M. Jean-Baptiste Blanc. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation et portera, monsieur le ministre, sur le zéro artificialisation nette (ZAN) : quatre ans d’incompréhension et parfois de discorde, quatre ans que les maires entendent parler de ce sujet, quatre ans que le Sénat se bat. À mes côtés dans ce combat, je citerai Guislain Cambier, Amel Gacquerre, Jean-Marc Boyer, Hervé Maurey… et il y en a tant d’autres, sur toutes les travées ! Le Sénat se bat pour contrecarrer une logique planificatrice et dirigiste imposée par les gouvernements successifs. Voilà quatre ans que nous essayons de concilier la sobriété foncière avec un vrai accompagnement des élus.
Aujourd’hui, nous ressentons une forme de lassitude. Nous avons en effet eu connaissance la semaine dernière d’une note provenant de Matignon et laissant à penser que l’État reviendrait une fois de plus sur sa parole…
M. Jean-François Husson. Impossible ! (Sourires.)
M. Jean-Baptiste Blanc. Il veut maintenir des industries dans les territoires, mais il refuse de prendre à son compte la consommation foncière qui en résulte. L’État se dit aux côtés des maires, mais ne fait rien pour que les préfets tiennent compte de la loi votée au Parlement. Les exemples sont nombreux… L’État prétend territorialiser, mais il entend maintenir une date couperet en 2034 pour l’application du ZAN à toutes les communes. L’État veut davantage de logements sociaux, mais il continue à priver les communes de leur pouvoir foncier.
Ma question est simple, monsieur le ministre : pouvons-nous enfin vous faire confiance, à la veille d’une discussion sur la proposition de loi visant à instaurer une trajectoire de réduction de l’artificialisation concertée avec les élus locaux (Trace) ? On trace, ou on ne trace pas ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC. – Mme Mireille Jouve applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.
M. François Rebsamen, ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation. Monsieur le sénateur Jean-Baptiste Blanc, je vous remercie de votre question. Nous avons déjà eu l’occasion d’échanger et nous allons continuer à tracer notre chemin ensemble, si vous en êtes d’accord.
Dès la semaine prochaine d’ailleurs, nous aurons l’occasion d’échanger lors de l’examen de cette proposition de loi, déposée par vous-même et le sénateur Cambier. Dès le début – c’est une habitude dans notre pays –, le choix a été fait d’une procédure descendante, sans s’interroger sur ce qui se passait au niveau des territoires. Pour ma part, je considère qu’il faut partir des territoires pour arriver à une proposition ascendante, dans le bon sens. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)
C’est ce que nous faisons en essayant d’assouplir ce dispositif, comme vous le savez, afin de tenir compte des remarques des uns et des autres. Pour autant, l’objectif de sobriété foncière est au cœur de tous les élus de chaque territoire.
Cela fait d’ailleurs longtemps que nos élus de terrain, en particulier les maires, ont ce souci écologique : préserver leur territoire d’une trop grande artificialisation.
Je regarde les amendements qui ont été déposés. J’ai moi-même proposé d’alléger le dispositif et de décaler l’échéance, en prenant l’année 2024, et non plus 2021, comme point de départ de la période de référence.
Entre 2021 et 2024, il y a eu beaucoup de confusion. Certaines régions ont mis en place des schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet), tandis que d’autres – vous le savez – ne l’ont pas fait. La situation est donc assez complexe.
Je propose de maintenir une mesure de vérification à l’issue d’une période de dix ans – je sais que vous n’y êtes pas favorables (Non ! sur les travées du groupe Les Républicains.) –, mais celle-ci n’interviendrait qu’en 2034, la période de référence débutant en 2024.
Je sais que vous et tous les maires de France partagez le même objectif : lutter pour la sobriété foncière ! (M. François Patriat applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Blanc, pour la réplique.
M. Jean-Baptiste Blanc. Dont acte, monsieur le ministre : nous avons la même vision sur le sujet.
Mais j’espère que c’est bien vous, et pas votre administration, qui l’emporterez ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.) Car ce qui ressort des travaux et des échanges sur le sujet nous inquiète un peu.
