M. Guy Benarroche. Cet amendement de repli, identique à celui que va présenter Mme Canayer, vise à permettre aux docteurs en droit de passer le concours professionnel. Cela permettra de remédier en partie aux difficultés que l’amendement n° 36 tendait à résoudre.

Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur, pour présenter l’amendement n° 77.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Cet amendement, qui a été très bien défendu par notre collègue Benarroche, vise à offrir aux docteurs la possibilité de passer le concours professionnel.

Une telle proposition me paraît aller dans le sens de l’intention initiale du Gouvernement et s’inscrire dans le droit fil de la création de l’Institut national du service public (INSP).

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Le concours professionnel est destiné aux candidats qui justifient d’une expérience particulièrement qualifiante pour être magistrats, puisque la formation qui leur sera dispensée sera plus courte.

C’est la raison pour laquelle les durées d’activité professionnelle requises pour présenter ce concours sont réduites pour les professionnels ayant une activité très proche de la sphère judiciaire – je pense aux avocats, aux juristes assistants, aux attachés de justice ou aux directeurs de service de greffe.

Les docteurs en droit, quand bien même ils justifient d’une expérience de cinq années d’enseignement ou de recherche, ne peuvent se prévaloir d’une expérience qualifiante. Ils n’ont cependant pas été lésés, puisque d’autres voies d’accès, qui leur permettent de bénéficier d’une formation plus longue, leur sont ouvertes.

Par ces amendements identiques, il est proposé d’ouvrir aux docteurs en droit la possibilité de passer le concours professionnel sous certaines conditions qui sont les mêmes que celles qui leur permettent d’ores et déjà de présenter le troisième concours.

Je présenterai ultérieurement un amendement visant à rétablir une voie d’accès spécifique à ce troisième concours pour les docteurs en droit titulaires d’un autre diplôme d’études supérieures et qui ne justifient d’aucune expérience professionnelle, et ce afin de tenir compte de la spécificité de leur parcours.

Pour l’ensemble de ces raisons, je suis défavorable à ces deux amendements identiques.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 44 et 77.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 33, présenté par Mmes Harribey et de La Gontrie, MM. Sueur, Bourgi, Durain, Kanner, Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 49, première phrase

Après le mot :

probatoire

rédiger ainsi la fin de la phrase :

en juridiction de trois mois organisée par l’École nationale de la magistrature effectuée selon les modalités prévues à l’article 19.

II. – Alinéa 57

Après le mot :

complémentaire

insérer les mots :

de douze mois

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ce projet de loi organique prévoit de renforcer le recrutement de magistrats au meilleur niveau possible en ouvrant les accès latéraux à ce corps.

Si le dispositif proposé à l’alinéa 49 du présent article est intéressant, il me semble que les durées de formation et de probation ne sont pas compatibles avec la réalité du métier d’avocat.

Si j’ai bien compris, à l’issue d’une première sélection, les candidats devront en effet effectuer un stage probatoire d’une durée de douze mois, au terme duquel certains stagiaires pourront ne pas être retenus. De fait, il sera très difficile pour les stagiaires de mettre en sommeil leur activité professionnelle pendant douze mois, sachant qu’ils pourront, à terme, ne pas être retenus !

Je propose donc de réduire la durée du stage probatoire à trois mois, et de porter la durée de la formation qui suivra celui-ci à quinze mois.

Il s’agit non pas d’en rabattre sur la qualité des personnes recrutées, mais, conformément à votre objectif, monsieur le garde des sceaux, de rendre cette filière attractive en ajustant les modalités d’intégration aux impératifs qui s’imposent aux candidats.

Porter la durée du stage probatoire à trois mois permettrait de rapprocher celle-ci de la durée d’une période d’essai, ce qui est suffisant pour juger si un candidat est absolument inadapté à la fonction qu’il envisage d’occuper.

Mme la présidente. L’amendement n° 68 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 49

Supprimer les mots :

, dont la durée ne peut être inférieure à dix-huit mois

II. – Alinéa 54

Supprimer les mots :

, dont moins de la moitié des membres sont magistrats en activité ou honoraires,

III. – Alinéa 96

Remplacer les mots :

, de la commission d’avancement ou du jury prévu à l’article 25-2

par les mots :

ou de la commission d’avancement

IV. – Alinéa 129

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Avoir les moyens d’embaucher est une chose ; être effectivement en mesure de le faire en est une autre.

