M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour la réplique.
Mme Catherine Morin-Desailly. Nous aurons l’occasion de poursuivre cet échange, car le sujet est important.
absences de professeurs dans certains établissements scolaires situés dans des communes rurales
M. le président. La parole est à Mme Alexandra Borchio Fontimp, auteure de la question n° 958, adressée à Mme la ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse, des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques.
Mme Alexandra Borchio Fontimp. Monsieur le ministre, je vous parlerai d’un problème récurrent et plus que jamais d’actualité. En effet, l’absence d’enseignants dans plusieurs établissements scolaires situés dans des zones rurales s’impose encore et toujours dans le débat.
L’éducation nationale souffre, c’est indéniable, et nos enfants sont les premières victimes. Si certaines familles font le choix de l’enseignement privé comme solution de remplacement, tout le monde n’y a pas forcément accès, quelles qu’en soient les raisons.
La nouvelle ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse, des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques dit d’ailleurs avoir été confrontée à des absences répétées d’enseignants et, pourtant, elle vit en plein centre de Paris. Je vous laisse imaginer la situation dans la ruralité…
Quoi qu’il en soit, le Gouvernement n’a pas réussi à tenir sa promesse de mettre « un professeur devant chaque classe ». Vivre dans une zone rurale ne doit pas rimer avec subir une inégalité d’accès à l’école.
Dans mon département des Alpes-Maritimes, par exemple, plusieurs établissements du haut et du moyen pays peinent à recruter des professeurs titulaires. Que ce soit au collège Jean-Franco à Saint-Étienne-de-Tinée ou au lycée de la Montagne à Valdeblore, le problème est le même : le recrutement d’enseignants relève du parcours du combattant. Nos enfants ne peuvent pas continuer de pâtir plus longtemps de ces difficultés.
Que le problème soit lié à la situation géographique ou au temps de transport, les propositions d’augmentation de salaire ou les offres de logement ne suffisent plus pour attirer les professeurs. Les chefs d’établissement et les maires rivalisent d’imagination pour rendre ces postes attractifs, mais sans succès.
Lorsque le Premier ministre était encore à la tête du ministère de l’éducation nationale, il parlait de « choc des savoirs » et assurait vouloir « élever le niveau de l’école », ce qui est un objectif tout à fait louable. Encore faudrait-il pour cela que des enseignants soient présents dans chaque classe de France.
La ruralité ne peut pas être sacrifiée. Elle doit redevenir une priorité de l’éducation nationale. Au-delà de la pénurie d’enseignants à l’échelle nationale, il faut impérativement travailler sur la situation particulière de la ruralité.
C’est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, je souhaite connaître les mesures supplémentaires que le Gouvernement compte mettre en œuvre pour pallier le manque d’enseignants dans les établissements scolaires situés dans nos belles communes rurales.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Madame la sénatrice, comme élu du département rural du Loir-et-Cher, je ne peux qu’être sensible à la question que vous posez. Celle-ci porte en réalité sur l’attractivité du métier d’enseignant pour permettre le remplacement de ceux qui sont absents dans certains établissements scolaires. Comme vous l’avez dit, le problème se pose non seulement dans les territoires ruraux, mais parfois aussi dans les territoires urbains.
Le ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse, des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques est pleinement mobilisé pour renforcer son action. Le 31 mars dernier, la Première ministre Élisabeth Borne et Gabriel Attal, alors ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, ont annoncé l’élargissement du programme Territoires éducatifs ruraux à l’ensemble des départements ruraux. Cette extension s’inscrit au sein du plan France ruralités qui vise à garantir l’amélioration durable de la qualité des services publics dans les territoires ruraux.
Le remplacement des professeurs absents est une priorité du service public de l’éducation nationale. À ce titre, les territoires ruraux isolés font l’objet d’un pilotage spécifique des services académiques.
Depuis 2017, le ministère prend des mesures concrètes afin de renforcer l’attractivité du métier d’enseignant. Au terme d’un cycle de concertations et de négociations avec les organisations syndicales, des mesures de revalorisation des rémunérations sont entrées en vigueur au 1er septembre 2023, qui ont concerné tout le personnel enseignant.
