M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Madame la sénatrice, les élections des chambres d’agriculture sont un moment important de mobilisation du monde agricole dans l’ensemble de ses composantes. Mon ministère y veille donc tout particulièrement.
J’ai demandé à mes services d’organiser les prochaines élections dans la continuité du précédent scrutin, notamment en termes de collège, afin d’assurer une forme de stabilité, tout en veillant à la stricte observation des échéances prévues par les textes applicables, notamment les délais d’inscription, pour que chacun ait le temps.
Comme vous le relevez, madame la sénatrice, lors des élections de 2019, la charge de travail, induite notamment par les consultations des différents acteurs impliqués, a eu pour conséquence un glissement de calendrier d’un mois, amenuisant mécaniquement la période d’inscription sur les listes électorales.
Dans le cadre de la préparation du prochain scrutin, les préfets feront afficher dès que possible, mais au plus tard le 1er juillet 2024, les avis annonçant l’établissement des listes électorales pour l’ensemble des collèges d’électeurs. Ainsi les intéressés pourront-ils faire connaître leur demande d’inscription sur les listes électorales durant une période minimale de deux mois et demi.
J’ai en outre demandé à mes services de me tenir informé de toute difficulté qui serait relevée ou qui pourrait ressortir des travaux du comité de pilotage national de ces élections. Cette instance, qui est en cours d’installation, nous permettra de disposer d’un certain nombre d’éléments.
En ce qui concerne l’organisation matérielle du scrutin, qui fera l’objet d’une instruction technique, la direction de l’administration centrale compétente organisera très prochainement un retour d’expérience sur les conditions matérielles du précédent scrutin, madame la sénatrice.
Il nous faut enfin remettre chaque jour sur le métier l’œuvre de simplification. Nous allons donc nous pencher sur la liste des pièces justificatives, afin de supprimer les pièces inutiles, ou même de trouver une pièce qui permettrait à elle seule de justifier de la capacité d’inscription sur les listes électorales.
Soyez assurée que nous y travaillons, madame la sénatrice, et que nous serons au rendez-vous de la plus forte simplification possible, car c’est d’elle que dépend la participation, qui constitue un élément majeur ; à tout le moins la favorise-t-elle.
Tels sont les éléments que je peux apporter en réponse à vos questions, madame la sénatrice.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour la réplique.
Mme Nathalie Goulet. Je reviens sur la représentativité, monsieur le ministre, car je sais votre attachement à cette question : les propriétaires, c’est 37 % du budget, mais un siège au lieu de deux. J’estime que c’est un élément auquel il conviendra de réfléchir. Sans propriétaires, il ne peut y avoir ni agriculteurs, ni fermiers, ni vie rurale. Il s’agit donc d’un enjeu important.
En tout état de cause, je vous remercie de votre réponse.
assouplissement des règles d’octroi de crédit immobilier
M. le président. La parole est à M. Cyril Pellevat, auteur de la question n° 925, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
M. Cyril Pellevat. Monsieur le ministre, ma question porte sur la situation du marché du crédit immobilier.
Depuis plusieurs mois, le secteur immobilier subit une crise d’ampleur qui touche à la fois tout Français souhaitant se loger et tous les secteurs qui dépendent du marché du crédit immobilier. Cela affecte également les collectivités territoriales, qui ont vu baisser leurs recettes liées aux droits de mutation.
Si cette crise résulte en grande partie de la hausse des taux d’intérêt, un facteur aggrave la crise actuelle, à savoir les nouveaux critères décidés par le Haut Conseil de stabilité financière. Ces critères obligatoires plafonnent le taux d’endettement à 35 % sans tenir compte du reste à vivre des ménages. La durée d’emprunt ne peut, quant à elle, excéder vingt-cinq ans pour l’ancien et vingt-sept ans pour le neuf.
Les principales conséquences de cette nouvelle réglementation sont les refus de plus en plus nombreux de crédits et des allongements de durée non nécessaires et coûteux pour les emprunteurs.
Les règles du Haut Conseil de stabilité financière bloquent des Français pourtant solvables et finançables. Face à la crise actuelle et à ces nouvelles règles contraignantes, c’est tout le marché immobilier qui est fragilisé.
Les acteurs du marché immobilier demandent plus de flexibilité dans l’application des règles établies par le Haut Conseil de stabilité financière, notamment une meilleure prise en compte du reste à vivre des foyers. Une telle mesure ne coûterait rien aux finances publiques.
