M. Guy Benarroche. Si la nouvelle mesure de placement conditionnel sous Arse est la bienvenue, le nouveau délai d’incarcération de quinze jours, qui est fixé par ce texte, nous paraît excessif et ne permet pas de limiter le recours à la détention provisoire, alors que la France subit un taux de surpopulation carcérale historique.

Le délai de quinze jours équivaut à dix jours de plus que le délai prévu par l’article 723-7-1 du code de procédure pénale, relatif à la fixation des modalités de la faisabilité de la peine de détention à domicile sous surveillance électronique.

Afin de renforcer la proportionnalité de la mesure, les auteurs du présent amendement demandent de baisser le délai d’incarcération du mis en cause à cinq jours, conformément au délai prévu à l’article 723-7-1.

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l’amendement n° 183.

Mme Cécile Cukierman. Dans le cadre de l’examen de la faisabilité de l’assignation à résidence sous surveillance électronique, cet amendement vise à réduire le délai d’incarcération du mis en cause à cinq jours, au lieu des quinze jours prévus par le texte actuel.

M. le président. L’amendement n° 118, présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Alinéa 16, première phrase

Après le mot :

jours

insérer les mots :

renouvelable une fois

La parole est à M. Guy Benarroche.

M. Guy Benarroche. En raison des difficultés des services pénitentiaires d’insertion et de probation (Spip), le présent amendement vise à instaurer un renouvellement possible du délai impératif imposé pour l’étude de faisabilité technique.

Les Spip, maillons pourtant essentiels dans la vision d’une politique pénale et carcérale au-delà de l’enfermement, manquent de moyens. Le Sénat a d’ailleurs pris des dispositions, afin d’augmenter considérablement dans les années à venir les ressources humaines de ces services.

Toutefois, pour l’instant, le manque d’effectifs, comme partout, grève les possibilités d’actions des Spip. L’absence d’attractivité de la branche pénitentiaire est aussi due à l’inaction de l’administration dans la gestion des revalorisations statutaires.

C’est pourquoi, afin de ne pas supprimer des chances de bénéficier d’une Arse, nous proposons de permettre de doubler les délais pendant lesquels les Spip effectuent leur étude de faisabilité. Il s’agit de leur laisser le temps de travailler, malgré leurs manques d’effectifs.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 133 est présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

L’amendement n° 185 est présenté par Mmes Cukierman, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 16, troisième phrase

Après les mots :

pour qu’il soit

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

prononcé la mesure prévue à l’article 138 du code de procédure pénale. En l’absence d’ordonnance de placement sous contrôle judiciaire prise dans ces délais, la personne est remise en liberté si elle n’est pas détenue pour une autre cause.

La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l’amendement n° 133.

M. Guy Benarroche. Cet amendement vise à prévoir, dans le cadre d’une création d’une Arse sous condition suspensive de faisabilité et avec incarcération provisoire, qu’en cas d’absence d’enquête de faisabilité, un contrôle judiciaire est prononcé en lieu et place de l’ouverture d’un débat contradictoire sur la détention provisoire.

Nous craignons en effet que la mesure proposée ne soit utilisée au détriment du contrôle judiciaire, ce qui irait à l’encontre des objectifs fixés visant à diminuer le recours à la détention provisoire, compte tenu de la crise de surpopulation carcérale que connaît la France.

Le présent amendement vise donc à pallier cette difficulté en réintroduisant le prononcé d’un contrôle judiciaire dans le dispositif.

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l’amendement n° 185.

Mme Cécile Cukierman. Comme l’a souligné notre collègue Guy Benarroche, l’objectif est bien évidemment de remplacer l’ouverture d’un débat contradictoire sur la détention provisoire par le prononcé d’un contrôle judiciaire en cas d’absence d’enquête et de faisabilité.

Nous craignons en effet, notamment la présidente de notre groupe, Éliane Assassi, que la détention provisoire ne puisse être privilégiée au contrôle judiciaire, ce qui serait contraire à l’objectif initial de limiter son recours et contribuerait à augmenter la surpopulation carcérale.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 36 est présenté par Mmes de La Gontrie et Harribey, MM. Sueur, Kanner, Bourgi, Durain, Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 128 est présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 16, quatrième phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à Mme Laurence Harribey, pour présenter l’amendement n° 36.

Mme Laurence Harribey. Le présent amendement vise à supprimer la possibilité du recours au dispositif de visioconférence pour l’organisation du second débat contradictoire prévue dans le cadre de la création de la nouvelle procédure d’Arse sous condition suspensive de faisabilité.

