Sommaire

Présidence de M. Dominique Théophile

Secrétaires :

Mmes Catherine Di Folco, Patricia Schillinger.

1. Procès-verbal

2. Simplification de la vie économique. – Demande de priorité

Demande de priorité de plusieurs articles du projet de loi de simplification de la vie économique et amendements portant articles additionnels. – Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des entreprises, du tourisme et de la consommation ; Mme Catherine Di Folco, rapporteur de la commission spéciale. – La priorité est ordonnée.

3. Financement des entreprises et attractivité de la France. – Adoption des conclusions modifiées d’une commission mixte paritaire sur une proposition de loi

M. Jean-François Husson, en remplacement de M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des entreprises, du tourisme et de la consommation

Texte élaboré par la commission mixte paritaire

Article 2

M. Louis Vogel

Amendement n° 1 du Gouvernement. – Adoption.

Article 13

Amendement n° 2 du Gouvernement. – Adoption.

Vote sur l’ensemble

M. Thomas Dossus

M. Pascal Savoldelli

M. Michel Masset

M. Bernard Buis

Mme Florence Blatrix Contat

Mme Marie-Claire Carrère-Gée

Mme Vanina Paoli-Gagin

M. Michel Canévet

Adoption de la proposition de loi dans le texte de la commission mixte paritaire, modifié.

Suspension et reprise de la séance

4. Ingérences étrangères en France. – Adoption des conclusions modifiées d’une commission mixte paritaire sur une proposition de loi

Mme Agnès Canayer, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire

Mme Prisca Thevenot, ministre déléguée chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement

Suspension et reprise de la séance

Texte élaboré par la commission mixte paritaire

article 1er

Amendement n° 1 rectifié du Gouvernement. – Adoption.

article 1er bis A

Amendement n° 2 du Gouvernement. – Adoption.

article 4

Amendement n° 4 du Gouvernement. – Adoption.

article 5 (pour coordination)

Amendement n° 3 du Gouvernement. – Adoption.

Vote sur l’ensemble

M. Pascal Savoldelli

M. Raphaël Daubet

M. Jean-Baptiste Lemoyne

M. Rachid Temal

M. François-Noël Buffet

Mme Vanina Paoli-Gagin

Mme Nathalie Goulet

M. Jacques Fernique

Adoption de la proposition de loi dans le texte de la commission mixte paritaire, modifié.

Suspension et reprise de la séance

5. Ordonnance de protection. – Adoption des conclusions d’une commission mixte paritaire sur une proposition de loi

Mme Dominique Vérien, rapporteure pour le Sénat de la commission mixte paritaire

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Texte élaboré par la commission mixte paritaire

Vote sur l’ensemble

Mme Nathalie Delattre

M. Thani Mohamed Soilihi

Mme Laurence Harribey

Mme Elsa Schalck

Mme Laure Darcos

Mme Olivia Richard

Mme Raymonde Poncet Monge

Mme Marie-Claude Varaillas

Adoption de la proposition de loi dans le texte de la commission mixte paritaire.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Pierre Ouzoulias

6. Simplification de la vie économique. – Discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Discussion générale

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des entreprises, du tourisme et de la consommation

Mme Catherine Di Folco, rapporteur de la commission spéciale

M. Yves Bleunven, rapporteur de la commission spéciale

Mme Nadège Havet

M. Michaël Weber

M. Rémy Pointereau

M. Jean-Luc Brault

M. Michel Canévet

M. Thomas Dossus

M. Pierre Barros

M. Michel Masset

Mme Audrey Linkenheld

Mme Patricia Demas

Mme Anne-Sophie Romagny

M. Hervé Reynaud

Clôture de la discussion générale.

Article 4 (priorité)

Amendement n° 275 rectifié de M. Pierre-Antoine Levi. – Retrait.

Amendements identiques nos 274 rectifié de M. Pierre-Antoine Levi et 306 de M. Pierre Barros. – Retrait de l’amendement n° 274 rectifié ; rejet de l’amendement n° 306.

Amendement n° 8 rectifié undecies de M. Jean-Baptiste Blanc. – Retrait.

Amendement n° 5 rectifié de M. Roger Karoutchi. – Adoption.

Amendement n° 283 de M. Joshua Hochart. – Non soutenu.

Amendement n° 9 rectifié bis de M. Roger Karoutchi. – Adoption.

Amendement n° 276 rectifié ter de Mme Nadine Bellurot. – Rejet.

Amendement n° 284 de M. Joshua Hochart. – Non soutenu.

Amendement n° 205 rectifié de Mme Vanina Paoli-Gagin. – Retrait.

Adoption de l’article modifié.

Après l’article 4 (priorité)

Amendement n° 285 de M. Joshua Hochart. – Non soutenu.

Amendement n° 230 de Mme Nadège Havet. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 12 rectifié bis de Mme Vanina Paoli-Gagin. – Rejet.

Amendement n° 253 rectifié de Mme Nadège Havet. – Rejet.

Amendement n° 254 rectifié de Mme Nadège Havet. – Retrait.

Amendements identiques nos 48 rectifié de Mme Nathalie Delattre, 353 rectifié de Mme Antoinette Guhl, 393 rectifié de M. Michel Canévet et 550 de M. Michaël Weber. – Adoption des quatre amendements insérant un article additionnel.

Amendement n° 309 de M. Pierre Barros. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendements identiques nos 368 rectifié bis de M. Jean-Baptiste Blanc, 427 rectifié bis de M. Michel Canévet, 464 rectifié de Mme Nadège Havet et 593 rectifié de Mme Nathalie Delattre. – Adoption des quatre amendements insérant un article additionnel.

Amendement n° 233 de Mme Nadège Havet. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 232 de Mme Nadège Havet. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendements identiques nos 366 rectifié bis de M. Jean-Baptiste Blanc, 423 rectifié bis de M. Michel Canévet et 465 rectifié de Mme Nadège Havet. – Adoption des trois amendements insérant un article additionnel.

Amendement n° 231 de Mme Nadège Havet. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 234 de Mme Nadège Havet. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 47 rectifié bis de Mme Nathalie Delattre. – Rejet.

Amendements identiques nos 57 rectifié de M. Gilbert Favreau et 178 rectifié de M. Laurent Burgoa. – Retrait des deux amendements.

Amendement n° 553 de M. Michaël Weber. – Rejet.

Amendement n° 298 de M. Pierre Barros. – Rejet.

Renvoi de la suite de la discussion.

7. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de M. Dominique Théophile

vice-président

Secrétaires :

Mme Catherine Di Folco,

Mme Patricia Schillinger.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix-sept heures.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

 
Dossier législatif : projet de loi de simplification de la vie économique
Demande de priorité (début)

Simplification de la vie économique

Demande de priorité

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de simplification de la vie économique
Demande de priorité (interruption de la discussion)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des entreprises, du tourisme et de la consommation. Dans le cadre de l’examen en séance publique du projet de loi de simplification de la vie économique ce soir à vingt et une heures trente, le Gouvernement souhaiterait, conformément à l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat que les articles 4 à 14, suivis des articles 24 A à 29, ainsi que les amendements portant articles additionnels qui s’y rapportent soient examinés en priorité avant l’article 1er, et que les articles 17, puis 22 et 23, ainsi que les amendements portant articles additionnels qui s’y rapportent, soient examinés avant l’article 16.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur cette demande de priorité ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur de la commission spéciale. La commission spéciale a émis un avis favorable sur cette demande du Gouvernement.

M. le président. La priorité est ordonnée.

Demande de priorité (début)
Dossier législatif : projet de loi de simplification de la vie économique
Discussion générale (début)

3

 
Dossier législatif : proposition de loi visant à accroître le financement des entreprises et l'attractivité de la France
Examen des conclusions d'une commission mixte paritaire

Financement des entreprises et attractivité de la France

Adoption des conclusions modifiées d’une commission mixte paritaire sur une proposition de loi

Discussion générale
Dossier législatif : proposition de loi visant à accroître le financement des entreprises et l'attractivité de la France
Article 1er

M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France (texte de la commission n° 632 rectifié, rapport n° 631).

La parole est à M. Jean-François Husson, en remplacement de M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire.

M. Jean-François Husson, en remplacement de M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi, en remplacement du rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire Albéric de Montgolfier, de souligner l’efficacité du travail parlementaire – ce n’est pas tous les matins qu’on peut le faire. (Sourires.)

Quelques semaines à peine après l’inscription à l’ordre du jour de notre assemblée de la proposition de loi visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France, nous nous retrouvons déjà pour la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire.

Si certaines dispositions touchant au fonctionnement des marchés, aux règles applicables aux acteurs financiers ou encore au droit des sociétés peuvent apparaître très techniques, elles pourraient avoir un effet concret sur la compétitivité de la place de Paris et, dans une moindre mesure, sur le financement des entreprises.

Nous faisons désormais face à une concurrence accrue, qui vient non plus seulement de la place de Londres, mais aussi des places d’Amsterdam ou de New York.

Ce n’est pas si souvent que nous avons l’occasion d’examiner un texte dédié à ces matières. Regrettons toutefois que la proposition de loi déposée par notre collègue député Alexandre Holroyd n’ait pas inclus un volet dédié à la régulation.

Mme la ministre en conviendra : une place bien régulée est un facteur d’attractivité pour les acteurs financiers. Le Sénat travaille d’ailleurs sur ce sujet depuis de nombreuses années, mais il faut croire que le Gouvernement le considère comme d’un moindre intérêt, ce qui me paraît regrettable.

Néanmoins, lors de l’examen de la proposition de loi, le Sénat s’est une nouvelle fois inscrit dans une démarche constructive. Poursuivant le travail mené en commission des finances et en commission des lois, nous avons été guidés par une double exigence : d’une part, préserver l’équilibre entre l’attractivité financière de la place de Paris et la protection des acteurs qui y opèrent et, d’autre part, orienter encore davantage le contenu de la proposition de loi vers le financement des petites et des moyennes entreprises (PME) et des entreprises de taille intermédiaire (ETI).

Cela s’est traduit par l’adoption de plusieurs dispositifs conservés dans le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire. Je pense par exemple à l’assouplissement des critères d’éligibilité des entreprises cotées ou au plan d’épargne en actions (PEA) destiné au financement des PME et des ETI, le PEA-PME.

Je souhaite également souligner les améliorations que le Sénat a apportées au texte grâce aux travaux de la commission des lois et de son rapporteur, M. Louis Vogel.

Ainsi, le Sénat a pleinement soutenu la création d’actions à droits de vote multiples dans le cadre des introductions en bourse, tout en renforçant les garanties prévues pour les actionnaires et les acteurs de marché. La Haute Assemblée a également renforcé les dispositifs permettant de faciliter le fonctionnement dématérialisé des organes sociaux, dans des conditions sécurisées pour les entreprises.

J’en viens aux principales modifications opérées lors de la réunion de la commission mixte paritaire.

Comme Albéric de Montgolfier, je tiens à cet égard à remercier l’auteur et rapporteur de la proposition de loi, Alexandre Holroyd, pour la qualité des discussions et des échanges que nous avons eus tout au long de l’examen du texte. Les apports du Sénat sont conservés, qu’il s’agisse des dispositifs destinés à favoriser le financement des entreprises ou des dispositions en faveur des actionnaires minoritaires.

Plusieurs propositions issues des travaux du Sénat ont été modifiées pour que leur portée soit renforcée. Concernant par exemple le champ de l’habilitation demandée par le Gouvernement pour légiférer par ordonnance dans le but de réviser le régime juridique applicable aux organismes de placement collectif, le texte issu de la commission mixte paritaire conserve les précisions apportées par le Sénat.

Madame la ministre, le Gouvernement devrait en convenir : le champ initialement prévu était bien trop large. L’accord auquel la commission mixte paritaire est parvenue prouve qu’une restriction est possible, à condition que le Gouvernement travaille davantage sur le dispositif et abandonne le principe selon lequel le Parlement devrait tout accepter.

Les travaux en commission mixte paritaire ont également permis de renforcer la sécurité juridique du mécanisme de plafonnement des indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse des traders, introduit par le Sénat. Je rappelle simplement qu’il s’agit là d’un apport essentiel pour l’attractivité de la place de Paris, que le Sénat a recommandé dès 2017.

Mes chers collègues, je vous invite ainsi à voter les conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et RDPI. – M. Louis Vogel applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des entreprises, du tourisme et de la consommation. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, pour développer une entreprise, l’énergie des entrepreneurs et de leurs salariés – et ils n’en manquent pas – ne suffit pas toujours. Vous le savez, il faut aussi un financement abondant et accessible, des procédures adaptées, un cadre simple, en somme un environnement attractif.

Créer un environnement attractif, nous y travaillons depuis des années. Nous poursuivrons dans cette direction dès ce soir en examinant le plan d’action de simplification qui fait l’objet d’un projet de loi global que j’aurai le plaisir de vous présenter.

La proposition de loi déposée par le député Holroyd contribue clairement à rendre plus attractif cet environnement, puisqu’elle simplifie et facilite les conditions de financement de nos entreprises.

Le travail de la commission des finances du Sénat a été précieux pour consolider ce texte. Je veux ici saluer les efforts et l’engagement du rapporteur Albéric de Montgolfier, ainsi que celui de M. Husson.

L’accord trouvé par la commission mixte paritaire démontre clairement que, lorsque l’essentiel est en jeu, à savoir la compétitivité de nos entreprises et le rayonnement de notre pays, les parlementaires savent travailler ensemble de manière constructive et rapide, pour reprendre les mots de M. Husson.

Sans prétendre être exhaustive, je souhaite souligner quelques-uns des principaux apports de la proposition de loi.

D’abord, c’est l’objet premier du texte, le financement des entreprises sera facilité. Le PEA-PME permettra de financer plus facilement davantage d’entreprises. La valorisation maximale des entreprises éligibles sera portée à 2 milliards d’euros, ce qui permettra d’en élargir le périmètre et de soutenir la croissance des entreprises de taille intermédiaire comme de nos licornes. Les critères d’éligibilité du PEA-PME seront simplifiés, ce qui facilitera l’utilisation de l’enveloppe fiscale de ce plan d’épargne pour financer les PME.

Par ailleurs, l’univers d’investissement de l’épargne salariale sera élargi via les fonds communs de placement d’entreprise (FCPE). Les FCPE pourront dorénavant financer des PME cotées sur le marché de croissance de la bourse de Paris.

En outre, le Gouvernement pourra introduire dans le droit français le régime des actions fractionnées. L’objectif est de permettre au plus grand nombre de mieux bénéficier d’opportunités d’investissement en bourse, en donnant la possibilité de placer régulièrement de petits montants, en fonction de ses moyens.

Ensuite, l’examen de la proposition de loi a permis d’enrichir les dispositions relatives à la modernisation de la gouvernance des entreprises. Les droits des actionnaires seront ainsi renforcés par l’introduction d’une procédure d’examen accélérée au tribunal de commerce en cas de désaccord entre les actionnaires et le conseil d’administration quant à l’inscription d’une résolution à l’ordre du jour. Cette disposition doit permettre de trancher les désaccords éventuels en la matière, en amont de la tenue de l’assemblée générale.

Enfin, à l’Assemblée nationale comme au Sénat, les rapporteurs du texte ont souhaité faciliter la relocalisation en France de certains emplois financiers. L’application du barème plafonnant les indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse, introduit par les ordonnances du 22 septembre 2017, sera ainsi modulé pour les traders par un plafonnement de la rémunération prise en compte.

Vous l’avez compris, cette proposition de loi représente un gain de compétitivité et de simplicité pour permettre à nos entrepreneurs de mieux financer leurs entreprises. En rendant possibles les introductions en bourse au moyen d’actions à droits de votes multiples, elle permet aux entrepreneurs de choisir la France tout en situant dans le même temps le siège social de leur entreprise à Paris. Il s’agit d’une avancée importante : la France aura en cela le régime d’introduction en bourse le plus compétitif d’Europe.

Pour toutes ces raisons, je me réjouis qu’un compromis ait été rapidement trouvé sur ce texte. Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de ce travail.

J’ai eu le plaisir de défendre ce texte lors de son examen en première lecture à l’Assemblée nationale. Quand certains, à l’extrême droite, auraient misé sur le financement familial, en supposant que chaque entrepreneur bénéficie d’un oncle fortuné, et que d’autres, à l’extrême gauche, se seraient contentés de croire que les banques suffisent comme unique levier financier – mes propos sont vérifiables en consultant le compte rendu de la discussion générale lors de l’examen de ce texte à l’Assemblée nationale –, je tiens à vous remercier du fond du cœur d’avoir trouvé un point d’équilibre pour plus d’efficacité au service du financement des entreprises. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP et UC.)

M. Jean-François Husson, au nom de la commission mixte paritaire. Très bien !

M. le président. Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, aucun amendement n’est recevable, sauf accord du Gouvernement ; en outre, le Sénat étant appelé à se prononcer avant l’Assemblée nationale, il statue d’abord sur les éventuels amendements, puis, par un seul vote, sur l’ensemble du texte.

Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

proposition de loi visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la france

TITRE Ier

RENFORCER LES CAPACITÉS DE FINANCEMENT DES ENTREPRISES DEPUIS LA FRANCE

Examen des conclusions d'une commission mixte paritaire
Dossier législatif : proposition de loi visant à accroître le financement des entreprises et l'attractivité de la France
Article 1er bis

Article 1er

Le code de commerce est ainsi modifié :

1° À la première phrase du I de l’article L. 225-122, après la référence : « L. 22-10-46, », est insérée la référence : « L. 22-10-46-1, » ;

1° bis À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 228-36, les mots : « ou de la société à responsabilité limitée » sont remplacés par les mots : « , de société à responsabilité limitée ou de société par actions simplifiée » ;

2° L’article L. 22-10-46 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le premier alinéa n’est pas applicable aux actions de préférence émises dans les conditions prévues à l’article L. 22-10-46-1 pendant la durée prévue au II du même article L. 22-10-46-1. » ;

3° À la première phrase du second alinéa de l’article L. 228-10, après les deux occurrences du mot : « réglementé », sont insérés les mots : « ou sur un système multilatéral de négociation » ;

4° La seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 228-11 est complétée par les mots : « ou dans les conditions fixées à l’article L. 22-10-46-1 » ;

5° Après l’article L. 22-10-46, il est inséré un article L. 22-10-46-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 22-10-46-1. – I. – Sans préjudice de l’article L. 225-122, dans le cadre de la première admission aux négociations des actions de la société sur un marché réglementé ou sur un système multilatéral de négociation, il peut être créé des actions de préférence dont le droit de vote est aménagé.

« Ces actions de préférence ne peuvent être créées qu’au bénéfice d’une ou de plusieurs personnes nommément désignées. Elles ne peuvent se voir conférer de droits de vote double en application des articles L. 225-123 et L. 22-10-46.

« Pour les sociétés dont les titres sont admis à la négociation sur un système multilatéral de négociation, le ratio entre les droits de vote attachés à une action de préférence et ceux attachés à une action ordinaire ne peut excéder vingt-cinq pour un et doit être un nombre entier.

« II. – Les actions de préférence sont créées pour une durée déterminée ou déterminable qui ne peut excéder dix ans. Cette durée peut être renouvelée par l’assemblée générale extraordinaire des actionnaires statuant au vu d’un rapport spécial des commissaires aux comptes de la société, dans des conditions définies par décret en Conseil d’État. À peine de nullité de la délibération, les titulaires des actions de préférence ne peuvent prendre part, directement ou indirectement, au vote sur le renouvellement de cette durée et les actions de préférence qu’ils détiennent ne sont pas prises en compte pour le calcul du quorum ni de la majorité, à moins que l’ensemble des actionnaires soient titulaires d’actions de préférence. Un tel renouvellement ne peut intervenir qu’une fois et pour une durée ne pouvant excéder cinq ans.

« III. – Chaque action de préférence mentionnée au I du présent article est convertie en action ordinaire :

« 1° Au terme de la durée mentionnée au II ou en cas d’ouverture de l’une des procédures judiciaires régies par les titres III et IV du livre VI du présent code ;

« 2° En cas de transfert en propriété, de transfert par voie de succession, de liquidation de communauté de biens entre époux ou de donation entre vifs ainsi que de changement de contrôle ou de dissolution de l’actionnaire personne morale.

« Les actions ordinaires ainsi substituées aux actions de préférence confèrent un droit de vote double identique à celui conféré aux autres actions dès lors qu’elles respectent les conditions prévues aux articles L. 225-123 et L. 22-10-46. Pour l’application des mêmes articles L. 225-123 et L. 22-10-46, il est tenu compte de la durée de l’inscription au nom du titulaire des actions de préférence converties en actions ordinaires.

« IV. – Une action de préférence ne donne droit qu’à une voix lorsque l’assemblée générale des actionnaires statue sur :

« a) Les résolutions relatives à la désignation des commissaires aux comptes ;

« b) Les résolutions relatives à l’approbation des comptes annuels ;

« c) Les résolutions relatives à la modification des statuts de la société, hors cas d’augmentation de capital.

« d) (nouveau) Les résolutions soumises en application des deuxième et troisième alinéas de l’article L. 225-40 ;

« e) (nouveau) Les résolutions relatives à la politique de rémunération des mandataires sociaux mentionnées au II de l’article L. 22-10-8 ainsi que les résolutions mentionnées aux I et II de l’article L. 22-10-34.

« Par dérogation, les statuts de la société peuvent prévoir que, en cas d’offre publique, une action de préférence ne donne droit qu’à une voix :

« 1° Lors de l’assemblée générale des actionnaires qui arrête toute mesure prévue par les statuts de la société dont la mise en œuvre est susceptible de faire échouer l’offre publique ;

« 2° Lors de la première assemblée générale des actionnaires suivant la clôture de l’offre publique lorsque, à l’issue de celle-ci, son auteur détient au moins les trois quarts du capital social assorti de droits de vote.

« Lorsqu’il est fait application des 1° et 2° du présent IV, les statuts de la société prévoient une indemnisation équitable des pertes enregistrées par les titulaires d’actions de préférence, dans des conditions et selon des modalités déterminées par décret en Conseil d’État.

« V. – Par dérogation au deuxième alinéa du I du présent article, pour les situations prévues au IV, les actions de préférence confèrent un droit de vote double à celui conféré aux autres actions dès lors qu’elles respectent les conditions prévues aux articles L. 225-123 et L. 22-10-46.

« VI. – Les informations relatives au nombre et à la durée des actions de préférence émises dans les conditions prévues au présent article, à l’identité des bénéficiaires desdites actions, ainsi qu’aux droits de vote qui leur sont attachés en fonction des résolutions d’assemblée générale, sont publiées selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État. »

Article 1er
Dossier législatif : proposition de loi visant à accroître le financement des entreprises et l'attractivité de la France
Article 2

Article 1er bis

Le dernier alinéa de l’article 19 nonies de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération est ainsi rédigé :

« L’article 15 et les deux derniers alinéas de l’article 16 ne sont pas applicables. »

Article 1er bis
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Article 2 bis

Article 2

I. – Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° L’article L. 214-28 est ainsi modifié :

a) À la fin de la première phrase du 1° du III, le montant : « 150 millions d’euros » est remplacé par le montant : « 500 millions d’euros » ;

b) À la première phrase du VII, le mot : « dix » est remplacé par le mot : « quinze » ;

c) Après le même VII, il est inséré un VII bis ainsi rédigé :

« VII bis. – Le règlement d’un fonds commun de placement à risques prévoit que ce dernier entre en période de préliquidation dans des conditions fixées par décret. La société de gestion du fonds commun de placement à risques prend les mesures nécessaires pour préparer la cession à venir des actifs du fonds en prenant en compte la nature des titres détenus tout en respectant leur maturité. »

2° (nouveau) L’article L. 214-164 est ainsi modifié :

a) Le V est ainsi modifié :

– la seconde phrase du troisième alinéa est complétée par les mots : «, pour une part comprise entre 5 % et 15 %, de titres émis » ;

– les a et b sont remplacés par des 1° à 3° ainsi rédigés :

« 1° Soit par des entreprises solidaires d’utilité sociale au sens de l’article L. 3332-17-1 du code du travail ;

« 2° Soit par des sociétés de capital-risque mentionnées au I de l’article 1er de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 portant diverses dispositions d’ordre économique et financier qui sont assimilées aux entreprises solidaires d’utilité sociale au sens de l’article L. 3332-17-1 du code du travail ;

« 3° Soit par des fonds communs de placement à risques mentionnés à l’article L. 214-28 du présent code ou par des fonds professionnels spécialisés mentionnés à l’article L. 214-154, qui sont assimilés aux entreprises solidaires d’utilité sociale au sens de l’article L. 3332-17-1 du code du travail. » ;

– au dernier alinéa, les mots : « mentionné au b ci-dessus » sont supprimés ;

b) Le 1° du VII est ainsi modifié :

– à la première phrase, les mots : « du a » sont remplacés par les mots : « des 1° à 3° » ;

– la seconde phrase est supprimée.

II. – L’article L. 131-1-2 du code des assurances est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, le taux : « 10 % » est remplacé par le taux : « 15 % » ;

2° Au 1°, les mots : « agréées en application » sont remplacés par les mots : « au sens » ;

3° Au 2°, les mots : « , sous réserve que leur actif soit composé d’au moins 40 % de titres émis par des entreprises solidaires d’utilité sociale mentionnées à » sont remplacés par les mots : « qui sont assimilées aux entreprises solidaires d’utilité sociale au sens de » ;

4° Le 3° est ainsi modifié :

a) Après le mot : « financier », sont insérés les mots : « ou par des fonds professionnels spécialisés mentionnés à l’article L. 214-154 du même code » ;

b) Les mots : « , sous réserve que l’actif de ces fonds soit composé d’au moins 40 % de titres émis par des entreprises solidaires d’utilité sociale mentionnées à » sont remplacés par les mots : « qui sont assimilés aux entreprises solidaires d’utilité sociale au sens de ».

III. – Au sixième alinéa du 1 du II de l’article 237 bis A du code général des impôts, les mots : « quinzième à dix-huitième » sont remplacés par les mots : « quatorzième à dix-neuvième ».

IV. – Le code du travail est ainsi modifié :

1° L’article L. 3332-17-1 est ainsi modifié :

a) Le III est ainsi rédigé :

« III. – Sont assimilés aux entreprises solidaires d’utilité sociale agréées en application du présent article les placements collectifs dont l’actif est composé pour au moins 50 % de titres émis par des entreprises solidaires d’utilité sociale définies au présent article ou par des entreprises qui leur sont assimilées sur le fondement du droit européen. » ;

b) Au IV, après le mot : « sociale », sont insérés les mots : « ou déclarées assimilées à celles-ci » ;

2° (nouveau) À la première phrase du second alinéa de l’article L. 3334-12, les mots : « et sans préjudice des dispositions du seizième alinéa de cet article » sont supprimés.

V. – A (nouveau). – Les b et c du 1° du I du présent article s’appliquent aux fonds communs de placement à risques agréés à compter de la promulgation de la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France.

B. – Le 2° du I et les II à IV du présent article entrent en vigueur le 1er janvier 2025.

Article 2
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Article 2 ter

Article 2 bis

Le 1° du I de l’article L. 221-31 du code monétaire et financier est complété par un c ainsi rédigé :

« c) Droits ou bons de souscription ou d’attribution attachés aux titres mentionnés aux a et b du présent 1° ; ».

Article 2 bis
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Article 2 quater A

Article 2 ter

Le b du 2 de l’article L. 221-32-2 du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Après le mot : « de négociation », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « dont la capitalisation boursière est inférieure à deux milliards d’euros ou l’a été à la clôture d’un au moins des quatre exercices calendaires précédant l’exercice pris en compte pour apprécier l’éligibilité des titres de la société émettrice. » ;

2° (nouveau) Les deux derniers alinéas sont supprimés.

Article 2 ter
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Article 2 quater

Article 2 quater A

I. – À la dernière phrase du deuxième alinéa de l’article L. 132-5-4 du code des assurances, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte, après les mots : « code monétaire et financier », sont insérés les mots : « ou de titres de sociétés commerciales qui remplissent les conditions prévues à l’article 1er-1 de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 portant diverses dispositions d’ordre économique et financier ».

II. – Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Le d du 3 de l’article L. 221-32-2 est complété par les mots : « ou de titres de sociétés commerciales qui remplissent les conditions prévues à l’article 1er-1 de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 portant diverses dispositions d’ordre économique et financier » ;

2° À la dernière phrase du sixième alinéa de l’article L. 224-3, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte, après le mot : « code », sont insérés les mots : « ou de titres de sociétés commerciales qui remplissent les conditions prévues à l’article 1er-1 de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 portant diverses dispositions d’ordre économique et financier ».

Article 2 quater A
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Article 2 quinquies

Article 2 quater

L’article L. 3332-17 du code du travail, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2023-1107 du 29 novembre 2023 portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise, est ainsi modifié :

1° À la première phrase du quatrième alinéa, après le mot : « réglementé », sont insérés les mots : « ou sur un marché de croissance des petites et moyennes entreprises » ;

2° Après le 1°, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :

« 1° bis Lorsque les titres de l’entreprise sont admis aux négociations sur un marché de croissance des petites et moyennes entreprises, dans des conditions déterminées par décret ; ».

Article 2 quater
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Article 3

Article 2 quinquies

I. – L’article 2 de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire est complété par un 5° ainsi rédigé :

« 5° Elles ont pour objectif de concourir à la préservation et à la mise en valeur des monuments et des sites, parcs et jardins protégés. »

II. – Le 1° de l’article 199 terdecies-0 AA du code général des impôts est ainsi rédigé :

« 1° Les exclusions prévues au 3° du C du I de l’article 199 terdecies-0 A relatives à l’exercice d’une activité financière, de construction d’immeubles ou immobilière ne sont pas applicables aux entreprises solidaires. Toutefois, les exclusions relatives à l’exercice d’une activité immobilière ou de construction d’immeubles sont applicables aux entreprises solidaires, à l’exception :

« a) Des entreprises solidaires qui n’exercent pas une activité de gestion immobilière à vocation sociale ;

« b) Des entreprises solidaires agréées par le ministre chargé de la culture et ayant pour mission de contribuer à la préservation et à la mise en valeur des monuments historiques et des sites, parcs et jardins protégés ; ».

II bis (nouveau). – Au b du 1° du I de l’article L. 3332-17-1 du code du travail, les mots : « ou 4° » sont remplacés par les mots : « , 4° ou 5° ».

III. – La perte de recettes résultant, pour l’État, de l’élargissement de la réduction d’impôt sur le revenu au titre des souscriptions en numéraire au capital des entreprises solidaires chargées de concourir à la préservation et à la mise en valeur des monuments historiques et des sites, parcs et jardins protégés, est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

Article 2 quinquies
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Article 5 bis

Article 3

Le code de commerce est ainsi modifié :

1° Au 2° de l’article L. 225-136, le taux : « 20 % » est remplacé par le taux : « 30 % » ;

2° L’article L. 22-10-52 est ainsi modifié :

a) Après le mot : « public », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « peut, sur délégation de l’assemblée générale extraordinaire, être librement fixé par le conseil d’administration ou le directoire. » ;

b) Le deuxième alinéa est ainsi modifié :

– la première phrase est supprimée ;

– à la seconde phrase, le mot : « autorisation » est remplacé par le mot : « délégation » ;

3° Après le même article L. 22-10-52, il est inséré un article L. 22-10-52-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 22-10-52-1. – Dans les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé ou sur un système multilatéral de négociation soumis au II de l’article L. 433-3 du code monétaire et financier, lorsque l’augmentation de capital est réservée à une ou à plusieurs personnes nommément désignées, l’assemblée générale extraordinaire peut déléguer au conseil d’administration ou au directoire le pouvoir de les désigner, dans la limite de 30 % du capital social par an.

« Si elle est administrateur ou membre du directoire, la personne nommément désignée ne peut prendre part ni aux délibérations ni aux votes du conseil d’administration ou du directoire sur l’opération. La procédure prévue aux articles L. 225-147 et L. 22-10-53 du présent code n’est pas applicable.

« Le prix d’émission des actions est fixé par le conseil d’administration ou le directoire, selon des modalités prévues par décret en Conseil d’État.

« Lorsqu’il fait usage de la délégation prévue au premier alinéa du présent article, le conseil d’administration ou le directoire établit un rapport complémentaire à l’assemblée générale ordinaire suivante, qui décrit les conditions définitives de l’opération. Ce rapport est certifié par le commissaire aux comptes, s’il en existe. » ;

4° À la première phrase de l’article L. 22-10-53, le taux : « 10 % » est remplacé par le taux : « 20 % ».

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Article 3
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Article 5 ter

Article 5 bis

À la première phrase du 2° de l’article L. 341-3 du code monétaire et financier, après le mot : « travail », sont insérés les mots : « ou des dispositifs relevant de la sous-section 2 de la section 2 du chapitre IV du titre II du livre II du présent code ».

Article 5 bis
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Article 6

Article 5 ter

Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi permettant de créer un régime de fractionnement des instruments financiers, notamment en :

1° Définissant les modalités de fractionnement d’un instrument financier ;

2° Définissant un régime de propriété pour l’acquisition et la détention des instruments financiers fractionnés ;

3° Étendant les droits associés aux différentes catégories d’instruments financiers dans les cas de fractionnement ;

4° Adaptant les règles de commercialisation et de négociation des instruments financiers aux fins de préciser leur application en cas de fractionnement d’un instrument financier ;

5° Déclinant le régime de protection des investisseurs pour prendre en compte le fractionnement d’instruments financiers ;

6° Étendant à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française et aux îles Wallis et Futuna, avec les adaptations nécessaires, les dispositions prises sur le fondement des 1° à 3° du présent article, pour celles qui relèvent de la compétence de l’État, et en prévoyant, le cas échéant, les adaptations nécessaires en ce qui concerne Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance.

TITRE II

FACILITER LA CROISSANCE À L’INTERNATIONAL DES ENTREPRISES FRANÇAISES PAR LA DÉMATÉRIALISATION DES TITRES TRANSFÉRABLES

Article 5 ter
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Article 7

Article 6

I. – Constitue un titre transférable l’écrit qui représente un bien ou un droit et qui donne à son porteur le droit de demander l’exécution de l’obligation qui y est spécifiée ainsi que celui de transférer ce droit.

Les titres transférables comprennent :

1° Les lettres de change et les billets à ordre régis par le titre Ier du livre V du code de commerce ;

2° Les récépissés et les warrants régis par la section 4 du chapitre II du titre II du même livre V ;

3° Les connaissements maritimes à ordre ou au porteur régis par la section 2 du chapitre II du titre II du livre IV de la cinquième partie du code des transports ;

4° Les connaissements fluviaux négociables régis par l’article 13 de la convention de Budapest relative au contrat de transport de marchandises en navigation intérieure (CMNI), faite le 22 juin 2001 ;

5° Les polices d’assurance de dommages et de personnes à ordre ou au porteur régies par le chapitre II du titre Ier du livre Ier du code des assurances ;

6° Les polices d’assurance maritime, aérienne et aéronautique, fluviale et lacustre, sur marchandises transportées par tous modes et les polices d’assurance de responsabilité civile spatiale régies par le titre VII du même livre Ier, lorsqu’elles ont été convenues à ordre ou au porteur ;

7° Les bordereaux de cession ou de nantissement de créances professionnelles régis par la sous-section 1 de la section 3 du chapitre III du titre Ier du livre III du code monétaire et financier, lorsque ces bordereaux sont stipulés à ordre ;

8° Tout autre écrit, à ordre ou au porteur, répondant à la définition prévue au premier alinéa du présent I, à l’exception de ceux mentionnés au II.

II. – Le présent titre ne s’applique pas :

1° Aux instruments financiers régis par le titre Ier du livre II du code monétaire et financier ;

2° Aux chèques bancaires et postaux régis par le chapitre Ier du titre III du livre Ier du même code ;

2° bis Aux bons de caisse régis par le chapitre III du titre II du livre II dudit code ;

3° Aux titres spéciaux de paiement dématérialisés régis par l’article L. 525-4 du même code ;

4° Aux titres à ordre régis par l’article L. 143-18 du code de commerce ;

5° Aux reçus d’entreposage mentionnés à l’article L. 522-37-1 du même code ;

6° Aux copies exécutoires représentant des créances hypothécaires à ordre régies par la loi n° 76-519 du 15 juin 1976 relative à certaines formes de transmission des créances.

Article 6
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Article 8

Article 7

I. – Le titre transférable mentionné au I de l’article 6 peut être établi, signé et conservé sous forme électronique dans les conditions prévues aux articles 1366 et 1367 du code civil. Le titre transférable électronique est transféré, remis, présenté et modifié selon une méthode fiable remplissant les objectifs prévus au I de l’article 8 de la présente loi.

II. – Le porteur du titre transférable électronique est celui qui dispose, pour lui-même ou pour un tiers, de son contrôle exclusif. Ce contrôle lui permet d’exercer les droits conférés par ce titre, de le modifier ou de le faire modifier et de le transférer, dans les conditions prévues au présent titre.

III. – Les mentions, tel l’endos, l’acceptation, l’aval ou toute autre modification, susceptibles d’être apposées sur le titre peuvent figurer à tout emplacement approprié du titre transférable électronique si leur nature et leur objet ressortent sans ambiguïté de leurs termes.

IV. – La présentation ou la remise d’un titre transférable électronique est effectuée par tout moyen de communication électronique à l’adresse électronique indiquée par le destinataire. Cette présentation ou cette remise peut également être réalisée en communiquant l’information permettant l’accès au titre transférable électronique.

Cette présentation ou cette remise est effective si le destinataire en accuse réception par tout moyen ou, en l’absence d’avis de réception, s’il peut se déduire de son comportement une telle présentation ou remise.

V. – Le transfert ou le nantissement des droits conférés par le titre transférable électronique lors de l’endossement ou de la simple remise de ce titre s’opère par le transfert du contrôle exclusif exercé sur ce titre.

L’endos en blanc du titre transférable électronique suppose que son porteur soit identifié comme la personne qui en a le contrôle exclusif.

VI. – Toute apposition de tampon, de cachet, de griffe ou d’un autre signe distinctif effectuée en sus d’une signature sur un titre transférable sur support papier peut être effectuée sur un titre transférable électronique par l’apposition horodatée d’une image reproduisant fidèlement ledit tampon, cachet ou signe distinctif ou ladite griffe.

Article 7
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Article 9

Article 8

I. – Le titre transférable électronique a les mêmes effets que le titre transférable établi sur support papier lorsqu’il contient les informations requises pour un titre transférable établi sur support papier et qu’une méthode fiable est employée pour :

1° Assurer l’unicité du titre transférable électronique ;

2° Identifier le porteur comme la personne qui en a le contrôle exclusif ;

3° Établir le contrôle exclusif du porteur sur ce titre transférable électronique ;

4° Identifier ses signataires et ses porteurs successifs, depuis sa création jusqu’au moment où il cesse de produire ses effets ou d’être valable ;

5° Préserver son intégrité et attester des éventuelles modifications qui lui sont apportées, telles des adjonctions, biffures ou radiations permises par la loi, les coutumes, les usages ou la convention des parties, depuis sa création jusqu’au moment où il cesse de produire ses effets ou d’être valable. L’intégrité s’apprécie, au regard de l’article 1366 du code civil, en déterminant si les informations contenues dans le titre, y compris ces éventuelles modifications, sont restées complètes et inchangées.

II. – Le titre transférable sur support papier peut être converti sur un support électronique et inversement dans les conditions prévues par les obligés et les titulaires de droits en vertu du titre. Un titre transférable peut toutefois être créé avec la mention qu’il ne peut être convertible sur un autre support.

Le changement de support n’opère pas novation et n’altère ni les obligations ou les droits respectifs des signataires, des porteurs ou des personnes ayant le contrôle exclusif du titre, ni ses effets envers les tiers.

Le titre converti conserve, en tant que de raison, les propriétés du titre initial et porte mention de cette conversion sur le nouveau support. L’ancien support cesse d’être valable à compter de l’émission du nouveau support.

III. – Les conditions d’application du présent article sont définies par décret en Conseil d’État.

Article 8
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Article 10

Article 9

I. – Le code de commerce est ainsi modifié :

1° Après l’article L. 511-1, il est inséré un article L. 511-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 511-1-1. – La lettre de change peut être établie, signée, transférée, présentée, remise, modifiée et conservée sous forme électronique dans les conditions prévues aux articles 7 et 8 de la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France.

« La section 12 du présent chapitre ne s’applique pas à la lettre de change électronique.

« L’acte qui doit être accompli au domicile d’une personne l’est dans les conditions prévues au IV de l’article 7 de la loi n° … du … précitée. » ;

2° Après l’article L. 512-1, il est inséré un article L. 512-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 512-1-1. – Le billet à ordre peut être établi, signé, transféré, présenté, remis, modifié et conservé sous forme électronique dans les conditions prévues aux articles 7 et 8 de la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France.

« L’article L. 511-1-1 relatif à la lettre de change électronique s’applique au billet à ordre électronique en tant qu’il n’est pas incompatible avec la nature de ce titre. » ;

3° Après l’article L. 522-27, il est inséré un article L. 522-27-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 522-27-1. – Le récépissé et le warrant peuvent être établis, signés, transférés, modifiés et conservés sous forme électronique dans les conditions prévues aux articles 7 et 8 de la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France.

« Le registre à souche mentionné aux articles L. 522-25 et L. 522-27 est tenu sous forme électronique selon une méthode fiable, dont un décret en Conseil d’État définit les caractéristiques.

« Il ne peut être délivré de récépissé électronique si le warrant est établi sur support papier, ni de warrant électronique si le récépissé est établi sur support papier. »

II. – L’article L. 313-23 du code monétaire et financier est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le bordereau, lorsqu’il est stipulé à ordre, peut être établi, signé, transféré et conservé sous forme électronique dans les conditions prévues aux articles 7 et 8 de la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France. »

III. – L’article L. 5422-3 du code des transports est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le connaissement peut être établi, signé, transféré, modifié, conservé et remis sous forme électronique dans les conditions prévues aux articles 7 et 8 de la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France. »

IV. – L’article L. 112-5 du code des assurances est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La police, lorsqu’elle est à ordre ou au porteur, peut être établie, signée, transférée, modifiée et conservée sous forme électronique dans les conditions prévues aux articles 7 et 8 de la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France. »

TITRE III

MODERNISER, SIMPLIFIER ET RENFORCER L’ATTRACTIVITÉ DU DROIT EN FAVEUR DE L’ÉCONOMIE FRANÇAISE

Article 9
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Article 10 bis A

Article 10

I. – La seconde phrase de l’article 1853 du code civil est complétée par les mots : « , y compris par voie électronique, selon les délais et modalités qu’ils définissent ».

II. – Le code de commerce est ainsi modifié :

1° Au second alinéa de l’article L. 221-6, après le mot : « écrite », sont insérés les mots : « , y compris par voie électronique, selon les délais et les modalités qu’ils définissent » ;

2° L’article L. 223-27 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi modifié :

– à la seconde phrase, les mots : « qu’à l’exception de celles prévues au premier alinéa de l’article L. 223-26 » sont remplacés par le mot : « que » et sont ajoutés les mots : « , y compris, dans ces cas, par voie électronique, selon les délais et les modalités qu’ils définissent » ;

– est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Les statuts peuvent admettre le vote par correspondance au moyen d’un formulaire dont les mentions sont fixées par décret en Conseil d’État. » ;

b) À la première phrase du troisième alinéa, les mots : « visioconférence ou par des moyens » sont remplacés par les mots : « un moyen » ;

3° Le troisième alinéa de l’article L. 225-37 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, les mots : « lorsque le conseil est réuni pour procéder aux opérations visées aux articles L. 232-1 et L. 233-16 et sauf disposition contraire des statuts, le règlement intérieur peut prévoir que » sont remplacés par les mots : « disposition contraire des statuts ou du règlement intérieur, » et les mots : « des moyens de visioconférence ou » sont remplacés par les mots : « un moyen » ;

b) La dernière phrase est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : « Sous réserve de prévoir que tout membre du conseil peut s’opposer à ce qu’il soit recouru à cette modalité, les statuts peuvent également prévoir que les décisions du conseil d’administration ou certaines d’entre elles peuvent être prises par consultation écrite des administrateurs, y compris par voie électronique, selon les délais et les modalités qu’ils définissent. Les statuts peuvent admettre le vote par correspondance au moyen d’un formulaire dont les mentions sont fixées par décret en Conseil d’État. » ;

4° Le troisième alinéa de l’article L. 225-82 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, les mots : « lorsque le conseil est réuni pour procéder aux opérations visées au cinquième alinéa de l’article L. 225-68 et sauf disposition contraire des statuts, le règlement intérieur peut prévoir que » sont remplacés par les mots : « disposition contraire des statuts ou du règlement intérieur, » et les mots : « des moyens de visioconférence ou » sont remplacés par les mots : « un moyen » ;

b) La dernière phrase est remplacée par trois phrases ainsi rédigées : « Sous réserve de prévoir que tout membre du conseil peut s’opposer à ce qu’il soit recouru à cette modalité, les statuts peuvent également prévoir que les décisions du conseil de surveillance ou certaines d’entre elles peuvent être prises par consultation écrite de ses membres. Dans ce cas, le président du conseil de surveillance peut décider que les membres du conseil peuvent communiquer leur réponse par message électronique à l’adresse électronique indiquée. Les statuts peuvent admettre le vote par correspondance au moyen d’un formulaire dont les mentions sont fixées par décret en Conseil d’État. » ;

5° Les deux premiers alinéas de l’article L. 225-103-1 sont remplacés par quatre alinéas ainsi rédigés :

« L’assemblée générale extraordinaire mentionnée à l’article L. 225-96, l’assemblée générale ordinaire mentionnée à l’article L. 225-98 et l’assemblée spéciale mentionnée à l’article L. 225-99 peuvent se tenir par un moyen de télécommunication permettant l’identification des actionnaires.

« Le recours à un moyen de télécommunication pour la tenue de l’assemblée générale ou de l’assemblée spéciale est indiqué dans l’avis de convocation. Sont réputés présents pour le calcul du quorum et de la majorité les actionnaires qui participent à l’assemblée par des moyens de télécommunication permettant leur identification.

« Sans préjudice de l’article L. 225-107, les statuts peuvent prévoir que l’assemblée générale extraordinaire mentionnée à l’article L. 225-96, l’assemblée générale ordinaire mentionnée à l’article L. 225-98 et l’assemblée spéciale mentionnée à l’article L. 225-99 sont tenues exclusivement par un moyen de télécommunication permettant l’identification des actionnaires.

« Toutefois, pour l’assemblée générale extraordinaire mentionnée à l’article L. 225-96, un ou plusieurs actionnaires représentant au moins 25 % du capital social peuvent s’opposer à ce qu’il soit recouru exclusivement aux modalités de participation à l’assemblée prévues aux trois premiers alinéas du présent article. » ;

6° L’article L. 225-107 est ainsi modifié :

a) (Supprimé)

b) Le II est abrogé ;

6° bis L’article L. 226-4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Sous réserve de prévoir que tout membre du conseil peut s’opposer à ce qu’il soit recouru à cette modalité, les statuts peuvent également prévoir que les décisions du conseil de surveillance ou certaines d’entre elles peuvent être prises par consultation écrite de ses membres, y compris par voie électronique, selon les délais et les modalités qu’ils définissent. Les statuts peuvent admettre le vote par correspondance au moyen d’un formulaire dont les mentions sont fixées par décret en Conseil d’État. » ;

6° ter À la première phrase du cinquième alinéa de l’article L. 228-61, les mots : « visioconférence ou par des moyens » sont remplacés par les mots : « un moyen » ;

7° Après l’article L. 22-10-21, il est inséré un article L. 22-10-21-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 22-10-21-1. – Nonobstant toute disposition contraire des statuts, sont réputés présents, pour le calcul du quorum et de la majorité, les membres du conseil de surveillance qui participent à la réunion par un moyen de télécommunication permettant leur identification, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État. Les statuts ou le règlement intérieur peuvent prévoir que certaines décisions ne peuvent être prises lors d’une réunion tenue dans ces conditions. » ;

8° Après l’article L. 22-10-3, il est inséré un article L. 22-10-3-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 22-10-3-1. – Nonobstant toute disposition contraire des statuts, sont réputés présents, pour le calcul du quorum et de la majorité, les administrateurs qui participent à la réunion par un moyen de télécommunication permettant leur identification, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État. Les statuts ou le règlement intérieur peuvent prévoir que certaines décisions ne peuvent être prises lors d’une réunion tenue dans ces conditions. » ;

8° bis À l’article L. 22-10-38, les mots : « visioconférence ou par des moyens » sont remplacés par les mots : « un moyen » ;

9° Après le même article L. 22-10-38, il est inséré un article L. 22-10-38-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 22-10-38-1. – Les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé assurent la retransmission en direct de l’assemblée, à moins que des raisons techniques rendent impossible ou perturbent gravement cette retransmission. Elles s’assurent également que l’enregistrement de l’assemblée puisse être consulté et indiquent, le cas échéant, si cet enregistrement porte sur l’intégralité de celle-ci.

