Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. On a recours au vote bloqué quand des amendements sont déposés en nombre au seul motif – disons-le clairement – de faire obstruction. Dès lors, permettre à chaque sénateur de s’exprimer sur chaque amendement, c’est permettre l’obstruction.

La logique du vote bloqué est précisément d’y parer : avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 14.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 16
Dossier législatif : proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification
Après l’article 17

Article 17

Le Règlement est ainsi modifié :

1° Après la première phrase de l’alinéa 12 de l’article 42, est insérée une phrase ainsi rédigée : « La question préalable, les motions préjudicielles ou incidentes et les motions tendant au renvoi en commission ne sont pas recevables. » ;

2° L’article 50 bis est complété par un alinéa 6 ainsi rédigé :

« 6. – Aucune motion n’est recevable sur les propositions de résolution déposées en application de l’article 34-1 de la Constitution. »

Mme la présidente. L’amendement n° 61, présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. J’ai souligné en discussion générale le travail accompli par Sylvie Vermeillet, vice-présidente du Sénat et auteure de la proposition de résolution, et par Muriel Jourda, rapporteure et présidente de la commission des lois, pour tenir compte des remarques des différents groupes dans la phase d’élaboration de ce texte.

Cependant, certaines dispositions continuent de nous étonner : ainsi est-il prévu de supprimer la faculté de déposer des motions de procédure sur une proposition de résolution et, pour ce qui est des conclusions d’une CMP, de limiter cette faculté aux seules exceptions d’irrecevabilité constitutionnelle.

Combien de fois de telles procédures ont-elles été utilisées ? Comme elles ne le sont pas régulièrement, pourquoi vouloir les supprimer ? Je rappelle que notre objectif est de renforcer les droits des groupes et de simplifier le règlement, non d’en réduire le nombre de pages !

Je le dis d’autant plus que se développe fortement, ces derniers temps, une nouvelle pratique parlementaire, qui consiste à ajouter en CMP des dispositions qui n’ont pas été débattues par les assemblées. Ce fut le cas, très récemment, sur la proposition de loi visant à restreindre les conditions d’application du droit du sol à Mayotte.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Permettez-moi, mes chers collègues, un petit rappel sur les motions qui peuvent être déposées : la question préalable, dont l’objet est de rejeter l’ensemble du texte ; les motions préjudicielles ou incidentes, dont l’objet est de subordonner un débat à une ou plusieurs conditions en rapport avec le texte en discussion ; les motions tendant au renvoi à la commission ; l’exception d’irrecevabilité, dont l’objet est de faire reconnaître que le texte en discussion est contraire à une disposition constitutionnelle.

De quoi parlons-nous ? De la possibilité d’opposer de telles motions soit aux conclusions d’une commission mixte paritaire soit à une proposition de résolution déposée sur le fondement de l’article 34-1 de la Constitution.

Or, chacun le sait ici, quand nous sommes saisis des conclusions d’une CMP, nous ne pouvons qu’accepter ou rejeter le texte – il n’y a pas d’autre possibilité – par un vote unique. Sur les propositions de résolution déposées en application de l’article 34-1 de la Constitution, de la même façon, le Sénat a vocation à se prononcer par un vote unique.

La seule motion qui ait du sens sur de tels textes, c’est donc l’exception d’irrecevabilité, dont l’objet, je l’ai dit, est de faire reconnaître que le texte en discussion est inconstitutionnel. En l’espèce, les autres motions, que j’ai énumérées, n’ont aucun sens. Cette règle est au demeurant, dans la pratique, de tradition constante : la seule motion qui peut être discutée est bien l’exception d’irrecevabilité.

Il est donc proposé de mettre notre règlement en conformité avec ce qui a du sens du point de vue de la procédure : restons-en là.

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 61.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 69, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, M. Gontard et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Dans le même esprit, nous proposons que les questions préalables, les motions préjudicielles ou incidentes et les motions tendant au renvoi à la commission continuent d’être recevables dans le cadre de la lecture des conclusions d’une commission mixte paritaire.

Certains textes, faut-il le rappeler, ont une trajectoire parlementaire assez complexe.