Certes, nous avons un objectif à atteindre. À cet égard, je remercie Matignon d’avoir demandé à Bercy de nous aider à chiffrer nos propositions financières et fiscales en la matière.
Car, au Sénat, nous travaillons déjà sur les outils et sur l’accompagnement financier et fiscal. D’où l’importance de voter la proposition de loi Trace ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC. – M. Vincent Louault applaudit également.)
baisse du tarif d’achat de l’électricité photovoltaïque
M. le président. La parole est à M. Claude Kern, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Claude Kern. Madame la ministre, le Gouvernement a évoqué le 20 janvier dernier au Sénat, lors de l’examen du compte d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale » (Facé), son intention de rationaliser le soutien aux énergies renouvelables, notamment vers les installations les plus efficaces concernant le photovoltaïque.
Depuis, un projet de révision de l’arrêté tarifaire nous alerte. Il pénaliserait de nombreuses initiatives locales citoyennes œuvrant de longue date, en cohérence avec leur localisation, en faveur de la promotion des énergies renouvelables, en particulier le solaire.
Même si je comprends la nécessité de réduire la dépense publique, ce changement abrupt de cap heurte de plein fouet des initiatives vertueuses, la lisibilité des règles, ainsi que la stabilité des modèles économiques. Pourtant, s’appuyer sur les projets citoyens est un levier formidable pour éviter les oppositions locales ! (M. Jacques Fernique applaudit.)
Nos voisins européens, plus pragmatiques, l’ont bien compris. En Allemagne, plus de 40 % des énergies renouvelables sont détenues par les citoyens et agriculteurs. Aux Pays-Bas, il y a 500 coopératives énergétiques locales. Avec notre dérisoire 1 %, nous faisons figure de mauvais élève de l’Europe pour le photovoltaïque.
La suppression du soutien au segment 100 kilowatts-crête à 500 kilowatts-crête, qui constitue aujourd’hui un moteur de croissance du solaire en France, indispensable à la réussite de la décarbonation de l’énergie dans les territoires, risque d’aggraver notre retard, mais également d’exposer le pays à des sanctions financières à l’échelon européen.
Madame la ministre, une telle décision n’entre-t-elle pas directement en contradiction avec nos objectifs nationaux de décarbonation ? En conséquence, allez-vous revenir dessus ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur Claude Kern, j’ai trois éléments de réponse à vous apporter.
Premièrement, je rappelle que l’État soutient depuis de nombreuses années le photovoltaïque sur les toitures. Le succès du dispositif de soutien proposé depuis le mois d’octobre 2021 dans le cadre de l’arrêté tarifaire dont vous avez fait mention en atteste. Au mois de janvier dernier, nous avons atteint près d’un gigawatt de demandes de contrat sur le segment que vous avez évoqué, en l’occurrence 100 kilowatts-crête à 500 kilowatts-crête. C’est déjà la moitié de l’objectif annuel. Il y a eu un véritable emballement.
M. Yannick Jadot. Cela s’appelle un succès !
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. Cela nous conduit à ajuster le soutien de l’État.
La production d’électricité doit être ajustée à la consommation. Il ne sert à rien de produire ce qui ne peut pas être consommé. Les prix négatifs en sont une illustration.
Deuxièmement, la filière ne partage pas votre sentiment quant à la brutalité supposée de la décision qui a été prise. Il y a au contraire eu beaucoup de concertation. D’ailleurs, comme nous l’ont confirmé les acteurs concernés, le tarif qui sera proposé au prochain trimestre, en l’occurrence 95 euros le mégawattheure, est compatible avec le développement du photovoltaïque.
Troisièmement, la filière a elle-même proposé des solutions de rechange à la baisse des tarifs de rachat pour atteindre nos objectifs. Pour les installations du segment que vous évoquez, un appel d’offres simplifié permettrait de contrôler le volume soutenu avec un tarif viable économiquement pour les projets.
Les discussions sont en cours. Elles se poursuivront demain au sein du Conseil supérieur de l’énergie. Nous continuerons de dialoguer avec les acteurs de la filière, afin que le développement du photovoltaïque, auquel nous sommes très attachés, soit compatible avec les besoins énergétiques du pays. Je suis certaine que vous partagez cet objectif.
