Mme la présidente. La parole est à M. Henri Cabanel. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, RDPI et INDEP.)

M. Henri Cabanel. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, après la proposition de loi créant une résidence d’attache fiscale pour les Français de l’étranger, adoptée par le Sénat au début du mois d’avril dernier, voici une nouvelle initiative de nos collègues du groupe Les Républicains concernant les Français établis hors de France, à quelques mois des élections sénatoriales.

Par certains aspects, la version initiale de cette proposition de loi pouvait étonner. Tout d’abord, le label était automatiquement octroyé à tout entrepreneur recensé par le comité d’identification, sans que l’intéressé ait à démontrer une contribution particulière à la promotion de savoir-faire ou de produits français. Ensuite, l’intitulé même de ce label, « Made by French », sonnait peut-être à la mode, mais la formulation n’était pas très heureuse…

Ces défauts ont été corrigés la semaine dernière en commission, ce qui rend, à mes yeux, la proposition de loi plus acceptable. Ainsi, en vertu de l’article 3, le label est désormais accordé sur candidature de l’entrepreneur. Au cours de cette procédure, l’on appréciera sa contribution à la promotion d’un savoir-faire français, à la distribution de biens ou services français ou encore au rayonnement de la France à l’international.

Certaines interrogations subsistent néanmoins quant aux responsabilités confiées aux différents acteurs de la présence française à l’étranger.

Au sein des comités d’identification, priorité a été donnée aux acteurs de terrain – représentants de chambres de commerce et d’industrie ou conseillers du commerce extérieur de la France –, dont l’utilité et la compétence sont indéniables. Toutefois, le dispositif ne gagnerait-il pas à être mieux coordonné avec les services diplomatiques et consulaires ? Il s’agit d’une question ouverte, adressée aux connaisseurs des réalités précises de la vie des différents acteurs français à l’étranger.

Plus largement, que signifie « faire rayonner la France à l’étranger » ? Je ne doute pas que bon nombre des 2,5 millions de personnes actuellement inscrites au registre des Français établis hors de France ont à cœur de promouvoir les productions de notre beau pays, notamment la gastronomie française, reconnue comme patrimoine immatériel de l’humanité.

Cela dit, indépendamment du cas des entrepreneurs vivant à l’étranger, nous sommes face à des enjeux de souveraineté. Je pense notamment aux transferts de technologies effectués par des entreprises françaises : ils ont pu conduire à une perte de souveraineté, ou du moins de leadership économique dans certains domaines, alors que l’espionnage industriel pratiqué par certains pays est désormais clairement établi.

Par ailleurs, je ne puis qu’appeler de mes vœux une meilleure articulation entre les activités des Français établis à l’étranger et notre tissu économique national. Les réseaux consulaires – pas au sens diplomatique ! – et les collectivités territoriales ont un rôle à jouer à cet égard.

La chambre de commerce et d’industrie de l’Hérault organise ainsi des rendez-vous de l’export. De même, elle développe des partenariats aux Proche et Moyen-Orient dans un certain nombre de secteurs, comme les transports, les énergies renouvelables ou encore l’agroalimentaire. Dans cette perspective, les contacts avec des entrepreneurs français établis hors de France peuvent aider à mieux connaître les réalités socio-économiques à l’étranger (M. le rapporteur acquiesce.), les occasions à saisir ou encore les risques à éviter.

Les auteurs de cette proposition de loi avancent que les entrepreneurs français à l’étranger créent aussi de la valeur en France. Ont-ils des exemples ou des chiffres permettant d’étayer cette affirmation ? Il n’est pas question – je le précise – de nier les liens de ces entreprises avec la France, qui sont réels : d’après le rapport législatif, plus des deux tiers d’entre elles entretiennent un partenariat avec une entreprise française.

En conclusion, même si cette initiative semble d’abord un signal envoyé à nos concitoyens installés à l’étranger, elle peut constituer un outil complémentaire des différents dispositifs existants pour la promotion des activités et intérêts français à l’étranger, à condition, bien sûr, d’être intelligemment utilisée.