Ainsi, le montant de la part fixe de l’indemnité de suivi et d’orientation des élèves a été augmenté. La prime d’attractivité a été étendue et revalorisée pour les professeurs stagiaires. Par ailleurs, les professeurs effectuant des missions complémentaires sur la base du volontariat peuvent bénéficier d’une rémunération complémentaire au travers du pacte enseignant. Les perspectives d’évolution professionnelle ont été améliorées pour un accès facilité au grade supérieur, ce qui constitue également un élément qui favorise l’attractivité du métier.
En complément, d’autres leviers sont mobilisés à l’échelon académique pour favoriser les carrières dans l’enseignement.
J’ajoute que nous travaillons également à fidéliser les contractuels de manière qu’ils puissent mieux œuvrer.
Le Président de la République l’a affirmé lors de la conférence de presse qui s’est tenue voilà deux jours : il y a eu des avancées sur la question du remplacement des enseignants en arrêt de travail de longue durée. En revanche, il faut faire porter l’effort sur les arrêts plus ponctuels. La question est non seulement d’attractivité, mais aussi d’organisation.
distinction entre les enseignants du public et ceux du privé pour le recrutement des professeurs agrégés et certifiés
M. le président. La parole est à Mme Nicole Duranton, auteur de la question n° 990, adressée à Mme la ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse, des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques.
Mme Nicole Duranton. Monsieur le ministre, les professeurs apprennent à nos enfants et à nos jeunes des savoirs essentiels. Qu’ils exercent dans le privé ou dans le public, ils rendent le même service public d’éducation et de formation des citoyens de demain.
Pourtant, des disparités existent entre les professeurs exerçant dans le public et les professeurs des établissements privés sous contrat. En effet, ces derniers se retrouvent écartés des concours de recrutement des professeurs agrégés (Prag) et des professeurs certifiés (PRCE).
Aujourd’hui, seuls les professeurs titulaires de la fonction publique peuvent être affectés comme enseignants dans le supérieur. Pour y prétendre, les enseignants du privé ont deux options : être lauréats d’un concours de l’enseignement public ou demander leur intégration dans le corps des professeurs agrégés ou des professeurs certifiés.
Ces étapes supplémentaires sont vécues comme une injustice pour les professeurs des établissements privés sous contrat. Certains interviennent régulièrement dans le supérieur, mais seulement en tant que vacataires. Ils sont en effet privés du statut de titulaire.
Monsieur le ministre, la ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse, des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques envisage-t-elle de remédier à ces inégalités et de permettre aux professeurs du privé d’accéder aux concours des professeurs agrégés et des professeurs certifiés dans les mêmes conditions que les enseignants du public ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Madame la sénatrice Duranton, les maîtres des établissements d’enseignement privé sous contrat d’association ont la qualité d’agent public, mais ne sont pas fonctionnaires, comme vous l’avez rappelé.
En application de l’article L. 442-5 du code de l’éducation, ils sont détenteurs d’un contrat pour enseigner en classe, fonction pour laquelle ils sont employés et rémunérés par l’État. S’ils bénéficient, en application du principe de parité posé à l’article L. 914-1 du code de l’éducation, des dispositions applicables aux enseignants du public, en revanche, les modalités de recrutement et concours sont spécifiques, ainsi que vous l’avez souligné. De même, étant recrutés sur contrat, ils ne peuvent pas non plus être détachés, en application de l’article L. 513-1 du code général de la fonction publique, car cette position administrative est réservée aux seuls fonctionnaires.
Le recrutement de professeurs agrégés et de professeurs certifiés dans l’enseignement supérieur se fait par la voie du détachement ou de l’affectation des membres des corps des professeurs titulaires de l’enseignement public. À ce jour, cette voie est donc fermée aux enseignants du privé.
Toutefois, les maîtres contractuels ou agréés de l’enseignement privé, lauréats d’un concours de l’enseignement public, qui avaient opté pour leur maintien dans l’enseignement privé, peuvent accéder au recrutement de professeurs agrégés ou de professeurs certifiés affectés dans l’enseignement supérieur en demandant leur intégration dans le corps des personnels enseignants du second degré auquel ce concours donne accès.
Par ailleurs et pour prolonger la question que vous posez, une concertation est en cours avec les organisations syndicales des enseignants du privé pour réfléchir aux mobilités nouvelles qui pourraient leur être proposées afin de mieux répondre à leurs attentes.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Duranton, pour la réplique.
