M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi.
M. Pierre-Antoine Levi. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’examen de ces crédits intervient dans un contexte politique et budgétaire particulier, qui nous oblige à faire des choix responsables tout en préservant l’ambition que nous assumons collectivement pour le sport, la jeunesse et la vie associative.
Ces domaines, essentiels pour la cohésion de notre société, méritent une attention toute particulière dans cette période de mutations profondes.
Nous le savons, le contexte budgétaire est contraint. Je mesure donc l’importance que revêt le budget de ces missions, aujourd’hui réunies au sein d’un même ministère.
Si les perspectives de revalorisation des dotations sont, pour ainsi dire, non envisageables, rien ne nous empêche en revanche d’appréhender les choses différemment et de corriger certaines lignes de manière plus rationnelle.
Je le rappelle avec force : le sport ne représente que 0,18 % des dépenses de l’État ! Ce chiffre interpelle quand on connaît l’importance du sport dans notre société et son rôle en matière de santé publique, d’éducation et de cohésion sociale.
La Cour des comptes nous a récemment alertés sur le coût considérable qu’impliquerait la généralisation du service national universel : entre 3,5 milliards et 5 milliards d’euros par an.
Face à ce constat, et alors que seuls 35 700 jeunes se sont inscrits au SNU pour 2025, très loin de l’objectif de 66 000, le groupe Union Centriste partage pleinement l’analyse de la commission des finances : il est temps de mettre fin à cette expérimentation.
Le Gouvernement lui-même semble d’ailleurs prendre acte de cette réalité, puisque la généralisation naguère annoncée pour 2026 est désormais jugée « inatteignable » dans la situation budgétaire actuelle.
Dans ce contexte, nous devons impérativement concentrer nos moyens sur les dispositifs qui ont fait leurs preuves.
Je pense, premièrement, au service civique, dont les crédits augmentent significativement, de 81,2 millions d’euros, pour atteindre près de 600 millions d’euros en 2025, ce qui permettra de conserver l’objectif de 150 000 jeunes volontaires.
Ce dispositif permet d’accompagner des jeunes dans un véritable parcours d’engagement, avec des résultats probants en matière d’insertion sociale et professionnelle. Sa force réside notamment dans la qualité de l’accompagnement et la durée des missions, qui permettent une réelle montée en compétences.
Deuxièmement, je relève que les « colos apprenantes » sont pérennisées, avec une enveloppe de 40 millions d’euros. Ce dispositif, qui a déjà bénéficié à 300 000 jeunes depuis sa création, répond à un triple objectif social, éducatif et culturel.
Nous nous réjouissons de sa pérennisation, tout en revendiquant un renforcement du maillage territorial pour garantir une égalité d’accès sur l’ensemble du territoire national.
Le développement du mentorat, avec une enveloppe maintenue à 32 millions d’euros, constitue également une réponse pertinente aux besoins d’accompagnement des jeunes, permettant un suivi personnalisé et adapté aux situations individuelles.
J’en viens à la vie associative, dont les crédits accusent un recul préoccupant de 3,9 %. Cette situation mérite toute notre attention.
Je rappellerai que les associations emploient 1,8 million de salariés et regroupent près de 15 millions de bénévoles ; ensemble, ils font vivre les valeurs d’engagement, de citoyenneté et de solidarité au quotidien.
Les associations sont confrontées à une triple difficulté : la hausse de leurs coûts de fonctionnement, la baisse des financements des collectivités territoriales et l’évolution des modalités de l’engagement bénévole.
Face à ce constat, nous disposons d’outils facilement mobilisables.
Ne serait-ce pas le moment d’envisager de relever la quote-part des sommes provenant des comptes bancaires inactifs et des contrats d’assurance vie en déshérence affectée au fonds de développement de la vie associative (FDVA) ? En 2025, cette quote-part sera portée à 40 % : pourquoi ne pas envisager un passage à 50 % ?
Le FDVA joue un rôle crucial pour les petites associations locales, avec plus de 25 000 subventions par an, dont 80 % bénéficient aux plus petites structures.
La non-reconduction de l’enveloppe complémentaire dite « Fonjep jeunes » apportée au Fonjep, qui s’élevait l’an dernier à 7,2 millions d’euros, est particulièrement inquiétante pour la capacité des associations à maintenir leurs actions en direction de la jeunesse.