« Un décret en Conseil d’État précise les modalités de retransmission, d’enregistrement et de consultation. » ;

10° (Supprimé)

Article 10
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Article 10 quater

Article 10 bis A

Le deuxième alinéa de l’article L. 225-105 du code de commerce est complété par une phrase ainsi rédigée : « En cas de contestation du refus d’inscription de ces points ou de ces projets de résolution, le tribunal de commerce compétent statue selon la procédure accélérée au fond. »

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Article 10 bis A
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Article 10 quinquies

Article 10 quater

Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de neuf mois à compter de la promulgation de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi pour :

1° Harmoniser et simplifier les dispositions relatives à la vie sociale des organismes de placement collectif :

a) En modifiant les modalités relatives à l’organisation des assemblées générales ;

b) En harmonisant les calendriers relatifs à la publication des comptes et à la distribution des dividendes ;

c) En harmonisant les définitions de capital et de sommes distribuables ;

d) En modifiant les modalités de fractionnement des actifs des organismes de placement collectif immobilier ;

e) En harmonisant les règles relatives au franchissement des seuils dans les organismes de placement collectif dont les actions sont négociées sur un marché réglementé, notamment avec l’article 1er de la directive 2004/109/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 2004 sur l’harmonisation des obligations de transparence concernant l’information sur les émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé et modifiant la directive 2001/34/CE ;

e bis) (nouveau) En assurant la cohérence des modalités de déclaration applicables aux sociétés de gestion dont les fonds communs de placement franchissent les seuils prévus dans le code de commerce ;

f) En modifiant les règles des opérations touchant à leur vie, notamment à leur fin de vie ;

2° Moderniser la gouvernance des organismes de placement collectif :

a) En modifiant la composition et le rôle des organes de surveillance des sociétés d’investissement à capital variable et des sociétés civiles de placement immobilier ;

b) En modifiant les modalités de tenue des réunions des organes de surveillance ;

c) En modifiant la répartition des pouvoirs entre les organes sociaux des sociétés d’investissement à capital variable et des sociétés à prépondérance immobilière à capital variable, d’une part, et leurs sociétés de gestion, d’autre part ;

d) En modifiant les modalités d’intégration des investisseurs dans la gouvernance ;

3° Réformer le cadre des opérations des organismes de placement collectif :

a) En modifiant le fonctionnement des compartiments, s’agissant de leur autonomie juridique, de la compétence des assemblées d’actionnaires des compartiments et des droits des créanciers ;

b) En modifiant les modalités de fractionnement de parts ou d’actions d’organismes de placement collectif ;

c) En modifiant les modalités de valorisation des apports en nature dans les organismes de placement collectif immobilier ;

4° Rendre applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna, avec les adaptations nécessaires, les dispositions prises sur le fondement des 1° à 3°, pour celles qui relèvent de la compétence de l’État, et procéder aux adaptations nécessaires de ces dispositions en ce qui concerne les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance.

Article 10 quater
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Article 10 sexies

Article 10 quinquies

Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Après le mot : « réserves », la fin du 3° des articles L. 214-14 et L. 214-24-47, du c du 6° de l’article L. 214-133 et du 3 de l’article L. 621-23 est ainsi rédigée : « , le refus de la certification des comptes ou l’impossibilité de les certifier. » ;

2° À l’article L. 214-78, les mots : « de l’article L. 214-24-40 » sont remplacés par les mots : « des articles L. 214-24-40 et L. 214-24-47 ».

Article 10 quinquies
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Article 12

Article 10 sexies

Le deuxième alinéa de l’article L. 621-30 du code monétaire et financier est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Un décret en Conseil d’État fixe la liste des cas dans lesquels ce délai est réduit à trois mois. Lorsque la décision contestée fait l’objet d’une demande de sursis à exécution, la juridiction saisie se prononce dans un délai d’un mois à compter du dépôt de cette demande. »

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Article 10 sexies
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Article 13

Article 12

I. – L’article L. 511-84-1 du code monétaire et financier est ainsi rédigé :

« Art. L. 511-84-1. – Pour l’application des articles L. 1226-15, L. 1234-9, L. 1235-3, L. 1235-3-1, L. 1235-11 et L. 1235-16 du code du travail, la détermination de l’indemnité à la charge de l’employeur ne prend pas en compte, pour les preneurs de risques au sens des articles 5 et 6 du règlement délégué (UE) 2021/923 de la Commission du 25 mars 2021 complétant la directive 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil par des normes techniques de réglementation fixant les critères permettant de définir les responsabilités dirigeantes, les fonctions de contrôle, l’unité opérationnelle importante et l’incidence significative sur le profil de risque de cette unité, et fixant les critères permettant de recenser les membres du personnel ou les catégories de personnel dont les activités professionnelles ont une incidence sur le profil de risque de l’établissement qui est comparativement aussi significative que celle des membres du personnel ou catégories de personnel visés à l’article 92, paragraphe 3, de ladite directive, la partie de la part variable de la rémunération dont le versement peut être réduit ou donner lieu à restitution en application de l’article L. 511-84 du présent code.

« Pour l’application de l’article L. 1235-3 du code du travail, le montant de la rémunération mensuelle prise en compte dans le calcul de l’indemnité octroyée par le juge aux salariés d’un établissement de crédit, d’une société de financement, d’une entreprise d’investissement ou d’une entreprise d’assurance ou de réassurance qui ont le pouvoir de prendre, d’approuver ou d’opposer leur veto à une décision portant sur des transactions du portefeuille de négociation ou qui dirigent directement un groupe de personnes ayant individuellement le pouvoir d’engager l’entreprise pour de telles transactions ne peut excéder le montant annuel du plafond mentionné à l’article L. 241-3 du code de la sécurité sociale. »

II (nouveau). – Le second alinéa de l’article L. 511-84-1 du code monétaire et financier s’applique aux licenciements prononcés postérieurement à la publication de la présente loi.

TITRE IV

DISPOSITIONS FINALES

Article 12
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Article 14

Article 13

I. – Les articles 6 à 8 sont applicables en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, sous réserve des adaptations suivantes :

1° À l’article 6 :

a) Les 1°, 2° et 4° à 6° du I ne sont pas applicables ;

b) Au 3° du même I, les références au code des transports sont remplacées par les références aux dispositions applicables localement en matière de connaissement maritime ;

2° À l’article 7, les références au code civil sont remplacées par les références aux dispositions applicables localement ayant le même objet ;

3° Les références au code de commerce sont remplacées par les références aux dispositions applicables localement ayant le même objet.

bis. – Les articles 6 à 8 sont applicables aux îles Wallis et Futuna, sous réserve de l’adaptation suivante : les 2° et 4° à 6° du I de l’article 6 ne sont pas applicables.

II. – Le I de l’article L. 950-1 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Le 2° est ainsi modifié :

aa) Au deuxième alinéa, la référence : « L. 223-27, » est supprimée ;

ab) Au troisième alinéa, la référence : « L. 228-61, » est supprimée ;

ac) Au quatrième alinéa, au début, les mots : « Les articles L. 228-65 et » sont remplacés par les mots : « L’article » et les mots : « sont applicables dans leur rédaction » sont remplacés par les mots : « est applicable dans sa rédaction » ;

ad) Au huitième alinéa, les références : « L. 225-35, », « L. 225-64, » et « L. 228-11, » sont supprimées ;

a) Au treizième alinéa, les références : « L. 225-58, », « L. 225-81, », « L. 225-103-1, », « L. 225-122, » et « L. 225-136, » sont supprimées ;

b) Après le même treizième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les articles L. 225-37, L. 225-58, L. 225-81, L. 225-103-1, L. 225-122, L. 225-136 et L. 226-4 sont applicables dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France. » ;

c) Après le quatorzième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’article L. 228-10 est applicable dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … précitée. » ;

d) Le quinzième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les articles L. 22-10-1 à L. 22-10-6, L. 22-10-8, L. 22-10-9 et L. 22-10-11 à L. 22-10-23, L. 22-10-34 et L. 22-10-39 à L. 22-10-45, L. 22-10-47 à L. 22-10-51, L. 22-10-54 à L. 22-10-58 et L. 22-10-60 à L. 22-10-78 sont applicables dans leur rédaction résultant de l’ordonnance n° 2020-1142 du 16 septembre 2020 portant création, au sein du code de commerce, d’un chapitre relatif aux sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé ou sur un système multilatéral de négociation.

« Les articles L. 22-10-46, L. 22-10-46-1, L. 22-10-52, L. 22-10-52-1 et L. 22-10-53 sont applicables dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … précitée. » ;

e) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Les articles L. 221-6, L. 223-27, L. 225-35, L. 225-36, L. 225-64, L. 225-65, L. 225-82, L. 225-107, L. 228-11, L. 228-61, L. 228-65, L. 22-10-3-1, L. 22-10-21-1, L. 22-10-25, L. 22-10-38, L. 22-10-38-1 et L. 22-10-59 sont applicables dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … précitée ; »

2° Le tableau du second alinéa du 5° est ainsi modifié :

a) La deuxième ligne est remplacée par trois lignes ainsi rédigées :

 

«

Article L. 511-1

l’ordonnance n° 2000-912 du 18 septembre 2000 relative à la partie législative du code de commerce

Article L. 511-1-1

la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France

Articles L. 511-2 à L. 511-25

l’ordonnance n° 2000-912 du 18 septembre 2000 relative à la partie législative du code de commerce

» ;

 

b) La septième ligne est remplacée par trois lignes ainsi rédigées :

 

«

Article L. 512-1

l’ordonnance n° 2000-912 du 18 septembre 2000 relative à la partie législative du code de commerce

Article L. 512-1-1

la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France

Articles L. 512-2 à L. 512-8

l’ordonnance n° 2000-912 du 18 septembre 2000 relative à la partie législative du code de commerce

» ;

 

III. – Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° La deuxième ligne du tableau du second alinéa du I des articles L. 752-7, L. 753-7 et L. 754-6 est ainsi rédigée :

 

«

L. 313-23

la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France

» ;

 

1° bis La troisième ligne du tableau du second alinéa du I des articles L. 783-11, L. 784-11 et L. 785-10 est ainsi rédigée :

 

«

L. 621-23

la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France

» ;

 

1° ter (nouveau) La deuxième ligne du tableau du second alinéa du I des articles L. 783-12, L. 784-12 et L. 785-11 est ainsi rédigée :

 

«

L. 621-30

la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France

» ;

 

2° La dernière ligne du tableau du second alinéa du I des articles L. 783-14, L. 784-14 et L. 785-13 est ainsi rédigée :

 

«

L. 632-17

la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France

» ;

 

3° Le tableau du second alinéa du I des articles L. 742-8 et L. 743-8 est ainsi modifié :

aa) (nouveau) La douzième ligne est remplacée par trois lignes ainsi rédigées :

 

«

L. 214-24-46

l’ordonnance n° 2013-676 du 25 juillet 2013

L. 214-24-47

la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France

L. 214-24-48 et L. 214-24-49

l’ordonnance n° 2013-676 du 25 juillet 2013

» ;

 

a) La dix-huitième ligne est ainsi rédigée :

 

«

L. 214-28

la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France

» ;

 

b) La trente-septième ligne est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :

 

«

L. 214-78

la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France

L. 214-79 et L. 214-80

l’ordonnance n° 2013-676 du 25 juillet 2013

» ;

 

c) La cinquante-cinquième ligne est ainsi rédigée :

 

«

L. 214-133

la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France

» ;

 

4° Le tableau du second alinéa du I de l’article L. 744-8 est ainsi modifié :

aa) (nouveau) La quatorzième ligne est remplacée par trois lignes ainsi rédigées :

 

«

L. 214-24-46

l’ordonnance n° 2013-676 du 25 juillet 2013

L. 214-24-47

la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France

L. 214-24-48 et L. 214-24-49

l’ordonnance n° 2013-676 du 25 juillet 2013

» ;

 

a) La dix-neuvième ligne est ainsi rédigée :

 

«

L. 214-28

la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France

» ;

 

b) La trente-huitième ligne est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :

 

«

L. 214-78

la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France

L. 214-79 et L. 214-80

l’ordonnance n° … 2013-676 du 25 juillet 2013

» ;

 

c) La cinquante-sixième ligne est ainsi rédigée :

 

«

L. 214-133

la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France

» ;

 

5° (nouveau) La dix-neuvième ligne du tableau du second alinéa du I de l’article L. 744-9 est ainsi rédigée :

 

«

L. 214-164

la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France

»

 

III bis. – L’article L. 531-1 du code de l’organisation judiciaire est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Est applicable à Wallis-et-Futuna l’article L. 311-16-1 du présent code, dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France. »

IV. – Le livre VII de la cinquième partie du code des transports est ainsi modifié :

1° Après le deuxième alinéa de l’article L. 5784-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’article L. 5422-3 est applicable à Wallis-et-Futuna dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France. » ;

2° Après le deuxième alinéa de l’article L. 5794-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’article L. 5422-3 est applicable dans les Terres australes et antarctiques françaises dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France. »

Article 13
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Article 12

Article 14

I. – Le 2° de l’article 3 entre en vigueur trois mois après la promulgation de la présente loi. Les modalités de fixation du prix d’émission déterminées par l’assemblée générale des actionnaires avant cette date, par référence aux dispositions légales et réglementaires, demeurent applicables, le cas échéant dans leur rédaction en vigueur à la date de ladite assemblée.

II. – Le 3° de l’article 3 et l’article 10 entrent en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d’État, et au plus tard trois mois après la promulgation de la présente loi.

III. – Le titre II entre en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d’État, et au plus tard neuf mois après la promulgation de la présente loi. Il ne s’applique pas aux titres mentionnés au I de l’article 6 établis avant cette date.

IV. – L’article 11 entre en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d’État, et au plus tard le premier jour du douzième mois suivant la promulgation de la présente loi. Il n’est applicable qu’aux recours formés après son entrée en vigueur.

M. le président. Nous allons maintenant examiner les amendements déposés par le Gouvernement.

Article 2

Article 14
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Article 13

M. le président. La parole est à M. Louis Vogel, sur l’article.

M. Louis Vogel. Au-delà des deux amendements déposés par le Gouvernement qui complètent les travaux de la commission mixte paritaire, je souhaite saluer cette proposition de loi et remercier toutes les parties prenantes pour la rapidité du travail qu’elles ont effectué.

Je remercie ainsi l’auteur et rapporteur du texte à l’Assemblée nationale, Alexandre Holroyd, les membres de la commission des finances de l’Assemblée nationale, les membres des commissions des finances et des lois du Sénat, notamment Albéric de Montgolfier, rapporteur sur le fond.

En ce qui concerne les articles sur lesquels la commission des lois a bénéficié d’une délégation pour avis, la plupart des apports que nous avons proposés ont été adoptés par la commission mixte paritaire, ce dont je me réjouis.

À l’article 1er, nous avons renforcé certaines garanties pour les actionnaires, en complétant le champ des catégories de résolution pour lesquelles les droits de vote multiples ne s’appliqueront pas.

À l’article 10, nous avons renforcé l’opérationnalité des dispositifs de consultation dématérialisée des organes sociaux, tout en veillant à la sécurité juridique des décisions prises.

Le travail réalisé en parfaite intelligence avec l’Assemblée nationale a également permis d’aboutir à une rédaction satisfaisante. En particulier, Alexandre Holroyd m’a convaincu qu’il ne fallait pas prévoir de plafond aux ratios de droits de vote associés aux actions de préférence sur les marchés réglementés à l’article 1er. Il m’a aussi convaincu à propos de l’article 10, la préservation d’un droit pour tout membre du conseil d’administration de s’opposer à une procédure de consultation écrite, comme l’avait souhaité l’Assemblée nationale, paraissant constituer une garantie raisonnable dès lors que le dispositif, comme l’avait souhaité le Sénat, peut être appliqué dans l’ensemble des sociétés anonymes et n’est pas réservé à celles où la présidence du conseil d’administration et la direction générale sont assurées par des personnes différentes.

Ainsi que Mme la ministre l’a indiqué, cette proposition de loi doit nous permettre d’attirer de nouvelles entreprises, mais aussi, et surtout, d’empêcher le départ de certaines entreprises françaises vers des places pratiquant un droit beaucoup plus « agressif » que le nôtre.

Nous avons réussi à rendre notre droit plus attractif tout en maintenant un équilibre des droits des petits actionnaires par rapport aux investisseurs. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. le président. L’amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 17

Rédiger ainsi cet alinéa :

– à la seconde phrase, les mots : « mentionnés au b du V ci-dessus » sont remplacés par les mots : « relevant des paragraphes 1, 2 et 6 de la sous-section 2, du sous-paragraphe 1 du paragraphe 1 ou du paragraphe 2 de la sous-section 3 de la présente section ».

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Il s’agit d’un amendement de coordination rédactionnelle, mais j’ai à cœur de détailler son contenu.

À la suite de l’adoption de l’amendement n° 14 rectifié bis sur l’article 2, qui visait la suppression du b du troisième alinéa du V de l’article L. 214–164 du code monétaire et financier, la commission mixte paritaire a procédé à la suppression d’un renvoi à cet alinéa à la dernière phrase du 1° du VII de l’article L. 214–164.

Après discussion avec l’Autorité des marchés financiers (AMF), il s’avère que cette suppression technique soulève une insécurité juridique, puisqu’elle pourrait donner l’impression que les fonds communs de placement d’entreprise, s’ils sont souscrits via un plan d’épargne retraite (PER), ne pourraient plus investir qu’à hauteur de 10 % dans un organisme de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) ou un fonds d’investissement alternatif (FIA) non ETF – Exchange Traded Fund –, contrairement aux pratiques de place actuelles.

C’est pourquoi nous vous proposons de corriger cette erreur légistique pour éviter tout risque juridique quant à l’application du droit commun pour les OPCVM. L’Autorité des marchés financiers est alignée sur cette nécessaire correction technique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, au nom de la commission mixte paritaire. La commission des finances ne s’est pas réunie et n’a pas pu se prononcer sur cet amendement non plus que sur le suivant. À titre personnel, toutefois, j’émets, sur l’un comme sur l’autre, un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Le vote sur l’article 2, modifié, est réservé.

Article 13

Article 12
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

M. le président. L’amendement n° 2, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 39

Remplacer les mots :

douzième ligne

par les mots :

treizième ligne

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Cet amendement rédactionnel vise à indiquer la bonne ligne du tableau du second alinéa du I des articles L. 742–8 et L. 743–8 de la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2, sur lequel la commission a émis un avis favorable.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Le vote sur l’article 13, modifié, est réservé.

Vote sur l’ensemble

Article 13
Dossier législatif : proposition de loi visant à accroître le financement des entreprises et l'attractivité de la France
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par les amendements du Gouvernement, l’ensemble de la proposition de loi, je vais donner la parole, pour explication de vote, à un représentant par groupe.

La parole est à M. Thomas Dossus, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Thomas Dossus. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons les conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France.

Cette proposition de loi, soutenue par le Gouvernement puisqu’elle lui permet de s’extraire de l’obligation de publier une étude d’impact – c’est important de le préciser –, est présentée comme un outil indispensable pour renforcer la place financière de Paris et faciliter le financement des entreprises françaises.

Derrière ce discours lénifiant se cache une vision jusqu’au-boutiste de la financiarisation de l’économie, qui nous a envoyés plusieurs fois dans le mur, mais que certains continuent de vénérer comme un totem.

La proposition de loi comporte plusieurs mesures contestables, dont la plus symbolique est sans doute l’autorisation des actions à droits de vote multiples. Cette mesure, censée faciliter la levée de capitaux, risque en réalité de concentrer le pouvoir entre les mains d’une poignée d’actionnaires, fragilisant ainsi la gouvernance des entreprises et marginalisant les actionnaires minoritaires.

Mettre fin au principe « un homme, une voix » sans étude d’impact nous paraît dangereux, mais la course à la concurrence entre places financières justifie tout.

D’autres mesures, comme l’assouplissement des règles d’augmentation de capital et la dématérialisation des titres transférables, visent à accélérer les mouvements de capitaux et à fluidifier les marchés financiers. Or cette obsession de la vitesse et de la performance financière ne tient aucun compte des enjeux sociaux et environnementaux qui devraient pourtant désormais guider notre politique économique.

La commission mixte paritaire n’a rien changé à cette équation. La seule modification notable du texte porte sur le plafonnement des indemnités de licenciement des traders et de leurs responsables directs. Ce plafonnement s’applique désormais à la rémunération prise en compte pour le calcul des indemnités et non plus aux indemnités elles-mêmes. Autant dire que ce n’est pas un changement d’ampleur par rapport à la philosophie du texte.

C’est en effet sa philosophie même qui nous pose problème. La proposition de loi reste aveugle face aux défis majeurs auxquels notre société est confrontée. La transition écologique, qui doit impérativement se concrétiser dans les choix d’investissement des entreprises, est totalement absente du texte. De même, les questions de justice sociale et de répartition des richesses, qui sont au cœur des préoccupations des citoyens, ne sont pas abordées.

Derrière cette proposition de loi se dessine une vision sans limites de l’économie, où les entreprises ne sont que des instruments financiers à la merci des fluctuations des marchés. Les travailleurs, réduits à de simples ressources humaines, sont oubliés de l’équation, tout comme les limites planétaires.

Le Gouvernement, obsédé par l’attractivité de la place financière de Paris, semble prêt à tout sacrifier sur l’autel de la financiarisation à outrance. Je précise, comme je l’avais rappelé lors de l’examen du texte en première lecture, que la liquidité des marchés et la disponibilité des capitaux figurent en queue de classement du baromètre d’Ernst & Young sur les critères d’attractivité de la France. La qualité de la main-d’œuvre, des infrastructures et la stabilité de l’environnement juridique et réglementaire sont des éléments bien plus prépondérants dans le choix des investisseurs étrangers. Mais de cela, il ne sera pas question aujourd’hui.

Nous devons faire un choix de société. Voulons-nous une économie au service des hommes et de la planète, ou une économie soumise aux marchés financiers ? Le choix a été fait.

C’est pourquoi, comme en première lecture, mon groupe votera contre cette proposition de loi, qui ne répond ni aux besoins des entreprises françaises ni aux aspirations des citoyens, mais qui poursuit la course à la financiarisation du monde. Nous devons exiger une politique économique qui prenne en compte les enjeux sociaux et environnementaux de notre époque. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – M. Pascal Savoldelli applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Pascal Savoldelli. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, rappelons deux faits : Paris est devenu la première place financière de l’Union européenne ; et la France, singulièrement les métropoles, est plus attractive pour les investissements étrangers. Cela rassure…

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. J’attends la chute…

M. Pascal Savoldelli. Toutefois, l’examen de cette proposition de loi visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France est rattrapé par l’actualité : l’agence ultralibérale Standard & Poors, en service commandé, vient de dégrader la note de la dette de la France.

Nous assistons à un jeu de dupes, qui permettra au Gouvernement de justifier les prochains rationnements des services publics. (Mme la ministre déléguée le conteste.) Pas une seule fois le lien n’a été fait entre les niveaux records de déficit et les baisses d’impôt de 60 milliards d’euros, et il faudrait aller encore plus loin dans la dérégulation et la déréglementation ?

Une action ne vaudrait plus une ou deux voix, mais bien vingt-cinq. Cela revient à soumettre un peu plus l’économie réelle au pouvoir de la finance.

Dans un monde en mutation accélérée, cette proposition de loi va-t-elle renforcer la démocratie dans l’entreprise, déjà fortement entravée par la financiarisation de l’économie ?

La réponse est non : toutes nos propositions en ce sens ont été balayées.

Permettre aux travailleuses et aux travailleurs par le biais de leur comité social et économique de s’opposer à une introduction boursière ou à une ouverture du capital ? Pas retenu !

Réserver l’octroi des actions à droits de vote multiples aux fondateurs et aux salariés ? Pas retenu !

L’obligation de proposer aux salariés au moins la moitié des actions de préférence lors d’une ouverture de capital ? Pas retenu non plus !

Faut-il encore rappeler qu’il n’y a pas d’entreprise sans travailleuses et travailleurs et que les richesses sont produites par la force de leur travail et non par les actionnaires, n’en déplaise au capitalisme sans limites ni considération pour l’humain ?

Les entreprises protègent leurs actionnaires en maintenant les dividendes, quitte à comprimer les effectifs. Il est vrai que l’on atteint tout juste moins 100 milliards d’euros de dividendes et en rachats d’actions, plus du double qu’en 2012 ! C’est cela, le coût humain du capital, le coût de la prétendue attractivité.

Pourtant, en 2005, des économistes se revendiquant comme libéraux, Augustin Landier et David Thesmar, écrivaient que « les mutations du capitalisme ont exposé les salariés à des risques dont ils s’étaient protégés jusqu’à présent ». Cela n’a jamais été aussi vrai. TotalEnergies en fournit à ce titre un exemple caricatural : sur 21,4 milliards de dollars de bénéfices net, 9 milliards ont débouché sur des rachats d’actions, et 7,79 milliards ont été distribués en dividendes. Soit 70 % pris par les actionnaires !

Le déménagement de la cotation principale du groupe serait finalement, selon les dires de son PDG, presque abandonné : un séisme financier sans impact pour ses activités. Aucun chantage ne doit être accepté par le Gouvernement. Madame la ministre, il faut de la fermeté, rien que de la fermeté, face à ceux qui quittent la France ou menacent de le faire.

Le ministre Lescure avait pourtant estimé indispensable d’affirmer que « le secteur financier n’est pas une fin en soi », mais est « surtout un moyen de financer au mieux l’économie productive, notamment dans nos territoires ». Belle citation, mais c’est une fable : la sphère financière est bel et bien décorrélée de la sphère productive. Le taux de retour aux actionnaires est le seul indicateur qui motive les décisions d’investissement. Il suffit pour s’en convaincre de voir la volatilité des valorisations boursières.

Où sont donc passées les PME dans cette proposition de loi ? Quelle mesure les concerne vraiment ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Les actions à droits de vote multiples !

M. Pascal Savoldelli. Il n’y en a que pour les gros.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. C’est faux !

M. Pascal Savoldelli. Revenant sur les principes du droit financier, cette proposition de loi est même contre-productive. Elle majore les seuils des titres détenus dans les plans d’épargne en actions, déroge au droit de préférence en risquant de menacer les actionnaires existants, ou encore en favorisant la publicité commerciale aux personnes physiques émanant de l’étranger.

En définitive, ce texte crée quatre risques : une éviction des PME et des ETI ; un affaiblissement des sociétés non cotées vis-à-vis des sociétés cotées ; une fuite du territoire de l’épargne française ; une concurrence exacerbée entre les actionnaires historiques et les nouveaux actionnaires.

Que dire enfin du projet de faire de tous les citoyens des actionnaires en puissance, en leur donnant par ordonnance – Mme la ministre l’a indiqué avec une certaine fierté – la possibilité d’acheter des quarts ou des dixièmes d’actions ? Le projet politique est clair : que chaque centime aille à la finance. (Mme la ministre déléguée proteste.)

Comme vous considérez que les personnes privées d’emploi et les retraités sont improductifs, leur épargne ne peut que l’être également. C’est un projet au service du capital face auquel les sénatrices et sénateurs du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky s’opposent, comme ils s’opposent à la plupart des mesures contenues dans cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. le président. La parole est à M. Michel Masset, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et RDPI.)

M. Michel Masset. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’accord en commission mixte paritaire sur cette proposition de loi faisait peu de doute. Si ce texte passe inaperçu aux yeux du grand public et pour la presse généraliste – mais non pour la presse spécialisée –, il comporte des mesures non négligeables pour le secteur financier et le financement des entreprises.

Je ne reviens pas en détail sur l’interrogation que j’ai eue en première lecture quant au fait d’utiliser l’initiative parlementaire pour traduire des annonces gouvernementales.

On peut encore discuter de la cohérence entre l’intitulé de la proposition de loi et son contenu effectif, qui porte presque exclusivement sur l’attractivité financière et bancaire, et non nécessairement sur l’économie en général.

En l’espèce, la volonté est clairement de tirer le meilleur parti des effets du Brexit et de mener une bataille pour la compétitivité avec les autres pôles financiers européens : Francfort, Amsterdam ou Luxembourg.

Je me dois toutefois de rappeler mon appréhension quant à l’objectif de financiarisation des petites entreprises.

Un des objectifs affichés du présent texte est de renforcer les moyens de financement des PME et des ETI par les marchés, tout en leur garantissant une protection adéquate, sous l’égide d’autorités telles que l’AMF ou l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR).

Ainsi, veillons à trouver un mix de financements qui préserve ce qui fait l’identité et les intérêts de nos entreprises françaises et européennes.

Le financement de marché reste peu développé en France, en comparaison avec les pays anglo-saxons. La certaine libéralisation que sous-tend ce texte ne doit pas nous conduire à nous jeter à corps perdu dans des modes de financement plus risqués ou à négliger les droits des actionnaires minoritaires.

C’est la raison pour laquelle les autorités de régulation gardent un rôle essentiel. La version de l’article 1er retenue en commission mixte paritaire réserve ces actions de préférence, avec un ratio élevé de vingt-cinq pour un, aux sociétés dont les titres sont admis à la « négociation sur un système multilatéral ».

La commission mixte paritaire a également retenu l’augmentation du seuil de capitalisation pour l’éligibilité d’une société au PEA-PME. Elle assouplit aussi les augmentations de capital sans droit préférentiel de souscription.

Une disposition importante du texte, constituée par l’article 4, avait été adoptée conforme dès la lecture devant le Sénat : elle lève des restrictions initialement prévues par la loi du 26 juillet 1968 relative à la communication de documents et renseignements d’ordre économique, commercial, industriel, financier ou technique à des personnes physiques ou morales étrangères, dite loi de blocage, vis-à-vis des autorités étrangères de supervision. Je rappelle néanmoins notre attachement à cette loi ancienne, qui vise à protéger notre souveraineté économique.

Le texte prévoit la dématérialisation des assemblées générales d’actionnaires et autres organes de décision, ce qui va, pour ainsi dire, dans le sens de l’Histoire, tout en comportant, comme dans d’autres domaines, des enjeux de cybersécurité.

Enfin, retenons que plusieurs mesures seront prises par voie d’ordonnance : la réforme des organismes de placement collectif et la simplification du régime des nullités. Le Parlement devra remplir sa mission de vérification et de ratification de ces ordonnances.

Rappelons donc les principaux enjeux auxquels doit répondre cette proposition de loi : satisfaire les besoins d’investissement, en particulier dans la transition écologique, mais aussi dans l’industrie de défense ou encore dans la transition numérique.

Cela est compréhensible, à l’heure où nous savons que la transition ne reposera pas sur l’investissement public. La mobilisation de l’épargne des Français doit être un outil majeur de cette transition. Espérons aussi des retombées positives en matière de créations d’emplois, et pas seulement dans le secteur financier à Paris.

Ainsi, ce texte, appelé de leurs vœux par les professionnels, nous semble aller dans le bon sens. Malgré les quelques points de vigilance évoqués, le groupe RDSE se montre favorable à l’adoption des conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Buis, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

M. Bernard Buis. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, si les jeux Olympiques et Paralympiques débutent bel et bien dans cinquante-trois jours, la France a pourtant déjà gagné une belle médaille : celle de l’attractivité en Europe.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Médaille d’or !

M. Bernard Buis. Comme toute médaille, elle ne tombe pas du ciel : elle est le fruit d’un travail de longue haleine.

Grâce aux réformes menées depuis 2017 sur la fiscalité, sur le foncier, sur notre marché du travail – je pense par exemple à la création du prélèvement forfaitaire unique – et grâce au dynamisme de notre tissu entrepreneurial, notre pays a su se démarquer et tirer son épingle du jeu parmi les nations européennes. Je dirai même que la France a su saisir l’opportunité du Brexit pour accroître ses avantages comparatifs, en attirant les acteurs financiers souhaitant sécuriser leur accès au marché unique.

Voilà les raisons qui font que notre pays, notamment grâce à la place de Paris, est aujourd’hui en tête des classements européens en matière tant de capitalisation boursière que d’investissements étrangers.

Cependant, nous ne sommes pas le seul État de l’Union européenne à tirer profit de la situation. Si nous étions hier en concurrence avec Londres, nous le sommes désormais avec d’autres places européennes, à l’image d’Amsterdam, qui offre aux investisseurs et aux acteurs économiques une réglementation plus souple que celle qui est en vigueur dans notre capitale, raison pour laquelle nous devons aller encore plus loin pour renforcer le financement des entreprises et l’attractivité de la France.

Même si cette attractivité est une réalité palpable dont les effets se font ressentir sur notre économie, nous devons rester vigilants et ne pas nous reposer sur nos lauriers. Nombreux sont les obstacles qui perdurent et nuisent à la compétitivité de la France. Un assouplissement est donc plus que nécessaire, et je me réjouis de l’accord trouvé en commission mixte paritaire.

Cette proposition de loi reprend de nombreux apports du Sénat, d’abord en matière de recours contre les décisions de l’Autorité des marchés financiers. Le délai laissé à la juridiction pour statuer sur un recours contre une décision individuelle de l’AMF est fixé à cinq mois pour les décisions les plus complexes. Il sera maintenu à trois mois pour les recours formés contre des décisions de moindre complexité, dont la liste sera fixée par décret en Conseil d’État.

Ensuite, soulignons également que le plafonnement des indemnités de licenciement des preneurs de risques est restreint aux seuls traders et à leurs responsables directs, ainsi qu’aux seules indemnités octroyées par le juge pour des licenciements sans cause réelle et sérieuse. De plus, le plafonnement porte non plus sur les indemnités de licenciement, mais sur la rémunération prise en compte pour le calcul desdites indemnités, afin de mieux tenir compte de l’ancienneté.

Enfin, notons que le champ de l’habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance, afin de renforcer l’adéquation du droit des organismes de placement collectif avec le droit des sociétés, a été précisé ; nous serons donc attentifs au contenu de ces ordonnances.

Pour conclure, le renforcement des capacités de financement de marché et en fonds propres des entreprises sera non négligeable, dans la mesure où le nombre d’entreprises dont les titres seraient éligibles aux fonds communs de placement à risque augmenterait de plus de 21 %.

Tout cela constitue autant de retombées économiques positives pour nos emplois, et donc pour nos territoires.

Mes chers collègues, pour une France plus attractive, où les entreprises se sentent libérées et accompagnées, où la réindustrialisation devient un peu plus, chaque jour, une réalité retrouvée, notre groupe RDPI votera pour l’adoption des conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Michel Canévet applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Florence Blatrix Contat. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, alors que nous achevons l’examen de cette proposition de loi visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France, les réserves du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain n’ont pas été levées.

Ce texte apporte une réponse insatisfaisante au problème du sous-financement de nos entreprises à forte croissance, notamment de nos start-up.

Je reviendrai d’abord et encore une fois sur la forme choisie.

Le ministre de l’économie avait promis un texte sur l’attractivité ; pour finir, nous avons dû nous contenter d’une proposition de loi composite, inscrite à l’ordre du jour du Sénat en pleine semaine gouvernementale. Nous regrettons ce choix, qui prive les parlementaires d’une étude d’impact et d’un avis du Conseil d’État ; cela nuit à la qualité de nos débats, et n’a pas aidé à lever nos doutes sur ce texte. Plus largement, nous regrettons que ce genre de pratique soit devenue monnaie courante.

Pour ce qui est du fond, nous partageons le constat, mais pas les réponses apportées.

Oui, il y a un problème de financement des entreprises en France. Oui, les épargnants se méfient des marchés financiers et des placements en actions. Oui, cela freine notre économie.

Cependant, pour répondre à cette problématique, vous recourez toujours aux mêmes recettes : vous vous alignez sur les standards de la dérégulation internationale, espérant y trouver une source de compétitivité face aux autres grandes places financières, notamment face à Amsterdam.

Au contraire, la régulation est gage de sécurité pour les investisseurs et nous regrettons, tout comme M. le rapporteur, que cette proposition de loi ignore cette dimension de l’attractivité.

Même mieux encadré par les rapporteurs, dont nous saluons le travail, ce texte sera-t-il efficace ? Nous en doutons fortement. À part quelques mesures techniques et utiles, comme la simplification du fonctionnement des organes sociaux, la dématérialisation des activités de financement du commerce international ou encore l’élargissement du PEA-PME, ce texte nous laisse perplexes.

Nos préoccupations principales, soulevées lors de la première lecture au Sénat par mon collègue Rémi Féraud et moi-même, restent intactes.

L’article 1er, qui concerne les actions à droits de vote multiples, concentre nos inquiétudes. Le texte permet toujours l’octroi de vingt-cinq droits de vote pour une seule action, permettant un contrôle de la société avec seulement 4 % du capital !

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. C’est normal, il s’agit du fondateur !

Mme Florence Blatrix Contat. Nous aurions préféré instaurer une limite à dix droits de vote par action, comme le recommandait le Haut Comité juridique de la place financière de Paris, soutenu par l’AMF, et réserver ce dispositif aux seuls fondateurs et dirigeants.

D’ailleurs, certaines agences de conseil spécialisées en droits de vote annoncent qu’elles recommanderont de voter contre la réélection de certains administrateurs dans les sociétés adoptant une structure de droits de vote trop inégaux, notamment si la distorsion dépasse 10 %. Voilà, nous y sommes…

Nous regrettons que notre position, sur ce point essentiel, n’ait pas été entendue. La protection des épargnants est insuffisamment prise en compte dans ce texte. Dans votre quête de compétitivité, vous êtes tombés dans une surenchère qui se révélera contre-productive.

Un autre regret concerne l’article 2 et la possibilité pour les fonds communs de placement à risque (FCPR) d’accompagner les entreprises cotées jusqu’à une capitalisation boursière de 500 millions d’euros, contre 150 millions d’euros jusqu’à présent.

Nous craignons qu’une telle disposition ne favorise les grandes entreprises, à rebours de l’objectif visé.

Nous saluons néanmoins l’adoption des amendements que nous avons déposés, mon groupe et moi-même, amendements conservés en commission mixte paritaire.

Le premier amendement permet aux sociétés coopératives d’intérêt collectif (SCIC) de constituer une réserve de revalorisation des parts sociales, comme pour les sociétés coopératives de production (Scop) et autres coopératives ; cela facilitera l’accès des SCIC aux financements.

Le deuxième amendement vise à renforcer le financement des entreprises solidaires, en augmentant le plafond de la poche solidaire des fonds d’investissement à 15 %, en procédant à une harmonisation des règles.

Ces deux avancées étaient attendues par le monde de l’économie sociale et solidaire (ESS) ; nous nous en réjouissons.

À l’inverse, nous déplorons l’habilitation accordée au Gouvernement à légiférer par ordonnance, qui l’autorisera à transformer profondément notre droit financier, notamment le cadre juridique des organismes de placement collectif.

Pour toutes ces raisons, et bien que nous comprenions l’intérêt d’un renforcement de l’attractivité de la place financière de Paris et les besoins croissants de financement des entreprises, nous exprimons de fortes réserves et nous nous opposerons à ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE-K.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Claire Carrère-Gée, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Marie-Claire Carrère-Gée. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’Assemblée nationale et le Sénat sont donc parvenus à un accord, ce dont je me réjouis, du moins sur le principe.

Même si l’objet de ce texte est en effet très modeste, puisqu’il s’agit d’améliorer, dans un exercice de benchmark purement technique, la position relative de la place de Paris par rapport à ses concurrentes européennes ou américaines.

La mesure principale est la mise en place des droits de vote multiples, un dispositif qui existe aux États-Unis et qui permet aux fondateurs d’une entreprise de lever du capital tout en gardant un plus grand contrôle de leur entreprise.

Cela avait été envisagé dans le rapport du Haut Comité juridique de la place financière de Paris en septembre 2022, mais ce dernier souhaitait que ce dispositif soit encadré. C’est ce qu’a fait le Sénat, en améliorant l’équilibre entre le caractère attractif des droits de vote multiples et la garantie légitime des droits des actionnaires.

Le texte issu de la commission mixte paritaire a conservé les changements proposés par le Sénat. Les droits de vote multiples seront limités à vingt-cinq voix par action sur les plateformes multilatérales de négociation, mais illimités sur les marchés réglementés. La validité de ces actions de préférence ne pourra excéder une durée de dix ans.

Notre groupe se félicite aussi de la reprise, en commission mixte paritaire, d’un apport du Sénat permettant d’assouplir les critères d’éligibilité au PEA-PME des entreprises cotées ; cet outil est efficace, mais sous-utilisé.

Je citerai aussi le renforcement des dispositifs facilitant la consultation dématérialisée des organes sociaux, ainsi que des apports techniques qui encouragent la croissance des entreprises françaises à l’international grâce à la dématérialisation des titres transférables.

Sans prétendre à l’exhaustivité, j’aurai un dernier mot sur l’habilitation du Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance des mesures visant à réviser le cadre juridique des organismes de placement collectif.

Le Sénat avait tenu à réduire la durée d’habilitation et à en préciser le champ. Madame la ministre, la position du Sénat sur les habilitations à légiférer par ordonnance est très réservée, car il est plus que fâcheux que l’ordonnance soit devenue le principal mécanisme d’adoption de la loi.

Le premier quinquennat d’Emmanuel Macron a constitué un record, alors même que, au cours du mandat de François Hollande, le nombre d’ordonnances avait déjà doublé par rapport au quinquennat de Nicolas Sarkozy. C’est une évolution dangereuse, que rien ne justifie.

La commission mixte paritaire a conservé les précisions et garde-fous introduits par le Sénat, ce qui est un bon point.

Les apports du Sénat ayant été retenus pour l’essentiel, le groupe Les Républicains votera, sur la proposition de notre rapporteur Albéric de Montgolfier et de notre rapporteur général Jean-François Husson, cette proposition de loi.

Mais enfin ! Nous votons les conclusions d’un texte « visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France ». Quelle imposture ! Comment croire que ces quelques mesures techniques accroîtront véritablement le financement des entreprises et l’attractivité de la France ?

Madame la ministre, si vous aviez fait le choix d’un projet de loi sur le financement des entreprises et l’attractivité de la France, plutôt que celui d’une maigre proposition de loi téléguidée, une étude d’impact aurait recensé les enjeux véritables. À l’évidence, elle aurait aussi démontré le caractère si maigrelet des dispositions proposées.

Le défaut d’attractivité de la France, c’est le manque d’épargne longue pour financer les entreprises françaises et l’innovation. Là est l’enjeu de la démocratisation du capital-investissement, qui demeure balbutiant chez les particuliers épargnants.

Pour renvoyer à une actualité récente, qui va nous coller durablement aux pieds, ce défaut d’attractivité est aussi lié au manque de crédibilité des politiques économiques et budgétaires françaises, sanctionné ce week-end par Standard & Poor’s.

Tout cela est bien plus important pour garantir l’attractivité de la France et le financement des entreprises que le niveau des indemnités de licenciement des traders, si vous me permettez cette remarque.

Oui, nous voterons ce texte purement technique et accessoire, principalement parce que les apports du Sénat ont été retenus. Toutefois, cela n’ôte rien à la frustration qui est la nôtre de constater que si peu soit fait pour améliorer réellement les conditions de financement de toutes nos entreprises, quelle que soit leur taille, et pour améliorer l’attractivité de la France. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et RDPI.)

Mme Vanina Paoli-Gagin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je vous ai tous écoutés très attentivement. Je souhaiterais concentrer mon propos sur l’utilité de ces financements.

Comme vous le savez tous, la prospérité d’une nation dépend de sa capacité à mettre la science au service de l’industrie et son appareil productif au service de sa vision stratégique.

M. Jean-François Husson, au nom de la commission mixte paritaire. Bon début !

Mme Vanina Paoli-Gagin. Une industrie qui ne se nourrit pas de développements scientifiques et d’innovation se condamne à la sous-traitance ; et une économie de la sous-traitance, c’est une économie vulnérable et à faible valeur ajoutée.

Inversement, si la science ignore l’industrie, c’est-à-dire si tout l’écosystème de nos universités, instituts de recherche et organismes de valorisation n’est pas tourné vers le développement de nouveaux produits ou services, alors la France continuera de faire ce en quoi elle excelle : faire avancer la science grâce au financement public, en fournissant au monde entier des découvertes exploitées ailleurs que chez nous.

Voilà qui explique l’effondrement de notre balance commerciale : en 2000, l’excédent commercial de la France était de 20 milliards d’euros ; en 2022, le déficit est de 164 milliards d’euros. Cette catastrophe s’est déroulée au long cours et à bas bruit, à coups de délocalisations et de fuites des cerveaux.

Prenons l’exemple de la batterie au lithium, dont nous avions, grâce au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), l’antériorité sur le plan scientifique, mais qui fut brevetée par les Américains et industrialisée par ces derniers comme par la Chine. Nous finissons trop souvent par importer des produits issus de notre recherche que nous n’avons pas su exploiter chez nous.

Pour enrayer cette mécanique infernale, qui précipite notre pays sur la pente du décrochage industriel, le Gouvernement a engagé une politique volontariste et efficace de réindustrialisation, qu’il convient de saluer.

Aux yeux de l’élue du département de l’Aube que je suis, département qui a tant souffert des délocalisations, voilà la mère des batailles : en réindustrialisant, nous pourrons rétablir notre balance commerciale et nos finances publiques, diminuer nos dépendances systémiques, préserver la cohésion territoriale, éviter l’implosion sociale, et même – on peut toujours rêver… – atteindre notre fameux objectif de Lisbonne : consacrer 3 % de notre PIB aux dépenses de R&D.

En juin 2022, la mission d’information sur le thème « Excellence de la recherche/innovation, pénurie de champions industriels : cherchez l’erreur française », dont je fus rapporteur, identifiait le maillon faible de la chaîne de l’innovation : le financement.

Il est essentiel de renforcer nos capacités de financement pour que nos entreprises, singulièrement nos PME et start-up, disposent des fonds nécessaires au développement de solutions industrielles de rupture.

C’est stratégique ! Si une start-up industrielle, qui cherche des fonds massivement ou qui souhaite être cotée en bourse, ne trouve pas en France sa solution de financement, c’est l’ensemble de la chaîne de valeur qui nous échappe et qui part ailleurs, aux États-Unis, au Canada, en Chine, voire en Inde, pays qui tireront finalement le meilleur profit des deniers publics français investis en amont pour soutenir cette innovation.

La proposition de loi que nous allons adopter ce jour s’inscrit dans cette logique. Il s’agit d’un texte technique, mais c’est dans ces mécanismes financiers que se joue une large part de notre destin industriel.

Le groupe Les Indépendants – République et Territoires salue l’adoption de ce texte. Je tiens en particulier à remercier les rapporteurs, nos collègues Albéric de Montgolfier, pour la commission des finances, et Louis Vogel, pour la commission des lois, dont l’expertise a été très précieuse pour améliorer cette proposition de loi.

Sans entrer dans le détail de toutes les mesures, je voudrais simplement revenir sur deux d’entre elles, fruit d’amendements que j’ai soutenus avec mon groupe.

La première concerne l’éligibilité des bons de souscription d’actions au plan d’épargne en actions. C’est une mesure très attendue par l’écosystème des business angels et des investisseurs. Je me réjouis qu’elle figure dans le texte final.

La seconde mesure rend les sociétés de capital-risque éligibles au PEA-PME, aux unités de compte en assurance vie et aux plans d’épargne retraite. Elle a le même objectif : drainer l’épargne des Français vers le financement de l’innovation et vers la réindustrialisation de notre pays.

L’exemple du cercle vertueux californien est à cet égard révélateur : il faut proposer des outils qui incitent les entrepreneurs d’aujourd’hui à devenir les investisseurs de demain, pour arrimer l’expérience et le savoir-faire de ceux qui réussissent sur le territoire national. Tout ce qui encourage l’investissement dans l’innovation y contribue.

Vous l’aurez compris, notre groupe voit dans ce texte d’apparence austère une étape de plus sur le chemin de la réindustrialisation de la France, et donc d’une économie plus prospère. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Michel Canévet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le groupe Union Centriste se félicite que la commission mixte paritaire ait pu aboutir à un accord, mardi dernier, sur ce texte. Issu de l’Assemblée nationale, il a été très sérieusement retravaillé, ici, au Sénat, par le rapporteur de la commission des finances, M. Albéric de Montgolfier, ainsi que par le rapporteur pour avis de la commission des lois, M. Louis Vogel, qui a su apporter son expertise sur ces sujets extrêmement importants que constituent le renforcement de l’attractivité de la France et le financement des entreprises.

Si ce n’est pas le Grand Soir attendu, néanmoins, la politique des petits pas nous fait avancer vers un renforcement de l’attractivité de la France. Aussi, ne boudons pas notre plaisir de voir les choses évoluer.

La situation a effectivement évolué depuis plusieurs années. Il y a un peu plus de cinq ans, madame la ministre, vous présidiez, à l’Assemblée nationale, la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises, devenu la loi Pacte du 22 mai 2019, tandis que M. Husson était rapporteur de ce texte au Sénat, texte qui avait pour ambition de simplifier la vie des entreprises et d’encourager leur croissance. Beaucoup a été fait depuis lors pour que les entreprises se développent mieux dans notre pays.