Prenons le projet de loi de simplification de la vie économique, dont l’examen en séance publique commence demain à l’Assemblée nationale – un festival d’amendements fourre-tout attend nos collègues députés. Il a commencé d’être étudié au Sénat il y a bientôt un an. En un an, nous avons vécu une dissolution, une nouvelle Assemblée nationale a été élue et deux gouvernements sont tombés. Il est donc à craindre que le texte qui sortira de la chambre basse ne soit plus du tout conforme à l’esprit dans lequel nous l’avons examiné au printemps dernier. Autrement dit, si une commission mixte paritaire parvient à se mettre d’accord sur ce projet de loi, le texte qui nous reviendra sera d’une tout autre nature que celui dont nous avons débattu.

Aussi avons-nous besoin de pouvoir déposer des motions pour faire droit à ce genre de circonstances et, le cas échéant, faire tomber le texte dont nous sommes saisis.

Mme la présidente. L’amendement n° 15, présenté par M. Kerrouche, Mmes de La Gontrie, Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer les mots :

La question préalable, les motions préjudicielles ou incidentes et les

par le mot :

Les

La parole est à M. Éric Kerrouche.

M. Éric Kerrouche. Voici un léger complément aux deux amendements qui viennent d’être présentés : pour ce qui est des lectures de conclusions de CMP, nous admettons qu’une motion de renvoi à la commission n’a pas de pertinence ; en revanche, il faut conserver la possibilité de déposer une question préalable ou des motions préjudicielles ou incidentes.

La modification inscrite à l’article 17 restreindrait inutilement les droits des parlementaires, tout cela pour gagner dix minutes : c’est évitable.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. À même esprit, comme le disait M. Dossus, même réponse : avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 69.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 15.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 17.

(Larticle 17 est adopté.)

Article 17
Dossier législatif : proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification
Article 17 bis (nouveau)

Après l’article 17

Mme la présidente. L’amendement n° 39, présenté par Mme M. Carrère, M. Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme Conte Jaubert, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et MM. Roux et Ruel, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l’alinéa 3 de l’article 23 bis du règlement, après les mots : « aux outre-mer », sont insérés les mots : « ainsi qu’à une mission temporaire dont il a été chargé par le Gouvernement ».

La parole est à Mme Maryse Carrère.

Mme Maryse Carrère. Le règlement du Sénat prévoit des dérogations aux modalités d’application de la retenue sur indemnité de fonction pour les sénateurs qui, chargés d’une mission officielle, ne peuvent être présents en séance.

Cependant, ces dérogations ne couvrent pas les sénateurs chargés par le Gouvernement d’une mission temporaire. Or ces missions, qui leur sont confiées par décret, s’inscrivent pleinement dans le travail parlementaire et contribuent à l’élaboration des politiques publiques. Elles exigent du temps, de l’engagement et des déplacements sur le terrain qui rendent souvent impossible la présence dans l’hémicycle et en commission.

Il est donc légitime d’étendre le champ de ces dérogations aux sénateurs chargés de telles missions. Cet amendement s’inscrit dans une démarche d’équité et de reconnaissance du travail parlementaire sous toutes ses formes.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Les parlementaires peuvent être en mission pour le Sénat, c’est normal.

En revanche, lorsqu’ils sont en mission pour le Gouvernement, ce n’est pas illégal, mais cela ne peut pas durer : je rappelle qu’au bout de six mois, si l’on reste au service du Gouvernement, on perd son mandat de sénateur.

Nous sommes le pouvoir législatif et non le pouvoir exécutif : il ne faut pas mélanger les deux !

La commission est défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 39.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 62, présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’alinéa 10 de l’article 29 ter du règlement est complétée par une phrase ainsi rédigée : « La demande d’organisation par deux présidents de groupe d’une discussion générale d’une durée minimale de quarante-cinq minutes sur le texte élaboré par une commission mixte paritaire est de droit. »

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Nous proposons, dans le même esprit que précédemment, que l’organisation, à la demande de deux présidents de groupe, d’une discussion générale d’une durée minimale de quarante-cinq minutes sur le texte élaboré par une commission mixte paritaire soit de droit.

Je ne reviens pas sur les arguments que j’ai déjà exposés.

Les procédures d’urgence se multiplient, et avec elles les CMP. De surcroît, il arrive fréquemment, désormais, qu’un texte soit réécrit en CMP et qu’il finisse ainsi par contenir des dispositions qui n’auront pas été débattues par les assemblées.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Ma chère collègue, vous proposez qu’il devienne possible de porter à quarante-cinq minutes la durée minimale de discussion sur les conclusions d’une CMP.

La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Le problème que je soulève n’est pas dérisoire : il ne s’agit pas d’un quart d’heure de discussion en plus ou en moins.