Monsieur le ministre, vous paraît-il envisageable de modifier la réglementation en vigueur pour rendre plus flexibles les règles du Haut Conseil de stabilité financière et ainsi relancer le secteur de l’immobilier qui en a tant besoin ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Cyril Pellevat, comme vous le savez, le ralentissement de la production de crédit est suivi de très près par le Gouvernement.
Votre question est juste, tant il est vrai que ce ralentissement résulte principalement, et en pratique quasi uniquement, du resserrement de la politique monétaire.
La baisse de la demande des ménages est en effet causée par la hausse rapide des taux d’intérêt immobiliers et constitue la raison principale de la baisse de production de crédit. Récemment, les taux d’intérêt tendent toutefois vers une stabilisation qui pourrait ralentir la dégradation des conditions de financement.
Vous mettez en exergue les positions du Haut Conseil de stabilité financière, notamment l’une des mesures qui ciblent l’offre de crédits en encadrant les conditions d’octroi, sur le fondement des bonnes pratiques que constituent en particulier la maîtrise du taux d’effort des emprunteurs et le caractère raisonnable de la maturité maximale du crédit.
Cette décision a été prise par le Haut Conseil de stabilité financière, institution collégiale qui ne dépend pas du Gouvernement et au sein de laquelle siègent des représentants de la Banque de France, de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution ou encore de l’Autorité des marchés financiers.
Dans ce contexte, le Haut Conseil a déjà adapté sa norme au nouveau contexte financier, dans l’objectif – qui est aussi le vôtre, monsieur le sénateur, et que nous partageons – de ne pas freiner l’offre de crédit, tout en respectant les grands principes.
Premièrement, la marge de flexibilité de la mesure a été élargie s’agissant de la partie libre d’utilisation, par exemple pour soutenir l’investissement locatif.
Deuxièmement, le respect de la marge de flexibilité sera désormais apprécié par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution sur trois trimestres glissants, ce qui permet aux banques un ajustement plus souple, notamment pour tenir compte des pics de saisonnalité.
Troisièmement, les prêts-relais sont désormais exclus du calcul du taux d’effort, sous condition de quotités de financement de 80 % au maximum, afin de fluidifier le marché.
Parallèlement, la possibilité d’allonger la maturité des prêts avec un différé d’amortissement est facilitée dans le cas de la construction d’un logement neuf ou dans le cas de travaux dont le montant s’élève à moins de 10 % du coût total de l’opération.
Le Gouvernement soutient enfin la mise en place par la Fédération bancaire française d’un dispositif offrant la possibilité d’un réexamen pour les ménages solvables dont la demande de crédit immobilier aurait été refusée.
M. le président. La parole est à M. Cyril Pellevat, pour la réplique.
M. Cyril Pellevat. Je vous remercie de tous ces éléments, monsieur le ministre.
Si le Haut Conseil de stabilité financière ne dépend pas du Gouvernement, le Gouvernement peut tout de même influencer ses décisions. (M. le ministre en convient.)
Des solutions sont attendues sur le terrain, car, pour les élus locaux, il ne se passe pas un jour sans qu’ils soient sollicités par une entreprise du bâtiment ou un emprunteur potentiel qui se retrouve dans une situation de blocage. De plus, dans les départements qui ont l’habitude d’enregistrer des taux de mutations élevés, comme c’est le cas pour la Haute-Savoie, les budgets des collectivités s’en ressentent.
avenir de l’aéroport d’orly et retrait d’air france de la plateforme aéroportuaire
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, auteur de la question n° 939, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
M. Pascal Savoldelli. Monsieur le ministre, le 18 octobre dernier, la direction du groupe Air France annonçait son retrait total de l’aéroport d’Orly, un choix qui profiterait à Transavia, filiale low cost du groupe.
Ce transfert aurait pour conséquence le départ de 600 à 1 000 emplois d’Orly, sans compter les emplois induits, estimés à 1 pour 5. Cela conduirait – permettez-moi l’expression, monsieur le ministre – à un véritable « désarmement économique » du Val-de-Marne et du sud francilien.
L’État est le premier actionnaire d’Air France. Il lui alloue en outre des subventions au titre de sa mission de continuité territoriale. Pourtant, pas une seule fois le Gouvernement ne s’est exprimé.
