Mme le président. Il va être procédé, dans les conditions prévues par l’article 56 du règlement, au scrutin public solennel sur l’ensemble du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023–2027 dans le texte de la commission, modifié.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 300 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 244 |
Pour l’adoption | 231 |
Contre | 13 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains.)
projet de loi organique relatif à l’ouverture, la modernisation et la responsabilité du corps judiciaire
Mme le président. Il va être procédé, dans les conditions prévues par l’article 56 du règlement, au scrutin public solennel sur l’ensemble du projet de loi organique relatif à l’ouverture, la modernisation et la responsabilité du corps judiciaire dans le texte de la commission, modifié.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 301 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 240 |
Pour l’adoption | 239 |
Contre | 1 |
Le Sénat a adopté.
La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la présidente, monsieur le président de la commission des lois, mesdames les rapporteures, mesdames, messieurs les sénateurs, au grand soir, je préfère les petits matins qui ouvrent sur le jour. (Ah ! et applaudissements sur des travées des groupes RDPI, UC et Les Républicains.)
Sortir la justice de l’ornière dans laquelle elle se trouve depuis trente ans : le Président de la République s’y était engagé, la Première ministre et son prédécesseur en avaient fait l’une de leurs priorités et, personnellement, c’est une ambition que j’ai portée dès mon arrivée à la Chancellerie.
Cet après-midi, c’est vous, mesdames, messieurs les sénateurs, qui envoyez un signal fort à toutes les juridictions et à tous les établissements pénitentiaires de ce pays – et je vous en remercie.
Je veux saluer le travail de Mmes Vérien et Canayer, les rapporteures, ainsi que l’engagement du président de la commission des lois, François-Noël Buffet. (Bravo ! et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Je me félicite des compromis que nous avons trouvés. Même s’il reste quelques divergences, je le dis ici : elles ne sont pas insurmontables.
Enfin, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux vous dire que, selon moi, les débats font honneur à la démocratie parlementaire.
M. Christian Cambon. Au Sénat !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Et c’est dans cet esprit de compromis et de dialogue républicain que, dès demain, je défendrai ce texte à l’Assemblée nationale. (Applaudissements sur des travées des groupes RDPI, RDSE, INDEP, UC et Les Républicains.)
M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Très bien !
Mme le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quatorze heures quarante, est reprise à quatorze heures quarante-cinq.)
Mme le président. La séance est reprise.
3
Mises au point au sujet de votes
Mme le président. La parole est à M. Alain Houpert.
M. Alain Houpert. Lors du scrutin public n° 299 sur l’ensemble de la proposition de loi relative à la reconnaissance biométrique dans l’espace public, je souhaitais voter contre.
Mme le président. La parole est à M. Vincent Éblé.
M. Vincent Éblé. Lors du scrutin public n° 300 sur l’ensemble du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 auquel il vient d’être procédé, je souhaitais m’abstenir.
Mme le président. La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Lors du scrutin public n° 301 sur l’ensemble du projet de loi organique relatif à l’ouverture, la modernisation et la responsabilité du corps judiciaire, j’ai été considéré comme n’ayant pas pris part au vote, alors que je souhaitais m’abstenir.
Mme le président. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn.
Mme Laurence Muller-Bronn. Lors du scrutin n° 300, mon vote n’a pas été pris en compte, alors que je souhaitais voter pour.
Mme le président. Acte vous est donné de ces mises au point, mes chers collègues. Elles seront publiées au Journal officiel et figureront dans l’analyse politique du scrutin concerné.
4
Enjeux de la France communale et avenir de la commune en France
Débat organisé à la demande du groupe Les Républicains
Mme le président. L’ordre du jour appelle le débat, organisé à la demande du groupe Les Républicains, sur les enjeux de la France communale et l’avenir de la commune en France.
Dans le débat, la parole est à M. Philippe Bas, pour le groupe auteur de la demande. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Franck Menonville applaudit également.)