Tout le monde a en tête la façon dont sont répartis les temps de parole. À trop réduire le temps consacré à débattre, on encourage les caricatures : contraindre les oppositions à ne s’exprimer que très brièvement, c’est les conduire à caricaturer les positions auxquelles elles s’opposent.

Si telle est la direction que vous souhaitez prendre, soit, mes chers collègues : pas de problème ! Il y a bien d’autres manières pour l’opposition de s’exprimer. Mais, je l’ai déjà dit, il fut un temps, qui n’est pas si ancien, où d’autres dispositions régissaient le temps de parole des sénateurs. Au bout du compte, nous ne siégions pas plus, il y avait moins d’amendements et nos débats étaient un peu plus constructifs.

On peut continuer dans cette voie, mais, à ce rythme, le Sénat ne pourra bientôt plus se gargariser d’être différent de l’autre chambre !

M. Antoine Lefèvre. Il y a de la marge…

Mme Cécile Cukierman. Et nous en serons réduits, les uns et les autres, à caricaturer les propos de nos collègues.

Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Je souhaite tout de même rappeler que, lors de la lecture des conclusions de CMP, tous les groupes ont le même temps de parole. Il ne s’agit pas de brider un groupe d’opposition en lui accordant une durée moindre pour s’exprimer.

Enfin, je me demande si le fait que les amendements étaient moins nombreux lorsque nous disposions de cinq minutes pour les présenter ne doit pas davantage au cumul des mandats, qui était alors encore possible. Mais ce n’est qu’une hypothèse…

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 62.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 12 rectifié, présenté par Mme de La Gontrie, M. Kerrouche, Mmes Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le règlement est ainsi modifié :

1° À l’alinéa 3 de l’article 38, la deuxième phrase est ainsi rédigée : « En cas de doute, l’épreuve est renouvelée. » ;

2° À l’article 53, les mots : « par assis et levé, » sont supprimés ;

3° À la première phrase de l’alinéa 3 de l’article 54, les mots : « par assis et levé » sont supprimés ;

4° L’alinéa 3 de l’article 56 bis est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les sénateurs dans l’incapacité de se rendre à la tribune prennent part au scrutin public depuis leur siège en remettant leur bulletin à un huissier. » ;

5° À l’alinéa 1 de l’article 96, les mots : « par assis et levé » sont remplacés par les mots : « à main levée ».

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Cet amendement vise à rayer du règlement du Sénat toute mesure discriminatoire et stigmatisante en supprimant la possibilité de vote « par assis et levé » lors des scrutins organisés dans l’hémicycle.

Comme vous le savez, mes chers collègues, une loi a été votée en 2005 pour permettre la plus grande accessibilité, en France, des personnes handicapées à l’ensemble des fonctions, notamment électives.

L’Assemblée nationale s’est saisie de ce sujet, sur l’initiative de Sébastien Peytavie et de Yaël Braun-Pivet, et a voté à l’unanimité la suppression du vote par « assis et levé » il y a quelques semaines.

Nous vous proposons aujourd’hui de faire de même. Il ne s’agit pas d’utiliser des périphrases pour désigner les élus en situation de handicap ; il s’agit simplement d’exclure du règlement du Sénat toute source de stigmatisation de ces personnes.

Mme la présidente. L’amendement n° 72 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, M. Gontard et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le règlement est ainsi modifié :

1° À l’alinéa 3 de l’article 38, les mots : « assis et levé » sont remplacés par les mots : « scrutin électronique des présents » ;

2° L’article 53 est ainsi modifié :

a) Les mots : « par assis et levé » sont remplacés par les mots : « au scrutin électronique des présents » ;

b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Le Bureau détermine les modalités de publication des résultats des scrutins électroniques des présents. » ;

3° À l’alinéa 3 de l’article 54, les mots : « par assis et levé » sont remplacés par les mots : « au scrutin électronique des présents » ;

4° À l’alinéa 1 de l’article 96, les mots : « par assis et levé » sont remplacés par les mots : « au scrutin électronique des présents ».

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Comme l’a été très bien dit ma collègue Marie-Pierre de La Gontrie, il s’agit véritablement d’œuvrer à l’égalité d’accès et à la dignité des élus handicapés.

Notre amendement est quasiment identique à celui qu’elle vient de présenter, à une petite distinction près : puisque le vote par assis et levé n’est pas un scrutin public, nous proposons de le remplacer par un vote électronique anonymisé.