Deuxième aéroport français et douzième aéroport européen, Orly est l’aéroport le plus dynamique d’Île-de-France et la passerelle avec les outre-mer. Cette dynamique fragile repose sur une diversité d’activités : présence d’Air France, industries à proximité, croissance des vols à bas coût et développement des longs courriers.
L’argument des économies après regroupement d’activité ne tient pas. Le potentiel d’Orly continue de s’accroître. Des compagnies privées sans mission de service public sont avides de récupérer des lignes, y compris pour la Corse.
J’en viens donc à mes deux questions, monsieur le ministre.
Le Gouvernement entend-il maintenir les emplois et les lignes d’Air France à Orly ?
Quelle est la vision stratégique du Gouvernement pour l’avenir de l’aéroport d’Orly ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Savoldelli, je vous remercie de votre question qui me permettra d’apporter un certain nombre d’éclairages au sujet du groupe Air France-KLM, qui est un opérateur important de l’aéroport d’Orly.
Ce projet se fonde d’abord sur un constat simple : la demande des vols sur le réseau national s’est effondrée depuis la crise sanitaire, du fait principalement de l’attractivité du train et du développement du travail en distanciel, ce qui entraîne des pertes importantes pour Air France, alors même qu’Orly, et c’est un atout, sera relié au centre de Paris grâce au prolongement de la ligne 14 du métro, qui sera inauguré en juin.
Basculer les vols interrégionaux opérés par Air France d’Orly vers Roissy présente également l’intérêt d’offrir un meilleur accès au réseau international à un certain nombre de nos concitoyens qui ne résident pas en Île-de-France.
Pour autant, comme vous l’avez indiqué, monsieur le sénateur, l’ensemble des créneaux aujourd’hui opérés par Air France seront repris par Transavia.
Je souhaite par ailleurs au nom du Gouvernement vous apporter trois garanties.
D’abord sur l’emploi, car 500 emplois étant concernés, y compris au sol, ce sujet est absolument crucial. Ce projet ne prévoit aucun licenciement et l’État sera très attentif aux solutions de reclassement offertes à l’ensemble de ces salariés franciliens.
Ensuite, l’activité à Orly continuera de bénéficier de la croissance de Transavia, qui a annoncé l’ouverture de quatorze nouvelles lignes en 2024, ainsi que du remplacement intégral de la flotte par de nouveaux appareils A320neo de dernière génération, qui présentent l’avantage non négligeable d’être plus propres et plus silencieux, et dont le premier exemplaire été livré à Orly il y a tout juste une semaine.
Enfin, pour ce qui est de la desserte du territoire, la direction d’Air France s’est engagée à maintenir 90 % de l’offre existante sur le réseau national et le groupe continue d’avoir des discussions avec les élus locaux sur les modalités précises de mise en œuvre de cet engagement pour prendre en compte au mieux la situation difficile de certaines destinations.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour la réplique.
M. Pascal Savoldelli. Monsieur le ministre, vous nous dites que le réseau national s’est effondré. Je conteste cette affirmation, car chacun sait qu’il faut tenir compte de la période de la crise de la covid-19 ; or votre raisonnement – du moins celui d’Air France – s’appuie sur les chiffres de 2019.
J’ai bien noté votre engagement en matière d’emploi et le fait que le projet ne prévoyait aucun licenciement. Toutefois, on mesure d’emblée les nombreux problèmes qui se poseront et qui porteront notamment sur les trajets ou sur le transport vers l’aéroport.
Vous mentionnez à juste titre, la ligne 14, monsieur le ministre. L’État vient d’y investir 400 millions d’euros, sans compter les 3 milliards d’euros pour l’arrivée du métro au mois de juin 2024.
Je vous avoue que je suis très inquiet face à la concurrence que risque de subir Air France de la part d’autres compagnies, y compris sa filiale Transavia, qui chercheront à prendre sa place et à bénéficier du réseau de transport exceptionnel, financé par l’argent public, qui permettra de relier l’aéroport au centre de Paris.
J’ai une pensée pour les populations ultramarines, qui ont une histoire avec Orly. Celle-ci n’est pas seulement liée aux lignes aériennes, mais elle a aussi une dimension sociale et humaine.