M. Philippe Bas, pour le groupe Les Républicains. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, vous vous souvenez certainement de la définition que Jules Barni, député et philosophe, avait donnée de la commune au début de la IIIe République,…
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Tout à fait !
M. Philippe Bas. … tant cette définition a été fréquemment reprise par le président du Sénat, Gérard Larcher : la commune, c’est la « petite République dans la grande ».
L’est-elle encore aujourd’hui, et pourra-t-elle le rester face à une recentralisation, qui n’est pas seulement rampante, puisqu’elle est, en réalité, de plus en plus assumée par l’État central ? C’est toute la question que soulève ce débat.
Les acquis fondamentaux de la décentralisation de Gaston Defferre sont aujourd’hui fortement rognés.
Qu’il s’agisse des normes qui se sont multipliées, de l’autonomie financière de nos collectivités et, donc, de l’argent des communes ou encore des structures au sein desquelles celles-ci vivent et agissent, nous observons partout un recul généralisé, qui ne cesse de préoccuper les citoyens qui ont accepté ce magnifique engagement au service des autres qu’est la mission municipale.
S’agissant des normes, laissons de côté la multiplication des normes en matière environnementale ou d’accessibilité pour nous concentrer sur ce qui fait l’actualité : les normes d’urbanisme.
Les contraintes extrêmement sévères que l’objectif de zéro artificialisation nette (ZAN) impose au monde rural empêchent les maires d’accompagner la mise en place du nouvel espace de développement qui s’ouvre pour leurs communes grâce au formidable essor du télétravail qui a résulté de l’expérience difficile du confinement vécue par les habitants du monde urbain.
M. Laurent Burgoa. Tout à fait !
M. Philippe Bas. Cette inquiétude est majeure. Notre assemblée s’en est du reste saisie, puisqu’elle a voté un texte qui a suscité tant de méfiance de la part du Gouvernement que son inscription à l’Assemblée nationale le 19 juin prochain ne nous laisse pas augurer tous les résultats que nous en attendons. Mais prenons les étapes dans l’ordre : il s’agira d’une première étape, qui n’est pas suffisante.
Il y a ensuite la question de l’argent. L’autonomie fiscale des communes n’existe pratiquement plus. Le démantèlement de la fiscalité locale, par plusieurs gouvernements successifs d’ailleurs, fait que le lien démocratique par essence qu’est le lien fiscal, qui relie l’effort consenti par nos concitoyens aux projets qu’ils demandent aux municipalités de réaliser et qui les rend conscients de leurs responsabilités de citoyen, est aujourd’hui distendu.
Quant aux dotations, j’aborderai bien sûr la question des dotations globales qui, après avoir été diminuées sous le mandat de François Hollande, n’ont cessé de s’éroder ensuite dans la mesure où elles n’ont jamais été indexées sur la hausse des prix ou sur la hausse des coûts.
J’ose le dire, les coûts pour les communes ne cessent d’augmenter : elles subissent une très forte érosion de leurs finances, une baisse que nous pouvons évaluer à environ 20 % au cours des dix dernières années, bien au-delà de l’inflation. C’est grave !
Bien sûr, on nous expliquera combien il est magnifique que les subventions aux projets, comme la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), ou les dotations de solidarité ne cessent d’augmenter, ce qui est effectivement le cas.
Mais, voyez-vous, mes chers collègues, quand le pouvoir financier échappe à la commune pour revenir à l’État – les dotations sont affectées, je le rappelle –, c’est aussi un recul de la décentralisation.
Je préfère de beaucoup que la commune ait une capacité d’investissement indépendante plutôt qu’elle doive sans arrêt aller au guichet de l’État pour obtenir des financements,…
M. Jean-Michel Arnaud. Très bien !
M. Philippe Bas. … même si je ne crache pas sur les subventions : nos communes en ont besoin, faute de moyens pour financer elles-mêmes leurs projets ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – M. Franck Menonville applaudit également.)