Tout en saluant le travail mené par Mmes les rapporteures, dont j’ai d’ailleurs repris un certain nombre de propositions, je ne peux que m’opposer à certaines évolutions introduites par la commission des lois, notamment le rétablissement de certaines dispositions qui sont d’ordre exclusivement juridique.

La composition des jurys relève en effet du pouvoir réglementaire. De fait, la loi organique ne précise la composition d’aucun des différents jurys qui existent déjà.

La commission souhaite inscrire dans le texte que le jury est minoritairement composé de magistrats.

S’agissant d’un jury, non pas de recrutement, mais d’aptitude, la présence de magistrats en nombre suffisant me paraît nécessaire.

En outre, parmi les neuf membres du jury d’aptitude, quatre sont aujourd’hui des magistrats. Ces derniers sont donc minoritaires, et il n’y a aucune raison que cela change.

Je souhaite que le champ du pouvoir réglementaire soit respecté, et qu’une telle limitation ne soit pas inscrite dans la loi.

Par ailleurs, la disposition relative à la proportion de magistrats détachés comporte un risque de censure constitutionnelle. Rien ne justifie de prendre un tel risque dans la mesure où le quota actuellement autorisé et validé par le Conseil constitutionnel est loin d’être atteint.

La commission a également souhaité préciser que les magistrats en service extraordinaire ne peuvent être nommés membres du jury d’aptitude des stagiaires. Cette précision est inutile, car s’agissant de la composition d’un jury, la définition des magistrats de l’ordre judiciaire retenue par le Conseil constitutionnel exclut les magistrats en service extraordinaire.

J’en viens enfin à la durée de la formation des stagiaires, que la commission souhaite encadrer dans la loi organique. Cette disposition me pose une vraie difficulté, car un tel niveau de norme n’est pas requis.

Aucune durée de formation n’est précisée dans la loi organique, ni pour les auditeurs de justice, ni pour les candidats à l’intégration, ni pour les lauréats des concours complémentaires. Je ne vois aucune raison de déroger à cette règle, et ce d’autant moins que le Gouvernement a indiqué en toute transparence qu’il envisageait de fixer, pour l’exercice de seules fonctions généralistes, la durée de formation à un minimum de douze mois.

Si la durée de formation est portée à dix-huit mois, le Gouvernement ne sera pas en mesure de tenir son engagement relatif au recrutement de 1 500 magistrats dans les délais qu’il s’est fixés, ce qui est pourtant le but de ce texte.

Les moyens importent, mais il nous faut aussi recruter des magistrats si nous voulons apporter à notre justice le souffle dont elle a tant besoin.

Telle est, au fond, la raison essentielle pour laquelle je vous demande, mesdames, messieurs les sénateurs, d’adopter cet amendement et, partant, de rétablir certaines dispositions du projet du Gouvernement.

À défaut, nous ne pourrons pas tenir nos engagements. Or pour me rendre toutes les semaines en juridiction, je puis vous dire que leur mise en œuvre concrète est particulièrement attendue.

Aux greffiers et magistrats qui me demandent ce qu’ils doivent faire en attendant que ce texte soit voté et applicable, je ne peux que répondre qu’il leur faut patienter encore un peu. C’est dire les attentes que suscite ce texte, et s’il importe de mettre en œuvre ces dispositions que – je le crois – nous souhaitons collectivement.

Mme la présidente. L’amendement n° 8, présenté par Mmes Harribey et de La Gontrie, MM. Sueur, Bourgi, Durain, Kanner, Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 54, première phrase

Remplacer les mots :

dont moins de la moitié des membres sont magistrats en activité ou honoraires

par les mots :

dont la moitié des membres au moins sont magistrats en activité ou honoraires de l’ordre judiciaire

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. L’amendement n° 33 vise à porter la durée de formation des stagiaires à quinze mois, ce qui reviendrait à amoindrir la durée actuellement prévue, que la commission a fixée à un minimum de dix-huit mois, en augmentant la seule durée du stage d’application en juridiction, monsieur le garde des sceaux.

Je comprends bien l’enjeu de recruter 1 500 magistrats, et je sais combien ces recrutements sont attendus dans les juridictions – nous en débattons depuis plusieurs années lors de l’examen du projet de loi de finances.

Il importe toutefois que les magistrats soient bien formés et qu’ils disposent de compétences suffisantes lorsqu’ils arrivent en juridiction. Telle est la raison pour laquelle nous proposons une formation d’au moins dix-huit mois et une extension du stage de préaffectation en juridiction.

