M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, sur l’article.

M. Jacques Fernique. Certaines volte-face me laissent pantois !

Je sais bien que notre règlement intérieur interdit d’interpeller directement un autre sénateur, mais je tiens à dire que l’on ne peut pas, à la fois, soutenir au sein du Conseil d’orientation des infrastructures (COI) le scénario de planification écologique, lequel prévoit que les secteurs autoroutier et aérien contribuent au financement des transports durables, prendre position contre la suppression de cet article 15 au sein de notre commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, comme celle-ci l’a fait clairement, et dire tout autre chose dans l’hémicycle !

Cette taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance n’est pas disproportionnée, et elle est nécessaire. Son application est soumise à deux conditions : tout d’abord, il faut que les revenus de l’exploitation excèdent 120 millions d’euros ; ensuite, le niveau moyen de rentabilité doit être supérieur à 10 %.

Cela signifie que le taux de 4,6 % de la taxe ne s’appliquerait que sur la fraction des revenus de l’exploitation excédant 120 millions d’euros.

Si le Sénat n’écoutait ni les bons conseils de sa commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ni l’avis de sa commission des finances – mais ce sera au rapporteur général de présenter ce dernier –, il enverrait un très mauvais signal !

M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour explication de vote.

M. Stéphane Sautarel. Dans un rapport d’information intitulé Situation de la SNCF et ses perspectives, qu’Hervé Maurey et moi-même avions commis au nom de la commission des finances, nous préconisions sous la recommandation n° 15, parmi d’autres solutions permettant de financer les infrastructures de transport, de créer une nouvelle taxe sur les sociétés concessionnaires d’autoroutes.

Notre pays doit en effet faire face à une difficulté majeure : l’entretien de nos infrastructures de transport, qu’elles soient ferroviaires, mais aussi – on s’en rend compte chaque jour davantage – routières. Il faut donc trouver des solutions pour financer les travaux liés à ces infrastructures, qui ont été trop longtemps abandonnées par l’État.

L’article 15, à la suite de l’avis donné par le Conseil d’État, prévoit d’élargir la taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance au transport aérien. Nous avions évoqué cette solution ; il nous avait alors semblé qu’il fallait établir un parallélisme des formes, et que la taxation du transport aérien devait servir à décarboner ledit secteur aérien. Nous avions également convenu qu’il fallait avoir une vision globale du transport terrestre, à la fois routier et autoroutier.

J’y insiste, nous devons mobiliser des moyens pour notre transport ferroviaire, mais aussi pour les infrastructures routières, sans forcément faire appel à la solidarité du transport aérien.

M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, sur l’article.

M. Éric Bocquet. Comme l’a précédemment rappelé notre collègue Jacquin, la commission d’enquête sénatoriale de 2020, créée sur l’initiative de nos amis du groupe centriste, et notamment de Vincent Delahaye, avait produit sur la base d’excellents travaux un rapport qui fut voté à l’unanimité. Y étaient évoqués des « perspectives de rentabilité prometteuses » – l’avenir vous a donné raison, mes chers collègues –, ainsi que des « profits futurs à partager équitablement avec l’État et les usagers » et une « rentabilité hors norme des sociétés d’autoroutes ». L’ART avait souligné les mêmes points.

Il y a véritablement du grain à moudre à cet égard, et je me réjouis que nous puissions en débattre ce soir.

Il était également dit dans ce rapport que « le montant des dividendes versés par les sociétés aux actionnaires, pour la période allant de 2022 à l’échéance des concessions, pourrait atteindre 40 milliards, dont 32 milliards pour les deux géants Vinci et Eiffage ».

J’exprimerai une légère inquiétude sur un point qui doit, selon moi, susciter notre vigilance : j’ai lu récemment dans la presse que les concessionnaires d’autoroutes envisageaient de répercuter l’éventuelle taxe sur les tarifs de péage. Il faudra y faire très attention !

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, sur l’article.