Enfin, et sans revenir sur cette erreur historique qu’a été la suppression de la réserve parlementaire (Applaudissements sur les mêmes travées.), qui était si utile pour les petits projets de nos communes, je veux vous dire que, si les choses s’arrêtaient là, elles seraient déjà très graves. Or elles le sont encore plus, car les communes interviennent maintenant au sein de structures qui, dans bien des cas, les empêchent d’exercer pleinement les responsabilités pour lesquelles les maires et les conseils municipaux ont été choisis démocratiquement par nos concitoyens.
Les communautés de communes XXL ne sont pas seulement des périmètres décidés par voie d’autorité par l’État : elles sont vraiment la manifestation première d’un socialisme étatique (Sourires sur les travées du groupe SER.) qui n’a cessé de se propager dans la gestion des collectivités territoriales.
Au-delà de la taille de ces intercommunalités, il se trouve que certaines sont aussi très fortement intégrées, y compris dans le monde rural.
Passe encore que l’on ait de grands périmètres, à condition qu’en leur sein on mette en œuvre une stratégie, qu’on fixe de grandes orientations en matière de développement économique et touristique.
En revanche, si c’est pour s’occuper des détails, comme l’adduction d’eau et la gestion de l’assainissement, on marche sur la tête ! (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)
Ce dessaisissement des maires a une conséquence immédiate : les citoyens ne les regardent plus comme des représentants ayant la capacité de régler leurs problèmes, mais comme des personnalités qui n’exercent plus réellement le pouvoir, ce qui est extrêmement grave pour la vie de nos communes et, au-delà, pour la vie démocratique.
Parce que la vie communale, ce sont les travaux pratiques de la démocratie, c’est la vie démocratique tout court qui est mise en péril par cette situation.
S’ajoute à cela le manque de respect croissant dont un certain nombre de nos concitoyens, que je ne devrais même pas qualifier comme tels, font preuve à l’égard de leur maire par leur agressivité ou leurs menaces. Le maire devient l’exutoire de toutes les frustrations de notre société, parce que, encore aujourd’hui, il est le premier visage de l’autorité.
Défendons nos maires, comme nous ne cessons de le faire depuis le rapport grandeur nature que nous avons élaboré dès 2019, après la mort du maire de Signes, à partir d’un échantillon de plus de quatre mille témoignages de maires.
Il faut aujourd’hui que nous nous ressaisissions collectivement et que nous revalorisions cette fonction municipale qui est essentielle à notre vie démocratique.
Le statut de l’élu doit être adapté à une fonction municipale qui, par sa complexité croissante, fait que la personne qui l’exerce aujourd’hui doit consentir des sacrifices professionnels, alors qu’elle avait été conçue comme compatible avec l’exercice d’une vie normale. C’est de moins en moins le cas : tirons-en les conséquences.
Mes chers collègues, j’y mets beaucoup d’enthousiasme, et je vous prie de m’en excuser, mais je crois que nous abordons là un enjeu fondamental qui n’est pas correctement pris en compte. Il est grand temps, je le répète, que la France se ressaisisse pour faire vivre la démocratie municipale. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées des groupes UC, RDSE et INDEP. – M. Sebastien Pla applaudit également.)
Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d’abord à remercier le Sénat de se saisir de ce sujet. Je suis intimement convaincue que la commune demeure un échelon vital, tant pour la démocratie locale que pour la mise en œuvre de l’action publique.
Malgré les nombreuses difficultés traversées par les maires et leurs communes, il faut rappeler cette réalité incontournable : l’échelon communal fait l’objet d’un attachement fort de nos concitoyens et reste l’échelon de proximité par excellence.