M. le président. La parole est à M. Claude Kern, pour la réplique.
M. Claude Kern. Madame la ministre, n’oubliez pas que de nombreux comités de citoyens se sont créés. Or, au train où vont les choses, beaucoup de projets en cours risquent malheureusement d’être abandonnés. Puissent les discussions auxquelles vous faites référence aller dans le bon sens ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et GEST.)
situation à la réunion (ii)
M. le président. La parole est à Mme Viviane Malet, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Viviane Malet. Ma question s’adresse à M. le ministre d’État, ministre des outre-mer.
Cinq personnes ont perdu la vie après le passage du cyclone Garance. J’adresse ici tout mon soutien et celui de mon groupe à leurs familles. Des centaines de familles réunionnaises sont sinistrées ; je souhaite leur exprimer ma solidarité. Je tiens également à saluer l’action de nos élus, de nos pompiers, de nos soignants et des agents des services publics ou privés ainsi que de l’État, qui sont venus en aide à l’ensemble de la population dans ces circonstances tragiques.
Après la dévastation de l’archipel mahorais, c’est La Réunion qui a été à son tour durement éprouvée ce 28 février, avec des vents dévastateurs de plus de 200 kilomètres-heure et des pluies diluviennes. Avec la chute de 21 pylônes de très haute tension, cette catastrophe majeure a privé des familles de toit et a endommagé de nombreuses habitations. À l’heure actuelle, 40 000 foyers sont sans électricité, et 30 000 sont privés d’eau. Des pans entiers de l’économie locale sont touchés ; des commerces, des entreprises et des bâtiments publics sont fortement endommagés.
Nos agriculteurs voient leur production totalement détruite, alors qu’ils se relevaient à peine du cyclone Belal de 2024, pour lequel les aides tardent à être versées.
Le centre hospitalier universitaire (CHU) a été inondé, ce qui complique considérablement la prise en charge des patients, alors même que les risques sanitaires post-cycloniques sont connus et peuvent entraîner des épidémies.
Monsieur le ministre, à compter de demain, vous vous rendez sur l’île. Face à une situation aussi dramatique, allez-vous annoncer, outre la mobilisation du fonds Barnier, la déclaration de l’état de catastrophe naturelle et de calamité agricole, des mesures exceptionnelles pour venir en aide aux familles réunionnaises sinistrées, pour alléger les charges de nos entreprises et pour accompagner nos collectivités, dont les budgets sont déjà contraints ? Allez-vous préconiser des dispositifs concrets de prévention des risques face aux phénomènes climatiques, afin d’anticiper de telles crises ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre des outre-mer.
M. Manuel Valls, ministre d’État, ministre des outre-mer. Madame la sénatrice Malet, vous avez eu raison de rappeler la mobilisation de tous.
Depuis la levée de l’alerte rouge samedi matin, les services de l’État et les collectivités sont pleinement mobilisés pour venir en aide à la population, réparer les premiers dégâts et rétablir la situation.
Les effectifs engagés sont particulièrement importants. Ainsi, 900 personnels des forces de sécurité et 245 personnels de secours, dont 188 sont venus en renfort, ont été mobilisés. En outre, à la demande du ministre de l’intérieur, 100 personnels de la sécurité civile ont rejoint l’île hier.
Je suis très attentif à la restauration – j’en ai parlé tout à l’heure – de l’accès à l’électricité, à l’eau potable et aux réseaux de télécommunications sur l’ensemble de l’île.
Je me rends dès ce soir à La Réunion, afin d’être aux côtés de la population éprouvée, des élus locaux et de l’ensemble des équipes de secours. Nous ferons un état des lieux précis des actions prioritaires pour soutenir les habitants sinistrés de l’île et permettre la reconstruction.
La procédure de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, à laquelle vous avez fait référence, est enclenchée. Elle devrait aboutir en urgence cette semaine.
La situation des agriculteurs qui voient leur travail et leur production anéantis par le cyclone Garance doit être examinée avec attention et rapidité. Les travaux de la direction de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (Daaf) et du préfet en vue de la reconnaissance de calamité agricole ont déjà commencé.