Malgré les remarques que je viens de formuler, les élus de notre groupe voteront cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et RDPI, ainsi quau banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Rietmann. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Évelyne Perrot applaudit également.)

M. Olivier Rietmann. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la crise sanitaire aura eu le mérite de mettre au jour des situations jusqu’alors oubliées : celles des petits entrepreneurs français, dirigeants de très petites entreprises (TPE) ou entrepreneurs individuels, installés à l’étranger. Certains d’entre eux ont vu leur activité emportée par la pandémie. D’autres ont été considérablement fragilisés, faute d’un soutien suffisant – quand il existait ! – du pays qu’ils ont rejoint.

À première vue, on pourrait très légitimement s’interroger sur le bien-fondé d’une telle aide, en suivant le raisonnement suivant : dès lors qu’une entreprise n’acquitte pas d’impôt en France, rien ne justifie l’assistance de l’État français. Ce serait pourtant commettre une grave erreur de jugement, car ces entreprises participent au rayonnement de la France. Elles sont même des relais inestimables pour l’Hexagone.

Dans un rapport d’information de décembre 2020 fait au nom de la délégation sénatoriale aux entreprises, notre ancienne collègue Jacky Deromedi relevait que 40 % de ces entreprises utilisent des produits français. Ajoutons que 69 % des entreprises françaises installées à l’étranger entretiennent un partenariat avec une entreprise française. En facilitant les exportations des petites et moyennes entreprises françaises, elles apportent une contribution majeure au commerce extérieur national.

Au-delà de leur contribution matérielle, ces entrepreneurs font aimer la France aux populations locales. Ils la font vivre à l’étranger. Ces ambassadeurs économiques de la France sont hôteliers à Battambang, producteurs de poivre à Kampot, pâtissiers à Oaxaca ou encore restaurateurs gastronomiques à Kuala Lumpur. Or ils représentent un véritable angle mort de notre politique économique, si bien qu’ils ont été oubliés au temps du covid-19. Notre réseau commercial international s’en est trouvé fragilisé et, pour les entreprises de l’Hexagone, un certain nombre de débouchés à l’exportation ont été irrémédiablement perdus.

Je rappelle que le Sénat a été l’une des forces menantes pour soutenir les Français de l’étranger qui avaient besoin d’aide. Ainsi, nous avons adopté la proposition de loi déposée par notre collègue Ronan Le Gleut portant création d’un fonds d’urgence pour les Français de l’étranger victimes de catastrophes naturelles ou d’événements politiques majeurs. Nous avons également proposé d’augmenter progressivement les crédits alloués au programme budgétaire « Français de l’étranger et affaires consulaires ».

La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui confirme cette volonté sénatoriale d’aider les entrepreneurs français à l’étranger.

Nous pouvons saluer l’exigence de notre rapporteur, Serge Babary, et de nos collègues Évelyne Renaud-Garabedian et Jean-Pierre Bansard : ils sont parvenus à inventer des dispositifs efficaces, cohérents et lisibles tout en assurant leur sécurité juridique. Il s’agit là de mesures de bon sens ; on peut d’ailleurs s’étonner qu’elles n’aient pas été mises en œuvre plus tôt.

Avant tout, il était indispensable d’expliciter les termes « entrepreneur français à l’étranger ». La définition large proposée par notre rapporteur à l’article 1er va dans le bon sens : elle a le mérite de la simplicité et permet de contourner les effets de seuils.

De même, le recensement des entrepreneurs français, qui fait l’objet de l’article 2, est une nécessité. Je souligne la lucidité et le pragmatisme dont notre rapporteur a fait preuve en confiant cette tâche aux représentants des chambres de commerce et d’industrie françaises à l’étranger et aux conseillers du commerce extérieur de la France. Dotés d’une approche microéconomique, les intéressés sont les mieux placés pour accomplir ce recensement.

Je soutiens de toutes mes forces la philosophie qui a présidé à la réécriture de l’article 3, créant le label de promotion d’un savoir-faire français. Ce label ne sera pas automatiquement octroyé : dès lors, nous garantissons sa crédibilité.

