frondeurs à l’époque ! (Vives protestations sur les travées du groupe SER.)
Vous avez voté comme moi et vous vous emportiez avec moi contre celles et ceux qui bloquaient – vous savez donc ce que c’est de bloquer le Parlement ! – et qui, parce qu’ils étaient en désaccord sur le fond, voulaient empêcher le débat de se tenir.
Je suis sûr que, au fond de vous-même, madame la sénatrice, vous pouvez vous retrouver avec nous sur une ligne responsable. Vous pouvez reconnaître que ce sont les conditions du débat qui nous ont conduits à recourir au 49.3 pour terminer ce chemin démocratique. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes RDSE et Les Républicains. – M. Daniel Chasseing applaudit également.)
quatrième année de spécialité de médecine générale
M. le président. La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Annie Delmont-Koropoulis. Ma question s’adresse à M. le ministre de la santé et de la prévention.
Monsieur le ministre, ce n’est malheureusement plus à démontrer : les zones blanches médicales concernent tous les territoires, et les aides financières ponctuelles ne permettent pas, à elles seules, d’attirer les jeunes médecins.
Le Sénat a adopté l’an dernier une proposition de loi de Bruno Retailleau visant à créer une année de professionnalisation en fin de cursus pour les internes en médecine générale.
Ce dispositif prévoyait que les étudiants en médecine générale effectuent une quatrième année d’internat sous la forme d’un stage en pratique ambulatoire dans les zones caractérisées par des difficultés d’accès aux soins. Chaque année, près de 4 000 internes auraient ainsi été déployés dans les zones sous-dotées.
L’article 37 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 prévoit un dispositif analogue. Les étudiants resteraient dans la région où ils ont suivi leurs études et bénéficieraient d’une rémunération adaptée.
Monsieur le ministre, vous avez confié à des personnalités qualifiées une mission sur la refonte du troisième cycle de médecine générale. Pouvez-vous nous faire part de leurs conclusions et nous préciser la date d’entrée en vigueur de l’article 37 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la prévention.
M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention. Madame la sénatrice Delmont-Koropoulis, comme s’y est engagé le Président de la République, nous mettons en place, à compter de la rentrée prochaine, une quatrième année de spécialité de médecine générale.
C’est une mesure qui fait consensus – vous avez rappelé l’adoption par le Sénat de la proposition de loi déposée par Bruno Retailleau – et qui a deux objectifs principaux.
Tout d’abord, il s’agit d’améliorer la formation de nos futurs médecins généralistes. La médecine générale était la seule spécialité sans quatrième année d’autonomie supervisée, alors que celle-ci permet de mieux former les futurs médecins, particulièrement dans des spécialités que les internes en médecine générale demandent souvent, comme la pédiatrie et la gynéco-obstétrique.
Ensuite, cette quatrième année facilitera l’installation de ces futurs médecins généralistes, en les déployant prioritairement dans les territoires sous-denses – c’était l’un des objectifs du Sénat – et en leur permettant de passer plus vite leur thèse de doctorat en médecine.
Pour accéder à cette quatrième année, ils devront en effet avoir passé leur thèse ; nous n’aurons donc plus d’étudiants qui ne peuvent pas s’installer à la sortie de leurs études, parfois durant plusieurs années, parce qu’ils doivent encore passer leur thèse.
En ce qui concerne la mission que j’ai confiée à quatre personnalités qualifiées – deux professeurs de médecine générale, un doyen et une interne –, leurs conclusions me seront rendues dans les jours qui viennent. La question principale, vous en avez parlé, est celle de la rémunération : elle devra être adaptée à cet exercice particulier de docteur junior en libéral, et non en centre hospitalier.
Bien entendu, dès que les conclusions de cette mission me seront remises, je serai à votre disposition pour vous les présenter et en débattre.
Cette mesure permettra d’améliorer la formation des médecins généralistes et de faciliter leur installation. Nous contribuerons ainsi à répondre à la problématique de l’inégalité d’accès territorial à la santé.
M. Alain Richard. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour la réplique.
Mme Annie Delmont-Koropoulis. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse.
Je voudrais toutefois vous rappeler que, sur l’initiative du Sénat, la loi du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé prévoyait l’obligation pour les étudiants de troisième cycle de médecine générale d’effectuer un stage d’au moins six mois en médecine ambulatoire.
Cette mesure n’a jamais été mise en place. Tout en regrettant le temps perdu, nous nous réjouissons que le Sénat ait enfin été entendu. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Jean-Marie Vanlerenberghe applaudit également.)
contamination de l’eau potable
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Procaccia. Ma question s’adresse à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Après un premier rapport en 2009, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) vient de faire le point sur la situation de la pollution par le chlordécone aux Antilles. En effet, bien que son usage soit interdit depuis trente ans, cette molécule persiste dans les sols et les eaux, contaminant les légumes racines, les animaux, les poissons et par conséquent les hommes, par le biais de l’alimentation.
Si le rapport évoque le progrès des connaissances scientifiques et médicales, il dresse un constat, que certains qualifient de sévère, sur une certaine inefficacité des plans Chlordécone qui se sont succédé, inefficacité qui explique le sentiment de défiance et de colère des Antillais.
Sa conclusion est, hélas, d’actualité : ce qui est arrivé aux Antilles doit servir de modèle à l’État pour gérer les pollutions que nous ne manquerons pas de découvrir ; une vision à long terme s’appuyant sur la recherche et associant tous les acteurs est dorénavant nécessaire.
La question de la pollution des eaux signalée récemment par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a été évoquée il y a quelques minutes par deux collègues. Cette pollution concerne une molécule qui, tout comme le chlordécone, est interdite, mais persistante dans le temps.
Monsieur le ministre, ma question est simple. Avez-vous mis au point une stratégie permettant de faire face à ces contaminations, une stratégie qui soit réfléchie et qui englobe les aspects sanitaires, économiques, environnementaux et sociaux ? Comment comptez-vous associer et informer clairement la population pour éviter le contre-modèle du chlordécone ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)