D’autres efforts ont été réalisés, comme la mise en place du prélèvement forfaitaire unique à 30 %. La fiscalité des plus-values et de l’épargne était parfois confiscatoire, allant jusqu’à 60 %. Disposer d’une politique fiscale identifiable et stable était important.

Il en est de même de l’impôt sur les sociétés : établi à un niveau bien plus élevé que dans la plupart des pays de l’OCDE, il fallait qu’il revienne à un niveau comparable à celui des autres grandes puissances. Nous nous félicitons que son taux soit aujourd’hui fixé à 25 %.

À la suite du Brexit, dans la compétition pour devenir la première place financière européenne, compétition remportée auparavant par Londres, le gouvernement français a beaucoup fait pour que la place de Paris devienne incontournable en Europe. Voilà qui est crucial. Les conséquences sont nombreuses. En premier lieu, les capitaux autrefois investis à l’étranger sont revenus en France. Le renforcement de la place financière de Paris y a contribué.

Si Paris occupe désormais une place incontournable, il nous faut continuer à renforcer ses atouts si nous ne voulons pas qu’elle soit supplantée par d’autres capitales européennes. Notre autorité de régulation, l’Autorité des marchés financiers, est particulièrement pertinente et agile. Elle réalise un excellent travail, comme a pu le constater la commission des finances du Sénat.

Si ce texte, je le répète, n’est pas le Grand Soir, un certain nombre de mesures feront que les entreprises françaises pourront s’aligner sur le droit en vigueur dans d’autres pays, ce afin d’éviter les délocalisations. Grâce à des mesures de simplification, notamment en matière de dématérialisation, les entreprises pourront s’adapter à leur temps ; il est notamment souhaitable que des assemblées générales ou des titres soient dématérialisés, afin que l’économie gagne en efficacité et que l’on gagne du temps.

L’apport du Sénat au sujet des preneurs de risques est notable : nous éviterons les abus, ce qui constitue un facteur d’attractivité pour les principaux investisseurs financiers dans notre pays. Le compromis trouvé en commission mixte paritaire va dans le bon sens.

Le groupe Union Centriste est persuadé que ces mesures attireront plus de financements vers les entreprises et rendront celles-ci plus compétitives. Surtout, elles encourageront leur développement. Nous voterons en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDPI et INDEP. – M. Roger Karoutchi applaudit également.)

M. le président. Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par les amendements précédemment adoptés par le Sénat.

(La proposition de loi est adoptée.)

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante-huit, est reprise à dix-huit heures.)

M. le président. La séance est reprise.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : proposition de loi visant à accroître le financement des entreprises et l'attractivité de la France
 

4

 
Dossier législatif : proposition de loi visant à prévenir les ingérences étrangères en France
Examen des conclusions d'une commission mixte paritaire

Ingérences étrangères en France

Adoption des conclusions modifiées d’une commission mixte paritaire sur une proposition de loi

Discussion générale
Dossier législatif : proposition de loi visant à prévenir les ingérences étrangères en France
Article 1er

M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à prévenir les ingérences étrangères en France (texte de la commission n° 647, rapport n° 646).

La parole est à Mme le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Agnès Canayer, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je me réjouis que nous soyons réunis aujourd’hui pour examiner le texte établi par la commission mixte paritaire sur cette proposition de loi visant à prévenir les ingérences étrangères en France.

Force est en effet de constater que le parcours législatif de ce texte aura été particulièrement rapide : adopté par l’Assemblée nationale le 27 mars 2024, il l’a également été par notre assemblée le 22 mai ; et nous voici d’ores et déjà réunis pour achever ce cheminement législatif notablement célère.

L’on ne peut que s’en féliciter au regard des lacunes de notre droit que ce texte a pour objet de combler. Vous ne serez dès lors guère étonnés, mes chers collègues, que, sur un texte aux objectifs si largement partagés, la commission mixte paritaire soit arrivée à un compromis, dont je vais rapidement vous présenter les termes.

Nous sommes en effet parvenus à un résultat équilibré et raisonnable.

Nous avions, au Sénat, approuvé l’ensemble des mesures qui étaient préconisées dans le rapport de la délégation parlementaire au renseignement pour l’année 2022-2023, qui était consacré au sujet des ingérences étrangères, à savoir la création, sur le modèle du Fara (Foreign Agents Registration Act) américain, d’un registre des activités d’influence étrangère, afin de favoriser la transparence en ce domaine ; l’amélioration de l’information du Parlement quant à l’état de la menace en matière d’ingérence étrangère ; l’expérimentation de l’extension à deux nouvelles finalités de la technique dite de l’algorithme ; l’élargissement aux ingérences étrangères de la procédure du gel des avoirs.

Nos divergences avec l’Assemblée nationale portaient principalement sur trois points à propos desquels nous sommes arrivés à nouer un compromis.

En premier lieu, nous avions choisi, contrairement à l’Assemblée nationale, d’autonomiser le registre nouvellement créé, spécifique aux influences, de celui qui fut instauré par la loi du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite loi Sapin 2, pour les représentants d’intérêts et d’en repousser l’entrée en vigueur au 31 décembre 2025, afin de laisser le temps aux acteurs, principalement la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), de déployer les outils nécessaires au contrôle.

Si l’Assemblée nationale a compris nos arguments quant à la nécessité d’étanchéifier les deux registres afin de renforcer l’effet signal de chacun d’eux, elle a souhaité ne pas retarder à la fin de l’année 2025 l’entrée en vigueur du dispositif. Nous avons donc trouvé un compromis et tranché pour une date d’entrée en vigueur fixée au 1er juillet 2025, laissant plus d’une année aux acteurs pour se mettre en ordre de marche.

En deuxième lieu, le Sénat avait réduit aux seules finalités préventives la mesure de gel des avoirs de l’article 4 de la proposition de loi, par crainte d’une censure constitutionnelle en cas d’application d’une mesure administrative, en lieu et place d’une sanction pénale, à des entités commettant des actes d’ingérence étrangère. Nous avons maintenu la restriction du dispositif à sa seule nature administrative et donc préventive, tout en acceptant les demandes de l’Assemblée nationale d’élargir le champ des comportements ainsi visés par des mesures préventives.

En troisième lieu, le Sénat a choisi d’enrichir le texte de l’Assemblée nationale par trois dispositifs, qui ont tous été retenus par la commission mixte paritaire.

Avec le soutien de plusieurs groupes politiques et en nous appuyant sur une recommandation du rapport de l’OCDE en la matière, nous avons souhaité permettre à la HATVP de renforcer le contrôle des mobilités entre le public et le privé qu’elle exerce aujourd’hui en matière de conflits d’intérêts et de l’étendre aux risques d’influence étrangère. Nous avons en effet considéré qu’elle pourrait utilement mettre à profit les informations du répertoire nouvellement créé pour émettre des avis quant aux risques induits par certaines mobilités d’anciens membres du gouvernement ou d’exécutifs locaux.

Nous avons également souhaité prévoir, en la matière, un contrôle plus long que celui qui existe pour les conflits d’intérêts, prenant acte de ce que les modes opératoires des puissances étrangères se rendant coupables d’ingérences s’inscrivent dans la durée.

Par ailleurs, nous avions adopté un amendement de notre collègue Jean-Baptiste Lemoyne sous-amendé par Sophie Primas visant à traduire les recommandations d’une mission d’information sénatoriale portant sur l’organisation de l’intelligence économique en France. Une partie de cet amendement a été maintenue par la commission mixte paritaire, ce qui permettra la tenue au Parlement d’un débat annuel sur l’intelligence économique et l’amélioration du contenu du rapport traitant de ce sujet remis chaque année aux présidents des commissions chargées des affaires économiques et aux rapporteurs généraux des commissions chargées des finances de chaque assemblée.

Les autres dispositions visant à renforcer les pouvoirs d’investigation octroyés à ces mêmes acteurs souffraient de risques juridiques trop importants, notamment sur le plan constitutionnel, pour faire l’objet d’un consensus.

Sous le bénéfice de ces observations, je vous invite, mes chers collègues, à adopter ce texte de compromis que nous vous soumettons. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et RDPI. – M. Claude Malhuret applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Prisca Thevenot, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie d’excuser mon collègue Jean-Noël Barrot, actuellement retenu par des engagements diplomatiques.

Je tiens à saluer le travail mené par le Parlement, et plus spécifiquement par le Sénat, sur la question des ingérences étrangères.

Je remercie les rapporteurs de ce texte, Agnès Canayer et Claude Malhuret, ainsi que les membres des commissions des lois et des affaires étrangères.

Je tiens à souligner également devant vous l’intérêt des travaux conduits en ce moment même par la commission d’enquête sénatoriale sur les politiques publiques face aux opérations d’influences étrangères, présidée par Dominique de Legge et dont Rachid Temal est le rapporteur.

La manipulation de l’information menace nos démocraties. L’instantanéité et la vitesse de propagation des fausses informations brouillent l’opinion publique, qui ne se forme plus de la même manière désormais : les citoyens sont noyés dans un volume de fausses informations qui se propagent à vitesse grand V. La radicalité en sort grande gagnante et nos démocraties en pâtissent.

Les adversaires de la démocratie – de nos démocraties – l’ont bien compris : les fausses informations sont devenues des armes, que certains n’hésitent d’ailleurs pas à utiliser à des fins électorales.

La difficulté qui persiste est la suivante : non seulement la parole publique est discréditée, mais les discours radicaux, les approximations et les mensonges sont de plus en plus nombreux et touchent le plus grand nombre.

Dans ce contexte, il est plus que jamais important de mettre tous nos efforts au service de la lutte contre les ingérences étrangères et de trouver en la matière des solutions concrètes qui soient à la hauteur des attentes de nos concitoyens.

Le Gouvernement combat depuis déjà plusieurs années les fausses informations et les ingérences étrangères.

Dès 2018, nous avons fait voter la loi relative à la lutte contre la manipulation de l’information, qui oblige les plateformes en ligne à coopérer dans le cadre de la lutte contre les fausses informations et qui a élargi les pouvoirs de modération de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom).

La création en 2021 de Viginum, service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères, a permis notamment de mettre au jour l’opération « Portal Kombat » montée par les Russes. Près de 200 sites internet créés pour diffuser de fausses informations avant les élections européennes ont ainsi pu être identifiés.

Nous agissons à l’échelle européenne également : l’adoption du DSA (Digital Services Act), le règlement sur les services numériques, oblige les grandes plateformes à faire la lumière sur leurs systèmes de recommandation de contenus à leurs utilisateurs.

En mars 2024 est par ailleurs entrée en vigueur la législation européenne sur l’intelligence artificielle (IA Act), qui impose aux logiciels de deepfake d’indiquer, le cas échéant, que le contenu a été généré ou manipulé artificiellement.

La présente proposition de loi s’inscrit en complément de ce travail mené par le Gouvernement depuis quelques années pour renforcer notre action en ce domaine et, ce faisant, la protection des citoyens.

Ainsi l’article 1er prévoit-il la création d’un registre pour la « transparence des activités d’influence réalisées pour le compte d’un mandant étranger » placé sous la responsabilité de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Concrètement, cela permettra de définir les activités d’influence, ce dispositif étant strictement circonscrit aux personnes agissant pour le compte de puissances étrangères. Je remercie d’ailleurs Mme la rapporteure de l’avoir enrichi en commission.

Le deuxième volet majeur de cette proposition de loi a pour objet de lutter contre les tentatives d’ingérences étrangères, qui sont par définition, quant à elles, malveillantes et illégales. Cette lutte nécessite de mettre en œuvre des moyens de détection pour identifier les manœuvres informationnelles et des dispositifs de traitement pour dissuader les auteurs de tels agissements.

Le présent texte y ajoute deux nouveaux chapitres. Tout d’abord, l’article 3 permet à nos services de renseignement de mobiliser des techniques algorithmiques de traitement de données en source ouverte dans le but de défendre « l’indépendance nationale, l’intégrité du territoire et la défense nationale » ainsi que « les intérêts majeurs de la politique étrangère, l’exécution des engagements européens et internationaux de la France et la prévention de toute forme d’ingérence étrangère ».

Le Gouvernement salue également le vote du Sénat qui a introduit dans le texte, sur proposition de la rapporteure, un article ouvrant la voie à un doublement des peines prononcées contre ceux qui attaquent des biens ou des personnes pour le compte d’une puissance étrangère. Voilà une mesure concrète qui pourra être mise en œuvre rapidement en tant que de besoin.

Dans un contexte où la démocratie est attaquée de l’intérieur comme de l’extérieur, il est crucial que nous renforcions l’arsenal dont nous disposons pour faire face aux tentatives d’influence et d’ingérence étrangères.

En conclusion, je remercie encore une fois les rapporteurs, les commissaires et l’ensemble des sénateurs de tous les groupes qui se sont investis dans l’examen de cette proposition de loi. Le Gouvernement, en lien avec les rapporteurs des deux chambres, présentera plusieurs amendements rédactionnels.

Mesdames, messieurs les sénateurs, j’espère que ces amendements comme l’ensemble du texte recevront votre approbation, s’agissant de dispositions extrêmement importantes eu égard aux menaces extérieures. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi quau banc des commissions.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Monsieur le président, pour des raisons qui sont essentiellement techniques, je sollicite une suspension de séance de quelques minutes avant que nous n’abordions l’examen des amendements du Gouvernement.

M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures onze, est reprise à dix-huit heures vingt.)

M. le président. La séance est reprise.

Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, aucun amendement n’est recevable, sauf accord du Gouvernement ; en outre, le Sénat étant appelé à se prononcer avant l’Assemblée nationale, il statue d’abord sur les éventuels amendements, puis, par un seul vote, sur l’ensemble du texte.

Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

proposition de loi visant à prévenir les ingérences étrangères en france

Examen des conclusions d'une commission mixte paritaire
Dossier législatif : proposition de loi visant à prévenir les ingérences étrangères en France
Article 1er bis A

Article 1er

I. – La loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique est ainsi modifiée :

1° Après la section 3 bis du chapitre Ier, est insérée une section 3 ter ainsi rédigée :

« Section 3 ter

« Transparence des activités dinfluence réalisées pour le compte dun mandant étranger

« Art. 18-11 et 18-12. – (Supprimés)

« Art. 18-12-1. – I. – Sont tenues de déclarer leurs activités d’influence auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, dans les conditions fixées par la présente section, les personnes physiques ou morales exerçant, sur l’ordre, à la demande ou sous la direction ou le contrôle d’un mandant étranger mentionné au II et aux fins de promouvoir les intérêts de ce dernier, une ou plusieurs actions destinées à influer sur la décision publique, notamment sur le contenu d’une loi, d’un acte réglementaire ou d’une décision individuelle, ou sur la conduite des politiques publiques nationales et de la politique européenne ou étrangère de la France, en :

« 1° Entrant en communication avec une ou plusieurs des personnes suivantes, à l’initiative de ces personnes ou de sa propre initiative :

« a) Un membre du Gouvernement, ou un membre de cabinet ministériel ;

« b) Un député, un sénateur, un collaborateur d’un député, d’un sénateur ou d’un groupe parlementaire, ainsi qu’avec les agents des services des assemblées parlementaires ;

« c) Un ancien président de la République, un ancien membre du Gouvernement, un ancien député ou un ancien sénateur, pendant une période de cinq ans suivant la fin de leur mandat ou la cessation de leurs fonctions ;

« d) Un collaborateur du Président de la République ;

« e) Le directeur général, le secrétaire général, ou leur adjoint, ou un membre du collège ou d’une commission investie d’un pouvoir de sanction d’une autorité administrative indépendante ou d’une autorité publique indépendante mentionnée au 6° du I de l’article 11 ;

« f) Une personne titulaire d’un emploi ou d’une fonction mentionné au 7° du même I ;

« g) Les titulaires d’une fonction de président de conseil régional, de président de l’Assemblée de Corse, de président du conseil exécutif de Corse, de président de l’assemblée de Guyane, de président de l’assemblée de Martinique, de président du conseil exécutif de Martinique, de président d’une assemblée territoriale d’outre-mer, de président de conseil départemental, de président du conseil de la métropole de Lyon, de président élu d’un exécutif d’une collectivité d’outre-mer, de maire d’une commune de plus de 20 000 habitants ou de président élu d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la population excède 20 000 habitants ou dont le montant des recettes totales de fonctionnement figurant au dernier compte administratif est supérieur à 5 millions d’euros ainsi que les présidents des autres établissements publics de coopération intercommunale dont le montant des recettes totales de fonctionnement figurant au dernier compte administratif est supérieur à 5 millions d’euros ;

« g bis) Les conseillers régionaux, les conseillers à l’assemblée de Guyane, les conseillers à l’assemblée de Martinique, les conseillers exécutifs de Martinique, les conseillers exécutifs de Corse, les conseillers départementaux, les adjoints aux maires des communes de plus de 20 000 habitants et les vice-présidents des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 20 000 habitants et du conseil de la métropole de Lyon lorsqu’ils sont titulaires d’une délégation de fonction ou de signature, respectivement, du président du conseil régional, du président du conseil exécutif, du président du conseil départemental, du maire, du président de l’établissement public de coopération intercommunale ou du président du conseil de la métropole de Lyon, dans les conditions fixées par la loi. Les délégations de fonction ou de signature sont notifiées sans délai par l’exécutif de chaque collectivité territoriale ou établissement public de coopération intercommunale au président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique ;

« g ter) Les directeurs, directeurs adjoints et chefs de cabinet des autorités territoriales mentionnées au g ;

« h) Un agent public occupant un emploi mentionné à l’article L. 122-10 du code de la fonction publique ;

« i) Un candidat déclaré aux élections présidentielles, législatives, sénatoriales ou européennes, à compter de la publication officielle des listes des candidats déclarés ;

« j) Les dirigeants d’un parti ou groupement politique bénéficiant de la première fraction de l’aide attribuée en application de l’article 8 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique ;

« 2° Réalisant toute action de communication à destination du public ;

« 3° Collectant des fonds ou procédant au versement de fonds sans contrepartie.

« Sont également tenues de déclarer leurs activités dans les conditions prévues à la présente section les personnes mentionnées aux 2° et 3° du II du présent article qui exercent une ou plusieurs des activités mentionnées aux 1° à 3° du présent I aux fins de promouvoir leurs intérêts ou ceux d’une puissance étrangère mentionnée au 1° du II.

« II. – Sont des mandants étrangers, au sens de la présente section :

« 1° Les puissances étrangères, à l’exclusion des États membres de l’Union européenne ;

« 2° Les personnes morales qui sont directement ou indirectement dirigées ou contrôlées par une puissance étrangère mentionnée au 1° ou qui sont financées pour plus de la moitié par une telle puissance étrangère ;

« 3° Les partis et les groupements politiques étrangers, à l’exclusion de ceux issus des États membres de l’Union européenne.

« III. – Ne sont pas des personnes tenues de déclarer leurs activités au sens de la présente section les membres du personnel diplomatique et consulaire en poste en France dûment habilités ainsi que les membres et les agents d’un État étranger, lorsqu’ils agissent dans l’exercice de leurs fonctions.

« Art. 18-13. – I. – Toute personne agissant pour le compte d’un mandant étranger tenue de déclarer ses activités en application de la présente section communique à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, par l’intermédiaire d’un téléservice, les informations suivantes :

« 1° Son identité, lorsqu’il s’agit d’une personne physique, ou celle de ses dirigeants et des personnes physiques chargées des activités d’influence en son sein, lorsqu’il s’agit d’une personne morale ;

« 2° Le nom et l’adresse de chacun des mandants étrangers pour le compte desquels elle agit ;

« 3° Le contenu de l’accord ou la nature du lien entre la personne agissant pour le compte d’un mandant étranger et le mandant étranger ;

« 4° Le nombre de personnes employées dans l’accomplissement des activités mentionnées au I de l’article 18-12-1 et, le cas échéant, le chiffre d’affaires généré par ces activités sur l’année précédente ;

« 5° Les actions réalisées, notamment :

« a) S’agissant des activités mentionnées au 1° du même I, les actions d’influence menées auprès des personnes mentionnées au même 1°, en précisant notamment la fonction des personnes contactées, l’intitulé, l’objet ou la référence de la décision publique concernée et le type d’actions menées ainsi que le montant des dépenses liées à ces actions durant l’année précédente ;

« b) S’agissant des activités mentionnées au 2° dudit I, la liste des actions de communication réalisées et les informations communiquées ;

« c) S’agissant des activités mentionnées au 3° du même I, la liste des opérations de collecte de fonds et des personnes bénéficiaires des versements opérés, le cas échéant.

« I bis. – Les informations mentionnées au I sont recensées au sein d’un répertoire numérique, rendu public par la Haute Autorité et placé sous son contrôle. Ce répertoire est commun à la Haute Autorité, à l’Assemblée nationale et au Sénat pour la mise en œuvre des règles du répertoire. Sa publication s’effectue dans un format ouvert librement utilisable et exploitable par un système de traitement automatisé, dans les conditions prévues au titre II du livre III du code des relations entre le public et l’administration.

« II. – Toute personne agissant pour le compte d’un mandant étranger tenue de déclarer ses activités en application de la présente section communique à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, dans un délai de quinze jours ouvrés à compter de la date à laquelle les conditions définies à l’article 18-12-1 sont remplies, les informations mentionnées aux 1° à 3° du I du présent article.

« La personne tenue de déclarer ses activités en application de la présente section communique ensuite l’ensemble des informations mentionnées au même I dans un délai d’un mois à la fin de chaque trimestre civil, à l’exception du chiffre d’affaires mentionné au 4° et du montant des dépenses mentionnées au 5° du I du présent article, qui sont communiqués dans un délai de trois mois à compter de la clôture de son exercice comptable.

« Art. 18-13-1. – Les règles applicables aux personnes menant des activités d’influence pour le compte d’un mandant étranger au sein de chaque assemblée parlementaire sont déterminées et mises en œuvre dans les conditions prévues à l’article 4 quinquies de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires.

« Art. 18-13-2. – Dans leurs relations avec les personnes mentionnées aux a et c à j du 1° du I de l’article 18-12-1, les personnes tenues de déclarer leurs activités :

« 1° Déclarent leur identité, l’organisme pour lequel elles travaillent et les intérêts ou entités qu’elles représentent ;

« 2° S’abstiennent de proposer ou de remettre à ces personnes des présents, dons ou avantages quelconques d’une valeur significative ;

« 3° S’abstiennent de toute incitation à l’égard de ces personnes à enfreindre les règles déontologiques qui leur sont applicables.

« Art. 18-14. – La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique s’assure du respect des obligations prévues aux articles 18-13 et 18-13-2. À cette fin, elle peut, à son initiative ou à la suite d’un signalement, mettre en demeure toute personne à l’égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser qu’elle entre dans le champ des personnes soumises à déclaration en application du I de lui communiquer, dans un délai d’un mois, tout information ou tout document nécessaire à l’exercice de sa mission, sans que le secret professionnel puisse lui être opposé. Elle peut, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, également procéder à des vérifications sur place dans les locaux professionnels de ces personnes, sur autorisation du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris et en présence d’un officier de police judiciaire, lors desquelles ses agents peuvent exiger la communication et obtenir ou prendre copie, par tout moyen et sur tout support, des documents professionnels de toute nature, entre quelques mains qu’ils se trouvent, propres à faciliter l’accomplissement de leur mission.

« Elle peut demander aux personnes mentionnées aux a et c à j du 1° du I de l’article 18-12-1, directement ou par l’intermédiaire de leur référent en matière de déontologie, de lui communiquer la liste des personnes tenues de déclarer les informations mentionnées à l’article 18-13 avec lesquels elles sont entrées en communication.

« La Haute autorité peut également être saisie par les personnes mentionnées au 1° du I de l’article 18-12-1 sur la qualification à donner, au regard du même I, à l’activité d’une personne physique ou morale. La Haute Autorité ou, par délégation, son président rend son avis dans un délai de deux mois à compter de la réception, par la Haute autorité, des informations dont elle a sollicité la communication auprès de la personne physique ou morale en cause. Ce délai peut être prolongé de deux mois par décision de son président, après qu’il a informé l’auteur de la saisine.

« Lorsqu’elle constate un manquement aux obligations prévues aux articles 18-13 et 18-13-2, elle :

« 1° Adresse à la personne tenue de déclarer ses activités, après l’avoir mis en état de présenter ses observations, une mise en demeure, qu’elle peut rendre publique, de respecter les obligations auxquelles elle est assujettie ;

« 2° Le cas échéant, avise du manquement constaté la personne mentionnée aux a et c à j du 1° du I de l’article 18-12-1 qui a été en communication avec une personne mentionnée au 1° du présent article et peut lui adresser des observations, sans les rendre publiques.

« Lorsque la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique constate qu’une personne tenue de déclarer les informations mentionnées à l’article 18-13 ne s’est pas conformée à la mise en demeure prononcée en application du présent article au terme d’un délai de deux mois, elle peut prononcer une astreinte dont le montant maximal est fixé à 1 000 euros par jour, qu’elle peut rendre publique.

« Art. 18-15. – Le fait, pour une personne tenue de déclarer ses activités en application de la présente section, de ne pas communiquer, de sa propre initiative ou à la demande de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, les informations qu’elle est tenue de communiquer à cette dernière en application de l’article 18-13 est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.

« Les personnes morales déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues à l’article 121-2 du code pénal, de l’infraction définie au premier alinéa du présent article encourent, outre l’amende suivant les modalités prévues à l’article 131-38 du code pénal, les peines prévues aux 5°, 7° à 9° et 12° de l’article 131-39 du même code.

« Art. 18-16. – Lorsqu’une personne physique ou morale remplit simultanément les conditions pour être qualifiée de représentant d’intérêts, au sens de l’article 18-2, et pour être tenue de déclarer ses activités en application de la présente section, et qu’elle s’est régulièrement acquittée des obligations prévues à la présente section, les obligations prévues à la section 3 bis du présent chapitre sont réputées remplies au titre des seules actions qu’elle a régulièrement déclarées.

« Lorsqu’une personne physique ou morale qui remplit simultanément les conditions pour être qualifiée de représentant d’intérêts, au sens de l’article 18-2, et pour être tenue de déclarer les informations mentionnées à l’article 18-13, ne s’est pas régulièrement acquittée des obligations prévues à la présente section, les manquements constatés ne peuvent être réprimés que sur le fondement de l’article 18-15.

« Art. 18-17. – Un décret en Conseil d’État, pris après avis public de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique et de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, définit les modalités de mise en œuvre de la présente section.

« Ce décret précise notamment :

« 1° Les modalités des communications prévues à l’article 18-13 ainsi que les conditions de publication des informations correspondantes ;

« 2° Les modalités de présentation des activités d’influence. » ;

2° À la seconde phrase du 5° du I de l’article 20, après la référence : « 18-2, », sont insérés les mots : « les relations avec les personnes tenues de déclarer ses activités en application de la section 3 ter du présent chapitre, ».

II. – L’article 4 quinquies de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires est ainsi modifié :

1° à 4° (Supprimés)

5° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Le présent article est également applicable aux personnes tenues de déclarer les informations mentionnées à l’article 18-13 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique qui entrent en communication avec les personnes mentionnées au b du 1° du I de l’article 18-12-1 de la même loi. »

III. – Entrent en vigueur :

1° Le premier jour du sixième mois suivant la publication du décret prévu à l’article 18-17 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, et au plus tard le 1er juillet 2025, les articles 18-12-1 et 18-13 et 18-13-2 à 18-17 de la même loi ainsi que le 2° du I du présent article ;

2° Le 1er juillet 2025, l’article 18-13-1 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 précitée et le II du présent article.

Article 1er
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Article 1er bis

Article 1er bis A

La loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique est ainsi modifiée :

1° La première phrase de l’article 1er est complétée par les mots : « ou tout risque d’influence étrangère » ;

2° Après le 6° du I de l’article 20, il est inséré un 6° bis ainsi rédigé :

« 6° bis Elle répond aux demandes d’avis des personnes mentionnées aux a et c à j du 1° du I de l’article 18-12-1 sur les questions relatives à leurs relations avec des personnes menant des activités d’influence étrangère et au répertoire prévu au même article 18-12-1 ; »

3° Le premier alinéa du I de l’article 23 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque ce contrôle est exercé au regard d’un risque d’influence étrangère, ce délai est porté à cinq ans. »

Article 1er bis A
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Article 2

Article 1er bis

I. – Les organismes mentionnés à l’article 222 bis du code général des impôts qui réalisent des analyses ou des expertises sur tout sujet en lien avec une politique publique nationale ou en matière de politique étrangère ainsi que les établissements éducatifs publics à but non lucratif œuvrant avec un partenaire étranger et ayant pour vocation la diffusion d’une langue étrangère et la promotion des échanges culturels sont tenus de transmettre à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique la liste des dons et des versements reçus de la part de toute puissance étrangère ou de toute personne morale étrangère extérieures à l’Union européenne.

II. – Un décret en Conseil d’État, pris après avis public de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, précise les conditions d’application du I du présent article.

Il précise notamment les conditions dans lesquelles ces informations peuvent être rendues publiques ainsi que le montant des avantages et ressources à partir duquel s’applique l’obligation de transmission prévue au premier alinéa.

Article 1er bis
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Article 2 bis

Article 2

Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er juillet de l’année qui suit celle de la promulgation de la présente loi, puis tous les deux ans, un rapport sur l’état des menaces qui pèsent sur la sécurité nationale. Ce rapport, qui fait état des menaces résultant d’ingérences étrangères, peut faire l’objet d’un débat à l’Assemblée nationale et au Sénat.

Article 2
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Article 3

Article 2 bis

Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° L’article L. 151-6 est complété par une phrase ainsi rédigée : « La publication annuelle de ces données peut donner lieu à un débat à l’Assemblée nationale et au Sénat. » ;

2° L’article L. 151-7 est ainsi modifié :

a) Le I est ainsi modifié :

– au 1°, après les mots : « de sécurité », le mot : « économique » est remplacé par les mots : « et d’intelligence économiques » ;

b) (Supprimé)

Article 2 bis
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Article 4

Article 3

I. – L’article L. 851-3 du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa du I est ainsi modifié :

a) Les mots : « seuls besoins de la prévention du terrorisme » sont remplacés par les mots : « seules finalités prévues aux 1°, 2° et 4° de l’article L. 811-3 » ;

b) À la fin, les mots : « une menace terroriste » sont remplacés par les mots : « des ingérences étrangères, des menaces pour la défense nationale ou des menaces terroristes » ;

2° À la première phrase du premier alinéa et au second alinéa du IV, les mots : « à caractère terroriste » sont supprimés.

II. – À compter du 1er juillet 2028, l’article L. 851-3 du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa du I est ainsi modifié :

a) Les mots : « seules finalités prévues aux 1°, 2° et 4° de l’article L. 811-3 » sont remplacés par les mots : « seuls besoins de la prévention du terrorisme » ;

b) À la fin, les mots : « des ingérences étrangères, des menaces pour la défense nationale ou des menaces terroristes » sont remplacés par les mots : « une menace terroriste » ;

2° À la première phrase du premier alinéa et au second alinéa du IV, après le mot : « menace », sont insérés les mots : « à caractère terroriste ».

III. – Le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’application du présent article au plus tard deux ans avant l’expiration du délai prévu au II. Une version de ce rapport comportant les exemples de mise en œuvre des algorithmes est transmise à la délégation parlementaire au renseignement.

Au plus tard six mois avant la date fixée au II, un rapport présentant le bilan de l’application du présent article est transmis au Parlement. Une version de ce rapport comportant les exemples de mise en œuvre des algorithmes est transmise à la délégation parlementaire au renseignement.

Article 3
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Article 4 bis

Article 4

Le chapitre II du titre VI du livre V du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Après le 1° de l’article L. 562-1, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :

« 1° bis “Acte d’ingérence” : agissement commis directement ou indirectement à la demande ou pour le compte d’une puissance étrangère et ayant pour objet ou pour effet, par tout moyen, y compris la communication d’informations fausses ou inexactes, de porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation, au fonctionnement ou à l’intégrité de ses infrastructures essentielles ou au fonctionnement régulier de ses institutions démocratiques ; »

2° (Supprimé)

3° Après l’article L. 562-2, il est inséré un article L. 562-2-1 ainsi rétabli :

« Art. L. 562-2-1. – Aux seules fins de prévenir la commission d’actes d’ingérence, le ministre chargé de l’économie et le ministre de l’intérieur peuvent décider, conjointement, pour une durée de six mois, renouvelable, le gel des fonds et ressources économiques :

« 1° Qui appartiennent à, sont possédés, détenus ou contrôlés par des personnes physiques ou morales, ou toute autre entité qui commettent, tentent de commettre, facilitent ou financent des actes d’ingérence, y incitent ou y participent ;

« 2° Qui appartiennent à, sont possédés, détenus ou contrôlés par des personnes morales ou toute autre entité elles-mêmes détenues ou contrôlées par les personnes mentionnées au 1° ou agissant sciemment pour le compte ou sur instructions de celles-ci. »

Article 4
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Article 5

Article 4 bis

I. – Le chapitre Ier du titre Ier du livre IV du code pénal est complété par une section 7 ainsi rédigée :

« Section 7

« Des atteintes aux biens et aux personnes commises pour le compte dune puissance étrangère

« Art. 411-12. – Lorsqu’un crime ou un délit prévu au titre II du livre II ou au titre Ier et aux chapitres II et III du titre II du livre III du présent code est commis dans le but de servir les intérêts d’une puissance étrangère, d’une entreprise ou d’une organisation étrangère, ou sous contrôle étranger, le maximum de la peine privative de liberté est relevé ainsi qu’il suit :

« 1° Il est porté à la réclusion criminelle à perpétuité lorsque l’infraction est punie de trente ans de réclusion criminelle ;

« 2° Il est porté à trente ans de réclusion criminelle lorsque l’infraction est punie de vingt ans de réclusion criminelle ;

« 3° Il est porté à vingt ans de réclusion criminelle lorsque l’infraction est punie de quinze ans de réclusion criminelle ;

« 4° Il est porté à quinze ans de réclusion criminelle lorsque l’infraction est punie de dix ans d’emprisonnement ;

« 5° Il est porté à dix ans d’emprisonnement lorsque l’infraction est punie de sept ans d’emprisonnement ;

« 6° Il est porté à sept ans d’emprisonnement lorsque l’infraction est punie de cinq ans d’emprisonnement ;

« 7° Il est porté au double lorsque l’infraction est punie de trois ans d’emprisonnement au plus. »

II. – Le livre IV du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° A (nouveau) Le deuxième alinéa de l’article 702 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, après le mot : « pénal », sont insérés les mots : « , ou une infraction mentionnée à l’article 411-12 du même code, commise dans le but de servir les intérêts d’une puissance étrangère, d’une entreprise ou d’une organisation étrangère, ou sous contrôle étranger, » ;

b) À la seconde phrase, les mots : « selon les modalités déterminées aux articles 628-1 à 628-6 et » sont remplacés par les mots : « composée et organisée selon les dispositions de l’article » ;

1° AB (nouveau) Au premier alinéa de l’article 706-72, les mots : « 411-9 du code pénal » sont supprimés et après le mot : « informations, », sont insérés les mots : « les infractions mentionnées à l’article 411-9 ou aggravées par la circonstance prévue à l’article 411-12 du code pénal, » ;

1° Le 11° bis de l’article 706-73 est complété par les mots : « et crimes mentionnés à l’article 411-12 du même code, commis dans le but de servir les intérêts d’une puissance étrangère, d’une entreprise ou d’une organisation étrangère, ou sous contrôle étranger » ;

2° Le 11° de l’article 706-73-1 est complété par les mots : « et délits mentionnés à l’article 411-12 du même code, commis dans le but de servir les intérêts d’une puissance étrangère, d’une entreprise ou d’une organisation étrangère, ou sous contrôle étranger lorsque cette circonstance porte la durée de la peine d’emprisonnement à cinq ans au moins ».

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Article 4 bis
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Article 1er

Article 5

(Pour coordination)

I. – La seconde colonne de la deuxième ligne du tableau du I de l’article L. 775-37 du code monétaire et financier est ainsi rédigée : « la loi n° … du … visant à prévenir les ingérences étrangères en France ».

II. – Le code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° Le début du premier alinéa de l’article L. 895-1 est ainsi rédigé : « Sont applicables en Polynésie française, dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … visant à prévenir les ingérences étrangères en France, les dispositions… (le reste sans changement). » ;

2° Le début du premier alinéa de l’article L. 896-1 est ainsi rédigé : « Sont applicables en Nouvelle-Calédonie, dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … du visant à prévenir les ingérences étrangères en France, les dispositions… (le reste sans changement). » ;

3° Le début de l’article L. 897-1 est ainsi rédigé : « Sont applicables dans les îles Wallis et Futuna, dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … visant à prévenir les ingérences étrangères en France, les dispositions… (le reste sans changement). »

III. – À l’expiration d’un délai de quatre ans à compter de la promulgation de la présente loi, le code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° Le début du premier alinéa de l’article L. 895-1 est ainsi rédigé : « Sont applicables en Polynésie française, dans leur rédaction résultant de la loi n° 2021-998 du 30 juillet 2021 relative à la prévention d’actes de terrorisme et au renseignement, les dispositions… (le reste sans changement). » ;

2° Le début du premier alinéa de l’article L. 896-1 est ainsi rédigé : « Sont applicables en Nouvelle-Calédonie, dans leur rédaction résultant de la loi n° 2021-998 du 30 juillet 2021 relative à la prévention d’actes de terrorisme et au renseignement, les dispositions… (le reste sans changement). » ;

3° Le début de l’article L. 897-1 est ainsi rédigé : « Sont applicables dans les îles Wallis et Futuna, dans leur rédaction résultant de la loi n° 2021-998 du 30 juillet 2021 relative à la prévention d’actes de terrorisme et au renseignement, les dispositions… (le reste sans changement). »

IV. – Au premier alinéa du I de l’article 35 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, après la première occurrence du mot : « loi », sont insérés les mots : « , dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … visant à prévenir les ingérences étrangères en France, ».

M. le président. Nous allons maintenant examiner les amendements déposés par le Gouvernement.

article 1er

Article 5
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Article 1er bis A

M. le président. L’amendement n° 1 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 45, deuxième phrase

Remplacer les mots :

du I

par les mots :

de la présente section

II. – Alinéa 66

Remplacer la deuxième occurrence de la référence :

18-17

par la référence :

18-16

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Prisca Thevenot, ministre déléguée. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Le vote sur l’article 1er, modifié, est réservé.

article 1er bis A

Article 1er
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Article 4

M. le président. L’amendement n° 2, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Remplacer les mots :

au même article 18-12-1

par les mots :

au I bis de l’article 18-13

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Prisca Thevenot, ministre déléguée. De nouveau, il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Le vote sur l’article 1er bis A, modifié, est réservé.

article 4

Article 1er bis A
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

M. le président. L’amendement n° 4, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Compléter cet article par huit alinéas ainsi rédigés :

4° À l’article L. 562–5, après les mots : « L. 562–2, », sont insérés les mots : « L. 562–2–1, » ;

5° À l’article L. 562–7, après les mots : « L. 562–2, », sont insérés les mots : « L. 562–2–1 » ;

6° Au premier alinéa de l’article L. 562–8, après les mots : « L. 562–2, », sont insérés les mots : « L. 562–2–1, » ;

7° Au premier alinéa de l’article L. 562–9, après les mots : « L. 562–2 », sont insérés les mots : «, L. 562–2–1 » ;

8° Le premier alinéa de l’article L. 562–11 est ainsi modifié :

a) Les mots : « de l’article » sont remplacés par les mots : « des articles » ;

b) Après les mots : « L. 562–2 », sont insérés les mots : « et L. 562–2–1 ».

II. – Au deuxième alinéa de l’article L. 212–1 du code des relations entre le public et l’administration, après le mot : « terrorisme », sont insérés les mots : « ou des actes d’ingérence ».

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Prisca Thevenot, ministre déléguée. Amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Le vote sur l’article 4, modifié, est réservé.

article 5 (pour coordination)

M. le président. L’amendement n° 3, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

I. – La deuxième ligne du tableau du deuxième alinéa du I de l’article L. 775-37 du code monétaire et financier est remplacée par trois lignes ainsi rédigées :

« 

L. 562-1

la loi n° … du … visant à prévenir les ingérences étrangères en France

L. 562-2

l’ordonnance n° 2016-1575 du 24 novembre 2016

L. 562-2-1

la loi n° … du … visant à prévenir les ingérences étrangères en France

».

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Prisca Thevenot, ministre déléguée. Il s’agit d’un amendement de coordination.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 3.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Le vote sur l’article 5, modifié, est réservé.

Vote sur l’ensemble

Article 4
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par les amendements du Gouvernement, l’ensemble de la proposition de loi, je vais donner la parole, pour explication de vote, à un représentant par groupe.

La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)

M. Pascal Savoldelli. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce texte marque un tournant significatif dans notre quête de transparence et dans notre lutte contre les influences extérieures qui s’immiscent insidieusement dans les rouages de nos institutions.

Cependant, permettez-moi de souligner une lacune béante dans cette proposition de loi : le regard y est concentré sur les actions menées sur l’initiative d’États étrangers, et détourné de l’influence non moins pernicieuse qu’exercent les multinationales : celles-ci, prédatrices insatiables, le plus souvent américaines, s’invitent régulièrement dans le processus de nos décisions publiques, infléchissant les lois et les règlements à leur avantage.

L’article 1er du texte, qui prévoit la création d’un répertoire des représentants d’intérêts agissant pour le compte de mandants étrangers, est fondé. Cependant, sa mise en œuvre doit être à la hauteur de nos attentes. Nous avons vu, avec la loi Sapin 2, que la multiplication des obligations déclaratives avait conduit à privilégier la quantité à la qualité, et à répertorier les représentants d’intérêts plutôt que leurs impacts concrets sur le processus décisionnel.

En outre, aux termes du présent texte, ne sont considérées comme actions de représentation d’intérêts que celles qui sont menées sur l’initiative de représentants d’intérêts étrangers. Or, mes chers collègues, comme vous le savez, de nombreuses actions de ce genre sont en réalité menées sur l’initiative des décideurs publics eux-mêmes. En conséquence, bon nombre d’activités d’influence étrangère échappent à la régulation parce qu’elles sont sollicitées par des parlementaires ou des conseillers ministériels. Il aurait donc été judicieux d’étendre l’obligation de reporting aux décideurs publics.

En attendant, d’autres mesures auraient pu être envisagées. Je pense notamment à la mise en place d’un registre des lobbyistes au sein des cabinets ministériels, des autorités administratives indépendantes et de certaines directions des administrations centrales. Ce registre aurait pu être accompagné, à l’instar de ce qui existe pour nos assemblées, d’un règlement intérieur, d’un code d’éthique et d’un rapport public annuel sur les personnalités et organisations rencontrées, afin que l’on dispose d’une vision plus large et plus précise des influences étrangères sur nos décisions publiques.

De plus, bien que des discussions aient lieu sur la nécessité d’augmenter les moyens de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, aucune garantie n’est inscrite à cet égard dans le présent texte. La HATVP disposait en 2021 d’un budget de 7,8 millions d’euros, et elle a bénéficié dans la période récente d’une légère augmentation de ses effectifs. Mais, mes chers collègues, nous devons nous assurer que cette augmentation correspond à un renforcement réel de ses capacités d’intervention. En tant que vice-président de la commission des finances, je serai particulièrement vigilant quant au budget alloué à la HATVP dans le prochain projet de loi de finances.

Par ailleurs, pour que cette instance soit véritablement efficace, pour assurer son indépendance et la rendre moins dépendante d’autres organes extérieurs, ne devrions-nous pas lui conférer des pouvoirs d’enquête étendus ?

Enfin, mes chers collègues, je souhaite une nouvelle fois appeler votre attention sur les risques induits par l’article 3, qui ouvre la porte à l’utilisation d’algorithmes par les services de renseignement pour le recueil de données relatives à la prévention des ingérences étrangères.

La normalisation de la surveillance numérique constitue une menace pour nos libertés fondamentales. Les gouvernements exploitent les infrastructures de domination des grandes plateformes commerciales, ce qui soulève des questions quant à la protection de la vie privée et des libertés individuelles. Si ces pratiques sont acceptées au nom de la lutte contre le terrorisme ou de la défense de la sécurité nationale, elles risquent d’être étendues progressivement à d’autres domaines sans que nous en mesurions réellement les conséquences.

C’est pourquoi il est essentiel d’engager la responsabilité humaine qui se niche derrière le choix de l’algorithme. Quels seront les biais discriminants des algorithmes ainsi utilisés ? Qui en aura l’usage ? De surcroît, le champ d’application de ces techniques serait étendu, aux termes de la proposition de loi, à la prévention de toute ingérence étrangère, un cadre bien trop large. Nous savons que l’utilisation de dispositifs exceptionnels, sans contre-pouvoir, est susceptible de porter gravement atteinte aux libertés. Je regrette donc qu’aucun de nos amendements – aucun ! – visant à ce que de telles pratiques soient contrôlées n’ait été retenu.

C’est pourquoi les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky voteront une nouvelle fois contre cette proposition de loi. Pour préserver nos libertés et renforcer véritablement notre démocratie, nous devons nous engager à mettre en place des mesures de transparence et de contrôle adaptées, tout en veillant à ne pas sacrifier nos principes fondamentaux. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)

M. le président. La parole est à M. Raphaël Daubet, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

M. Raphaël Daubet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je salue l’accord auquel est parvenue la commission mixte paritaire, qui conclut nos travaux parlementaires sur ce texte de loi très important pour notre démocratie.

Nous faisons face à un phénomène méthodiquement pensé, à la fois aiguisé et insaisissable : ingérences économiques, ingérences sociales et politiques, espionnage industriel et scientifique sont le fait de notre époque, un temps où les réseaux sociaux, la mondialisation, l’hypermédiatisation et l’hypercommunication ont créé les conditions favorables à la multiplication des cyberattaques et des manœuvres de tous ordres visant à influencer l’opinion publique. Un nouveau champ de bataille est ainsi apparu.

Mais, au-delà de cette dimension temporelle, on redécouvre, au fond, une réalité vieille comme le monde. Ces malveillances s’appuient, dans leur principe, sur les mêmes ressorts que la propagande d’autrefois et les endoctrinements ou campagnes de désinformation que le monde a toujours connus ; souvent, elles reposent sur le même vieil adage, « diviser pour mieux régner ». En définitive, l’« affiche rouge » de 1944 n’est pas si éloignée des « mains rouges » de 2024.

La vérité, c’est que nous avions créé des espaces de paix, à l’échelle de nos démocraties, à l’échelle de l’Europe, parfois au-delà. Or ces espaces ne sont plus protecteurs : ils sont devenus perméables aux agressions extérieures. L’existence de telles agressions est désormais amplement prouvée, et, malheureusement, il ne s’agit plus d’un phénomène marginal.

Chacun peut comprendre qu’un destin national soumis à des ingérences étrangères cesse d’être totalement dans nos mains.

Cette proposition de loi est un premier pas, qui contribuera d’ores et déjà à mieux nous protéger, en renforçant nos exigences de transparence et nos moyens d’action. Il nous faudra créer demain des espaces de paix nouveaux, y compris dans les horizons numériques. La commission d’enquête sur les influences étrangères, dont je suis membre, apportera un éclairage complémentaire sur cette menace, qui permettra d’enrichir encore notre arsenal législatif.

Oui, il faut donc légiférer, mais je ne suis pas sourd aux mises en garde de certains de nos collègues. Au contraire, je crois que la vraie difficulté est là : jusqu’où peut-on aller sans empiéter sur les libertés fondamentales ? Le groupe RDSE veillera toujours à ce que l’on fasse évoluer ce cadre législatif avec beaucoup de discernement et de prudence. Nous considérons cependant que l’expérimentation de la technique dite de l’algorithme, en l’espèce, est acceptable.

La transparence, quant à elle, devrait s’opérer via la constitution d’un répertoire, tenu et rendu public par la HATVP. Cette mesure est la bienvenue, et je souscris à la nécessité de laisser un délai supplémentaire à la Haute Autorité pour se renforcer en moyens humains et matériels.

Pour conclure, permettez-moi d’insister sur l’alerte lancée par ma collègue Annick Girardin sur la vulnérabilité particulière de nos outre-mer. On a vu les tentatives de déstabilisation en Nouvelle-Calédonie, à Mayotte, en Polynésie française. Notre groupe le redit : les territoires d’outre-mer, en particulier, sont insuffisamment sécurisés alors qu’ils sont une porte d’entrée sur la totalité des réseaux publics français.

Ces événements récents nous ramènent enfin à une réalité encore plus cruelle : les ingérences étrangères tirent leur force de nos propres faiblesses.

La moindre faute politique, la moindre erreur d’appréciation, le moindre mouvement social offre à nos adversaires une occasion supplémentaire de nous déstabiliser. C’est dire, au-delà de ce texte, si notre responsabilité est grande dans cette lutte. (M. Rachid Temal et Mme Nathalie Goulet applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Monsieur le président, madame la rapporteure, mes chers collègues, nous arrivons au terme de la procédure sur cette proposition de loi. Cet examen, comme l’a souligné Mme la rapporteure, a été rondement mené puisque ce texte, déposé en février, sera définitivement adopté en juin.