Monsieur le ministre, je vous invite à traiter le sujet avec la plus grande attention, de manière que l’on ne vienne pas nous dire, dans plusieurs années, que l’aéroport d’Orly a été vendu au secteur privé comme un aéroport low cost.
respect par le groupe technip energies des sanctions européennes contre la russie
M. le président. La parole est à Mme Mathilde Ollivier, auteure de la question n° 944, transmise à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Mme Mathilde Ollivier. Monsieur le ministre, en 2019, le groupe russe Novatek annonçait le lancement du projet Arctic LNG 2 de gaz naturel liquéfié en Arctique. Ce chantier, très stratégique pour la Russie, devait lui permettre de produire et d’exporter 20 millions de tonnes de gaz liquéfié par an vers l’Europe et l’Asie. La filiale française était liée contractuellement au groupe russe à hauteur de 7 milliards d’euros pour assurer l’ingénierie et la construction du projet.
La guerre en Ukraine a entraîné la mise en application de sanctions à l’échelon européen, interdisant « explicitement les exportations vers la Russie de produits et de technologies utilisés dans la liquéfaction de gaz naturel, et proscrit toute assistance technique, financière ou logistique à leur utilisation ».
À la suite d’une enquête du journal Le Monde, de sérieux doutes sont apparus sur les activités du groupe Technip Energies en Russie. En effet, il semblerait que la société soit parvenue à retarder sa sortie du mégaprojet, notamment avec la poursuite de la livraison de pièces jusqu’au mois d’octobre 2022 et le transfert d’entités aux Émirats arabes unis. Le cabinet Brunswick, qui travaille pour Technip Energies, a déclaré sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) avoir rencontré, en 2022, plusieurs membres du Gouvernement ou de cabinets ministériels pour qu’ils soutiennent Technip Energies dans le cadre de sa sortie ordonnée du projet.
Monsieur le ministre, étiez-vous au courant d’un quelconque contournement des sanctions par le groupe Technip Energies pour répondre aux exigences contractuelles du client russe Novatek ? Cette potentielle violation du régime de sanctions fera-t-elle l’objet d’une enquête ?
À la suite des révélations du journal Le Monde, avez-vous exigé la liste des composants de tous les équipements livrés par Technip Energies après la mise en application des sanctions européennes ? Quelles sont les conséquences pour l’État, comme actionnaire, après la chute du cours de l’action de Technip Energies à la suite de la parution de l’enquête du journal Le Monde ?
Enfin, pourquoi la France et l’Union européenne ne mettent-elles pas tout en œuvre – comme le font les États-Unis qui ont pris des sanctions – pour empêcher que ce projet ne voie le jour, ce qui contribuerait à assécher les ressources de la machine de guerre russe ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Madame la sénatrice Ollivier, le Gouvernement tient à réaffirmer qu’il est pleinement mobilisé pour soutenir l’Ukraine, notamment en faisant adopter au sein du G7 et de l’Union européenne la mise en place de sanctions économiques contre la Russie. Certains nous reprochent d’ailleurs d’aller trop loin en ce sens.
Dans ce cadre, la France demeure particulièrement attentive au strict respect des sanctions européennes. C’est une question non seulement de crédibilité, mais aussi d’équité entre les entreprises.
Pour ce qui est du secteur de l’énergie et du cas particulier du groupe Technip Energies, les sanctions européennes contre la Russie comprennent une interdiction de fourniture de biens utilisés dans le raffinage et la liquéfaction de gaz naturel, conformément au règlement de l’Union européenne n° 833/2014.
Ce règlement est d’application directe et il est de la responsabilité des entreprises concernées de s’y conformer, en sollicitant les autorisations nécessaires auprès du service des biens à double usage et de la direction générale du Trésor.
Vous évoquez des échanges entre le groupe Technip Energies et les services de l’État. L’administration de mon collègue Bruno Le Maire se tient en effet à la disposition de toutes les entreprises françaises sur ce sujet, y compris pour les aider dans leurs démarches de retrait du marché russe. Elle applique dans ses réponses une politique claire de strict respect des sanctions européennes.
Quant à la qualification du contournement de sanction, elle ne peut s’apprécier que par une analyse fine et au cas par cas. Elle relève des prérogatives d’enquête du service des douanes et doit s’exercer sur la base d’éléments précis, qu’il s’agisse de la liste des types de biens concernés, de l’applicabilité ou non d’exemptions ou de dérogations prévues par les textes européens, ou bien encore des pays d’exportation. Ce travail est en cours dans le cas qui nous occupe.
situation de la fibre optique dans plusieurs communes des yvelines
M. le président. La parole est à Mme Marta de Cidrac, auteure de la question n° 993, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Mme Marta de Cidrac. Monsieur le ministre, certaines communes de mon département des Yvelines m’ont fait part de l’intensification des difficultés qu’elles rencontrent dans l’utilisation de leur réseau de fibre optique. En effet, Carrières-sous-Poissy, Achères ou Conflans-Sainte-Honorine, pour ne citer que ces trois exemples, font face à une forte dégradation de la qualité du service opéré par SFR, agissant en tant qu’opérateur d’infrastructure.