Je ne peux que reprendre à mon compte le mot de Tocqueville : « Les institutions communales sont à la liberté ce que les écoles primaires sont à la science ; elles la mettent à la portée du peuple ; elles lui en font goûter l’usage paisible et l’habituent à s’en servir. »
Je ne cite pas Tocqueville par coquetterie. Ses mots sont profondément vrais : il y a un lien évident entre l’institution municipale et la construction de la République, car c’est dans la commune que les Français ont appris la citoyenneté et la liberté politique, qui sont au fondement de notre pacte démocratique.
C’est d’ailleurs sans doute un facteur d’explication du double malaise actuel, celui des maires et celui des citoyens. Nos collègues élus se sentent dépossédés de leur capacité à influer sur le destin de la commune et de ses administrés. Nos concitoyens perçoivent, même confusément, ce sentiment de dépossession et ne sont plus sûrs de voir l’utilité de voter et de s’investir dans la vie communale.
Or, dans un contexte politique marqué par de nombreuses crises, il est important que nous puissions nous appuyer sur des communes solides. Les maires demeurent les acteurs publics les mieux identifiés au niveau local. Les Français les connaissent, leur font confiance et savent pouvoir compter sur eux.
La commune demeure aussi, au sein de l’architecture institutionnelle et pour les citoyens, l’échelon de proximité. Elle incarne un service public de proximité répondant à une forte demande sociale. Elle bénéficie de la clause de compétence générale lui permettant de régler par délibération toutes les affaires relevant de son niveau, sous réserve qu’elles ne soient pas attribuées à l’État ou à un autre échelon.
Cela explique que les attentes à l’égard des communes soient fortes, alors que les élus s’estiment bien souvent insuffisamment armés pour y répondre, du fait de diverses évolutions, notamment le renforcement de l’intercommunalité et l’augmentation de la technicité de certaines compétences.
C’est le hiatus entre ces attentes fortes et les moyens réels des communes que nous avons à résoudre ensemble pour apaiser le malaise de nos collègues élus.
Les communes ont besoin qu’on leur fasse confiance et qu’on les soutienne. C’est pourquoi, et je pèse mes mots, nous devons faire confiance à nos communes et à nos maires, et c’est ce que nous faisons !
Pour toutes les raisons que je viens d’exposer, les communes ont beaucoup à apporter à l’action publique et à notre vie démocratique : proximité, subsidiarité, efficacité, initiative, projet, autant de mots que l’époque a sans doute galvaudés, mais qui témoignent bien du fait que la commune est l’échelon du faire et du bien faire.
Il faut que nous capitalisions là-dessus, parce que c’est ce que nos concitoyens attendent : proximité et efficacité. Il faut donc laisser les collectivités prendre l’initiative, faire des choix, organiser la vie et les services publics locaux pour répondre au mieux aux besoins quotidiens du pays.
De son côté, l’État doit consolider le rôle de la commune et du maire.
En matière institutionnelle, je citerai deux exemples concrets qui sont au cœur de l’action du Gouvernement et que je me dois de vous rappeler.
Le premier a trait au développement d’un véritable pouvoir réglementaire local.
Pour que le maire dispose dans certains domaines d’un véritable levier juridique, la loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dite loi 3DS, a consacré le pouvoir réglementaire dont disposent les collectivités territoriales, au premier rang desquelles les communes, pour l’exercice de leurs compétences. Le législateur doit maintenant s’en saisir pour que ce pouvoir soit mis en œuvre plus souvent.
Le second concerne l’encouragement d’une décentralisation différenciée.
Les règles d’exercice des compétences locales et les architectures institutionnelles doivent pouvoir être différentes en fonction des territoires. Nous devons adapter notre organisation au terrain, et pas l’inverse.
Je crois également que, face à la complexité croissante des politiques publiques dont les communes sont chargées, l’État a un rôle primordial à jouer d’accompagnateur et de facilitateur.