Ce texte vise à apporter des réponses attendues. Nous vivons dans un monde marqué par le choc et le retour de velléités impériales, avec un passage très clair de la compétition à la confrontation. Les velléités panrusses, panturques, panchinoises et autres peuvent prendre différentes formes, notamment politiques via la désinformation et la manipulation.

C’est ce que nous avons encore constaté ce week-end avec l’épisode de la macabre mise en scène des cercueils au pied de la tour Eiffel. Certaines personnes soupçonnées de les avoir déposés entretenaient manifestement des connexions avec le réseau responsable de la triste affaire des « mains rouges ».

Nous sommes face, d’un côté, à un phénomène d’ingérence très low cost – il est question de quelques centaines d’euros donnés à des individus pour mener ces actions – et, de l’autre, à des dispositifs, au contraire, perfectionnés et même hypersophistiqués.

Au-delà de la forme politique, ces actions peuvent également prendre une dimension internationale, certains acteurs ou États s’efforçant de battre en brèche le multilatéralisme pour essayer de bâtir un « altermultilatéralisme » n’ayant naturellement rien à voir avec les valeurs fondamentales mises en place au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.

Dans ce contexte, pour certains, tous les coups sont permis. Les intelligences étrangères peuvent prendre des formes très différentes. Comme le souligne Agnès Canayer dans son rapport, la menace est protéiforme. Elle peut prendre la forme classique de l’espionnage, y compris économique – j’y reviendrai –, mais également des formes plus modernes avec le cyber, sans parler de formes hybrides, qui sont très présentes.

Face à cette menace, nous avons le devoir de nous armer et de nous protéger. La délégation parlementaire au renseignement dans son rapport pour l’année 2022-2023, qui a conduit à cette proposition de loi, évoquait la nécessité d’une riposte démocratique. Eh bien, nous y sommes puisque tel est l’objet de ce texte.

Je citerai quelques mesures, comme la création d’un registre des activités d’influence étrangère, l’amélioration de l’information du Parlement, grâce au rapport prévu à l’article 2, l’extension de la technique de l’algorithme, ainsi que l’extension de la procédure de gel des avoirs. Bref, il s’agit d’envoyer un signal fort : qui s’y frotte s’y pique !

Par ailleurs, ces ingérences ne concernent pas que la dimension politique ou géopolitique : elles concernent aussi le volet économique. Le rapport relatif à l’activité de la délégation parlementaire au renseignement pour l’année 2022-2023 le soulignait très bien en titrant l’une de ses sous-parties : « Nos alliés n’agissent pas toujours comme des amis » en matière économique.

Claude Malhuret, dans son rapport pour avis, évoquait d’ailleurs un certain nombre de comportements comme la guerre juridique que « les États-Unis conduisent sous couvert d’extraterritorialité de leur droit ou des pratiques de conformité ». Il soulignait qu’il était nécessaire d’agir aux niveaux national et européen.

Voilà pourquoi nous avons voulu, avec un certain nombre de collègues, à notre échelle, faire un pas dans le bon sens en reprenant certaines recommandations de la mission d’information pour faire un bilan de l’organisation de l’intelligence économique en France, que j’ai conduite avec Marie-Noëlle Lienemann.

Je remercie Mme la rapporteure, Agnès Canayer, M. le président de la commission des lois, François-Noël Buffet, M. le rapporteur de l’Assemblée nationale, Sacha Houlié, d’avoir accepté de retenir, in fine, une bonne partie du dispositif de l’article 2 bis, issu d’un amendement que j’ai défendu avec Franck Montaugé. Cet article prévoit d’instaurer un débat au Parlement sur le contrôle des investissements étrangers en France. Nous en avons organisé un la semaine dernière au Sénat, mais le principe de la tenue de ce débat sera désormais gravé dans la loi. Je me réjouis que le Gouvernement se soit engagé, à travers la voix de Roland Lescure, à en débattre avec nous chaque année.

Par ailleurs, ce rapport sur le contrôle des investissements étrangers en France sera enrichi puisque le Gouvernement s’est engagé à effectuer un suivi dans la durée des engagements pris par les investisseurs – c’est très important.

Enfin, et c’est un point clé, nous passons d’une vision purement défensive de sécurité économique à une vision également offensive d’intelligence économique. Ce concept est pris en compte pour la première fois au niveau législatif grâce à l’amendement que nous avons défendu avec Franck Montaugé. Au-delà de la sécurité économique, cela permettra d’aller dans une logique plus partenariale qui embarque les collectivités locales, les entreprises, les partenaires sociaux et les citoyens. Autant d’éléments qui étaient appelés de ses vœux par la délégation parlementaire au renseignement lorsqu’elle incitait à aller au-delà de la seule vision défensive.

Pour toutes ces raisons, le groupe RDPI votera les conclusions de la commission mixte paritaire. Nous serons également très attentifs aux travaux qui seront poursuivis au sein de notre assemblée, qu’il s’agisse des commissions d’enquête ou d’autres. (Applaudissements sur des travées des groupes RDPI et UC.)

M. le président. La parole est à M. Rachid Temal, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Rachid Temal. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera bien sûr cette proposition de loi, et ce pour plusieurs raisons.

Ce texte fait d’abord la démonstration, s’il en était besoin, de la capacité du Parlement à légiférer et à bien légiférer. Cela a été rappelé, les travaux de la délégation parlementaire au renseignement ont permis de nous rassembler largement sur cette proposition de loi. Certes, et je le dis avec une certaine taquinerie, le texte est issu de l’Assemblée nationale ; pour autant, le Sénat a pu le bonifier, ce qui nous permet aujourd’hui d’avancer.

Je tiens à insister sur cet aspect, car certains s’interrogent parfois sur le rôle du Parlement. Ce texte offre une démonstration parfaite de notre utilité.

Par ailleurs, d’autres l’ont dit avant moi, nous nous trouvons aujourd’hui dans un contexte très particulier. Je reviendrai sur les travaux de la commission d’enquête évoqués par le collègue qui m’a précédé à cette tribune, mais force est de constater que le monde de 1945 a volé en éclats. Il n’existe plus aujourd’hui de blocs et chacun concurrence désormais chacun, au niveau régional comme au niveau international.

Dorénavant, un État, aussi petit soit-il, peut concurrencer un État comme la France, pourtant doté de l’arme nucléaire. Cela modifie radicalement les relations entre les États.

Par ailleurs, c’est vrai notamment sur les questions d’ingérence politique, les nouvelles technologies d’aujourd’hui et l’intelligence générative de demain vont modifier totalement le rapport de chacun à la vérité. Nous verrons émerger des vérités parallèles. Il s’agit donc d’une problématique très importante pour notre pays.

Cette proposition de loi, qui nous convient parfaitement à ce stade, constitue une première étape. Nous approuvons la création d’un nouveau répertoire, mais il convient également de tenir compte des remarques de la HATVP. Quid de la capacité financière de cette dernière à mettre en place de tels dispositifs ? Il importe donc d’être cohérents. C’est la raison pour laquelle nous appelons le Gouvernement à dégager des moyens massifs, financiers ou technologiques, pour pouvoir assurer ces missions.

Nous avons pu également intégrer dans le champ du texte les instituts. C’est une bonne chose, comme on le voit notamment avec une grande puissance asiatique.

L’instauration d’un rapport a été saluée, mais je rappelle que l’organisation d’un débat devant le Parlement n’est pas obligatoire. Cela aurait pourtant été utile…

En ce qui concerne les algorithmes, je partage les interrogations et le souci de vigilance. En tout état de cause, la démocratie est toujours la meilleure réponse pour faire en sorte de mieux nous protéger.

Ce texte, comme je l’ai évoqué, est une première étape intéressante, mais pas seulement. J’ai l’honneur d’être le rapporteur de la commission d’enquête sur les politiques publiques face aux opérations d’influences étrangères. On le voit bien, il s’agit d’un enjeu majeur en matière d’ingérence. Oui, nous avons des alliés, mais ils sont eux-mêmes enclins à défendre leurs propres intérêts.

Cela nous renvoie, madame la ministre, à la capacité actuelle qu’a la France de proposer un vrai narratif, ainsi qu’à sa capacité d’avoir de l’influence pour lutter contre les ingérences. On le sait, les ingérences trouvent un terreau fertile dans les sociétés fracturées et pessimistes. C’est un obstacle qu’il convient de lever. Nous l’avons vu avec la Nouvelle-Calédonie : l’Azerbaïdjan – avec le groupe de Bakou – n’est pas à l’origine de cette crise, mais il a su l’inscrire dans un narratif. Idem en ce qui concerne le continent africain, où la question du passé colonial de la France a pu peser au Mali, notamment.

Il nous faudra donc avoir une vision globale, ce sera certainement notre prochaine étape dans la lutte contre les ingérences. Il convient également de sortir de la naïveté. Cette proposition de loi et les travaux de la commission d’enquête seront des maillons essentiels. Il importera aussi de mettre en place un programme national. Il est certes utile d’avoir des services, mais encore faut-il que la société civile, de l’école primaire à l’université, soit informée des questions d’ingérence. C’est ainsi que nous parviendrons à combattre ce phénomène.

Nous ferons des propositions en ce sens le moment venu. La commission d’enquête rendra ses conclusions au début du mois de juillet. J’espère que nous serons de nouveau appelés les uns et les autres à légiférer sur ces questions pour passer un nouveau cap.

Quoi qu’il en soit, nous voterons en faveur de ce texte, qui n’est qu’une première étape, mais elle est importante et nécessaire. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. François-Noël Buffet, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. François-Noël Buffet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ferai quelques observations pour le compte du groupe Les Républicains sur les résultats de cette commission mixte paritaire, qui a été conclusive.

Il importe peut-être de rappeler les différentes étapes de ce processus législatif pour lutter contre les ingérences étrangères. Ce texte a été préparé par les travaux de la délégation parlementaire au renseignement, qui, chaque année, produit un rapport sur un thème qu’elle choisit. Force est de constater que cette délégation se place dans le monde dans lequel elle vit, et c’est heureux !

La loi du 24 juillet 2015 relative au renseignement a donné à l’ensemble de nos services des moyens juridiques pour leur permettre de mettre en œuvre leurs techniques de renseignement. Au cours de l’année 2017-2018, le programme de la délégation portait sur le renseignement d’intérêt économique, qu’elle considérait comme « un enjeu de puissance ». Nous avions alors déjà observé qu’il y avait pour notre pays un travail approfondi à faire et des améliorations à mettre en œuvre.

Bien sûr, le temps a passé et la situation internationale a changé. Nous connaissons aujourd’hui une période plus trouble, au cours de laquelle les intérêts de la France sont ébranlés. Un certain nombre de puissances étrangères souhaitent déstabiliser notre pays dans les endroits où celui-ci est implanté. L’orateur précédent vient d’évoquer l’Afrique, mais on peut aussi penser à ce qui se passe dans nos outre-mer. Il importera de trouver des solutions.

Un autre événement majeur a été la guerre sur le territoire européen engagée par la Russie contre l’Ukraine.

Il était donc absolument nécessaire que nos services puissent détenir les moyens suffisants pour lutter contre les ingérences étrangères que nous constatons tous les jours ou presque. Je ne reviendrai pas sur les exemples qui ont déjà été cités…

C’est dans ces conditions que la commission mixte paritaire et nos deux assemblées ont trouvé un accord sur le texte proposé par notre collègue député Sacha Houlié, président de la commission des lois de l’Assemblée nationale.

Les rapporteurs ont trouvé rapidement des éléments d’entente. Il restait quelques petits points de discussion, en particulier sur la date de mise en œuvre du fameux fichier ou sur le rôle de la HATVP, que le Sénat a défendu unanimement. Les services bénéficieront de moyens supplémentaires, il faut s’en réjouir.

Je ne peux conclure sans rappeler que le Parlement sait aussi travailler rapidement puisque ce texte déposé en février est voté à la fin du mois de juin. On aimerait que ce soit plus souvent le cas, mais, ici, nécessité fait loi !

Nous examinerons probablement, soit à l’automne, soit en début d’année prochaine, un texte plus important sur le renseignement, car il est nécessaire de continuer d’adapter nos moyens techniques et juridiques à l’évolution de la menace. Celle-ci n’est évidemment pas négligeable. Chacun sait que notre pays fait l’objet d’attaques nombreuses et régulières, s’appuyant sur des moyens technologiques de plus en plus performants et discrets. Il importe donc d’accroître les outils à notre disposition pour lutter contre cette volonté de déstabiliser la France. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’Union européenne est un projet de paix, qui s’est bâti sur un continent dévasté par deux guerres mondiales. La France et ses partenaires ont fait le choix du commerce et des échanges pour repousser les conflits.

Ce faisant, nous avons été tentés de ne pas voir que la compétition entre les États se poursuivait. Le spectre des actions hostiles est large entre la paix et la déclaration de guerre. Aujourd’hui, nos adversaires prennent soin de ne pas franchir le seuil de la conflictualité afin de ne pas s’exposer à des représailles directes.

La Russie, la Chine et l’Iran sont trois puissances hostiles à la démocratie libérale. Ces pays pratiquent depuis plusieurs siècles les stratégies indirectes.

Parce qu’elle est la patrie des droits de l’homme, parce qu’elle est membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, et parce qu’elle tient tout particulièrement à son indépendance et à sa souveraineté, la France est une cible de choix.

Alors même que nos soldats sont déployés dans de nombreuses opérations de maintien de la paix et de lutte contre le terrorisme, nous apparaissons singulièrement démunis sur le théâtre de la guerre informationnelle, cette néo-guerre permanente qui abolit la frontière entre la paix et la guerre.

Il aura fallu attendre 2018, à la suite des graves ingérences dans l’élection présidentielle de 2017, pour que la lutte contre la manipulation de l’information soit renforcée dans notre pays. La création de Viginum est encore plus récente.

Les démocraties sont particulièrement sensibles aux attaques informationnelles. La souveraineté nationale appartient au peuple, qui est donc très exposé aux actions d’influence et aux manipulations de l’information. C’est ce que nous constatons chaque jour avec la guerre en Ukraine, dans le conflit qui oppose Israël au Hamas, mais aussi au travers des émeutes en Nouvelle-Calédonie. Euromore, la nouvelle arme de la guerre informationnelle russe lancée il y a quelques jours nous rappelle, après l’interdiction de Russia Today (RT) et de Sputnik, que l’hydre empoisonnée est malheureusement éternelle.

Ces actions ne visent pas que nos concitoyens ; elles ciblent aussi les décideurs publics et le débat public lui-même. Voilà tout l’intérêt de cette proposition de loi, qui a fait l’objet d’un accord en commission mixte paritaire.

Les personnes agissant pour le compte d’un mandant étranger, dans le but d’influer sur la décision publique, seront astreintes à des obligations déclaratives. Cette plus grande transparence nous permettra de détecter les stratégies mises en œuvre par les puissances étrangères. Le cas échéant, les pouvoirs publics seront en mesure d’entraver les ingérences décelées.

Au-delà de ces obligations déclaratives, le texte prévoit une expérimentation de quatre ans au cours desquels nos services de renseignement seront autorisés à mettre en œuvre des traitements automatisés de données.

Cela permettra, là encore, de mieux repérer et d’entraver les actions d’ingérence étrangère, et plus généralement toutes les menaces pesant sur la défense nationale.

Le texte final reprend plusieurs des mesures intégrées par le Sénat, et je m’en félicite. Parmi elles, citons l’alourdissement des sanctions pénales des infractions commises pour le compte d’un mandant étranger. Avec le gel des avoirs, il s’agit sans doute là de l’une des meilleures réponses aux ingérences menées dans notre pays.

Nous avons tardé à prendre conscience que l’influence qui se transforme en ingérence doit être punie. La proposition de loi que nous nous apprêtons à voter constitue l’une des étapes d’un réveil nécessaire.

D’autres sont attendues. Le volet économique de l’ingérence étrangère devra encore faire l’objet de mesures spécifiques si nous souhaitons préserver notre souveraineté. C’est notamment le cas avec nos données. Si je regrette que nous ne disposions pas d’un cloud français souverain, voire d’un cloud européen souverain, je me console en pensant que nous recourons à celui de nos alliés (Mme Nathalie Goulet manifeste son scepticisme.), mais ce n’est qu’un pis-aller.

Désormais, et grâce à notre collègue Jean-Baptiste Lemoyne, nous aurons, chaque année, un débat sur le contrôle des investissements étrangers en France. Il s’agit d’un instrument de contrôle majeur que nous devons nous approprier.

La France est en retard, mais cette proposition de loi incarne une dynamique nouvelle. Nous serons plus attentifs et plus intransigeants quant aux ingérences afin de mieux protéger nos concitoyens et notre souveraineté. Nous devons également avancer au sein de l’Union européenne sur ces questions hautement stratégiques pour nos démocraties.

Le Royaume-Uni, l’Australie et le Canada ont légiféré ou vont légiférer en ce sens. Cela témoigne du climat de notre époque. La loi américaine contre les ingérences étrangères date de 1938, veille de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre froide qui l’a suivie.

Nous entrons dans une période de confrontation accrue. Avec cette loi, nous contribuons à nous doter des moyens de ne pas la subir, tout en rappelant que le meilleur bouclier est celui des forces morales au sein d’une démocratie vigoureuse. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Bernard Buis applaudit également.)

Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme souvent ces derniers temps, j’interviens en fin de débat, quand tout a déjà été dit ! (Sourires.)

M. Rachid Temal. C’est la faute d’Hervé Marseille ! (Mêmes mouvements.)

M. Jacques Fernique. C’est moi le dernier intervenant ! (Nouveaux sourires.)

Mme Nathalie Goulet. Ainsi en a décidé le sort !

Le registre des acteurs d’influence étrangère ? Très bien. Les techniques algorithmiques ? Très bien. Le gel des avoirs ? Encore mieux ! Le renforcement du dispositif pénal ? Parfait ! (Sourires.)

Le texte qui nous est proposé, madame la ministre, est la preuve que quand on veut, on peut aller vite.

Permettez-moi tout de même ici un parallèle avec notre débat douloureux et au forceps sur les cabinets de conseil, autre force d’ingérence et d’influence. Le moins que l’on puisse dire est que le Gouvernement ne montre pas autant de bonne volonté. C’est un sujet sur lequel il est pourtant également absolument nécessaire de légiférer. Imputer les ingérences et les influences uniquement à l’étranger, c’est faire fi des sujets franco-français.

Qu’il s’agisse des lobbies ou des cabinets de conseil – nous avons eu un débat musclé cette semaine –, j’espère que la navette se poursuivra rapidement et qu’elle nous permettra d’aboutir à un accord sur un texte le plus proche possible de celui du Sénat, notre assemblée étant très attentive à ces questions de conflit d’intérêts.

Le texte qui nous est proposé vise à plus de transparence : parfait, c’est ce qu’il nous faut ! Mais vous ne pouvez pas à la fois plaider pour plus de transparence dans le périmètre restreint de cette proposition de loi et maintenir les opacités du texte sur les cabinets de conseil. Du point de vue de la majorité sénatoriale, c’est tout à fait inacceptable.

Le pantouflage et le « rétropantouflage » sont aussi des éléments qui permettent des ingérences et des influences. Ce sont des sujets sur lesquels il faudra encore travailler.

Madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, dix ans après sa promulgation, la loi Sapin doit être revisitée et évaluée. Je pense, notamment, aux lanceurs d’alerte et aux aviseurs, en particulier en matière fiscale.

La loi Sapin, on le sait, est consécutive à l’affaire Jérôme Cahuzac, selon l’habitude propre à notre pays d’avoir un scandale, une loi ! Il est temps de relier tous ces maillons et de revoir la loi Sapin à l’aune des nouveaux dispositifs.

Par ailleurs, comme cela a été maintes fois rappelé à cette tribune, il est beaucoup trop réducteur de limiter les ingérences et les influences au seul secteur du numérique. Soyons cohérents et parlons aussi de la lutte contre l’islam radical. (M. Roger Karoutchi acquiesce.) C’est un sujet qui doit être pris extrêmement au sérieux, notamment en matière de financement du terrorisme, car l’ingérence se fait aussi au travers de moyens.

Je citerai l’exemple de collectes de fonds sur le territoire national au profit d’écoles d’oulémas, notamment en Mauritanie, en lien avec les Frères musulmans. Ces collectes, donnant lieu à des déductions fiscales qui retombent sur l’ensemble des contribuables, viennent nourrir des écoles d’oulémas fréristes dont les élèves iront ensuite fomenter des révoltes et des attentats contre nos propres soldats en Afrique de l’Ouest. Il importe donc que nous nous montrions cohérents sur toutes ces questions d’ingérence et d’influence.

Ce texte est important, mais il n’aborde qu’une seule partie du problème. Il convient, évidemment, de donner des moyens à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

Le groupe Union Centriste votera le texte résultant des travaux de la commission mixte paritaire tout en attirant votre attention sur un point vigilance extrêmement important en ce qui concerne les ingérences franco-françaises. Ces dernières sont au moins tout aussi importantes que les questions de transparence. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDSE, RDPI et Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Jacques Fernique. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je remplace ma collègue Mélanie Vogel, empêchée aujourd’hui.

Je serai donc le dernier des intervenants à s’exprimer, après la dernière intervenante. (Sourires.)

Quand Jean de La Fontaine écrivit au XVIIe siècle sa fable sur la course entre un lièvre et une tortue, il ne pensait probablement pas qu’il y aurait un jour un Parlement comme le nôtre pour faire des lois. Et il pensait sûrement encore moins aux ingérences étrangères. Néanmoins, nous devrions tirer les leçons de cette fable à l’heure où nous tentons de protéger notre démocratie et la République contre les tentatives malveillantes de puissances étrangères.

Ces stratégies dangereuses peuvent commencer par l’influence – par exemple, par le biais de la diffusion de certaines informations sur les médias – ou des investissements massifs dans des infrastructures essentielles. Ainsi, les ports maritimes du Havre et de Marseille appartiennent à une entreprise d’État chinoise.

En parallèle, nous devons faire face à des tentatives d’ingérence, ce dont témoignent de nombreux scandales récents dont les exemples, hélas ! ne manquent pas. Je ne reviendrai pas sur le Qatargate, qui a impliqué des eurodéputés de l’Alliance progressiste des socialistes et démocrates (S&D) ou sur les prêts du Rassemblement national contractés auprès des banques russes.

Il est impératif de lutter contre ces tentatives d’ingérences étrangères qui ne cessent de se multiplier – sur ce point, le consensus est heureusement assez large.

Si la menace avait été totalement prise au sérieux, elle aurait appelé une réponse globale, avec des mesures à la fois ciblées et efficaces. Il aurait fallu un projet de loi complet, accompagné d’une étude d’impact.

Or le Gouvernement n’a manifestement pas parfaitement mesuré l’importance du problème et a cru suffisant l’examen d’une proposition de loi de la majorité présidentielle à l’Assemblée nationale, inscrite à l’agenda parlementaire sur le temps gouvernemental.

L’adoption à la va-vite d’un tel texte est bien évidemment plus simple que l’examen d’un projet de loi, mais, compte tenu des stratégies de nos adversaires et de l’importance du sujet, une telle réponse ne peut qu’être incomplète.

Certes, cette proposition de loi comprend des avancées.

Nous saluons ainsi la création d’un répertoire des activités d’influence menées pour le compte d’un acteur étranger. Ce registre permettra d’éviter les abus les plus flagrants, en renforçant la transparence.

Si nous nous félicitons que la commission mixte paritaire ait validé le pouvoir de sanction de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique en cas de manquement aux obligations déclaratives, nous déplorons que ces obligations restent incomplètes. Entre autres, il aurait fallu obtenir que les lobbyistes renseignent les montants des financements reçus par leurs mandataires étrangers, comme ils le font au Parlement européen et comme nous l’avons proposé par le biais d’un de nos amendements.

Nous nous réjouissons également que la commission mixte paritaire ait validé l’élargissement à la lutte contre les ingérences étrangères de diverses mesures, comme le gel des avoirs des personnes se livrant à des faits d’ingérence ou encore la possibilité de continuer à utiliser les techniques spéciales d’enquête lorsqu’une affaire est confiée par les services de renseignement à l’autorité judiciaire.

Cependant, cette proposition de loi comporte tout de même, à notre sens, un double défaut.

Premièrement, en élargissant le recours au traitement algorithmique des données de connexion, elle restreint encore plus les libertés publiques, car cette technique relève de la surveillance de masse.

Je ne veux pas revenir sur les caractéristiques de cette technique de renseignement à l’efficacité incertaine ; je me permets seulement de constater qu’un ajout en commission mixte paritaire est venu organiser le traitement pénal des atteintes à ce traitement algorithmique.

Madame la ministre, que faites-vous pour éviter de telles atteintes avant qu’elles ne se produisent ? Que faites-vous pour éviter que les données collectées par l’algorithme ne soient ensuite vendues ? Ne craignez-vous pas que ces données ne soient vulnérables à une cyberattaque ?

Deuxièmement, nous déplorons que la proposition de loi soit largement incomplète. De fait, les ingérences étrangères dépassent de loin le seul champ couvert par ce texte.

On ne trouve pas un mot sur les postes de police chinois sur notre territoire, alors qu’ils représentent une atteinte flagrante à la souveraineté nationale ! Pas un mot sur les imitations des publications de presse, alors qu’elles risquent d’éroder la confiance dans les médias ! Pas un mot non plus sur le financement de la vie politique, alors que l’extrême droite accepte à bras ouverts les dons et financements étrangers ! À cet égard, il serait urgent de créer enfin une banque de la démocratie.

Bien que toutes les propositions en ce sens aient été écartées, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera en faveur de ce texte, qui comprend des mesures que nous appelons nos vœux depuis longtemps.

Il n’empêche que nous craignons que ce texte ne crée seulement l’illusion d’une réponse complète à un problème en réalité bien plus complexe et bien plus large.

Il est grand temps que le Gouvernement prenne enfin le risque d’ingérences étrangères à bras-le-corps. Comme la course décrite par La Fontaine, cette bataille se gagne non pas en quelques sauts tardifs, mais seulement grâce à un effort stratégique et tenace sur la durée. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – M. Christophe Chaillou applaudit également.)

M. le président. Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi visant à prévenir les ingérences étrangères en France dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par les amendements précédemment adoptés par le Sénat.

(La proposition de loi est adoptée.)

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures, est reprise à dix-neuf heures cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : proposition de loi visant à prévenir les ingérences étrangères en France
 

5

 
Dossier législatif : proposition de loi renforçant l'ordonnance de protection et créant l'ordonnance provisoire de protection immédiate
Examen des conclusions d'une commission mixte paritaire

Ordonnance de protection

Adoption des conclusions d’une commission mixte paritaire sur une proposition de loi

Discussion générale
Dossier législatif : proposition de loi renforçant l'ordonnance de protection et créant l'ordonnance provisoire de protection immédiate
Article 1er

M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi allongeant la durée de l’ordonnance de protection et créant l’ordonnance provisoire de protection immédiate (texte de la commission n° 610, rapport n° 609).

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Dominique Vérien, rapporteure pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, un peu plus d’un an après la présentation du rapport Plan rouge VIF, que j’ai eu l’honneur de remettre au Gouvernement avec notre collègue députée Émilie Chandler, autrice de la présente proposition de loi, nous sommes aujourd’hui réunis pour avaliser – du moins je l’espère – la sixième réforme des ordonnances de protection depuis leur instauration en 2010. C’est la preuve de l’attention que le Parlement porte à la lutte contre les violences intrafamiliales (VIF).

Lors de l’examen de la proposition de loi, le mois dernier, cette réforme, que nous avons adoptée à l’unanimité, nous est apparue nécessaire et opportune. Je ne reviendrai pas dans le détail sur son contenu, sur lequel nous avons débattu avec passion il y a quelques semaines.

Quoi qu’il en soit, le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire, qui préserve les principaux apports du Sénat, me semble satisfaisant.

En effet, le compromis qui vous est proposé maintient les deux mesures phares qui étendent dans le temps la protection des victimes : en amont, la création d’une ordonnance provisoire de protection immédiate (OPPI) ; en aval, le doublement de la durée maximale de l’ordonnance de protection.

De plus, le Sénat a profondément enrichi le texte, et nous pouvons nous féliciter que ces compléments aient fait l’objet d’un accord lors de la commission mixte paritaire.

Dans le détail, je soulignerai six apports du Sénat.

Premièrement, sur l’initiative de notre assemblée, et plus particulièrement de nos collègues Olivia Richard, Elsa Schalck et Mélanie Vogel, le code civil est modifié pour préciser ou, du moins, rappeler qu’il peut toujours y avoir danger, y compris lorsque la cohabitation a pris fin ou qu’elle n’a jamais eu lieu.

Certes, cette modification ne va pas aussi loin que la redéfinition du critère du danger que nous avons évoquée lors de nos échanges. Elle permettra toutefois de répondre à la frilosité de certains juges, qui refusent de délivrer des ordonnances de protection lorsque la victime présumée et l’auteur des violences ne vivent plus sous le même toit, même momentanément.

Cela ne va pas assez loin, mais je suis persuadée, comme l’a exprimé Laurence Rossignol lors de son intervention, que nous n’en sommes pas à la fin de nos discussions sur les outils de protection et sur la difficulté de confier à un juge civil des mesures d’ordre pénal. J’avoue avoir beaucoup appris sur cette frontière entre civil et pénal lors de l’examen du texte !

Deuxièmement, pour ce qui concerne l’ordonnance provisoire de protection immédiate, je regrette qu’il n’ait pas été possible de permettre à la personne en danger de saisir directement le juge aux affaires familiales (JAF), mais, là encore, la frontière entre pénal et civil s’est fait sentir.

Nous pouvons toutefois nous réjouir de l’extension des mesures que pourra prononcer le juge, à savoir la suspension de l’exercice de l’autorité parentale ou l’autorisation de dissimulation de l’adresse de la victime présumée.

Troisièmement, nous avons aligné les peines encourues pour non-respect d’une ordonnance provisoire de protection immédiate et non-respect d’une ordonnance de protection, dans un souci de lisibilité du droit, certes, mais surtout pour permettre au juge d’imposer le port d’un bracelet antirapprochement (BAR) à la personne ayant violé une mesure édictée dans le cadre d’une ordonnance de protection.

Quatrièmement, nous avons permis au procureur d’attribuer à la victime un téléphone grave danger (TGD).

Cinquièmement, nous avons adapté le code électoral afin de répondre à un défaut d’articulation avec le code civil et de garantir l’effectivité de la dissimulation de l’adresse de la victime lorsque celle-ci est prononcée par le juge, y compris sur les listes électorales, qui sont, comme vous le savez, consultables par tous. Nous devons cette avancée à une proposition de notre collègue Anne-Sophie Romagny.

Sixième point, et non des moindres, le juge pourra désormais, dans le cadre d’une ordonnance de protection, attribuer temporairement à la personne en danger la jouissance des animaux de compagnie du couple, qui, trop souvent, constituent pour le conjoint violent un moyen de pression à l’égard de ses enfants et de l’autre conjoint. Nous devons ce progrès au combat de notre collègue Arnaud Bazin ; je tenais à le saluer.

Ce texte constitue donc bien un progrès.

Je tiens cependant à préciser, monsieur le garde des sceaux, que nous suivrons avec une attention toute particulière son application, notamment les décrets et différentes circulaires sur lesquels se sont engagés vos services, tout comme la ministre Sarah El Haïry, lors des débats en première lecture.

Mais je suis sûre que vous allez nous confirmer une fois de plus votre volontarisme dans ce combat que nous partageons contre les violences intrafamiliales, et que nous pouvons avoir toute confiance en votre parole !

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Bien sûr !

Mme Dominique Vérien, rapporteure. Compte tenu de ces réelles avancées et du compromis que nous avons, en bonne entente, trouvé avec nos collègues députés, je vous invite, mes chers collègues, à adopter ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et SER, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux. (M. Thani Mohamed Soilihi applaudit.)

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure et présidente de la délégation aux droits des femmes, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, si nous sommes réunis aujourd’hui, c’est parce que la commission mixte paritaire a été conclusive. Laissez-moi donc vous dire combien je suis heureux d’être avec vous aujourd’hui pour voir aboutir – du moins je l’espère – cette proposition de loi tant attendue, grâce à un engagement transpartisan.

La lutte contre les violences intrafamiliales et conjugales est un combat qui doit être mené sans relâche et sans répit, à un niveau de mobilisation et de vigilance rouge. Je dirais même, chère Dominique Vérien, même si je concède que le jeu de mots est un peu facile, « rouge vif », en référence, bien sûr, à votre rapport, dont j’ai déjà eu l’occasion de saluer à de multiples reprises la très grande qualité et dont ce texte reprend l’une des recommandations phares, à savoir « créer, dans la loi, la possibilité de délivrer une ordonnance de protection immédiate pour répondre aux situations les plus urgentes ».

Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, cinq ans après le Grenelle, notre mobilisation n’a pas faibli. Je le dis, elle ne faiblira pas. Nous continuons de porter haut cette grande cause, et de construire une justice plus protectrice.

Depuis que je suis garde des sceaux, la lutte contre la récidive et la lutte contre les violences faites aux femmes font partie des priorités de la politique pénale sans cesse rappelées aux procureurs de la République de notre pays.

Désormais, tous les outils de protection sont à la disposition des juridictions, comme les téléphones grave danger et les bracelets antirapprochement, qui, vous le savez, sont remplacés automatiquement afin que les juridictions n’en manquent jamais, mais également les ordonnances de protection, dont le nombre a explosé.

La mobilisation de tous les professionnels a permis le déploiement de 5 693 téléphones grave danger actuellement, contre 976 en 2020. Vous avez déjà fait le calcul : c’est une multiplication par six !

Plus de 1 000 BAR ont été posés en 2023, ayant permis plus de 10 400 interventions des forces de sécurité intérieure (FSI). Ce sont autant de vies sauvées.

De même, les condamnations pour violences ont augmenté de 136 % depuis 2017, passant de 22 202 à 52 302 en 2023.

Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, j’ai mentionné d’emblée le progrès que constitue la création de l’ordonnance de protection immédiate.

Le délai est passé de quarante-deux jours, en 2017, à six jours aujourd’hui. Demain, grâce à cette loi, nous passerons à quelques heures.

Les débats ont permis de tracer les contours et de soulever les enjeux complexes liés à la mise en place de ce dispositif tout à fait novateur et inédit, mais aussi très dérogatoire, en ce sens qu’il conduit à conférer au juge civil des prérogatives de nature quasi pénale, en amont de toute déclaration de culpabilité et, surtout, en l’absence de contradictoire.

C’est pourquoi je tiens à souligner le travail important accompli par la commission mixte paritaire, qui n’a éludé aucun sujet pour parvenir à offrir au juge civil un cadre sécurisé d’intervention urgente. Sous l’égide des deux rapporteures, Mmes Dominique Vérien, pour le Sénat, et Émilie Chandler, pour l’Assemblée nationale, vous avez retrouvé les équilibres initiaux, tout en perfectionnant le texte pour qu’il soit pleinement effectif.

Cela nous permet aujourd’hui de nous réjouir collectivement des avancées concrètes permises par cette proposition de loi.

En premier lieu, celle-ci renforce l’ordonnance de protection délivrée, en allongeant à douze mois la durée initiale de protection des victimes et en précisant que l’absence de cohabitation ne peut être un motif de rejet par le juge.

Ensuite, elle crée l’ordonnance de protection immédiate, nouvelle mesure essentielle, totalement articulée avec la saisine initiale du juge aux affaires familiales, grâce au mécanisme de la requête accessoire laissé à la main du procureur, seul à même de détecter le danger grave et immédiat en évitant tout risque d’instrumentalisation.

Je tiens à rappeler que la partie demanderesse pourra manifester son consentement à la protection immédiate dans le cadre de la requête initiale.

Soyez-en convaincue, madame la rapporteure, nous le préciserons par voie de circulaire et nous modifierons le formulaire de la requête permettant à la victime de produire toutes les pièces utiles à la caractérisation du danger grave et immédiat.

Je tiens également à souligner plusieurs enrichissements d’origine parlementaire.

Le Sénat a souhaité permettre au juge de confier l’animal de compagnie à la personne en danger. Si cette disposition peut faire sourire, il s’agit bien là de répondre à une réalité et de participer à briser les mécanismes de l’emprise. Je sais que vous y teniez, madame la rapporteure ; je suis très heureux que cela figure dans le texte issu de la commission mixte paritaire.

Le texte étend également le mécanisme de l’ordonnance de protection immédiate aux mariages forcés.

Il autorise le juge à suspendre l’exercice du droit de visite et d’hébergement, en cohérence avec les interdictions de contact.

Il autorise la dissimulation de l’adresse de la personne en danger jusque sur les listes électorales.

Enfin, il harmonise et élève les sanctions en cas de non-respect des obligations ordonnées par le juge, en fixant la peine encourue à trois ans de prison et 45 000 euros d’amende.

Vous l’aurez compris, je soutiens pleinement, totalement, le texte élaboré par la commission mixte paritaire, qui intègre toutes les garanties permettant de sécuriser le dispositif, malgré l’absence de contradictoire et de voies de recours, en conciliant la nécessité de l’urgence de la protection avec celle de ne pas porter atteinte aux libertés.

Je souhaite, enfin, répondre à certaines interrogations légitimement exprimées en séance publique. De fait, il convient de garantir l’efficacité de cette réforme, et notre devoir collectif est d’agir en responsabilité.

Le texte sera complété par un décret et une circulaire d’application permettant de décrire avec précision la mise en œuvre opérationnelle du dispositif. Je veillerai personnellement, madame la rapporteure, à la diffusion de tous les outils pratiques qui permettront aux procureurs de détecter les situations les plus urgentes.

Je veux aussi que la mise en place de ces nouveaux dispositifs soit une occasion supplémentaire pour les acteurs judiciaires de travailler ensemble et d’utiliser toutes les passerelles entre les procédures civiles et pénales, notamment dans le cadre des pôles spécialisés VIF, qui renforcent la fluidité de la circulation de l’information pour mieux détecter le danger. C’était là aussi l’une de vos recommandations, madame la rapporteure ; elle est désormais une réalité.

Sous l’impulsion du Président de la République et du Parlement, et grâce à la mobilisation totale de mon ministère, les juridictions se sont adaptées pour diviser par sept les délais d’attribution des ordonnances de protection. Le taux d’acceptation dépasse désormais 70 %. En 2023, 3 997 ordonnances de protection ont été délivrées, contre 1 392 en 2017 – leur nombre a quasiment triplé !

Aujourd’hui, nous avons l’occasion de faire mieux et de franchir une nouvelle étape avec ce texte important, qui renforce et complète notre arsenal pour agir plus vite, plus efficacement et répondre à toutes les situations.

Mon objectif est très clair : améliorer sans relâche nos outils, y compris juridiques, jusqu’à ce que nous parvenions à terrasser ce fléau des violences faites aux femmes. Dans la lutte contre ces violences, il n’y a aucune fatalité ; notre volonté d’avancer est totale.

C’est pourquoi je vous invite, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, à adopter ce texte le plus largement possible. Nous le devons aux victimes et, surtout, à celles qui risquent de le devenir. Il est grand temps de les sauver ! (Applaudissements.)

M. le président. Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, aucun amendement n’est recevable, sauf accord du Gouvernement ; en outre, le Sénat étant appelé à se prononcer avant l’Assemblée nationale, il statue d’abord sur les éventuels amendements, puis, par un seul vote, sur l’ensemble du texte.

Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

proposition de loi renforçant l’ordonnance de protection et créant l’ordonnance provisoire de protection immédiate

Examen des conclusions d'une commission mixte paritaire
Dossier législatif : proposition de loi renforçant l'ordonnance de protection et créant l'ordonnance provisoire de protection immédiate
Articles 1er bis A et 1er bis B

Article 1er

Le code civil est ainsi modifié :

1° AA (nouveau) À l’article 515-9, l’avant-dernière occurrence du signe : « , » est remplacée par le mot : « ou » ;

1° A L’article 515-11 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, après le mot : « vraisemblables », sont insérés les mots : « , y compris lorsqu’il n’y a pas de cohabitation ou qu’il n’y a jamais eu de cohabitation, » ;

b) Après le 3°, il est inséré un 3° bis ainsi rédigé :

« 3° bis Attribuer à la partie demanderesse la jouissance de l’animal de compagnie détenu au sein du foyer ; »

c) À la seconde phrase du 6°, les mots : « l’huissier » sont remplacés par les mots : « le commissaire de justice » ;

1° À la première phrase de l’article 515-12, le mot : « six » est remplacé par le mot : « douze » ;

1° bis L’article 515-13 est ainsi modifié :

a) Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;

b) Il est ajouté un II ainsi rédigé :

« II. – Une ordonnance provisoire de protection immédiate peut également être délivrée en urgence par le juge à la personne majeure menacée de mariage forcé, dans les conditions fixées à l’article 515-13-1.

« Le juge est compétent pour prendre les mesures mentionnées au troisième alinéa du même article 515-13-1. Il peut également ordonner l’interdiction temporaire de sortie du territoire de la personne menacée, à sa demande. Cette interdiction de sortie du territoire est inscrite au fichier des personnes recherchées par le procureur de la République.

« Ces mesures prennent fin à compter de la décision statuant sur la demande d’ordonnance de protection ou qui accueille une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident mettant fin à l’instance. » ;

2° Le titre XIV du livre Ier est complété par un article 515-13-1 ainsi rédigé :

« Art. 515-13-1. – Lorsque le juge aux affaires familiales est saisi d’une demande d’ordonnance de protection dans les conditions prévues au premier alinéa de l’article 515-10, le ministère public peut, avec l’accord de la personne en danger, demander également une ordonnance provisoire de protection immédiate.

« L’ordonnance provisoire de protection immédiate est délivrée par le juge aux affaires familiales dans un délai de vingt-quatre heures à compter de sa saisine s’il estime, au vu des seuls éléments joints à la requête, qu’il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables la commission des faits de violence allégués et le danger grave et immédiat auquel la victime ou un ou plusieurs enfants sont exposés.

« Le juge aux affaires familiales est compétent pour prononcer, à titre provisoire, les mesures mentionnées aux 1° à 2° bis de l’article 515-11, la suspension du droit de visite et d’hébergement mentionné au 5° du même article 515-11 et la dissimulation par la personne en danger de son domicile ou de sa résidence dans les conditions prévues aux 6° et 6° bis dudit article 515-11.

« Ces mesures prennent fin à compter de la décision statuant sur la demande d’ordonnance de protection ou qui accueille une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident mettant fin à l’instance. »

Article 1er
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Article 1er bis

Articles 1er bis A et 1er bis B

(Supprimés)

Articles 1er bis A et 1er bis B
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Article 2

Article 1er bis

I. – L’article L. 37 du code électoral est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu’une mesure mentionnée aux 6° ou 6° bis de l’article 515-11 du code civil a été prononcée, l’adresse de la personne bénéficiaire de l’ordonnance de protection est masquée, dans les conditions fixées au dernier alinéa du même article 515-11 et précisées par décret en Conseil d’État. »

II. – L’article 515-11 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour l’application du dernier alinéa de l’article L. 37 du code électoral, lorsque les mesures mentionnées aux 6° et 6° bis du présent article sont prononcées, le maire et le représentant de l’État dans le département concernés sont, sous réserve de l’accord de la personne bénéficiaire de l’ordonnance de protection, informés par le procureur de la République de ces mesures afin que l’adresse de la personne ne puisse être communiquée à des tiers. »

Article 1er bis
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Article 2 bis

Article 2

Le code pénal est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l’article 227-4-2 est ainsi modifié :

a) Après la première occurrence du mot : « ou », il est inséré le mot : « de » ;

a bis) Après le mot : « civil », sont insérés les mots : « ou dans une ordonnance provisoire de protection immédiate rendue en application de l’article 515-13-1 du même code » ;

b) Les mots : « se conformer à cette ou ces obligations ou interdictions » sont remplacés par les mots : « s’y conformer » ;

c) Le mot : « deux » est remplacé par le mot : « trois » et le montant : « 15 000 € » est remplacé par le montant : « 45 000 € » ;

2° (Supprimé)

Article 2
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Article 3

Article 2 bis

L’article 41-3-1 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Au 1°, après le mot : « protection », sont insérés les mots : « ou d’une ordonnance provisoire de protection immédiate » ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le dispositif de téléprotection est attribué dans le cadre d’une ordonnance provisoire de protection immédiate qui n’est pas suivie de l’octroi d’une ordonnance de protection, la durée de six mois mentionnée au premier alinéa peut être réduite par le procureur de la République. »

Article 2 bis
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 3

I. – L’article 711-1 du code pénal est ainsi rédigé :

« Art. 711-1. – Sous réserve des adaptations prévues au présent titre, les livres Ier à V du présent code sont applicables, dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … allongeant la durée de l’ordonnance de protection et créant l’ordonnance provisoire de protection immédiate, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna. »

bis. – Le début du premier alinéa de l’article 804 du code de procédure pénale est ainsi rédigé : « Le présent code est applicable, dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … renforçant l’ordonnance de protection et créant l’ordonnance provisoire de protection immédiate, en Nouvelle-Calédonie… (le reste sans changement). »

ter. – Le premier alinéa du I de l’article L. 388 du code électoral est ainsi rédigé :

« I. – Le titre Ier du livre Ier du présent code, dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … renforçant l’ordonnance de protection et créant l’ordonnance provisoire de protection immédiate, à l’exception des articles L. 15, L. 15-1, L. 46-1 et L. 66, est applicable à l’élection : ».

II. – L’article 1er et le II de l’article 1er bis de la présente loi sont applicables dans les îles Wallis et Futuna et en Polynésie française.

M. le président. Sur les articles du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je ne suis saisi d’aucun amendement.

Le vote est réservé.

Vote sur l’ensemble

Article 3
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, l’ensemble de la proposition de loi, je vais donner la parole, pour explication de vote, à un représentant par groupe.

La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mme la rapporteure applaudit également.)

Mme Nathalie Delattre. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, il est des textes sur lesquels nous sommes particulièrement fiers que notre Parlement trouve un accord en commission mixte paritaire. Cette proposition de loi en fait partie.

Bon nombre des mesures qu’elle contient proviennent de l’excellent rapport Plan rouge VIF, rendu en 2023 par Émilie Chandler, députée, et notre collègue Dominique Vérien, rapporteure du présent texte au Sénat.

Je tiens à confirmer que les dispositions proposées emportent notre conviction.

En premier lieu, elles répondent malheureusement à un constat toujours aussi alarmant. Comme l’a souligné mon collègue Michel Masset, au nom de notre groupe, lors du précédent examen du texte par notre assemblée, près de 110 féminicides perpétrés par un conjoint ou un ex-conjoint ont été recensés en 2023 et, plus largement, des centaines de milliers de faits de violences conjugales et intrafamiliales sont commis chaque année.

Dans le même temps, le nombre de demandes d’ordonnance de protection pour lutter en urgence contre des violences conjugales a été multiplié par 3,6 entre 2011 et 2021.

Ce constat est forcément en demi-teinte, entre la satisfaction d’observer que les mécanismes que nous instaurons pour protéger les victimes sont fonctionnels et le sentiment de désarroi que suscite leur sollicitation inlassable.

En second lieu, si les dispositions emportent notre adhésion, c’est aussi, et même surtout, parce qu’elles sont pragmatiques, notamment grâce au travail de notre rapporteure, que je souhaite particulièrement féliciter.

Nous approuvons l’article 1er, qui répond à de véritables attentes et qui a notamment été salué par les différents professionnels qui accompagnent les victimes, dont les magistrats.

Ces apports sont indéniables.

D’une part, il double la durée maximale des mesures prises dans le cadre d’une ordonnance de protection, qui passerait de six à douze mois – l’expérience a montré que le délai de six mois était vraiment trop court.

D’autre part, il vient instituer une ordonnance provisoire de protection immédiate permettant à une victime présumée de violences conjugales de saisir le juge aux affaires familiales dans des délais plus restreints. Il s’agit, là aussi, d’un dispositif cohérent, qui permettra à la justice de mieux répondre à la détresse des victimes.

Nous retrouvons dans le présent texte certains apports du Sénat, ainsi que M. le garde des sceaux l’a souligné.

Je pense à la possibilité d’octroyer un téléphone grave danger dans le cadre d’une ordonnance provisoire de protection immédiate, à la garde de l’animal de compagnie, dont vous avez vous-même reconnu l’importance, monsieur le garde des sceaux, ou encore à la possibilité de dissimuler l’adresse d’une personne bénéficiaire d’une ordonnance de protection en cas de demande d’accès aux listes électorales.

D’autres apports sont absents, ce que je regrette vivement.