Il est exact que, lors de certaines auditions auxquelles Mmes Harribey et de La Gontrie ont assisté, nous avons été alertés sur la situation des avocats et des chefs d’entreprise qui passent le concours et qui doivent mettre leur activité professionnelle en sommeil pendant la durée de leur formation, ce qui les place dans une situation d’instabilité d’autant plus grande qu’ils peuvent ne pas être intégrés à l’issue de ce stage.

C’est pourquoi je présenterai ultérieurement un amendement visant à adapter les conditions de la formation à la situation professionnelle des stagiaires.

En tout état de cause, l’avis est défavorable sur l’amendement n° 33.

L’amendement n° 68 rectifié tend à rétablir le texte initial du Gouvernement, largement modifié par la commission.

Je ne reviendrai pas sur la durée de la formation, que je viens d’évoquer.

Par ailleurs, bien que la composition du jury relève du niveau réglementaire, j’estime que nous pouvons tout de même fixer un cadre dans la loi organique. Pour éviter tout risque de corporatisme, la commission a ainsi précisé que le jury ne peut pas être composé d’une majorité de magistrats.

Enfin, pour ce qui concerne l’ouverture de la proportion de magistrats détachés, si le quota d’un vingtième n’est certes pas atteint, il me paraît toutefois opportun de relever celui-ci, car j’estime qu’il faut encourager le détachement des magistrats. Telle est la raison pour laquelle la commission a fixé ce quota à un quinzième.

L’avis est donc défavorable sur l’amendement n° 68 rectifié.

Enfin, l’amendement n° 8 tendant à revenir sur les dispositions relatives à la composition du jury professionnel adoptées par la commission, j’y suis également défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 33 et 8 ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Je tiens à rappeler que la durée de formation est aujourd’hui de six mois. Vous ne m’avez pas répondu sur ce point qui inquiète grandement les personnes qui envisagent d’entrer dans la magistrature, madame la rapporteure.

Si je vous rejoins pleinement quant à l’exigence d’excellence, je rappelle qu’un jury d’aptitude se prononce sur l’intégration des candidats.

L’aptitude des candidats qui ont exercé la profession d’avocat pendant de nombreuses années ne fait du reste pas de doute.

En tout état de cause, le Gouvernement juge aujourd’hui crucial d’élargir ces passerelles, qui, en l’état, sont bien trop étroites.

L’avis est donc défavorable sur les amendements nos 33 et 8.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Richard, pour explication de vote.

M. Alain Richard. Permettez-moi d’apporter un soutien – seulement partiel – au garde des sceaux.

J’estime qu’il est tout à fait soutenable, en droit, d’inscrire dans la loi organique que le jury doit être composé d’une majorité de non-magistrats, car une telle disposition contribue à encadrer les conditions d’accès à la profession.

Pour autant, celle-ci est inopportune sur le fond car, comme l’a indiqué le garde des sceaux, ce jury doit apprécier la capacité des candidats à exercer en juridiction. Les membres de ce jury qui ne sont pas des professionnels de l’activité juridictionnelle, et qui jouent à ce titre un rôle moral, doivent donc rester minoritaires en son sein.

Je me permets enfin de rappeler au Gouvernement, car il est assez fréquent que les parlementaires franchissent la ligne qui délimite les champs législatif et réglementaire, qu’il existe une procédure de déclassement, dont le Gouvernement ne fait pas usage, mais à laquelle le Conseil constitutionnel se prête volontiers, qui permet de rendre sa juste place à une disposition de forme législative qui relève du domaine réglementaire.

Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Pour vous répondre sur la durée de la formation, monsieur le garde des sceaux, je répète que l’allongement de la durée de formation introduit par la commission est sans conséquence sur la formation théorique, dont la durée reste inchangée.

En revanche, en portant la durée de formation à un minimum de dix-huit mois, nous allongeons le stage de préaffectation durant lequel les magistrats stagiaires, déjà affectés dans une juridiction, pourront se former auprès de leurs confrères tout en exerçant leurs fonctions.

Sans se heurter à l’atteinte de l’objectif de recrutement que vous visez, monsieur le garde des sceaux, une telle disposition permet donc de garantir la qualité de la formation des magistrats stagiaires.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 33.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 68 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 8.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 78, présenté par Mmes Canayer et Vérien, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 49

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Le régime de stages et d’études est adapté à leur formation d’origine, à leur expérience professionnelle et, le cas échéant, à la poursuite de leur activité professionnelle.