Les efforts que nous faisons, et que nous amplifierons dans les mois à venir, sont significatifs : je pense au renforcement du réseau préfectoral, à l’accompagnement financier renforcé par le fonds vert, à la création d’un guichet unique de l’ingénierie avec le renforcement des capacités de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) et à un travail que nous avons largement entamé, mais qui mérite d’être poursuivi ensemble, celui de la simplification des normes.
Je veux particulièrement insister sur le soutien que nous devons aux maires, lorsqu’ils sont victimes de menaces ou de violences – j’en ai déjà parlé plusieurs fois dans cet hémicycle. Le 17 mai dernier, j’ai d’ailleurs indiqué que le ministre de l’intérieur et des outre-mer, Gérald Darmanin, et moi-même serions intraitables envers les auteurs de ces violences et que la peur devait changer de camp.
Le déploiement du « pack sécurité » constitue une première réponse qui sera amplifiée en lien avec les initiatives prises par les parlementaires et les associations d’élus, que je salue.
Toutefois, les voies et moyens du soutien apporté aux communes et aux maires ne sont pas figés. Nous sommes particulièrement disposés à les conforter en lien avec le Parlement et les élus locaux, car nous pensons qu’il s’agit en réalité d’une question de démocratie locale.
Nous menons d’ailleurs avec l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité une démarche transversale sur les conditions d’exercice des mandats locaux, qui aura vocation à identifier des pistes pour renforcer ce soutien.
Nous devons aussi tracer ensemble les grandes lignes de l’avenir de la commune pour le consolider. Nous devons soutenir les maires et pérenniser le modèle communal, tel qu’il nous a été légué par deux siècles de République.
Mais le débat que vous avez ouvert nous offre aussi l’occasion de nous interroger sur les évolutions et les changements à opérer afin de garantir l’avenir de la commune.
Cet exercice sera nécessairement riche. Toutefois, trois sujets qui me semblent contribuer à cette réflexion peuvent déjà être évoqués.
Tout d’abord, comment favoriser encore davantage la coopération et la solidarité entre les communes, tout en respectant la liberté de chacune ? De quels moyens disposons-nous ? La coopération intercommunale a permis la mise en commun de projets, de compétences et de moyens au service d’une vision partagée du territoire. Elle a ancré la coopération dans la décentralisation. Nous avons créé de nouveaux outils pour renforcer ce mouvement ces dernières années. Ce champ est à explorer, parce que les communes en sortiront fortifiées.
Ensuite, je souhaite offrir aux communes plus de visibilité sur leurs ressources de fonctionnement comme d’investissement ; nous y travaillons avec les associations d’élus. Cela me semble indispensable pour permettre à l’action publique locale de se développer et pour apporter des réponses durables aux besoins des Français.
Enfin, nous devons ensemble responsabiliser nos concitoyens. Le modèle de l’électeur consommateur qui vote et qui attend ensuite tout de l’élu sans plus rien lui apporter, ni encouragement ni soutien, n’est plus viable.
Nous devons trouver ensemble le moyen de mobiliser les Français pour qu’ils soutiennent leurs élus, qu’ils fassent corps avec eux et qu’ils les accompagnent dans l’exercice de leur charge.
Débat interactif
Mme le président. Nous allons maintenant procéder au débat interactif.
Je rappelle que chaque orateur dispose de deux minutes au maximum pour présenter sa question et son éventuelle réplique.
Le Gouvernement dispose pour répondre d’une durée équivalente. Il aura la faculté, s’il le juge nécessaire, de répondre à la réplique pendant une minute supplémentaire. L’auteur de la question disposera alors à son tour du droit de répondre pendant une minute.
Dans le débat interactif, la parole est à M. Max Brisson. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Max Brisson. Madame la ministre, la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite loi Maptam, et la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe, ont rigidifié l’action locale.
La France communale a été particulièrement exposée à leurs effets : dilution de la voix des communes dans de grands ensembles ne correspondant pas toujours aux réalités territoriales, uniformisation des politiques, éloignement de la réalité des territoires, normes de plus en plus nombreuses et injonctions démultipliées.
