Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Charlotte Caubel, secrétaire d’État. Cela fait longtemps que je suis interpellée sur l’existence de trois numéros distincts : le 119, le 3018 et le 3020.
J’ai mené une étude sur le sujet : en réalité, ces différents services ne touchent pas du tout les mêmes publics, ils n’apportent pas les mêmes réponses et les écoutants sont également différents.
Dans les faits, le 3020 est énormément sollicité par les familles pour des faits de harcèlement, surtout physique, et essentiellement dans les écoles primaires. Il s’agit d’une problématique réelle au sein des écoles.
Je rappelle que les écoutants du 3020, issus de l’éducation nationale et pilotés par elle, ont l’obligation de prendre l’attache de l’école et des familles, si bien que des adolescents qui voudraient demander de l’aide, parce qu’ils sont cyberharcelés, pour une affaire de revenge porn par exemple ou à cause de contenus portant atteinte à leur intimité, voient dans le manque de confidentialité assurée par le 3020 en matière d’échanges, tant à l’égard des parents qu’à l’égard de l’école, un obstacle majeur.
La fusion du 3020 et du 3018 reviendrait à fusionner des démarches, des problématiques et des publics différents. J’ajoute qu’il existe une formation et une compétence spécifiques au 3018.
Dernier élément extrêmement important à mes yeux, le 3018 est considéré comme un signaleur de confiance au niveau européen : c’est ce qui lui permet de signer des conventions avec l’ensemble des plateformes et d’obtenir extrêmement rapidement le retrait de certains contenus, ce qui n’est évidemment pas le rôle de l’éducation nationale, qui a déjà fort à faire par ailleurs.
Il existe donc, je le répète, deux démarches parfaitement distinctes.
Cela étant, je veux vous rassurer : le 119, le 3018 et le 3020 recourent à des mécanismes de redirection quand il y a une erreur de destinataire ou quand la problématique soulevée se situe au carrefour de plusieurs situations. Il va de soi que les écoutants du 3018 peuvent inviter l’enfant à prendre l’attache de ses parents ; ils peuvent aussi adresser un signalement au titre de l’article 40 du code pénal s’il leur semble nécessaire que l’école et les parents se mobilisent.
Ces mécanismes existent et jouent à plein.
Aujourd’hui, je le redis, il n’est pas possible de fusionner ces numéros d’appel, car les démarches à accomplir lorsqu’un enfant semble en danger sont différentes selon qu’il s’agit d’un adolescent éprouvant le besoin de signaler un problème auprès du 3018 ou d’une famille qui constate des faits de harcèlement à l’école.
Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Fialaire, pour explication de vote.
M. Bernard Fialaire. Je me suis peut-être mal fait comprendre : les réponses sont bien sûr spécifiques, et je ne souhaite absolument pas que les services soient fusionnés.
Je dis simplement qu’il doit être possible de mettre en place un numéro d’appel unique, très simple d’accès, pour tout ce qui touche au harcèlement scolaire ou au cyberharcèlement. Ensuite, il reviendra à la plateforme de répartir les appels vers les services appropriés à même d’apporter aux victimes une réponse spécifique.
Si nous ne le faisons pas, nous devrons tous acheter un smartphone supplémentaire pour enregistrer tous les numéros d’appel d’urgence !
Ne pourrait-on pas simplifier les choses ? C’est tout ce que je demande – et j’y insiste : concevoir un numéro unique, qui permette d’orienter les victimes vers les services idoines.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 6 (nouveau)
I. – La présente loi entre en vigueur à une date fixée par décret qui ne peut être postérieure de plus de trois mois à la date de réception par le Gouvernement de la réponse de la Commission européenne permettant de considérer le dispositif législatif lui ayant été notifié comme conforme au droit de l’Union européenne.
II. – Par dérogation au I :
1° La dernière phrase du premier alinéa du I de l’article 6-7 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique entre en vigueur deux ans après la date d’entrée en vigueur mentionnée au I du présent article ;
2° Le II de l’article 6-7 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 précitée entre en vigueur un an après la date d’entrée en vigueur mentionnée au I du présent article. – (Adopté.)
Vote sur l’ensemble
Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à Mme Marie Mercier, pour explication de vote.
Mme Marie Mercier. Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, on ne peut évidemment qu’être favorable à une proposition de loi qui a pour objet de protéger nos enfants, en particulier lorsqu’elle vise à les protéger de ce monde numérique qui échappe aux adultes.