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l’amendement n° 128.

M. Guy Benarroche. Ces nouvelles modalités de jugement sont, selon le Conseil national des barreaux, contraires au droit au procès équitable, qui suppose un accès au juge, la publicité de l’audience, une égalité des armes.

Le Syndicat de la magistrature, lui aussi, déplore que la visioconférence ne cesse d’être étendue pour des raisons de gestion, au mépris de la qualité de la justice et des droits des personnes en cause.

Pourtant, le Conseil constitutionnel a rappelé à plusieurs reprises « l’importance de la garantie qui peut s’attacher à la présentation physique de l’intéressé devant la juridiction pénale ». Il a également indiqué qu’un réel accès au juge et une réelle oralité des débats priment les objectifs de bonne administration de la justice et de protection de la santé publique.

Enfin, la question restera celle de la mise en œuvre d’une telle disposition en juridiction, les effectifs actuels de JLD rendant impossible l’absorption d’une telle charge supplémentaire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. L’amendement n° 13 vise à supprimer la possibilité d’incarcération des personnes dans le cadre de la détention provisoire le temps strictement nécessaire à la mise en place d’une Arse.

Or cette possibilité vise à éviter que les personnes ne disparaissent dans la nature et de se donner le temps de vérifier la faisabilité du dispositif. Il s’agit d’un dispositif très encadré et dont les garanties sont proportionnelles à l’objectif. Je vous rappelle qu’il ne concerne que des peines encourues supérieures ou égales à trois ans d’emprisonnement. La durée de quinze jours maximum de détention provisoire doit permettre de vérifier la faisabilité technique par les services de probation et d’insertion pénitentiaire, d’organiser un débat contradictoire et de garantir que le placement en détention fasse l’objet d’une ordonnance motivée, avec des éléments précis et circonstanciés.

La suppression d’un tel dispositif ne nous paraît pas justifiée dès lors que celui-ci répond à un vrai objectif d’efficacité et de faisabilité. Avis défavorable.

Les amendements identiques nos 132 et 183 visent à abaisser la période de quinze jours de détention provisoire préalable à une Arse. Selon moi, un délai de cinq jours n’est pas suffisant et ne permettra pas de mener une vraie enquête. Il faut, par exemple, s’assurer que la personne dispose d’un logement et que la mise en place du bracelet électronique est adaptée. Avis défavorable.

L’amendement n° 118 vise à prévoir une prolongation du délai pour vérifier la faisabilité technique de l’Arse. Contrairement aux amendements précédents, il s’agit d’allonger le délai de la détention provisoire. Une telle mesure pose, à nos yeux, un problème de cohérence. La durée de dix jours donnée au Spip pour rendre son rapport est conçue pour s’intégrer au temps de la détention provisoire, qui est de quinze jours. Comment pourrions-nous l’allonger ?

La vraie solution consiste à donner plus de moyens au Spip. C’est la raison pour laquelle nous avons voté dans la loi de programmation le fléchage de 600 emplois pour les Spip. Il s’agit de pouvoir accompagner une exécution des peines adaptée. Avis défavorable.

Les amendements identiques nos 133 et 185 visent à recourir au contrôle judiciaire plutôt qu’à la détention provisoire avant la mise en en place de l’Arse. En général, la détention provisoire est prononcée dès lors que le contrôle judiciaire n’est pas adapté ou n’a pas fonctionné. Le choix du contrôle judiciaire doit donc être laissé aux magistrats. Il s’agit non pas de dispositifs concurrents, mais complémentaires. Avis défavorable.

Les amendements identiques nos 36 et 128 visent à supprimer la possibilité de recourir à la visioconférence pour l’audience qui doit statuer sur la mise en place de la détention provisoire en cas d’impossibilité de recourir à l’Arse.

Lorsque la mise en œuvre de l’Arse n’est pas possible, le prévenu pourra être maintenu en détention provisoire ou orienté vers un contrôle judiciaire. Néanmoins le recours à la visioconférence est une procédure complémentaire, qui intervient à la suite de la première décision prise sur le recours à la détention provisoire préalable à la mise en place de l’Arse. Cela semble proportionné. La suppression proposée aggraverait la procédure. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. En réalité, on utilise beaucoup moins l’Arse dans le cadre de la mise en examen que dans le cadre d’une mise en liberté ultérieure. Pourquoi ? Parce que quand on met en examen, on ne dispose pas de tous les éléments, et il faut du temps pour les recueillir.

