M. Christophe Chaillou. Certes, mais pas au niveau de 2014… Il faut comparer cette baisse des moyens humains à l’explosion des signalements, qui sont en augmentation de 86 % !
C’est aussi une question de confiance : le fait d’avoir envisagé à un moment de dissoudre la Miviludes n’a pas contribué à renforcer la sérénité au sein de cette institution. Quant à la décision, évoquée par plusieurs orateurs, de la rattacher au ministère de l’intérieur, elle nous semble incompréhensible eu égard à sa nature interministérielle. Tous ces éléments nous interpellent au regard de la volonté, louable, affichée par le Gouvernement.
Mes chers collègues, une grande partie des modifications proposées par Mme la rapporteure, dont je salue l’engagement, le travail et l’approche pragmatique, et adoptées en commission des lois vont dans la bonne direction.
Dans un premier temps, il nous semble essentiel de conforter la Miviludes, dans le respect de la séparation des pouvoirs. Nous nous interrogeons ainsi sur son statut.
La commission s’est également prononcée en faveur d’une augmentation de la répression des délits d’exercice illégal de la médecine et des pratiques commerciales trompeuses : cela va dans le bon sens.
Enfin, nous ne pouvons être qu’en accord avec Mme la rapporteure et notre collègue Nathalie Delattre sur les modifications apportées au texte en vue de mieux protéger les mineurs, car c’est indispensable.
Nous regrettons toutefois que la commission ait souhaité supprimer les articles 1er et 4, ce qui vide en grande partie le texte de sa substance. Nous regrettons également que la réécriture par le Gouvernement de l’article 4 ne corresponde pas aux avis du Conseil d’État.
Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Christophe Chaillou. Tout en rappelant notre engagement dans la lutte contre les phénomènes sectaires, nous considérons que ce texte, même amendé par la commission et la majorité sénatoriale, est par trop précipité et quelque peu bâclé. Surtout, il ne répond pas à un aspect essentiel, celui des moyens.
C’est pourquoi nous nous abstiendrons sur ce projet de loi.
Mme la présidente. La parole est à Mme Sylviane Noël. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sylviane Noël. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, à quelques jours seulement des fêtes de Noël, ce projet de loi relatif à la lutte contre les dérives sectaires aurait presque pu passer inaperçu, tant son titre et l’objectif qu’il prétend se donner peuvent paraître consensuels.
En effet, vous ne trouverez – je pense – personne dans cet hémicycle qui puisse s’opposer d’une quelconque manière à la lutte contre les véritables dérives sectaires, incarnées par les marabouts et manipulateurs en tout genre qui abusent de façon malveillante de la faiblesse ou de la détresse de certains.
La perversité de ce texte réside dans le fait qu’il mélange volontairement les genres, en traitant à la fois des dérives sectaires et du débat scientifique, au travers notamment de son article 4.
Ledit article prévoit que sera punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende « la provocation à abandonner ou à s’abstenir de suivre un traitement médical thérapeutique ou prophylactique, lorsque cet abandon ou cette abstention est présenté comme bénéfique pour la santé des personnes visées alors qu’il est, en l’état des connaissances médicales, manifestement susceptible d’entraîner pour elles, compte tenu de la pathologie dont elles sont atteintes, des conséquences graves pour leur santé physique ou psychique ».
Que recouvre cette notion de « provocation à s’abstenir de suivre » ? Et que signifient les mots « en l’état des connaissances médicales » ? De quelles connaissances médicales s’agit-il ? Celles des laboratoires pharmaceutiques, alors même que la balance bénéfice-risque peut varier largement dans le temps ?
Rappelons-nous des péripéties du vaccin AstraZeneca, d’abord recommandé pour tous malgré les mises en garde de certaines voix dissonantes, avant d’être réservé à certaines catégories, puis finalement complètement retiré. On voit au travers de cet exemple toute la difficulté qu’il y a à demander au juge pénal de condamner les prises de position scientifiques : ce qui apparaît vrai scientifiquement aujourd’hui peut ne plus l’être demain !