D’une manière générale, tous les dossiers devront être traités dans les délais les plus brefs. Surtout, les indemnisations devront être versées rapidement. J’y veillerai.
J’aurai sur place l’occasion de compléter ces annonces au regard de ce que je pourrais constater avec l’ensemble des professionnels. J’espère que nous pourrons répondre le plus vite possible aux attentes – elles sont fortes – de nos compatriotes réunionnais.
fusillade en avignon
M. le président. La parole est à M. Lucien Stanzione, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Lucien Stanzione. Avignon mitraillée ! Avignon meurtrie ! Avignon terrorisée !
Ce dimanche, à dix-sept heures, dans la Cité des papes, une nouvelle fusillade a éclaté. Deux semaines plus tôt, dans le quartier Saint-Chamand, il y avait eu un homme abattu et cinq blessés graves. C’est une mécanique implacable qui broie des vies !
Comment ne pas penser au capitaine de police Éric Masson, assassiné en pleine ville sur un point de deal ?
Trois ans après, la situation a empiré. La violence et les deuils se multiplient. Les habitants vivent sous tension. La peur paralyse. Aujourd’hui, les transports en commun sont bloqués dans tous ces quartiers. La délinquance est là, s’affirme et s’étale.
Je pourrais évoquer Grenoble, Dijon, etc. On brûle des bibliothèques en représailles contre l’action des pouvoirs publics. À Avignon, ce sont des tirs pour intimider, des règlements de comptes pour contrôler. En 2024, il y a eu six « narchomicides », soit deux fois plus qu’en 2023. Les guerres de territoires s’intensifient.
Monsieur le ministre, vous avez intégré Avignon au dispositif Villes de sécurité renforcée, comme Grenoble, Rennes et d’autres. Je veux ici saluer cette décision.
Il faut tirer les leçons des échecs passés. Votre prédécesseur, Gérald Darmanin, enchaînait des opérations spectaculaires pour faire « place nette ». Mais une place nette sans projet, c’est une place vide, qui devient perdue pour notre République !
Saint-Chamand, Monclar, La Rocade… Dix ans de violence ! Combien de services publics, de centres sociaux et d’associations laissés à l’abandon ? Quand on abandonne un quartier, il se remplit d’autres lois que celles de notre République.
Il faut un État qui protège, une police formée et dotée de moyens réels, une justice efficace et juste.
Je veux ici saluer le travail du préfet Thierry Suquet et celui des forces de l’ordre et des acteurs de terrain emmenés par la maire Cécile Helle, qui, avec des moyens contraints, tentent de ralentir une telle spirale.
Quels moyens durables et pérennes comptez-vous mettre en place pour Avignon ? Les criminels, eux, n’attendent pas !
Monsieur le ministre d’État, nous espérons votre venue sur place dans les prochains jours. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.
M. Bruno Retailleau, ministre d’État, ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur, je voudrais d’abord vous remercier d’avoir rendu hommage au capitaine Éric Masson, dont la compagne était enceinte lorsqu’il a été tué.
Vous m’interrogez sur les moyens de rétablir l’ordre. À Avignon, comme dans d’autres grandes villes, nous menons précisément une lutte acharnée contre les trafiquants de drogue. Vous sollicitez une réponse durable de la part de l’État. C’est ce que je voudrais vous apporter.
La réponse durable, ce sera le vote – je salue MM. Jérôme Durain et Étienne Blanc, présents dans cet hémicycle – de la proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic dans quelques jours, je l’espère, à l’Assemblée nationale.
Sans attendre, nous avons décidé une nouvelle stratégie, que nous expérimentons à Grenoble, ainsi, bien entendu, qu’à Avignon. Elle comporte trois réponses : une réponse judiciaire, une réponse sécuritaire et une réponse administrative. Il s’agit donc d’une stratégie globale.
Réponse judiciaire d’abord. Les coups de filet pour attraper les têtes de réseau sont préparés par l’autorité judiciaire, notamment avec du renseignement.
Réponse sécuritaire ensuite. La CRS 84, qui est une CRS de nouvelle génération, a été dépêchée sur place. Nous occupons l’espace public et les transports. Nous effectuons des fouilles de caves et d’immeubles. Nous exerçons des contrôles de police et de gendarmerie sur la voie publique.