Concernant le programme « Sport », avec 593 millions d’euros, son budget pour 2025 est en forte baisse ; il risque d’être encore plus fortement amoindri si l’amendement que nous soumet le Gouvernement ce soir est adopté.
Cette diminution soulève des interrogations légitimes sur notre ambition de « grande nation sportive ».
Comment justifier le gel des 100 millions d’euros du plan « 5 000 équipements sportifs – Génération 2024 » et la réduction de 10 millions d’euros des sommes allouées au Pass’Sport ?
La stratégie nationale sport-santé souffre quant à elle encore d’incohérences majeures.
Le dispositif des trente minutes de sport par jour dans les écoles est loin d’être effectif : seuls 42 % des écoles primaires l’appliquent. La baisse, de 3,15 millions d’euros, des crédits alloués aux deux heures supplémentaires de sport au collège est un signal particulièrement négatif.
S’agissant de l’ANS, nous nous réjouissons du relèvement du plafond de la taxe sur les paris sportifs en ligne, mais nous attendons des garanties fermes quant à sa pérennisation. Seule une dotation budgétaire globale et stabilisée permettra de mener une politique continue et efficace en faveur du sport.
La simplification de la gouvernance territoriale reste un enjeu majeur. Il serait plus efficace de privilégier une déconcentration des crédits à l’échelon départemental, car cela permettrait une meilleure prise en compte des réalités locales.
Pour conclure, le groupe Union Centriste conditionnera son vote sur les crédits de cette mission à l’engagement du Gouvernement sur les différents points que j’ai évoqués, notamment la réorientation des moyens du SNU vers des dispositifs plus efficaces, comme le service civique et le soutien aux associations de terrain. L’heure n’est plus aux expérimentations coûteuses, mais à la consolidation des dispositifs qui ont fait leurs preuves.
Dans le cas contraire, nous nous rallierons aux conclusions des rapporteurs. (Mme Sonia de La Provôté applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Jérémy Bacchi.
M. Jérémy Bacchi. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, on nous avait promis que les jeux Olympiques auraient un héritage ; pourtant, financièrement parlant, avec près de 188 millions d’euros de coupes pour le seul programme « Sport », permettez-moi de ressentir un fort scepticisme !
Cette baisse concerne notamment les engagements à l’égard du sport du quotidien, qui subissent une réduction de crédits de près de 151,6 millions d’euros, ainsi que le financement du Pass’Sport avec une coupe de 10 millions d’euros.
Le programme « Sport » devient ainsi l’une des missions proportionnellement les plus amputées dans ce budget 2025, sans même compter le coup de rabot de 50,5 millions d’euros que ces crédits ont connu au mois de février 2024.
Et voici qu’aujourd’hui, madame la ministre, vous entendez opérer une coupe supplémentaire de 34,3 millions d’euros par voie d’amendement ! Le groupe CRCE–K condamne fermement, tant sur la forme que sur le fond, cette décision qui envoie un message désastreux aux millions de sportifs français.
Dès lors, je m’interroge, madame la ministre, sur la sincère volonté de votre ministère en matière d’héritage des jeux Olympiques. J’en veux pour preuve les ressources du plan « 5 000 équipements sportifs – Génération 2024 », gérées par l’Agence nationale du sport, qui vont être réduites de 100 millions d’euros dans ce PLF 2025. Cette coupe équivaut peu ou prou aux sommes déjà prévues pour ce programme phare en faveur des équipements sportifs. Cela signifie que les autorisations d’engagement octroyées à l’ANS pour de nouveaux chantiers n’auront pas leur contrepartie en crédits de paiement dans le PLF 2025.
Rappelons que deux tiers des 270 000 équipements sportifs qui maillent notre pays ont pourtant besoin d’être rénovés. Je pense en particulier aux piscines : la situation de nombre d’entre elles est plus que préoccupante en raison de leur vieillissement et du coût énergétique que celui-ci implique.
Par ailleurs, alors même que les collectivités, premières financeuses du sport en France, avec 12,5 milliards d’euros dépensés chaque année, sont confrontées à des coûts d’investissement et de fonctionnement croissants en raison de la vétusté de leurs équipements sportifs, leur budget sera ponctionné de près de 5 milliards d’euros.
Cette réduction drastique du budget des collectivités aura des répercussions évidentes sur leurs investissements en direction du sport ; cela ne fait que renforcer mon interrogation quant à votre volonté de donner un véritable héritage aux jeux Olympiques.