L’incarcération vise évidemment à éviter que le mis en examen ne disparaisse. Mais – pardonnez-moi d’insister lourdement – elle limite aussi de facto la détention provisoire. En effet, une fois que les recherches ont été faites, si elles sont positives, on s’oriente alors vers la mise en œuvre de l’Arse, et c’est un détenu de moins. Voilà la réalité du texte que je défends.

Sur ces amendements, tout a parfaitement été dit par Mme la rapporteure. Vous souhaitez, par exemple, limiter à cinq jours le délai d’incarcération. Mais si le 1er mai tombe un lundi, soit juste après le week-end, combien de temps restera-t-il pour effectuer les vérifications ? Si ces dernières n’aboutissent pas, l’Arse ne pourra pas être mise en œuvre et nous aurons un détenu de plus. Or je sais, monsieur le sénateur Benarroche, que vous vous battez corps et âme contre la surpopulation carcérale. Par ailleurs, vous proposez de porter le délai imposé pour l’étude de faisabilité technique à dix jours, ce qui établirait à vingt-cinq jours au lieu de quinze le délai d’incarcération !

Je suis donc défavorable à tous ces amendements, car notre objectif – je le redis ici – est de limiter la détention.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 13.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 132 et 183.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 118.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 133 et 185.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 36 et 128.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 217, présenté par MM. Mohamed Soilihi, Richard, Théophile, Bargeton et Buis, Mme Cazebonne, MM. Dagbert et Dennemont, Mme Duranton, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne, Lévrier, Marchand, Patient et Patriat, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch et Mme Schillinger, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 19

Insérer cinq alinéas ainsi rédigés :

…° L’article 148-2 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Toute juridiction appelée à statuer en application de l’article 148-1, sur une demande de mise en liberté se prononce après avoir entendu le ministère public, le prévenu, auquel est préalablement notifié son droit de se taire sur les faits qui lui sont reprochés, ou son avocat. Si la personne a déjà comparu devant la juridiction moins de quatre mois auparavant, le président de cette juridiction peut en cas de demande de mise en liberté refuser la comparution personnelle de l’intéressé par une décision motivée qui n’est susceptible d’aucun recours. » ;

b) Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« Toutefois, lorsqu’au jour de la réception de la demande il n’a pas encore été statué soit sur une précédente demande de mise en liberté, soit sur l’appel d’une précédente décision de refus de mise en liberté, les délais prévus ci-dessus ne commencent à courir qu’à compter de la décision rendue par la juridiction compétente. Faute de décision à l’expiration des délais, il est mis fin à la détention provisoire, le prévenu, s’il n’est pas détenu pour une autre cause, étant d’office remis en liberté. »

La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.

M. Thani Mohamed Soilihi. Cet amendement de coordination vise à modifier l’article 148-2 du code de procédure pénale, qui organise les audiences du tribunal correctionnel après renvoi du juge d’instruction en cas de demande de mise en liberté ou de mainlevée totale ou partielle du contrôle judiciaire.

Il convient de supprimer ce dernier cas, dans la mesure où l’article 3 tend à confier au juge des libertés et de la détention l’examen des demandes de modification ou de mainlevée de la mesure de contrôle judiciaire ou d’assignation à résidence sous surveillance électronique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Cet amendement nous est présenté comme un amendement de coordination pour les modalités de prise de décisions relatives aux demandes de liberté par le JLD, mais nous pensons qu’il va au-delà, en supprimant, notamment, des conditions de délai.

Nous aimerions que M. le garde des sceaux nous donne davantage de précisions, car il s’agit d’un sujet extrêmement technique. En l’état, la commission des lois a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. En réalité, on donne compétence au JLD. Il faut par conséquent beaucoup moins de temps pour que le JLD se réunisse avec lui-même que pour recomposer une juridiction dans sa complétude.

Cet amendement me semble opportun et utile. Avis favorable.

M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Certains points restent obscurs. Mais la navette permettra peut-être d’améliorer le texte. Avis de sagesse, à titre personnel.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 217.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 14 rectifié, présenté par MM. Le Rudulier, Bascher et Belin, Mme Belrhiti, MM. Brisson, Cambon, Cardoux, Chatillon et Cuypers, Mme Devésa, M. Duffourg, Mme Dumont, MM. Frassa et Genet, Mmes F. Gerbaud et Goy-Chavent, M. Guerriau, Mmes Joseph, Lassarade et Lavarde et MM. Milon, Pellevat, Retailleau, Tabarot et C. Vial, est ainsi libellé :

Alinéas 20 à 27, 29 à 31

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Brigitte Devésa.