Pour autant, je souhaite que ce texte soit applicable. Je rappelle à cet égard que la disposition que j’ai fait inscrire dans la loi du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales – il y a donc plus de trois ans maintenant – n’est toujours pas appliquée. Il est probablement compliqué de la mettre en œuvre, mais il s’agit d’une mesure tendant à protéger nos enfants de contenus destinés à des adultes.
Tout le monde est d’accord lorsqu’il est question de protéger nos enfants, mais ce qui divise, ce sont les moyens pour y parvenir : donner des moyens supplémentaires à l’Arcom en se passant de juges, pourquoi pas ?
Je souhaiterais malgré tout insister sur un point : on peut prévoir la mise en place d’outils comme le contrôle parental, mais il faut veiller à ne pas exonérer les sites qui diffusent ce genre de contenus de leur responsabilité. Ce type de produits est destiné à des adultes, pas à des enfants : ces contenus doivent donc leur être interdits, ce qui implique un contrôle de l’âge des usagers. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
Mme la présidente. Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi visant à instaurer une majorité numérique et à lutter contre la haine en ligne.
(La proposition de loi est adoptée.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Alexandra Borchio Fontimp, rapporteure. En conclusion de ce débat, qui est une première pour moi à cette place, je tiens à adresser tous mes remerciements aux collègues présents ce soir pour leur mobilisation et la confiance qu’ils m’ont accordée en votant cette proposition de loi.
Je tiens plus particulièrement à remercier, non seulement le président de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, Laurent Lafon, mon ami Max Brisson et le secrétariat de la commission, mais aussi les ministres pour la qualité de nos échanges sur ce sujet transpartisan, avec pour seul objectif la protection des enfants – comme vient de le rappeler Marie Mercier –, et la présidente de séance pour avoir tenu bon jusqu’au terme de ce débat. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
9
Modifications de l’ordre du jour
Mme la présidente. Mes chers collègues, par lettre en date de ce jour, le Gouvernement demande l’inscription à l’ordre du jour du jeudi 8 juin, en premier point du matin, des conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à garantir le respect du droit à l’image des enfants.
Acte est donné de cette demande.
Le délai limite pour les inscriptions de parole serait fixé au mercredi 7 juin à 15 heures.
Y a-t-il des observations ?…
Il en est ainsi décidé.
Par ailleurs, à la demande de plusieurs groupes, nous pourrions fixer à une heure trente le temps réservé aux groupes dans la discussion générale commune sur le projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 et le projet de loi organique relatif à l’ouverture, la modernisation et la responsabilité du corps judiciaire, prévue le 6 juin, ainsi que dans la discussion générale sur le projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense, prévue le 27 juin prochain.
Y a-t-il des observations ?…
Il en est ainsi décidé.
10
Ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, mercredi 24 mai 2023 :
À quinze heures :
Questions d’actualité au Gouvernement.
À seize heures trente et le soir :
Quatre conventions internationales examinées selon la procédure d’examen simplifié :
Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal sur l’octroi de l’autorisation d’exercer une activité professionnelle aux personnes à charge des agents des missions officielles de chaque État dans l’autre, signé à Paris le 7 septembre 2021, et de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République démocratique socialiste de Sri Lanka relatif à l’autorisation d’exercice d’une activité professionnelle salariée par les membres de la famille des agents des missions officielles de chaque État dans l’autre, signé à Paris le 23 février 2022 (procédure accélérée ; texte de la commission n° 592, 2022-2023) ;
Projet de loi autorisant la ratification du Protocole du 30 avril 2010 à la Convention internationale de 1996 sur la responsabilité et l’indemnisation pour les dommages liés au transport par mer de substances nocives et potentiellement dangereuses (procédure accélérée ; n° 617, 2022-2023) ;
Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation de la convention d’entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal et de la convention d’extradition entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal (texte de la commission n° 619, 2022-2023) ;
Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté d’Andorre concernant l’amélioration de la résilience climatique et de la viabilité des routes nationales 116, 20, 320 et 22 liées aux risques naturels entre Prades et la frontière franco-andorrane (texte de la commission n° 621, 2022-2023) ;
Projet de loi visant à donner à la douane les moyens de faire face aux nouvelles menaces (procédure accélérée ; texte de la commission n° 615, 2022-2023).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures trente-cinq.)
Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
FRANÇOIS WICKER