Mme Nicole Duranton. Monsieur le ministre, je ne manquerai pas de faire part aux professeurs qui m’ont interpellée sur cette question de la concertation qui est en cours et j’espère qu’elle aboutira.
formation des enseignants au maniement des extincteurs
M. le président. La parole est à M. Philippe Grosvalet, auteur de la question n° 996, adressée à Mme la ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse, des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques.
M. Philippe Grosvalet. Monsieur le ministre, comme tous les établissements recevant du public, les écoles doivent respecter des normes relatives à la prévention des incendies. Ainsi, les directeurs d’école doivent être formés à la manipulation des extincteurs.
Pourtant, le 4 septembre dernier, au cours de son inspection de l’école Jean-de-La-Fontaine, située à Saint-Lyphard, en Loire-Atlantique, la commission consultative départementale de sécurité et d’accessibilité a remarqué l’absence d’une telle formation. Ce défaut avait déjà été signalé lors des visites précédentes en 2010, 2015 et 2018.
Tenu informé de l’avis défavorable à la poursuite de l’activité d’accueil du public qui s’est ensuivi, le maire s’est vu dans l’obligation morale de prendre un arrêté provisoire d’exploitation de six mois. Il faut saluer sa sagesse.
La situation de cette école n’est pas isolée. Ainsi, depuis 2011, plusieurs cas dans la Drôme, dans la Sarthe et ailleurs ont été signalés par des parlementaires. Ce constat est d’autant plus alarmant au vu de l’âge des élèves en école maternelle et primaire.
Dans ce contexte, monsieur le ministre, je vous remercie de bien vouloir m’indiquer quelles sont les mesures envisagées pour assurer cette formation indispensable à la sécurité des élèves et du personnel de ces établissements.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Grosvalet, le Gouvernement, plus particulièrement la ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse, des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques, est très attentif à ce que la sécurité du personnel et des élèves soit garantie dans les écoles et les établissements scolaires.
Concernant la prévention du risque incendie, les académies sont chargées de mettre en œuvre l’ensemble des mesures prévues, d’une part, par la réglementation des établissements recevant du public, d’autre part, par le code du travail. Ces mesures comprennent la formation du personnel au risque incendie, à la manipulation des extincteurs, au déclenchement de l’alarme et, bien évidemment, à l’évacuation.
Le ministère rappelle régulièrement aux académies l’importance de la prévention du risque incendie et les actions de prévention à mettre en œuvre. L’importance de ses gestes justifie qu’on les rappelle régulièrement, même s’ils peuvent paraître répétitifs.
Ainsi, dans les orientations stratégiques ministérielles (OSM) en matière de politique de prévention des risques professionnels portant sur l’année 2023, publiées au bulletin officiel de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports n° 18 du 4 mai 2023, les académies sont invitées à porter une attention particulière à l’évaluation et à la prévention des risques bâtimentaires, notamment le risque incendie.
Ces OSM renvoient à un guide sur la sécurité incendie, élaboré et publié à la fin de 2022 par la cellule ministérielle chargée du bâti scolaire, qui présente de manière synthétique les obligations liées à la prévention du risque incendie, notamment en matière de formation à la manipulation des extincteurs.
Le ministère restera attentif à la mise en œuvre des formations incendie dans les académies et au suivi de la levée des prescriptions formulées par les commissions consultatives départementales de sécurité et d’accessibilité.
M. le président. La parole est à M. Philippe Grosvalet, pour la réplique.
M. Philippe Grosvalet. Force est de constater que ces directives ne sont pas suivies et que l’on tend à considérer que le pire n’est jamais certain. J’invite donc la ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse, des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques à s’inspirer de la morale de la fable de Jean de La Fontaine, Le Chat et le vieux rat, qui rappelle que « la méfiance est mère de la sûreté ».
projet de loi sur le modèle français de la fin de vie
M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly, auteur de la question n° 995, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.
M. Stéphane Demilly. Devant les membres de la convention citoyenne sur la fin de vie, le Président de la République s’est engagé à bâtir un projet de loi avant la fin de l’été 2023. Au début du mois de décembre dernier, le Gouvernement a annoncé que ce projet de loi sur le modèle français de la fin de vie serait présenté dans le courant du mois de février 2024, sans pour autant préciser quand débuterait son examen à l’Assemblée nationale.