Je pense en particulier à l’article 1er bis, qui tendait à ce que le juge aux affaires familiales puisse, dans le cadre d’une ordonnance de protection, autoriser la partie demanderesse à dissimuler l’adresse de l’école de ses enfants. Pour avoir parfois assisté à l’exfiltration de mamans et d’enfants de leur domicile, je peux vous dire que nous manquons là un rendez-vous.

Puisque j’évoque cette mesure et les enfants, je veux dire un mot d’une recommandation formulée par la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise) dans le rapport qu’elle a rendu à la fin de l’année dernière, lequel préconisait la création d’une mesure judiciaire d’urgence spécifiquement dédiée aux enfants, pensée sur le modèle de l’ordonnance de protection que nous sommes en train de réformer.

Le 10 avril dernier, la présidente de notre groupe, Maryse Carrère, a déposé, en notre nom, une proposition de loi qui vise à instituer cette ordonnance de sûreté de l’enfant victime de violences. J’ai la conviction qu’un tel mécanisme est attendu tant il reste de chemin à parcourir pour parfaire notre arsenal législatif en vue de la protection des victimes les plus fragiles.

En attendant, le RDSE salue le texte que nous examinons aujourd’hui. Nous voterons unanimement pour. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et UC, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et Les Républicains. – Mme Raymonde Poncet Monge applaudit également.)

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Bravo !

M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

M. Thani Mohamed Soilihi. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, le 21 mai dernier, députés et sénateurs, réunis en commission mixte paritaire, ont trouvé un accord sur une version finale de cette proposition de loi, dont l’enjeu, la protection des victimes de violences intrafamiliales, nous rassemble tous.

Son adoption à l’unanimité par l’Assemblée nationale le 5 mars dernier et par le Sénat le 14 mai en est la preuve manifeste.

L’engagement et le travail constructif des deux rapporteures sur ce sujet ont permis la présentation d’un texte commun de compromis, dont j’espère qu’il sera adopté.

Je tiens à mon tour à saluer le travail de notre rapporteure Dominique Vérien.

La présente proposition de loi contient deux mesures majeures pour protéger les victimes de violences conjugales ou intrafamiliales : la création d’une ordonnance provisoire de protection immédiate, qui pourra être délivrée en vingt-quatre heures par le juge aux affaires familiales en cas de danger grave et immédiat ; l’allongement à douze mois de la durée maximale de l’ordonnance de protection pour permettre de mieux s’organiser.

Notre assemblée a enrichi ce texte dans cet esprit. Je pense notamment à la possibilité d’attribuer un téléphone grave danger en cas d’OPPI, à la possibilité donnée au juge de se prononcer sur la garde provisoire de l’animal de compagnie ou encore à la dissimulation de l’adresse de la victime sur les listes électorales selon des modalités d’application fixées par décret en Conseil d’État.

Des discussions intéressantes ont néanmoins marqué nos débats en séance publique, mais aussi en commission mixte paritaire : d’abord, sur l’exigence du double critère des violences alléguées et du danger ; ensuite, sur la préférence donnée à l’interdiction de paraître dans certains lieux, en l’occurrence l’école des enfants, sur la dissimulation de l’adresse de celle-ci ; enfin, sur l’application effective de la loi.

Sur ce dernier point, monsieur le garde des sceaux, pouvez-vous nous confirmer que la formation des magistrats et des forces de sécurité intérieure sera poursuivie et accentuée ? En effet, si les juges et les procureurs manient de mieux en mieux la notion de danger, c’est bien cette formation qui permettra de faire entendre que le danger peut perdurer ou exister, même lorsque les parties ne vivent pas ou ne vivent plus ensemble !

Pour ce qui concerne la dissimulation de l’adresse de l’école des enfants d’une personne bénéficiaire d’une ordonnance de protection, je peux comprendre l’agacement de certains de nos collègues face à une certaine frilosité. Celle-ci est toutefois liée à la potentielle inconstitutionnalité des modifications qu’ils souhaitaient apporter. Ces considérations constitutionnelles nous obligent également à la vigilance.

En tout état de cause, il nous semble que les mesures contenues dans ce texte – inédites et, pour certaines, dérogatoires aux règles et aux principes fondamentaux de la procédure civile, notamment du contradictoire – sont sécurisées, sans que leur efficacité en soit affectée.

Grâce à cet outil judiciaire d’urgence, les autorités judiciaires disposeront de moyens spécifiques pour empêcher le pire.

Pour toutes ces raisons, le groupe RDPI votera en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et UC.)

M. le président. La parole est à Mme Laurence Harribey, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Laurence Harribey. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen de cette proposition de loi, qui prévoit l’allongement de la durée de l’ordonnance de protection et crée une ordonnance provisoire de protection immédiate, et sur laquelle le Gouvernement a engagé la procédure accélérée, arrive à son terme. C’est une bonne chose.

Alors que le nombre des demandes d’ordonnance de protection est passé de 1 600 en 2011 à 6 000 en 2021, qu’entre 2019 et 2021 seulement 70 % des demandes avaient été acceptées – M. le ministre l’a présenté comme un progrès, et, en quelque sorte, cela en est tout de même un –, et qu’au 23 mai de cette année on recense déjà 41 féminicides, ce texte représente de manière évidente un pas de plus vers la protection des victimes de violences intrafamiliales ; il prend place dans un continuum législatif qui se consolide.

Depuis des années, notre groupe plaide pour l’allongement de la durée de l’ordonnance de protection. Nos collègues Michelle Meunier et Laurence Rossignol avaient ainsi déposé des amendements en ce sens à l’occasion de l’examen de la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants, dite loi Taquet. Quant à notre collègue députée Cécile Untermaier, elle avait déposé en décembre 2022 une proposition de loi prévoyant le passage de six à douze mois de la durée de l’ordonnance de protection. J’avais également repris ce dispositif au travers d’amendements lors de l’examen de la proposition de loi visant à mieux protéger et accompagner les enfants victimes et covictimes de violences intrafamiliales, présentée par la députée Isabelle Santiago.

À l’époque, nos amendements avaient tous été rejetés. Nous sommes donc heureux que cet allongement de la durée de l’ordonnance de protection prenne forme.

L’ordonnance provisoire de protection immédiate est un dispositif d’urgence qui, au vu des chiffres, nous semble indispensable. Vous l’avez souligné, monsieur le garde des sceaux, il s’agit d’une mesure véritablement nouvelle, qui était une proposition phare du rapport de Dominique Vérien. Nous l’avons répété à plusieurs reprises au cours de l’examen du texte : nous y sommes pleinement favorables.

Le travail accompli par la rapporteure et les débats, en commission comme en séance, ont permis d’avancer sur d’autres thèmes, comme l’assouplissement du dispositif, en prévoyant l’ouverture de la saisine du JAF à toutes les personnes ayant demandé la délivrance d’une ordonnance de protection, après avis conforme du parquet.

Nous avons aussi souscrit à l’idée de la suspension provisoire, pendant la durée de l’OPPI, du droit de visite et d’hébergement de l’auteur présumé des violences, et approuvé l’amendement prévoyant que l’adresse du bénéficiaire de l’ordonnance de protection soit masquée sur les listes électorales.

Nous regrettons cependant deux points.

Tout d’abord, un amendement, déposé par notre groupe à plusieurs reprises, visait à dissimuler l’adresse de l’école des enfants au parent auteur des violences ; ce problème est attesté par des cas précis. Cet amendement, qui avait été adopté en séance publique, n’a pas été retenu par la commission mixte paritaire. Soyez certains que nous le redéposerons.

Ensuite, la notion de danger a fait l’objet de longs débats tout au long de l’examen du texte. Nous avions présenté un amendement de compromis tendant à rendre les deux critères alternatifs et non cumulatifs, en remplaçant simplement la coordination « et » par « ou ». Nous comprenons que la réflexion ne soit pas encore mûre, mais nous pensons que cette solution était relativement claire.

Cela étant dit, monsieur le garde des sceaux, vous avez apporté un certain nombre de garanties : nous espérons que les juges pourront les invoquer et que l’on évitera ainsi les jurisprudences allant dans le sens de celle de la Cour de cassation, laquelle insistait sur le caractère cumulatif. L’acculturation à cette notion devrait entraîner des progrès dans ce domaine.

Bien qu’il faille aller encore plus avant, nous voterons ce texte nécessaire qui constitue, j’y insiste, un véritable progrès. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST, ainsi que sur des travées du groupe UC. Mme Laure Darcos applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Elsa Schalck, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mmes Olivia Richard et Laure Darcos applaudissent également.)

Mme Elsa Schalck. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, nous voilà réunis pour cette dernière ligne droite de l’examen d’une proposition de loi qui s’inscrit dans notre combat commun contre les violences conjugales et intrafamiliales.

Avec ce texte présenté par la députée Émilie Chandler, et adopté à l’unanimité au Sénat le 14 mai dernier, nous complétons les outils au service de la protection des victimes. Je voudrais, à mon tour, saluer l’accord auquel la commission mixte paritaire est parvenue.

Cette proposition de loi vient améliorer le dispositif de l’ordonnance de protection par deux dispositions majeures. La première prévoit l’allongement de la durée des effets de cette ordonnance de six à douze mois. La seconde, qui est sûrement la plus importante, crée un outil inédit, l’ordonnance provisoire de protection immédiate.

Je tiens de nouveau, au nom du groupe Les Républicains, à saluer le travail de la rapporteure, Dominique Vérien, qui était déjà très engagée sur le sujet en tant que coautrice du rapport Plan rouge VIF – Améliorer le traitement judiciaire des violences intrafamiliales.

L’ordonnance de protection, créée en 2010, aura donc connu six réformes pour s’adapter aux évolutions. La pertinence de cet outil est illustrée par l’augmentation du nombre de demandes et du nombre d’ordonnances de protection octroyées ; les chiffres ont été rappelés.

Je salue la création de l’ordonnance provisoire de protection immédiate, nouvel outil qui permettra de répondre aux besoins de réactivité et d’urgence. Désormais, une ordonnance pourra être délivrée dans un délai très court, en l’espèce vingt-quatre heures. Il s’agit là d’un apport majeur du texte.

Je me félicite également de l’allongement de la durée de l’ordonnance de protection de six à douze mois, car cette disposition va dans le sens d’une meilleure protection des victimes de violences.

La commission mixte paritaire a validé la modification, proposée par la rapporteure, de l’article 2, qui vise à harmoniser les sanctions en cas de violation de l’OPPI ou de l’ordonnance de protection. Nous avions en effet rappelé qu’il était important de mettre en cohérence ces deux outils.

Je veux aussi, évoquant cet article, dire qu’il est nécessaire de prévoir des moyens pour que les sanctions soient réellement appliquées en cas de violation de l’ordonnance de protection.

Nous devons nous interroger : combien de sanctions sont-elles prononcées à l’encontre de ceux qui violent une ordonnance ? Je tiens à relayer ici les difficultés que peuvent connaître les victimes confrontées à cette situation. J’espère que les pôles VIF permettront d’apporter une réponse concrète en la matière.

Lors de l’examen du texte au Sénat, deux points avaient été particulièrement débattus.

Le premier concernait la saisine du juge aux affaires familiales. Nous étions nombreux à souhaiter ici que la partie demanderesse puisse également être à l’origine d’une demande d’OPPI.

Si cette disposition n’a pas été retenue par la commission mixte paritaire, je veux saluer le compromis que celle-ci a trouvé avec la Chancellerie, qui permet à la partie demanderesse d’apporter des éléments pour caractériser un danger grave et immédiat. Il importe en effet que la victime puisse invoquer des arguments, étant entendu – je le rappelle – que la procédure de l’OPPI est une procédure accessoire à celle de l’ordonnance de protection, dont la victime peut être à l’initiative.

Le deuxième point concernait les conditions d’octroi de l’ordonnance de protection classique. Nous étions, là aussi, nombreux à rappeler qu’il peut toujours y avoir danger, même lorsque la cohabitation a pris fin ou n’a jamais eu lieu.

Je salue la rédaction modifiée de l’article 515-11 du code civil, qui mentionne expressément qu’une ordonnance de protection peut être délivrée même en l’absence de cohabitation entre les deux parties. Il était important de rappeler clairement que l’appréciation du danger ne doit pas être liée au critère de cohabitation. La modification viendra lever ce frein, sur lequel de nombreux professionnels ont attiré notre attention.

Pour toutes ces raisons, le groupe Les Républicains salue le travail de la commission mixte paritaire et votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC. – Mme la rapporteure applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.

Mme Laure Darcos. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, la lutte contre les violences conjugales doit être menée sans faillir tant les chiffres sont effroyables.

Plus de 320 000 femmes ont déclaré avoir été victimes de violences physiques, sexuelles, psychologiques ou verbales en 2022. Cette même année, 118 femmes sont décédées sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint. Une femme meurt en France tous les trois jours ! En outre, 267 femmes ont été victimes d’une tentative de féminicide, échappant de peu à une fin tragique. Ces statistiques sont tout simplement effrayantes.

La proposition de loi allongeant la durée de l’ordonnance de protection et créant l’ordonnance provisoire de protection immédiate s’inscrit dans la continuité de notre engagement pour mieux protéger les victimes de violences conjugales. Cet engagement transpartisan constant a permis, je le rappelle, d’adopter le 22 mai dernier la proposition de loi visant à assurer une justice patrimoniale au sein de la famille. Ainsi se construit, texte après texte, un droit toujours plus protecteur pour les victimes de violences au sein de la famille.

L’ordonnance de protection, dont la création date de 2010, fait partie des dispositifs de protection judiciaire d’urgence indispensables. Le nombre de demandes d’ordonnance de protection est en constante augmentation, preuve s’il en est que ce dispositif est mieux connu des victimes.

A contrario, le choix d’y recourir de plus en plus fréquemment est le corollaire de l’augmentation exponentielle des violences auxquelles les femmes sont exposées dans notre société. Près de 5 800 demandes d’ordonnance de protection ont ainsi été formées en 2022, quand leur nombre n’était que de 1 600 en 2011. Toutefois, les juges aux affaires familiales n’ont fait droit à ces demandes que dans 62,5 % des cas.

En quatorze ans d’existence, l’ordonnance de protection a été marquée par plusieurs évolutions législatives. La présente proposition de loi constitue, certes, la sixième réforme depuis 2010, mais elle se traduit par de nouveaux acquis importants.

Elle permettra en effet de prolonger jusqu’à douze mois, contre six aujourd’hui, la durée des mesures prononcées par le juge dans le cadre d’une ordonnance de protection et de créer un outil judiciaire inédit : l’ordonnance provisoire de protection immédiate.

Aussi, je me félicite que la commission mixte paritaire ait été conclusive. Je me réjouis de l’esprit consensuel ayant présidé aux échanges entre nos deux assemblées. Ils attestent la ferme volonté de la représentation nationale de renforcer la protection des victimes et d’assurer la réactivité de l’action judiciaire.

Plusieurs dispositions introduites par le Sénat en première lecture ont été conservées dans le texte de compromis. C’est assurément un motif de satisfaction.

A notamment été maintenue l’extension des mesures que le juge aux affaires familiales pourra prononcer dans le cadre d’une ordonnance provisoire de protection immédiate, à savoir la suspension de l’autorité parentale et la dissimulation de l’adresse de la victime.

La possibilité pour le procureur de la République d’accorder un téléphone grave danger au bénéficiaire d’une ordonnance provisoire de protection immédiate est, sans aucun doute, la mesure de protection la plus efficace dans le cas d’un conjoint ou ex-conjoint extrêmement menaçant. Il s’agit d’un apport majeur de notre assemblée.

Par ailleurs, dans le cadre de l’ordonnance de protection, la victime pourra obtenir la dissimulation de son adresse en cas de demande d’accès aux listes électorales émanant de l’auteur des violences.

Avant de conclure, permettez-moi de remercier notre rapporteure, Dominique Vérien, qui s’est beaucoup investie sur ce texte, et de souligner son engagement constant et énergique pour faire progresser les droits des femmes.

Monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, cette proposition de loi contient des avancées indéniables en matière de lutte contre les violences conjugales. Elle est une nouvelle traduction de notre détermination collective à faire reculer toutes les formes de violence mettant en danger les personnes au sein de leur propre foyer. Aussi, c’est avec conviction que le groupe Les Indépendants lui apportera son soutien. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – Mme la rapporteure applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Olivia Richard, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur des travées du groupe UC. – Mme Elsa Schalck applaudit également.)

Mme Olivia Richard. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, permettez-moi de rendre, à mon tour, un hommage appuyé à la rapporteure et présidente de la délégation aux droits des femmes, Dominique Vérien, pour son engagement sans faille dans la lutte contre les violences faites aux femmes, notamment perpétrées dans le cadre familial.

Vous le savez, la présidente Dominique Vérien est coautrice du Plan rouge VIF, issu du rapport éponyme visant à améliorer le traitement judiciaire des VIF, qui est une véritable feuille de route. Avec la députée Émilie Chandler, autrice de la présente proposition de loi, notre collègue a démontré qu’il était possible d’agir concrètement pour lutter contre ces violences. Cela passe par une prise de conscience d’un phénomène qui n’est certes pas nouveau, mais qu’il nous appartient collectivement de pointer du doigt.

Pour ce faire, je réaffirme la nécessité, questionnée dans cet hémicycle lors de nos débats en première lecture, de nommer les choses pour qu’elles soient prises en compte. C’est bien pour cela qu’est apparu le terme « féminicide ». Une femme qui est tuée dans son cercle familial l’est parce qu’elle est une femme et que, de tout temps, la sphère privée est restée secrète, ce qui permet les violences.

Utiliser le terme « féminicide », c’est reconnaître cela, en prendre la mesure et le dénoncer. Nommer ces violences pour qu’elles existent, les compter pour qu’elles comptent : ce sont des axes de travail importants au sein de la délégation aux droits des femmes de notre assemblée.

La commission mixte paritaire qui s’est réunie sur ce texte a permis à nos deux chambres de trouver un accord sur les points restant en discussion, et le groupe Union Centriste s’en félicite.

L’article 1er permet de délivrer une ordonnance de protection lorsque les enfants sont en danger. Cette clarification, qui tient en une virgule, permettra de mieux protéger les enfants qui sont désormais, il faut le rappeler, considérés comme des victimes des VIF.

La proposition de loi vise également – c’est tout à fait essentiel – à protéger les femmes qui n’ont pas d’enfants. Être ou ne pas être mère, telle n’est pas la question !

Pour garantir cette protection, le texte issu de la commission mixte paritaire tend à combler une faille que les agresseurs savent très bien exploiter : la publicité des listes électorales. En modifiant le code électoral, le texte que nous voterons aujourd’hui empêchera le conjoint dangereux de retrouver l’adresse de sa victime en consultant, lui-même ou par le biais d’un tiers, la liste électorale.

Si nous évoquons cette faille et essayons de la combler, c’est parce qu’elle nous a été signalée. Permettez-moi à cet égard de saluer, comme l’a fait Dominique Vérien, notre collègue Anne-Sophie Romagny.

Sur un tout autre sujet, ce texte offre également une liberté supplémentaire à la victime : celle de garder l’animal de compagnie du couple dès lors qu’une ordonnance de protection a été délivrée. C’est en effet un outil d’emprise qu’il fallait enlever de la main du conjoint violent.

Lors de l’examen en première lecture, deux points ont été largement débattus.

Il s’agit, tout d’abord, de la notion de danger, interprétée par la jurisprudence de façon trop restrictive. De trop nombreux magistrats estiment que la cessation de la cohabitation éteint la menace : c’est faux et illusoire.

Un compromis a été trouvé sur la rédaction de l’article 515-11 du code civil, et je félicite vivement Dominique Vérien pour sa démarche pragmatique. Les engagements du garde des sceaux ont été entendus, et une augmentation rapide du nombre d’ordonnances accordées est attendue.

Concernant, ensuite, l’ordonnance provisoire de protection immédiate, dont la création, inspirée du Plan rouge VIF, est l’une des principales avancées de ce texte, un compromis a également été trouvé sur la question de l’initiative.

L’OPPI pourra être demandée par le procureur, avec l’accord de la victime. Le nombre des ordonnances effectivement accordées selon cette procédure fera l’objet d’une grande vigilance.

Enfin, une autre nouveauté a été introduite par le Sénat au travers d’un amendement présenté par la présidente Vérien, et que la commission mixte paritaire a conservée : grâce à ce texte, les juges auront la capacité de protéger les femmes victimes de mariage forcé.

Le juge pourra, sur sa demande expresse, prononcer une interdiction de quitter le territoire français à l’encontre de la victime. En tant que sénatrice des Français établis hors de France, je me félicite particulièrement de cette avancée. En effet, en 2023, douze mariages forcés ont pu être évités à l’étranger grâce à l’action de notre administration consulaire. C’est à la fois beaucoup et, hélas, insuffisant. Nous verrons comment la disposition introduite, très précieuse pour les femmes en France, pourra être traduite pour les femmes françaises à l’étranger.

En créant l’ordonnance provisoire de protection immédiate et en allongeant à une année la durée de l’ordonnance de protection, le texte qui nous est présenté marque des avancées importantes pour protéger les femmes.

Mes chers collègues, vous l’aurez compris, le groupe Union Centriste votera avec enthousiasme en faveur des conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – Mme la rapporteure, Mme Marie-Claude Varaillas et M. Laurent Somon applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je prends la parole au nom de ma collègue Mélanie Vogel qui ne peut être présente parmi nous aujourd’hui et vous prie de bien vouloir l’en excuser.

À chaque fois qu’une femme devient victime de harcèlement, de coups, de menaces, de viol, c’est une vie qui est brisée, c’est une femme de plus qui vit dans la peur. Pour lutter contre ces violences patriarcales intolérables, il faut les prévenir, poursuivre les agresseurs et protéger les victimes. Pourtant, ces efforts restent largement insuffisants.

D’abord, la prévention demeure insuffisante. En effet, l’État n’a pas atteint l’objectif fixé par la loi en matière de dispense de cours d’éducation à la sexualité, lesquels participent à la prévention.

Ensuite, les poursuites ne sont pas assez efficaces. Les victimes rencontrent toujours d’énormes difficultés à porter plainte et un violeur est condamné dans seulement 0,6 % des cas.

Enfin, la protection est toujours parcellaire. La présente proposition de loi vise à la renforcer, et j’en remercie sincèrement Émilie Chandler et Dominique Vérien : nous soutenons pleinement ce texte sur lequel elles ont beaucoup travaillé. Celui-ci permettra notamment de compléter le dispositif des ordonnances de protection, lesquelles ne peuvent être délivrées qu’à l’issue d’une procédure contradictoire qui prend nécessairement plusieurs jours.

Imaginez la situation : on vous agresse ; malgré le choc, les blessures et le traumatisme subis, vous réussissez tout de même à demander une ordonnance de protection. Mais avant que celle-ci ne soit délivrée, votre agresseur vous retrouve et vous menace une nouvelle fois…

Les ordonnances de protection ne permettent pas de protéger la victime dans les premiers jours qui suivent l’alerte. C’est pourquoi nous saluons sans réserve la création de l’ordonnance provisoire de protection immédiate, qui vise à accorder plus rapidement une protection.

La liste des mesures pouvant être prononcées pour la mise en œuvre des OPPI a été complétée sur votre initiative, madame la rapporteure. Je me félicite que la commission mixte paritaire ait validé cet élargissement, comme elle l’a fait pour l’octroi des téléphones grave danger.

Nous nous réjouissons également que la durée de l’ordonnance de protection ait été allongée, passant de six mois à un an. Nous avons soutenu cette initiative qui permettra enfin à la France de rattraper son retard dans ce domaine. À Chypre et en Grèce, par exemple, l’ordonnance de protection peut demeurer en vigueur jusqu’à ce que la justice pénale rende un arrêt sur les faits justifiant la mise en vigueur du dispositif. En Finlande, sa durée maximale est de deux ans, et en Italie d’un an.

Le Sénat avait adopté des mesures davantage protectrices des personnes en danger, mais elles ont été supprimées par la commission mixte paritaire, ce qui est dommage.

Ainsi, la commission mixte paritaire s’est opposée à ce que la victime puisse demander elle-même une OPPI, comme l’avait proposé le Sénat. Faire dépendre la délivrance de cette protection des procureurs de la République témoigne-t-elle d’une méfiance envers les juges ? Émilie Chandler justifie la suppression de la mesure que nous proposions par la volonté d’éviter tout risque d’instrumentalisation. Nous craignons pour notre part que, du fait de cette barrière, le dispositif ne soit sous-utilisé.

La commission mixte paritaire est aussi revenue sur l’évolution que le Sénat avait prévue concernant les critères d’examen des ordonnances de protection, c’est-à-dire sur le caractère cumulatif des violences et du danger.

Cette évolution avait fait suite à des travaux transpartisans constructifs qui allaient, au demeurant, dans le sens d’une proposition de loi que l’Assemblée nationale avait déjà adoptée. La commission mixte paritaire a supprimé la disposition au motif qu’il existait un risque d’inconstitutionnalité. Devancer une éventuelle décision du Conseil constitutionnel, c’est limiter le débat parlementaire !

Ce texte a ainsi été amputé de plusieurs mesures qui auraient pu renforcer considérablement la protection des femmes, une protection dont elles ont grandement besoin. Nous le regrettons.

Malgré tout, ce texte comporte des avancées que nous soutenons pleinement. C’est pourquoi le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera en faveur des conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme la rapporteure et M. Christophe Chaillou applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Mme Marie-Claude Varaillas. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite tout d’abord rappeler les chiffres effroyables des violences intrafamiliales en France. En 2022, ce sont 244 000 victimes de violences commises par leur conjoint ou ex-conjoint qui ont été enregistrées par les services de sécurité ; 86 % de ces victimes étaient des femmes.

Ces chiffres sont en hausse : dans notre pays, entre 2022 et 2023, les violences intrafamiliales ont augmenté de 9 % sur tout le territoire.

Mon département de la Dordogne, à dominante rurale, n’est pas épargné. Il ressort du bilan préfectoral de 2023 sur la délinquance que les violences intrafamiliales représentent 63 % des affaires de coups et blessures volontaires. Surtout, la préfecture enregistrait cette même année une hausse terriblement importante des violences intrafamiliales, de 52,8 %. Rendons-nous compte !

Derrière ces chiffres, il y a des femmes meurtries, détruites, victimes. Agir est plus qu’un devoir, c’est un impératif. Je me félicite donc que nous puissions, à l’issue de cette commission mixte paritaire, adopter ensemble cette proposition de loi qui renforce le mécanisme de l’ordonnance de protection et met en place l’ordonnance provisoire de protection immédiate.

Le dispositif de l’ordonnance de protection, mis en place en 2010 et amélioré par plusieurs réformes, permet ainsi au juge aux affaires familiales de statuer sur une situation de danger et de prendre des mesures à l’encontre du conjoint violent, pour protéger les victimes.

Nous avons renforcé le dispositif en allongeant la durée du mécanisme de l’ordonnance de protection de six à douze mois, afin que la victime soit protégée le plus longtemps possible. C’est une victoire !

L’introduction du mécanisme de l’ordonnance provisoire de protection immédiate est également une grande avancée. Désormais, le juge aux affaires familiales pourra prendre des mesures de protection de la victime sous vingt-quatre heures, afin d’interdire au conjoint ou ex-conjoint violent d’entrer en relation avec celle-ci, de se rendre dans certains lieux, mais aussi, par exemple, afin de suspendre l’exercice de l’autorité parentale et d’autoriser la victime à dissimuler son adresse. Ces mesures s’inscrivent bien dans le cadre de la lutte contre les violences intrafamiliales.

Nous souhaitons toutefois rappeler qu’il est nécessaire que des formations à destination des magistrats du siège et du parquet soient mises en place, afin de développer l’usage de ces mécanismes et d’unifier les pratiques sur tout le territoire. En 2022, le ministère public n’était à l’origine que de 2 % des demandes d’ordonnances de protection. Le besoin de formation est donc criant.

Enfin, mes chers collègues, si la protection des femmes victimes de violences intrafamiliales est indispensable, il nous faut également lutter contre le sexisme à la racine, puisqu’il est la cause de ces violences immondes.

Dans un rapport de 2010, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe rappelait d’ailleurs que la lutte contre les stéréotypes sexistes était un outil de prévention de la violence fondée sur le genre. Or, selon le rapport pour 2024 du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, le sexisme est en augmentation dans la société française.

Le sexisme est un tout, justifié par la culture patriarcale. Il procède d’une représentation du monde fondée sur l’inégalité entre les femmes et les hommes, considérée comme naturelle. Il engendre non seulement des inégalités, mais aussi des violences sexistes et sexuelles. Il est à l’origine d’un continuum des violences, des plus anodines en apparence aux plus graves. Dans la mesure où il puise sa source dans le patriarcat, c’est donc bien le système patriarcal dans lequel nous évoluons qui justifie et légitime ces violences.

La lutte contre le sexisme et la lutte contre le patriarcat sont indissociables. On ne peut faire reculer l’un avant l’autre ; ils se nourrissent mutuellement, avancent et reculent de concert. Plus les femmes s’affirment sur la scène publique, plus les préjugés sexistes perdent du terrain dans l’imaginaire collectif. Plus les préjugés sexistes reculent, plus le système patriarcal apparaît pour ce qu’il est.

Les inégalités entre les femmes et les hommes sont aggravées, de surcroît, par la crise et les difficultés sociales qui en résultent, lesquelles touchent plus durement les populations qui sont déjà en situation inégalitaire.

Nous devons lutter ensemble contre ce système patriarcal sous toutes ses formes, au travail, au sein du foyer, dans la rue, dans les lieux d’études, dans les espaces associatifs, sans nous cantonner aux conséquences. Sinon, nous continuerons à perdre du terrain.

Le groupe CRCE-K votera unanimement cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K. – Mme la rapporteure applaudit également.)

M. le président. Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, l’ensemble de la proposition de loi renforçant l’ordonnance de protection et créant l’ordonnance provisoire de protection immédiate.

(La proposition de loi est adoptée.) – (Applaudissements.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Pierre Ouzoulias.)

PRÉSIDENCE DE M. Pierre Ouzoulias

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : proposition de loi renforçant l'ordonnance de protection et créant l'ordonnance provisoire de protection immédiate
 

6

Demande de priorité (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de simplification de la vie économique
Discussion générale (suite)

Simplification de la vie économique

Discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de simplification de la vie économique (projet n° 550, texte de la commission n° 635, rapport n° 634).

La procédure accélérée a été engagée sur ce texte.

Discussion générale

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi de simplification de la vie économique
Article 4 (priorité)

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des entreprises, du tourisme et de la consommation. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis particulièrement ravie de vous retrouver ce soir pour débattre de ce projet de loi de simplification.

Ce texte, vous le savez, s’inscrit dans un plan d’action plus large qui obéit à un seul objectif : simplifier la vie et le quotidien de nos entreprises. Il s’agit de simplifier non pas pour le plaisir, même si cela peut en être un, mais pour libérer du temps utile à nos entrepreneurs, du temps pour qu’ils puissent innover, recruter, se développer – bref, du temps pour entreprendre !

Nous croyons que le rôle des pouvoirs publics en matière de politique économique est d’enlever des cailloux de la chaussure de nos entrepreneurs, et non d’en ajouter ! Alléger la charge normative, les obligations et les sanctions qui pèsent sur eux, c’est alléger leur charge mentale et leur quotidien.

Telle est l’ambition que nous portons avec le Président de la République et Bruno Le Maire depuis 2017.

Depuis cette date, nous avons fait adopter des lois importantes, comme la loi pour un État au service d’une société de confiance, dite loi Essoc, la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi Pacte, ou encore, l’automne dernier, la loi relative à l’industrie verte qui a permis de renforcer notre attractivité industrielle, si cruciale au XXIe siècle.

Nous avons également allégé la fiscalité des entreprises en matière d’impôt sur les sociétés et d’impôts de production.

Ces mesures portent leurs fruits : elles nous ont permis de créer de la croissance, de devenir le pays le plus attractif en Europe pour les investissements étrangers – c’est la cinquième année que nous le sommes –, d’ouvrir de nouvelles usines, de créer deux millions d’emplois en sept ans et de faire baisser substantiellement le chômage.

Pour continuer sur cette lancée, une nouvelle impulsion était nécessaire. Nous avons donc consulté les entreprises, les fédérations et organisations professionnelles, les Françaises et les Français : six mois de consultations, 33 000 participants, plus de 730 000 votes sur la plateforme citoyenne.

Ce projet de loi vient du terrain, des entrepreneurs, mais aussi des parlementaires, dont Nadège Havet que je remercie pour les échanges que nous avons eus et la qualité de son travail. Je veux aussi saluer avec respect et sincérité la qualité du rapport de la délégation sénatoriale aux entreprises et l’engagement de son président, Olivier Rietmann.

Ce texte affiche trois objectifs ambitieux.

Premier objectif : continuer de mettre l’administration au service de toutes les entreprises. La simplification – je n’aurai de cesse de le répéter devant vous –, c’est non pas un choc, mais un état d’esprit, et cela doit devenir l’esprit de l’État à chaque échelon.

Trop souvent, mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez entendu, comme moi, dans vos circonscriptions des entrepreneurs râler à juste titre contre la lenteur d’une administration face, par exemple, à une demande d’extension de site ou d’ouverture d’usine.

Cette remise à plat, nous souhaitons la faire sans totem ni tabou. Nous souhaitons par ailleurs inscrire ce travail dans la durée grâce à des lois annuelles de simplification et un suivi renforcé, qui passeront au peigne fin les normes applicables aux entreprises pour déceler de nouvelles marges de manœuvre.

Le cœur de ce texte, ce sont le stock et le flux de normes dont vous entendrez parler tout au long de la discussion. Nous cherchons bien sûr à abaisser le stock existant, mais des mesures plus structurelles, comme le débat annuel que nous prévoyons d’instituer ou le « test PME » que nous évoquerons à la fin de l’examen du texte, doivent permettre de nous attaquer au flux de normes de façon régulière et rigoureuse.

Deuxième objectif : soulager les acteurs économiques, en particulier les plus petits.

On parle souvent de justice sociale. J’ai travaillé un certain temps en entreprise – dans des petites, des moyennes et une grande – et j’ai même eu l’impertinence de créer la mienne il y a maintenant dix ans. Je peux vous dire qu’il m’est arrivé de râler parce que les TPE ou les PME – vous le savez bien au Sénat – ne sont pas outillées comme les entreprises de taille intermédiaire (ETI) ou les grandes entreprises pour mettre en œuvre ou exécuter les nouvelles normes, pour s’y adapter.

Nous ne sommes pas tous égaux devant la norme selon que l’on soit une petite PME de dix salariés ou une grande ETI dotée d’une équipe spécialisée. Face à la complexité administrative, les entreprises ne sont donc pas égales entre elles ; c’est un véritable enjeu d’égalité économique.

Laissez-moi vous rappeler les chiffres de l’excellent rapport du Sénat relatif à la simplification des règles et normes applicables aux entreprises : 8 heures par semaine, c’est le nombre d’heures consacrées par un tiers des chefs d’entreprise à l’administratif ; 50 %, c’est la part des entreprises qui renoncent à des aides publiques pour cause de complexité. J’y insiste, une entreprise sur deux renonce à une aide, effrayée par la démarche à effectuer pour la demander !

Le non-recours aux prestations sociales est un enjeu majeur de justice ; il est souvent le fait des plus fragiles ou des plus isolés. Force est de constater que c’est un peu la même chose dans le champ de l’entreprise : les plus petites sont parfois isolées et convaincues qu’il est trop compliqué de demander une aide. Ce non-recours est un problème important pour les toutes petites entreprises. C’est pourquoi nous proposons dans ce texte trois mesures qui leur sont destinées.

Il s’agit, tout d’abord, de rapprocher le droit des professionnels et le droit des particuliers en matière de banque et d’assurance pour que les professionnels soient mieux protégés. Concrètement, il faut prévoir la possibilité pour les entreprises de procéder à la résiliation à tout moment de certains contrats d’assurance et de raccourcir les délais d’indemnisation des assurés dans le cadre des dommages aux biens – j’espère qu’il sera de six mois pour les professionnels comme pour les particuliers.

Il s’agit, ensuite, de simplifier les démarches complexes, notamment l’installation et l’exploitation des commerces dans les galeries marchandes et les centres commerciaux, qui nécessitent jusqu’à quatre mois – autant de temps et de chiffre d’affaires perdus pour le commerçant.

Il s’agit, enfin, de libérer la trésorerie pour les entreprises en adaptant le bail commercial, avec notamment la mensualisation des loyers qui permettra de rendre environ 2 milliards d’euros de trésorerie aux commerçants. Ce sujet a émergé à la suite des travaux du Conseil national du commerce (CNC), que j’ai créé il y a maintenant deux ans. Sur ce point, je souhaite saluer l’accord de place historique qui a été trouvé sur les baux commerciaux sous l’égide du CNC et sur lequel j’aurais le plaisir de revenir en détail lors de nos débats.

La simplification des procédures du quotidien, c’est le nerf de la guerre. C’est pour cela que nous proposons également la suppression des formulaires Cerfa à horizon 2030 et de 80 % d’entre eux d’ici à 2026.

J’entends naturellement – j’étais députée avant d’être ministre – votre réticence à donner au Gouvernement une habilitation à légiférer par ordonnance sur ce sujet, mais, si cette habilitation est large, c’est que la matière est très foisonnante : même si nous ne sommes pas d’accord sur la méthode, vous reconnaîtrez que supprimer 1 800 formulaires au Parlement serait un exercice titanesque et une utilisation bien peu respectueuse par le Gouvernement du temps parlementaire.

Bien sûr, le Gouvernement vous rendra des comptes : c’est la moindre des choses ! L’article 1er prévoit qu’un projet de loi de ratification sera déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance.

Troisième objectif : continuer à faciliter et à accélérer les transitions écologique, énergétique et numérique. C’est un enjeu de compétitivité et une question de bon sens. Mes collègues Marina Ferrari et Roland Lescure auront l’occasion de défendre ces mesures devant vous.

Nous souhaitons poursuivre le travail en matière de raccourcissement des délais et d’allégement des conditions d’installation des usines et des centres de données. Nous voulons lever les barrières qui nous empêchent encore d’atteindre notre plein potentiel en matière de géothermie, d’éolien en mer, de stockage du carbone et de biogaz. Nous voulons aussi encourager l’exploitation minière de lithium et de cuivre dans notre sous-sol pour alimenter nos gigafactories de batteries électriques.

Je tiens à préciser que nous serons également favorables aux amendements visant à prolonger le mandat de La Poste comme prestataire du service universel postal et à lui permettre de continuer de contribuer au recensement de la population opéré par l’Insee. Simplifier la vie des Français, c’est aussi garantir un accès équitable à ce grand service public sur tout le territoire ; ces amendements y contribueront.

Je le redis, ce projet de loi a vocation à enlever des cailloux de la chaussure de nos entrepreneurs. Car – soyons lucides – le temps que nous examinions ce texte, une dizaine de normes nouvelles seront peut-être entrées en vigueur !

C’est la raison pour laquelle la simplification doit devenir une hygiène du quotidien, d’abord pour l’exécutif : nous devons nous attaquer non seulement au stock de normes, mais aussi au flux ; sinon, nous risquons de réinventer le mythe de Sisyphe.

C’est dans cet esprit que le projet de loi met en place une nouvelle méthode pour mieux appréhender les effets concrets sur les entreprises, TPE et PME.

Nous voulons que tous les projets de loi qui concerne les entreprises, mais également les textes réglementaires lorsque le Gouvernement l’estimera utile, fassent l’objet d’un test PME. La loi en posera les principes grâce à l’intégration des propositions de la remarquable délégation sénatoriale aux entreprises dont je salue de nouveau le travail.

Avant de conclure, permettez-moi, mesdames, messieurs les sénateurs, de vous dire que le Gouvernement prend bonne note des craintes exprimées lors des travaux de la commission spéciale – certaines sont légitimes.

Je pense notamment à celle relative à la simplification du bulletin de paie. La situation actuelle ne satisfait personne : l’élaboration du bulletin de paie est coûteuse pour l’entreprise et celui-ci est peu lisible pour le salarié. (M. Thomas Dossus sexclame.) Nous souhaitons inverser cette logique : le bulletin de paie de demain doit comporter moins d’informations, mais de meilleures informations.

C’est un travail de longue haleine, à n’en pas douter, qui commence par l’établissement d’un nouveau format de bulletin par voie réglementaire, auquel nous travaillerons avec les partenaires sociaux d’ici à 2027 ; notre cible étant de parvenir à quinze lignes, les principales, comme c’est le cas chez nos voisins européens.

Pour autant, soyons clairs, le salarié continuera, s’il le souhaite, d’avoir accès à toute l’information : l’entreprise la gardera à sa disposition, comme c’est déjà le cas, mais sous le format le plus simple pour elle, et le salarié pourra la consulter avant 2030 sur le portail national des droits sociaux. Le Gouvernement attache en effet une importance primordiale à ce que cette réforme ne se traduise pas par une charge supplémentaire pour l’employeur. (Exclamations sur les travées du groupe GEST.)

Mesdames, messieurs les sénateurs, ce projet de loi est désormais entre vos mains, et je ne doute ni de votre soutien à cette ambition de simplification ni de votre capacité à améliorer le texte. Je remercie de nouveau les rapporteurs et la commission spéciale pour le sérieux de leurs travaux.

Il n’est pas un aboutissement, c’est un point de départ. Comme je le disais, la simplification est non pas un choc, mais un état d’esprit, et elle doit devenir l’esprit de l’État. Nous devons y travailler chaque année – c’est pourquoi nous proposons un débat annuel – et elle doit sous-tendre chaque projet de loi qui concerne nos entrepreneurs : nous en débattrons à l’article 27 avec le test PME.

Le défi est immense, nous en sommes conscients. Léonard de Vinci le disait bien mieux que moi : « La simplicité est la sophistication suprême. » (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme le rapporteur. (Applaudissements sur des travées du groupe UC.)

Mme Catherine Di Folco, rapporteur de la commission spéciale. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes aujourd’hui réunis pour examiner le projet de loi de simplification de la vie économique.

Au regard de l’ambition que traduit cet intitulé et de l’attente de nos entreprises, confrontées sur le terrain et au quotidien à la complexité de notre droit et à la culture bureaucratique de notre administration, nous ne pouvions que nous réjouir que le Gouvernement emboîte enfin le pas au Sénat dans son effort continu de simplification du droit.

Quelle ne fut pas notre déception de constater la faiblesse du texte qui est aujourd’hui soumis à notre examen ! Accumulation de mesures largement techniques, ce texte a la pâle apparence d’un squelette, dont la chair serait, pour l’essentiel, constituée des ordonnances qu’il reviendra au Gouvernement de prendre à l’abri du regard du Parlement.

Je tiens à cet égard à réitérer notre position et à déplorer le dépôt par le Gouvernement d’amendements tendant à rétablir les trois habilitations à légiférer par voie d’ordonnances supprimées par la commission spéciale.

Le soutien du Sénat à la prise de mesures de simplification demeure entier – je veux le réaffirmer très clairement – et notre opposition à ces habilitations n’a nullement pour objet, comme feint de le croire le Gouvernement, de s’opposer à ces mesures. Il est en revanche particulièrement problématique que le Gouvernement estime qu’une œuvre aussi importante que celle de la simplification de la vie économique de nos entreprises puisse se faire sans le Parlement.

Alors que celui-ci a montré sa capacité à se saisir de textes amples et techniques, l’examen par le Parlement d’un texte spécifique paraît une manière bien plus expédiente de faire valoir l’intérêt de nos entreprises, en particulier les TPE et PME, que la prise d’ordonnances dans la rédaction desquelles la bureaucratie administrative finit toujours, nous le savons bien, par avoir le dernier mot.

Outre la suppression de ces habilitations particulièrement malvenues, la commission a tâché de faire œuvre utile et apporté des compléments qui lui ont paru nécessaires.

Je pense en particulier à l’article 6 : la main du Gouvernement a manifestement tremblé dans son geste simplificateur. La commission spéciale a parachevé le travail en supprimant purement et simplement le droit d’information des salariés en cas de cession d’une entreprise de moins de 50 salariés.

M. le ministre Le Maire s’en était remis à la sagesse des parlementaires sur l’opportunité du maintien d’un tel dispositif et avait fort justement souligné que l’on peut « légitimement s’interroger sur l’efficacité du dispositif ». Doit-on en déduire que le Gouvernement retirera l’amendement de rétablissement qu’il a, à ma grande surprise, déposé à l’article 6 ?

Sur la plupart des autres sujets, l’examen en commission spéciale a d’ores et déjà permis d’enrichir le projet de loi.

Je pense en particulier à l’article 27, entièrement réécrit de manière à préserver le texte voté par le Sénat en mars dernier sur l’initiative d’Olivier Rietmann. Cela permet, à la place d’une disposition initiale plutôt lapidaire et à la portée normative incertaine, d’introduire, pour la première fois, un véritable test PME et une procédure d’évaluation systématique de l’impact des projets de texte sur les entreprises.

Sur ce sujet comme sur d’autres, nous nous sommes ainsi efforcés de donner quelque souffle à ce texte protéiforme, pour ne pas dire fourre-tout.

Je forme néanmoins le vœu que les prochains projets de loi consacrés à la simplification annoncés par le Gouvernement – une fois par an, nous dit-on – puissent faire l’objet d’une meilleure association, en amont, du Parlement. En effet, trop de sujets n’auront pas pu être réglés en raison du périmètre initial du projet de loi, à la fois ample par le nombre des sujets qu’il aborde et restreint par la portée réelle des mesures qu’il contient. Rendez-vous donc l’année prochaine ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Roger Karoutchi applaudit également.)

M. Yves Bleunven, rapporteur de la commission spéciale. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, lorsque j’ai pris connaissance de ce projet de loi visant à simplifier la vie économique, je dois reconnaître que j’ai été assez décontenancé par sa complexité.

Il y a autant de sujets différents que d’articles, presque autant de mesures visant à simplifier la vie de l’administration que de mesures visant à simplifier la vie des entreprises, et presque davantage de mesures orphelines et disparates rattachées à un véhicule-balai que de mesures visant un réel objectif de simplification.

L’ambition de ce projet de loi est sans commune mesure avec celle de ses prédécesseurs. Ce texte n’est pas un premier essai, mais c’est le premier d’un exercice de simplification annoncé annuellement et que nous appelons de nos vœux. La copie est loin d’être satisfaisante, mais nous soutiendrons les futurs exercices de simplification à trois conditions.

La première, c’est que les intentions du Gouvernement et ses volontés de réforme soient mieux précisées, mieux définies et plus transparentes.

La deuxième, c’est que le Gouvernement s’engage en faveur de la stabilité normative pour simplifier la vie du monde économique. Ce projet de loi est utilisé pour modifier des lois à peine votées, certaines n’étant même pas encore totalement applicables, et pour supprimer des dispositions adoptées par le Parlement contre l’avis du Gouvernement. Évitons de rouvrir inutilement les débats récents sur la production d’énergies renouvelables, sur l’industrie verte ou encore sur l’artificialisation des sols.

La troisième condition, c’est que le Gouvernement s’engage à consulter davantage, en particulier les partenaires sociaux. Nous avons tous été stupéfaits de constater que les organisations syndicales et patronales ont unanimement critiqué le dispositif sur les bulletins de paie, considérant qu’il était une source inutile de confusion et de complexité.

M. Yves Bleunven, rapporteur. C’est pourquoi la commission spéciale a supprimé le dispositif proposé.

Au sein de ce texte à l’identité encore mal définie, je relève toutefois quelques bonnes mesures techniques et sectorielles auxquelles la commission spéciale a apporté son soutien.

Je pense par exemple aux mesures de simplification de la vie des commerçants telles que la mensualisation des loyers commerciaux, l’encadrement du montant et du délai de restitution des dépôts de garantie et les mesures d’assouplissement de la politique d’aménagement commercial.

J’ai souhaité y ajouter une mesure visant à favoriser la réouverture de cafés et de bistrots dans les petites communes, la ruralité étant encore trop souvent oubliée.

Je pense également aux dispositions relatives aux secteurs de la banque et des assurances, que la commission spéciale a souhaité compléter afin de rééquilibrer le rapport de force entre assureurs et assurés au bénéfice de nos entreprises.

Je pense enfin aux mesures de simplification de la compensation de la biodiversité, les fameuses mesures compensatoires environnementales. C’est une attente très forte des acteurs de nos territoires.

Parmi les différents secteurs d’activité concernés par ce projet de loi, je constate que trois d’entre eux suscitent une attention toute particulière.

Tout d’abord, dans le secteur des télécommunications, si les mesures proposées n’ont pas grand-chose à voir avec de la simplification, elles permettent quand même de mieux lutter contre la spéculation foncière sur les emplacements d’antennes-relais. C’est l’opportunité pour le Sénat, sous l’impulsion de certains de nos collègues, de plaider en faveur d’une meilleure information des élus locaux, d’une plus grande mutualisation des infrastructures de télécommunications et d’une régulation plus efficace du marché.

Ensuite, dans le secteur de l’énergie, la commission a souhaité apporter son soutien à la plupart des mesures de simplification du droit minier, ainsi qu’au déploiement d’installations de productions d’énergie renouvelable, en cohérence avec les travaux menés sur les enjeux de notre future programmation énergétique.