Le recours accru à la sous-traitance pour les raccordements de nouveaux clients a endommagé le réseau, de sorte que des remises en état sont nécessaires. Reste que les différents opérateurs commerciaux se renvoient la balle.
La confusion totale qui découle de cette situation a durablement dégradé le réseau de fibre optique de ces communes, ce qui n’est pas sans conséquence sur la qualité de vie de leurs habitants.
Cela contraste avec le déploiement du programme New Deal mobile dans les Yvelines dont je salue les progrès. Cependant, n’oublions pas le problème posé par la fibre optique qui se dégrade très fortement à plusieurs endroits dans le territoire.
Monsieur le ministre, quelles mesures envisagez-vous de prendre pour mettre fin à l’anarchie entre les différentes parties prenantes du dossier et quels moyens allez-vous engager pour que toutes les communes qui connaissent ces difficultés retrouvent un réseau de fibre optique digne de ce nom ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Madame la sénatrice, certains territoires souffrent en effet de dysfonctionnements particulièrement forts en matière de qualité d’exploitation de leur réseau de fibre optique.
Ces difficultés qui pénalisent les usagers sont le fruit de plusieurs facteurs.
Tout d’abord le rythme annuel des raccordements est très élevé.
Ensuite, certains réseaux FttH (Fiber to the Home) sont historiquement mal dimensionnés, ce qui est le cas dans votre département des Yvelines.
Enfin, il faut déplorer le recours à un trop grand nombre de sous-traitants peu ou mal formés.
Face à l’accroissement des difficultés et des signalements sur les réseaux de fibre optique, le Gouvernement et l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) ont saisi la filière afin qu’elle formule rapidement des propositions d’amélioration. Celles-ci s’articulent autour de trois axes.
Le premier axe porte sur le renforcement de la qualité des interventions. Les opérateurs ont établi un cahier des charges, définissant une certification et les compétences minimales requises sur le raccordement final.
Le deuxième axe a trait au renforcement des contrôles, grâce à la transmission par les opérateurs commerciaux de leurs plannings d’intervention et grâce à la réalisation de comptes rendus d’intervention permettant le contrôle mutuel entre opérateurs, pour éviter que chacun échappe à sa propre responsabilité.
Le troisième axe concerne la reprise des infrastructures dégradées, que ce soit au niveau des points de mutualisation ou des réseaux vieillissants ou mal dimensionnés qui nécessitent une reprise globale de l’infrastructure.
Plusieurs opérateurs ont déjà notifié un plan de reprise de 1 000 points de mutualisation à l’Arcep, ce qui correspond à 450 000 locaux.
D’autres reprises sont à prévoir. Ainsi, dans la commune de Conflans-Sainte-Honorine, pour reprendre l’un des exemples que vous avez cités, l’opérateur d’infrastructure a prévu la reprise de huit points de mutualisation qui permettront de résorber un certain nombre des difficultés que vous avez évoquées.
Le Gouvernement veille à la mise en place effective par les opérateurs des trois axes que j’ai mentionnés et en a confié le contrôle à l’Arcep. C’est un travail de contrôle continu – si vous me permettez l’expression – qu’il nous faut accomplir pour faire en sorte de rétablir enfin la situation.
M. le président. La parole est à Mme Marta de Cidrac, pour la réplique.
Mme Marta de Cidrac. Monsieur le ministre, nous connaissons les arguments que vous venez d’exposer.
J’aurais souhaité que le Gouvernement tape du poing sur la table et se montre plus efficace. La situation dure depuis des mois, voire plusieurs années dans certaines communes. Cela devient d’autant plus insupportable que la pratique du télétravail se déploie de plus en plus dans les Yvelines ; or elle nécessite une connexion sans faille.
répartition de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux dans le cadre d’une installation de production d’électricité d’origine nucléaire
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, auteure de la question n° 981, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Mme Catherine Morin-Desailly. Monsieur le ministre, ma question, à laquelle j’associe mes collègues élus de la Seine-Maritime Pascal Martin, Agnès Canayer et Patrick Chauvet élus de la Seine-Maritime, porte sur la répartition de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (Ifer) dans le cadre d’une installation de production d’électricité d’origine nucléaire.