Dès lors, alors que les JO et le choix du sport comme grande cause nationale en 2024 avaient suscité une véritable dynamique, dont a notamment témoigné la hausse de 10 % du nombre de nouveaux licenciés, comment peut-on sérieusement prétendre vouloir réussir un quelconque héritage en amputant si durement le budget du programme « Sport » tout en réduisant de manière aussi drastique le budget de nos collectivités ?
Quant à nous, membres du groupe CRCE-K, il nous semble urgent de poursuivre l’effort entrepris au travers du plan de création de 5 000 équipements, donc d’annuler la baisse de 100 millions d’euros prévue en la matière dans ce PLF.
Nous avons d’ailleurs déposé un amendement en ce sens. Nous souhaitons financer cette proposition par la suppression du SNU, qui ne remplit pas sa mission en matière de mixité sociale et n’est pas en mesure d’assurer l’ensemble de ses missions du fait d’un manque d’encadrement.
De plus, il nous apparaît plus que nécessaire de conserver dans ce budget la hausse de 113,4 millions d’euros des ressources de l’ANS issues de la taxe sur les paris sportifs en ligne, proposition déjà adoptée par le Sénat. Le déplafonnement en question ne mettra point en difficulté les opérateurs de jeux. Selon le rapport de 2023 de l’Autorité nationale des jeux (ANJ), le marché des jeux en ligne a retrouvé en 2023 les niveaux de croissance particulièrement dynamiques observés depuis 2017 : le produit brut des jeux a progressé de 7,2 %, pour s’établir à 2,3 milliards d’euros.
Pour conclure, nous pensons que le succès des jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) ne doit pas être jugé à l’aune du seul nombre de médailles remportées : l’augmentation du nombre de pratiquants d’une activité physique et sportive, autre indicateur crucial, ne peut passer que par le soutien à une politique publique sportive ambitieuse.
Dès lors, pour toutes les raisons que j’ai exposées, nous voterons contre ce budget.
M. le président. La parole est à Mme Mathilde Ollivier.
Mme Mathilde Ollivier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la situation est particulière et inédite. Ce discours, madame la ministre, s’adressait à l’origine à votre prédécesseur. Le contexte politique fait que je m’adresse à vous au sujet d’orientations et de crédits budgétaires sur lesquels vous n’avez pas, vous-même, travaillé.
Certes, les hommes et les femmes politiques changent, mais la politique, elle, reste la même. Le problème est bien là !
À la découverte de ce projet de loi de finances, à la découverte d’une baisse de 231 millions d’euros des crédits de la mission pour l’année 2025, ma réaction fut sans équivoque : de la surprise et de la déception !
En effet, la France a vécu pendant deux mois au rythme de la compétition sportive. Le succès populaire des Jeux a parfaitement illustré l’importance du sport dans les consciences collectives.
Pourtant, le programme « Sport » subit de plein fouet l’austérité budgétaire, avec une baisse globale de 182 millions d’euros de crédits : un recul sans précédent. On a l’impression qu’une fois les Jeux terminés, on tourne la page, pour passer à autre chose. Pourtant, cet héritage, c’est maintenant qu’il peut s’inscrire durablement dans nos politiques publiques.
Nous, membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, proposons plutôt une grande loi de programmation, qui aurait pour objectif de faire du sport un terrain de jeu populaire et émancipateur. Ce texte reposerait sur trois grands piliers.
Premièrement, il faut valoriser la pratique du sport dès le plus jeune âge. Pour cela, nous souhaitons revenir sur la baisse des crédits du Pass’Sport, véritable allocation de rentrée sportive qui permet à des familles d’alléger le coût exorbitant des licences sportives. Nous proposons également d’investir la question du temps libre, en reprenant les dispositions de ma proposition de loi visant à promouvoir et démocratiser l’accès aux vacances sportives.
Deuxièmement, nous voulons que soient traitées les problématiques des violences sexuelles et sexistes dans le sport.
Troisièmement, nous posons la question des infrastructures et de l’accessibilité des complexes sportifs. Aujourd’hui, la moitié des équipements sportifs construits avant 1985, soit 50 000 sur tout le territoire, n’ont jamais été rénovés. Au vu de l’urgence climatique que nous vivons, il faut lancer une politique ambitieuse de rénovation du bâti et ainsi soutenir nos collectivités locales. C’est également un enjeu d’accessibilité pour les personnes en situation de handicap. Après les jeux Paralympiques, il est particulièrement regrettable de voir le Gouvernement reculer sur le plan « 5 000 équipements sportifs – Génération 2024 ».