Enfin, en matière d’urbanisme et de déploiement de projets industriels et d’infrastructures stratégiques, nos travaux sont utilement complétés par ceux du groupe de suivi des dispositions législatives et réglementaires relatives à la stratégie de réduction de l’artificialisation des sols, dit groupe de suivi ZAN.

En conclusion, si ce texte nous permet d’obtenir des avancées sectorielles significatives, ce sera déjà une première victoire. Cela fait longtemps que nous parlons de simplification, alors offrons à nos entreprises de véritables changements ! Soyons constructifs ensemble, écoutons-nous et surtout, madame la ministre, n’oubliez pas l’expertise que le Sénat peut apporter sur le sujet ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDSE et Les Républicains. – Mme Nadège Havet applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Nadège Havet. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe UC.)

Mme Nadège Havet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, non sans une certaine ironie, le rapport sénatorial de juin 2023 consacré à la sobriété normative et présenté par nos collègues Rietmann, Moga et Devinaz commençait de la façon suivante : « Nul chef d’entreprise n’est censé ignorer les 11 176 articles du code du travail, les 7 008 articles du code de commerce ou encore les 6 898 articles du code de l’environnement. »

Avec plus de 400 000 normes, la France se classe en effet au deuxième rang des pays dans lesquels la bureaucratie est la plus complexe. C’est un constat qu’il faut savoir affronter. Il doit aussi interroger nos pratiques en tant que législateurs. Oui, il faut simplifier, mais sans déréguler ni recomplexifier.

Nous devons déjà appliquer les règles existantes, et ce de façon homogène, expliquer les règles que nous adoptons et former ceux à qui elles sont destinées avant de faire le procès de leur non ou mauvaise mise en œuvre.

Je le rappelais en séance il y a deux mois : le coût des normes est estimé à 84 milliards d’euros par an, soit 3 % du PIB. L’excès de normes, leur imprévisibilité, leur complexité pèsent négativement sur l’activité de nos entreprises, mais il y a une autre conséquence : cette inflation normative crée de la désespérance et un sentiment d’inutilité sociale.

J’ai été frappée par les témoignages que j’ai entendus ces dernières semaines lors de mes rencontres, dans le Finistère ou les Yvelines aux côtés de mon collègue Martin Lévrier, venant de personnes travaillant dans des secteurs d’activité aussi variés que l’agriculture, la restauration, le bâtiment ou la coiffure : « il faut arrêter de légiférer sans cesse », « vous adoptez une norme qui vient mettre fin à une autre qu’on n’a pas encore eu le temps d’appliquer » ou « la loi, ça allait encore, mais, à la fin, on ne comprenait plus rien à la circulaire ».

En parallèle – je répète souvent cette phrase qui me vient de mon expérience de responsable d’équipe à Pôle emploi, aujourd’hui appelé France Travail –, il est urgent de passer d’un principe de contrôle à un principe de confiance.

Il est vrai que simplifier est complexe dans un pays légicentriste. C’est pourtant nécessaire, aujourd’hui comme demain. Et ce n’est pas seulement vrai pour les entreprises. Ainsi, dans son récent rapport, Éric Woerth a notamment souligné que l’enchevêtrement des responsabilités, des compétences et des financements entre l’État et les collectivités territoriales avait atteint un niveau de complexité préjudiciable et que la réussite de la décentralisation nécessitait une vaste clarification et de s’attaquer à la simplification normative.

La simplification est une exception, elle doit devenir la règle : c’est ce que vous avez rappelé, madame la ministre, lors de votre audition devant la commission spéciale.

Simplifier les démarches des acteurs économiques afin de poursuivre le soutien à la croissance et le travail de renforcement de l’attractivité de la France. Tel est l’objectif de ce projet de loi qui s’articule autour de trois axes.

Tout d’abord, il s’agit de mettre l’administration et le droit au service de l’économie, en simplifiant l’organisation et les démarches administratives, l’accès à la commande publique et les obligations pesant sur les entreprises, en facilitant le règlement des litiges et en garantissant la prise en considération de l’impératif de simplification dans la durée.

Ensuite, il faut soutenir les petits acteurs économiques, qui n’ont pas les moyens humains de mettre en œuvre les normes pensées pour les grands acteurs, en rapprochant leur droit de celui des particuliers et en simplifiant les formalités permettant le développement des commerces.

Enfin, il est nécessaire de faciliter les transitions écologique, énergétique et numérique.

Notre groupe salue cette ambition portée par le Gouvernement depuis 2017.

Cette ambition s’était déjà traduite dans la loi de 2018 pour un État au service d’une société de confiance, qui a notamment consacré le principe d’un droit à l’erreur.

Un an plus tard, d’importantes avancées dans la simplification de la vie des entreprises ont également été consacrées dans la loi Pacte, comme vous l’avez rappelé, madame la ministre.

Plus récemment, la loi du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte a aussi permis d’accélérer la transition écologique des entreprises, tout en soutenant leur développement industriel.

Mais il faut aller plus loin ! Le 15 novembre dernier, le Journal des entreprises titrait : « Contraintes administratives : le ras-le-bol des PME et ETI. » Le même jour, les Rencontres de la simplification étaient lancées. Des consultations auprès des représentants des fédérations professionnelles ont permis de recevoir près de 1 500 propositions. Un espace numérique spécifique a recueilli 5 300 contributions et près de 730 000 votes.

Avec quatre députés, nous avons également mené un travail d’échanges. Dans le rapport que nous avons rendu en février dernier, nous proposons quatorze pistes de réflexion visant à simplifier la vie des entreprises, fruit de cinquante déplacements et de trente réunions publiques organisées avec des acteurs économiques. Ce travail a pu nourrir le projet de loi dont nous discutons ce soir, qui est en fait l’acte 2 de ce nouveau volet parlementaire, après la proposition de loi visant à rendre obligatoires les tests PME de notre collègue Olivier Rietmann, dont les dispositions ont été intégrées au présent texte par voie d’amendements en commission.

L’objectif du test PME sera d’évaluer la faisabilité de la mise en œuvre concrète de nouvelles mesures concernant les entreprises, ainsi que le coût associé. Toute disposition jugée démesurée au regard des objectifs visés devra être adaptée. Dans ce cadre, nous sommes favorables à la création d’un organe consultatif.

En commission, mardi dernier, quatre-vingt-dix amendements ont été adoptés, dont un grand nombre émanant de nos rapporteurs ; je veux saluer ici le travail qu’ils ont mené dans un temps contraint.

La commission a notamment élargi les possibilités ouvertes par l’article 20 en matière de dérogation aux règles des plans locaux d’urbanisme pour l’installation de systèmes de production d’énergie renouvelable sur les bâtiments existants. Elle a adopté deux amendements du groupe RDPI visant à étendre le champ d’application de cet article aux installations de production de réseaux de chaleur et de froid efficaces et aux revêtements réflectifs innovants sur les toitures.

Il nous reste maintenant à débattre et, surtout, à poursuivre cet effort de simplification afin de faciliter la vie de nos entreprises. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Dominique Vérien applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Michaël Weber. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Michaël Weber. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la simplification est aujourd’hui sur toutes les lèvres : « simplification massive » du Premier ministre ; simplification « à fond la caisse » du Président de la République, « choc de simplification » du ministre de l’agriculture. Le dernier avatar en date est la « simplification de la vie économique » de M. Le Maire, ministre de l’économie, dont l’objectif louable est de fluidifier les démarches et les procédures, et ce sans jamais remettre en cause les droits essentiels.

Je décèle ici une manière très française de raisonner, par dichotomie. C’est le fameux dualisme cartésien : le corps se conçoit indépendamment de l’esprit, et l’esprit indépendamment du corps. On modifie la lettre de la loi, en criant au loup de l’inflation normative, mais sans porter préjudice à son esprit ; on clarifie la forme, on supprime la partie purement bureaucratique et administrative pour améliorer l’effectivité du droit et la sécurité juridique tout en garantissant le fond, le respect des principes et des valeurs dont le droit est garant.

Ce projet de loi illustre néanmoins l’impossibilité de faire une distinction aussi manichéenne entre le fond et la forme. Le Gouvernement, en procédant ainsi dans l’urgence, veut soit ignorer la technicité de l’exercice de simplification à droit non constant, soit faire de ce mot la caution de sa politique du passage en force.

Simplifier peut être de bonne gouvernance si cela ne signifie pas dérégulation et régression du droit au profit d’une minorité d’acteurs. Il appartient au législateur de garantir que la vie économique respecte nos valeurs en matière sociale, écologique et démocratique. Une bonne simplification permet l’effectivité des droits. Tel n’est pas le cas ici.

Tout au contraire, on s’attaque au droit des salariés et on le fragilise, on détricote le droit de l’environnement, on rogne les compétences des élus locaux dans les territoires, on déroge aux règles de droit commun pour l’implantation de projets industriels sans jamais poser la question de leur acceptabilité sociale, pourtant essentielle à leur réussite.

Il y a un problème de méthode, qui est aussi un problème démocratique. Un tel projet de loi, qui concerne une myriade de secteurs, allant du monde du travail aux prérogatives des collectivités, en passant par l’énergie, la santé, la fonction publique, l’environnement et l’urbanisme, ne peut se faire dans l’urgence, sans concertation et sans un travail minutieux d’expertise sur l’effet produit par la suppression de telle ou telle norme.

Nous avons eu quinze jours pour examiner un texte technique comprenant une trentaine d’articles : c’est un véritable déni démocratique et un mépris affiché pour le travail parlementaire, qui soulignent le caractère paradoxal de ce projet de loi.

En effet, alors que le Gouvernement soutient qu’il veut que le droit soit plus cohérent et plus lisible pour les citoyens, il produit dans la précipitation un texte sans cohérence et donc peu lisible, dont les implications réelles sont obscures. Ce texte est éloquent par ce qu’il ne dit pas et par ce qu’il dissimule, à l’image de ce bulletin de paie sur lequel le Gouvernement voudrait faire disparaître les cotisations sociales, lesquelles garantissent pourtant nos droits sociaux.

Cette circumnavigation du droit, qui aboutit à simplifier les règles pour certains, mais à les complexifier pour la majorité, montre bien le biais de ce gouvernement.

La vie économique, ce n’est pas que la vie des entrepreneurs, c’est aussi celle des salariés, des administrés et des citoyens. Ni les syndicats ni les associations environnementales n’ont été associés à ce projet de loi, qui touche pourtant, entre autres, au travail et à l’environnement. À cet égard, l’exemple des compensations environnementales réécrites à l’article 18 pour les rendre parfaitement inopérantes est assez significatif.

Autres exemples : la suppression du délit d’entrave à l’audit de durabilité ou celle de la prise en compte du bilan carbone dans la production de biogaz. Derrière le cri de guerre – « supprimer de la bureaucratie » –, ce sont en réalité des mécanismes de contrôle et d’enquête publique, garantissant concrètement l’ambition écologique de la France, qui sont jetés aux oubliettes.

Les règles de droit protègent l’intérêt général et sont donc rarement inutiles. Avoir des exigences fortes pour la protection du bien commun est essentiel. Que le Gouvernement s’attelle donc, dans un premier temps, au véritable chantier de simplification à droit constant afin de simplifier l’accès au droit sans attenter à son contenu ! Nous sommes favorables à une simplification qui rende la loi plus lisible et cohérente, mais pas à ce qui fragilise les droits.

Par ailleurs, la multiplication des régimes dérogatoires à des dispositions dont l’encre est parfois à peine sèche n’est pas de nature à simplifier les règles et à faciliter leur application. C’est bien plutôt la cause d’une complexité accrue du droit et d’une instabilité juridique. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Pierre Barros applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Rémy Pointereau. Il y a moins de trois semaines, vous étiez auditionnée, madame la ministre, avec M. le ministre des finances, par la commission spéciale sur le texte que nous examinons aujourd’hui. Vous aviez alors indiqué que ce projet de loi constituait l’un des piliers de la stratégie française présentée à l’Union européenne. Nous ne pouvons que constater qu’il s’appuie sur de nombreux travaux conduits par le Sénat. À cet égard, je remercie mes collègues rapporteurs, Catherine Di Folco et Yves Bleunven, du travail qu’ils ont accompli en si peu de temps.

Je vous avais dit que nous étions particulièrement sensibles, dans les différents domaines de l’action publique, à la question de l’empilement des normes et à la nécessité de distinguer la norme qui protège de celle qui entrave inutilement. Nous sommes donc prêts à relever avec vous le défi de la simplification, sans toutefois renoncer aux prérogatives du Parlement, et à l’exercice de notre mission de législateur. C’est pourquoi nous ne souhaitons pas abuser des ordonnances sans limitation et sans objet précis que vous nous proposez…

Au Sénat, nous n’aimons pas confondre vitesse et précipitation. Or nous avons disposé de moins de douze jours utiles pour travailler sur ce texte. Malgré cela, nous avons fourni un travail sérieux, reposant notamment sur les avis des organismes nationaux que vous avez vous-même auditionnés, ou de ceux que vous n’avez pas entendus – je pense aux organisations syndicales représentatives.

Malgré ce court délai, nous avons tenu à entendre les acteurs au plus près du terrain en organisant des auditions « locales ». Vous le savez, le son de cloche n’y est pas le même qu’à l’échelon national. Sil les acteurs demandent, réclament, de la simplification, ils veulent qu’elle soit bien réelle et pas seulement de façade, qui conduit souvent en réalité à une complexification. Je veux parler bien sûr des bulletins de paie, qu’il faudra finalement faire en double : un simple, de quinze lignes, et un autre, de trente-sept lignes !

Nous avons approuvé plusieurs mesures du texte, notamment celles qui permettent une meilleure évaluation des normes à venir, mesure que nous avons complétée en reprenant le texte adopté en mars dernier par le Sénat sur l’initiative du président de la délégation sénatoriale aux entreprises, Olivier Rietmann.

En ce qui concerne le stock de normes, nous savons que nous ne pouvons pas tout traiter dans ce texte. Cela suscitera bien sûr beaucoup de déceptions, dans les entreprises, mais aussi chez les sénateurs et les sénatrices. Nous devons travailler tant sur le stock que sur le flux.

Nous avons d’ores et déjà obtenu des avancées sur plusieurs sujets qui concernent le quotidien des entreprises, comme l’accès aux marchés publics, les relations avec les assurances ou la transmission des TPE et PME. Nous avons voulu, sur ces points, aller au bout de la logique de simplification. Bien sûr, des progrès restent à faire. Je pense notamment à la lutte contre les recours abusifs, qui minent la conduite de projets et les stoppent dans certains cas.

Ainsi, nous avons œuvré en responsabilité. Pourtant, nous avons de vifs regrets. En effet, vos services vous ont proposé d’intituler ce projet de loi : « simplification de la vie économique », ce qui exclut le monde agricole et les collectivités territoriales. Soyez assurée, madame la ministre, que nous ferons en sorte que la simplification soit également au cœur des projets de loi les concernant que nous aurons à examiner au cours des semaines à venir.

Nous avons tenu à marquer notre attachement à l’implantation des commerces dans les zones rurales en facilitant leur ouverture. Nous avons, en revanche, refusé les mesures qui pouvaient apparaître comme de la simplification, mais qui ne l’étaient pas pour les acteurs. Il faudra peut-être plus de concertation et de conviction, notamment en ce qui concerne la réforme du contentieux.

Dans l’ensemble, nous avons tenté de faire œuvre commune et d’entamer une démarche qui pourrait être reprise pour les lois de simplification à venir.

Même si ce projet de loi ne constitue pas le grand rendez-vous de la simplification que nous attendions, puisqu’il ne s’attaque à l’océan normatif qu’à la petite cuillère, il a le mérite – c’est encore plus vrai après le travail de la commission – de sortir la simplification de son statut d’Arlésienne, ce qu’elle était jusqu’alors.

Nous vous donnons déjà rendez-vous, madame la ministre, pour examiner le prochain texte sur la simplification ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Avec plaisir !

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Brault.

M. Jean-Luc Brault. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la bureaucratie est bien souvent la mort de tout travail sensé, disait Einstein. La France dispose, hélas, d’une certaine expertise en la matière. Par la réglementation, parfois la surréglementation, nous tuons beaucoup d’initiatives. Surtout, on tue dans l’œuf les initiatives de jeunes entrepreneurs – et j’apprécie, comme vous, madame la ministre, le mot « entrepreneur ».

En temps de crise comme en temps normal, la France se caractérise par tout un cortège de déclarations sur l’honneur, de demandes d’autorisation et de déclarations. Ce penchant pour la complexification est une réalité pesante tant pour nos concitoyens que pour nos entreprises.

Entrepreneur moi-même, j’ai coutume de dire qu’il faut être fou pour être chef d’entreprise, pour ne pas dire inconscient. Aujourd’hui, les démarches administratives se multiplient et les erreurs sont lourdement sanctionnées. Il y a de quoi décourager les plus tenaces et les jeunes entrepreneurs.

Il faut reconnaître au Gouvernement une volonté de remédier à cela. La loi Pacte, la loi d’accélération et de simplification de l’action publique, dite loi Asap, mais aussi la création d’un droit à l’erreur ou encore la mise en place du guichet unique des formalités des entreprises : voilà autant d’initiatives qui vont dans le bon sens, si elles aboutissent.

Afin d’accompagner cette dynamique, nous nous félicitons de l’adoption du nouvel article 3 bis, issu du travail de notre collègue Dany Wattebled et porté par notre groupe. Prévoir que le silence gardé par l’administration vaut acceptation est un excellent principe. Madame la ministre, j’ose croire que, dès demain, nos PME et nos TPE vont vraiment constater une amélioration.

L’administration avait malheureusement trop strictement encadré ce principe, allant presque jusqu’à le renverser. L’adoption de la disposition en commission devrait lui redonner tout son sens, en permettant davantage de simplicité et une plus grande économie de moyens.

Je vous proposerai également de voter un amendement tendant à améliorer l’exécution des contrats de sous-traitance lorsque le sous-traitant est placé en redressement judiciaire. Il est essentiel de raccourcir les délais de remplacement du sous-traitant pour permettre au plus vite la reprise des chantiers. En outre, il convient de ne pas sanctionner plus lourdement et financièrement les collectivités dans le cadre de marchés publics.

Le projet de loi que nous examinons constitue l’un des volets législatifs de la démarche de simplification lancée par l’exécutif. La commission spéciale a fait le choix de supprimer toutes les demandes d’habilitation à légiférer par ordonnances que le Gouvernement avait sollicitées. Nous comprenons tout à fait qu’elle défende jalousement les prérogatives du Parlement. Il ne faudrait cependant pas que la suppression de ces habilitations aboutisse à un abandon pur et simple des réformes envisagées.

Il est en effet urgent de modifier les régimes administratifs de déclaration et d’autorisation. L’ampleur particulière de ce travail nous paraît justifier une habilitation. Il nous semble également essentiel de développer la procédure du rescrit, dont nos concitoyens ont tant besoin.

Si ces dérogations simplifient la vie de ceux qui y sont éligibles, elles complexifient à coup sûr notre droit. Quand les dérogations se multiplient, c’est peut-être le signe que le droit commun doit être revu.

Le rescrit ou les dérogations sont en fait les symptômes d’une maladie particulièrement délétère qui affecte notre pays depuis de trop nombreuses années : l’inflation normative. En vingt ans, le volume des lois et décrets a plus que doublé. Nous devons absolument changer notre mode de fonctionnement. L’ensemble du Sénat en est conscient et nous tentons collectivement d’y remédier. Le volume des normes a cependant crû de près de 20 % au cours des sept dernières années. Nous devons faire mieux.

Benjamin Constant disait : « La multiplicité des lois flatte dans les législateurs deux penchants naturels, le besoin d’agir et le plaisir de se croire nécessaires. » À nous de le faire mentir, madame la ministre, de montrer à nos concitoyens que les lois que nous votons simplifient et améliorent effectivement leur vie et de faire en sorte que, demain, le mot « entrepreneur » prenne tout son sens. L’entrepreneur est là pour créer, améliorer, construire, avec des compagnons heureux et fiers de leur entreprise ! (M. Martin Lévrier applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Michel Canévet. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Michel Canévet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le groupe Union Centriste plaçait beaucoup d’espoir dans ce projet de loi de simplification de la vie économique, qui vise aussi à réduire les normes, car il y en a beaucoup dans notre pays.

Je dois vous dire que nous avons été déçus, madame la ministre, d’une part, par la technicité de ce texte et, d’autre part, par son manque d’ambition. Il y a tellement de sujets à traiter que nous aurions aimé que le texte soit plus garni. Hélas, il n’en est rien !

En outre, à notre plus grand désespoir, la commission, dont les travaux ont été menés de façon majestueuse par Rémy Pointereau et les deux excellents rapporteurs Catherine Di Folco et Yves Bleunven, a fait un usage immodéré des articles 40 et 45 de la Constitution. Nous avions pourtant fait des propositions intelligentes, qui ne seront malheureusement pas examinées en séance. Nous le regrettons amèrement, mais nous essaierons tout de même d’apporter un certain nombre d’améliorations sur quelques points du texte.

Ce texte a suscité de nombreuses attentes dans les départements, notamment chez les entrepreneurs que, tous autant que nous sommes, nous rencontrons régulièrement. Ils nous disent tous qu’il y a trop de lourdeurs administratives.

Samedi dernier, j’ai participé au soixantième anniversaire d’une entreprise dans le Finistère. Le chef d’entreprise, qui est de la race des seigneurs, fustigeait les lourdeurs administratives, les dossiers très détaillés qu’il faut compléter pour qu’un projet puisse se concrétiser, qu’il s’agisse d’ouvrir une carrière ou un centre de stockage et de revalorisation des déchets. Il y a encore beaucoup à faire !

De nombreux acteurs économiques se plaignent également du manque d’écoute et de réactivité des administrations. Or, aujourd’hui, les choses allant assez vite, il importe que l’administration accompagne les entreprises au lieu de les faire patienter.

Très concrètement, on constate dans nos départements que des procédures qui devraient aller de pair sont bien souvent disjointes. À titre d’exemple, quand un permis de construire et une autorisation pour une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE) sont nécessaires, les dossiers ne sont pas étudiés conjointement, alors que tous deux sont soumis à la signature du préfet. Je connais un cas dans le Finistère : alors que le permis de construire a été délivré, le dossier relatif à l’ICPE n’a même pas été ouvert…

Beaucoup de chemin reste donc à parcourir pour que les entreprises obtiennent des réponses de l’administration et puissent bénéficier d’un accompagnement pour concrétiser leurs projets.

Cela a été dit par les orateurs qui m’ont précédé, ce texte prévoit un certain nombre de mesures qui ne nous semblent pas simplifier la vie des entreprises. Je pense en particulier à celles relatives à la fiche de paie. Les organisations que nous avons auditionnées nous ont dit que ces mesures n’apporteront aucune simplification tant que le portail des droits sociaux annoncé ne sera pas en service. Quand il le sera, nous pourrons alors engager une réelle démarche de simplification du bulletin de paie.

Par ailleurs, nous devons veiller à ce que certains autres articles du texte ne conduisent pas à réduire la concurrence dans les territoires. On parle ainsi de déroger à l’allotissement. Il nous faut être attentifs au fait que cette disposition pourrait entraîner l’exclusion d’un certain nombre de PME des marchés publics. Dans le secteur des antennes téléphoniques aussi, nous devons veiller à ne pas réduire la concurrence. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – Mme Nadège Havet applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Thomas Dossus. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous étudions aujourd’hui un texte dit de simplification économique, lequel fait suite à un rapport pompeusement intitulé Rendre des heures aux Français, ce qui ne manque pas d’ironie, permettez-moi de le souligner, madame la ministre, sachant que vous leur avez pris deux ans l’année dernière !

Nous avons suivi attentivement les auditions menées par les rapporteurs dans un délai très contraint, mais nous avons également conduit nos propres auditions. Le constat est unanime : le texte, étudié en toute hâte, présente d’énormes trous dans la raquette, de nombreux publics visés n’y ayant pas été associés par le Gouvernement.

Certes, le projet de loi s’appuie sur une consultation citoyenne, qui a donné lieu à une publication en janvier, mais les objectifs affichés semblent davantage refléter les priorités des directions centrales que les besoins des parties prenantes. Le Conseil d’État ne dit pas autre chose dans son analyse du texte. Une telle hâte nuit à la qualité de l’analyse et compromet la légitimité des réformes proposées.

Nous ne sommes pas les seuls à avoir du mal à trouver du sens à ce texte fourre-tout, six articles ayant déjà été supprimés en commission. Cette dernière a elle aussi fait œuvre de simplification ! (Marques dironie sur les travées du groupe GEST.) Nous nous réjouissons toutefois de certaines de ces suppressions, que nous considérons comme des améliorations.

Je pense ainsi à l’article visant à simplifier la fiche de paie, mesure qui a été rejetée par l’ensemble des syndicats, patronaux comme salariés. Cette simplification n’était qu’une pure démarche de propagande, une opération de communication visant à renforcer la vision biaisée que le Gouvernement a des cotisations sociales et à masquer leur utilité pour les salariés, et ce sans bénéfice de temps pour les employeurs.

Certains articles visent prétendument à rationaliser les normes environnementales, ce qui suggère qu’elles sont une source de complexité inutile. Dans la droite ligne des reculs écologiques du Gouvernement, le projet de loi engage donc un recul brutal du droit et de la démocratie environnementale.

En prévoyant des dérogations aux règles du droit environnemental et en qualifiant les data centers de projets d’intérêt national majeur afin de faciliter leur implantation sur le territoire français, vous ouvrez la porte à l’installation de grands projets à impact environnemental élevé et réduisez l’acceptation de ces projets. Aucune audition n’a permis de quantifier les installations prévues par le Gouvernement au travers de ce dispositif. Nous signons donc là un nouveau chèque en blanc pour l’artificialisation des sols.

Dans la droite ligne de ces reculs écologiques, vous choisissez de diminuer les mesures de compensation des atteintes à la biodiversité. Cette modification ne simplifie rien, mais en supprimant l’obligation de résultat vous risquez de porter fortement atteinte à la biodiversité. Compenser les atteintes dans un « délai raisonnable » – notion vague ! – ne permet pas d’assurer une compensation efficace et nécessaire.

De plus, les sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation (SNCRR) créés par la loi de 2023 relative à l’industrie verte risquent de perdre leur intérêt avant même d’être mis en œuvre. Quel est en effet l’intérêt de compenser une atteinte aux milieux vivants une fois que ces milieux auront été détruits ?

Il est essentiel d’instaurer un cadre clair pour les mesures compensatoires, car les obligations peuvent provenir de législations variées. Une réglementation cohérente aide les porteurs de projet à comprendre et à répondre aux obligations, évitant ainsi l’incertitude et la complexité. Affaiblir la compensation, c’est aussi affaiblir l’acceptation des grands projets industriels. Vous allez soulever des oppositions toujours plus fortes, madame la ministre, et faire perdre du temps à tout le monde.

Ce texte acte des reculs environnementaux en usant de l’alibi de la simplification. C’est donc un texte dangereux !

Dans un autre registre, le test PME prévu par un article du projet de loi était, avant son passage en commission, totalement vide de sens. Non codifié, cet article n’avait aucune portée. Nous saluons donc l’adoption des amendements y afférents en commission.

Toutefois, nous souhaitons exclure de cette évaluation les normes relatives aux droits sociaux, environnementaux ou sanitaires relevant de la compétence du haut conseil à la simplification pour les entreprises. Nous proposons également d’étendre le test PME en prévoyant une consultation des acteurs syndicaux. En effet, 99 % des effectifs des PME sont des salariés. C’est donc avant tout à eux qu’il faut s’intéresser.

Le texte prévoit finalement de supprimer un certain nombre de commissions nationales consultatives. Il semble pertinent de poursuivre la réflexion en s’interrogeant sur le bien-fondé de la prolifération de conseils créés par décret autour du Président de la République, car ils accentuent la concentration des pouvoirs et l’hyperprésidence.

Nous pensons que les différents organes d’État intervenant dans les secteurs de la prospective ou de la planification sont très éparpillés, surtout dans un contexte de demande forte de leviers pour la transition écologique. Le Haut-Commissariat au plan est à cet égard un exemple notable. Nous vous proposerons une simplification de tous ces outils, qui sont nécessaires.

En conclusion, nous nous opposons à un texte qui, malgré la diversité des mesures qu’il prévoit, masque mal le cap dangereux du Gouvernement. Nous refusons de soutenir une législation qui sacrifie les normes environnementales au nom de la simplification administrative. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. le président. La parole est à M. Pierre Barros.

M. Pierre Barros. Madame la ministre, lors de la présentation du projet de loi, vous avez affiché l’ambition de réaliser une véritable révolution, pour « changer la culture de l’administration » au travers d’une nouvelle étape, celle de la simplification.

Nous avons malheureusement été déçus de découvrir ce texte, qui s’apparente plus à une compilation de mesures dérogatoires qu’à une réelle démarche de rationalisation du droit. Pire, ce projet de loi contribue, lui aussi, à l’inflation législative et introduit de l’insécurité juridique dans de nombreux domaines.

Multiplier les dérogations, le risque contentieux ou encore les comités Théodule est loin d’être à la hauteur de l’ambition affichée.

Notons également que nous demander d’examiner dans un délai de quinze jours, en procédure accélérée, un projet de loi dans lequel sont juxtaposées nombre de mesures sectorielles témoigne d’une stratégie peu respectueuse du Sénat. Je salue donc le travail colossal réalisé par les rapporteurs de la commission, qui a permis de supprimer de nombreuses aberrations du texte initial.

Par ailleurs, la remise en cause dans certains articles de la loi relative à l’industrie verte, adoptée pourtant il y a moins de six mois, illustre également la volonté du Gouvernement de contourner le Parlement.

En outre, la version initiale du texte ne comportait pas moins de trois demandes d’habilitation à légiférer par voie d’ordonnances. Vous osez même revenir sur une décision, datant de 2020, du Parlement, qui avait refusé de supprimer la Commission supérieure du numérique et des postes. Votre désir de déréguler les droits des travailleurs et de les rendre invisibles est, cette fois encore, parfaitement clair !

L’article 7, comportant la prétendue simplification de la feuille de paie – qui n’a jamais été une demande des syndicats patronaux, et encore moins des salariés –, en est l’exemple flagrant. C’est bien pour cette raison que la commission a décidé à l’unanimité de le supprimer. Votre volonté de le réintroduire par voie d’amendement est clairement une insulte au travail du Sénat.

Tout au long de ce texte, on sent bien qu’il y a deux poids, deux mesures : la confiance pour les patrons, la défiance pour tous les autres. Ces autres, vous n’avez pas même pris la peine de les consulter : je parle ici des syndicats de salariés. Vous prônez la confiance, l’indulgence, le droit à l’erreur, l’allégement des contrôles sur les entreprises et, en même temps, vous organisez la traque des chômeurs, la multiplication des contrôles et des mesures vexatoires. Vous voulez redonner du temps utile aux entrepreneurs alors que, en même temps, avec votre réforme des retraites, vous avez organisé la privation du temps de vie en bonne santé de millions de nos concitoyens.

Cette remise en cause permanente des droits des travailleurs, pourtant premiers acteurs de la vie économique, n’est pas acceptable. Votre leitmotiv du « en même temps » devient lui aussi insupportable et vous permet de vous attaquer désormais à la protection de la biodiversité. C’est ainsi que vous arrivez à clore le titre VII, intitulé « Faciliter l’essor de projets industriels et d’infrastructures », par l’article 18, qui sacrifie la biodiversité au profit du développement économique. Vous nous présentez ensuite des mesures, dans le titre VIII, visant à « simplifier pour accélérer la transition énergétique et écologique de notre économie ». Remarquable coup de maître, malheureusement en défaveur de la transition énergétique !

Que dire de votre méconnaissance de nos territoires et de leurs dynamiques, que l’on constate quand vous remettez en cause les compétences des élus locaux en matière de projets d’aménagement de zones d’activités ou commerciales ?

Vous l’aurez compris, nous ne partageons ni le diagnostic ni les solutions prévues par ce texte.

Une véritable révolution culturelle aurait sans doute été de faire une évaluation fine et complète des lois Pacte, Essoc et Asap, avant de nous vendre de nouveau un prétendu allégement des contraintes, lequel ne fait que masquer la pénurie de personnels en mesure d’accompagner correctement les entreprises et les particuliers dans leurs rapports à la loi et à la règle.

Comme l’a dit le ministre de l’économie Bruno Le Maire, « la confiance ne se décrète pas, elle se construit ». Il a raison, mais elle se construit avec tous les acteurs de la vie économique : chefs d’entreprise, certes, mais aussi salariés, collectivités locales, administrations locales et services de l’État dans nos territoires.

Nous ne voterons pas pour un texte qui apportera de la complexité et de l’opacité en lieu et place d’une stabilité du droit et d’un meilleur respect de la norme, qu’elle soit législative ou réglementaire. Ce projet de loi fait fi d’un renforcement des moyens et des compétences nécessaires à une mise en œuvre juste et efficace. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)

M. le président. La parole est à M. Michel Masset. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Michel Masset. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, voici venu le temps de la simplification de la vie des entreprises !

Les constats sur lesquels se fonde ce projet de loi sont certains. Le rapport La sobriété normative pour renforcer la compétitivité des entreprises, rendu en 2023 par la délégation aux entreprises du Sénat, nous avait en effet alertés sur le fardeau qui pèse sur nos entreprises. La délégation appelait alors à une politique publique de long terme, fondée sur l’évaluation de la norme, loin donc des coups de communication.

Avec mon collègue Christian Klinger, nous avions fait un constat similaire en matière de foncier économique : l’écosystème administratif national et local s’est complexifié, ce qui engendre une insécurité juridique certaine. Nous avions aussi tiré le signal d’alarme sur la réduction nette des effectifs de l’administration déconcentrée. Ce dernier point appelle une observation importante : pour être efficace, la simplification nécessite des investissements.

De ces rapports ressort une réalité forte : nos PME et nos TPE, alors même qu’elles constituent l’essentiel de notre tissu économique et qu’elles font vivre nos territoires, sont les principales victimes de ces complexifications. Nous devrons l’avoir à l’esprit, notamment lors de l’examen de l’article 27, relatif aux tests PME, qui résulte d’une initiative bienvenue du président Rietmann.

De surcroît, particulièrement en France, la simplification est une entreprise de longue haleine, nécessitant une volonté politique affirmée, une indispensable prudence et un refus des discours simplistes, qui atteindraient de manière pernicieuse l’esprit de nos lois.

Enfin, j’aimerais attirer l’attention de notre assemblée sur la nécessité de l’évaluation, corollaire inévitable de la simplification. Il est indispensable de capitaliser sur l’existant. Or, au cours des dernières années, des lois visant à favoriser la compétitivité de nos entreprises ont été adoptées. Je pense notamment à la loi relative à l’industrie verte votée il y a à peine sept mois, le 23 octobre 2023, qui prévoit par exemple une dérogation à l’obligation d’allotissement des marchés publics. Cette dérogation sera étendue par l’article 16 du présent projet de loi sans qu’un bilan ait pu être tiré de la mesure déjà entrée en vigueur. Quant à l’étude d’impact, elle est quasi muette sur ce sujet.

Autre exemple frappant, cette étude d’impact révèle que l’article 19 modifie une procédure qui ne doit entrer en vigueur que dans moins d’un mois, le 1er juillet 2024.

Il ne faut pas confondre simplification et précipitation. Prenons garde à concilier la temporalité législative et celle du monde économique car, si les entreprises appellent de leurs vœux la simplification, elles demandent également que la fréquence des modifications juridiques leur permette de s’adapter et d’anticiper.

Voilà pour la méthode, venons-en aux actes. Je l’ai dit, il ne faut céder ni aux mesures simplistes ni au discours de dépolitisation des politiques publiques. L’abrogation ou la simplification des normes doit avoir un sens politique clair. La libéralisation de certaines réglementations revient évidemment à promouvoir les secteurs que celles-ci encadrent. Maintenons une transparence sur les objectifs visés !

J’attire donc votre attention sur les divers écarts faits dans le cadre de l’application des PLU pour des projets d’intérêt national ou des installations privées. Ces mesures reviennent, dans certains cas, à dessaisir les élus locaux de leur compétence en matière d’urbanisme. Je nous invite à prendre garde à ces dérogations.

Enfin, j’aimerais relayer une inquiétude relative à l’application du projet de loi dans les outre-mer. Il est indispensable de prendre sérieusement en compte les spécificités de ces territoires, qui sont souvent les grands oubliés de nos politiques publiques. Je pense notamment à la question de la médiation, prévue à l’article 9, qui revêt une importance particulière.

Ces points de vigilance dans la philosophie de la démarche simplificatrice étant posés, je veux souligner l’importance de certaines mesures de ce projet de loi. Je pense au renforcement de l’utilisation de la plateforme dite profil d’acheteur ; à l’amélioration des relations entre le monde économique et l’administration ; ou encore à l’accélération des procédures contentieuses.

Mes chers collègues, nous aurons l’occasion d’en discuter tout au long de nos débats, mais nous pouvons dire à titre liminaire que le fait que l’existence même de ce texte montre que nous allons dans le bon sens. Aussi le groupe RDSE l’aborde-t-il favorablement. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme Audrey Linkenheld. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Audrey Linkenheld. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, simplifier, oui, nous pouvons nous accorder sur cette intention louable, tant la complexité de notre système normatif peut parfois peser sur le quotidien des entreprises ou des administrations. Mais simplifier comme le propose le Gouvernement, au détriment des droits sociaux et environnementaux, nous ne pouvons l’accepter !

Ce projet de loi de simplification manque de cohérence, et se trompe souvent de cible. Vous proposez ainsi, madame la ministre, de simplifier le bulletin de paie des salariés, en limitant les informations qui y figurent. Faire disparaître le détail des cotisations sociales et le paiement des heures supplémentaires, c’est pourtant prendre le risque de ne plus permettre aux salariés de détecter de potentielles erreurs. C’est également imposer une nouvelle obligation aux entreprises, celle de collecter, conserver et transmettre les données supprimées aux salariés quand ils en font la demande. Où est la simplification ? En réalité, il n’y en a pas ! Il existe, en revanche, un risque, et peut-être même une volonté, d’invisibiliser les droits sociaux, dans le but – qui sait ? – de les amoindrir ultérieurement.

Limiter les droits, c’est ce que vous tentez de faire aussi avec l’article 6. La loi de 2014 relative à l’économie sociale et solidaire, dite loi Hamon, obligeait un employeur à avertir ses salariés de son projet de cession d’activité avec au moins trois mois de délai. L’objectif de la mesure était clair : préserver l’emploi en permettant aux salariés de présenter un éventuel projet de reprise.

Ce délai a déjà été réduit à deux mois, et vous proposez dans ce texte de le réduire encore à trente jours. Il est pourtant impossible, en si peu de temps, de monter un projet sérieux. Vous rendez donc tout simplement ce droit ineffectif. D’ailleurs, ayant saisi votre intention, la rapporteure de la commission spéciale a, « pour aller au bout de la logique poursuivie », acté la suppression totale du droit d’information. Notre groupe proposera son rétablissement.

Quant à l’article 5, qui porte sur l’unification du contentieux de la commande publique au profit de la compétence du juge administratif, nos travaux ont montré, là encore, que cette réforme serait, notamment pour les entreprises publiques locales, source de complexification plus que de simplification. Nous nous félicitons donc d’avoir obtenu la suppression de cet article et nous nous opposerons à votre demande de le rétablir.

Les mesures les plus radicales de ce texte de simplification sont sans doute celles relatives aux démarches déclaratives des entreprises, aux rescrits sectoriels et aux contrats spéciaux. Sur ces sujets, vous nous demandez de vous habiliter à légiférer sur tout par ordonnance. Cela revient à vous donner un blanc-seing alors que les travaux de la commission spéciale, malgré les efforts des deux rapporteurs, ne nous ont en rien éclairés sur l’impact des réformes que vous envisagez sur la législation sociale, fiscale et environnementale.

Par conséquent, en dépit des modifications prévues dans les amendements que vous avez déposés en vue de la séance, nous estimons que le champ d’habilitation reste trop large. Notre groupe refusera donc la réintroduction des articles 2, 3 et 11, supprimés par la commission spéciale.

Je tiens d’ailleurs à saluer le rétablissement, par cette même commission, de la Commission supérieure du numérique et des postes. Pour en être membre depuis peu, je puis témoigner de son travail régulier et je ne peux cautionner la volonté du Gouvernement de priver les députés et les sénateurs d’un espace de travail utile sur des sujets numériques à forts enjeux sociétaux.

Finalement, malgré quelques rares avancées, comme sur la mensualisation des baux commerciaux, ce projet de loi se révèle plus décevant que simplificateur. Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain vous appelle donc, pour la suite de son parcours parlementaire, à envisager la simplification économique moins comme une occasion de déréguler que comme une opportunité d’accélérer les transitions écologique et sociale, qui sont les véritables leviers d’un développement économique soutenable pour les hommes et la planète. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à Mme Patricia Demas. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Patricia Demas. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je félicite à mon tour les membres de la commission spéciale, et en particulier les deux rapporteurs et le président Pointereau, pour leur travail, accompli dans des délais contraints.

Mon propos se concentrera sur l’article 17 du projet de loi, dont j’ai appris l’existence alors que je me trouvais à Bercy, avec la secrétaire d’État chargée du numérique, Marina Ferrari, pour échanger sur la proposition de loi que je venais de déposer en réponse à l’exaspération de nombreux maires de mon département des Alpes-Maritimes, impuissants face à l’implantation anarchique d’antennes-relais.

La simplification prévue à l’article 17 du projet de loi est motivée avant tout par la volonté d’accélérer la couverture en téléphonie mobile de notre pays. Plus précisément, cet article vise à renforcer le dispositif de lutte contre la spéculation foncière et à modifier le code de l’urbanisme afin de déroger à la possibilité pour une administration – et même, pour le maire – de retirer une décision d’urbanisme permettant l’implantation d’antennes-relais. Il renforce les obligations d’information du maire, incombant à toute personne qui devient propriétaire ou exploite un terrain, accueillant, ou destiné à accueillir, des antennes-relais. Il vient d’être utilement enrichi par des amendements adoptés par la commission spéciale ; je félicite d’ailleurs leurs auteurs.

Il convient cependant d’aller plus loin, dans le respect des prérogatives des maires, pour la protection des riverains, de l’environnement et du cadre de vie, mais aussi de la santé publique, et dans le respect – indispensable – d’un minimum de règles par les opérateurs.

Dans un monde où les besoins de connexion croissent de manière exponentielle et où la dynamique de construction des réseaux est devenue un enjeu essentiel, la téléphonie mobile est une pierre angulaire de notre société. Il est indéniable que les retards dans l’installation des antennes de téléphonie mobile ont des répercussions défavorables et qu’il nous faut accélérer le processus de déploiement. Pour autant, cela ne doit pas se faire aux dépens de l’intérêt général des territoires et de la sobriété.

Les retards observés ne sont pas seulement dus à des contraintes techniques. Ils sont souvent le résultat de litiges et d’oppositions locales, alimentés par des préoccupations légitimes concernant l’aménagement du paysage, ou encore les effets sur la santé et l’environnement.

C’est là que réside l’importance cruciale de la mutualisation des infrastructures de téléphonie mobile, et je proposerai des amendements pour la renforcer, qui reprennent les dispositions de ma proposition de loi que je qualifierai « de terrain ». Si j’en juge par le nombre de ses cosignataires et celui des amendements que je présenterai à l’article 17, ce sujet concerne tous les départements de France !

En partageant au maximum les installations existantes, nous pouvons non seulement réduire les délais d’implantation et le nombre d’antennes, mais aussi minimiser leur impact visuel et environnemental.

Imposer la justification du non-recours à la mutualisation d’infrastructures permettra d’étudier, dès le début d’un projet d’implantation, toutes les possibilités. Cette anticipation permettra d’aboutir à une décision équilibrée qui, forcément, sera plus rapide à mettre en œuvre et évitera un certain nombre de contentieux.

En faisant cela, nous instaurons un dialogue transparent et constructif entre les opérateurs et les communautés locales. Rééquilibrons le rapport de force !

En favorisant la mutualisation des infrastructures, nous aidons à atteindre l’objectif d’accélération du déploiement qui figure à l’article 17 du texte. Nous ouvrons aussi la voie à un avenir où la connectivité et la sobriété vont de pair. Le déploiement optimisé des antennes de téléphonie mobile est bien plus qu’une simple question de connexion ; c’est un impératif moral et environnemental.

Pour finir, je me réjouis du sauvetage, sur l’initiative des rapporteurs, de la Commission supérieure du numérique et des postes. Depuis que j’en suis membre, j’ai en effet pu mesurer tout l’intérêt de son travail et constater sa dynamique, sous l’impulsion de notre collègue Damien Michallet, dans un monde où le numérique et ses déclinaisons occupent une place croissante. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Anne-Sophie Romagny. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en tant que chef d’entreprise, le projet de loi que nous examinons me tient particulièrement à cœur puisqu’il concerne la simplification de la vie économique.

Cependant, je ne peux vous cacher ma déception, sincère et profonde, quant au contenu du texte déposé par le Gouvernement et, surtout, aux délais impartis pour l’examiner : un tout petit mois, et même à peine quinze jours ! Il s’agit pourtant d’un enjeu majeur pour notre économie. La véritable question est donc : nous donnez-vous réellement les moyens de vos ambitions ? Je n’ose y répondre…

Peu de mesures contenues dans le texte du Gouvernement visaient concrètement à améliorer le quotidien de nos entrepreneurs, qui doivent, à eux seuls, être à la fois commerciaux, informaticiens, directeurs des ressources humaines, techniciens de l’environnement, comptables, juristes et experts dans la jungle administrative qui s’impose à eux chaque matin.

Vous le savez, madame la ministre, la simplification est un enjeu majeur et un chantier d’ampleur.

Je souhaite d’ailleurs présenter mes remerciements au président Pointereau et aux rapporteurs Yves Bleunven et Catherine Di Folco pour les travaux colossaux qu’ils ont réalisés en un temps extrêmement restreint, ainsi qu’aux membres de la commission spéciale mobilisée pour proposer des mesures effectives.

D’une part, la commission spéciale a fait le choix de supprimer les mesures aux effets plus qu’incertains. À titre d’exemple, nous avons supprimé les articles 2 et 3, qui concentraient les effets d’annonce du Gouvernement sans qu’aucun travail de fond ait été engagé par celui-ci pour connaître exactement les mesures envisagées. Je pense par exemple à la mise en œuvre du principe « dites-le-nous une fois », qui manque cruellement de substance : il devrait à lui seul faire l’objet d’un texte.

Les représentants des administrations que nous avons entendus lors de nos différentes auditions ont apporté des témoignages édifiants, qui montrent que les services ne sont absolument pas prêts : « nous n’avons pas les chiffres », « techniquement, nous ne savons pas comment faire », « cela risque d’être très long », ou encore « c’est extrêmement complexe »… De fait, nous n’allons pas réduire trente ans de complexification en un mois. Mais nous ne pouvons pas entendre, comme seul propos rassurant, que le Gouvernement a « dépêché une task force sur le sujet ». Nous risquons, une fois de plus, de décevoir sur un sujet attendu.

Nous avons également fait le choix de supprimer l’article 7, relatif à la redéfinition du bulletin de salaire. Ce dispositif, présenté comme exemplaire par le Gouvernement, n’apportait aucune simplification pour les employeurs et n’était d’ailleurs demandé par personne.

D’autre part, la commission spéciale s’est attachée à combler le manque d’ambition de ce projet de loi, notamment en renforçant l’article 27, qui porte sur le test PME, par la reprise des dispositions de la proposition de loi d’Olivier Rietmann, adoptée très récemment par notre chambre.

À titre personnel, je suis très sensible à cette dernière mesure, qui fait écho au rapport que nous avons rendu avec Marion Canalès en février dernier sur la directive CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive), relative à la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises. Nous proposions notamment d’expérimenter le « test PME-CSRD ». Je sais, madame la ministre, que vous avez mené une étude sur le sujet, et je me réjouis que nos travaux aient pu modestement être utiles.

Le groupe Union Centriste est favorable à cette version du projet de loi modifiée, améliorée – et simplifiée – par le Sénat, même si nous affirmons, d’ores et déjà, que la tâche de la simplification n’est pas terminée et qu’il faudra, rapidement, y revenir. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. Hervé Reynaud. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Hervé Reynaud. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi de simplification de la vie économique, dont nous débutons l’examen aujourd’hui, était attendu. Il part d’un constat très ancien, celui de l’inflation normative dans laquelle excelle notre pays.

Le Sénat s’est depuis longtemps inquiété de ces contraintes normatives. Lorsque les normes concernent les entreprises, elles peuvent constituer un frein à leur compétitivité en pénalisant leur développement en France comme à l’international, ainsi que leur capacité d’innovation.