M. Ronan Dantec. Le transport aérien soucie beaucoup de monde dans cet hémicycle…

L’idée initiale du Gouvernement, si l’on se réfère aux déclarations faites par Clément Beaune cet été, était de taxer directement le transport aérien, probablement via une augmentation de la taxe Chirac de solidarité sur les billets d’avion. Cette proposition a disparu, et l’on est passé à l’idée d’une taxation liée aux infrastructures.

L’article 15 prévoit, logiquement, que tout ce qui émet du carbone – les automobiles et le transport aérien – finance ce qui n’en émet pas, c’est-à-dire le ferroviaire. Encore une fois, c’est totalement logique !

Il faut arrêter le greenwashing : le transport aérien décarboné n’existera jamais ! Pour que cela soit possible, il faudrait utiliser une part très importante des terres dédiées à l’alimentation sur l’ensemble de la planète.

Les académies, y compris celles qui sont mainstream et productivistes, ont chiffré le coût des e-carburants fabriqués en utilisant de l’électricité décarbonée : il est tellement élevé que, si l’on retenait cette solution, Air France n’existerait plus tandis qu’Emirates continuerait d’utiliser du kérosène !

Ce que l’on demande au secteur du transport aérien, c’est de participer, avec d’autres, au financement des modes de transport décarbonés. C’est totalement cohérent !

L’idée selon laquelle les avions pourraient voler à la biomasse ou à l’électricité est un leurre. Il suffit de faire une règle de trois pour le comprendre !

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de Mme Sylvie Robert.)

PRÉSIDENCE DE Mme Sylvie Robert

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

Organisation des travaux

La parole est à M. le président de la commission.

Article 15
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2024
Article 15

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Mes chers collègues, nous avons connu un après-midi difficile du point de vue du rendement : nous n’avons examiné qu’une vingtaine d’amendements par heure, ce qui est très largement insuffisant. L’heure de levée de la séance sera déterminée par notre capacité à doubler ce rythme, pour retrouver celui qui était le nôtre lors des trois précédentes journées.

Je vous invite donc à être très rapides dans la présentation de vos amendements, à ne pas hésiter à utiliser le mot « défendu », ainsi qu’à limiter votre temps de parole lors des explications de vote.

Mme la présidente. Dans la discussion des articles du projet de loi de finances pour 2024, nous poursuivons l’examen de l’article 15.

Autre (dans une discussion de texte de loi)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2024
Article 16

Article 15 (suite)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° I-114 rectifié ter est présenté par M. Panunzi, Mme Malet, MM. Grosperrin, Belin et D. Laurent, Mmes Lassarade et Joseph, MM. Bas, Brisson et J.P. Vogel, Mme Dumas, MM. Chauvet et Levi, Mme Muller-Bronn, M. Cadec et Mme Aeschlimann.

L’amendement n° I-617 rectifié bis est présenté par MM. Capo-Canellas, S. Demilly et Henno, Mme Sollogoub, MM. Médevielle et Kern, Mmes Romagny, Billon et Perrot et MM. Anglars, Bleunven, Bazin et Fargeot.

L’amendement n° I-1866 rectifié bis est présenté par M. de Montgolfier, Mmes Chain-Larché et Borchio Fontimp, MM. Cuypers et de Legge, Mme Dumont, M. Genet, Mme Imbert et MM. Karoutchi, Lefèvre, H. Leroy et Somon.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Jacques Panunzi, pour présenter l’amendement n° I-114 rectifié ter.

M. Jean-Jacques Panunzi. Je demande la suppression de l’article 15 et de la taxe qu’il instaure, qui est profondément injuste, car la Corse n’est pas raccordée au maillage ferroviaire hexagonal.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour présenter l’amendement n° I-617 rectifié bis.

M. Vincent Capo-Canellas. Je reprendrai le fil de ma prise de parole sur l’article, car ce projet mérite qu’on s’y arrête.

Au départ, l’idée du Gouvernement était d’augmenter la taxe de solidarité sur les billets d’avion, qui n’est pas comptabilisée dans les charges et les bilans des compagnies.