Cette notion d’état des connaissances médicales est beaucoup trop vague et sujette à interprétation. Elle peut ainsi conduire à qualifier de dérive sectaire toute opposition personnelle à un traitement médical, quels que soient le contexte et les motivations personnelles.
Inversement, des pratiques médicales complémentaires, dont un grand nombre sont officiellement reconnues dans d’autres pays, pourraient être non seulement discréditées, mais aussi criminalisées. Le syndicat des médecins libéraux s’est d’ailleurs ému des risques de dérives graves que pourrait entraîner l’adoption de ce texte.
Et que dire de tous les lanceurs d’alerte, dont la vigilance et la ténacité ont pourtant permis de dénoncer des scandales sanitaires qui ont émaillé l’histoire de notre pays et de stopper des prescriptions thérapeutiques délétères pour la santé de nos concitoyens ?
Distilbène, Mediator, Vioxx, Dépakine, statines, Levothyrox, prothèses mammaires PIP : tous ces scandales ont été révélés par des patients victimes ou par leurs familles. Auraient-ils eu le courage de lancer l’alerte devant la menace d’un emprisonnement ou d’une peine d’amende ? Rien n’est moins sûr…
Qui, en dehors du médecin et de son patient, peut décider qu’un traitement est manifestement susceptible d’entraîner des conséquences graves pour la santé physique ou mentale des personnes concernées ? Quelle sera la prochaine étape ? Renoncer au secret médical ? Où placerez-vous la limite ?
Au travers de ce texte, c’est le retour en force de l’État « nounou », qui décide pour nous de ce qui est vrai ou faux, de ce qui est bon ou pas pour notre santé et même de ce qui peut ou ne peut pas être dit.
Les citoyens sont-ils trop stupides pour ne pas être capables de se forger une opinion par eux-mêmes, en étudiant les arguments avancés par des personnes de points de vue différents ?
Cela n’a pas échappé au Conseil d’État, qui considère que « ni la nécessité ni la proportionnalité de ces nouvelles incriminations ne sont avérées ». Je salue également la clairvoyance de notre rapporteure Lauriane Josende, que je tiens à féliciter pour la rigueur de son analyse, sur l’initiative de laquelle l’article 4 ainsi que d’autres dispositions plus que discutables ont été purement et simplement supprimés.
Madame la secrétaire d’État, est-ce une façon pour le Gouvernement de cadenasser le débat scientifique ? De quoi avez-vous peur ? (Mme la secrétaire d’État proteste. – M. Thomas Dossus s’exclame.)
M. Olivier Bitz. Ce n’est pas digne !
Mme Sylviane Noël. Vos propos outranciers tenus à l’égard de notre méritant collègue Alain Houpert dans l’hebdomadaire L’Express démontrent, s’il en était besoin, les véritables motivations que le Gouvernement poursuit au travers de ce texte : discréditer, museler et punir tous ceux qui osent émettre un avis différent du vôtre !
Durant la crise du covid-19, bon nombre de certitudes scientifiques sur lesquelles nos dirigeants se sont appuyés ont été démenties quelques mois plus tard. Certains médecins et scientifiques qui défendaient une voie différente de celle du Gouvernement ont été discrédités, censurés et persécutés afin de faire croire à un « consensus scientifique » qui n’a jamais existé.
Avant de s’engager dans de nouvelles lois visant à restreindre nos choix individuels de santé, le Gouvernement serait bien inspiré de tirer les leçons de toutes les atteintes aux droits fondamentaux qui ont été commises ces dernières années au nom du covid-19.
Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Sylviane Noël. Il est urgent de retrouver une pluralité d’opinions ainsi qu’une véritable liberté d’expression et de débat au sein de notre pays. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Olivier Bitz applaudit également.)
Mme Nathalie Goulet. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, trois minutes, c’est la durée d’un témoignage.