Mme Brigitte Devésa. L’article 3 tend notamment à renforcer les droits du témoin assisté, en particulier en matière d’expertises.

Or ces dispositions sont de nature à alourdir sensiblement la procédure devant le juge d’instruction, au détriment du travail des enquêteurs, par la multiplication des demandes et des recours.

De telles mesures aboutiront nécessairement à augmenter les délais, déjà longs, du traitement des dossiers d’instruction.

M. le président. L’amendement n° 11, présenté par Mme Devésa, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 20, 21, 25 à 27, 30 à 34

Supprimer ces alinéas.

II. – Alinéa 37

Supprimer les mots :

et le témoin assisté

La parole est à Mme Brigitte Devésa.

Mme Brigitte Devésa. Le statut de témoin assisté est un statut intermédiaire entre celui de témoin et celui de mis en examen. Il est appliqué aux personnes contre lesquelles il existe des soupçons de culpabilité, mais des soupçons moins forts que ceux qui pèsent contre les personnes mises en examen.

Comme le statut de mis en examen, le statut de témoin assisté confère un certain nombre de droits au cours de la procédure judiciaire. Ces droits semblent aujourd’hui suffisants pour garantir le droit à la défense des témoins assistés sans qu’il soit besoin de les étendre davantage.

Cet amendement vise donc à supprimer l’extension des droits du témoin assisté.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. L’amendement n° 14 rectifié vise à supprimer le renforcement des droits du témoin assisté. Comme nous l’avons souligné à plusieurs reprises, nous sommes au milieu du gué concernant ce statut du témoin assisté. La proposition du Gouvernement ne va pas jusqu’au bout des préconisations des États généraux de la justice, qui demandaient que le statut de témoin assisté soit réellement la règle, la personne n’étant mise en cause qu’au terme de ce statut de témoin assisté.

Néanmoins, il est prévu de renforcer les droits du témoin assisté. Même si le dispositif n’est pas totalement abouti, les droits renforcés permettront de mieux défendre la place du témoin assisté. Par ailleurs, la possibilité de faire constater la prescription de l’action est exigée par le Conseil constitutionnel. Il nous semble donc, là aussi, que les garanties sont suffisamment assurées même si le statut tel qu’il est prévu n’est, selon nous, pas encore totalement efficient.

J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement, ainsi que sur l’amendement n° 11.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Les États généraux préconisaient en effet que le statut de témoin assisté devienne la règle. Mais, au fond, il s’agit d’une espèce de basculement sémantique, puisque les mis en examen deviennent alors témoins assistés, ce qui ne change pas grand-chose à leur sort.

Je le dis avec toutes les précautions qui s’imposent, mais le témoin assisté est plus « présumé innocent » encore que le mis en examen. Il me paraît donc tout à fait naturel qu’il ait autant de droits. Il ressent sans doute le besoin et l’envie de faire triompher son innocence, d’être totalement blanchi. Bien qu’il ne soit pas encore mis en examen, il est tout de même dans une procédure judiciaire dont on peut penser a priori qu’elle n’est pas formidablement agréable !

Si l’on détaille les droits que l’on confère aux mis en examen, on lui donne, par exemple, la possibilité de demander une expertise. Le mis en examen a également la possibilité de contester une décision du juge qui refuse de faire droit à une demande de constatation de la prescription de l’action publique. Pourquoi n’en serait-il pas de même pour le témoin assisté ?

Si les faits qui lui sont « reprochés » sont prescrits, quand fera-t-il valoir ses droits ? Il doit attendre la fin de la procédure, qui est pesante. Or le témoin assisté a des droits. Je souhaite véritablement que l’on s’aligne ici sur les droits du mis en examen. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 14 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 11.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 124, présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 20

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Au premier alinéa de l’article 161-1, après les mots : « aux parties », sont insérées les mots : « et aux témoins assistés » ;

La parole est à M. Guy Benarroche.

M. Guy Benarroche. Cette proposition s’inscrit dans la volonté de réforme du statut de témoin assisté engagée par les États généraux de la justice et reprise dans le projet de loi.

Par souci de cohérence, les mesures doivent être étendues à l’ensemble de la section traitant de l’expertise dans le code de procédure pénale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Cet amendement vise à compléter l’information des témoins assistés en leur communiquant les demandes d’expertise.