II. – Après l’alinéa 52

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article. » ;

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Cet amendement que j’ai déjà évoqué vise à adapter le régime de stages et d’études à la formation d’origine, à l’expérience professionnelle et, le cas échéant, à la poursuite de l’activité professionnelle des stagiaires.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. La disposition que vous proposez d’introduire pour les stagiaires issus du concours professionnel me paraît incompatible avec le statut de ces derniers, madame la rapporteure.

En effet, la formation – dont la durée proposée par le Gouvernement fait l’objet de critiques – doit être suivie à plein temps. Elle ne peut donc pas être adaptée pour permettre un cumul d’activité.

Cette règle vaut d’ailleurs pour tous les fonctionnaires stagiaires, qui doivent se consacrer entièrement à leur formation. Il en est de même pour les magistrats.

Tous les stagiaires seront rémunérés pendant l’intégralité de cette formation.

De plus, j’imagine difficilement qu’un avocat puisse effectuer son stage juridictionnel en même temps qu’il poursuit son activité libérale, même en dehors du ressort, sans faire naître un risque de conflit d’intérêts.

Je rappelle, enfin, que le statut de la magistrature prévoit divers statuts qui permettent l’exercice à temps incomplet des fonctions de magistrat et qu’en pareille hypothèse un cumul avec une autre activité professionnelle est possible. C’est notamment le cas des magistrats à titre temporaire, qui, d’ailleurs, bénéficient, en outre, d’une voie d’intégration définitive dédiée.

L’intégration dans la magistrature doit être un véritable choix. En conséquence, je suis viscéralement opposé à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Une fois n’est pas coutume, je partage absolument l’avis du garde des sceaux.

La prise de risque est maximale.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Oui !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C’est bien pourquoi il eût fallu voter mon amendement n° 33 ! (Sourires.)

Il est intéressant de voir comment vous tournez autour du problème. Comment faire pour qu’un avocat qui exerce puisse changer de voie professionnelle sans pour autant mettre en péril son activité si, par hasard, sa reconversion n’aboutit pas ?

Nous avions proposé une voie. Vous l’avez refusée, estimant que celle de la commission était meilleure. Sauf que la vôtre n’est pas acceptable. Il y a une vraie prise de risque, raison pour laquelle vous devriez retirer votre amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Et si nous faisions plus court et à temps plein ?

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C’est ce que je proposais !

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Pas tout à fait…

Mme la présidente. Malheureusement, je ne peux soumettre une nouvelle fois au vote l’amendement de Mme de La Gontrie…

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Je pense que notre objectif est commun : faire en sorte que les avocats qui font le choix d’intégrer la magistrature ne subissent pas une période de formation trop longue qui mette en péril leur activité professionnelle.

La solution proposée par Mme de La Gontrie ne nous semblait pas satisfaisante, parce qu’elle créait des systèmes qui étaient trop dérogatoires.

Aujourd’hui, nous proposons une solution plus large, qui permette des adaptations. Elle n’est certainement pas satisfaisante. Peut-être devons-nous profiter de la navette pour trouver une solution efficace en la matière.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Chiche !

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Je retire l’amendement.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Nous allons trouver une solution !

Mme la présidente. L’amendement n° 78 est retiré.

Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 9, présenté par Mmes Harribey et de La Gontrie, MM. Sueur, Bourgi, Durain, Kanner, Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 78

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…) Au 5° , le mot : « vingt » est remplacé par le mot : « quinze » ;

…) Au septième alinéa, le mot : « vingt-cinq » est remplacé par le mot : « vingt » ;

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. L’amendement est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 55 rectifié n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 9.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 56 rectifié n’est pas soutenu.

La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour explication de vote sur l’article.

M. Philippe Bonnecarrère. Je n’ai pas voulu, tout à l’heure, revenir sur les échanges entre M. le garde des sceaux et plusieurs d’entre vous sur la question de l’impartialité des magistrats. Je souhaite rapidement exprimer de nouveau notre point de vue.

Nous pensons que cette question de l’impartialité est au cœur de la vie, de la démarche et de l’action des magistrats, dans leur action individuelle comme collective.

Nous sommes conscients des enjeux de l’action syndicale et de la liberté d’expression.