Ainsi, les coupes budgétaires touchent tous les pans de notre politique sportive. Une seule exception doit être relevée : le Gouvernement propose, par amendement, de créer un nouveau programme « Jeux Olympiques et Paralympiques d’hiver 2030 » destiné à financer un nouvel établissement public.
Au moins, me direz-vous, c’est l’occasion d’avoir des échanges sur le sujet. En effet, la droite sénatoriale refuse que l’on en débatte dans notre assemblée : elle s’oppose au lancement d’une mission d’information sur cet événement, dont les conséquences financières, économiques, sociales et environnementales sont pourtant majeures et nécessitent un débat parlementaire.
Pour ce qui concerne le programme « Jeunesse et vie associative », les contours du budget proposé ne sont pas plus réjouissants.
Qu’il s’agisse du Fonjep ou des associations agréées de jeunesse et d’éducation populaire, nous déplorons le manque de considération dont on fait montre pour ces acteurs incontournables de la cohésion sociale et territoriale, alors que nous devrions plus que jamais les soutenir.
Toutefois – c’est assez rare pour être signalé –, nous marquons une victoire dans ces débats. Nous nous réjouissons en effet de la fin programmée et annoncée du service national universel. C’est un combat que les Écologistes mènent depuis le début de ce dispositif.
Le SNU a été un échec sur tous les plans : coûts exorbitants, objectifs flous, manque de mixité sociale, dérives permanentes, dispositif esquivé et critiqué par la jeunesse… En consacrant cette suppression définitive du service national universel, nous proposons de rediriger ses crédits budgétaires vers le sport.
Vous l’aurez compris, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires ne votera pas les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.)
M. le président. La parole est à M. David Ros. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. David Ros. Permettez-moi tout d’abord, madame la ministre, de vous féliciter pour votre nomination, mais surtout pour l’organisation remarquable des derniers JOP à Paris, résultat incontestable à mettre à votre crédit.
Du crédit, nous passons à l’héritage : le budget 2025 est l’occasion de se jeter à l’eau. Alors, madame la ministre, faut-il voir dans ce budget, une piscine à moitié vide ou une piscine à moitié pleine ? (Sourires.)
Nous débattons aujourd’hui d’une mission qui concerne près de 30 millions de nos concitoyens : sportifs licenciés, bénévoles associatifs et jeunes engagés dans divers dispositifs. Ce budget est une trahison de leur engagement et de leurs espoirs.
Ainsi, les crédits alloués au sport pour 2025 subissent une réduction de près de 170 millions d’euros, soit une baisse de plus de 23 % par rapport à 2024. Et nous apprenons aujourd’hui que vous allez encore nous proposer, par amendement, une baisse supplémentaire de 34 millions d’euros pour le sport ! En cette night session, ce n’est pas l’Open de Bercy, mais le « Close de Bercy » ! (Sourires.)
Dès demain, si ce projet de budget n’est pas amendé, le sport représentera moins de 0,15 % du budget de la nation, une part dérisoire, indigne des ambitions pourtant proclamées par le Président de la République lui-même. Comment, dans ces conditions, répondre à l’élan collectif généré par Paris 2024 ?
Les chiffres sont pourtant sans équivoque : à la rentrée, les clubs ont enregistré une hausse des inscriptions de 32 % en triathlon, de 25 % en escrime, de 20 % en tennis de table. En revanche, faute de moyens, plus de 100 000 inscriptions ont été refusées en basket-ball et en hand-ball. Débordés, les clubs instaurent des quotas, limitent les entraînements et voient leur capacité à accueillir s’effondrer.
Bref, la passion des Français pour le sport se heurte à une gestion budgétaire qui transforme cet engouement en frustration.
À cela s’ajoute l’abandon de la généralisation des deux heures hebdomadaires supplémentaires au collège. S’y ajoute également le manque d’ambition pour le sport à l’université, le plus grand angle mort de la politique sportive dans notre pays, bien en deçà du niveau des pays anglo-saxons, pour ne citer qu’eux.
Le 7 avril 2023, une feuille de route sur le développement du sport universitaire était signée. Où en sommes-nous aujourd’hui ? Je vous serais reconnaissant, madame la ministre, de bien vouloir informer le Sénat de vos avancées en la matière.