Madame la ministre, il y a une réelle attente sur ce sujet, vous le savez. La question de la fin de vie mérite d’être débattue au Parlement au nom de nos malades français atteints de maladies graves et souvent incurables.
J’ai été particulièrement sensible au témoignage d’un père de famille de mon département qui souffre de la maladie de Charcot. Cette maladie touche environ 9 000 personnes en France et 1 500 nouveaux cas sont déclarés chaque année, soit près de 5 nouveaux cas par jour. Après l’apparition des premiers symptômes, l’espérance de vie des malades est en moyenne de deux à cinq ans. Aujourd’hui, ceux qui souffrent de cette maladie subissent une double peine : ils sont, d’une part, privés de traitement, d’autre part, dans l’impossibilité de demander à mourir dignement.
Or, comme ce père de famille me l’a lui-même écrit, « contrairement à d’autres maladies dégénératives, avec la maladie de Charcot, vos capacités cognitives ne sont pas touchées, vous permettant ainsi de profiter pleinement de votre propre déchéance ».
Devant des propos aussi poignants, vous comprendrez qu’il est urgent d’agir, madame la ministre. Cela est d’autant plus vrai que le nombre de cas de maladies neurodégénératives – Parkinson, Alzheimer, Charcot – a explosé ces dernières années et les prévisions des spécialistes pour les années à venir font vraiment frémir.
Madame la ministre, quel est le calendrier et quelle est la vision du Gouvernement sur ce sujet ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Prisca Thevenot, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur Demilly, je vous prie d’excuser l’absence de Mme Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités, qui ne peut être présente ce matin et qui m’a chargée de vous répondre.
Sur la question de la fin de vie, depuis plusieurs années, les mentalités et les attentes de notre société évoluent. Vous l’avez souligné dans votre propos. L’allongement de l’espérance de vie, le nombre croissant de maladies – vous en avez cité certaines –, la dépendance et parfois la souffrance des malades soulèvent de nouvelles questions auxquelles il nous faut répondre.
S’il est indispensable d’œuvrer au renforcement de la prise en charge de la souffrance, notamment en soins palliatifs, nous ne pouvons pas ignorer la détresse de ceux qui demandent une aide active à la fin de vie.
Conformément aux engagements qu’il a pris, le Président de la République a souhaité que le Gouvernement lui présente un projet de loi sur l’accompagnement de la fin de vie.
La ministre du travail, de la santé et des solidarités présentera dans les prochaines semaines une stratégie décennale pour accélérer le développement des soins palliatifs et pour améliorer le droit des patients et la protection des personnes. Celle-ci comprendra notamment une réflexion sur l’accompagnement du deuil, sur les directives anticipées et sur l’accompagnement des aidants dans cette période difficile qu’est la fin de vie.
Un autre volet concernera l’introduction dans notre loi d’une aide active à mourir. Il nous faudra légiférer avec précaution et prudence, dans le dialogue et le respect des professionnels de santé et des familles.
Le travail de coconstruction que nous avons engagé sur ce sujet avec le Parlement depuis plus d’un an permettra de trouver un chemin – j’en suis certaine. La ministre du travail, de la santé et des solidarités ainsi que la ministre des relations avec le Parlement détailleront dans les semaines qui viennent le calendrier précis de l’examen parlementaire. Je suis certaine que nous réussirons à trouver ensemble un point d’équilibre pour répondre aux difficultés que rencontrent de nombreuses familles ainsi que les professionnels de santé.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly, pour la réplique.
M. Stéphane Demilly. Madame la ministre, vous l’aurez compris, nous attendons ce projet de loi. Nous sommes impatients de connaître son contenu et de le voir inscrit à l’ordre du jour.
généralisation de l’expérimentation de la réalisation des interruptions volontaires de grossesse instrumentales par les sages-femmes
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, auteure de la question n° 959, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.
Mme Laurence Rossignol. Madame la ministre, le Parlement a voté il y a quelque temps une loi autorisant les sages-femmes à réaliser des interruptions volontaires de grossesse (IVG) instrumentales. Originellement, je souhaitais vous interroger sur la date de publication du décret d’application de cette disposition, mais, celui-ci ayant depuis lors été pris, ma question portera sur le caractère extrêmement restrictif de sa portée.
D’une part, il prévoit un délai pendant lequel les sages-femmes peuvent pratiquer des IVG instrumentales qui diffère du délai légal.