Ce projet est très différent, car cette taxe, elle, va directement affecter les charges et les bilans des compagnies aériennes. Son volume a triplé par rapport à celui qui était prévu avec la hausse annoncée de la taxe de solidarité, ce qui représente une augmentation de 50 % des impôts payés par les aéroports.

Un certain nombre d’aéroports n’arriveront pas à répercuter cette hausse, car le principe de modération tarifaire est inclus dans la loi.

Dans le cas de l’aéroport de Nice-Côte d’Azur, la presse a indiqué que la rentabilité des capitaux investis dans sa caisse régulée était de l’ordre de 1 %. L’Autorité de supervision indépendante des redevances aéroportuaires (ASI), puis l’Autorité de régulation des transports (ART) ont baissé le niveau des redevances. La rentabilité des capitaux investis n’est pas égale au coût moyen pondéré du capital : il n’est pas rentable d’y investir.

Le Gouvernement voudrait tout de même demander à cet aéroport de s’acquitter de 5 millions d’euros d’impôts supplémentaires, mais ce dernier ne peut pas augmenter ses tarifs de plus de 5 % en raison de la modération tarifaire. L’aéroport ne retrouvera jamais son niveau de rentabilité.

Qu’est-ce que cela signifie ? Que les aéroports ne pourront plus investir demain, notamment dans la transition écologique.

Tout à l’heure, j’ai indiqué qu’il est un peu shadokien que l’État s’applique à lui-même cette taxe. Par exemple, elle coûtera 120 millions d’euros à Aéroport de Paris. Mais qui est l’actionnaire majoritaire de ce groupe ?

M. Vincent Capo-Canellas. L’État, en effet.

Nous avons aidé Air France pour assurer sa sauvegarde. Mais maintenant, nous nous rendons compte que cette taxe pénalisera les compagnies. Du coup, nous cherchons à intégrer des contre-mesures dans ce budget, destinées à « pomper » dans l’autre sens…

Certains points posent question, et mériteraient d’être regardés de plus près. En particulier, la définition des activités est curieuse : selon que l’on se situe ou non dans le périmètre aéroportuaire, d’un côté ou de l’autre de la rue, les mêmes activités seraient victimes d’une distorsion de concurrence.

Mme la présidente. La parole est à M. Albéric de Montgolfier, pour présenter l’amendement n° I-1866 rectifié bis.

M. Albéric de Montgolfier. « Précompte mobilier » ; « OPCVM » ; « non-résidents » : ces mots vous disent-ils quelque chose, monsieur le ministre ?

Ce sont des noms de contentieux ayant coûté extrêmement cher à la France. À chaque fois, Bercy expliquait qu’il n’y avait aucun problème, que cela ne coûterait rien, qu’il n’y avait pas de risque contentieux. Le Sénat avait pourtant parfois dénoncé l’existence de ces risques. Pour le contentieux du précompte mobilier, l’État a par exemple dû payer, quelques années plus tard, 5 milliards d’euros.

Aujourd’hui, je crains que l’on n’ouvre, avec cet article 15, un contentieux à retardement. Ce n’est pas un fantasme ; cela correspond à un avis du Conseil d’État, rendu le 8 juin dernier, indiquant l’existence d’un vrai risque contentieux.

Monsieur le ministre, vous nous convaincrez peut-être du contraire, mais j’aimerais que vous teniez l’engagement pris par Bruno Le Maire, qui avait favorablement répondu, lors d’une réunion de la commission des finances, à ma demande de rendre public l’avis du Conseil d’État portant sur ce projet de loi, et notamment sur l’article 15.

Nous attendons toujours. À ma connaissance, le rapporteur général ne dispose pas de l’avis du Conseil d’État sur l’article 15. Pourquoi ? Veut-on nous cacher le risque de contentieux, qui ne manquera pas de survenir ?

Pour cette raison, je demande la suppression de l’article 15.

Je voudrais également que nous mettions fin à la fable selon laquelle seuls les concessionnaires paieront, tandis que les usagers ne paieront pas. Nous savons très bien que cette taxe aura des répercussions sur les tarifs des péages et sur les redevances aéroportuaires, et qu’en fin de compte il y aura forcément quelqu’un pour payer.