Je salue également la volonté de M. le rapporteur de conserver un dispositif souple, décentralisé et donc proche du terrain. Ce répertoire sera propre à chaque pays : on évitera ainsi de créer de nouvelles complexités ou contraintes liées à l’hypercentralisation, maladie française chronique. (Mme la présidente de la commission manifeste son approbation.)

Je ne puis que plaider en faveur d’une méthode qui laisse les acteurs locaux des chambres de commerce et d’industrie et les conseillers du commerce extérieur de la France s’organiser. En effet, ils sont les mieux à même de connaître l’environnement économique.

L’aide aux entreprises à l’étranger a trop souffert de la complexité administrative et l’aide publique au développement international a trop péché par ses incohérences. Avec ce texte, nous renverserons un peu la vapeur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Évelyne Perrot et M. Jean-Claude Requier applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Marc. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – Mme la présidente de la commission applaudit également.)

M. Alain Marc. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la France vit au-dessus de ses moyens : voilà plus de quarante ans que les budgets présentent des déficits importants, qui ont inéluctablement pour conséquence de creuser notre dette.

Mais les déficits et la dette publics ne sont pas les seuls indicateurs qui démontrent cette réalité. Les économistes analysent aussi l’actif extérieur net de notre pays, c’est-à-dire l’écart entre les actifs détenus à l’étranger par des Français et les actifs français détenus par des étrangers.

À la fin de l’année 2021, notre actif extérieur net était en notre défaveur de plus de 800 milliards d’euros, soit 33 % du produit intérieur brut (PIB) de la France : le chiffre est colossal. À titre de comparaison, l’actif extérieur net de l’Allemagne est positif et représente 60 % de son PIB. L’actif extérieur net du Japon atteint même 66 % de son PIB.

Cette situation nourrit le sentiment de dépossession qu’éprouvent les Français. Ils sentent que le destin économique de la Nation leur échappe. Pourtant, il n’y a pas de fatalité. À preuve, il y a vingt ans, l’actif extérieur net de la France était positif : en 2002, il était excédentaire de 6 milliards d’euros. La situation s’est dégradée ensuite, notamment à cause de notre solde commercial, qui est devenu structurellement déficitaire.

Nous devons inverser la tendance au plus vite pour renouer avec l’esprit de conquête et gagner des positions à l’étranger.

Nous devons poursuivre nos efforts pour améliorer notre compétitivité : cela vaut pour l’agriculture, bien sûr – en la matière, le Sénat a récemment fait d’ambitieuses propositions –, comme pour tous les autres secteurs.

Il faut aussi que nous capitalisions sur les atouts dont nous disposons à l’étranger. À cet égard, les entrepreneurs français installés hors de France constituent un actif stratégique incontournable. C’est pourquoi je salue cette proposition de loi, qui vise à mieux les reconnaître et à les valoriser.

Le présent texte part d’un constat clair : il n’existe pas de définition juridique des entrepreneurs français à l’étranger. Or il est impossible de valoriser ce qui n’est pas défini.

Monsieur le rapporteur, cher Serge Babary, je salue la nouvelle version de l’article 1er, qui formule une définition simple et efficace. Dans l’ensemble – je tiens à le souligner –, vous avez largement amélioré la rédaction de cette proposition de loi, sur les plans quantitatif et qualitatif.

Quantitativement, vous avez élargi la définition de l’entrepreneur français établi à l’étranger afin qu’un plus grand nombre de personnes soient éligibles au dispositif. En effet, il existe de nombreuses façons d’être entrepreneur : un investisseur impliqué dans le développement d’une entreprise ou un dirigeant, quelle que soit la part du capital qu’il détient, sont aussi des entrepreneurs. Il faut les soutenir.

Qualitativement, vous avez supprimé le caractère automatique de l’octroi du label. Ce dernier sera réservé aux entrepreneurs qui font la promotion de nos savoir-faire et de notre culture en dehors de nos frontières : il n’en aura que davantage de valeur. Le label sera non plus une simple qualification administrative, mais une véritable reconnaissance.