Limitées par l’article 45 du règlement du Sénat et par l’article 40 de la Constitution, les possibilités de compléter votre texte, madame la secrétaire d’État, étaient relativement réduites.
Ce projet de loi manque d’ambition. Il ne traite pas de l’indemnisation des victimes, ce qui est tout de même dommage.
J’avais déposé un amendement visant à compléter les missions de la Miviludes de façon que cet organisme puisse veiller à la juste indemnisation des victimes, mais on m’a rétorqué qu’il était irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution. Or il visait non pas à ce que la Miviludes indemnise elle-même, mais à ce qu’elle veille au bon fonctionnement des mécanismes d’indemnisation. Je pense que vous examinerez ce point dans le cadre de la navette. (Mme la secrétaire d’État acquiesce.)
La Miviludes ayant fusionné avec le comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR), un remarquable document de politique transversale, dit « orange budgétaire », a été publié. Malheureusement, celui-ci n’identifie ni les missions, ni les moyens, ni les résultats de la Miviludes. Vos services devraient se rapprocher de Bercy afin que ledit document précise quels sont et les moyens affectés à la Miviludes et les résultats de sa politique.
Par ailleurs, ce texte ne contient aucun dispositif de contrôle du financement des associations, sujet sur lequel beaucoup reste à faire. Encore une fois, en raison des conditions d’examen du texte et des limites que l’article 45 du règlement nous impose, je n’ai pas fait preuve de beaucoup de créativité afin d’éviter que mes amendements ne soient retoqués.
Madame la secrétaire d’État, il faudrait sérieusement coordonner votre texte avec la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, que Nathalie Delattre a évoquée et qui traite de sujets connexes. Certaines des dispositions que nous avons adoptées et qui ne sont pas encore évaluées mériteraient d’être confrontées aux mesures que nous sommes en train d’examiner.
Madame la secrétaire d’État, veillez à l’indemnisation des victimes, complétez les missions de la Miviludes ainsi que le document de politique transversale de façon que, lors de l’examen du prochain budget, le travail, les moyens et les objectifs de la Miviludes soient clairement identifiables et que son fonctionnement ne soit pas noyé dans celui du CIPDR, lequel a connu quelques défaillances.
Ces sujets sont extrêmement importants ; vous aurez probablement à cœur de les mettre en musique au cours de la navette et lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – MM. Olivier Bitz et André Reichardt applaudissent également.)
M. Olivier Bitz. Bravo !
Mme la présidente. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
projet de loi visant à renforcer la lutte contre les dérives sectaires
Chapitre Ier A
Consacrer les pouvoirs et le rôle de la MIVILUDES dans la lutte contre les dérives sectaires
(Division nouvelle)
Article 1er A (nouveau)
Une mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires est chargée :
1° D’observer et d’analyser le phénomène des mouvements à caractère sectaire dont les agissements sont attentatoires aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales ou constituent une menace à l’ordre public ou sont contraires aux lois et règlements ;
2° De favoriser, dans le respect des libertés publiques, la coordination de l’action préventive et répressive des pouvoirs publics à l’encontre de ces agissements ;
3° De développer l’échange des informations entre les services publics sur les pratiques administratives dans le domaine de la lutte contre les dérives sectaires ;
4° De contribuer à l’information et à la formation des agents publics dans ce domaine ;
5° D’informer le public sur les risques et, le cas échéant, les dangers auxquels les dérives sectaires l’exposent et de faciliter la mise en œuvre d’actions d’aide aux victimes de ces dérives ;
6° De participer aux travaux relatifs aux questions relevant de sa compétence menés par le ministère des affaires étrangères dans le champ international.
Le président de la mission établit un rapport annuel d’activité remis au Premier ministre et rendu public. Il est publié sous la seule responsabilité du président qui ne peut être poursuivi à l’occasion des opinions qui y sont émises.