Ce budget 2025 apparaît comme une occasion manquée ; malheureusement, il ne reste plus grand-chose dans le bassin : je dirais même que nous touchons le fond !
Mon collègue Adel Ziane, en seconde mi-temps (Sourires.), reviendra plus précisément sur l’attente et les besoins des collectivités locales, en particulier sur les équipements nautiques. Je lui laisserai également le soin d’annoncer le vote du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain sur cette mission, même s’il n’y aura ni suspense ni prolongation… (Nouveaux sourires.)
Madame la ministre, sachez que nous resterons sur le terrain, à vos côtés. Nous défendrons des amendements et soutiendrons tous ceux dont l’adoption permettrait de modifier le budget à la hauteur des enjeux sportifs mentionnés.
Nous resterons en tenue, jusqu’au coup de sifflet final pour travailler à une politique sportive et associative ambitieuse, cohérente et pérenne. (Sourires. – Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.
Mme Vanina Paoli-Gagin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la reprise, cette semaine, des débats budgétaires constitue une épreuve pour la République. En cas de nouvel échec, en cas de nouvelle censure, même si cela n’a pas été le cas aujourd’hui, fort heureusement, le débat sera inévitable : peut-on surmonter la crise sans changer nos institutions ? Ce qui est en jeu, c’est tout autant le vote du budget que le procès de la Ve République.
Le débat sera posé, mais il ne sera pas tranché. Nos institutions peuvent-elles nous permettre de sortir de la crise institutionnelle ? Ou bien contribuent-elles au contraire au blocage, comme celles de la IVe République participaient de la paralysie de l’action publique lors de la guerre d’Algérie ?
Notre conviction, au groupe Les Indépendants, c’est que la Ve République n’est pas le problème, mais la solution. Deux enjeux sont devant nous. Le premier, le plus évident et le plus urgent, c’est de rétablir nos finances publiques. Le second, qui dépend du premier, c’est de préserver l’unité de la République.
La mission « Sport, jeunesse et vie associative », dont nous examinons aujourd’hui les crédits, est emblématique de ces deux défis.
Certes, les budgets afférents représentent à peine 0,3 % du budget général, soit un poids relativement faible dans les finances publiques. Nos débats risquent donc de paraître quelque peu anecdotiques, eu égard à la gravité de la crise financière qui nous menace.
Mais ces débats revêtent une portée symbolique très forte. Ces dépenses peuvent sembler non essentielles, parce que subventionner des associations sur deniers publics n’est pas une mission première de l’État. Elles sont, à coup sûr, très difficiles à réduire, car derrière chacune de ces dépenses il y a des emplois, des structures qui vivent et dépendent de ces financements et qui souhaitent les voir pérennisés. Et nombre de ces structures, malgré leur dépendance financière, comptent des hommes et des femmes qui œuvrent utilement pour le bien public.
Toutefois, face à la menace de la crise financière, il est nécessaire, il est de notre responsabilité collective de réduire ces dépenses ; je pense tout autant à certaines subventions aux associations qu’aux dépenses de fonctionnement du ministère.
Tel est le sens d’un amendement que notre groupe défendra. Comme pour tous les crédits qui ne relèvent pas des missions régaliennes de l’État, nous demandons une baisse d’au moins 2 %.
Pour conclure, j’ajouterai un mot sur le service national universel, dont nous allons, si je ne me trompe, acter la fin dans ce budget.
Le SNU est né d’une très belle idée. C’était, au fond, la volonté de ressusciter, sous une autre forme, le service militaire ou plutôt de réactiver son pouvoir d’intégration républicaine tout en le dépouillant de son caractère militaire.
C’était sans doute, par construction, mission impossible. Mais il me semble louable d’avoir essayé. Ce dispositif n’a pas fonctionné. Il a même échoué. Il faut constater cet échec et en tirer les conclusions. Rien ne sert de préserver des dispositifs auxquels on ne croit plus. C’est le sens d’un amendement que je défendrai.
Mais l’objectif poursuivi, à savoir renforcer l’adhésion des plus jeunes générations à la République et stimuler la cohésion pour faire nation, ne sera, heureusement, pas enterré avec le dispositif. Seulement, il nous faudra trouver de nouveaux moyens plus efficients et plus intégrateurs d’y parvenir.
Je suis certaine, madame la ministre – je salue à cette occasion votre action –, que le sport est un excellent moyen d’y contribuer. L’immense réussite des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris nous l’a rappelé : le sport est un puissant levier d’intégration républicaine.