Il importe de bien comprendre que c’est un amendement de modernité et de mise à jour de nos procédures aux fins d’améliorer l’accessibilité. Je pense que l’on peut, à cet effet, s’autoriser à entrer dans un nouveau monde en permettant le vote électronique par boîtier.

À mes yeux, ce dernier ne rigidifierait rien ; au contraire, il ferait avancer un peu nos procédures.

Mme la présidente. L’amendement n° 90, présenté par Mme M. Jourda, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 53 du règlement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 2. – À l’invitation du Président, le sénateur qui se trouve dans l’incapacité physique, permanente ou temporaire, d’exprimer son vote selon la modalité applicable fait connaître son vote par toute manifestation compatible avec cette incapacité. »

La parole est à Mme le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les amendements nos 12 rectifié et 72 rectifié.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Mes chers collègues, je vous invite, sur le sujet, à préférer le dispositif de mon amendement à ceux des deux amendements qui viennent d’être présentés.

Je crois qu’il y a une confusion entre les buts et les moyens. Le but est de permettre à tout sénateur de voter, quels que soient son état physique, si je puis dire, et son éventuel handicap.

On peut, malheureusement, être durablement handicapé, mais il arrive aussi qu’on le soit temporairement. On ne peut pas supprimer chaque modalité de vote, parce que tel ou tel de nos collègues est susceptible d’avoir telle ou telle incapacité, y compris temporairement.

Je m’explique : si l’on supprime le vote par assis et levé en pensant à celui qui ne peut pas se lever, va-t-on supprimer le vote à main levée, parce que l’un de nos collègues peut avoir les bras immobilisés ? Cela peut toujours arriver, ce n’est pas une hypothèse d’école.

Je dois dire que je ne parviens pas à comprendre cette façon de procéder.

Il me semble que le but est de permettre le vote, pour lequel les moyens sont divers : il y a le vote par assis et levé, le vote à main levée, le scrutin à la tribune, le scrutin public, le scrutin en salle des conférences… Nous ne pouvons pas nous arrêter à l’incapacité de tel ou tel de nos collègues pour déterminer les moyens susceptibles d’être utilisés.

J’entends dire que le vote par assis et levé serait discriminant, parce que certains ne pourraient pas se lever.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Je n’ai pas vocation à parler au nom des personnes en fauteuil roulant, mais il s’avère que, comme beaucoup d’entre vous, je travaille depuis des années, dans mon département – le Morbihan –, avec un élu en fauteuil : je ne l’ai jamais entendu demander que l’on renonce à faire quoi que ce soit au motif que lui-même ne pouvait pas le faire. Je ne l’ai jamais entendu dire qu’il était offensé parce que nous marchions quand lui ne pouvait plus marcher.

Je crois donc qu’il faut en revenir au but premier, à savoir permettre de déterminer la manière dont un sénateur peut exprimer son vote, alors qu’il est physiquement empêché de le faire compte tenu de la modalité de vote retenue à ce moment.

C’est la raison pour laquelle je propose, par cet amendement, qu’un sénateur empêché vote de la façon qui semblerait la plus appropriée, sur invitation du président de séance, lequel peut aussi l’interroger simplement sur le sens de son vote. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.

M. Éric Kerrouche. Je suis accablé, madame la rapporteure, par votre position. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Olivier Paccaud. Cela faisait longtemps !

M. Éric Kerrouche. Je vous le dis très tranquillement, si vous ne vous rendez pas compte que la procédure que vous proposez de mettre en œuvre créera une nouvelle stigmatisation, c’est assez triste. (Mêmes mouvements.)

Et je veux dire à ceux de nos collègues que notre amendement fait manifestement réagir…

M. Loïc Hervé. Ils en ont le droit !

M. Éric Kerrouche. … que je ne comprends pas en quoi notre proposition poserait un problème ici, alors que l’Assemblée nationale a voté à l’unanimité peu ou prou le même amendement. Où est la difficulté ?

On nous propose encore une fois une solution qui ne met pas tout le monde au même niveau, ce qui n’est pas tolérable. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)

M. Antoine Lefèvre. Et à la tribune ?

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Madame la rapporteure, je suis moi aussi quelque peu consterné.

Nous fêtons les 25 ans de la loi de 2005.