Simplifiez, simplifiez, il en restera toujours quelque chose : pas forcément ! Certes, de même qu’il existe un bon et un mauvais cholestérol, il convient de distinguer, comme l’a dit Rémy Pointereau, la norme qui protège de celle qui entrave. Mais le coût macroéconomique de la réglementation pesant sur les entreprises est évalué à 3 % du PIB, soit plus de 60 milliards d’euros par an.

Depuis plusieurs années déjà, notre Haute Assemblée travaille sur cette question. Récemment, le rapport d’information du 15 juin 2023, rédigé par nos collègues Gilbert-Luc Devinaz, Jean-Pierre Moga et Olivier Rietmann, a pointé l’importance de l’évaluation indépendante.

Je me réjouis que ce projet de loi de simplification de la vie économique intègre le mécanisme du test PME, déjà adopté en mars dernier. Mais permettez-moi, madame la ministre, de revenir une fois encore sur la méthode. Comme un certain nombre de mes collègues, je tiens à souligner le décalage entre l’importance que ce texte revêt pour notre tissu économique, les dispositions minimalistes qu’il comportait initialement et les délais bien trop courts qui nous sont laissés pour l’examiner.

Certes, concertation il y a eu, vous l’avez plaidé en audition, mais la coconstruction que vous mentionnez n’a pas abouti puisque, notamment, les organisations syndicales n’ont pas apprécié d’être négligées. Le Conseil d’État lui-même regrette le bref délai dont il a disposé pour examiner ce projet de loi, alors « que l’urgence qui s’attache à l’adoption des mesures proposées n’est pas avérée ».

Les auditions tenues par les rapporteurs Catherine Di Folco et Yves Bleunven ont cependant apporté un éclairage nouveau sur certains points et permettent de présenter aujourd’hui des mesures concrètes. Je voudrais ici féliciter Rémy Pointereau d’avoir présidé tambour battant ces réunions.

Dans le titre III du projet de loi, facilitant l’accès de toutes les entreprises à la commande publique, je salue le fait que l’accès à une plateforme unique et dématérialisée soit simplifié et que les entreprises puissent candidater simplement en utilisant leur numéro Siret. Mais nous aurions aimé que le texte ne soit pas scindé et que, sur ce point, il concerne aussi, plus largement, les collectivités territoriales.

Je voudrais évoquer les études d’impact, qui revêtent une grande importance. En l’espèce, le Conseil d’État relève qu’elle lui a été transmise tardivement et qu’elle est « insuffisamment aboutie ». C’est un problème important : il faut, si l’on veut simplifier la vie des entreprises, prendre le temps de conduire des études d’impact rigoureuses, objectives, permettant une réelle mesure des coûts et des bénéfices.

Enfin, je salue la suppression des articles 2, 3 et 11 : ces habilitations beaucoup trop larges demandées par le Gouvernement dessaisissaient le Parlement de son pouvoir législatif sur des sujets d’importance.

Mes chers collègues, ce projet de loi est très attendu, mais les différents partenaires considèrent tous qu’il ne s’agit que d’une première étape. La commission spéciale a néanmoins remanié le texte : il en ressort, fort heureusement, nettement amélioré.

Sous réserve des observations que je viens de faire, nous le voterons. Afin de restaurer la confiance entre les entreprises et l’administration, nos entrepreneurs ont besoin de liberté et de stabilité. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission spéciale.

projet de loi de simplification de la vie économique

TITRE III

FACILITER L’ACCÈS DE TOUTES LES ENTREPRISES À LA COMMANDE PUBLIQUE

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de simplification de la vie économique
Après l’article 4 (priorité) (début)

Article 4 (priorité)

I. – Le code de la commande publique est ainsi modifié :

1° L’article L. 2132-2 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les personnes morales de droit public, à l’exception des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et de leurs groupements, et les organismes de sécurité sociale utilisent la plateforme de dématérialisation mise gratuitement à leur disposition par l’État pour réaliser les communications et les échanges mentionnés au premier alinéa dans les conditions et sous réserve des dérogations définies par voie réglementaire.

« L’État autorise tout acheteur autre que ceux qui sont soumis à l’obligation mentionnée au deuxième alinéa qui en fait la demande à utiliser gratuitement sa plateforme de dématérialisation. » ;

2° La vingt-sixième ligne du tableau du second alinéa de l’article L. 2651-1, la vingt-cinquième ligne du tableau du second alinéa des articles L. 2661-1 et L. 2671-1 et la vingt-quatrième ligne du tableau du second alinéa de l’article L. 2681-1 sont remplacées par deux lignes ainsi rédigées :

«

L. 2131-1 à L. 2132-1

L. 2132-2

Résultant de la loi n° … du … de simplification de la vie économique

» ;

3° Après le 5° des articles L. 2651-2, L. 2661-2, L. 2671-2 et L. 2681-2, il est inséré un 5° bis ainsi rédigé :

« 5° bis L’article L. 2132-2, dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … de simplification de la vie économique, est ainsi modifié :

« a) Au deuxième alinéa, les mots : “, à l’exception des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et de leurs groupements, et les organismes de sécurité sociale” sont supprimés ;

« b) Le dernier alinéa est supprimé ; »

4° L’article L. 3122-4 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les personnes morales de droit public, à l’exception des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et de leurs groupements, et les organismes de sécurité sociale utilisent la plateforme de dématérialisation mise gratuitement à leur disposition par l’État pour offrir l’accès mentionné au premier alinéa dans les conditions et sous réserve des dérogations définies par voie réglementaire.

« L’État autorise toute autorité concédante autre que celles qui sont soumises à l’obligation mentionnée au deuxième alinéa qui en fait la demande à utiliser gratuitement sa plateforme de dématérialisation. » ;

5° La vingtième ligne du tableau du second alinéa de l’article L. 3351-1 est remplacée par trois lignes ainsi rédigées :

«

L. 3120-1 à L. 3122-3

L. 3122-4

Résultant de la loi n° … du …

L. 3122-5

» ;

6° Après le 4° des articles L. 3351-2 et L. 3381-2, il est inséré un 4° bis ainsi rédigé :

« 4° bis Au deuxième alinéa de l’article L. 3122-4, dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … de simplification de la vie économique, les mots : “, à l’exception des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et de leurs groupements, et les organismes de sécurité sociale” sont supprimés ; »

7° La vingtième ligne du tableau du second alinéa des articles L. 3361-1 et L. 3371-1 et la seizième ligne du tableau du second alinéa de l’article L. 3381-1 sont remplacées par trois lignes ainsi rédigées :

«

L. 3120-1 à L. 3122-3

L. 3122-4

Résultant de la loi n° … du …

L. 3122-5

» ;

8° Après le 4° des articles L. 3361-2 et L. 3371-2, il est inséré un 4° bis ainsi rédigé :

« 4° bis L’article L. 3122-4, dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … de simplification de la vie économique, est ainsi modifié :

« a) Au deuxième alinéa, les mots : “, à l’exception des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et de leurs groupements, et les organismes de sécurité sociale” sont supprimés ;

« b) Le dernier alinéa est supprimé ; ».

II. – Le présent article entre en vigueur à une date fixée par décret en fonction de la catégorie d’acheteurs et d’autorités concédantes et au plus tard le 31 décembre 2028.

Les acheteurs et autorités concédantes pour lesquels une plateforme de dématérialisation a été mise à disposition par un contrat qui est en cours à la date de publication de la présente loi ou pour lequel une procédure de consultation ou un avis de publicité est en cours à cette même date ne sont soumis aux obligations qui résultent du présent article qu’au terme de ce contrat.

L’État autorise l’acheteur ou l’autorité concédante qui en fait la demande à utiliser gratuitement sa plateforme de dématérialisation dès la date de publication de la présente loi.

Le présent II est applicable aux contrats soumis au code de la commande publique dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie ainsi que dans les Terres australes et antarctiques françaises.

M. le président. L’amendement n° 275 rectifié, présenté par MM. Levi, Klinger et Laugier, Mme Demas, MM. A. Marc et Menonville, Mme O. Richard, M. H. Leroy, Mme de La Provôté, MM. Henno, Kern, Cadec, Panunzi, Chatillon, J.M. Arnaud et Chasseing, Mme Guidez, MM. Grand et Belin, Mmes Antoine et Billon et MM. Fargeot et Duffourg, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Patricia Demas.

Mme Patricia Demas. Cet amendement vise à supprimer l’article 4. En effet, les mesures figurant dans cet article ne permettent pas d’atteindre l’objectif de simplification de l’accès à la commande publique en ligne, et mettent en péril tout un écosystème qui fonctionne correctement depuis de nombreuses années grâce aux investissements consentis et à l’innovation développée par le secteur privé.

Le départ d’une partie des collectivités sur Place, la plateforme des achats de l’État, ne serait-ce que de 15 % d’entre elles, couplé au départ obligatoire des personnes morales de droit public, entraînerait la disparition des plateformes mutualistes, qui ne pourraient plus maintenir leur rentabilité, et donc l’effondrement de toute la commande publique française, y compris pour les collectivités ayant fait le choix de rester sur les plateformes mutualistes.

Par ailleurs, le choix d’une plateforme unique de publication des consultations fragiliserait également l’équilibre économique précaire des supports habilités à publier des annonces légales (Shal) et, en particulier, de la presse quotidienne régionale (PQR), à la survie de laquelle la publication des avis de publicité est indispensable.

Enfin, c’est un danger pour nos petites entreprises locales, qui seraient plus facilement mises en concurrence avec les grands groupes et les ETI nationales, et subiraient les allongements de délais liés à l’absence d’interopérabilité. Elles se retrouveraient seules face à la difficulté de la commande publique, faute d’un accompagnement que n’offre pas la plateforme d’État.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer l’article 4 que la commission spéciale a adopté.

Nous estimons en effet que cet article constitue un juste équilibre pour la centralisation des procédures de passation des contrats de la commande publique pour les personnes morales de droit privé, de droit public et les organismes de sécurité sociale, tout en prévoyant un recours – facultatif, j’y insiste – au dispositif pour les collectivités territoriales.

La mise en œuvre dans un délai de cinq ans de cette obligation nouvelle permettra aux acteurs du secteur, tels que les éditeurs privés de plateformes de dématérialisation, de se préparer, notamment en recentrant leurs prestations vers les personnes non soumises à l’obligation. En outre, rien n’empêchera les acheteurs dont l’offre est publiée sur la plateforme de l’État d’assurer aussi une publication via la PQR.

L’article 4 prévoit donc une véritable mesure de simplification de l’accès des petites entreprises à la commande publique, et ne remet en cause ni le modèle économique des autres plateformes de dématérialisation des offres ni celui des éditeurs de la PQR. Il permet de poursuivre un mouvement de centralisation déjà engagé par les administrations centrales et offre la possibilité aux acheteurs non soumis à l’obligation de bénéficier d’un outil opérationnel gratuit pour la dématérialisation de leurs offres.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Nous souscrivons aux arguments de Mme la rapporteure.

Place ne déstabilisera nullement les autres plateformes, notamment mutualistes, pas plus que la PQR qui est derrière celles-ci. Cette plateforme n’est qu’un point d’entrée pour accéder, ensuite, aux plateformes des marchés publics.

Par ailleurs, la date d’entrée en vigueur, fixée à la fin de 2028, permettra à chacun de s’adapter.

Je le répète, ces dispositions ne remettent aucunement en cause le marché des annonces légales, qui représente des ressources financières encore très importantes pour la PQR.

Je rappelle également – vous en avez longuement discuté en commission – que nous parlons d’une évolution de 7,5 % à 15 % du flux des marchés publics. Par construction, 85 % du champ des marchés publics resteraient à la main des plateformes mutualistes et de la PQR, dont vous avez relayé, madame la sénatrice, les préoccupations légitimes.

Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. Madame Demas, l’amendement n° 275 rectifié est-il maintenu ?

Mme Patricia Demas. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 275 rectifié est retiré.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 274 rectifié est présenté par MM. Levi, Klinger et Laugier, Mme Demas, MM. A. Marc et Menonville, Mme O. Richard, M. H. Leroy, Mme de La Provôté, MM. Henno, Kern, Cadec, Panunzi, Chatillon, J.M. Arnaud et Chasseing, Mme Guidez, MM. Grand et Belin, Mmes Antoine et Billon et MM. Fargeot et Duffourg.

L’amendement n° 306 est présenté par M. Barros, Mme Apourceau-Poly, MM. Bacchi, Bocquet et Brossat, Mmes Brulin et Corbière Naminzo, M. Corbisez, Mmes Cukierman et Gréaume, M. Lahellec, Mme Margaté, MM. Ouzoulias et Savoldelli, Mmes Silvani et Varaillas et M. Xowie.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rédiger ainsi cet article :

I. – Le code de la commande publique est ainsi modifié :

1° L’article L. 2132-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les personnes morales de droit public, à l’exception des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et de leurs groupements, et les organismes de sécurité sociale peuvent utiliser la plateforme de dématérialisation mise gratuitement à leur disposition par l’État, après autorisation de celui-ci, pour réaliser les communications et les échanges mentionnés au premier alinéa dans les conditions et sous réserve des dérogations définies par voie réglementaire. » ;

2° L’article L. 3122-4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les personnes morales de droit public, à l’exception des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et de leurs groupements, et les organismes de sécurité sociale peuvent utiliser la plateforme de dématérialisation mise gratuitement à leur disposition par l’État, après autorisation de celui-ci, pour réaliser les communications et les échanges mentionnés au premier alinéa dans les conditions et sous réserve des dérogations définies par voie réglementaire. »

II. – Le présent article entre en vigueur à une date fixée par décret en fonction de la catégorie d’acheteurs et d’autorités concédantes et au plus tard le 31 décembre 2028.

L’État peut autoriser l’acheteur ou l’autorité concédante qui en fait la demande à utiliser gratuitement sa plateforme de dématérialisation dès la date de publication de la présente loi.

Le présent II est applicable aux contrats soumis au code de la commande publique dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie ainsi que dans les Terres australes et antarctiques françaises.

La parole est à Mme Patricia Demas, pour présenter l’amendement n° 274 rectifié.

Mme Patricia Demas. Cet amendement, que je présente au nom de M. Levi, vise à réécrire l’article 4 en y apportant trois modifications : suppression de la possibilité donnée aux collectivités territoriales d’utiliser la plateforme de dématérialisation de l’État, Place ; suppression de l’obligation faite aux personnes morales de droit public et aux organismes de sécurité sociale d’utiliser cette même plateforme ; et extension aux personnes morales de droit public et aux organismes de sécurité sociale de la possibilité d’utiliser cette plateforme s’ils en formulent la demande.

Les mesures prévues à l’article 4 ne répondent pas à l’objectif de simplification de l’accès à la commande publique en ligne, et mettent en péril tout un écosystème qui fonctionne correctement depuis de nombreuses années grâce aux investissements consentis et à l’innovation développée par le secteur privé.

Le départ d’une partie des collectivités sur Place – ne serait-ce que de 15 % d’entre elles –, couplée au départ obligatoire des personnes morales de droit public, entraînerait la disparition des plateformes mutualistes, qui ne pourraient plus maintenir leur rentabilité.

Cela conduirait à l’effondrement de la commande publique française dans son ensemble, y compris pour les collectivités ayant fait le choix de rester sur les plateformes mutualistes.

Par ailleurs, le choix d’une plateforme unique de publication des consultations fragiliserait l’équilibre économique précaire des Shal, en particulier la PQR, dont la survie dépend de la publication des avis de publicité.

Enfin, il représente un danger pour nos petites entreprises locales, qui seraient plus facilement mises en concurrence avec les grands groupes et les ETI nationales, et subiraient les allongements de délais liés à l’absence d’interopérabilité. Elles se retrouveraient seules face aux difficultés que présente la commande publique, faute d’un accompagnement que n’offre pas la plateforme d’État.

M. le président. La parole est à Mme Marianne Margaté, pour présenter l’amendement n° 306.

Mme Marianne Margaté. Au travers de cet amendement d’appel, nous souhaitons relayer les inquiétudes réelles des éditeurs privés qui ont développé des plateformes d’achat dédiées à la commande publique.

Ces derniers ont émergé à la demande des pouvoirs publics et sous leur impulsion. Par leurs investissements, ils ont permis à l’État d’atteindre ses objectifs de modernisation en matière de transparence des marchés publics, de digitalisation de l’économie et, aujourd’hui, de réduction de l’impact environnemental de l’activité.

Or, dans sa rédaction actuelle, l’article 4 risque de mettre à mal tout un écosystème et ses nombreux emplois.

Outre ces plateformes mutualistes qui fournissent 80 % des acheteurs autres que l’État, c’est aussi la PQR qui risque de faire les frais d’un article rédigé sans véritable concertation.

Comme le souligne la commission spéciale, l’extension de l’usage de la plateforme Place et l’intégration des marchés des collectivités engendreraient une perte financière importante pour la presse quotidienne régionale, que l’objectif de simplification visé par ce texte ne semble pas justifier.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. La commission spéciale a émis un avis défavorable sur ces amendements identiques, mais je souhaiterais plutôt que leurs auteurs les retirent, s’agissant d’amendements d’appel.

Par ses propos, Mme la ministre a tenté de rassurer la PQR et les plateformes.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. En effet !

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. S’ils étaient adoptés, ces amendements auraient pour effet de ralentir le processus de centralisation des procédures de passation des contrats de la commande publique.

Je rappelle que les collectivités ont la faculté de faire appel à ces plateformes si elles le souhaitent. Nous pouvons leur laisser cette liberté.

Nous avons, nous aussi, reçu les représentants de la PQR et des plateformes, qui nous ont exposé leurs problèmes, auxquels nous ne sommes pas insensibles.

Les services que fournissent les plateformes sont très intéressants, notamment pour les collectivités. Il leur appartient donc de rester performantes : c’est une saine concurrence.

Enfin, les collectivités qui ont l’habitude de travailler avec ces plateformes bénéficient d’un service en retour, si l’on peut dire, de leur investissement : elles n’en changeront pas si facilement. Ne nous affolons donc pas, d’autant que la part de marché concernée reste mineure.

Pour ces raisons, la commission spéciale demande le retrait de ces amendements ; à défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Le Gouvernement suivra avec sagesse et détermination l’avis de la commission spéciale.

Les amendements nos 274 rectifié et 306 tendent à supprimer l’obligation de recours à Place pour les établissements publics, les hôpitaux et les organismes de sécurité sociale. Or tel est précisément l’objet de l’article 4.

Nous avons, nous aussi, reçu les éditeurs de plateformes et de logiciels mutualistes, ainsi que les acteurs de la presse quotidienne régionale. Comme l’a rappelé Mme la rapporteure, une petite partie du flux seulement est concernée.

En tant qu’ancienne responsable de TPE-PME, j’ai personnellement fait l’expérience de la réponse aux appels d’offres et marchés publics. C’est une véritable nécessité que de simplifier et de regrouper sur une seule plateforme mutualisée l’ensemble des appels d’offres à destination des entités visées à l’article 4, c’est-à-dire, je le redis, les établissements publics, les hôpitaux et les organismes de sécurité sociale.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous passez du temps avec vos administrés petits entrepreneurs et, pour certains d’entre vous, êtes vous-mêmes entrepreneurs. Vous connaissez donc le doux enfer qui consiste, par exemple, à se coltiner, pour répondre à un appel d’offres public, de renseigner l’intégralité des informations d’une TPE artisanale de quatre salariés sur quinze plateformes différentes.

Si ce texte ne manque pas d’audace – j’ai bien vu que vous l’aviez tous remarqué (Mme Anne-Sophie Romagny sourit.) –, il n’y a vraiment aucune malice dans cet article 4. Il s’agit simplement de tenter de rassembler – soyons fous ! – 15 % du flux des marchés publics en un seul lieu, en une seule place, sans mauvais jeu de mots.

Pour ces raisons et celles qui ont été exposées par Mme la rapporteure, je demande le retrait de ces amendements identiques ; à défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. Madame Demas, l’amendement n° 274 rectifié est-il maintenu ?

Mme Patricia Demas. Il s’agissait en effet d’un amendement d’appel. Il est heureux que vous ayez pu rassurer ses auteurs, ainsi que l’ensemble des parties concernées.

Pour le compte de M. Levi, je retire donc l’amendement n° 274 rectifié.

M. le président. L’amendement n° 274 rectifié est retiré.

Madame Margaté, l’amendement n° 306 est-il maintenu ?

Mme Marianne Margaté. Oui, je le maintiens, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 306.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 8 rectifié undecies, présenté par M. J.B. Blanc, Mme Noël, M. Sautarel, Mme Goy-Chavent, M. Daubresse, Mmes Valente Le Hir, Estrosi Sassone, Demas et M. Mercier, MM. J.P. Vogel, Pellevat, Burgoa, Brisson, Reynaud, Chevrollier et Klinger, Mme Muller-Bronn, M. Genet, Mme Dumont, M. Chaize, Mmes Josende, P. Martin et Belrhiti, MM. Lefèvre, Belin, Chatillon, Milon, Houpert et Gremillet, Mmes Lassarade et Pluchet, M. Bouchet, Mme Canayer, M. D. Laurent et Mmes Nédélec et Schalck, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 3

Supprimer les mots :

, à l’exception des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et de leurs groupements,

II. – Alinéas 7 à 10

Supprimer ces alinéas.

III. – Alinéa 12

Supprimer les mots :

, à l’exception des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et de leurs groupements,

IV. – Alinéas 16, 17, 20 à 23

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Patricia Demas.

Mme Patricia Demas. Le présent amendement vise à retirer le caractère facultatif, pour les collectivités territoriales, leurs établissements publics et leurs groupements, d’utiliser une solution mutualisée mise à disposition par l’État pour la publication de leurs annonces de marchés publics et de délégation de service public.

L’objectif est de standardiser l’usage de cette plateforme par tous les acteurs publics, notamment les collectivités territoriales, qui comptent pour 54,3 % du montant de la commande publique.

Cette démarche vise à simplifier l’accès et à augmenter la transparence de la commande publique.

Pour la transmission des factures électroniques, les collectivités territoriales et leurs établissements doivent déjà se conformer à une solution mutualisée mise à disposition par l’État, conformément aux articles L. 2192-5 et L. 3133-6 du code de la commande publique.

Ainsi, la communication et les échanges d’informations par voie électronique peuvent s’effectuer selon des modalités analogues.

L’adoption de cette plateforme centralisée pour les collectivités comporterait de multiples avantages : elle simplifierait les processus pour nos TPE-PME, favoriserait l’innovation dans nos régions, allégerait les démarches administratives pour les collectivités elles-mêmes, et renforcerait la transparence pour les citoyens.

M. le président. L’amendement n° 5 rectifié, présenté par M. Karoutchi, Mme Chain-Larché, MM. Cuypers, Cambon, Milon et Burgoa, Mme Lavarde, MM. Sido, D. Laurent et Levi, Mme Malet, M. de Legge, Mmes Eustache-Brinio et Imbert, MM. Meignen, H. Leroy et Paul, Mmes Micouleau et Dumas, M. Genet, Mmes Josende et Canayer, MM. Belin et Brisson, Mmes Richer et Estrosi Sassone, MM. Folliot et Grosperrin, Mmes Muller-Bronn, N. Goulet et Carrère-Gée, MM. Pellevat, Mandelli, Bouchet, Reynaud, Pernot, Bruyen, Bonnecarrère et Savin, Mme Lassarade, MM. Mouiller et Panunzi, Mmes Herzog, Gatel, M. Mercier et F. Gerbaud, MM. J.P. Vogel, de Nicolaÿ et Hugonet, Mme Puissat, M. Henno, Mme Demas, M. Paumier, Mme Perrot, M. Lefèvre et Mmes Dumont, Schalck et Bonfanti-Dossat, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les collectivités territoriales, leurs établissements publics et leurs groupements peuvent utiliser, si elles le souhaitent, la plateforme de dématérialisation mentionnée à l’alinéa précédent.

La parole est à M. Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi. Avec votre autorisation, monsieur le président, je présenterai simultanément l’amendement n° 5 rectifié et l’amendement n° 9 rectifié bis.

Ces deux amendements ont en effet le même objet, mais portent sur deux alinéas différents.

M. le président. L’amendement n° 9 rectifié bis, présenté par M. Karoutchi, Mme Chain-Larché, MM. Cuypers, Cambon, Milon et Burgoa, Mme Lavarde, MM. Sido, D. Laurent et Levi, Mme Malet, M. de Legge, Mmes Eustache-Brinio et Imbert, M. Meignen, Mme Aeschlimann, MM. H. Leroy et Paul, Mmes Micouleau et Dumas, M. Genet, Mmes Josende, Bonfanti-Dossat et Canayer, MM. Belin et Brisson, Mmes Richer et Estrosi Sassone, MM. Folliot et Grosperrin, Mmes Muller-Bronn, N. Goulet et Carrère-Gée, MM. Pellevat, Mandelli, Bouchet, Reynaud, Pernot, Bruyen, Bonnecarrère et Savin, Mme Lassarade, MM. Mouiller et Panunzi, Mmes Herzog, Gatel, M. Mercier et F. Gerbaud, MM. J.P. Vogel, de Nicolaÿ et Hugonet, Mme Puissat, M. Henno, Mme Demas, M. Paumier, Mme Perrot, M. Lefèvre et Mmes Dumont et Schalck, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 12

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les collectivités territoriales, leurs établissements publics et leurs groupements peuvent utiliser, si elles le souhaitent, la plateforme de dématérialisation mentionnée à l’alinéa précédent.

Veuillez poursuivre, mon cher collègue.

M. Roger Karoutchi. L’alinéa 3 de l’article 4 exclut complètement les collectivités territoriales de l’accès à la plateforme. Or la commande publique émanant des collectivités locales et de leurs groupements est plus importante que celle de l’État et de l’ensemble des établissements hospitaliers.

Par cet amendement très simple, il s’agit, sans le leur imposer, de donner aux collectivités locales qui le souhaitent la possibilité d’accéder à cette plateforme. Je ne comprends d’ailleurs pas très bien pourquoi elles ont été exclues du dispositif.

Madame la ministre, je sais ce que vous allez me dire et je vous réponds tout de suite. (Sourires.)

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Quel talent !

M. Roger Karoutchi. Vous allez me dire que, aux termes de l’alinéa suivant, l’État « autorise » les autorités concédantes qui le demandent à accéder à la plateforme.

Pour ma part, je souhaite non pas que l’État autorise l’accès à la plateforme, mais simplement que les collectivités volontaires puissent y accéder.

Quand on dit que l’État « autorise », cela peut signifier que, juridiquement, il peut aussi ne pas autoriser. Par conséquent – je sens que vous êtes quasiment d’accord avec moi (Mme la ministre déléguée sourit.) –, vous devriez émettre un avis de sagesse.

Dans le fond, vous considérez vous aussi comme une bonne chose que les collectivités qui le souhaitent, et elles seules, puissent accéder à cette plateforme. Pourquoi faudrait-il l’autorisation de l’État quand elles peuvent y accéder naturellement si elles sont volontaires ?

M. le président. L’amendement n° 283 n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Le débat est intéressant, car deux visions s’opposent : certains veulent absolument exclure les collectivités territoriales de la plateforme, alors que d’autres souhaitent les obliger à l’utiliser.

Je considère pour ma part qu’il est dommage de prévoir une telle obligation. (M. le président de la commission spéciale et M. Roger Karoutchi acquiescent.) Laissons aux collectivités leur libre administration : c’est d’ailleurs ce que prévoit le texte.

De plus, si nous obligions les collectivités à utiliser Place, la plateforme ne pourrait pas suivre. Elle n’est pas dimensionnée pour accueillir les appels d’offres très importants des collectivités. Compte tenu du volume d’achats des collectivités territoriales, les plateformes actuelles, je le répète, n’ont pas trop de souci à se faire.

La commission spéciale émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 8 rectifié undecies.

J’en viens aux amendements de M. Karoutchi. Mon cher collègue, je pense sincèrement que vos amendements sont satisfaits par la rédaction actuelle. (M. Roger Karoutchi le conteste.) Je ne suis pas du tout convaincue par vos arguments. Puisque les collectivités ne sont pas obligées d’utiliser la plateforme, c’est donc bien qu’elles ont la faculté de le faire. Elles ne doivent pas le faire, mais elles peuvent le faire !

M. Roger Karoutchi. À condition d’y être autorisées ! Ce n’est pas la même chose !

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Puisque vous ne semblez pas vouloir retirer vos amendements, je serai contrainte d’y être défavorable. Mais, sincèrement, vous devriez être satisfait. (Sourires.)

M. Roger Karoutchi. Je ne le suis pas du tout ! (Nouveaux sourires.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Je salue tout d’abord la dextérité de Mme la sénatrice Demas… À l’inverse de l’amendement n° 274 rectifié, l’amendement n° 8 rectifié undecies de Jean-Baptiste Blanc prévoit l’obligation pour les collectivités territoriales, leurs établissements publics et leurs groupements d’utiliser gratuitement le profil d’acheteur de l’État.

J’ajouterai aux arguments pertinents de Mme la rapporteure que l’architecture technique et logicielle du profil d’acheteur de l’État ne permet pas d’accueillir simultanément le nombre élevé d’entités et de consultations de marché que représente l’intégralité des collectivités locales, de leurs groupements et des établissements publics. Cela supposerait un chantier de transformation long et coûteux.

En outre – et je sais cet argument bien plus percutant connaissant la sensibilité légitime du Sénat sur ce sujet –, vous entendrez, madame la sénatrice, qu’au-delà des problèmes d’interopérabilité cette obligation irait à l’encontre du principe de libre autonomie des collectivités territoriales. Or, tout comme le Gouvernement, j’y suis attachée.

Pour ces raisons, j’émets un avis défavorable, conforme à celui de Mme la rapporteure, sur l’amendement n° 8 rectifié undecies.

J’en viens aux amendements de M. Karoutchi. Monsieur le sénateur, étant une femme de lettres comme souvent les ministres de Bercy (Sourires.), je n’y suis pas insensible, mais vous avez bien devancé ma réponse – c’est assez rare pour que je le salue !

Je ne doute pas que vous serez sensible à notre volonté de simplification. Vous proposez la rédaction suivante : les collectivités territoriales, leurs établissements publics et leurs groupements « peuvent utiliser » si elles le souhaitent, la plateforme », alors que nous proposons que l’État « autorise »…

M. Roger Karoutchi. Ce n’est pas la même chose !

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Comme je suis impertinente, je me permets de vous dire qu’« autorise » est plus protecteur, en droit, que « peut autoriser ». (M. Roger Karoutchi proteste.)

Malgré votre talent littéraire, vous comprendrez que, comme Mme la rapporteure, je vous demande de retirer vos deux amendements ; à défaut, l’avis sera défavorable.

Finalement, cela change assez peu de choses. L’important est de ne surtout pas forcer la main des collectivités locales et de leur donner la liberté d’accéder à la plateforme. « Autoriser » ou « pouvoir autoriser », peu importe, tant que les collectivités y ont accès. Évitons les propos superfétatoires dans la loi ! Les entrepreneurs « en bavent » de ces lois bavardes.

Mme Audrey Linkenheld. Il n’y a pas que les lois qui sont bavardes…

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Je peux aussi me taire !

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Madame la ministre, si j’avais employé dans un de mes amendements les termes « peuvent autoriser », je comprendrais vos propos, mais ce n’est pas le cas.

Il faudrait que vous lisiez les amendements : les mots y figurant sont « peuvent utiliser ». L’État n’a pas à donner son autorisation ; si elles le souhaitent, les collectivités locales peuvent utiliser la plateforme.

Or, dans votre rédaction, il est écrit à l’alinéa suivant : l’État « autorise ». Ce n’est pas la même chose : si l’État autorise, cela veut dire qu’il peut aussi ne pas autoriser.

Mes amendements visent à faire en sorte que les collectivités volontaires, et elles seules, accèdent à la plateforme sans avoir besoin de l’autorisation de l’État. C’est tout !

M. le président. La parole est à M. Laurent Somon, pour explication de vote.

M. Laurent Somon. Il m’avait semblé que nous discutions d’une loi de simplification. (Sourires.)

Je rebondis sur les propos de M. Karoutchi : si une autorisation est prévue, il faut faire une demande, ce qui complexifie la procédure. Ses amendements laissent les collectivités libres, sans demande préalable à qui que ce soit, de choisir les modalités de lancement de leurs marchés.

M. le président. Madame Demas, l’amendement n° 8 rectifié undecies est-il maintenu ?

Mme Patricia Demas. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 8 rectifié undecies est retiré.

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Aux termes de l’alinéa 3 de l’article 4, « les personnes morales de droit public, à l’exception des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et de leurs groupements, et les organismes de sécurité sociale utilisent la plateforme ».

Ces entités sont obligées d’utiliser la plateforme, et les collectivités territoriales sont exclues de cette obligation. Cela signifie donc, si elles n’y sont pas obligées, qu’elles ont la possibilité d’utiliser la plateforme.

M. Roger Karoutchi. Avec l’autorisation de l’État !

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Non !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 5 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 9 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 276 rectifié ter, présenté par Mme Bellurot, M. Somon, Mme Borchio Fontimp, MM. Lefèvre et Mouiller, Mmes Dumont, Canayer et Richer, MM. Burgoa et Tabarot, Mme Demas, MM. Milon et Mandelli, Mme Josende, M. Frassa, Mmes Gosselin et Petrus, MM. Brisson et Bouchet, Mme Bonfanti-Dossat et MM. Belin, Favreau, Panunzi, J.B. Blanc, Michallet et Gremillet, est ainsi libellé :

Alinéas 4, 13 et 26

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Nadine Bellurot.

Mme Nadine Bellurot. Cet amendement vise à supprimer la dérogation que l’État peut accorder pour donner accès à sa plateforme.

En effet, cette plateforme unique, que nous ne contestons pas totalement, mettrait en péril l’écosystème des plateformes mutualistes existantes.

Nous avons déjà évoqué les éditeurs et la presse quotidienne régionale. La publication des avis de publicité est absolument indispensable à la survie des quotidiens régionaux, dont nous connaissons les difficultés.

Les dispositifs actuels de la PQR adossés aux éditeurs de logiciel apportent une prestation de service et de proximité, tant aux collectivités qu’aux entreprises candidates, qui est essentielle au tissu économique local.

Je signale que cette mesure aurait un impact financier estimé à 20 millions d’euros pour la PQR, qui est aujourd’hui le premier contributeur dans la diffusion des marchés publics auprès des entreprises locales.

Je veux également rappeler que la plateforme France Marchés, gérée par la PQR, publie 250 000 avis de marchés publics par an.

La PQR représente 55 journaux quotidiens, 46 sites web et – vous en avez tous une chez vous, mes chers collègues – 444 éditions locales. Elle est lue par 70 % des dirigeants de PME et par 80 % des élus locaux.

L’adoption de cet amendement permettrait de lancer un débat sur ce sujet et d’y travailler dans le cadre de la navette parlementaire, car, manifestement, les dispositions du texte touchant à la PQR ne sont pas encore tout à fait stabilisées.

J’entends bien qu’il reste une part du gâteau à partager, mais cela n’est pas de nature à répondre aux difficultés et aux attentes de la presse quotidienne régionale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Cela devient cocasse ! (Sourires.)

Nous venons d’adopter les amendements de M. Karoutchi visant à laisser la faculté aux collectivités qui le souhaitent d’utiliser la plateforme. Et voilà que cet amendement a pour objet de leur en interdire à tout prix l’accès. Nous faisons le grand écart…

M. Laurent Somon. C’est la simplification !

Mme Nadine Bellurot. Je suis cohérente avec ma position !

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Certes, ma chère collègue.

Vous comprendrez toutefois, qui plus est après le vote des derniers amendements, que je demande le retrait de votre amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

De toute évidence, on ne peut pas priver les collectivités de la possibilité d’utiliser la plateforme.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Même avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 276 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 284 n’est pas soutenu.

L’amendement n° 205 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Brault et Capus, Mme Bourcier, MM. Chasseing et Chevalier, Mme L. Darcos, M. Grand, Mme Lermytte et MM. V. Louault, A. Marc et Wattebled, est ainsi libellé :

Alinéa 24

Remplacer l’année :

2028

par l’année :

2026

La parole est à M. Jean-Luc Brault.

M. Jean-Luc Brault. Le délai de quatre ans prévu pour la mise en place de la plateforme de dématérialisation destinée à centraliser les profils d’acheteur public paraît excessivement long.

Afin de garantir un déploiement efficace du projet au sein des administrations, mais surtout d’améliorer concrètement et plus rapidement la situation des entreprises, notamment des PME, cet amendement tend à réduire ce délai de moitié.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Mon cher collègue, vous souhaitez avancer l’entrée en vigueur du dispositif de deux ans, soit en 2026 au lieu de 2028.

J’entends votre souhait d’accélérer le processus, mais je rappelle que la date du 31 décembre 2028 est une date butoir : l’article renvoie à un décret le soin de fixer pour chaque catégorie d’acheteur la date d’entrée en vigueur du dispositif, qui interviendra au plus tard le 31 décembre 2028.

En outre, lors des auditions, la direction des achats de l’État nous a bien indiqué que ce délai de plusieurs années doit permettre de préparer et de faire évoluer la plateforme afin qu’elle soit en mesure de faire face à un afflux d’utilisateurs.

À mon sens, il faut conserver cette date : c’est la raison pour laquelle je demande le retrait de l’amendement, sinon l’avis sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Pour paraphraser l’un d’entre vous, ne confondons pas simplification et précipitation.

Compte tenu du chantier nécessaire pour permettre, sur un plan technique, à la plateforme d’intégrer de plus en plus d’utilisateurs, la prudence et la temporalité sont de mise.

Afin d’éviter de se retrouver en difficulté à la fin de l’année 2026, il a donc été proposé de fixer l’échéance au 31 décembre 2028. Si la plateforme est prête, rien n’empêchera une mise en œuvre avant cette date.

Je demande donc également le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. Monsieur Brault, l’amendement n° 205 rectifié est-il maintenu ?

M. Jean-Luc Brault. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 205 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’article 4, modifié.

(Larticle 4 est adopté.)

Article 4 (priorité)
Dossier législatif : projet de loi de simplification de la vie économique
Après l’article 4 (priorité) (interruption de la discussion)

Après l’article 4 (priorité)

M. le président. L’amendement n° 285 n’est pas soutenu.

L’amendement n° 230, présenté par Mme Havet, MM. Lévrier, Patriat, Bitz, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, MM. Fouassin, Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Mohamed Soilihi, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Les acheteurs peuvent conclure un marché de travaux sans publicité ni mise en concurrence préalables pour répondre à un besoin dont la valeur estimée est inférieure à 100 000 euros hors taxes.

Ces dispositions sont également applicables aux lots qui portent sur des travaux dont le montant est inférieur à 100 000 euros hors taxes, à la condition que le montant cumulé de ces lots n’excède pas 20 % de la valeur totale estimée de tous les lots.

Les acheteurs veillent à choisir une offre pertinente, à faire une bonne utilisation des deniers publics et à ne pas contracter systématiquement avec un même opérateur économique lorsqu’il existe une pluralité d’offres susceptibles de répondre au besoin.

II. – Les dispositions du I entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2025 et s’appliquent aux marchés publics pour lesquels une consultation est engagée ou un avis d’appel à la concurrence est envoyé à la publication à compter du 1er janvier 2025.

III. – Le présent article est applicable aux marchés publics conclus par l’État et ses établissements publics dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

La parole est à Mme Nadège Havet.

Mme Nadège Havet. Cet amendement vise à relever le seuil de dispense de procédure de publicité et de mise en concurrence pour les marchés de travaux et des lots portant sur des travaux dont la valeur estimée est inférieure à 100 000 euros. Le relèvement du seuil favoriserait l’accès des TPE et PME à la commande publique, car ces marchés sont majoritairement ceux auxquels ces entreprises candidatent.

De telles dispositions permettraient à la France de pérenniser un seuil de dépenses différencié plus élevé pour les marchés de travaux, alignant ainsi notre pratique avec celle de la majorité des États membres de l’Union européenne.

Enfin, ce seuil constituerait une mesure de simplification pour les acheteurs, en leur permettant d’éviter des coûts de procédure souvent supérieurs aux gains attendus d’une mise en concurrence.

Un rapport parlementaire de 2015 avait évalué que le seuil à partir duquel le coût d’organisation d’une procédure de publicité et de mise en concurrence dépasserait les gains attendus se situait entre 20 000 et 80 000 euros, tous types de marchés confondus.

Compte tenu de la technicité particulière des marchés de travaux, ce seuil pourrait raisonnablement être fixé à 100 000 euros.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Ma chère collègue, je vous rappelle que, en l’état du droit, le décret du 28 décembre 2022 prévoit d’ores et déjà que les marchés de travaux d’un montant inférieur à 100 000 euros ne sont pas soumis aux exigences de publicité et de mise en concurrence. Cette disposition prendra fin au 31 décembre 2024, soit très prochainement.

Je rappelle également que les seuils de mise en concurrence et de publicité pour les contrats de commande publique relèvent normalement du domaine réglementaire. Il conviendrait donc plutôt de prolonger la durée de la mesure.

Pour ma part, je souhaite connaître les intentions du Gouvernement à l’échéance de cette disposition. Madame la ministre, entendez-vous renouveler ce seuil dérogatoire par décret ? Le Gouvernement est-il plutôt favorable à l’inscription du seuil dans la loi ? J’y vois personnellement un danger, car pour modifier le seuil il faut changer la loi.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Le seuil à partir duquel les marchés de travaux bénéficient d’une dispense de mise en concurrence et de publicité a été relevé de 40 000 euros à 100 000 euros par la loi du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique, dite loi Asap.

En 2022, cette mesure a été prolongée jusqu’au 31 décembre 2024, notamment pour soutenir l’activité des entreprises du bâtiment, qui étaient durement affectées par les pénuries de matières premières et la flambée des prix des matériaux.

Nous disposons donc désormais d’un peu de recul sur ce dispositif. Celui-ci a montré son efficacité pour les acheteurs, mais aussi pour nos PME : celles-ci nous expliquent, pour le dire simplement, qu’il n’est pas intéressant de consacrer du temps à répondre à des appels d’offres d’un montant moindre sans être certain de remporter le marché.

Ce seuil de 100 000 euros reste très inférieur à celui qui est fixé dans les directives européennes pour les marchés de travaux, où il s’établit à plus de 5 millions d’euros.

Après avoir rehaussé son montant, puis prolongé sa durée d’application, le Gouvernement est favorable à sa pérennisation. Le montant de 100 000 euros semble adapté. Nous avons rencontré plus de 75 représentants d’associations, de fédérations ou d’organisations professionnelles d’employeurs comme de salariés : les PME, dans un grand nombre de secteurs, plébiscitent cette mesure.

Le Gouvernement émet donc un avis tout à fait favorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est donc l’avis de la commission spéciale ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. La commission spéciale émet à son tour un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 230.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 12 rectifié bis, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Brault, Capus et Malhuret, Mme Bourcier, MM. Chasseing et Chevalier, Mme L. Darcos, M. Grand, Mme Lermytte et MM. V. Louault, A. Marc, L. Vogel et Wattebled, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 2122-1 du code de la commande publique est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« …. – L’acheteur peut passer un marché public sans publicité ni mise en concurrence préalables portant sur des travaux, fournitures ou services innovants au sens du second alinéa de l’article L. 2172-3 et répondant à un besoin dont la valeur estimée est inférieure à 300 000 euros hors taxes. »

La parole est à M. Jean-Luc Brault.

M. Jean-Luc Brault. Dans son rapport intitulé Transformer lessai de linnovation : un impératif pour réindustrialiser la France – chacun sait que notre pays a bien besoin d’innovation ! –, la mission d’information sénatoriale sur la recherche et l’innovation a recommandé de tripler le plafond du régime des achats innovants, qui est aujourd’hui fixé à 100 000 euros. Ce montant est trop bas pour soutenir l’innovation industrielle, car les produits dans ce secteur dépassent largement ce seuil.

Cet amendement vise à inscrire dans la loi le seuil de 300 000 euros, ce qui correspond à un triplement du montant actuellement fixé par voie réglementaire.

M. le président. L’amendement n° 253 rectifié, présenté par Mme Havet, M. Lévrier, Mme Schillinger, M. Mohamed Soilihi, Mme Duranton et MM. Canévet et Buis, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’acheteur peut passer un marché public sans publicité ni mise en concurrence préalables portant sur des travaux, fournitures ou services innovants au sens du second alinéa de l’article L. 2172-3 et répondant à un besoin dont la valeur estimée est inférieure aux seuils communautaires.

La parole est à Mme Nadège Havet.

Mme Nadège Havet. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. En ce qui concerne l’amendement n° 12 rectifié bis, comme je l’ai indiqué lors de la réunion de la commission spéciale, je ne suis pas très favorable à l’inscription d’un montant dans la partie législative du code de la commande publique. En effet, cela nous priverait de la possibilité de faire évoluer périodiquement ce seuil en fonction des conditions économiques et des arbitrages politiques.

En outre, augmenter de plus de trois fois le montant en dessous duquel les achats innovants peuvent être conclus par des acheteurs publics sans mise en concurrence serait à mon sens disproportionné.

Je rappelle que le montant du seuil actuel de 100 000 euros est déjà très élevé au regard des seuils traditionnels pour les marchés publics.

L’amendement n° 253 rectifié vise à aligner le seuil de mise en concurrence et de publicité pour les achats innovants sur le seuil en vigueur pour les procédures formalisées défini au niveau européen. Cette mesure serait regrettable, car ces seuils européens sont susceptibles d’évoluer et n’ont pas vocation à prendre en compte les besoins spécifiques des contrats publics d’achats innovants.

De plus, comme pour l’amendement précédent, rehausser les seuils de dispense de mise en concurrence et de publicité n’est pas anodin au regard du respect des principes de la commande publique. Ces exigences constituent aussi des garanties de transparence et d’accessibilité de la commande publique pour tous les acheteurs publics, notamment pour ceux qui sont de plus petite taille.

Sur la forme, la définition des seuils relève plutôt du domaine réglementaire.

Sur le fond, il convient de trouver le bon équilibre, afin d’inciter les acheteurs publics à recourir au régime des achats innovants, sans pour autant leur permettre de se soustraire aux principes fondamentaux de la commande publique.

La commission spéciale émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. En ce qui concerne l’amendement n° 12 rectifié bis, je ne répéterai pas les propos de Mme le rapporteur. Je me contenterai d’indiquer que, en relevant ce seuil, surtout dans une telle proportion, on se heurterait directement au droit européen.

Je rappelle que, pour les marchés de fournitures et de services, les directives européennes imposent une procédure de publicité et de mise en concurrence à partir de 143 000 euros hors taxes et de 221 000 euros hors taxes pour les collectivités locales. L’instauration d’un seuil de dispense de ces formalités à partir de 300 000 euros hors taxes serait donc contraire au droit européen.

J’émets par conséquent un avis défavorable sur l’amendement n° 12 rectifié bis.

Ma position est la même sur l’amendement n° 253 rectifié, pour les mêmes raisons que celles que vient d’évoquer Mme le rapporteur. Il s’agit sans doute d’un amendement d’appel de la part de Mme Havet, pour faciliter la commande publique. Toutefois, les seuils prévus sont un peu trop élevés. Pérennisons déjà celui de 100 000 euros !

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 253 rectifié.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 12 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 253 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 254 rectifié, présenté par Mme Havet, M. Lévrier, Mme Schillinger, M. Mohamed Soilihi, Mme Duranton et MM. Canévet et Buis, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’acheteur peut passer un marché public sans publicité ni mise en concurrence préalables portant sur des produits d’occasion au sens de l’article R. 122-4 du code de la consommation ou sur des marchés de fournitures devant être issus du réemploi ou de la réutilisation au sens de l’article L. 541-1-1 du code de l’environnement, et répondant à un besoin dont la valeur estimée est inférieure à 100 000 euros hors taxes.

Ces dispositions sont également applicables aux lots de ces marchés dont le montant est inférieur à 80 000 euros hors taxes qui remplissent la condition prévue au b du 2° de l’article R. 2123-1.

Lorsqu’il fait usage de cette faculté, l’acheteur veille à choisir une offre pertinente, à faire une bonne utilisation des deniers publics et à ne pas contracter systématiquement avec un même opérateur économique lorsqu’il existe une pluralité d’offres susceptibles de répondre au besoin.

La parole est à Mme Nadège Havet.

Mme Nadège Havet. Au vu des arguments qui viennent d’être présentés à propos de mon précédent amendement, je retire l’amendement n° 254 rectifié, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 254 rectifié est retiré.

Je suis saisi de quatre amendements identiques.

L’amendement n° 48 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et Jouve, MM. Masset et Roux, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et M. Grosvalet.

L’amendement n° 353 rectifié est présenté par Mme Guhl, M. Dossus, Mme Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Fernique, Gontard et Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel.

L’amendement n° 393 rectifié est présenté par MM. Canévet et Delcros, Mmes N. Goulet et O. Richard, MM. Kern et Longeot, Mmes Havet et Billon, MM. Capo-Canellas et Cambier, Mme Gacquerre, M. Duffourg, Mme Saint-Pé et M. Levi.