Interpellée par des élus de mon territoire qui sont concernés par la construction de deux nouveaux EPR2 (Evolutionary Power Reactor) à Penly – le début des travaux est prévu en 2027 –, je me fais le relais d’un sentiment d’incompréhension légitime vis-à-vis de la redistribution fiscale de l’Ifer.
En effet, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) voisins de la centrale nucléaire de production d’électricité (CNPE) de Penly, concernés par la nouvelle zone-cadre du plan particulier d’intervention, doivent faire face à une double problématique. Celle-ci est liée, d’une part, à l’acceptabilité du projet qui nécessite des mesures d’information, de sensibilisation et de préparation de la population, notamment en cas d’alerte ; elle tient, d’autre part, au fait que ces collectivités et EPCI sont prioritaires dans l’accueil des nouveaux employés et de leurs familles en matière de logement et d’accès aux services.
Ces contraintes et obligations justifieraient que les communes et EPCI concernés obtiennent en contrepartie une compensation fiscale. Or il n’en est rien : ils ne bénéficient pas des recettes liées à l’Ifer, qui ne sont reversées qu’à l’EPCI à fiscalité professionnelle unique d’implantation, en l’espèce la communauté de communes de Falaises du Talou.
Cette exclusivité est prévue par le code général des impôts et s’applique à d’autres cas d’installation de production d’électricité. Le sénateur Hervé Maurey l’a déjà souligné dans sa question écrite du 19 décembre 2019 : cette privation des bénéfices fiscaux légitimes liés à ces installations est injustement perçue par les collectivités.
Monsieur le ministre, afin de garantir une véritable équité territoriale et d’impliquer activement les communes, ne serait-il pas préférable d’ajuster la répartition des recettes fiscales en fonction du nouveau périmètre ? Le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales a répondu à mon collègue Hervé Maurey que les communes avoisinantes pouvaient « toujours bénéficier de la dotation au titre du FDPTP (fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle) » et qu’il n’était pas possible de revoir la répartition de l’Ifer.
J’insiste donc, monsieur le ministre, en vous demandant s’il ne serait tout de même pas utile d’envisager une modification de la répartition de l’Ifer au regard du nouveau périmètre de la CNPE de Penly. Qui plus est, je doute qu’il s’agisse d’un cas isolé.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Madame la sénatrice Morin-Desailly, vous appelez l’attention du Gouvernement sur la répartition du produit de l’Ifer. Le sujet, reconnaissons-le, est assez ancien et les mécanismes sont en place depuis un certain temps. Vous mentionnez notamment la centrale de Penly qui est située sur le territoire de la commune de Petit-Caux et qui est rattachée à la communauté de communes de Falaises du Talou. Cette centrale doit en effet bénéficier de la construction de deux réacteurs supplémentaires à compter de 2027.
Comme vous le savez, le produit de l’Ifer est réparti entre le bloc communal et le département, au sens général du terme, en fonction du lieu d’implantation. Au sein du bloc communal, la répartition varie en fonction du régime fiscal. Si l’EPCI est à fiscalité professionnelle unique, le produit de la composante de l’Ifer est réparti entre l’EPCI et le département.
Il est en effet possible – je l’ai constaté dans mon département – de demander une dotation au titre du FDPTP pour les communes voisines de l’EPCI. Dans les autres cas, c’est-à-dire en l’absence d’EPCI, la répartition se fait par moitié entre la commune et le département.
Ce système est cohérent, d’une part, avec la logique de l’intégration fiscale, d’autre part, avec la prise en compte des externalités des communes avoisinantes, considérées à l’échelle du département compétent en matière de cohésion territoriale. C’est sans doute la cohésion territoriale qui pourrait justifier la compensation des communes qui ne seraient pas dans l’EPCI d’implantation.
Dans ces conditions, le Gouvernement ne souhaite pas opérer la modification du régime actuel comme vous le demandez. Peut-être faudrait-il plutôt envisager à l’échelle du territoire la possibilité d’assurer une meilleure répartition de l’Ifer pour les communes avoisinantes de l’EPCI d’implantation.