Les membres de notre groupe soutiennent également les autres ajustements apportés au dispositif pour assouplir sa mise en œuvre. Je pense notamment à la constitution des comités chargés d’identifier les entrepreneurs français à l’étranger et à la dénomination exacte du label, qui sera travaillée en concertation avec les représentants compétents. (M. le rapporteur le confirme.)

Les élus de notre groupe voteront bien sûr cette proposition de loi, telle qu’elle a été amendée par M. le rapporteur. J’espère que, comme l’a laissé entendre M. le ministre, le Gouvernement soutiendra cette initiative. Plus vite elle entrera en vigueur, plus vite elle produira ses effets.

Ce dispositif doit nous permettre d’accroître notre souveraineté économique en valorisant nos actifs à l’étranger et donc d’améliorer notre position extérieure nette. Il pourrait devenir la première pierre d’un édifice plus ambitieux : les entrepreneurs français établis hors de France pourraient être invités à développer leurs activités sur le territoire national, à y investir et à y créer des emplois. Ce faisant, l’on favoriserait la réimpatriation des capitaux créés à l’étranger.

Il est bon de vouloir faire venir de grandes entreprises étrangères en France ; mais il est bon aussi de soutenir nos propres entrepreneurs (M. le ministre délégué acquiesce.), en France comme à l’étranger ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains, ainsi quau banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon.

M. Daniel Salmon. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec cette proposition de loi, nous abordons la situation des entrepreneurs français à l’étranger. Le présent texte entend définir en droit leur statut, organiser leur recensement et octroyer un label aux entreprises dont l’activité contribue au rayonnement de la France ou à la promotion d’un savoir-faire français.

Pour la plupart, ces entrepreneurs sont artisans, commerçants ou autoentrepreneurs. Ils sont généralement à la tête de très petites entreprises (TPE) encore peu connectées au réseau des CCI.

À ce jour, il n’existe pas de données qualitatives ou quantitatives sur les entrepreneurs français installés à l’étranger et sur les entreprises qu’ils ont créées localement. Leur situation économique est assez mal connue et souvent fragile. (M. le rapporteur le confirme.) À ce stade, leur définition juridique est inexistante, comme l’ont souligné les travaux en commission.

Nous entendons cette demande d’identification et de reconnaissance, déjà formulée en 2020 dans un rapport d’information de la délégation sénatoriale aux entreprises intitulé Renforcer la résilience des entreprises françaises à létranger.

Mieux connaître ce tissu économique et ces entrepreneurs afin de mieux structurer les réseaux concernés : sur le principe, une telle ambition nous paraît légitime.

La pertinence du texte initial suscitait un certain nombre d’interrogations. Sa principale disposition était la création d’un label regroupant les entrepreneurs dans un répertoire public unique et octroyé automatiquement, sans condition sociale ou environnementale : un tel choix nous paraissait risqué. Il s’agissait au mieux d’une mesure cosmétique, sans réelle plus-value pour les entreprises.

Les modifications adoptées en commission ont le mérite de resserrer un peu le cadre de ce label. M. le rapporteur a conditionné son octroi à l’exercice d’une activité contribuant « au rayonnement de la France », améliorant ainsi la rédaction initiale. Que ce label soit octroyé non plus automatiquement, mais au terme d’une candidature, nous paraît également plus judicieux.

Quant à l’élargissement, à l’article 1er, de la définition de l’entrepreneur français à l’étranger au-delà des seuls Français créateurs d’une entreprise dont ils sont aussi actionnaires majoritaires, il nous semble bienvenu.

Toutefois, nous aurions préféré que l’octroi du label soit assorti de conditionnalités plus explicites et ambitieuses sur les plans éthique, social et environnemental. Ce sera l’objet de nos amendements. Il nous semble important que ce label ne puisse être apposé sur des produits dont l’importation est encadrée, voire interdite en France, par exemple des marchandises contrefaisantes.

À cet égard, le cadre fixé par la commission demeure bien trop large : il ne tient pas compte des conditions de production ou du type de marchandise.