Elle reçoit les témoignages volontaires de personnes victimes de dérives sectaires, ou de tiers souhaitant témoigner de tels faits, des signalements individuels ou toute information sur l’existence ou le risque d’une dérive sectaire. Ces informations peuvent, sous réserve de l’accord de la personne déclarant avoir été victime, être publiées dans le rapport annuel. Les témoignages font l’objet de mesures adéquates de pseudonymisation ou d’occultation en vue d’assurer la confidentialité de l’identité des personnes concernées, en ce compris les personnes qui témoignent. Les informations émanant d’un témoin ou d’une personne tierce ayant connaissance de tels actes ne peuvent pas faire l’objet d’une communication.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn, sur l’article.
Mme Laurence Muller-Bronn. Je souhaite tout d’abord remercier notre rapporteure Lauriane Josende de son travail sur ce projet de loi. Elle a permis la suppression de dispositions très problématiques du point de vue du droit et dangereuses en termes de liberté d’expression, de liberté d’information et de liberté de choix individuel en santé.
Disons-le franchement, ce texte constitue l’exemple même des dérives législatives auxquelles nous avons été confrontés tout au long de la crise sanitaire : excessif, liberticide et imposé aux parlementaires en procédure d’urgence le soir ou la nuit, alors que rien ne le justifie. Mais nous sommes habitués à ces manières de faire et nous avons vite compris la nécessité de rejeter la version initiale du projet de loi.
Je ne reprendrai pas les nombreux arguments exposés durant la discussion générale, mais je tiens à revenir sur un point essentiel : les motivations du texte et son postulat de départ reposent sur des arguments flous, ambigus et anxiogènes. Vous décrivez une explosion des dérives sectaires depuis la crise sanitaire, qui se seraient multipliées avec le développement des pratiques de soins non conventionnelles.
M. Jacques Fernique. Non !
Mme Laurence Muller-Bronn. Or aucune de ces affirmations maintes fois répétées n’est validée par une étude ou un recueil statistique. On nous présente des chiffres où sont volontairement mélangés les saisines, les signalements et les autres indicateurs. Ce n’est pas sérieux !
Je rappelle qu’une commission d’enquête sénatoriale avait déjà dressé, en 2013, un constat approfondi sur l’influence des mouvements à caractère sectaire dans le domaine de la santé, bien avant le covid-19. Nous disposons aujourd’hui de la législation nécessaire pour répondre à ces phénomènes, et ce de manière tout à fait rationnelle.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, sur l’article.
M. Pierre Ouzoulias. Mes chers collègues, je voulais intervenir à ce moment du débat pour vous dire mon embarras concernant les bases choisies pour commencer cette discussion. La dénégation des dérives sectaires ne me semble pas la bonne perspective pour aborder ce texte.
Par ailleurs, je ne comprends pas comment, dans vos interventions de discussion générale, vous avez pu mélanger et considérer de la même façon, d’une part, la docteure Irène Frachon, qui a justement révélé les problèmes causés par le Mediator, sur la base d’une analyse clinique et scientifique parfaitement démontrée, ce qui a d’ailleurs permis à sa cause de gagner devant les tribunaux, et, d’autre part, les dénégations de quelques savants farfelus lors de la crise de la covid-19. (M. Thomas Dossus marque son approbation.)
Il n’y a pas plusieurs sciences. Il n’y en a qu’une seule, celle qui obéit à des règles déontologiques. C’est celle-là qu’il faut écouter.
Il faudrait recentrer notre débat sur le point essentiel, à savoir la prise en compte des dérives sectaires. Mes chers collègues, nous n’avons pas besoin de statistiques pour constater, en suivant les réseaux sociaux, que nous sommes face à une grande vague d’irrationalité extrêmement dangereuse. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. – Mmes Nathalie Delattre et Nathalie Goulet ainsi que M. Jean-Luc Brault applaudissent également.)