L’amendement n° 550 est présenté par M. M. Weber, Mme Linkenheld, MM. Mérillou et Chaillou, Mme Conconne, MM. Fagnen, Ros, Kanner, Redon-Sarrazy et Bouad, Mme Canalès, MM. Darras, Jacquin, Pla et Uzenat, Mme Bonnefoy, M. Gillé, Mme Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le second alinéa de l’article L. 2172-3 du code de la commande publique est complété par une phrase ainsi rédigée : « Peuvent être considérés comme innovants les travaux, les fournitures ou les services qui tiennent compte de leurs incidences énergétiques et environnementales et qui recourent en priorité à des matériaux issus de la seconde main, du réemploi, de la réutilisation, du recyclage. »

La parole est à M. Michel Masset, pour présenter l’amendement n° 48 rectifié.

M. Michel Masset. Cet amendement vise à élargir la définition du marché public innovant.

La commande publique représente près de 10 % du PIB de la France. Elle doit être dirigée en priorité, lorsque c’est possible, vers des méthodes et des procédés qui relèvent de l’économie circulaire, laquelle vous est chère, je le sais, madame la ministre. Il est possible d’accélérer son déploiement en recourant à la procédure des marchés innovants.

Il convient d’affiner la définition de ce dispositif dans le code de la commande publique, pour qu’il intègre au mieux la notion d’économie circulaire. Par ailleurs, il importe de rehausser la limite de 100 000 euros en dessous de laquelle il est possible de passer des marchés d’achats innovants de gré à gré, sans publicité ni mise en concurrence.

Nous proposons ainsi de rendre ce dispositif plus attractif pour les acheteurs publics et leurs groupements.

M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour présenter l’amendement n° 353 rectifié.

M. Thomas Dossus. L’enjeu est de donner la priorité aux méthodes et aux procédés relevant de l’économie circulaire dans la commande publique chaque fois que c’est possible.

Le dispositif des achats innovants permet actuellement de passer un marché de gré à gré sans publicité. Nous souhaitons y intégrer les méthodes et les procédés de l’économie circulaire. Il s’agit d’approfondir le dispositif, afin qu’il devienne plus attractif pour les acheteurs publics et leurs groupements, ce qui facilitera l’adoption de solutions innovantes et durables.

Cette proposition s’inscrit dans la logique du plan national pour des achats durables (Pnad). En 2019, seulement 15,8 % des marchés publics intégraient une disposition environnementale, ce qui est bien inférieur à l’objectif de 30 %. Le nouveau plan national pour les achats durables pour la période allant de 2022 à 2025 vise à ce que ce taux atteigne les 100 % d’ici à 2025. Nous voulons donc faciliter la réalisation de cet objectif.

M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l’amendement n° 393 rectifié.

M. Michel Canévet. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour présenter l’amendement n° 550.

M. Simon Uzenat. Mes propos iront dans le même sens que ceux de mes collègues.

J’ai l’expérience de la commande publique dans la région Bretagne ; j’ai eu l’occasion de présider des instances chargées de procéder à la commande publique et de travailler à la conclusion de partenariats d’innovation.

Or, trop souvent, dans ce dernier cas, nos services évoquaient l’interprétation trop restrictive de la jurisprudence par les services compétents, notamment ceux de l’État. Cela empêchait la mise en œuvre de solutions, qui étaient pourtant de bon sens et sur lesquelles les entreprises étaient prêtes à travailler, mais qui n’étaient pas considérées comme suffisamment innovantes, limitant donc l’usage de ce dispositif.

Nous souhaitons ainsi, en lien avec l’Institut national de l’économie circulaire, adresser un message très clair aux entreprises, pour leur indiquer que nous pouvons mettre en place ensemble, par le biais de la commande publique des collectivités, des solutions nouvelles, qui ne constituent pas forcément des ruptures technologiques, mais qui s’inscrivent dans la logique du Pnad.

Comme vient de le rappeler mon collègue, l’objectif de ce plan est que la totalité des marchés comporte, à l’horizon de 2025, une disposition environnementale. En Bretagne, nous avons pris cet engagement dès l’année 2023.

Nous voulons donc préciser les critères et soutenir les entreprises qui s’engagent résolument dans cette voie, quel que soit leur secteur d’activité.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Les dispositions de ces amendements identiques posent un problème au regard du droit de l’Union européenne. En effet, la définition de l’innovation permettant le recours à la dérogation prévue par l’article L. 2172-3 du code de la commande publique est encadrée par les directives européennes sur les marchés publics du 26 février 2014.

Il convient de le souligner, cette définition n’exclut pas, dans sa rédaction actuelle, les biens issus du recyclage, de la seconde main ou du réemploi. Ces derniers peuvent d’ores et déjà, sous certaines conditions, entrer dans la catégorie des achats innovants.

En revanche, l’origine des biens ne peut suffire à elle seule à catégoriser ces derniers comme des achats innovants, car d’autres critères sont prévus au niveau européen. La modification proposée irait donc à l’encontre de la définition établie par l’Union européenne.

La commission spéciale a émis par conséquent un avis défavorable sur ces quatre amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Ces amendements identiques sont intéressants.

Comme vous êtes nombreux à le savoir, la France défend de longue date auprès des instances européennes une position ambitieuse sur ces sujets. Nous demandons ainsi que les directives relatives à la commande publique soient révisées, afin que les dimensions concernant l’environnement, le développement durable et l’économie circulaire puissent être mieux prises en considération dans la commande publique.

Pour le dire avec mes mots, sans reprendre ceux qu’a employés Mme le rapporteur, instaurer une présomption d’innovation, dès lors que sont prises en compte les incidences énergétiques ou environnementales ou certaines pratiques de production circulaire ou de réemploi, ne correspond pas au droit de l’Union européenne.

Très concrètement, si ces amendements identiques étaient adoptés, la France pourrait donc faire l’objet d’une procédure en manquement. (M. Thomas Dossus proteste.)

En tant que ministre, j’appelle de mes vœux une révision des directives européennes relatives à la commande publique.

En attendant, j’émets un avis défavorable sur ces amendements identiques.

M. le président. Monsieur Masset, l’amendement n° 48 rectifié est-il maintenu ?

M. Michel Masset. Oui, je le maintiens, monsieur le président.

M. le président. Monsieur Dossus, l’amendement n° 353 rectifié est-il maintenu ?

M. Thomas Dossus. Oui, je le maintiens également, monsieur le président.

M. le président. Monsieur Canévet, l’amendement n° 393 rectifié est-il maintenu ?

M. Michel Canévet. Oui, il est maintenu, monsieur le président.

M. le président. Monsieur Uzenat, l’amendement n° 550 est-il maintenu ?

M. Simon Uzenat. J’entends les arguments exposés par Mme le rapporteur et par Mme la ministre. Nous devons prendre en compte le cadre européen, mais, sur ce sujet, l’Europe est en réalité à mi-chemin.

Il y a certes un risque d’incompatibilité avec le droit européen, mais nous sommes nombreux, et pas seulement en France, à être convaincus que nous devons aller plus loin en la matière. Permettez-moi donc d’insister.

Je me fonde sur des expériences locales. Le partenariat d’innovation est l’occasion, au-delà des objectifs du plan national pour des achats durables, d’expérimenter des solutions nouvelles avec nos TPE et nos PME et de démontrer leur efficacité.

Trop souvent, lorsqu’il s’agit d’économie circulaire, on nous objecte que les modèles ne sont pas suffisamment robustes, que l’on ne dispose pas des moyens nécessaires et qu’il est risqué de s’engager dans cette voie. Résultat, la mise en œuvre de solutions nouvelles se trouve retardée.

Il convient donc d’accélérer, dans l’intérêt des collectivités comme dans celui des entreprises. À cet égard, notre proposition semble raisonnable. L’État et les collectivités veilleront à ce qu’elle soit mise en œuvre de manière réfléchie ; nous comptons d’ailleurs sur les services de l’État pour accompagner et encourager les collectivités dans cette voie.

Je maintiens donc cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 48 rectifié, 353 rectifié, 393 rectifié et 550.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4.

L’amendement n° 309, présenté par MM. Barros, Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 2141-2 du code de la commande publique, il est inséré un article L. 2141-2-… ainsi rédigé :

« Art. L. 2141-2-…. – Sont exclues de la procédure de passation des marchés les personnes qui n’ont pas rempli leurs obligations mentionnées à l’article L. 232-21 du code de commerce sur les deux exercices précédents. »

La parole est à M. Pierre Barros.

M. Pierre Barros. Les membres du groupe CRCE-K souhaitent exclure de plein droit des marchés publics les entreprises qui n’ont pas publié leurs comptes lors des deux années précédant le marché.

En effet, sur 10 millions d’entreprises, 600 000 seulement respectent scrupuleusement l’obligation de déposer leurs comptes. Il existe certes des sanctions – les entreprises sont passibles d’amendes de 1 500 euros à 3 000 euros –, mais elles sont rarement appliquées.

Les entreprises invoquent plusieurs raisons. Elles ne veulent pas présenter de bilan défavorable ou risquer de fournir des informations stratégiques à un concurrent, à un client ou à un fournisseur. Mais la transparence compte dans une relation contractuelle : il est important que la collectivité sache quelle est la situation financière de l’entreprise ou du maître d’ouvrage.

Nous avons tous connu des situations dans lesquelles, quelques semaines ou quelques mois après la passation du marché, nous avons découvert que l’entreprise retenue se trouvait dans une situation financière catastrophique. Dans ce cas, le chantier est arrêté et il faut reprendre toute la procédure.

Obliger les entreprises qui souhaitent répondre à des appels d’offres publics à déposer leurs comptes nous prémunirait de ces situations difficiles à gérer.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Nous examinons un texte de simplification. Or la mesure proposée constitue plutôt une sanction. Il me semble que c’est quelque peu hors sujet…

J’entends qu’il est nécessaire que l’acheteur public dispose de toutes les informations pertinentes pour sélectionner le soumissionnaire, mais les entreprises peuvent aussi faire des erreurs, même si elles sont regrettables. Pourquoi les sanctionner ? (Exclamations sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST.) Et faut-il toutes les sanctionner ? Accordons-leur le bénéfice du doute.

La commission spéciale émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. En complément aux propos de Mme le rapporteur, auxquels j’adhère, j’ajoute que l’acheteur peut déjà exiger des opérateurs économiques, au titre du contrôle de la capacité économique et financière, qu’ils fournissent des informations sur leurs comptes annuels, indiquant notamment le rapport entre les éléments d’actifs et de passifs.

Nous aurons d’ailleurs tout le loisir de parler de sanctions à l’article 10. Plus que six articles, patience ! (Sourires.)

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Michaël Weber, pour explication de vote.

M. Michaël Weber. Cet amendement doit retenir notre attention. En effet, nous sommes souvent alertés par des élus de nos territoires, qui se plaignent que des entreprises ne remplissent pas toutes leurs obligations de déclaration et ne publient pas leurs comptes annuels. Ces sociétés n’offrent pas de visibilité suffisante sur leur capacité à répondre au marché qui est susceptible de leur être confié.

Les dispositions de cet amendement vont dans le sens. Contrairement à ce qui a été dit, elles ne complexifient pas les choses. (Mme la ministre déléguée proteste.) Au contraire, elles fournissent aux commanditaires les garanties que le marché pourra être exécuté dans de bonnes conditions.

Nous voterons donc cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Pardonnez-moi, mais cet amendement n’a pas pour objet d’instituer une sanction ! La publication des comptes est une obligation légale. (Marques dapprobation sur les travées des groupes CRCE-K et SER.) Ou alors faut-il considérer, madame la ministre, puisque vous avez adhéré aux propos de Mme le rapporteur, qu’une telle obligation est une sanction ?

Un certain nombre d’entreprises ne respectent pas cette obligation légale. Elles ne sont donc pas en conformité avec notre droit. Nous proposons donc simplement par cet amendement que les entreprises contrevenantes ne puissent pas concourir aux marchés publics. Ce n’est pas une sanction ! Il s’agit seulement d’écarter des marchés publics celles et ceux qui ne respectent pas le droit. Nous devrions tous être d’accord sur ce point.

Si l’on suit l’argumentaire de notre rapporteur, auquel Mme la ministre souscrit, ne pas respecter le droit ne serait pas grave : il faudrait être prudent avec les entreprises, reconnaître leur droit à l’erreur…

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Cela existe !

M. Fabien Gay. Pendant ce temps, le Gouvernement annonce sa troisième réforme de l’assurance chômage… Il faut donc faire attention aux argumentaires utilisés !

J’ajoute que nous ne proposons pas de pénaliser les entreprises qui ne se conforment pas à l’obligation légale : nous ne prévoyons pas une amende systématique ni une interdiction d’exercer ; nous souhaitons simplement qu’elles ne puissent plus concourir aux marchés publics. Ce n’est pas une sanction !

Je souhaiterais donc obtenir des explications. Faut-il considérer que respecter une obligation légale est une sanction ? Voilà qui ouvrirait des horizons larges dans le champ du droit…

M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour explication de vote.

M. Simon Uzenat. Il convient de le rappeler, les entreprises qui ne respectent pas les règles en la matière ne constituent pas la majorité. Les représentants d’organisations professionnelles et interprofessionnelles le disent bien : certains estiment que 10 % des entreprises ne se plient pas aux règles.

En tout état de cause, il s’agit bien d’une minorité. Et les chefs d’entreprise eux-mêmes appellent la puissance publique à sanctionner ceux qui jouent avec les règles. Sinon, en réalité, ce sont ceux qui respectent le droit qui sont pénalisés.

Je rappelle par ailleurs que les associations qui sollicitent des subventions doivent présenter leurs comptes dans les règles. Il ne peut y avoir deux poids, deux mesures ! (Marques dapprobation sur les travées du groupe CRCE-K.)

Votre gouvernement, madame la ministre, a adopté en mai 2022 un décret visant à interdire aux entreprises qui n’ont pas présenté un plan de vigilance de soumissionner. Il semble tout à fait normal que les entreprises qui choisissent de ne pas respecter les règles ne puissent pas concourir à des marchés publics encadrés par ces mêmes règles !

On ne peut pas être gagnant à la fois au tirage et au grattage, si j’ose dire, car ce ne serait pas compréhensible. J’y insiste, les entreprises, dans leur très grande majorité, respectent ces règles. Adressons un message clair : l’interdiction de soumissionner doit être quasiment automatique, dès lors que les règles fondamentales ne sont pas respectées. Nous soutiendrons donc avec conviction cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 309.

(Lamendement est adopté.) – (Marques de satisfaction sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4.

Je suis saisi de quatre amendements identiques.

L’amendement n° 368 rectifié bis est présenté par MM. J.B. Blanc, Somon et Burgoa, Mme Canayer, MM. Reynaud, Sautarel et C. Vial, Mmes Micouleau, Imbert et Bonfanti-Dossat, MM. Bruyen, Meignen et Gremillet, Mmes Lassarade et Belrhiti, MM. Laménie, Tabarot et Cadec, Mme Joseph, MM. Sido, Milon et J.P. Vogel, Mme Demas, M. Pernot, Mmes P. Martin et Petrus, M. Chatillon, Mme Dumont, M. Chevrollier, Mme Ventalon, M. Mandelli, Mme Josende, MM. Genet, Michallet, Panunzi et Chaize, Mmes Malet et Noël et MM. Brisson, Piednoir et Klinger.

L’amendement n° 427 rectifié bis est présenté par MM. Canévet et Delcros, Mmes N. Goulet et O. Richard, MM. Kern et Longeot, Mme Billon, M. Capo-Canellas, Mmes Romagny et Gacquerre et MM. Duffourg et Levi.

L’amendement n° 464 rectifié est présenté par Mme Havet, MM. Lévrier, Patriat, Bitz, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, MM. Fouassin, Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Mohamed Soilihi, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

L’amendement n° 593 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel et Guiol, Mme Jouve, M. Masset et Mme Pantel.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 2151-1 du code de la commande publique, il est inséré un article L. 2151-… ainsi rédigé :

« Art. L. 2151-…. – Pour les marchés passés selon une procédure formalisée, la présentation des variantes est autorisée sauf mention contraire dans l’avis de marché ou dans l’invitation à confirmer l’intérêt. Pour les marchés passés selon une procédure adaptée, la présentation des variantes est autorisée sauf mention contraire dans les documents de la consultation. »

La parole est à M. Laurent Somon, pour présenter l’amendement n° 368 rectifié bis.

M. Laurent Somon. Cet amendement de Jean-Baptiste Blanc vise à simplifier la présentation des variantes dans les marchés publics. Ces dernières, en effet, sont souvent source d’innovations ou de solutions de remplacement vertueuses, sur le plan non seulement technique, mais aussi environnemental. Elles sont trop peu utilisées en raison d’un cadre juridique contraignant.

Il est ainsi proposé d’harmoniser, pour les marchés les plus importants, les règles applicables aux pouvoirs adjudicateurs avec celles des entités adjudicatrices, afin de permettre à ces dernières de valoriser leur savoir-faire en matière d’innovation.

M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l’amendement n° 427 rectifié bis.

M. Michel Canévet. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. La parole est à Mme Nadège Havet, pour présenter l’amendement n° 464 rectifié.

Mme Nadège Havet. Il est également défendu, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Michel Masset, pour présenter l’amendement n° 593 rectifié.

M. Michel Masset. En stimulant l’innovation, la commande publique contribue à faire grandir les entreprises innovantes, qui, en retour, offrent aux collectivités la possibilité de répondre plus efficacement aux attentes et aux besoins des citoyens.

Nous sommes donc extrêmement favorables à cette mesure.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Les variantes sont des outils dont l’utilité est reconnue. Elles permettent d’encourager l’émergence de solutions techniques innovantes, notamment d’un point de vue environnemental et social, en réponse aux marchés publics.

En l’état actuel du droit, les variantes sont réputées être autorisées, sauf mention contraire dans l’avis de marché ou dans les documents de la consultation pour les procédures adaptées et les procédures formalisées des entités adjudicatrices.

Afin de faciliter et d’encourager le recours aux variantes, il conviendrait d’élargir cette présomption d’autorisation aux procédures formalisées des pouvoirs adjudicateurs.

La commission spéciale émet donc un avis favorable sur ces amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Les règles relatives à la présentation des variantes sont définies à l’article R. 2151-8 du code de la commande publique. Celui-ci dispose que les variantes sont autorisées dans les marchés en procédure adaptée, sauf si l’acheteur s’y oppose expressément.

Pour ce qui est des procédures formalisées, c’est-à-dire pour les marchés soumis au droit européen de la commande publique, les modalités de présentation des variantes sont imposées par la directive 2014/24, laquelle prévoit, à l’inverse, que les variantes sont interdites, sauf si le pouvoir adjudicateur les autorise expressément. Modifier cette règle se heurterait donc directement au droit européen en vigueur.

C’est pourquoi j’émets un avis défavorable sur ces amendements identiques.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 368 rectifié bis, 427 rectifié bis, 464 rectifié et 593 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4.

L’amendement n° 233, présenté par Mme Havet, MM. Lévrier, Patriat, Bitz, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, MM. Fouassin, Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Mohamed Soilihi, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de la commande publique est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa de l’article L. 2152-7, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le marché peut être attribué à une société constituée ou en cours de formation entre l’acheteur et le ou les soumissionnaires déclarés attributaires si les documents de la consultation le prévoient. Cette société est constituée, pour une durée limitée en vue de la conclusion et de l’exécution de ce marché. » ;

2° Après le premier alinéa de l’article L. 3124-5, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le contrat de concession peut être attribué à une société constituée ou en cours de formation entre l’autorité concédante et le ou les soumissionnaires déclarés attributaires si les documents de la consultation le prévoient. Cette société est constituée, pour une durée limitée en vue de la conclusion et de l’exécution de ce contrat de concession. »

La parole est à Mme Nadège Havet.

Mme Nadège Havet. Si vous me le permettez, monsieur le président, je défendrai en même temps l’amendement n° 232.

M. le président. J’appelle donc en discussion l’amendement n° 232, présenté par Mme Havet, MM. Lévrier, Patriat, Bitz, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, MM. Fouassin, Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Mohamed Soilihi, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 3 du chapitre Ier du titre VII du livre Ier de la deuxième partie du code de la commande publique est complétée par un article L. 2171-6-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 2171-6-2. – L’acheteur peut confier à un opérateur économique une mission globale portant sur tout ou partie de la conception, de la construction et de l’aménagement d’infrastructures ou d’équipements publics ayant vocation à être imbriqués dans un ensemble immobilier plus vaste comportant un programme de logement, et dont l’opérateur économique assurera la maîtrise d’ouvrage globale. »

Veuillez poursuivre, ma chère collègue.

Mme Nadège Havet. L’amendement n° 233 vise à ouvrir le recours à l’ensemble des marchés et des contrats de concession au dispositif de partenariat public privé institutionnalisé (PPPI), issu du droit de l’Union européenne.

L’amendement n° 232 tend quant à lui à créer une nouvelle catégorie de marché global sectoriel, afin de permettre le transfert de la maîtrise d’ouvrage à l’opérateur privé pour des projets immobiliers complexes où la maîtrise d’ouvrage publique et la maîtrise d’ouvrage privée s’entremêlent. Cela offrirait une solution pratique et efficace pour garantir la réalisation des projets tout en répartissant les risques de manière plus appropriée.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. L’amendement n° 233 vise à permettre, pour l’ensemble des marchés publics et des contrats de concession, le recours au partenariat public-privé institutionnalisé, qui repose sur le cofinancement public-privé par la mise en place d’une structure de gouvernance conjointe.

L’élargissement du recours à un tel dispositif pourrait être intéressant, car les PPPI, à la différence des montages classiques en partenariat public-privé, ont l’avantage de présenter un coût réduit pour les finances publiques et de renforcer la visibilité de la personne morale de droit public sur l’exécution du contrat.

Toutefois, en raison des fortes contraintes juridiques imposées par le droit de l’Union européenne concernant la mise en œuvre de ces partenariats, je souhaite solliciter l’avis du Gouvernement, pour m’assurer qu’une telle réforme ne présenterait pas des fragilités juridiques ou n’aurait pas des effets délétères que nous n’aurions pu identifier dans les délais qui nous ont été impartis.

De même, n’ayant pu expertiser la mesure proposée, je souhaite entendre l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 232.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. L’amendement n° 233 a pour objet d’inscrire dans le code de la commande publique un dispositif qui est admis par le droit européen.

Il vise à étendre à tous les acheteurs la possibilité offerte par la loi aux collectivités territoriales de mener une procédure de commande publique pour sélectionner un partenaire avec lequel elles créent une société à capital mixte en vue d’exécuter un marché public ou un contrat de concession.

L’institution de ces partenariats public-privé peut être un outil pertinent pour faciliter la réalisation de projets complexes à l’aide d’un cofinancement public-privé et d’une structure de gouvernance commune ou conjointe.

Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur l’amendement n° 233.

L’amendement n° 232 tend quant à lui à créer un marché global sectoriel en cas d’opération portant sur un ensemble immobilier où la maîtrise d’ouvrage publique et la maîtrise d’ouvrage privée seraient imbriquées.

Ce que l’on appelle communément des cessions foncières avec charges, c’est-à-dire des opérations lors desquelles la vente et l’acquisition d’équipements sont indivisibles, entre parfois en conflit avec certaines règles de la commande publique ayant justement vocation à régir des opérations moins complexes, notamment celles qui sont relatives à la maîtrise d’ouvrage publique, à l’allotissement ou encore au paiement direct des sous-traitants.

Lorsque l’opération porte sur un ensemble immobilier où les maîtrises d’ouvrage publique et privée sont imbriquées, cette nouvelle forme de marché permettrait à la collectivité publique ou à des bailleurs sociaux de confier la maîtrise d’ouvrage à un opérateur privé, afin de ne pas avoir à supporter de risque relatif à la réalisation du programme privé.

Le Gouvernement émet donc également un avis favorable sur l’amendement n° 232.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 233.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4.

Je mets aux voix l’amendement n° 232.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4.

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L’amendement n° 366 rectifié bis est présenté par MM. J.B. Blanc, Somon et Burgoa, Mme Canayer, MM. Reynaud, Sautarel et C. Vial, Mmes Micouleau, Imbert et Bonfanti-Dossat, MM. Bruyen, Meignen et Gremillet, Mmes Lassarade et Belrhiti, MM. Laménie, Tabarot et Cadec, Mme Joseph, MM. Sido, Milon et J.P. Vogel, Mme Demas, M. Pernot, Mmes P. Martin et Petrus, M. Chatillon, Mme Dumont, M. Chevrollier, Mme Ventalon, M. Mandelli, Mme Josende, MM. Genet, Michallet, Panunzi et Chaize, Mmes Malet et Noël et MM. Brisson, Piednoir et Klinger.

L’amendement n° 423 rectifié bis est présenté par MM. Canévet et Delcros, Mmes N. Goulet et O. Richard, MM. Kern et Longeot, Mme Billon, M. Capo-Canellas, Mme Romagny, M. Cambier, Mme Gacquerre, M. Duffourg, Mme Saint-Pé et M. Levi.

L’amendement n° 465 rectifié est présenté par Mme Havet, MM. Lévrier, Patriat, Bitz, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, MM. Fouassin, Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Mohamed Soilihi, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre II du titre VIII du livre Ier de la deuxième partie du code de la commande publique est complété par un article L… ainsi rédigé :

« Art. L.– L’acheteur notifie le marché au titulaire dans un délai qui ne peut être supérieur à un an à compter de la décision d’attribution. Le marché prend effet à la date de réception de la notification.

« Au-delà de cette date, l’entreprise retenue est en droit de ne pas donner suite à la notification du marché. »

La parole est à M. Laurent Somon, pour présenter l’amendement n° 366 rectifié bis.

M. Laurent Somon. Cet amendement vise à encadrer le délai entre la décision d’attribution d’un marché public et sa notification par l’acheteur, afin de simplifier les procédures, notamment pour les plus petites entreprises.

En effet, le délai entre l’annonce du choix pressenti et la notification du marché crée des incertitudes qui compliquent la gestion des petites entreprises, en ce qui concerne tant l’établissement des plans de charge que la gestion des ressources humaines ou l’adéquation de l’offre financière à la réalité des travaux au moment de leur exécution.

M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l’amendement n° 423 rectifié bis.

M. Michel Canévet. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. La parole est à Mme Nadège Havet, pour présenter l’amendement n° 465 rectifié.

Mme Nadège Havet. Il est également défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Ces amendements visent à encadrer le délai entre la décision d’attribution et la notification du marché par l’acheteur et à le limiter à un an.

Cela nous semble intéressant : en effet, les PME doivent parfois attendre plusieurs mois la notification du marché pour lequel elles ont été sélectionnées, ce qui entraîne pour elles de lourdes difficultés, notamment en matière de gestion des ressources humaines et d’établissement des plans de charge.

Aujourd’hui, aucune limite n’est posée à ce délai de notification. L’adoption de ces amendements constituerait une réelle simplification de la vie des entreprises, en garantissant à celles-ci plus de visibilité dans l’exécution des contrats.

La commission spéciale émet donc un avis favorable sur ces trois amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Le Gouvernement comprend le souhait de raccourcir le plus possible le délai entre l’attribution d’un marché public et sa notification et de le limiter à un an.

Pour autant, encadrer ce délai dans la loi ne semble pas opportun compte tenu des nombreux aléas de procédure qui peuvent remettre en cause la capacité de l’acheteur à notifier le marché selon les échéances qu’il s’est fixées. Certains marchés ne peuvent être notifiés avant que l’acheteur n’ait obtenu toutes les autorisations administratives nécessaires. Nous aurons l’occasion d’en parler de nouveau.

Par exemple, le droit du travail impose de notifier le marché et de commencer l’exécution des travaux seulement après l’accomplissement des obligations prévues par le code du travail, notamment en ce qui concerne la sécurité des chantiers, ce qui est logique.

Les entreprises ne se trouvent pas pour autant démunies : juridiquement, en cas d’absence ou de retard de la notification, elles sont déliées de leur engagement et peuvent renoncer au marché. La notification tardive d’un marché peut également engager la responsabilité de l’acheteur.

Pour ces raisons, le Gouvernement estime préférable de mener des actions de sensibilisation auprès des acheteurs, pour les encourager à tenir les délais les plus courts possible.

J’émets donc un avis défavorable sur ces trois amendements identiques.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 366 rectifié bis, 423 rectifié bis et 465 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4.

Madame la ministre déléguée, mes chers collègues, il est minuit. Je vous propose de prolonger notre séance jusqu’à minuit et demi, afin de poursuivre l’examen de ce texte.

Il n’y a pas d’observation ?…

Il en est ainsi décidé.

L’amendement n° 231, présenté par Mme Havet, MM. Lévrier, Patriat, Bitz, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, MM. Fouassin, Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Mohamed Soilihi, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l’article L. 2193-1 du code de la commande publique, après les mots : « marchés de travaux », sont insérés les mots : « pour lesquels l’acheteur est maître d’ouvrage au sens de l’article L. 2411-1 ».

La parole est à Mme Nadège Havet.

Mme Nadège Havet. Monsieur le président, si vous me le permettez, je présenterai en même temps les amendements nos 231 et 234.

M. le président. J’appelle donc en discussion l’amendement n° 234, présenté par Mme Havet, MM. Lévrier, Patriat, Bitz, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, MM. Fouassin, Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Mohamed Soilihi, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, et ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 1° de l’article L. 2512-5 du code de la commande publique est ainsi rédigé :

« 1° Les services d’acquisition ou de location, quelles qu’en soient les modalités financières :

« a) De terrains, de bâtiments existants ou d’autres biens immeubles, ou qui concernent d’autres droits sur ces biens ;

« b) D’une partie minoritaire et indissociable d’un immeuble à construire assortis de travaux répondant aux besoins de l’acheteur qui ne peuvent être réalisés par un autre opérateur économique que celui en charge des travaux de réalisation de la partie principale de cet immeuble lorsqu’il n’existe aucune solution de remplacement raisonnable et que l’absence de concurrence ne résulte pas d’une restriction artificielle des caractéristiques du marché. Les dispositions des articles L. 2183-1 et L. 2184-1 sont applicables lorsque le marché répond à un besoin dont la valeur est égale ou supérieure aux seuils européens figurant dans un avis annexé au présent code ; »

Veuillez poursuivre, ma chère collègue.

Mme Nadège Havet. L’amendement n° 231 vise à préciser que les règles relatives à la sous-traitance n’ont vocation à s’appliquer aux marchés de travaux que dans l’hypothèse où l’acheteur est maître d’ouvrage.

Cette précision permet notamment de confirmer que la règle du paiement direct n’est pas maintenue dans le cas où la personne publique transfère la maîtrise d’ouvrage à une personne privée.

L’amendement n° 234 vise quant à lui à assouplir le régime d’exécution des ventes en l’état futur d’achèvement (Vefa) qualifiées de marché public.

Actuellement, le code de la commande publique permet de passer sans publicité ni mise en concurrence préalable certains marchés d’acquisition ou de location d’une partie minoritaire et indissociable d’un immeuble à construire. Ce cadre juridique impose des règles d’exécution peu compatibles avec une maîtrise d’ouvrage privée.

Afin de résoudre ces problèmes, nous proposons, au travers de cet amendement, de faire passer les Vefa publiques dans le régime des contrats exclus, afin de les exempter des règles d’exécution actuelles et de permettre une conclusion de gré à gré, selon le même régime que celui qui gouverne les acquisitions ou les locations d’immeubles existants par des pouvoirs adjudicateurs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. L’amendement n° 231 vise à déroger aux règles relatives aux sous-traitants lorsque l’acheteur public n’est pas maître d’ouvrage.

Cette disposition semble une mesure de simplification et de bon sens, puisqu’il paraît incohérent de soumettre l’acheteur public à des contraintes fortes vis-à-vis des sous-traitants s’il n’est pas lui-même chargé de la maîtrise d’ouvrage.

Néanmoins, en cohérence avec la position de la commission spéciale sur les amendements nos 233 et 232, je sollicite l’avis du Gouvernement, afin que celui-ci confirme que cette réforme n’induirait pas d’effets délétères et permettrait au contraire de simplifier la conduite de certaines opérations pour les acheteurs publics.

L’amendement n° 234 vise à aligner le régime des ventes en l’état futur d’achèvement sur le régime des contrats exclus, c’est-à-dire conclus de gré à gré et soumis à des règles d’exécution plus souples. Cet alignement semble justifié en raison de la nature singulière de ces marchés, où l’acheteur public n’acquiert qu’une partie minoritaire d’un ensemble immobilier et pour lesquels la maîtrise d’ouvrage est confiée à un opérateur privé.

En conséquence, ainsi que je l’indiquais au sujet des amendements nos 233 et 232, cet amendement tend apparemment à simplifier l’exécution de certains marchés de travaux. Toutefois, les conséquences juridiques de son adoption éventuelle demeurent difficilement évaluables dans les délais d’examen de ce projet de loi.

Je sollicite donc ainsi également sur cet amendement l’avis du Gouvernement, qui pourra nous indiquer les éventuels effets délétères d’une telle réforme.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. L’amendement n° 231 vise à préciser que les dispositions du code de la commande publique relatives à la sous-traitance ne s’appliquent que pour les marchés de travaux dans lesquels l’acheteur est maître d’ouvrage.

Le Gouvernement estime que cette clarification bienvenue permet de répondre aux interrogations des acheteurs publics qui, dans le cadre d’opérations complexes, passent des marchés de travaux comportant des transferts de la maîtrise d’ouvrage.

Dans ce cas, au sens de la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance, le maître d’ouvrage est le titulaire du contrat et non plus l’acheteur. Il n’y a alors pas de sens à ce que l’acheteur conserve l’obligation de payer directement un éventuel sous-traitant.

Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur cet amendement, qui tend à remédier à cette incohérence.

L’amendement n° 234 vise quant à lui à faciliter l’exécution financière des ventes en l’état futur d’achèvement. Les opérations immobilières des personnes publiques passées sous cette forme peuvent être qualifiées de marchés publics de travaux.

Dans ce cas, alors même qu’elles peuvent être conclues sans publicité ni mise en concurrence, ces opérations sont soumises aux règles d’exécution financière prévues par le code de la commande publique, lesquelles sont très peu compatibles avec une maîtrise d’ouvrage privée.

Cet amendement vise justement à harmoniser la Vefa publique avec la Vefa classique. Son adoption favoriserait l’attractivité de ce dispositif dont les personnes publiques et les bailleurs sociaux ont besoin.

Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur l’amendement n° 234.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 231.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4.

Je mets aux voix l’amendement n° 234.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4.

Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 47 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, MM. Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et Jouve, MM. Masset et Roux, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et M. Grosvalet, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La dernière phrase du dernier alinéa de l’article 53 de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement est complétée par les mots : « et pour faire évoluer les règles d’attribution des marchés publics dans un sens favorable à la prise en compte par les acheteurs publics des labels mentionnés au neuvième alinéa du présent article. »

La parole est à M. Michel Masset.

M. Michel Masset. La prise en compte par les acheteurs publics de labels sectoriels relatifs à la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) est absente de l’article 53 de la loi du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement.

Cet amendement tend précisément à remédier à ce problème. Il vise ainsi à compléter le dernier alinéa de cet article, qui enjoint déjà au Gouvernement de promouvoir « un cadre de travail au niveau communautaire pour l’établissement d’indicateurs sociaux et environnementaux ».

Ces dernières années, des fédérations professionnelles ont mis en place des labels sectoriels relatifs à la RSE et les entreprises y adhérant se sont impliquées dans cet effort. Celles-ci craignent que les premières avancées pour le verdissement de la commande publique, dans la loi du 23 octobre 2023 relative à l’industrie, verte ne conduisent à s’accommoder d’un statu quo en ce qui concerne les règles européennes, qui exigent que l’objet de la commande publique ne porte que sur le marché, à l’exclusion de tout critère relatif aux entreprises soumissionnaires.

En effet, développer un label sectoriel RSE suppose déjà un lourd investissement collectif de la part des entreprises concernées. Faire vivre cette démarche de progrès, former des auditeurs intervenant sur site et élaborer des outils pédagogiques représente pour elles un second effort. Enfin, elles réalisent un troisième engagement en adoptant une démarche d’amélioration continue et d’évaluation de leur performance RSE.

Au vu des débats qui ont eu lieu lors de l’examen du projet de loi au sein de la commission spéciale, cet amendement ne peut pas être considéré comme satisfait au motif que, aux termes de l’alinéa 9 de l’article 53 de la loi du 3 août 2009, « l’État appuiera la création, pour les entreprises de toute taille, de labels attribués sur la base de référentiels pouvant présenter un caractère sectoriel et territorial [et] soutiendra de la façon la plus appropriée les PME s’engageant dans la voie de la certification environnementale ».

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 57 rectifié est présenté par M. Favreau, Mme Aeschlimann, MM. Belin, J.-B. Blanc et Brisson, Mme Evren, M. Gremillet, Mme Josende, MM. Karoutchi, Laménie et Mandelli, Mme Micouleau, M. Panunzi, Mme Petrus et MM. Sautarel, Sido, Tabarot, J.-P. Vogel et Genet.

L’amendement n° 178 rectifié est présenté par MM. Burgoa, Bouchet, Milon et Menonville, Mmes Imbert, Guidez et Dumont, MM. Piednoir et Henno, Mmes Belrhiti et Lopez, M. Anglars, Mme Demas, MM. Sol et H. Leroy, Mme Canayer et M. Houpert.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa de l’article 53 de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ce cadre de travail visera également à permettre la prise en compte par les acheteurs publics des labels mentionnés au neuvième alinéa du présent article. »

La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour présenter l’amendement n° 57 rectifié.

Mme Marie-Do Aeschlimann. Cet amendement vise à permettre la prise en compte par les acheteurs publics des labels RSE mis en œuvre par les fédérations professionnelles. Ces dernières années, celles-ci ont mobilisé de nombreux moyens pour encourager le développement de labels sectoriels.

Les entreprises adhérentes se sont également impliquées de façon prononcée en faveur de l’effort relatif à la RSE. Elles craignent en effet que la loi relative à l’industrie verte ne tende à compromettre ces efforts, en faisant porter l’objet de la commande publique sur le marché et en excluant tout critère relatif aux entreprises soumissionnaires.

M. le président. La parole est à Mme Patricia Demas, pour présenter l’amendement n° 178 rectifié.

Mme Patricia Demas. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Comme je l’ai indiqué devant la commission spéciale, ces amendements nous semblent satisfaits, dans la mesure où l’article 53 de la loi de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement précise déjà que l’État « soutiendra de la façon la plus appropriée […] les petites et moyennes entreprises qui s’engageront dans la voie de la certification environnementale ».

Cela peut inclure un travail gouvernemental à l’échelon européen. Il me semble d’ailleurs que Mme la ministre a évoqué tout à l’heure l’engagement européen de la France, afin de mieux prendre en compte les labels RSE au sein de la commande publique.

Dès lors, dans un esprit d’intelligibilité et de concision de la loi, un tel ajout semble inutilement alourdir le texte.

Par ailleurs, ces dernières années, de nombreuses avancées en matière de verdissement de la commande publique ont été mises en œuvre, ce qui montre bien la volonté de l’État et du législateur d’avancer vers une meilleure prise en compte de la démarche environnementale des entreprises.

Ajouter un article additionnel comportant une injonction à agir pour le Gouvernement serait peu opérationnel, d’autant que, je le répète, cette mesure est déjà en partie satisfaite.

Pour ces raisons, la commission spéciale émet un avis défavorable sur l’amendement n° 47 rectifié bis, ainsi que sur les amendements identiques nos 57 rectifié et 178 rectifié.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Je vous l’accorde, mon propos manque un peu de précision, mais j’essaierai d’obtenir des informations plus complètes d’ici à demain. Comme je l’indiquais lors de l’examen de l’article 4, il est prévu durant cette mandature de revoir la directive sur la commande publique à l’échelon européen.

Ainsi que Mme le rapporteur l’a rappelé, la référence aux labels RSE est déjà clairement autorisée dans la définition des besoins si elle est liée à l’objet du marché et si les autres labels présentant des garanties équivalentes sont admis.

En revanche, outre que les dispositions proposées ne sont pas toutes d’ordre normatif, une telle modification du droit européen, qui viserait à prendre en compte la politique générale des entreprises dans l’attribution des marchés publics n’est pas envisageable aujourd’hui, dès lors qu’elle n’aurait pas de lien avéré avec l’objet du marché. Elle serait alors contraire au principe de non-discrimination issu des traités.

Pour cette raison, le Gouvernement sollicite le retrait de ces amendements, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour explication de vote.

M. Simon Uzenat. Un important travail a été réalisé sous l’égide de la plateforme RSE de France Stratégie, en particulier entre 2018 et 2021. Un certain nombre d’organisations professionnelles sont désormais engagées sur ce sujet, même si, il faut le reconnaître, le niveau de maturité des fédérations d’entreprises diffère selon les branches d’activité.

Toujours est-il que ce travail, qui a mobilisé plusieurs dizaines de branches, a livré des enseignements extrêmement intéressants.

Madame la ministre, les avis au sujet de la prise en compte de la politique générale des entreprises dans l’attribution des marchés publics sont en effet divergents. Certains juristes expérimentés défendent l’idée d’une réforme à la marge du code des marchés publics, quand d’autres estiment qu’il faut engager une révision de la directive du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics.

Le cadre n’est donc pas définitivement stabilisé. En tout état de cause, nous devons soutenir les organisations professionnelles qui s’engagent à respecter ces labels, notamment dans les secteurs du bâtiment, des carrières et des matériaux, en fonction de leur degré de maturité. Les entreprises le demandent clairement, il faut pouvoir valoriser ces actions, pour soutenir efficacement les acteurs économiques des territoires.

Nous voterons donc en faveur de ces amendements, dont les dispositions permettent, dans l’attente d’une évolution du cadre européen, d’avancer concrètement pour reconnaître l’engagement de ces acteurs économiques. Ceux-ci doivent être avantagés dans le cadre de la passation des marchés publics.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 47 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Madame Aeschlimann, l’amendement n° 57 rectifié est-il maintenu ?

Mme Marie-Do Aeschlimann. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 57 rectifié est retiré.

Madame Demas, l’amendement n° 178 rectifié est-il maintenu ?

Mme Patricia Demas. Non, je le retire également, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 178 rectifié est retiré.

L’amendement n° 553, présenté par M. M. Weber, Mme Linkenheld, MM. Mérillou et Chaillou, Mme Conconne, MM. Fagnen, Ros, Kanner, Redon-Sarrazy et Bouad, Mme Canalès, MM. Darras, Jacquin, Pla et Uzenat, Mme Bonnefoy, M. Gillé, Mme Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au I de l’article 58 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, les mots : « les services de l’État ainsi que par les collectivités territoriales et leurs groupements » sont remplacés par les mots : « les entités adjudicatrices soumises au code de la commande publique ».

La parole est à M. Simon Uzenat.

M. Simon Uzenat. Les dispositions de cet amendement sont issues du rapport parlementaire de la mission d’information sur l’évaluation de l’impact de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et pour une économie circulaire, dite loi Agec, ainsi que du rapport d’évaluation adressé au Parlement par le commissariat général au développement durable relatif à l’article 58 de cette même loi.

Il s’agit d’étendre à tous les acheteurs soumis au code de la commande publique les obligations d’achats issues du réemploi, du don, du recyclage et de la réutilisation.

Aujourd’hui, seuls les acheteurs de l’État, des collectivités territoriales et de leurs groupements intercommunaux sont concernés par ces obligations, pour environ 46 % du montant total des marchés publics notifiés en 2021, soit un peu moins de 60 milliards d’euros.

Les autres acheteurs soumis au code de la commande publique, notamment les établissements publics, pourraient également devoir respecter cette obligation, afin de susciter un puissant levier de transformation de l’offre économique et d’aider à structurer l’offre économique circulaire. Cette préoccupation, me semble-t-il, est très largement partagée sur ces travées.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. En effet, l’évaluation du dispositif adressée par le commissariat général au développement durable au Parlement en 2022 a permis de constater que cette nouvelle obligation a incité de nombreux acheteurs à investir le champ de l’achat durable, contribuant ainsi à leur montée en compétences dans ce domaine.

L’évaluation avance également plusieurs pistes d’évolution du dispositif, comme l’élargissement des obligations à d’autres acheteurs publics, la simplification des aspects techniques du décret d’application et le renforcement de l’accompagnement des acheteurs, afin de favoriser leur appropriation du dispositif.

Néanmoins, un tel élargissement pourrait supposer une évaluation plus complète. Il semble être un peu tôt pour tirer un bilan concret de cette nouvelle obligation.

De plus, la rédaction de l’amendement présente un défaut, me semble-t-il : les seules entités adjudicatrices sont soumises à son dispositif, alors qu’il est précisé dans l’objet de l’amendement que celui-ci vise à soumettre l’ensemble des acheteurs publics à l’obligation. Autrement dit, en l’état, le présent amendement ne vise pas à inclure tous les acteurs publics, contrairement à ce qui est inscrit dans son objet.

Une telle évolution du dispositif pourrait utilement s’appuyer sur des travaux préparatoires à plus long terme. Si je partage la volonté affichée par les auteurs de l’amendement, je vais donc, en raison de ce défaut de rédaction, m’en remettre à la sagesse du Sénat.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Monsieur le sénateur, vos préoccupations me semblent assez éloignées du cœur du texte.

L’État et les collectivités territoriales sont déjà soumis aux dispositions de la loi Agec, pour un montant de 58 milliards d’euros par an. Je pense que l’élargissement de cette mesure à d’autres organismes ne relève pas du cœur du projet de loi, qui est la simplification de la vie des entreprises.

Comme je suis en désaccord sur le choix du véhicule législatif choisi, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 553.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 298, présenté par MM. Barros, Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Pour les marchés dont les montants n’excèdent pas les seuils mentionnés à l’article 4 de la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE, les acheteurs publics peuvent, lorsqu’ils se fondent sur une pluralité de critères pour l’attribution d’un marché, prendre en compte la proximité des soumissionnaires du lieu d’exécution du marché et leurs engagements à cet égard dans l’évaluation de leur offre.

La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas.

Mme Marie-Claude Varaillas. Il nous paraît fondamental d’intégrer un critère de proximité dans la commande publique, afin de véritablement favoriser nos PME-TPE et nos producteurs locaux dans le cadre des projets d’alimentation territoriaux.

Si cette disposition est contraire au droit européen, voire au droit constitutionnel, il est contradictoire de vouloir redynamiser nos territoires et préserver l’emploi comme le tissu économique local tout en donnant systématiquement la prévalence aux règles de concurrence.

Bien sûr, on peut avancer quelques exceptions, comme celles qui concernent la nécessité d’assurer une intervention rapide, de connaître l’environnement économique local ou encore de promouvoir des modes de production respectueux de l’environnement ou issus du commerce équitable, auxquelles on peut ajouter des astuces comme la « clause Molière ». In fine, il s’agit toujours de soutenir le tissu des PME locales. Mais nous sommes alors confrontés à une inutile complexité du droit.

Nous regrettons l’absence de mécanismes comparables au Small Business Act existant aux États-Unis, qui oblige l’administration à réserver une part de ses marchés publics aux PME, voire aux PME locales. En effet, il ne suffit pas de faciliter l’accès des PME à la commande publique : selon nous, il faut leur réserver une place dans cette commande.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Ma chère collègue, nous ne pouvons que partager votre souhait de favoriser les entreprises locales.

Les collectivités souhaitent faire travailler les entrepreneurs locaux, c’est évident. Toutefois, comme vous l’avez vous-même indiqué, l’inclusion de critères de proximité est contraire à la directive européenne sur la passation des marchés publics. Même en demeurant en deçà des seuils fixés par l’Union européenne, il s’agirait là d’une discrimination entre les candidats.

La commission spéciale émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Madame la sénatrice, je vous remercie d’avoir commencé la défense de votre amendement en reconnaissant qu’il était contraire au droit européen.

En la matière, il n’est peut-être pas impossible d’imaginer faire évoluer le droit européen… Je précise toutefois, car nous avons beaucoup discuté du plan national pour des achats durables (Pnad), qu’il est déjà possible de moduler la rédaction des cahiers des charges en fonction des spécificités locales.

Au sein des critères de choix, qu’il s’agisse des produits, de la performance des offres en matière de protection de l’environnement ou des circuits courts, des voies et moyens peuvent être utilisés pour parvenir à ces fins, sans contrevenir au droit.

Le Gouvernement émet donc également un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 298.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Mes chers collègues, je vais lever la séance.

Nous avons examiné 36 amendements au cours de la journée ; il en reste 362 à examiner sur ce texte.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Après l’article 4 (priorité) (début)
Dossier législatif : projet de loi de simplification de la vie économique
Discussion générale

7

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mardi 4 juin 2024 :

À neuf heures trente :

Questions orales.

À quatorze heures trente et le soir :

Suite du projet de loi de simplification de la vie économique (procédure accélérée ; texte de la commission n° 635, 2023-2024).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le mardi 4 juin 2024, à zéro heure trente.)

Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

FRANÇOIS WICKER