Je pense que cette taxe est un bricolage. Il y avait un moyen de financer les infrastructures, l’écotaxe ; mais cette dernière a malheureusement été abandonnée il y a quelques années. Sans doute était-elle mal calibrée, mais elle aurait frappé les poids lourds qui traversent la France sans s’acquitter d’aucune contribution pour l’entretien de notre réseau. D’autres pays ont adopté un système similaire, mais nous l’avons malheureusement abandonné.

J’aimerais que le ministre nous éclaire sur les risques contentieux existant autour de cette taxe.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je partage certaines des réserves émises, mais au regard de ce que nous connaissons de l’avis du Conseil d’État, il semble qu’il y ait une place pour créer une telle taxe.

Je le rappelle, une commission d’enquête sénatoriale a conduit un travail au sujet des concessions autoroutières. On ne peut pas balayer d’un revers de la main ses conclusions.

Il y a des difficultés : au départ, seule une taxation des autoroutes était envisagée. Si l’on va chercher d’autres exploitants d’infrastructure de transport, notamment les aéroports, il y a naturellement un effet domino.

Il faut aussi prendre en compte le fait que ce projet permet d’alimenter les caisses de l’Afit. Si cette ressource était supprimée, un problème d’équilibre budgétaire se poserait. C’est l’affaire du Gouvernement, certes, mais c’est aussi la nôtre.

Pour cette raison, la commission demande le retrait de ces trois amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Monsieur de Montgolfier, je vous rappelle que le dispositif de l’article 15 a été élaboré dans le cadre d’un travail préalable mené avec le Conseil d’État, qui a défini les conditions dans lesquelles les grandes infrastructures de transport peuvent être mises à contribution.

La réponse du Conseil d’État est très claire : si une taxe spécifique est appliquée aux sociétés concessionnaires d’autoroutes (SCA), elle aura des répercussions sur les tarifs.

Cela ne correspond pas à notre projet. L’article 15 tient compte de l’avis du Conseil d’État, puisque nous mettons en place une taxe sur les grandes infrastructures de transport dont les mobilités sont dites « polluantes », afin notamment de financer notre plan ferroviaire.

L’article 15 a été transmis au Conseil d’État, qui a rendu son avis. Ce dernier a été communiqué, à sa demande, au rapporteur général de la commission des finances, qui en dispose donc.

Nous avons précisé le dispositif à la suite de l’instruction auprès du Conseil d’État. Il s’agit non d’une taxe spécifique sur les sociétés concessionnaires d’autoroutes, mais bien d’une taxe sur les grandes infrastructures.

Ce projet est solide. On ne peut pas dire que cette taxe aura une répercussion sur le coût des péages et sur les automobilistes, dans la mesure où cette taxe n’est pas spécifique.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur les amendements de suppression. Nous avons besoin d’affecter le produit de cette taxe à l’Afit France, en particulier en vue de financer des projets d’infrastructure de transports décarbonés.

Par ailleurs, cette taxe est ciblée, car elle est bornée par certains critères, comme une rentabilité supérieure à 10 % ou un revenu supérieur à 120 millions d’euros.

Cette taxe est équilibrée, non spécifique, et elle contribue au financement de la transition écologique.

Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.

M. Bruno Retailleau. Nous ne devons pas supprimer cet article, car dans quelques instants, au travers de l’amendement n° I-213 déposé au nom de la commission des finances, le rapporteur général proposera de puiser dans le produit de cette taxe pour conforter l’investissement des départements sur la voirie.

Nous ne savons plus financer correctement nos infrastructures routières : nous ne disposons plus d’un mécanisme adapté. J’ai connu le temps où un système d’adossement permettait aux tronçons autoroutiers rentables de financer ceux qui n’étaient pas rentables. Ce système d’aménagement du territoire était parfait, mais l’Europe l’a détruit, au titre du respect de la concurrence.