Mme la présidente. L’amendement n° 30, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
Après l’article 21 de la loi n° 2001-504 du 12 juin 2001 tendant à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales, il est inséré un article 21 bis ainsi rédigé :
« Art. 21 bis. - Une administration désignée par décret du Président de la République est chargée de la mise en œuvre de la politique de prévention et de lutte contre les dérives sectaires. Elle a notamment pour missions : »
II. – Alinéa 8
1° Première phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Elle remet un rapport annuel d’activité au Premier ministre qui est rendu public.
2° Seconde phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d’État. L’article 1er A visant à conférer à la Miviludes un statut législatif fait partie des ajouts de la commission.
Cette mesure était proposée dans le rapport sénatorial du 4 avril 2013 sur l’influence des mouvements à caractère sectaire dans le domaine de la santé. Elle est également attendue par les associations d’aides aux victimes de dérives sectaires, qui ont construit des liens forts et un rapport de confiance avec la Miviludes.
Loin de remettre en cause cette disposition, cet amendement a pour objet de la sécuriser juridiquement en la toilettant des dispositions qui présentent un risque d’inconstitutionnalité, notamment le fait d’accorder une immunité au président de la Miviludes pour les opinions émises dans le rapport annuel d’activité de la mission.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Lauriane Josende, rapporteure. Cet amendement du Gouvernement ayant été déposé tardivement, la commission n’a pu l’examiner. À titre personnel, j’y suis défavorable.
Nous pourrions certes être d’accord avec certaines des dispositions de cet amendement, mais d’autres ne peuvent absolument pas nous convenir en l’état.
La commission a proposé de conférer un statut législatif à la Miviludes. L’insertion de cette précision dans la loi du 12 juin 2001 tendant à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales nous paraît être une bonne idée.
En revanche, nous ne sommes favorables ni à ce que son nom puisse être changé, alors qu’il rend cet organisme facilement identifiable et fait partie de son identité, ni à la suppression de l’immunité de son président.
Nous pouvons toutefois nous réjouir que le Gouvernement accepte le statut législatif de la Miviludes – il s’agit d’une demande ancienne et nécessaire. (Mme la secrétaire d’État acquiesce.)
Le Gouvernement invoque plusieurs obstacles constitutionnels qui imposeraient de modifier la rédaction proposée par la commission. Or l’article 34 de la Constitution n’empêche pas de créer des organismes dont le champ de compétences relève du domaine de la loi.
En ce qui concerne l’immunité du président pour les opinions émises dans le rapport annuel, il nous semble nécessaire de prémunir la Miviludes contre la multiplicité des procédures « baillons » intentées par les mouvements à tendance sectaire.
Il est ressorti des auditions que nous avons menées que la non-anonymisation des témoignages recueillis dans les avis de la Miviludes constituait l’un des principaux problèmes auxquels elle était confrontée lorsque des poursuites viennent à être engagées.
Il nous faut continuer de travailler avec le Gouvernement et l’Assemblée nationale sur cette question. Peut-être la navette parlementaire permettra-t-elle d’aboutir à une rédaction convenable.
Par cet article 1er A, la commission a institué une mission qui pourrait, le cas échéant, être renommée par décret. Nous ne voyons là aucune difficulté.
Mme la présidente. L’amendement n° 9 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…°De coordonner l’action des acteurs associatifs impliqués dans la lutte contre les dérives sectaires et l’accompagnement des victimes et d’animer ce réseau associatif, y compris par le biais de formations.
La parole est à M. Jacques Fernique.
M. Jacques Fernique. Cet amendement vise à traduire l’objectif n° 10 de la stratégie nationale de lutte contre les dérives sectaires. Nous demandons de renforcer la coordination entre la Miviludes et les associations spécialisées, afin de mieux accueillir, soutenir et accompagner les personnes subissant ou ayant subi une expérience sectaire.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Lauriane Josende, rapporteure. Cet amendement tend à conforter davantage le rôle de coordination et d’animation du tissu associatif impliqué dans la lutte contre les dérives sectaires.