Ce label peut être réellement bénéfique pour les entrepreneurs français à l’étranger s’il vise à valoriser des produits, des comportements et des stratégies avec le même degré d’exigence que pour les entrepreneurs français établis en France.

À nos yeux, son octroi doit être soumis au respect de critères sociaux, environnementaux et sanitaires : en ce sens, il doit s’inspirer de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) existant en droit national.

Valorisons et récompensons les activités vertueuses ou, a minima, celles qui ne sont pas moins-disantes. Alignons-nous sur les dispositifs qui existent déjà en France, dans un souci de non-discrimination : cette démarche relève tout simplement du bon sens.

Je formule également cette remarque, déjà exprimée en commission : les comités locaux constitués en vue de l’attribution du label devront examiner avec vigilance les situations d’optimisation fiscale. C’est une réalité pour certaines entreprises qui ont préféré délocaliser.

De même, rappelons que l’exigence de sobriété, indispensable à la transition écologique, vaut aussi en matière économique. On ne saurait produire pour produire : somme toute, le « développement commercial de la France » et le « rayonnement de la France à l’international » sont des enjeux annexes, voire anecdotiques, face à l’impératif de résilience, véritable enjeu pour la transition de notre tissu économique.

En résumé, les élus du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires soutiennent l’objectif de cette proposition de loi : créer un cadre pour assurer une meilleure connaissance et une plus grande visibilité de ces entrepreneurs, qui peuvent contribuer à la valorisation du savoir-faire français à travers le monde. Toutefois, le label proposé ne va pas changer en profondeur la vie des entrepreneurs français à l’étranger. Il ne répondra pas davantage aux problématiques structurelles des TPE et PME les plus exposées aux crises. À cette fin, d’autres leviers d’action sont évidemment nécessaires.

Notre vote dépendra de la prise en compte des quelques exigences, raisonnables et de bon sens, que nous avons formulées afin de mieux encadrer ce label.

Enfin, comme l’a relevé M. le ministre, veillons à éviter toute confusion entre les entreprises françaises et les entreprises de droit français à l’étranger : il s’agit là d’un point essentiel.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne. (Mme la présidente de la commission applaudit.)

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici réunis pour traiter d’une initiative bienvenue, visant à mieux reconnaître et à mieux soutenir les entrepreneurs français à l’étranger.

Je remercie les auteurs de cette proposition de loi, Évelyne Renaud-Garabedian et Jean-Pierre Bansard, dont on connaît l’expérience entrepreneuriale. Je me suis volontiers associé à eux, en qualité de cosignataire, aux côtés de nombreux collègues.

Je remercie nos collègues députés qui ont, eux aussi, commencé à se pencher sur cette question. Je pense en particulier à Anne Genetet et à Stéphane Vojetta, auteurs d’une proposition de loi dont la philosophie est assez proche de celle-ci. Je n’oublie pas non plus notre rapporteur, M. Babary : ses analyses, précieuses et très pointues, nous permettent d’avancer dans le bon sens.

Ces différents travaux témoignent d’un intérêt croissant et transpartisan pour ce sujet à la fois important et complexe, notamment au regard des enjeux juridiques liés au droit des sociétés en vigueur dans d’autres pays.

J’ai en tête les demandes de soutien qui ont afflué tout au long de la crise sanitaire : force était alors de constater qu’il n’était pas possible d’agir directement en faveur d’entreprises de droit étranger.

Monsieur le ministre, Proparco intervient, comme vous le soulignez, mais dans une zone restreinte, à savoir les pays émergents. (M. le ministre délégué le concède.) Or les entrepreneurs français sont partout de par le monde. Pour les aider, il a donc fallu déployer des trésors de créativité, parfois en soutenant des associations qui allaient les soutenir à leur tour. C’était le cas – je m’en souviens – en Israël.

Je le répète, il s’agit d’un sujet important, d’autant que notre manière d’être au monde n’est pas la même que celle d’autres nations européennes. Sans revenir sur l’exemple de l’Allemagne et sur son tropisme exportateur, j’observe que nous, Français, avons encore des faiblesses à corriger, alors même que nous sommes forts d’une diaspora répartie aux quatre coins du monde. Contrairement à d’autres, elle est souvent bien insérée dans le réseau économique local. Elle crée localement, produit localement, distribue localement ou régionalement.