Je m’étais opposé, à la tribune du Sénat, au projet de privatisation des sociétés d’économie mixte concessionnaires d’autoroutes (Semca), pourtant proposé par un gouvernement de droite. Le système des Semca était vertueux, puisque les recettes des autoroutes alimentaient le budget de l’Afit France, grande structure finançant les infrastructures. Mais on l’a détruit, et en le détruisant, on a spolié la nation française. Éric Bocquet l’a signalé, la commission d’enquête sénatoriale a établi que la privatisation des concessions autoroutières, pour quelques milliards d’euros, a constitué une véritable spoliation. Nous le savons aujourd’hui, les chiffres le prouvent.

Il me semble important de maintenir le dispositif prévu par l’article, afin d’y greffer celui de l’amendement du rapporteur visant notamment à financer les routes départementales.

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Cozic, pour explication de vote.

M. Thierry Cozic. J’entends les explications du président Retailleau, mais en voyant l’origine des collègues ayant déposé ces amendements, il me semble qu’il faut de la cohérence, et mettre les actes en rapport avec les discours.

Lors de la discussion générale, en ouverture de l’examen de ce texte, j’avais fait état d’un « trilemme » entre la transition énergétique, les déficits publics et la solidarité de tous les acteurs. Nous nous heurtons à un triangle d’incompatibilité.

Nous sommes en plein dans cette contradiction : d’un côté le Gouvernement ne veut absolument pas mettre de nouvelles taxes en place ; d’un autre côté, la majorité sénatoriale a en point de mire le déficit, et prononce tout le temps ce mot.

Cet article nous offre pourtant la possibilité de mettre en place une nouvelle recette, ce qui sera favorable au solde public. Qui plus est, cette taxe sera aussi favorable à l’environnement, grâce au financement des infrastructures décarbonées, en particulier du ferroviaire.

Cette taxe est souhaitée depuis plus de deux ans par les socialistes. Son assiette est assez large, son taux relativement modéré : elle ne mettra pas en difficulté les sociétés concessionnaires d’autoroutes ou les grands aéroports.

Nous sommes très favorables à cet article 15, et nous nous opposerons à ces trois amendements, ainsi qu’à d’autres amendements que nous examinerons plus tard, qui viseront à remettre en cause une partie de cette taxe.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.

M. Vincent Capo-Canellas. Monsieur le ministre, vous ne m’avez pas répondu : quel sera l’effet de cette taxe sur la capacité des aéroports à maintenir leurs infrastructures, et à investir pour améliorer leurs services ? Le secteur est compétitif…

De plus, il faut tenir compte de la modération tarifaire. Allez au bout de votre logique : si vous taxez les aéroports, il faut réviser le principe de la modération tarifaire, et permettre à certains, sous le contrôle de l’ART, d’augmenter leurs tarifs au-delà de la limite de 5 %.

Le président Retailleau l’indiquait très justement, nous avons un problème pour financer les infrastructures. Mais à partir du moment où nous les lestons d’une taxe représentant une augmentation de 50 % de leurs impôts, les aéroports n’arriveront plus à investir. De plus, ils sont contraints et ne peuvent pas augmenter leurs redevances. Mécaniquement, l’investissement sera réduit, ce qui n’ira pas sans difficulté.

Par ailleurs, cinq aéroports seraient actuellement touchés par cette taxe : ceux de Toulouse, de Marseille, de Lyon, de Nice et Aéroports de Paris. D’ailleurs, si l’on prenait individuellement les aéroports de ce dernier groupe, la taxation serait inférieure, mais ce cas n’est bizarrement pas prévu par le texte.

Quatre autres aéroports français pourraient assez rapidement franchir le seuil des 120 millions d’euros, et entrer dans le champ de la taxe. Que dites-vous par rapport à cela ? Encore une fois, je ne discute pas le principe de cette taxe, mais ses effets. Il me semble que des effets de seuils, notamment, n’ont pas été anticipés. Et après, nous dirons que nos aéroports régionaux sont en difficulté…

Mme la présidente. Monsieur de Montgolfier, l’amendement n° I-1866 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Albéric de Montgolfier. Madame la présidente, j’accepte de le retirer si le rapporteur général confirme qu’il a bien reçu l’avis du Conseil d’État au sujet de l’article 15. Je lui fais confiance s’il signale l’absence de risques contentieux : je faisais ce travail lorsque j’occupais ses fonctions.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Nous avons bien reçu quelques éléments au sujet de l’article 15, mais il me semble que nous ne disposons pas de la totalité de l’avis du Conseil d’État.