Nous ne pouvons que nous réjouir de l’implication bénévole quotidienne de nombreux acteurs dont il importe de consolider les liens avec la Miviludes. La commission est favorable à cet amendement, à la rédaction duquel elle a été associée.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d’État. Je suis très reconnaissante au sénateur Benarroche d’avoir déposé cet amendement, qui constitue l’une des pierres de la stratégie nationale de lutte contre les dérives sectaires.
Néanmoins, je ne veux pas inscrire cette mesure, qui relève d’une circulaire, dans le marbre de la loi. (M. Thomas Dossus s’exclame.)
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il y sera défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je voterai cet amendement, qui me semble de bon sens.
Coordonner l’action et l’accompagnement des victimes correspond à l’objet d’un amendement que j’ai déposé, mais qui a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution. Le groupe écologiste a été plus attentif que moi à la rédaction de son dispositif… (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Fernique, pour explication de vote.
M. Jacques Fernique. Madame la ministre, vous parlez d’une pierre que l’on ne devrait pas graver dans le marbre : j’avoue que j’ai du mal à comprendre. (Sourires.)
Mme la présidente. L’amendement n° 13 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Elle est informée, à sa demande et après accord du maire, des travaux conduits au sein des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance en matière de lutte contre les dérives sectaires.
La parole est à M. Jacques Fernique.
M. Jacques Fernique. Cet amendement vise à mettre en œuvre les conclusions du rapport sénatorial de 2013 rédigé par Alain Milon et Jacques Mézard.
La Miviludes n’a pas la faculté d’enjoindre aux préfets de mettre en place des groupes de travail spécifiques, alors qu’elle joue un rôle essentiel en matière d’animation du réseau de lutte contre les dérives sectaires. Elle devrait au moins pouvoir bénéficier de retours d’informations essentiels à la conduite de ses missions.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Lauriane Josende, rapporteure. Nous comprenons la volonté des auteurs de cet amendement, qui a pour objet de favoriser l’articulation entre la Miviludes et les actions menées localement par les élus, les préfectures ou les forces de l’ordre.
Comme les auditions l’ont souligné, le service central chargé d’enquêter sur les dérives sectaires n’est doté que de huit personnes. Il cherche à développer, sur le modèle de la lutte contre les violences intrafamiliales, un maillage territorial reposant sur des référents locaux en matière de lutte contre les dérives sectaires. Il me semble indispensable que le législateur puisse s’engager en ce sens.
Nous avons essayé de travailler à une nouvelle rédaction de cet amendement. Le sujet relève-t-il cependant du domaine de la loi ? Cela reste discutable…
La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d’État. Le Gouvernement s’en remet également à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 1er A, modifié.
(L’article 1er A est adopté.)
Après l’article 1er A
Mme la présidente. L’amendement n° 10, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Après l’article 1er A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au deuxième alinéa de l’article L. 132-5 du code de la sécurité intérieure, après le mot : « peines », sont insérés les mots : « , à la prévention et à la lutte contre les phénomènes sectaires ».
La parole est à M. Jacques Fernique.
M. Jacques Fernique. Le présent amendement a pour objet d’élargir les compétences des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance au traitement des faits relatifs aux phénomènes sectaires.
Les élus locaux se trouvent parfois bien démunis face à la recrudescence de phénomènes sectaires au sein de leur commune. Ils peinent, lorsqu’ils signalent ces faits aux préfets, à obtenir les réponses adéquates.
Il convient de ce fait d’améliorer le pilotage local et l’échange d’informations entre les élus locaux, les préfets, les institutions et les organismes publics comme privés autour de ce sujet. Les élus pourront proposer des orientations et des diagnostics, évoquer des événements particuliers ou urgents.
Cet amendement vise simplement à traduire l’objectif n° 7 de la stratégie nationale de lutte contre les dérives sectaires.