Parce qu’il permet à tout un chacun de s’élever, par son travail personnel, par son goût de l’effort, par sa force de caractère, sans aucune considération sociale, ethnique ou religieuse, le sport est le creuset républicain par excellence. C’est aussi un excellent médicament préventif pour notre santé corporelle ou mentale.
Puisse l’esprit des jeux Olympiques, tout à la performance et à l’excellence, nous guider dans nos débats budgétaires afin de rétablir au plus vite nos finances publiques ! Nous voterons les crédits de cette mission. (M. Vincent Louault applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Marie-Do Aeschlimann. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le succès des jeux Olympiques de l’été 2024 a rappelé combien le sport pouvait être un facteur de cohésion nationale et de rayonnement international.
Cependant, cette discussion me permet d’insister à la fois sur l’importance du sport pour tous et sur les points de vigilance qui s’imposent dans cette période de sérieux budgétaire.
Il nous est proposé, dans ce projet de loi de finances pour 2025, une réduction importante des crédits du programme « Sport ».
Au total, hors JOP, cela représente une baisse de 222 millions d’euros si l’on prend en compte l’amendement gouvernemental de dernière minute, soit 30 % du budget global.
Ces baisses, bien qu’elles soient de taille, peuvent sembler compréhensibles dans le contexte budgétaire et après les efforts exceptionnels réalisés pour les jeux Olympiques et Paralympiques. Mais rappelons que les JO de Paris ont suscité un enthousiasme qu’il ne faudra pas décevoir. Et nous devons également préparer les JO d’hiver de 2030.
Certains éléments de ce budget vont dans le bon sens. Je salue le maintien du plan « Génération 2024 », à hauteur de 100 millions d’euros.
Cependant, je voudrais partager avec vous quelques-unes des préoccupations que m’inspire ce budget. Ces choix auront en effet des conséquences très concrètes sur le terrain.
Cette baisse de crédits intervient alors que, comme l’a souligné le rapporteur Lozach, de nombreux équipements sportifs sont vétustes. En effet, près des deux tiers des 270 000 infrastructures existantes ont été mises en service avant 1995 et nécessitent une rénovation.
Parmi les équipements les plus dégradés figurent les piscines, dont beaucoup datent du plan « mille piscines » des années 1970. Ces infrastructures vieillissantes et énergivores nécessitent une modernisation.
Certaines piscines ferment en raison du coût de leur entretien. Cela est problématique, car la natation scolaire fait partie intégrante des programmes d’enseignement. On trouve un autre exemple de ce problème dans la fermeture de nombreuses patinoires, notamment en Île-de-France. Rien que dans mon département des Hauts-de-Seine, deux patinoires ont fermé récemment : à Colombes, en 2022, et à Boulogne-Billancourt l’année dernière.
La construction de ces équipements sportifs est largement assumée par les collectivités locales, surtout les communes, toutes confrontées à une baisse de leurs ressources.
Au-delà de la question des infrastructures, le fonctionnement des clubs risque d’être affecté par la baisse du budget alloué à l’Agence nationale du sport, un pilier de l’écosystème sportif. L’engagement des bénévoles doit pourtant être soutenu.
Surtout, la réduction, de près de 10 millions d’euros, des crédits alloués au Pass’Sport soulève des interrogations. Ce dispositif a permis à de nombreux jeunes, souvent issus de familles modestes, d’accéder au sport en réduisant le coût des licences. Il contribue à l’égalité des chances, à l’inclusion et à l’amélioration de la santé publique.
Alors que la sédentarité devient un enjeu de société, réduire l’enveloppe du Pass’Sport pourrait envoyer un signal contre-productif.
À vrai dire, le sport doit être envisagé, non comme une simple dépense, mais comme un investissement dans notre avenir.
Alors que la commission des affaires sociales du Sénat lance une mission d’information sur les politiques de prévention en santé, je veux souligner que le sport en constitue l’un des piliers. Investir dans le sport aujourd’hui, c’est protéger la santé demain. La recherche scientifique montre les bienfaits du sport contre un très grand nombre de maladies. Alors que 2025 est l’année de la santé mentale, rappelons que le sport est plus efficace que la médication pour lutter contre les détresses psychologiques.
Mes chers collègues, madame la ministre, bien que le contexte budgétaire soit tendu, nous devons nous donner les moyens de rester une grande nation sportive ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)