D’autre part, ce décret exige la présence de trois médecins, dont, « sur site ou par convention avec un autre établissement de santé », celle d’un médecin à même de pratiquer des embolisations artérielles.
En réalité, cela signifie que les sages-femmes ne pourront que très rarement pratiquer des IVG instrumentales, tant les conditions exigées sont drastiques – bien plus que celles qui s’appliquent aux médecins.
Ainsi, la présence de ce fameux médecin capable de pratiquer des embolisations artérielles n’est jamais exigée auprès d’un médecin pratiquant une IVG instrumentale, pas plus que lors d’un accouchement, alors même que les risques hémorragiques sont plus importants.
Aussi, madame la ministre, je vous demande de revoir la rédaction de ce décret de façon que la volonté du Parlement soit respectée pleinement et non pas de manière partielle.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Prisca Thevenot, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser ma collègue ministre du travail, de la santé et des solidarités, qui, ne pouvant être présente ce matin, m’a chargée de vous répondre en son nom.
Le Gouvernement est engagé dans l’amélioration et la protection de l’accès à l’interruption volontaire de grossesse. Il partage pleinement l’objectif de diversifier les professionnels susceptibles de réaliser des IVG par voie instrumentale, afin d’assurer l’accès des femmes aux différentes techniques d’IVG, médicamenteuses comme instrumentales.
La rédaction du décret du 16 décembre 2023 relatif à la pratique des interruptions volontaires de grossesse instrumentales par des sages-femmes en établissement de santé, pris par le ministre de la santé de la prévention, et faisant suite à une expérimentation porteuse de nombreux enseignements, a donné lieu à une large concertation avec les principaux acteurs impliqués, évoquant notamment la question du terme possible de réalisation des IVG dans le cadre de cette pratique.
Le décret dispose finalement que les sages-femmes pourront pratiquer ces IVG jusqu’au terme de seize semaines d’aménorrhée, soit jusqu’à la fin de la quatorzième semaine de grossesse, limite fixée par la loi pour la réalisation d’une IVG.
Par ailleurs, l’enjeu de sécurité et de qualité qui s’attache à ces actes – point qui mobilise toute l’attention du Gouvernement, et ce quel que soit le professionnel qui les réalise – a conduit à fixer des conditions d’expérience et de formation des sages-femmes pour autoriser celles-ci à les pratiquer. Ces conditions préexistaient dans le cadre expérimental et elles ont montré toute leur utilité.
Cette extension des compétences des sages-femmes est une avancée importante pour l’accès à l’IVG de toutes les femmes, en particulier dans des territoires où les contraintes liées à la démographie des professionnels de santé fragilisent celui-ci. Le Gouvernement sera particulièrement attentif à sa mise en place concrète dans le plus grand nombre possible d’établissements de santé sur le territoire.
C’est également une mesure importante en faveur de la diversification des compétences des sages-femmes et de l’attractivité de leur métier dans le cadre hospitalier.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour la réplique.
Mme Laurence Rossignol. Madame la ministre, vous répondez, certes, à ma question, mais en partie seulement.
Je ferai plusieurs remarques.
Vous dites qu’une concertation a eu lieu avec les principaux acteurs impliqués. En tout cas, probablement pas avec les sages-femmes, ou du moins celle-ci n’a pas abouti positivement. J’imagine qu’ont été particulièrement écoutés – et entendus – les médecins qui s’opposaient à ce transfert d’activité aux sages-femmes. Celles-ci sont très mécontentes de ce décret, car elles s’estiment parfaitement à même de réaliser les IVG instrumentales.
De même, chacun convient sans aucun problème que des conditions d’expérience et de formation sont nécessaires pour réaliser de tels actes, comme c’était le cas pendant la phase expérimentale. Reste que vous ne répondez pas à ma question sur le point suivant : pourquoi exiger la présence, aux côtés des sages-femmes, de médecins spécialistes, alors que celle-ci n’est pas requise quand l’acte est effectué par un médecin ?
En réalité, le Gouvernement a beau dire qu’il veut faciliter l’accès à l’IVG, ce décret va à l’encontre de la volonté exprimée par le Parlement.
meilleure prévention de l’arrêt cardiaque extra-hospitalier en france
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, auteur de la question n° 992, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.