Réponse administrative enfin. Nous tapons les narcotrafiquants au portefeuille, afin de détruire l’écosystème ; je pense notamment au système des blanchisseuses. Nous menons aussi des enquêtes patrimoniales ; c’est fondamental !
Mme Nathalie Goulet. Bien !
M. Bruno Retailleau, ministre d’État. Nous en voyons les premiers résultats : 200 interpellations pour stupéfiants ; 30 kilos de cannabis, 5 kilos de cocaïne et 5 kilos de kétamine saisis ; 230 amendes forfaitaires délictuelles (AFD) infligées. Et nous avons arrêté des trafiquants. Je ne peux pas en dire plus, car l’enquête, sous la direction de l’autorité judiciaire, est en cours.
Croyez-moi, nous allons combattre ces narcoracailles pied à pied ! J’espère pouvoir vous dire un jour : « Avignon libérée ! » (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – M. Jean-Baptiste Lemoyne applaudit également.)
inadéquation de l’étiquetage nutritionnel aux produits traditionnels tels que le fromage au lait cru
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Anglars, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Claude Anglars. Ma question s’adresse à Mme la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
En 2017, la France a expérimenté le Nutri-score et le système de notation censé indiquer la qualité nutritionnelle des aliments. Or ce système est contesté. Défavorable aux produits traditionnels, tels que les fromages au lait cru et la charcuterie, il soulève de nombreuses craintes chez les producteurs et les filières de qualité, qui en dénoncent les critères.
En 2020, la Commission européenne envisageait de rendre le Nutri-score obligatoire à l’échelle de l’Union européenne. Cependant, le 28 février 2025, un vote de la Commission européenne a validé le retrait du Nutri-score obligatoire ; à cette occasion, la France s’est abstenue.
Cet abandon répond à des préoccupations légitimes. Je les avais déjà soulevées avec d’autres ici auprès de vos prédécesseurs en insistant sur la nécessité d’éviter une obligation qui aurait fragilisé les filières de qualité.
Nous sommes au lendemain du Salon de l’agriculture et du concours général agricole, et nous célébrons cette année le centenaire de l’appellation d’origine protégée du roquefort. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.) C’est la plus ancienne appellation de France. Je le rappelle, la filière du roquefort a été la première à dénoncer les incohérences du Nutri-score et les menaces qu’il faisait peser sur la pérennité des productions de qualité.
Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer quel est l’avenir de l’étiquetage nutritionnel en France ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées des groupes UC et INDEP.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
Mme Annie Genevard, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Anglars, lorsque le Nutri-score a été mis en place, on pensait que toute l’Europe allait s’en emparer. En réalité, ce système a eu un faible succès ; aujourd’hui, sept pays de l’Union européenne seulement l’ont adopté.
Avec la filière roquefort, vous avez été le premier – je vous en félicite – à soulever les problèmes que posait un tel étiquetage.
Certes, l’intention était louable. Il est bon de communiquer la qualité nutritionnelle des produits aux consommateurs.
Mais le problème pour le roquefort chez vous, comme pour le comté chez moi, ou pour toutes les magnifiques salaisons françaises, c’est que le classement de ces produits remarquables était très mauvais. Ils étaient jugés tantôt trop gras, tantôt trop sucrés.
Mme Raymonde Poncet Monge. C’est la réalité !
Mme Annie Genevard, ministre. Nous voyons donc que le Nutri-score pose un certain nombre de difficultés à des filières d’une très grande qualité. À tel point que, consciente des difficultés créées par un tel étiquetage, la France a – vous l’avez rappelé – voté non à la proposition de la Commission européenne de le rendre obligatoire.
En 2023, l’algorithme a été revu. Nous aurions pu espérer que les désagréments et les effets de bord négatifs seraient corrigés. Cela n’a pas du tout été le cas ! Au contraire, il y a même eu une aggravation. Ainsi, le lait a été classé non plus comme aliment, mais comme boisson ! De mon point de vue, c’est proprement scandaleux. Cela le prive automatiquement de la note A, qu’il obtenait généralement.