Depuis lors, le Sénat n’a eu de cesse de corriger ces déséquilibres et de tirer le signal d’alarme. Ainsi, depuis 2022 et l’adoption de la loi 3DS, l’exercice d’une compétence peut être territorialisé.
Cette possibilité nouvelle permet d’articuler durablement l’action des communes et de leurs intercommunalités, en prenant en compte la réalité des bassins de vie à un niveau infracommunautaire. Cet apport est décisif pour revenir à un exercice souple et simple des compétences dans les territoires.
Or, dans les faits, communes et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) peinent à s’approprier ce mécanisme. Ils n’en ont pas connaissance et méconnaissent la marche à suivre pour créer un pôle de proximité ou un pôle de compétences. Enfin, les services de la préfecture tâtonnent pour conseiller les maires et les élus communautaires.
Aussi, quel bilan tirez-vous de ces mois d’expérience d’exercice territorialisé des compétences intercommunales ? Comment envisagez-vous de mieux faire connaître ce mécanisme pour que les élus s’en emparent ?
Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Brisson, vous évoquez deux grands sujets.
Le premier est celui de la simplification des normes, que je ne peux qu’appeler de mes vœux. Christophe Béchu et le président Larcher ont signé une charte de simplification qui liste un certain nombre de sujets sur lesquels la direction générale des collectivités locales (DGCL) travaille. Mon ministère est évidemment à votre disposition pour accélérer ces travaux ou échanger sur leur état d’avancement.
Le second sujet a trait au bilan que nous tirons des liens entre les EPCI et les communes et aux moyens de favoriser l’appropriation des notions de pôles de proximité et de pôle de compétences par les collectivités.
Vous avez tout à fait raison : aujourd’hui, nous ne disposons pas de bilan. Ce bilan, je le dresse au fur et à mesure de mes visites de terrain – soixante-six ces neuf derniers mois – et je constate que des intercommunalités fonctionnent très bien, mais que c’est plus difficile pour d’autres, en particulier pour un grand nombre d’intercommunalités XXL, pour reprendre l’expression du sénateur Bas.
Je crois qu’il est important de rappeler le rôle central du préfet de département. Là où les intercommunalités ne fonctionnent pas aussi bien qu’elles le devraient – diverses raisons peuvent l’expliquer –, les préfets sont le point d’entrée – à défaut, je le suis également – pour faire en sorte que les communes et les intercommunalités se saisissent des possibilités offertes par la loi pour avancer et travailler ensemble. La mutualisation et le faire ensemble sont, vous le savez, des sujets qui me sont chers.
Mme le président. La parole est à M. Max Brisson, pour la réplique.
M. Max Brisson. Madame la ministre, tous les EPCI XXL n’ont pas été imposés ; je pourrais vous citer un exemple.
En tout cas, dans ces structures, il est nécessaire de territorialiser l’action publique. Les maires ont besoin de cette proximité et d’avoir le sentiment de continuer d’exercer des compétences. Dans ces grands EPCI, les maires peuvent avoir le sentiment de ne plus compter, ce qui engendre découragement, résignation et absentéisme.
Pour lutter contre cela, il est nécessaire que le Gouvernement et les préfets soient à la manœuvre et essaient de faire partager ce besoin de territorialisation, qui est tout simplement un besoin de proximité. Sans cette proximité, il y aura découragement et crise des vocations et de la démocratie communale. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Jean-Michel Arnaud applaudit également.)
Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Un certain nombre de circulaires ont d’ores et déjà été diffusées aux préfets pour qu’ils jouent ce rôle et fassent connaître aux maires les possibilités qui leur sont offertes en fonction des transferts de compétences qui ont été réalisés.
Je vous propose de renforcer l’information des préfets sur le rôle qu’ils doivent jouer en la matière.
Mme le président. La parole est à M. Max Brisson.