Nous avons donc, de manière classique, à trouver un équilibre entre deux objectifs à valeur constitutionnelle, pour reprendre la formulation habituelle du Conseil constitutionnel.

Nous avons bien entendu, monsieur le garde des sceaux, et je vous remercie d’avoir eu la courtoisie de me communiquer une copie de votre courrier, la démarche que vous avez entreprise auprès du CSM pour être mieux informé, pour reprendre votre expression, et bénéficier de sa sagesse sur ces questions.

Nous espérons très simplement que, d’ici à la fin de la navette, nous aurons la réponse du CSM. Nous entendons évidemment en tenir compte.

Nous avons maintenu notre amendement pour que la discussion puisse avoir lieu, pour que le sujet reste dans le débat, mais nous partageons votre souci d’équilibre et votre approche consistant à faire preuve d’une sagesse toute particulière dès lors que l’on touche au monde de la justice.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 1er, modifié.

(Larticle 1er est adopté.)

Article 1er
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027
Article 3

Article 2

I. – L’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est ainsi modifiée :

1° (nouveau) Après le mot : « apprécie », la fin de la seconde phrase du troisième alinéa de l’article 12-1 est ainsi rédigée : « spécialement les critères pris en compte lors de la nomination de ces magistrats, et mentionnés aux articles 15 et 16 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature. » ;

2° Après le même article 12-1, il est inséré un article 12-1-1 ainsi rédigé :

« Art. 12-1-1. – À l’exclusion des aptitudes à l’exercice des fonctions juridictionnelles, l’activité professionnelle des premiers présidents des cours d’appel et des procureurs généraux près lesdites cours, des présidents des tribunaux judiciaires, des tribunaux de première instance, des tribunaux supérieurs d’appel et des procureurs de la République près lesdits tribunaux fait l’objet d’une évaluation établie par un collège d’évaluation.

« Le collège d’évaluation est composé de magistrats de l’ordre judiciaire, en activité ou honoraires, exerçant ou ayant exercé les fonctions de chefs de cour d’appel ou de tribunal judiciaire et de personnalités qualifiées ayant une compétence spécifique en matière de gestion de ressources humaines ou budgétaires. Les personnalités qualifiées ne peuvent représenter moins du quart ni plus de la moitié des membres du collège. Les membres du collège sont nommés par le garde des sceaux, ministre de la justice, sur avis de la formation plénière du Conseil supérieur de la magistrature. Ils exercent leurs fonctions en toute indépendance, dignité, impartialité, intégrité et probité et ne reçoivent ni ne sollicitent d’instruction d’aucune autorité. Ils ne peuvent appartenir ou, depuis moins de dix ans, avoir appartenu au Parlement ou au Gouvernement. Ils ne peuvent être membres du Conseil supérieur de la magistrature.

« Sur le rapport d’un de ses membres, établi sur le fondement d’une sollicitation de l’ensemble de l’environnement professionnel de l’intéressé, le collège procède à l’évaluation, qui apprécie la qualité des pratiques professionnelles et des réalisations, ainsi que les aptitudes des magistrats mentionnés au premier alinéa à l’administration et à la gestion, dans le cadre notamment des orientations de politiques publiques dont ils ont la charge et qui leur sont communiquées par les autorités compétentes.

« Cette évaluation a lieu au moins une fois durant l’exercice de leurs fonctions ou à la demande de l’intéressé et après au moins deux années d’exercice.

« L’évaluation est communiquée au magistrat qu’elle concerne et est versée à son dossier administratif.

« Le magistrat qui conteste l’évaluation réalisée au titre du présent article peut exercer un recours devant le collège d’évaluation.

« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article, notamment la composition du collège d’évaluation, les modalités de désignation de ses membres, les modalités de son intervention et de la participation du magistrat évalué, les critères d’évaluation ainsi que les modalités du recours. »

II. – Le titre II de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature est ainsi modifié :

1° Après le deuxième alinéa de l’article 15, sont insérés vingt et un alinéas ainsi rédigés :

« Pour arrêter chaque proposition de nomination de premier président de cour d’appel, la formation compétente du Conseil supérieur apprécie spécialement :

« 1° Les qualités juridictionnelles ;

« 2° L’expérience antérieure d’une ou de plusieurs fonctions d’animation et de gestion ;

« 3° L’aptitude à exercer des fonctions d’encadrement et à conduire des projets ;