M. Bernard Jomier. Madame la ministre, l’été prochain, à l’occasion des jeux Olympiques et Paralympiques, des millions de personnes viendront célébrer les exploits des plus grands sportifs.
Les stades et les fan zones, particulièrement bondés et exposés à la chaleur estivale, pourront devenir des lieux propices aux situations stressantes et, par conséquent, accroître le risque d’arrêt cardiaque.
En France, plus de 40 000 personnes font face à cette situation chaque année, avec un taux de survie de seulement 6 %. Le manque de formation aux gestes qui sauvent persiste et la majorité des victimes succombent dans les dix minutes qui précèdent l’arrivée des secours.
Par comparaison, la Suède affiche un taux de survie de 40 %, principalement grâce à une population largement formée aux premiers secours, à un accès aisé aux défibrillateurs et à un entretien méticuleux de ces matériels.
Malgré des progrès ces dernières années, notre pays accuse un retard significatif dans ce domaine : les défibrillateurs automatisés externes (DAE) sont mal entretenus et insuffisamment déclarés aux associations de citoyens sauveteurs.
De plus, la fermeture d’établissements équipés de DAE rend ces équipements médicaux parfois inaccessibles, alors que le nombre de citoyens capables d’administrer les premiers secours demeure faible.
Madame la ministre, à l’approche des Jeux, je vous interpelle sur les mesures concrètes que le Gouvernement envisage de prendre pour assurer la protection des spectateurs et des visiteurs contre le risque d’arrêt cardiaque.
Plus généralement, comment comptez-vous renforcer la formation des citoyens aux gestes qui sauvent et améliorer l’accès aux DAE ?
Quel est le plan du Gouvernement pour que la France rattrape son retard dans la prévention et la prise en charge des arrêts cardiaques ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Prisca Thevenot, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, je porte à votre connaissance la réponse que m’a demandé de vous transmettre ma collègue chargée de ce dossier.
Le Président de la République a fixé comme objectif en 2017 de « former 80 % de la population aux gestes des premiers secours ».
La loi du 28 juin 2018 relative au défibrillateur cardiaque a imposé l’obligation d’équipement en DAE des établissements recevant du public (ERP), le renforcement de la signalétique relative à ces équipements, leur maintenance et, enfin, la création d’une base de données nationale Géo’DAE pour les recenser et, surtout, les géolocaliser.
L’enjeu est d’améliorer les chances de survie en permettant à une personne témoin d’un arrêt cardiaque de disposer très rapidement d’un DAE en complément de la réalisation des gestes de premiers secours.
La déclaration des informations relatives à ces dispositifs médicaux par leurs propriétaires ou par les professionnels assurant la maintenance des DAE sur le portail Géo’DAE intervient dans le respect du standard défini par l’arrêté du 29 octobre 2019 relatif aux défibrillateurs automatisés externes et à leurs modalités de signalisation dans les lieux publics et les établissements recevant du public.
Elle a pour objectif de faciliter leur géolocalisation par les services de secours et d’aide médicale urgente, ainsi que par des applications citoyennes diffusant les données relatives aux DAE.
Depuis la création de la base de données nationale au mois de mars 2020, on observe une augmentation croissante du nombre de déclarations. En effet, près de 112 000 DAE ont ainsi été déclarés. Ces données, disponibles en open data, sont, conformément à la loi, validées par les propriétaires de DAE eux-mêmes et constamment mises à jour.
Elles permettent aux services de secours et d’aide médicale urgente d’optimiser la prise en charge en facilitant l’utilisation des DAE par les témoins.
Elles permettent aussi à certaines applications disponibles sur les différentes plateformes de mobiliser des citoyens sauveteurs en cas d’arrêt cardiaque tout en géolocalisant les DAE et, ainsi, de sauver des vies.
Des actions de sensibilisation et de communication sont régulièrement assurées pour améliorer la déclaration des données relatives aux DAE installés et, ainsi, contribuer au déploiement de la base nationale Géo’DAE.
Des QR codes DAE ont été placés dans des endroits stratégiques des territoires pour maximiser la visibilité et l’accessibilité de ces instruments pour le grand public afin de les intégrer au mieux dans la chaîne de prise en charge de l’arrêt cardiaque.
décret relatif à l’installation d’officines de pharmacie dans les communes de moins de 2 500 habitants