La commission avait émis un avis défavorable, pensant qu’une telle mesure alourdirait les procédures. Néanmoins, je comprends l’objet de cet amendement et, à titre personnel, j’y suis plutôt favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Avis de sagesse bienveillante. Si l’on donne davantage de droits aux témoins assistés, les magistrats auront davantage recours à ce statut. C’est aussi l’un des objectifs.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 124.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements et deux sous-amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 186, présenté par Mmes Cukierman, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 38 à 42

Supprimer ces alinéas.

II. – Alinéas 60 à 67

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Nous entamons une série d’amendements portant sur les enjeux de l’activation à distance d’un appareil électronique sans le consentement de son propriétaire. Nous proposons de supprimer cette possibilité.

Les nouvelles techniques d’enquête prévues dans le projet de loi diffèrent considérablement des pratiques de sonorisation de lieux et d’écoutes téléphoniques en raison, notamment, de l’omniprésence des appareils connectés dans la vie quotidienne.

À nos yeux, le volume et la qualité des données qui seront écoutés en temps réel par les officiers de police judiciaire sont disproportionnés.

Nous nous inquiétons également du fait que les journalistes ne soient pas exclus de l’application de ces dispositions, ce qui constitue un risque pour la liberté d’information et la démocratie.

Nous dénonçons le fait que, bien que les avocats soient exclus du dispositif, les enquêteurs pourraient toujours écouter et prendre connaissance des conversations entre un client et son avocat dans un cadre confidentiel, sans les retranscrire. Une telle disposition remettrait en question la sincérité et la confidentialité des échanges avec l’avocat.

Nous considérons donc nécessaire d’interdire l’activation à distance pour les personnes qui résident ou qui exercent habituellement leur activité professionnelle dans les lieux visés par l’article 706-96-1 du code de procédure pénale.

M. le président. L’amendement n° 229, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge et M. Salmon, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 38 à 42

Supprimer ces alinéas.

II. – Alinéas 62 à 67

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Guy Benarroche.

M. Guy Benarroche. Nous pensons qu’il faut toujours être extrêmement vigilant quand nous sommes face à de nouvelles techniques susceptibles de porter atteinte à la vie privée. La proposition du Gouvernement d’autoriser l’activation à distance des appareils connectés à internet dans le contexte de l’instruction et de l’enquête portant sur certains délits et crimes nous paraît porter indéniablement une atteinte à la vie privée particulièrement grave. Ce n’est pas seulement nous qui le disons ; le Conseil d’État l’a aussi relevé.

Une fois activés, ces appareils seront utilisés pour localiser des suspects, pour capter des conversations et des images via la caméra. C’est particulièrement grave, parce que la captation concerne aussi des personnes tierces. Prenons le cas où un portable est activé à distance, un seul suspect étant visé. Quand ce dernier va prendre son téléphone avec lui dans le métro, toutes les conversations seront alors captées. Idem s’il va au restaurant. Ainsi, tout échange dans l’espace public est alors potentiellement sous écoute. C’est inédit !

Pire, imaginons maintenant que le suspect se rende dans le bureau de son avocat avec son portable. L’entretien sera alors capté et transmis par l’appareil. Non seulement cela met à mal le secret professionnel de l’avocat, mais cela contourne aussi l’interdiction de mettre sous écoute le téléphone des avocates et des avocats.

Les garanties potentielles resteront toujours insuffisantes, car elles interviennent seulement ex post, une fois les conversations et les images captées et transmises.

Enfin, il y a déjà des techniques d’enquête permettant de mettre des suspects sous écoute et de les suivre dans leurs mouvements, mais les atteintes à la vie privée qu’elles causent sont moins importantes.

Pour ces raisons, les avantages que représente cette nouvelle technologie spéciale d’enquête ne peuvent pas justifier les graves atteintes portées aux droits individuels. C’est pourquoi les écologistes au Sénat s’y opposent avec véhémence.

M. le président. Le sous-amendement n° 283, présenté par Mmes de La Gontrie et Harribey, MM. Sueur, Kanner, Bourgi, Durain, Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Amendement n° 229, alinéas 1 et 2

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Laurence Harribey.

Mme Laurence Harribey. Je ne reprends pas tout l’argumentaire qui vient d’être développé. Ce sous-amendement vise à supprimer la possibilité d’activer à distance un appareil connecté à des fins de captation sonore ou d’image, tout en maintenant la possibilité d’activer à distance un appareil connecté à des fins de géolocalisation.