Le « fabriqué en France » occupe souvent le devant de la scène médiatique et politique. Cet après-midi même, tous les regards étaient tournés vers l’inauguration de la première giga-usine française de batteries, et c’est tant mieux : les projets de relocalisation, les enjeux de souveraineté et la situation de notre balance commerciale sont au cœur de nos préoccupations. Mais le « fabriqué par des Français » n’est pas moins important.

Je pense à ce couple de Français, établi aux Émirats arabes unis, qui a ouvert un magasin de fleurs, puis un second, puis créé une chaîne, qui s’est ensuite implantée en France.

Les success stories sont aussi le fait d’entrepreneurs français à l’étranger. Il est question ici non pas d’évitement fiscal, mais simplement de passion. Je le dis, car l’on perçoit chez les auteurs de certains amendements une forme de défiance. Sachons considérer ces passionnés de la France !

Je pense aussi à toutes ces maisons, évoquées par les précédents orateurs – les boulangeries, les fromageries, les restaurants – qui font rayonner notre gastronomie. Je pense notamment à Éric Ripert, dont Le Bernardin à New York arrive en tête des meilleurs restaurants gastronomiques du monde en 2023 dans le classement établi par la Liste, aux côtés de Guy Savoy.

Je remercie les conseillers du commerce extérieur de la France et CCI France international de leur action sur le terrain.

Voilà 125 ans que les conseillers du commerce extérieur de la France existent – ils sont environ 4 000, femmes et hommes, engagés dans nos régions et à l’étranger au service du rayonnement économique de la France. Ils conseillent nos postes diplomatiques et jouent un rôle très important en matière de formation et de promotion des volontaires internationaux en entreprise. Je salue tout particulièrement l’action du président Alain Bentejac, qui achève son mandat.

Je remercie également CCI France International, institution plus que centenaire, forte de ses 33 000 membres, répartis dans 119 chambres de commerce et d’industrie et 94 pays. Là encore, bravo à Arnaud Vaissié et à tout son conseil d’administration !

Il est légitime que ces parties prenantes constituent l’ossature du comité d’identification, prévu à l’article 2 du texte, tel qu’il résulte des travaux de la commission.

Monsieur le ministre, l’administration ne saurait rester à l’écart de cette procédure : les communautés French Tech sont labellisées par la mission French Tech, administration qui relève du Gouvernement ; le label « Entreprise du patrimoine vivant », dont l’instruction est déléguée à l’Institut national des métiers d’art (INMA), est décerné par l’État.

C’est pourquoi j’ai déposé un amendement tendant à prévoir que le service économique de l’ambassade assure le secrétariat du comité, sur le modèle des conseils consulaires au sein desquels l’administration joue le rôle de rapporteur général. Je remercie le rapporteur d’avoir émis un avis favorable sur cet amendement.

Monsieur le ministre, le ministère des affaires étrangères doit assumer toutes ses compétences, même si certains en son sein considèrent qu’elles ne relèvent pas toutes de son cœur de métier, à l’instar de l’action économique à l’étranger. Je me réjouis donc que l’article 3 rattache ce label au ministère, car il vise à promouvoir la marque France, ainsi que l’a dit Serge Babary. Alors, allons-y, franchement !

Sachez, monsieur le ministre, que nous serons toujours à vos côtés, y compris pour vaincre certains corporatismes et concrétiser les engagements que le Président de la République a pris auprès des Français de l’étranger, qu’ils concernent le pass Culture, le pass Éducation langue française ou le service national universel, etc.

Nous sommes réunis aujourd’hui pour franchir une première étape fondatrice. Je me réjouis du large consensus qui se dégage déjà de nos prises de parole. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains. – M. Jean-Claude Requier applaudit également.)

(M. Pierre Laurent remplace Mme Laurence Rossignol au fauteuil de la présidence.)