« 4° L’aptitude à conduire et à mettre en œuvre les politiques publiques judiciaires relevant du ressort de la cour d’appel, en collaboration avec les juridictions de ce ressort ;

« 5° L’aptitude à diriger et à gérer l’activité de la cour d’appel et de son ressort ;

« 6° L’aptitude à conduire et animer le dialogue social ;

« 7° L’aptitude à assurer le rôle d’inspection, de contrôle et d’évaluation des juridictions du ressort de la cour d’appel ;

« 8° L’aptitude à collaborer avec le procureur général près la même cour d’appel ;

« 9° L’aptitude à dialoguer avec l’ensemble des auxiliaires de justice du ressort de la cour d’appel, ainsi qu’avec les services de l’État ;

« 10° L’aptitude à représenter l’institution judiciaire.

« Pour arrêter chaque proposition de nomination de président de tribunal judiciaire, la formation compétente du Conseil supérieur apprécie spécialement :

« a) Les qualités juridictionnelles ;

« b) L’aptitude à exercer des fonctions d’encadrement et à conduire des projets ;

« c) L’aptitude à participer aux politiques publiques judiciaires conduites dans le ressort de la cour d’appel ;

« d) L’aptitude à diriger et à gérer l’activité de la juridiction, et à en rendre compte au premier président de la cour d’appel du ressort ;

« e) L’aptitude à animer le ressort de la juridiction et à coordonner l’arrondissement judiciaire ;

« f) L’aptitude à conduire et à animer le dialogue social ;

« g) L’aptitude à collaborer avec le procureur de la République près la même juridiction ;

« h) L’aptitude à dialoguer avec l’ensemble des auxiliaires de justice du ressort de la juridiction, ainsi qu’avec les services de l’État ;

« i) L’aptitude à représenter l’institution judiciaire. » ;

2° L’article 16 est complété par vingt et un alinéas ainsi rédigés :

« Pour donner son avis sur les propositions de nomination du ministre de la justice, garde des sceaux, aux fonctions de procureur général près une cour d’appel, la formation compétente du Conseil supérieur apprécie spécialement :

« 1° Les qualités juridictionnelles ;

« 2° L’expérience antérieure d’une ou de plusieurs fonctions d’animation et de gestion ;

« 3° L’aptitude à exercer des fonctions d’encadrement et à conduire des projets ;

« 4° L’aptitude à conduire et à mettre en œuvre des priorités de politique pénale définies par le ministre de la justice, garde des sceaux, dans le ressort de la cour d’appel, et à coordonner à cet effet l’action des procureurs de la République près les tribunaux judiciaires de ce ressort ;

« 5° L’aptitude à diriger et à gérer l’activité de la cour d’appel et de son ressort ;

« 6° L’aptitude à conduire et à animer le dialogue social ;

« 7° L’aptitude à assurer le rôle d’inspection, de contrôle et d’évaluation des juridictions du ressort de la cour d’appel ;

« 8° L’aptitude à collaborer avec le premier président de la même cour d’appel ;

« 9° L’aptitude à dialoguer avec l’ensemble des auxiliaires de justice du ressort de la cour d’appel, ainsi qu’avec les services de l’État ;

« 10° L’aptitude à représenter l’institution judiciaire.

« Pour donner son avis sur les propositions de nomination du ministre de la justice, garde des sceaux, aux fonctions de procureur de la République près un tribunal judiciaire, la formation compétente du Conseil supérieur apprécie spécialement :

« a) Les qualités juridictionnelles ;

« b) L’aptitude à exercer des fonctions d’encadrement et à conduire des projets ;

« c) L’aptitude à mettre en œuvre les priorités de politique pénale définies par le ministre de la justice, garde des sceaux, sous l’autorité du procureur général près la cour d’appel du ressort ;

« d) L’aptitude à diriger et à gérer l’activité de la juridiction, et à en rendre compte au procureur général près la cour d’appel du ressort ;

« e) L’aptitude à animer le ressort de la juridiction et à coordonner l’arrondissement judiciaire ;

« f) L’aptitude à conduire et à animer le dialogue social ;

« g) L’aptitude à collaborer avec le président affecté de la même juridiction ;

« h) L’aptitude à dialoguer avec l’ensemble des auxiliaires de justice du ressort de la juridiction, ainsi qu’avec les services de l’État ;

« i) L’aptitude à représenter l’institution judiciaire. »