M. Bruno Retailleau. Nous saisirons le Conseil constitutionnel !

Mme la présidente. Monsieur de Montgolfier, l’amendement n° I-1866 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Albéric de Montgolfier. Non, au vu de ce demi-avis du Conseil d’État dont dispose le rapporteur général, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° I-1866 rectifié bis est retiré.

Monsieur Panunzi, l’amendement n° I-114 rectifié ter est-il maintenu ?

M. Jean-Jacques Panunzi. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° I-114 rectifié ter est retiré.

Monsieur Capo-Canellas, l’amendement n° I-617 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Vincent Capo-Canellas. Oui, je le maintiens.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-617 rectifié bis.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 73 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 340
Pour l’adoption 14
Contre 326

Le Sénat n’a pas adopté.

Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-1864 rectifié, présenté par MM. de Montgolfier, Belin et J.B. Blanc, Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet et Bruyen, Mme Chain-Larché, MM. Cuypers et de Legge, Mmes Dumas et Dumont, M. Genet, Mmes Imbert et Joseph, MM. Karoutchi, Klinger, Lefèvre et H. Leroy, Mmes Malet et Petrus et M. Somon, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

II. – Alinéas 7, 10, 11, 19, 21, 27, 32, 37, 38, 43, 48, 54, 57, 58, 61, 64, 68 et 76

Remplacer les mots :

infrastructures de transport

par le mot :

autoroutes

III. -. Alinéa 22

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 425-4. – Une autoroute de longue distance s’entend de l’autoroute qui permet le déplacement de personnes ou de marchandises sur une longue distance. »

IV. -. Alinéa 24 et 29

Remplacer les mots :

infrastructure de transport

par le mot :

autoroute

V. -. Alinéa 25, 26, 30, 31

Remplacer le mot :

infrastructure

par le mot :

autoroute

VI. – La perte de recettes résultant pour l’État est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Albéric de Montgolfier.

M. Albéric de Montgolfier. Les ports et les aéroports doivent faire face à des investissements, notamment concernant la transition écologique, qu’il s’agisse de l’électrification des ports ou de l’alimentation des avions comme des engins de piste.

Aéroports de Paris, ainsi qu’un certain nombre de ports vont voir leur capacité d’investissement dans la transition énergétique réduite.

Pour cette raison, je propose que les ports et les aéroports soient exclus du champ de cette taxe. La grande différence entre ces deux infrastructures et les autoroutes, c’est que ces dernières ne sont pas soumises à la concurrence internationale.

Mme la présidente. L’amendement n° I-646, présenté par MM. Parigi, G. Blanc et Dossus, Mme Senée, MM. Benarroche, Dantec, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 15 à 19

Supprimer ces alinéas.

II. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

… – Le I n’est pas applicable sur le territoire de la collectivité de Corse.

La parole est à M. Paul Toussaint Parigi.

M. Paul Toussaint Parigi. Cet amendement vise à exclure du périmètre de cet article l’ensemble des territoires insulaires de la République.

Si nous comprenons l’esprit de cette taxe, cette dernière ne peut être appliquée au détriment de la continuité territoriale.

L’article 15 ne prévoit pourtant aucune modalité pour éviter que les exploitants des infrastructures concernées ne reportent la hausse de la fiscalité sur les tarifs appliqués aux usagers. Dès lors, en définitive, ce sont bien les voyageurs qui devront payer cette nouvelle taxe.

Aussi, pour des raisons de sauvegarde du pouvoir d’achat et de préservation de l’efficacité des dispositifs de continuité territoriale, nous proposons d’exclure la Corse du périmètre d’application de l’article.