Il y a donc un vrai sujet. D’un côté, les politiques encouragent à la consommation de produits laitiers : deux par jour pour les adultes, et trois à quatre par jour pour les enfants. De l’autre, on désincite les consommateurs, puisque le lait est mal classé au Nutri-score. C’est tout de même problématique.
Nous sommes, je le rappelle, dans la semaine de la lutte contre l’obésité…
M. le président. Il faut conclure !
Mme Annie Genevard, ministre. La décision a été prise voilà plus d’un an. L’arrêté est à ma signature. Je ne l’ai pas encore signé. Je ne sais pas quelles sont mes marges de manœuvre pour corriger les effets négatifs, mais croyez bien que je m’y intéresse de très près.
Cela étant, les consommateurs apprécient le Nutri-score. Il faut aussi en tenir compte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Piednoir, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Stéphane Piednoir. Madame la ministre, depuis plusieurs années, les orientations du pays en termes de politique énergétique sont pour le moins sinueuses, pour ne pas dire branchées sur courant alternatif.
La dernière déclaration du Président de la République, avec la fameuse formule Plug, baby plug !, laissait entrevoir une trajectoire un petit peu plus rectiligne vers une électrification de nos usages. Ce n’est visiblement pas le cas.
De même, alors qu’une programmation pluriannuelle de l’énergie est réclamée depuis deux ans, il faut bien faire le constat aujourd’hui d’une éclipse totale.
Notre électricité est, comme chacun sait, à 95 % décarbonée, en grande partie grâce à notre nucléaire. Nous pouvons profiter de productions locales photovoltaïques avec des installations intégrées à des bâtiments, c’est-à-dire sans dénaturer les sols naturels.
C’est précisément le cas du secteur dit S21. Des installations photovoltaïques de moins de 500 kilowatts sur des bâtiments sont déjà financées par des collectivités locales, des particuliers, voire des exploitants agricoles.
Or les professionnels de la filière que nous avons rencontrés nous disent que nous ne sommes pas à l’abri d’un nouveau court-circuit général. En effet, le décret que le Gouvernement s’apprêterait à prendre signerait l’arrêt brutal de subventions d’aide aux petites installations, qui sont bien dimensionnées.
Madame la ministre, pouvez-vous nous confirmer une telle intention ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur Stéphane Piednoir, comme j’ai eu l’occasion de le souligner en réponse à une question précédente, l’État soutient le développement du photovoltaïque, notamment sur les toitures, depuis plusieurs années.
Pour autant, toute politique, quelle qu’elle soit, doit être budgétairement soutenable.
Je le rappelle, aujourd’hui, le coût des installations du photovoltaïque sur toiture est deux fois plus élevé que celui du photovoltaïque au sol ou des installations d’une importance autre. C’est pourquoi le Gouvernement souhaite effectivement recentrer le soutien vers des installations plus performantes.
L’arrêté tarifaire qui existe depuis 2021 a été à l’origine d’une demande particulièrement forte. Comme je le disais, au mois de janvier dernier, près d’un gigawatt de demandes, soit la moitié de l’objectif annuel, ont été déposées.
Un ajustement est en cours, avec deux orientations : premièrement, favoriser pour les plus petites installations tout ce qui concerne l’autoconsommation ; deuxièmement, prévoir pour tout ce qui est injection sur le réseau un soutien orienté vers des installations plus performantes et économiquement viables de plus grande puissance.
Encore une fois, l’électricité ne se stocke pas et il n’est pas du tout vertueux de produire de l’électricité que l’on ne peut pas consommer. Dans ce cadre, un arrêté spécifique sur le photovoltaïque au sol plus compétitif sera publié avant la fin du premier trimestre de 2025, afin d’encourager ce type d’installations et de diversifier les sources de production d’énergies renouvelables.
L’État soutient l’énergie photovoltaïque et ajuste les aides publiques dont vous avez fait mention pour orienter les financements vers des solutions plus efficaces et plus adaptées aux enjeux de la transition énergétique. Il vise en parallèle à favoriser l’autoconsommation pour les particuliers.
Au demeurant, les contrats en cours qui sont déjà signés ne sont pas du tout concernés par de telles modifications.