M. Olivier Paccaud. Les 20 ans !

M. Guillaume Gontard. Oui, les 20 ans.

Relisez cette loi : elle vise à l’inclusion et à l’accessibilité pour tous et pour toutes et à éviter toute stigmatisation. Or Mme la rapporteure nous propose tout l’inverse, puisqu’il s’agit de trouver une solution en fonction du handicap de la personne. C’est de fait stigmatisant : une telle démarche est à l’opposé de tout le processus qui a été mis en place pour aborder l’inclusion de manière globale et la rendre universelle.

Nous connaissons les problèmes d’accessibilité de notre hémicycle pour ceux qui auraient certains problèmes de santé.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Non ! Il est accessible !

M. Guillaume Gontard. Cela dit, des travaux sont en cours pour y remédier.

Nous proposons là quelque chose de très simple à mettre en place, à l’instar de ce qui a été voté à l’Assemblée nationale. Je pense que le Sénat devrait aussi être capable de le faire.

Il me paraît relativement simple, quand il y a un doute, de faire voter les sénateurs de manière anonyme au moyen des petites tablettes qui sont installées sur nos pupitres. Voilà ce que nous proposons et qui me paraît résoudre totalement le problème.

En revanche, la solution de Mme la rapporteure ne me semble absolument pas acceptable en ce qu’elle va à rebours de toute notion d’inclusion.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.

M. Pierre Ouzoulias. Je m’exprime en tant que vice-président du Sénat.

Lorsque l’on préside la séance, la procédure de vote par assis et levé est très utile pour réveiller l’hémicycle. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.) C’est ce qui permet, quand plus personne ne lève la main, de rappeler aux collègues qu’il faut tout de même faire un geste pour manifester un vote.

Par ailleurs, on peut utiliser une formule simple – je l’ai fait en tant que président de séance –, à savoir : « Que ceux qui peuvent se lever se lèvent. » C’est la formule donnée par le speaker lors des matchs de rugby – j’en suis un spectateur régulier –, notamment pour les hymnes nationaux.

Ceux qui ne peuvent pas se lever pourraient exprimer leur opinion par les moyens qu’ils souhaitent, en particulier par l’intermédiaire de l’huissier, qui peut transmettre leur vote au président. Je ne vois pas en quoi la formule « Que ceux qui peuvent se lever se lèvent » pourrait poser problème et être stigmatisante. Au reste, je ne crois pas que le rugby soit un sport extrêmement stigmatisant.

M. Pierre Ouzoulias. On peut donc rester en l’état et maintenir le vote par assis et levé, chacun comprenant bien que les personnes qui ne peuvent pas se lever ne se lèvent pas. (Vifs applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Un sénateur du groupe Les Républicains. C’est du bon sens !

Mme la présidente. La parole est à M. Michaël Weber, pour explication de vote.

M. Michaël Weber. Je suis désolé, mais je ne crois pas que ce soit du bon sens ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Nous avons bien remarqué que, depuis le début de nos débats, Mme la rapporteure ne fait pas preuve d’une grande ouverture d’esprit quant aux amendements que nous avons déposés. (Exclamations sur les mêmes travées.)

C’est un fait incontestable !

M. Olivier Paccaud. Cessez de donner des leçons de morale, c’est insupportable !

M. Michaël Weber. Puisque vous m’interpellez directement et me parlez de morale, monsieur Paccaud, la moindre des choses serait de se tourner vers la personne qui a défendu l’amendement pour lui répondre, ce qui, je tiens à le préciser, n’est pas arrivé depuis le début de l’examen du texte.

M. Cédric Perrin. C’est stigmatisant…

M. Michaël Weber. J’en reviens au sujet de ces amendements.

Une unanimité s’est faite à l’Assemblée nationale pour supprimer le vote par assis et levé ; or je n’ai pas le sentiment que les députés et les sénateurs soient des êtres fondamentalement différents. Il me semble que l’on pourrait donner le même exemple aujourd’hui.

Franchement, madame la rapporteure, il me paraît un peu court que vous vous fondiez sur le cas d’une personne en situation de handicap que vous connaissez et qui ne se plaint pas de sa situation.

Pour ma part, je pense que la proposition que vous faites conduirait à une stigmatisation accrue. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Il faudra que la personne en situation de handicap fasse état de celui-ci pour pouvoir voter : ce n’est pas acceptable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote. (Marques dimpatience sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Marie-Pierre de La Gontrie garde un temps de silence, suscitant des exclamations sur les mêmes travées.)